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ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION DE LA PRODUCTION ET DES ÉCHANGES

COMPTE RENDU N° 14

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mardi 9 novembre 1999
(Séance de 16 heures 15)

Présidence de M. André Lajoinie, président

SOMMAIRE

 

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- Examen de la proposition de résolution de M. Philippe DOUSTE-BLAZY (n° 1785) tendant à la création d'une commission d'enquête sur les phénomènes de pollution atmosphérique urbaine pour la limitation de leurs conséquences sanitaires et l'élaboration d'une doctrine de gestion des risques

 

(Mme Annette PEULVAST-BERGEAL, rapporteur)

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La commission a examiné, sur le rapport de Mme Annette Peulvast-Bergeal, la proposition de résolution de M. Philippe Douste-Blazy (n° 1785) tendant à la création d'une commission d'enquête sur les phénomènes de pollution atmosphérique urbaine pour la limitation de leurs conséquences sanitaires et l'élaboration d'une doctrine de gestion des risques.

Mme Annette Peulvast-Bergeal, rapporteur, a rappelé, en préambule, que la proposition de résolution examinée par la commission de la production et des échanges avait été déposée par M. Philippe Douste-Blazy, le 23 juillet 1999, sur le bureau de l'Assemblée nationale. Elle a jugé qu'il convenait tout d'abord d'examiner cette proposition sous l'angle de la recevabilité. Celle-ci peut être admise sans difficulté, Mme Elisabeth Guigou, Garde des Sceaux, ministre de la justice ayant confirmé qu'aucune information judiciaire n'est ouverte sur les faits ayant motivé le dépôt de cette proposition. Il convient donc d'en examiner l'opportunité.

Mme Annette Peulvast-Bergeal, rapporteur, a insisté sur quatre points : la définition de la pollution atmosphérique, l'évolution de la qualité de l'air en ville ainsi que sa perception par la population, les effets de la pollution atmosphérique urbaine sur la santé humaine et l'efficacité des politiques publiques en matière de lutte contre cette pollution.

S'agissant du premier point, elle a souligné qu'alors que l'opinion publique considère la pollution atmosphérique urbaine comme une de ses préoccupations centrales, le sujet reste mal connu. Notamment, la mesure de la pollution de l'air demeure très empirique et les indicateurs de pollution ne donnent qu'un aperçu partiel du phénomène. Elle a noté que, par ailleurs, la pollution atmosphérique est variable selon le type d'agglomération concernée, les nuisances liées aux mono-industries étant ainsi très différentes de celles produites par les transports.

Concernant la question de la réalité de la dégradation de la qualité de l'air dans les zones urbaines, Mme Annette Peulvast-Bergeal a noté que malgré une sensibilité croissante de l'opinion publique sur cette question, les études les plus récentes montrent que la qualité de l'air en zone urbaine s'est améliorée ; cela est notamment dû à la désindustrialisation, à l'abandon de certains modes de chauffage comme le charbon et aux progrès réalisés dans le domaine des carburants et des moteurs. Ainsi, les émissions de gaz carbonique ont été divisées par sept en vingt ans, celles de plomb ont également fortement diminué et celles de dioxyde de soufre ont été divisées par dix en près de quarante ans.

S'agissant de l'impact de la pollution atmosphérique sur la santé humaine, Mme Annette Peulvast-Bergeal a attiré l'attention sur les divergences des conclusions des études qui sont souvent menées selon des méthodologies différentes, et a noté que leurs résultats étaient souvent peu précis, ce qui nécessitait de les examiner avec circonspection. Citant une étude récemment publiée par l'Académie des sciences et intitulée « pollution atmosphérique due aux transports et santé publique », elle a fait observer que, selon celle-ci, les effets de la pollution atmosphérique en termes de risque individuel étaient plus faibles que ceux du tabagisme passif ; toutefois, la pollution atmosphérique constitue un facteur aggravant pour les personnes les plus fragiles. Par ailleurs, elle a noté que l'étude soulignait la corrélation existant entre la morbidité et la concentration d'ozone ou de particules fines et mettait l'accent sur le problème de la pollution de l'air à l'intérieur des locaux.

Enfin, concernant l'efficacité des politiques publiques menées en matière de lutte contre la pollution atmosphérique, Mme Annette Peulvast-Bergeal a estimé qu'il convenait de se pencher tant sur l'action menée par la Communauté européenne que sur celle menée par la France. Elle a observé que la Commission européenne a abordé ce sujet dès 1980, en élaborant de nombreuses directives et qu'une réforme importante était engagée depuis 1996 en matière de gestion de la qualité de l'air ambiant. Certaines directives ont été transposées par la France entre 1996 et 1998. Mme Annette Peulvast-Bergeal a également cité le programme « Auto oil » lancé par la Commission européenne en 1994 et qui a donné lieu à deux directives visant à réglementer la composition des carburants.

Concernant le dispositif français, Mme Annette Peulvast-Bergeal a évoqué la loi n° 96-1236 du 30 décembre 1996 sur l'air et l'utilisation rationnelle de l'énergie, qui contient l'essentiel des dispositions législatives de lutte contre la pollution atmosphérique auxquelles il convient d'ajouter les mesures fiscales en faveur des véhicules propres ainsi que la taxe générale sur les activités polluantes dont l'assiette sera étendue en 2001 aux consommations intermédiaires d'énergie. Déplorant le flou et la dispersion de ces dispositions, Mme Annette Peulvast-Bergeal a souhaité que ces dernières fassent l'objet d'une évaluation et d'un bilan.

S'interrogeant sur la procédure la plus adaptée pour mener à bien ce travail, elle a estimé que la commission d'enquête n'était pas la formule la plus appropriée compte tenu en particulier de sa lourdeur et de sa solennité. C'est pourquoi elle a jugé préférable que soit mise en place, dans le cadre de la commission de la production et des échanges, une mission d'information sur la pollution atmosphérique urbaine, permettant de faire le point sur l'état d'avancement et l'efficacité des politiques publiques. Elle a souhaité que la réflexion menée dans ce cadre s'inscrive dans la ligne de celle engagée par le rapport présenté au Premier ministre par Mme Odette Grzegrzulka et M. André Aschieri, sur le renforcement de la sécurité sanitaire environnementale.

M. Philippe Douste-Blazy a souligné l'extrême actualité et la gravité du problème de la pollution atmosphérique. Il a indiqué qu'une étude récente de l'OMS estime que la pollution due aux véhicules automobiles est responsable de près de 17 000 décès anticipés. Il a rappelé que les travaux de l'Institut de veille sanitaire établissent un lien direct entre le taux de pollution, tel que mesuré par la teneur de l'air en gaz rares ou toxiques, et l'aggravation des pathologies dont souffrent les insuffisants cardiaques ou respiratoires. La responsabilité de la pollution en matière de bronchiolite du nourrisson est également établie de façon certaine.

Au-delà d'un constat sur les termes duquel la plupart des spécialistes s'accordent, il convient de mettre en place une véritable politique de gestion du risque. La création d'une commission d'enquête constituerait un signe fort de la volonté de l'Assemblée nationale de voir cette question de santé publique placée au rang de préoccupation majeure.

En réponse, Mme Annette Peulvast-Bergeal, rapporteur, a indiqué qu'au-delà d'une analyse dont elle partage les principales conclusions, la création d'une mission d'information paraîtrait plus opportune. Celle-ci peut en effet disposer de moyens comparables sans subir de contraintes de forme et de limitation de calendrier.

Conformément aux conclusions du rapporteur, la commission a rejeté la proposition de résolution.

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