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ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION DE LA PRODUCTION ET DES ÉCHANGES

COMPTE RENDU N°59

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 2 juin 1999
(Séance de 9 heures 45)

Présidence de M. André Lajoinie, Président

SOMMAIRE

 

pages

– Examen du projet de loi portant ratification des ordonnances n° 98-520 du 24 juin 1998, n° 98-521 du 24 juin 1998, n° 98-523 du 24 juin 1998, n° 98-526 du 24 juin 1998, n° 98-776 du 2 septembre 1998, n° 98-777 du 2 septembre 1998 prises en application de la loi n° 98-145 du 6 mars 1998 portant habilitation du Gouvernement à prendre, par ordonnances, les mesures législatives nécessaires à l’actualisation et à l’adaptation du droit applicable outre-mer (n° 1176 rectifié) -

 

(M. Maxime BONO, rapporteur)

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– Examen du rapport d’information présenté par M. Jean-Pierre BLAZY en conclusion des travaux d’une mission d’information sur la politique aéroportuaire


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– Information relative à la commission

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La commission a examiné, sur le rapport de M. Maxime Bono, le projet de loi portant ratification des ordonnances n° 98-520 du 24 juin 1998, n° 98-521 du 24 juin 1998, n° 98-523 du 24 juin 1998, n° 98-526 du 24 juin 1998, n° 98-776 du 2 septembre 1998, n° 98-777 du 2 septembre 1998 prises en application de la loi n° 98-145 du 6 mars 1998 portant habilitation du Gouvernement à prendre, par ordonnances, les mesures législatives nécessaires à l’actualisation et à l’adaptation du droit applicable outre-mer (n° 1176 rectifié).

M. Maxime Bono, rapporteur, a tout d’abord rappelé que cette procédure inhabituelle mais non exceptionnelle, justifiée par les spécificités du droit applicable outre-mer, avait permis de rattraper rapidement le retard pris en ce domaine. Il s’est félicité que conformément au souci exprimé par les deux assemblées lors de l’examen de la loi d’habilitation, cette procédure n’ait pas conduit au dessaisissement du Parlement puisque, respectant ses engagements, le Gouvernement lui demandait aujourd’hui de ratifier ces ordonnances.

Il a précisé que cette ratification n’est pas nécessaire à la validité de ces ordonnances, le simple dépôt du projet de loi de ratification la garantissant et que d’ailleurs, de 1960 à 1990, seules 30 des 158 ordonnances prises en application de l’article 38 de la Constitution avaient été expressément ratifiées. Il a toutefois rappelé que la ratification donnait aux ordonnances, qui conserveraient sans elle valeur d’acte administratif, force de loi et que la volonté du Gouvernement d’associer le Parlement répondait donc également au souci pragmatique de mieux garantir la stabilité juridique de ces ordonnances qui s’appliquent déjà outre-mer.

Le rapporteur a ensuite présenté les six ordonnances que le projet vise à ratifier.

Il a tout d’abord indiqué que l’ordonnance n° 98-520 applicable à Mayotte, visait à confier pour cinq ans au maximum au Centre national pour l’aménagement des structures des exploitations agricoles l’exercice du droit de préemption en matière foncière, à rendre applicable dans cette collectivité les dispositions relatives aux offices d’intervention agricole et à donner une base législative à la mise en œuvre de la nouvelle politique de l’Etat en matière d’aide au logement social.

Il a ensuite présenté l’ordonnance n° 98-521 qui vise à permettre l’adaptation par décret en Conseil d’Etat des normes de construction en matière acoustique et thermique dans les DOM afin de tenir compte de leurs spécificités climatiques, à rendre applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon les dispositions du code de la construction et de l’habitation relatives à l’accès des personnes handicapées aux lieux publics ainsi que certaines de celles relatives à la sécurité de l’équipement des immeubles et à étendre à la Nouvelle Calédonie et à la Polynésie française les dispositions du régime métropolitain de l’épargne logement relevant de la compétence de l’Etat. A ce sujet, il a signalé que le coût de cette extension, sur lequel s’était interrogé M. Jérôme Lambert, rapporteur du projet de loi d’habilitation, lui avait été communiqué par le Gouvernement qui l’évaluait entre 30 et 40 millions de francs par an en régime de croisière.

Il a ensuite indiqué que l’ordonnance n° 98-523 relative au régime de la pêche maritime dans le territoire des terres australes et antarctiques françaises (TAAF) apportait pour l’essentiel des adaptations garantissant que la légalité des dispositions répressives nécessaires à la préservation des ressources halieutiques des TAAF ne puisse être contestée.

M. Maxime Bono, rapporteur, a précisé que l’ordonnance n° 98-526 visait à créer à Mayotte sur le modèle des commissions départementales d’équipement commercial instituées par la loi du 27 décembre 1973 modifiée d’orientation du commerce et de l’artisanat, une commission territoriale d’organisation des activités commerciales et artisanales et que l’ordonnance n° 98-776 modifiait le code rural afin de permettre aux présidents des chambres d’agriculture de la Nouvelle Calédonie et de la Polynésie française d’adhérer au nom de celles-ci à l’assemblée permanente des chambres d’agriculture.

Enfin, le rapporteur a présenté l’ordonnance n° 98-777 qui modifie le code du domaine de l’Etat afin de permettre des cessions gratuites de terres en Guyane aux agriculteurs les occupant et ayant réalisé un programme de mise en valeur de celles-ci, aux personnes morales dont l’objet est essentiellement agricole et dont le capital appartient majoritairement à des personnes physiques susceptibles de bénéficier de ce dispositif ainsi qu’à des personnes physiques occupant sur ces terres des constructions principalement affectées à leur habitation et ne possédant pas de biens immobiliers. Il a rappelé l’importance de ces dispositions compte tenu de la situation foncière en Guyane où plus de 90 % des terres appartiennent à l’Etat.

La commission est ensuite passée à l’examen de l’article unique.

· Article unique : Ratification des ordonnances

La commission a adopté un amendement de coordination du rapporteur prenant en compte l’addition proposée par celui-ci de deux articles additionnels au projet.

La commission a ensuite adopté l’article unique ainsi modifié.

· Article additionnel après l’article unique : Abrogation de l’article 2 de l’ordonnance n° 98-520 du 24 juin 1998

La commission a adopté un amendement du rapporteur abrogeant l’article 2 de l’ordonnance n° 98-520 du 24 juin 1998 devenu sans objet du fait de sa codification par la loi n° 98-984 du 3 novembre 1998 visant à la création d’un office des produits de la mer et de l’aquaculture et étendant à la collectivité territoriale de Mayotte les offices d’intervention prévus au livre VI du code rural.

· Article additionnel après l’article unique : Modification de l’article premier de l’ordonnance n° 98-521 du 24 juin 1998

La commission a adopté un amendement du rapporteur apportant deux modifications formelles à l’article 1er de l’ordonnance n° 98-521 du 24 juin 1998, la première rectifiant une erreur de plume et la seconde clarifiant la rédaction d’un alinéa.

La commission a ensuite adopté l’ensemble du projet de loi ainsi modifié.

——fpfp——

La commission a ensuite examiné le rapport d’information de M. Jean-Pierre Blazy sur la politique aéroportuaire.

M. Jean-Pierre Blazy, rapporteur, a tout d’abord rappelé le contexte dans lequel la commission avait décidé la création de la mission d’information sur la politique aéroportuaire. Il a ainsi précisé que, le 23 septembre 1997, M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l’équipement, des transports et du logement, avait confirmé la décision d’extension de l’aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle et la construction de deux nouvelles pistes. En même temps, le Gouvernement s’engageait à ne pas dépasser le niveau de 55 millions de passagers par an à Roissy.

Il a également rappelé que la question de l’extension de la plate-forme avait déjà été examinée par les gouvernements précédents. Ainsi, une mission chargée d’étudier, dans la perspective plus générale de la politique aéroportuaire de la France, à la fois l’agrandissement des capacités de l’aéroport et la possibilité de définir un site pour le troisième aéroport international parisien avait été confiée à M. Jacques Douffiagues qui avait proposé pour ce dernier point la localité de Beauvilliers, en Eure-et-Loir.

Le rapporteur a fait observer que, depuis la remise du rapport de la mission Douffiagues, le 19 mars 1996, les réalités de la politique aéroportuaire avaient sensiblement évolué. Il a remarqué que le contexte européen et mondial du transport aérien était aujourd’hui caractérisé par une libéralisation du ciel et une croissance importante du trafic. Le plafond des 55 millions de passagers à Roissy devrait dans ces conditions être atteint vers 2007/2008, soit bien avant l’échéance de 2015 retenue dans les documents de l’enquête publique préalable à la construction des troisième et quatrième pistes de l’aéroport Paris-Charles-de-Gaulle.

Il a donc considéré qu’il était urgent de réfléchir à l’avenir de la politique aéroportuaire de la France, dans la perspective d’une saturation de l’aéroport de Roissy dans moins de dix ans. Cette analyse doit s’insérer dans le cadre de la future loi d’orientation pour l’aménagement et le développement durable du territoire, dont l’examen s’achève actuellement.

Il a également souligné l’importance croissante de l’exigence environnementale des riverains et des élus des communes situées à proximité des aéroports.

Il a ensuite précisé les grands axes de son rapport, dans lequel sont examinés les effets de la concurrence exacerbée dans le transport aérien, ainsi que les rapports conflictuels qui opposent le développement aéroportuaire, l’aménagement du territoire et l’environnement, avant d’envisager les moyens de réconcilier ces trois éléments.

Il a indiqué qu’il recommandait notamment :

– d’engager les études et la concertation indispensables pour examiner les possibilités de développement des aéroports de province, non pas pour créer des « hubs » secondaires, mais pour favoriser le redéploiement sur une ou deux plates-formes d’une partie du trafic moyen et long-courrier ;

– d’étudier les possibilités de desserrement du trafic parisien sur les petits aéroports parisiens, comme Beauvais ;

– d’approfondir la question du troisième aéroport, en lien étroit avec les sujets précédents, en réexaminant d’urgence le projet de son implantation à Beauvilliers. Il a considéré que, si le choix du site n’était pas effectué dans les mois qui viennent, les chances d’un véritable développement durable du transport aérien en France seraient compromises.

M. Léonce Deprez a souhaité savoir quelles décisions restaient à prendre étant donné les annonces faites par le Gouvernement sur la modernisation de Roissy et d’Orly.

M. Jean-Pierre Blazy a indiqué que l’aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle serait saturé dans moins de dix ans. Pour prévenir le blocage, il faut ou bien confirmer la mise en place d’un troisième aéroport parisien, ou bien redéployer les liaisons vers des aéroports de province existants.

M. Léonce Deprez a estimé que la décision portant sur le choix d’un site aéroportuaire parisien supplémentaire devrait prendre en considération les atouts de l’aéroport de Lille-Lesquin. Cet aéroport est proche de Roissy. Il a été modernisé par des investissements particulièrement lourds qui ont bénéficié de fonds européens. Sa desserte dépasse largement la région Nord-Pas-de-Calais.

M. Jean-Pierre Blazy a indiqué qu’Aéroports de Paris et Lille-Lesquin étaient en contact. Si un redéploiement en direction de cet aéroport est possible, le ciel supérieur au-dessus de Lille est saturé par les avions civils et par les avions militaires qui occupent à cet endroit de nombreux couloirs. En l’état actuel, cette situation constitue un obstacle au développement de Lille-Lesquin, mais il n’est pas insurmontable.

Le rapporteur a rappelé que ce choix ne relevait pas du Parlement mais du Gouvernement. Il appartient cependant aux parlementaires de s’interroger sur la nécessité de poursuivre la concentration du trafic international sur Roissy.

M. Léonce Deprez a demandé si la mission proposait de tirer parti des infrastructures existantes avant d’engager la construction ou le développement d’un troisième site et si la concentration des liaisons sur Roissy n’était pas passéiste en raison des engorgements, notamment en termes de desserte terrestre, et des conséquences négatives sur l’aménagement et l’équilibre du territoire qu’elle entraînait.

M. Claude Billard a fait remarquer que, dans un contexte de déréglementation du transport aérien et de concurrence exacerbée entre les compagnies, la mise en œuvre d’une politique aéroportuaire équilibrée est un exercice difficile.

Il a indiqué qu’il était d’accord avec l’économie générale du rapport mais a émis des réserves sur le nécessité de choisir dès maintenant un site pour un troisième aéroport situé dans le grand bassin parisien.

Il a admis qu’il fallait envisager un redéploiement des zones de fret et redéfinir le rôle des aéroports de province. Il a tenu toutefois à rappeler que le ministre des transports venait de décider de maintenir la desserte d’Orly par des vols long courrier.

M. Félix Leyzour a demandé si le site situé entre Nantes et Rennes constituait toujours une des implantations possibles du troisième aéroport.

M. André Godin a jugé urgent que le Gouvernement indique les grandes orientations de sa politique aéroportuaire car celle-ci implique une réflexion sur l’intermodalité et oblige à constituer d’ores et déjà des réserves foncières.

Selon lui, Lyon-Satolas doit jouer un rôle important car cette plate-forme, sur laquelle 240 millions de francs ont été investis pour construire une gare TGV, tend à se développer en récupérant en particulier une partie du trafic de l’aéroport de Genève-Cointrin, victime de sa saturation. Il a rappelé que la région Rhône-Alpes, avec 5 millions d’habitants, offre de grandes potentialités qui pourraient croître encore avec un TGV Rhin-Rhône.

Il a souhaité une meilleure répartition des vols intercontinentaux sur nos aéroports et a appelé l’attention des députés sur les problèmes que peuvent soulever les dysfonctionnements des transports en commun parisiens.

M. André Lajoinie, président, a noté que le phénomène de saturation des aéroports était en œuvre en France et souligné la spécificité française, la région parisienne étant la première destination de notre pays en termes d’accueil de voyageurs, notamment du fait de son attrait touristique important.

Il a enfin noté que, si des problèmes de saturation existaient, il convenait de tenir compte de la réalisation de deux pistes supplémentaires à l’aéroport de Roissy, et s’est félicité du renforcement de la synergie entre Orly et Roissy, confirmée par la récente décision de M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l’équipement, des transports et du logement, visant à la création d’une ligne TGV entre les aéroports d’Orly et de Roissy.

M. Léonce Deprez a alors souligné que les limites de trafic qui avaient été mises en place à Orly, avaient parfois pour conséquence de détourner, la nuit, l’atterrissage de certains avions de cette plate-forme vers celle de Roissy.

M. André Lajoinie, président, a noté qu’un redéploiement des vols internationaux était effectivement nécessaire ; Nantes, qui doit se doter d’un nouvel aéroport important à Notre-Dame des Landes, pourrait contribuer à cet objectif.

Des desserrements se révélant par ailleurs nécessaires, il a estimé qu’ils pourraient concerner les aéroports de Beauvais, Cergy-Pontoise ou Cormeilles, dont les vols de voyageurs vers la Grande-Bretagne ou l’Irlande sont en forte croissance.

Il a en outre déploré que l’aéroport de Roissy soit frappé du défaut de gigantisme, et a estimé que par conséquent, l’idée d’un troisième aéroport ne pouvait être repoussée. Toutefois, il a jugé qu’il était préférable, avant toute chose, d’exploiter les possibilités immédiates de desserrement.

Abordant le problème de la réserve foncière, il a rappelé que M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l’équipement, des transports et du logement, avait annoncé qu’une décision serait prise sur ce point avant la fin de l’année, la construction de la nouvelle plate-forme devant être distincte dans le temps de cette première mesure.

En réponse, M. Jean-Pierre Blazy, rapporteur, a rappelé les points suivants :

– les plates-formes aéroportuaires parisiennes constituent le « hub » principal d’Air France ;

– les « hubs » secondaires  sont localisés sur des aéroports comme Lyon-Satolas, Clermont-Ferrand ;

– les aéroports comme Beauvais sont spécialisés sur les liaisons point à point, dont le trafic est en forte croissance ;

– une politique d’aménagement durable du territoire doit permettre de ne plus concentrer les trafics aériens sur Paris ;

– considérer que la question du troisième aéroport ne peut plus être éludée signifie que les études sur sa faisabilité et son implantation doivent être reprises immédiatement, du fait que la réalisation d’une telle infrastructure requiert au minimum dix ans. C’est pourquoi, des réponses, attendues par les élus locaux, doivent être fournies d’ici la fin de cette année ou au début de 2000.

La commission a ensuite autorisé, en application de l’article 145 du règlement et dans les conditions prévues à l’article premier de l’instruction générale du Bureau, la publication du rapport d’information.

Information relative à la Commission

La commission a nommé M. Jean-Jacques Filleul, rapporteur pour la proposition de résolution de M. Didier Boulaud (n° 1646) sur les propositions de directives relatives aux chemins de fer communautaires (COM [98] 480 final/n° E 1163).


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