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ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION DE LA PRODUCTION ET DES ÉCHANGES

COMPTE RENDU N° 22

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 16 décembre 1998
(Séance de 16 heures 30)

Présidence de M. André Lajoinie, Président

SOMMAIRE

 

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– Suite de l’examen du projet de loi d’orientation pour l’aménagement et le développement durable du territoire et portant modification de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d’orientation pour l’aménagement et le développement du territoire (n° 1071) 

 

(M. Philippe DURON, rapporteur).

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La commission a poursuivi l’examen, sur le rapport de M. Philippe Duron, du projet de loi d’orientation pour l’aménagement et le développement durable du territoire et portant modification de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d’orientation pour l’aménagement et le développement du territoire (n° 1071).

· Article 11 (article 12 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995) : Articulation de la carte des formations supérieures et de la recherche et du schéma de services collectifs de l’enseignement supérieur et de la recherche

La commission a rejeté deux amendements de M. Patrick Ollier, l’un visant à supprimer l’article 11, et l’autre proposant une nouvelle rédaction de l’article prévoyant des incitations en faveur des laboratoires privés choisissant une localisation conforme au schéma national d’aménagement et de développement du territoire.

Elle a ensuite adopté l’article 11 sans modification.

· Article 12 (article 16 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995) : Schéma de services collectifs culturels

Après avoir rejeté un amendement de suppression de cet article présenté par M. Patrick Ollier, la commission a examiné un amendement du même auteur visant à maintenir en vigueur l’article 16 de la loi du 4 février 1995. M. Patrick Ollier a souligné la nécessité de réaffirmer l’objectif de rééquilibrage des équipements culturels entre la région d’Ile-de-France et les autres régions. Le rapporteur a déclaré partager ce point de vue et fait observer que le projet de loi ne modifiait pas l’article 16 de la loi « Pasqua » sur ce point, maintenant ainsi l’objectif de rééquilibrage fixé en 1995. Il a également indiqué que le schéma de services collectifs culturels serait, tout comme les autres schémas, pris en compte dans les contrats de plan Etat-régions, la principale modification proposée étant d’étendre la portée du schéma prévu par la loi « Pasqua » limité aux seuls équipements culturels. M. Patrick Ollier a alors retiré son amendement.

Puis, la commission a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur ainsi qu’un amendement de M. Félix Leyzour visant à inclure le développement de la création parmi les objectifs de l’Etat dans le domaine culturel, après que le rapporteur eut proposé un sous-amendement rédactionnel. Elle a ensuite examiné un amendement du rapporteur visant à clarifier la rédaction de l’objectif d’accès aux biens, services et pratiques culturels, son auteur faisant observer qu’il convenait de lever l’ambiguïté liée à l’utilisation de l’adjectif « artistiques », applicable aux pratiques mais inadaptée pour les biens et services. M. Philippe Duron, rapporteur, a estimé que la suppression de cette référence n’était pas gênante dans la mesure où l’on peut considérer que les pratiques culturelles incluent les pratiques artistiques, ainsi que l’attestent plusieurs publications récentes du ministère compétent, comme l’atlas des activités culturelles et l’enquête sur les pratiques culturelles des Français. M. François Brottes a souligné que cette suppression était d’autant plus justifiée que la commission venait d’adopter l’amendement de M. Félix Leyzour introduisant le développement de la création dans le même alinéa de l’article. La commission a alors adopté l’amendement du rapporteur.

Elle a ensuite examiné un amendement de M. Jean Proriol visant à mentionner les établissements scolaires comme vecteur d’un accès plus démocratique aux oeuvres et pratiques culturelles. Le rapporteur a indiqué que cette insertion pouvait être interprétée comme étant restrictive, d’autres établissements contribuant tout autant à la réalisation de cet objectif, par exemple les conservatoires municipaux pour l’accès aux pratiques musicales. M. Félix Leyzour a déclaré partager l’avis du rapporteur, tout en soulignant que le rôle de l’école était essentiel et qu’il fallait intervenir sur les programmes d’enseignement. Après que M. Jean Proriol eut précisé que son amendement ne visait pas les programmes mais les activités artistiques ou culturelles proposées en milieu scolaire, la commission a rejeté cet amendement. M. Jean Proriol a retiré un amendement relatif au développement de la production culturelle, partiellement satisfait par l’amendement de M. Félix Leyzour précédemment adopté.

Puis, la commission a adopté quatre amendements présentés par le rapporteur :

– le premier visant à supprimer une redondance au quatrième alinéa du II de l’article 12 entre les efforts et les moyens publics ;

– le deuxième ayant pour objet de faciliter les transferts de fonds patrimoniaux prévus au cinquième alinéa du II en précisant que ces transferts se réaliseront sans aliénation des collections d’origine ;

– le troisième au sixième alinéa du II, étant de nature purement rédactionnelle ;

– le quatrième élargissant le champ de la politique d’intégration à la reconnaissance des pratiques culturelles alors que le septième alinéa du II ne visait que la reconnaissance des formes d’expression et des pratiques artistiques.

La commission a ensuite examiné un amendement présenté par le rapporteur proposant une nouvelle rédaction du huitième alinéa du II de l’article 12 relatif à la valorisation des cultures et langues régionales en vue d’élargir sa portée. Le rapporteur a souligné qu’il lui paraissait opportun de prendre en compte non seulement les langues régionales mais aussi, s’agissant des objectifs stratégiques de l’Etat, la promotion de la langue française et l’apprentissage des langues parlées par les populations vivant sur le territoire national, qu’elles soient françaises ou d’origine étrangère, l’approche multiculturelle des langues constituant elle aussi un facteur d’intégration. M. Jean-Claude Lenoir, appréciant cette initiative, a suggéré d’inclure dans le dispositif la diffusion de la langue française. M. Pierre Ducout a fait observer que la rédaction proposée ne mentionnait plus les cultures régionales car elle était axée sur les langues. M. Eric Doligé, tout en approuvant l’initiative du rapporteur, a émis des réserves sur la mention de l’apprentissage des langues parlées par les Français d’origine étrangère en mettant l’accent sur les difficultés de mise en oeuvre d’un dispositif aussi général dont les conséquences pour les « petites » communes seraient très lourdes. M. Patrick Ollier, après avoir jugé que la nouvelle rédaction proposée par le rapporteur améliorait sensiblement le texte du projet de loi, a cependant estimé que l’intégration passait avant tout par l’apprentissage de la langue du pays d’accueil, ce qui n’empêchait nullement de préserver les cultures des Français d’origine étrangère. Le rapporteur a rappelé qu’il s’agissait de définir les objectifs à long terme du schéma de services collectifs qui n’a pas pour fonction de prévoir de mesures d’application concrète, compte tenu de sa valeur indicative. Il a souligné que la politique d’intégration passait à la fois par l’acceptation de la culture du pays d’accueil et par la préservation de l’identité culturelle du pays d’origine. Il a précisé que son amendement visait en particulier les enfants de la deuxième ou troisième génération, qui bien souvent n’ont pas les moyens d’apprendre la langue maternelle ou paternelle.

Soulignant l’intérêt de l’amendement du rapporteur pour renforcer la politique d’intégration, M. Félix Leyzour a fait observer qu’un débat important avait lieu actuellement sur la signature par la France de la charte européenne des langues régionales et minoritaires qui pourrait poser un problème de constitutionnalité, le français étant la langue officielle de l’Hexagone. M. Paul Patriarche a indiqué que cette charte pourrait poser problème car certains de ses articles confèrent un caractère obligatoire à l’utilisation des langues régionales, par exemple dans l’enseignement scolaire, et s’est prononcé contre une telle contrainte. M. Félix Leyzour a souligné à son tour qu’il était opposé à ce que la charte rende l’enseignement des langues régionales obligatoire tout en mettant l’accent sur la nécessité de les valoriser. Prenant l’exemple de la musique celtique, il a fait observer que son développement reposait sur la sauvegarde du breton. M. Patrick Ollier, rappelant que la transmission des langues s’effectuait surtout dans le cadre familial, s’est interrogé sur le rôle de l’Etat en ce domaine. Il s’est déclaré favorable à la valorisation des cultures régionales ainsi qu’à la préservation de l’identité culturelle des Français d’origine étrangère, tout en considérant que celle-ci ne relevait pas de la politique d’intégration. Le président André Lajoinie a fait observer que l’amendement du rapporteur faisait la synthèse entre les différents intervenants et souligné qu’il s’agissait d’objectifs à long terme, comme il est d’usage dans une loi d’orientation. Après que le rapporteur eut proposé de rectifier son amendement pour tenir compte des observations des commissaires, la commission a adopté l’amendement ainsi rectifié.

Puis, elle a examiné un amendement de M. Patrick Ollier tendant à insérer dans l’article 12 un nouvel alinéa afin de mettre l’accent sur le développement des pratiques culturelles des jeunes. Le rapporteur ayant fait observer que les jeunes étaient à l’évidence concernés par l’accès de tous aux pratiques et services culturels, dont ils sont souvent les principaux usagers, et que l’amendement posait des problèmes rédactionnels, M. Patrick Ollier l’a retiré. Un amendement du même auteur tendant à insérer dans le texte le développement des productions culturelles a été rejeté au motif qu’il était partiellement satisfait par les décisions précédentes de la commission.

La commission a successivement rejeté un amendement de M. Yves Coussain supprimant le dernier alinéa de l’article 12 et un amendement de M. Patrick Ollier ayant pour objet de maintenir la référence expresse aux contrats de plan Etat-régions dans cet article.

Elle a adopté un amendement du rapporteur visant, dans un souci de lisibilité, à replacer dans l’article 12 les modalités de mise en oeuvre du schéma de services collectifs culturels inscrites à l’article 13 du projet de loi, sous réserve de deux modifications rédactionnelles.

Puis, la commission a adopté l’article 12 ainsi modifié.

· Article 13 (article 16-1 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995) : Modalités de mise en œuvre du schéma de services collectifs

Suivant la proposition du rapporteur, la commission a adopté un amendement de suppression de cet article afin que l’ensemble des dispositions du projet de loi relatives au schéma de services collectifs culturels figure dans le même article de la loi du 4 février 1995. Elle a par conséquent adopté l’amendement n° 105 de M. Yves Nicolin et un amendement de M. Patrick Ollier ayant le même objet mais fondés sur des motifs différents. Deux amendements, l’un de M. Jean Proriol rappelant le respect du principe de la libre administration des collectivités territoriales, l’autre de M. Eric Doligé faisant référence aux schémas départementaux culturels, ont donc été considérés comme sans objet.

· Article 14 (article 17 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995) : Schéma de services collectifs sanitaires

La commission a examiné en discussion commune un amendement de M. Patrick Rimbert prévoyant que dans le cadre du schéma de services collectifs sanitaires, ayant pour but d’assurer un égal accès en tout point du territoire à des soins de qualité il faudra « veiller notamment au maintien des établissements de proximité » et un amendement de M. Patrick Ollier mentionnant « le maintien des établissements de proximité dans les régions confrontées à des problèmes d’accès difficile ».

Le rapporteur a fait valoir que le maintien des établissements de proximité, qui était mentionné dans la loi du 4 février 1995, correspond effectivement à un souhait fort de la société et estimé que la rédaction de l’amendement de M. Patrick Rimbert, plus large, était préférable. M. Patrick Ollier a estimé que ce problème se posait fréquemment dans les zones de montagne et souligné la souplesse de la solution qu’il préconisait. La commission a ensuite adopté l’amendement de M. Patrick Rimbert, celui de M. Patrick Ollier devenant en conséquence sans objet.

La commission a ensuite adopté un amendement rédactionnel du rapporteur puis examiné trois amendements identiques de MM. Yves Coussain, Félix Leyzour et Patrick Ollier, visant à supprimer l’alinéa de l’article 14 qui prévoit que le schéma de services collectifs sanitaires « est établi dans le respect du principe d’équilibre financier de la sécurité sociale ». MM. Patrick Ollier, Félix Leyzour et Léonce Deprez ont fait valoir que cette disposition ne devait pas figurer logiquement dans un projet de loi consacré à l’aménagement du territoire.

Le rapporteur a exprimé sa compréhension à l’égard des arguments développés puis souligné que, conscient de la nécessité de maîtriser l’évolution des dépenses de santé, il avait présenté un amendement prévoyant que le schéma de services collectifs sanitaires « vise au respect du principe d’équilibre financier de la sécurité sociale ». Après de nouvelles interventions de MM. Patrick Ollier et Léonce Deprez, le rapporteur s’est rallié aux amendements de suppression et a retiré son amendement. Les amendements de MM. Yves Coussain, Félix Leyzour et Patrick Ollier, ont été adoptés.

Le rapporteur a ensuite présenté un amendement prévoyant que le schéma de services collectifs sanitaires « prend en compte » les dispositions des schémas régionaux d’organisation sanitaire (SROS), alors que le projet de loi dispose qu’il « est construit sur la base » de ces SROS. Le rapporteur a indiqué, en effet, que le schéma de services collectifs sanitaires ne doit pas s’inscrire dans un cadre fermé ni constituer une simple addition des SROS.

M. Jean-Claude Lenoir a estimé qu’une planification de l’offre sanitaire ne peut ignorer le contenu des schémas régionaux, cependant que MM. Jean-Claude Daniel et Félix Leyzour ont jugé que l’Etat doit pouvoir prévoir et programmer les réponses aux besoins existants sans être excessivement lié par ces schémas. M. Patrick Ollier a rappelé que la « Loi Pasqua » avait prévu la mise en place d’un schéma national d’organisation sanitaire, pour tenir compte en particulier de certains établissements non traités par la loi hospitalière, notamment les établissements climatiques. Il a fait remarquer également que le schéma national ne devait pas s’analyser comme une simple addition des schémas régionaux d’organisation sanitaire. MM. François Dosé et Jean Proriol ont insisté sur le fait que l’effort de planification sanitaire ne doit pas être enfermé dans le carcan des schémas régionaux d’organisation sanitaire et de l’action des agences régionales de l’hospitalisation.

La commission a ensuite adopté l’amendement du rapporteur, puis l’article 14 ainsi modifié.

· Article 15 (article 18 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995) : Schéma de services collectifs de l’information et de la communication

La commission a tout d’abord rejeté deux amendements de M. Patrick Ollier proposant, l’un, de supprimer l’article, l’autre de le réécrire afin de maintenir le schéma des télécommunications prévu par la loi du 4 février 1995. Elle a également rejeté l’amendement de M. Yves Coussain intitulant le schéma « schéma de développement des technologies de l’information et de la communication ».

M. Félix Leyzour a ensuite retiré son amendement prévoyant que le schéma fixe des objectifs de développement des services, le deuxième alinéa de l’article 18 se référant déjà à des objectifs. Il a également retiré son amendement demandant l’égalité d’accès de tous les citoyens à ces services, cette expression étant trop restrictive par rapport à la notion traditionnelle d’usagers. M. Jean Proriol a retiré son amendement ayant le même objet.

Après que M. Jean-Claude Lenoir eut fait valoir que l’objectif du schéma devrait être une couverture de 100 % du territoire par les services de radiocommunication, la commission a rejeté un amendement de M. Yves Coussain proposant que 85 % du territoire national soit desservi par des grands opérateurs de radiocommunications. Elle a également rejeté, au bénéfice des dispositions proposées par M. François Brottes, un amendement de M. Yves Coussain disposant que le schéma définit les conditions de promotion, par l’État, de services utilisant des réseaux interactifs.

M. François Brottes a présenté un amendement visant à ce que le schéma garantisse notamment :

– une distribution quotidienne, au moins six jours sur sept, du courrier de moins de 350 grammes dans des conditions tarifaires abordables et identiques sur l’ensemble du territoire ;

– une capacité à émettre ou à percevoir des mandats postaux, sans avoir à effectuer un déplacement de plus d’une heure, par le moyen de transport le plus accessible ;

– un accès de proximité aux cabines téléphoniques en fonction de critères d’implantation portant sur la densité de population et la notion de voisinage par rapport à toute zone habitée ;

– une couverture optimale du territoire pour l’utilisation du téléphone mobile cellulaire ;

– une réception correcte des chaînes de radio et de télévision publiques en tout point habité du territoire ;

– des possibilités de connexion à un réseau de télécommunications interactif à haut débit accessibles aux lieux de formation et d’éducation, aux entreprises, aux établissements publics et aux collectivités locales.

Il a fait valoir que les dispositions concernant le service postal et le service des mandats postaux avaient un caractère normatif car il convenait, d’une part, que la loi soit adaptée pour éviter un vide juridique né de l’absence de transposition de la directive européenne du 15 décembre 1997 dans la mesure où celle-ci est en retrait par rapport au contenu du service postal français puisqu’elle prévoit une distribution minimale seulement cinq jours sur sept et, d’autre part, d’affirmer l’importance sociale du service des mandats postaux. Par ailleurs, il a fait observer que le cahier des charges de France Télécom n’était pas suffisamment précis ou contraignant en matière de cabines publiques et de téléphonie mobile.

Le rapporteur a exprimé son accord avec l’amendement sous réserve de l’adoption de deux sous-amendements. Il a cependant fait observer que dès à présent les mandats postaux pouvaient être perçus en tout point du territoire grâce aux facteurs qui peuvent les délivrer et ils peuvent être émis de la même manière en confiant la somme d’argent au facteur qui, le lendemain, vient faire signer le mandat à la personne qui en a demandé l’émission.

La commission a adopté le premier sous-amendement du rapporteur qui prévoit que le schéma définisse les conditions pour assurer les services décrits et non les garantisse.

Le second sous-amendement du rapporteur propose de supprimer l’objectif de réception correcte des chaînes de radio et de télévision. Le rapporteur a fait valoir qu’il était matériellement impossible de définir les conditions d’une réception correcte rapide de ces chaînes en raison de la multitude des zones d’ombre existant sur le territoire français, y compris dans les zones habitées. De ce fait, le seul moyen de parvenir à une réception correcte rapide est d’inviter les Français mal desservis à s’équiper en paraboles pour recevoir les émissions satellitaires. En outre, la disposition établit une discrimination entre les chaînes publiques et les chaînes privées, ce qui apparaît peu conforme aux principes constitutionnels et rend la tâche de Télédiffusion de France impossible.

M. François Brottes a estimé que sa proposition n’était pas discriminatoire car il est justifié de garantir une réception correcte des chaînes accomplissant une mission de service public.

M. Eric Doligé a attiré l’attention sur la lourdeur des engagements représentés par cette disposition. Notamment, il s’est demandé si en cas de grève, la proposition de M. François Brottes n’impliquait pas la mise en place d’un service minimum. M. Patrick Ollier a proposé que la loi prévoit simplement la réception des chaînes sans exiger un caractère correct qu’il est difficile d’apprécier. En outre, il a fait observer que lorsqu’on le veut, TDF et les pouvoirs publics dégagent les moyens pour installer des émetteurs. M. Léonce Deprez s’est inquiété de la confusion faite entre ce qui doit relever de la loi et ce qu’il convient de laisser à la charge du Gouvernement. L’amendement de M. François Brottes permettrait d’intenter des recours des usagers contre toute mauvaise réception, ce qui conduira à des contentieux inextricables. M. Christian Estrosi, usant de la faculté offerte par le premier alinéa de l’article 38 du Règlement, a invité les commissaires à rejeter le sous-amendement afin que le Parlement fasse progresser la politique d’aménagement du territoire dans la mesure où les gouvernements n’assument pas leurs responsabilités. Il convient d’avoir les mêmes conditions de confort et de sécurité dans les zones d’habitation reculées que dans les villes. M. Patrick Rimbert s’est déclaré favorable à l’adoption du sous-amendement. M. Jean Proriol s’y est, en revanche, opposé. M. Paul Patriarche a attiré l’attention sur l’importance sociale de la télévision et du nombre de personnes qui vivent sans recevoir de manière correcte certaines chaînes de télévision. M. Patrick Ollier a fait observer que l’accès le plus important aux services publics était, pour de nombreuses personnes, l’accès à la télévision.

Après avoir fait remarquer que son amendement ne limitait en rien le droit de grève, M. François Brottes a accepté la suppression de la disposition dans l’attente d’une nouvelle proposition de sa part. Puis, la commission a adopté le sous-amendement du rapporteur et l’amendement de M. François Brottes ainsi modifié.

La commission a ensuite adopté deux amendements de M. François Brottes tendant à englober le secteur postal dans le troisième alinéa du II de l’article, dans la mesure où La Poste participe à l’offre de base en matière d’information et de communication. Puis, elle a adopté un amendement de conséquence de M. François Brottes supprimant le quatrième alinéa du II, rendant ainsi sans objet un amendement rédactionnel du rapporteur.

Enfin, la commission a rejeté un amendement de M. Patrick Ollier relatif à la couverture du territoire par des réseaux interactifs à haut débit, et adopté l’article 15 ainsi modifié.

· Article 16 (article 19 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995) : Schémas de services collectifs de transport

La commission a tout d’abord rejeté un amendement de M. Patrick Ollier de suppression de cet article. Elle a également rejeté, sur proposition du rapporteur, un amendement de M. Jean Proriol tendant à renvoyer à l’ensemble de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d’orientation des transports intérieurs les modalités d’établissement des schémas de transport.

Elle a ensuite examiné deux amendements identiques, l’un de M. Yves Coussain, l’autre de M. Jean Proriol tendant au maintien du premier alinéa de l’article 17 de la loi du 4 février 1995. Un débat s’est engagé sur ces amendements. M. Jean Proriol a considéré qu’il était indispensable de fixer de façon précise les perspectives à long terme d’une desserte équilibrée et équitable du territoire, faute de quoi le schéma resterait trop flou. M. Patrick Ollier a déclaré qu’il fallait conserver des objectifs ambitieux en matière de désenclavement du territoire, notamment des zones de montagne.

M. Christian Estrosi a mis en parallèle le renoncement à l’objectif fixé par la LOADT de l’existence de liaisons de transport rapides accessibles de toutes les parties du territoire avec les annulations par le Gouvernement de plusieurs importants projets d’infrastructures, telle la construction du canal Rhin-Rhône, de l’autoroute A51 ou de nouvelles liaisons transalpines.

M. Eric Doligé a relevé qu’il était contradictoire d’accepter de préciser les objectifs des schémas de services collectifs dans certains cas et de les refuser dans d’autres. Il s’est prononcé en faveur d’une politique plus ambitieuse pour la France. Le rapporteur a indiqué en réponse qu’il était évidemment impossible de réaliser en vingt ans, échéance des schémas, l’ensemble des infrastructures qui seraient nécessaires pour remplir les conditions définies par la LOADT en matière de transports rapides.

M. Jean-Jacques Filleul a soutenu la position du rapporteur. Il a estimé qu’une référence aux objectifs de désenclavement trouverait plus sa place à l’article 32 du projet de loi.

M. Félix Leyzour a rappelé qu’en matière de transport le projet de loi tendait à développer l’intermodalité et à rééquilibrer les parts respectives du ferroviaire et de la route. Il a par ailleurs indiqué qu’il restait beaucoup à faire dans ce domaine, ce qui nécessitait à la fois d’optimiser le réseau existant et de prévoir des infrastructures nouvelles.

M. Patrick Rimbert a contesté le sérieux du discours de l’opposition, qui veut à la fois remplir des objectifs de construction d’infrastructures de transport particulièrement difficiles à réaliser en seulement vingt ans, et revendique une utilisation des fruits de la croissance pour réduire le désendettement de l’Etat. Il a rappelé à ce propos que le niveau actuel de l’encours de la dette, tant de Réseau ferré de France que des sociétés concessionnaires d’autoroutes, s’établissait à environ 200 milliards de francs.

M. Jean-Michel Marchand a fait observer que des évolutions étaient intervenues dans la définition des priorités d’aménagement. Toutefois, la construction d’infrastructures nouvelles n’est pas exclue. En outre le projet de loi devrait permettre aux acteurs locaux de mieux contribuer au développement des politiques de transport.

En réponse aux intervenants, le rapporteur a indiqué que l’originalité de ce projet de loi était de prendre en compte la dimension durable du développement, ce qui expliquait la remise en cause de certains projets. Il a par ailleurs fait observer que la notion, contenue dans les amendements, d’un temps de trajet en voiture n’était guère précise et ne tenait pas compte des conditions de circulation. De même, depuis plusieurs années, la tendance est à préférer le développement des trains pendulaires à la construction de lignes nouvelles à grande vitesse, autrement plus coûteuses. Il convient donc de trouver un équilibre entre le développement des infrastructures et les capacités financières et budgétaires de la collectivité. La commission a ensuite rejeté ces deux amendements.

Puis la commission a rejeté, suivant l’avis du rapporteur :

– un amendement de M. Patrick Ollier réintroduisant un schéma des ports maritimes ;

– un amendement de M. Yves Coussain prévoyant à l’horizon 2015 l’obligation d’une desserte de proximité de toutes les aires urbaines par une grande liaison d’aménagement du territoire ;

– trois amendements de M. Patrick Ollier, réintroduisant, le premier, un schéma du réseau ferroviaire, le deuxième, un schéma directeur des voies navigables, et le troisième un schéma directeur routier national ;

– un amendement de M. Claude Hoarau visant à atteindre un même niveau de dotation, par habitant, du fonds d’investissement routier et de transport, en métropole et dans les départements d’outre-mer, le rapporteur ayant fait observer que cet amendement posait des problèmes de recevabilité financière.

La commission a ensuite adopté l’article 16 sans modification.

· Article 17 (article 20 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995) : Schéma de services collectifs de l’énergie

Après avoir rejeté un amendement de suppression de cet article présenté par M. Patrick Ollier, la commission a adopté un amendement du rapporteur corrigeant une erreur matérielle du texte. Elle a ensuite examiné en discussion commune un amendement de M. Félix Leyzour précisant que les objectifs d’exploitation des ressources locales concourent à l’indépendance énergétique nationale, à la sécurité d’approvisionnement et à la lutte contre l’effet de serre et un amendement du rapporteur. Le rapporteur a dans un premier temps fait remarquer que sa rédaction était plus globale et se rapprochait plus de la définition de la politique énergétique donnée à l’article premier du projet de loi relatif à la modernisation et au développement du secteur public de l’électricité. MM. Jean-Claude Daniel et Jean-Michel Marchand ont indiqué que l’effet de serre n’était pas le seul risque environnemental lié à l’énergie et qu’en conséquence la rédaction proposée par le rapporteur leur paraissait meilleure. MM. Christian Bataille, Patrick Ollier et Léonce Deprez sont intervenus pour marquer leur accord avec l’amendement proposé par M. Félix Leyzour, M. Patrick Ollier retirant en conséquence un amendement voisin qu’il avait déposé. Le rapporteur ayant décidé à son tour de retirer son amendement, la commission a adopté l’amendement de M. Félix Leyzour.

Puis la commission a adopté trois amendements du rapporteur :

– le premier visant à préciser que le schéma de services collectifs de l’énergie définit les objectifs d’exploitation des ressources locales d’énergie renouvelable et d’utilisation rationnelle de l’énergie ;

– le deuxième supprimant la référence à la programmation énergétique territoriale, la politique nationale de l’énergie ne pouvant être une superposition de politiques régionales ;

– le dernier précisant que les besoins en stockage visés dans les schémas de services collectifs de l’énergie ne portent que sur le gaz naturel.

Après avoir rejeté un amendement de M. Jean Proriol, la commission a adopté un amendement du rapporteur indiquant les conditions dans lesquelles l’Etat et les collectivités territoriales peuvent mener des actions de maîtrise de l’énergie. Elle a ensuite adopté un amendement de conséquence du rapporteur.

Puis elle a rejeté un amendement de M. Patrick Ollier et deux amendements de M. Jean Proriol apportant des précisions jugées non nécessaires sur les conditions de fonctionnement de la conférence régionale de l’aménagement et du développement du territoire.

Après que M. Félix Leyzour eut retiré un amendement, elle a adopté un amendement du rapporteur rectifié par son auteur supprimant la référence à la notion de politiques énergétiques.

La commission a adopté l’article17 ainsi modifié.

· Article 18 (article 21 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995) : Schéma de services collectifs des espaces naturels et ruraux

La commission a examiné un amendement de suppression de cet article présenté par M. Patrick Ollier. Soulignant que cette fois il ne proposait pas de retour à la loi « Pasqua », M. Patrick Ollier s’est interrogé sur la pertinence d’un schéma de services collectifs des espaces naturels et ruraux qui, contrairement aux transports ou à la santé, ne rendent pas, en tant que tels, de services au public. Le rapporteur a estimé au contraire que ces espaces, par leurs fonctions économique, environnementale et sociale, rendaient de multiples services à la collectivité en tant que support foncier des activités agricoles, comme espaces de loisirs et de tourisme, en termes de préservation des ressources ou encore comme facteur de prévention des risques naturels. Insistant sur la nécessité de préserver les espaces naturels afin de les soustraire à un urbanisme sauvage, notamment dans les zones littorales, M. Félix Leyzour a souligné l’intérêt des conventions conclues entre les collectivités locales et les propriétaires privés afin d’ouvrir ces espaces au public. M. Jean-Michel Marchand a mis l’accent sur l’utilité sociale de ces espaces pour les habitants des zones urbaines. M. Patrick Ollier a indiqué qu’il souhaitait la préservation et la mise en valeur des espaces naturels, qu’il était même favorable à la création d’un réseau national des espaces protégés, mais contestait leur caractère de « services collectifs ». Après les interventions de MM. Pierre Ducout et Jean-Claude Daniel relevant l’importance des services rendus sur les territoires naturels et ruraux, la commission a rejeté l’amendement de suppression. Elle a également rejeté l’amendement n° 25 de M. Michel Bouvard, un amendement de M. François Sauvadet et un amendement de M. Jean Proriol ayant pour objet de restreindre le schéma aux seuls espaces naturels protégés.

Après avoir adopté un amendement du rapporteur rectifiant une erreur matérielle dans le I de l’article 18, la commission a adopté un amendement également proposé par le rapporteur en vue de préciser dès le début du nouvel article 21 de la loi du 4 février 1995 les principes de multifonctionnalité des espaces naturels et ruraux et de mise en valeur durable de ces espaces qui n’étaient mentionnés qu’au quatrième alinéa du II de l’article. En conséquence, elle a rejeté un amendement de M. Pierre Micaux relatif à la concertation avec les instances élues locales.

Puis, la commission a adopté un amendement du rapporteur insérant dans le même alinéa le principe d’une gestion équilibrée de ces espaces et assurant l’articulation entre le schéma de services collectifs et les contrats territoriaux d’exploitation prévus par la loi d’orientation agricole. Elle a rejeté un amendement de M. Patrick Ollier au motif qu’il était satisfait par l’adoption des amendements présentés par le rapporteur. La commission a ensuite adopté un amendement supprimant, dans la deuxième phrase du deuxième alinéa du II de l’article 18, la prévention de certains risques naturels, après que le rapporteur eut expliqué qu’il proposait une rédaction plus complète sur la mise en oeuvre de cette politique et souhaitait, en outre, l’étendre à l’ensemble des risques naturels. En conséquence, les amendements de M. Patrick Ollier et de M. Félix Leyzour procédant à la même extension sont devenus sans objet. La commission a alors adopté l’amendement du rapporteur visant à préciser que le schéma de services collectifs détermine les conditions de mise en oeuvre des actions de prévention des risques naturels afin d’assurer leur application homogène et adaptée sur l’ensemble du territoire national. MM. Jean-Claude Daniel et Eric Doligé s’étant interrogés sur la contribution des espaces naturels à la prévention des changements climatiques, le rapporteur a indiqué que le texte visait notamment la politique de boisement mise en oeuvre dans le cadre du plan national de lutte contre l’effet de serre.

La commission a ensuite examiné un amendement de M. Patrick Rimbert visant à supprimer dans le troisième alinéa du II de l’article 18 l’identification des territoires selon les fonctions auxquelles ils devraient être principalement affectés. M. Patrick Rimbert a indiqué que la rédaction du projet de loi risquait de figer la situation et d’empêcher toute évolution future des territoires. Le rapporteur a mis l’accent sur l’utilité d’une typologie, partant de l’existant et intégrant la multifonctionnalité des espaces naturels et ruraux. Il a proposé de modifier la rédaction en faisant référence à la vocation principale des territoires. M. Patrick Ollier a estimé que la rédaction suggérée par le rapporteur serait en tout cas préférable à celle du projet de loi qui tend à figer l’usage des territoires pour vingt ans et reflète une volonté sous-jacente de zonage. M. Jean-Claude Daniel a jugé plus opportun de se référer à la destination principale des territoires. Après les interventions de MM. François Brottes, Serge Poignant, Félix Leyzour, Léonce Deprez, Patrick Ollier et celle du rapporteur se ralliant à la position exprimée par M. Patrick Rimbert, la commission a adopté cet amendement.

Puis, elle a examiné un amendement visant à substituer à l’identification des degrés de protection des territoires la définition de mesures de gestion, le rapporteur précisant qu’il fallait concilier les activités humaines et la protection de l’environnement. M. Jean-Michel Marchand a estimé préférable de mentionner à la fois les deux éléments, certains espaces naturels devant bénéficier de dispositifs de protection contraignants. Le rapporteur a indiqué que son amendement ne l’excluait aucunement, tout espace bénéficiant de mesures de protection faisant simultanément l’objet d’une gestion. Après l’intervention de M. Félix Leyzour approuvant la position du rapporteur, la commission a adopté l’amendement.

Elle a ensuite adopté l’amendement n° 70 cor. de M. Léonce Deprez et un amendement identique du rapporteur supprimant le quatrième alinéa du II de l’article 18, dont les dispositions ont été replacées en début d’article, M. Léonce Deprez ayant indiqué que les principes définis à cet alinéa devaient plutôt relever du schéma régional d’aménagement et de développement du territoire. En conséquence, la commission a considéré comme sans objet un amendement de M. Patrick Ollier visant à mentionner dans cet alinéa le développement des territoires.

Puis, elle a rejeté l’amendement n° 71 cor. de M. Léonce Deprez supprimant le cinquième alinéa du II de l’article 18, son auteur soulignant que les opérations de reconquête des territoires dégradés devaient relever des schémas régionaux d’aménagement et de développement du territoire. Après les explications du rapporteur, indiquant que le schéma de services collectifs devait en fixer les objectifs à long terme et que ces opérations pourront bénéficier d’un financement de l’Etat, M. Léonce Deprez a indiqué qu’il allait retirer cet amendement. Après l’intervention de M. Patrick Ollier proposant un sous-amendement rédactionnel, la commission a adopté un amendement du rapporteur afin de rendre plus dynamiques les orientations du schéma en précisant qu’il ne suffit pas d’identifier les territoires les plus dégradés mais qu’il fallait aussi définir des actions en vue de leur reconquête, à l’instar du rétablissement du caractère maritime de la baie du Mont-Saint-Michel ou de la reconquête écologique de l’étang de Berre. Elle a en conséquence rejeté un amendement de M. Jean Proriol tendant à substituer le terme de restauration à celui de reconquête.

Après avoir rejeté l’amendement n° 72 cor. de M. Léonce Deprez supprimant l’avant-dernier alinéa du II de l’article 18 relatif à la mise en place d’indicateurs du développement durable, la commission a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur.

Puis, elle a examiné un amendement de M. Serge Poignant précisant que le schéma de services collectifs devait être élaboré en concertation avec tous les acteurs locaux des territoires concernés. M. Serge Poignant a souligné la nécessité d’une large concertation sur ce schéma dont la mise en place du réseau Natura 2000 sera une composante essentielle. M. Jean-Claude Daniel a déclaré comprendre l’argumentation de M. Serge Poignant mais jugé que cet amendement n’avait pas sa place dans l’article définissant les objectifs stratégiques de l’Etat à long terme. Le rapporteur a indiqué que les procédures de concertation liées à la mise en place du réseau Natura 2000 restaient valables et rappelé la création de comités départementaux de suivi en vue d’associer l’ensemble des partenaires intéressés à l’élaboration des documents d’objectifs, puis à la définition de mesures de gestion, assorties d’éventuelles compensations financières. La commission a rejeté l’amendement de M. Serge Poignant.

Après avoir rejeté l’amendement n° 73 cor. de M. Léonce Deprez visant à supprimer le dernier alinéa de l’article 18, puis adopté un amendement rédactionnel du rapporteur à cet alinéa, elle a examiné un amendement de M. Patrick Ollier visant à préciser que l’évaluation des perspectives de conservation et de mise en valeur du patrimoine naturel devait s’accompagner d’une évaluation de leur coût et de leurs effets économiques. Le rapporteur ayant émis des réserves sur la possibilité d’évaluer les effets économiques à long terme et souligné qu’il fallait aussi intégrer les avantages induits des mesures de gestion, M. Patrick Ollier a retiré son amendement.

Puis la commission a adopté l’article 18 ainsi modifié.

· Article 19 (article 22 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995) : Reconnaissance des pays et chartes de pays

La commission a tout d’abord examiné deux amendements de suppression de cet article de MM. Patrick Ollier et Yves Coussain ; à cette occasion, un débat général sur l’article s’est engagé.

M. Patrick Ollier a estimé que le projet de loi abandonnait une notion fondamentale, celle de constatation du pays, notion pourtant synonyme de liberté pour les communes participant au pays et d’engagement volontaire de celles-ci. Il s’est élevé contre la disparition de cette notion qui fondait les articles sur les pays de la loi du 4 février 1995 et qui avait pour effet de ne donner au préfet que le seul pouvoir de publier la liste des communes faisant partie du pays. Il a regretté que, désormais, l’administration, en la personne du préfet de région, soit appelée à délimiter le périmètre pertinent du pays. Il a souhaité qu’une rédaction plus souple et consensuelle de cet article puisse être trouvée en ce qui concerne la reconnaissance des pays.

M. Philippe Duron, rapporteur, a estimé que cet article était un des articles essentiels du projet de loi puisque ce sont les pays et les agglomérations qui vont structurer notre territoire. Il a indiqué qu’il ne s’agissait pas de revenir sur la notion de pays dont la création a été définie par la loi du 4 février 1995, mais qu’il s’agit de tirer les leçons de l’expérience fournie par la constatation de 81 pays ainsi que par l’ « opération de préfiguration » instituée par la DATAR sur 41 pays-tests.

Reconnaissant que certaines craintes ne sont pas totalement infondées, il a observé qu’il proposerait un amendement visant à garantir la liberté des élus tout en évitant la constitution, regrettable, de pays de circonstance. Il a précisé que la liberté du préfet de région pour déterminer le périmètre du pays n’était pas totale puisqu’il devait s’entourer de l’avis de la conférence régionale de l’aménagement et du développement du territoire, qui comprend des représentants de toutes les collectivités territoriales, mais il a souhaité qu’une consultation de la commission interdépartementale de la coopération intercommunale soit également instituée.

Il a estimé opportun que le périmètre du pays ainsi délimité par le préfet de région ne soit pas définitif car celui-ci ne doit pas être conçu a priori mais il doit être la conséquence de la volonté des acteurs exprimée dans une charte approuvée par l’ensemble des conseils municipaux. Il a relevé qu’une fois la charte adoptée, le périmètre d’étude préalablement constitué pouvait alors être validé en périmètre définitif. Il a souligné que les deux étapes de cette procédure permettraient de mettre en valeur l’importance de la notion de projet qui doit être à la base de la constitution du pays.

Évoquant le problème de la superposition des territoires, parcs naturels et pays, pays et agglomérations, il a observé qu’une grande souplesse pouvait être admise à condition qu’elle se fasse dans le respect de certaines structures et il a évoqué la possibilité de conventionnement entre ces différents territoires.

M. Léonce Deprez a relevé que la notion de pays était une notion fondamentale de la loi du 4 février 1995 comme du projet de loi actuel mais qu’il convenait d’aller encore plus loin car le pays constitue vraiment la structure d’avenir de l’aménagement du territoire. Il a observé qu’il fallait approfondir les notions de projet de territoire et de maîtres d’ouvrage responsable du projet.

M. Serge Poignant a pris acte des observations du rapporteur et a déclaré en partager les objectifs.

M. Félix Leyzour a considéré que les pays allaient jouer un rôle important dans l’aménagement du territoire car ce sont des territoires pertinents mais qu’il ne fallait pas surestimer leur rôle. Évoquant son appartenance à un pays interdépartemental, il a souligné la réalité que constitue les pays mais aussi la manière fort nuancée dont ils sont vécus suivant leur implantation géographique sur le territoire. Faisant remarquer qu’ils pouvaient correspondre soit à des bassins de vie, soit à des bassins d’emploi et qu’ils étaient donc une réalité aux contours imprécis mais qui avait l’avantage de mettre en relation les acteurs d’un territoire, il a souhaité que l’on fasse preuve de pragmatisme pour l’élaboration du projet et de la charte et il a craint que l’obligation de constituer un syndicat mixte pour pouvoir contractualiser avec l’État et la région ne soit une source de conflit avec les collectivités appartenant à des groupements et avec les départements.

M. Patrick Ollier a observé que ce serait une erreur de s’enfermer dans un texte trop rigoureux et précis et il a trouvé intéressante l’idée d’une consultation de la commission interdépartementale de la coopération intercommunale car cet organisme est plus proche de la réalité de terrain que la conférence régionale de l’aménagement et du développement du territoire. Il a souhaité que le préfet de région n’ait pas le pouvoir d’arrêter, donc de décider la délimitation du périmètre, mais qu’il ait seulement pour fonction de publier la liste des communes membres du pays, comme c’est le cas à l’heure actuelle.

Il a estimé intéressante l’idée selon laquelle l’élaboration de la charte ne serait pas liée à la délimitation définitive du périmètre et il a souhaité que soit bien précisé le fait que le pays ne constitue en aucun cas une nouvelle structure territoriale. Il a approuvé l’idée d’obliger à la constitution d’un syndicat mixte pour permettre la contractualisation mais il a évoqué les craintes de ceux qui estiment que c’est donner trop de pouvoirs à une nouvelle structure.

M. Jean-Michel Marchand a considéré que la notion de pays constituait la pierre angulaire du projet et qu’il s’agissait d’un territoire en évolution.

Il a souligné la responsabilité qui sera celle des acteurs de terrain puisque le préfet de région n’en détermine le périmètre qu’après avis conforme de la conférence régionale de l’aménagement et du développement du territoire.

Il a estimé intéressante l’idée selon laquelle le périmètre ne serait pas définitif avant l’élaboration d’un véritable projet de pays. Il a indiqué qu’il y aurait un équilibrage à trouver pour déterminer la place de l’agglomération au sein des pays et qu’il faudrait réfléchir aux structures nécessaires à la contractualisation.

Il a estimé indispensable qu’il n’y ait pas de « trous blancs », c’est à dire de territoires n’appartenant ni à un pays, ni à une agglomération, et il a évoqué, à cet égard, la nécessité pour l’autorité administrative de veiller à ce problème par une concertation accrue. Il a conclu sur la nécessité d’une certaine souplesse.

M. Léonce Deprez a insisté sur le fait qu’il fallait s’appuyer sur les groupements intercommunaux à vocation multiple déjà existants tels que les communautés de communes, les SIVOM ou les districts et qu’il fallait donc en faire les maîtres d’ouvrage des projets de développement du pays. Citant l’exemple de la région Nord Pas-de-Calais et de ses groupements intercommunaux il a fait valoir que le pays ne devrait pas constituer une nouvelle structure mais qu’il devait fédérer l’ensemble des groupements intercommunaux qui décident de s’associer pour former un pays. Il a observé que le périmètre du pays devait donc relever d’un choix de ces structures intercommunales, que celles-ci devaient être les maîtres d’ouvrage des projets sauf si elles n’en ont pas la capacité, auquel cas elles pourraient passer entre elles des conventions.

M. Pierre Cohen a relevé qu’il était important de bien spécifier que le pays n’était pas une structure supplémentaire mais qu’il fallait prendre garde à ne pas remettre en cause la dynamique d’intercommunalité lancée à partir de 1992.

Il a considéré que le pays devait être une association de structures intercommunales dans le cadre d’un projet de développement mais ne devrait être en aucun cas le refuge de communes qui s’associent pour éviter l’intercommunalité. Il a estimé qu’il serait souhaitable de savoir quelle serait la position adoptée à l’article 20 relatif aux agglomérations avant de se prononcer sur cet article. Il a observé qu’à son avis le territoire devait être structuré en pays et en aires urbaines organisées, mais qu’il ne devrait y avoir ni vide entre ces structures, ni superposition de celles-ci.

M. Serge Poignant a observé qu’il ne fallait pas confondre intercommunalité et pays, car il existe encore des communes qui ne sont pas des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI).

Il a souligné qu’il fallait prendre en compte la diversité de notre territoire national et qu’il fallait avoir une attitude souple si l’on voulait couvrir l’ensemble du territoire par des pays, et donc qu’il ne fallait pas que le pays soit une fédération d’EPCI.

M. Joseph Parrenin a exprimé son accord avec ce dernier point de vue et il a estimé qu’il fallait trouver pour le pays un cadre applicable à l’ensemble de la France. Citant l’exemple des SIVOM, il a noté cependant qu’en l’absence de fiscalité propre, les projets intercommunaux ne peuvent se mettre en place. Il a souhaité que le texte soit élaboré dans un esprit de souplesse.

M. Félix Leyzour a rappelé les propos de Madame Dominique Voynet, ministre de l’environnement et de l’aménagement du territoire, selon lesquels le pays ne deviendrait pas un maître d’ouvrage et il a considéré que si un accord se réalisait sur ce point, il serait possible de trouver une solution au problème posé.

M. Jean-Claude Daniel a souligné que les craintes exprimées sont légitimes mais qu’elles ne sauraient éviter les dangers. Il a souhaité que l’on réfléchisse à l’organisation du territoire à partir des données existantes, l’Etat, les régions, les départements, les communes et les diverses structures intercommunales auxquelles le projet de loi de M. Jean-Pierre Chevènement doit ajouter les communautés d’agglomérations. Il a observé qu’à partir de ces données, il s’agissait de mettre en place des structures de projet. Il a donc considéré que si le territoire local comportait plusieurs EPCI, il ne fallait pas constituer un EPCI d’EPCI, mais faire un seul EPCI ou à défaut constituer une structure très souple basée sur une charte ou éventuellement sur une structure un peu plus structurée comme un syndicat mixte, si les acteurs du pays en décidaient ainsi. Prenant l’exemple du pays de Quimper qui comprend un territoire rural et une grosse agglomération, il a estimé que celle-ci devait pouvoir contractualiser au titre de l’agglomération mais que le pays de Quimper pouvait également être une réalité au sein d’une organisation plus souple.

M. Philippe Duron, rapporteur, a identifié quatre thèmes nouveaux et importants concernant les pays : celui de leur périmètre, celui de la superposition de plusieurs structures, celui de leur gestion et celui de la contractualisation.

S’agissant du périmètre des pays, il a observé qu’il était nécessaire de faire une synthèse de deux éléments, d’une part, la nécessité d’organiser le territoire à partir de la région, ce qui conduit à privilégier l’avis de la conférence régionale de l’aménagement et du développement du territoire (CRADT), car elle peut avoir une vision d’ensemble du territoire, et la nécessité d’une vision plus proche du terrain, ce qui le conduit à proposer la consultation de la commission départementale de la coopération intercommunale (CDCI), car elle peut disposer de meilleurs éléments d’appréciation.

Il a considéré qu’il fallait lier les deux éléments que sont la distance et la proximité pour avoir une vue d’ensemble pertinente pour la création d’un pays. Citant l’exemple du pays d’Auge qui s’est constitué à l’intérieur de frontières départementales alors qu’il aurait dû naturellement les transgresser, il a estimé que la CRADT constituait l’échelon pertinent d’appréciation pour la création de pays.

Il a donc souhaité que la décision du préfet de région soit prise après avis conforme de la CRADT et avis simple de la CDCI. Il a observé que cette décision des préfets de délimiter le périmètre ne faisait pas d’eux les décideurs, que cette décision revenait aux communes et aux groupements de communes mais que l’intervention des préfets avait pour objet de s’assurer que la décision prise était raisonnable et cohérente et éventuellement d’ouvrir une discussion pour parvenir à une meilleure solution.

S’agissant du problème de la superposition des périmètres, qui est assurément le plus difficile, il a observé qu’il ne fallait pas démembrer les parcs naturels régionaux (PNR) mais qu’en même temps, il y avait une aspiration légitime des PNR à être associés à un projet de pays. Il a estimé qu’il serait bon de procéder par voie de convention, de manière à ne pas remettre en cause les PNR qui fonctionnent, pour certains, depuis plus de trente ans, et qu’une modification éventuelle de périmètre ne devait intervenir qu’au moment de la renégociation de la charte (c’est-à-dire tous les dix ans).

En ce qui concerne la superposition des pays et des agglomérations, il s’est déclaré en faveur de celle-ci car il existe autour des agglomérations des territoires dont la vocation est incertaine. Il s’est donc montré partisan d’ouvrir à ceux-ci la possibilité d’une contractualisation avec l’agglomération sur certains sujets bien identifiés (transports en commun, assainissement, ordures ménagères...).

S’agissant de la gestion du pays, il a fait part de son souci d’éviter la création d’une strate territoriale supplémentaire et souligné la nécessité de garder une certaine souplesse au système. Il a relevé que la structure de syndicat mixte fermé n’était pas pertinente car elle induisait un transfert de compétences et il a considéré que la formule du syndicat mixte ouvert était intéressante, car elle est très souple, tout en préservant la sécurité de l’Etat et des élus dans la contractualisation, à la différence de la simple association. Il s’est déclaré ouvert également à la possibilité d’une constitution d’un groupement d’intérêt public (GIP).

Il a observé que dans les pays qui sont entièrement couverts par des EPCI à fiscalité propre, il ne devrait pas y avoir de problème, chacun d’entre eux pouvant être cosignataire du contrat, mais que dans les territoires où coexiste encore un grand nombre de communes, la solution du syndicat mixte ouvert paraît pertinente, car il faut que les élus puissent se retrouver dans une structure qui leur soit propre et pas seulement au sein du conseil de développement qui sera créé.

A l’issue de ce débat, la commission a rejeté les deux amendements de suppression de l’article de MM. Patrick Ollier et Yves Coussain.

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