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ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION DE LA PRODUCTION ET DES ÉCHANGES

COMPTE RENDU N° 31

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 2 février 2000
(Séance de 18 heures 30)

Présidence de M. André Lajoinie, président

SOMMAIRE

 

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- Audition de M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement, de M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement, et de M. Claude Bartolone, ministre délégué à la ville, sur le projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains .



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La commission a entendu M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement, M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement, et M. Claude Bartolone, ministre délégué à la ville, sur le projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains.

M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement, a présenté le projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains en indiquant qu'il avait été élaboré en concertation avec M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement, retenu pour l'heure au Sénat, après un large débat mené pendant six mois dans six villes de France (Orléans, Perpignan, Nîmes, Lille, Dijon, Lyon). Il vise à donner une plus grande cohérence au développement des villes et à assurer le renouvellement du tissu urbain dont l'extension mal maîtrisée a produit de nombreux effets néfastes : dépérissement de quartiers, ségrégation entre habitants, asphyxie des moyens de transport, diminution de la qualité de vie des habitants (pollution, bruit,...), creusement des inégalités.

Il a fait valoir que le projet de loi n'avait pas l'ambition de régler tous les problèmes d'urbanisme, de logement et de transport urbain, mais qu'il s'inscrivait dans la continuité des lois du 25 juin 1999 d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire et du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale et des mesures annoncées par le Premier ministre et M. Claude Bartolone, ministre délégué à la ville, en matière de politique de la ville.

Le projet de loi vise en fait à rénover le cadre juridique des politiques d'aménagement de l'espace afin d'assurer un développement et un renouvellement urbains cohérents, solidaires et durables. Il repose tout d'abord sur une exigence de solidarité destinée à assurer le développement cohérent des territoires urbains, périurbains et ruraux qui forment ensemble un même bassin de vie, d'habitat et d'emploi, pour engager, dans les quartiers anciens et dégradés, des actions fortes de renouvellement urbain, pour assurer la mixité sociale dans des villes plus équilibrées, grâce à une plus grande diversité de l'habitat à l'échelle des quartiers, communes et agglomérations, dont l'Etat devra être le garant.

Le projet de loi s'appuie également sur le principe du développement durable et de la qualité de la vie, qui vise à ce que le développement des villes soit respectueux des territoires qui les entourent, dans un souci d'économie de l'espace et d'équilibre avec les espaces ruraux, pour intégrer dans le développement économique et les choix d'urbanisation, des enjeux de qualité urbaine et de protection de l'environnement, pour donner une priorité nouvelle aux autres modes de déplacement que l'automobile.

En troisième lieu, le projet de loi s'appuie sur le principe de démocratie et de décentralisation et vise à rendre le droit plus lisible. A cette fin, le ministre a expliqué qu'il fallait simplifier les règles et les rendre accessibles à chacun, en privilégiant le dialogue et le débat public sur la procédure. Les responsabilités respectives de l'Etat et des collectivités locales dans l'application des orientations nouvelles données aux politiques urbaines doivent êtres claires, avec l'affirmation de la responsabilité première des collectivités territoriales dans la mise en _uvre, à l'échelle la plus pertinente, des objectifs que la Nation s'assigne par la loi.

Le ministre a ensuite indiqué que le projet de loi s'articulait autour de trois objectifs majeurs. Le premier objectif consiste à définir un meilleur équilibre des agglomérations. Il a jugé que la réalisation de cet objectif était impossible lorsque les politiques de l'habitat, des transports, d'aménagement ne sont conçues ni à la bonne échelle, ni de façon cohérente par rapport à un véritable projet d'agglomération, attentif aux équilibres sociaux et territoriaux. C'est pourquoi le projet de loi propose la création d'un schéma de cohérence territoriale, qui sera porteur de la stratégie globale d'agglomération, à l'échelle du bassin de vie et qui devrait fédérer tous les autres documents sectoriels de politique urbaine. En l'absence de schéma de cohérence territoriale, les possibilités d'ouverture à l'urbanisation de nouveaux territoires seraient strictement encadrées.

Cette recherche de cohérence dans les politiques urbaines intègre également la mise en _uvre d'une politique des déplacements au niveau de l'agglomération, au service du développement durable. Cela suppose que le plan de déplacements urbains soit rendu plus efficace et concerne à la fois les politiques de transports collectifs mais aussi de partage de la voirie ou du stationnement. La coopération entre régions et départements doit être rendue possible, c'est pourquoi le projet de loi propose la création de syndicats mixtes de transports, dotés de financements adaptés. Il convient notamment à ce titre d'envisager le reversement à leur profit des amendes perçues par l'Etat. En outre, la généralisation de la régionalisation des transports régionaux doit être menée à terme, les présidents des conseils régionaux ayant demandé, à l'unanimité, qu'elle fût achevée en 2002.

Le ministre a précisé que, parallèlement, le plan local d'urbanisme remplacerait le plan d'occupation des sols. Plus souple et plus simple, il traduira le projet urbain local, les principales actions d'aménagement, les actions relatives au traitement de l'espace public ou à l'environnement. En matière d'élaboration des documents d'urbanisme, les règles de procédure seront simplifiées, tout en renforçant la nécessaire concertation publique.

Le deuxième objectif majeur du projet de loi est la réussite de la mixité urbaine. Le ministre a estimé qu'il n'y aurait pas de mixité sociale et urbaine et d'équilibre social de l'habitat sans réalisation de logements sociaux là où il y en a peu ou pas du tout. Il a précisé que le projet de loi portait le taux de 18 % prévu par la loi du 13 juillet 1991 d'orientation pour la ville à 20 %, cette réforme s'accompagnant de mesures de mise en _uvre considérablement renforcées. Il a ajouté qu'il ne fallait pas avoir une approche restrictive de la notion de logement social puisqu'en certaines zones urbaines, plus de 75 % de la population pouvaient être éligibles à un logement social.

Le troisième objectif majeur du projet de loi vise à assurer une offre d'habitat diversifiée et de qualité. Le projet de loi conforte explicitement dans leur statut actuel les logements sociaux construits avec l'aide de l'Etat, même à la fin des conventions en cours. Il renforce la solidarité entre bailleurs sociaux, dont certains connaissent de vraies difficultés alors que d'autres sont dans des situations plus confortables, au travers du mécanisme de financement de la Caisse de garantie du logement locatif social, qui est réformé. Afin de créer les conditions d'un dialogue régulier entre organismes HLM et locataires, en particulier avant toute opération de travaux importants, des plans de concertation locative seront élaborés au sein de chaque organisme.

Le ministre a ajouté que la qualité de l'habitat privé nécessitait souvent d'être améliorée pour répondre à ce dernier objectif. C'est pourquoi le projet de loi réforme les procédures de lutte contre l'insalubrité et le péril, renforce la capacité d'intervention dans les copropriétés dégradées et unifie les modes d'interventions publiques en faveur de l'habitat privé.

En conclusion, le ministre a fait valoir qu'au-delà des réformes de fond, le projet de loi simplifiait également le droit en vigueur en supprimant plus de dispositions législatives qu'il n'en créait.

M. Claude Bartolone, ministre délégué à la ville, a ensuite rappelé que, comme l'indiquait M. Jean-Claude Gayssot, ce projet de loi s'inscrit dans la continuité de la loi du 25 juin 1999 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire et de la loi du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale, dont la création de 51 communautés d'agglomération au 31 décembre dernier illustre le succès. Le ministre a estimé qu'il convenait de conforter les nouvelles solidarités urbaines en train d'apparaître.

Nous sommes à un moment historique a-t-il souligné, caractérisé par la fin de la ville industrielle pensée dans les années 1960 et 1970. Ainsi, quarante ans après le début de la vague massive de construction de logements sociaux - 1,7 million entre 1960 et 1975 - et vingt ans après le début du programme de 2 millions de réhabilitations réalisées entre 1982 et 1997, on peut estimer qu'un grand nombre de quartiers nécessiterait aujourd'hui des aménagements lourds compte tenu de leur ancienneté et de leur image sociale dégradée. Le temps de la réparation s'achève donc et doit désormais s'ouvrir celui de la reconstruction. Alors que les quartiers monofonctionnels construits dans les années 1960 arrivent en fin de vie, il convient certes de conduire des opérations de démolition-reconstruction mais évidemment pour reconstruire autrement.

Puis, M. Claude Bartolone, ministre délégué à la ville, a déclaré qu'avec le retour de la croissance, de nouvelles préoccupations se faisaient jour, nos concitoyens aspirant à davantage de qualité de vie et à un « écodéveloppement » ainsi qu'à davantage de démocratie locale. L'enjeu, a-t-il estimé, est donc de reconstruire une ville solidaire pour le XXIème siècle.

Il a précisé que cette ambition du Gouvernement se traduisait par le grand programme de renouvellement urbain annoncé par le Premier ministre lors du Comité interministériel de la ville du 14 décembre 1999 ainsi que par ce projet de loi qui vise à apporter les outils législatifs indispensables au développement solidaire de nos villes. Le projet de loi tire les conséquences des difficultés rencontrées par l'application de la loi d'orientation pour la ville. Il vise ainsi à étendre l'obligation de construction de 20 % de logements sociaux à toutes les agglomérations de plus de 50 000 habitants comprenant une ville centre d'au moins 15 000 habitants.

Le projet de loi prévoit en outre une simplification des critères de sélection des communes soumises à l'obligation de réalisation de logements sociaux qui s'imposera à toutes les communes de plus de 1 500 habitants n'ayant pas 20 % de logements sociaux. 114 agglomérations seraient concernées par ce dispositif, et 1113 communes (dont 178 en Ile-de-France) seraient soumises à l'obligation de réaliser des logements sociaux. L'objectif est de substituer à la loi d'orientation pour la ville, modifiée à l'initiative de M. Gilles Carrez, un système simple : les communes concernées auront l'obligation de réaliser 15 % des logements sociaux manquants par période de trois ans, les communes qui n'ont pas assez de logements sociaux devant constituer pour les réaliser une épargne de précaution abondée à hauteur de 1000 francs par logement manquant, montant doublé au bout de trois ans. Il importe de gagner le « pari de l'intelligence » car nos concitoyens doivent vivre une vie de citoyens, ce qui ne peut être le cas dans des villes sans mixité sociale générant désordre et violence comme l'ont tristement illustré les récentes difficultés dans certains établissements scolaires.

Ce projet de loi, a souligné le ministre, n'aboutit ni au centralisme ni à des procédures autoritaires. Ce n'est que tout en fin de procédure, si le constat devait être fait du refus de certaines collectivités locales de construire des logements sociaux pour des raisons politiciennes, que le représentant de l'Etat devrait intervenir pour se substituer aux autorités défaillantes de ces collectivités en construisant ces logements grâce à la réserve financière mise en place.

Abordant ensuite la question des copropriétés en grande difficulté, M. Claude Bartolone, ministre délégué à la ville, a estimé que celles-ci constituaient un autre problème majeur de la politique de la ville auquel le projet de loi entendait apporter des solutions. Celles-ci s'inspirent des mesures d'ordre législatif préconisées par le groupe de travail présidé par Mme Brevan, déléguée interministérielle à la ville, dont des propositions ne relevant pas du domaine de la loi ont inspiré certaines des décisions du comité interministériel à la ville du 14 décembre 1999. Le ministre a précisé que tel avait été le cas de la prime à l'amélioration de l'habitat « parties communes » dans le cadre des plans de sauvegarde et de l'enveloppe de 3 milliards de fonds propres attribuée à la Caisse des dépôts et consignations pour assurer des avances remboursables aux syndicats de copropriétaires. Il a également indiqué que l'enveloppe financière prévue dans le cadre du grand programme de renouvellement urbain pourrait être utilisée pour la restructuration des copropriétés en extrême difficulté, la traduction financière de la volonté politique du gouvernement étant donc réelle.

Parmi les mesures d'ordre législatif relatives aux copropriétés en grande difficulté prévues par le projet de loi, le ministre a cité le renforcement de l'accès des copropriétaires occupants aux fonds de solidarité pour le logement pour les dettes de charges, la possibilité accordée au syndic de recouvrer directement auprès du locataire défaillant de manière répétée les charges dues par celui-ci ainsi que la simplification de la division des grandes copropriétés, de plus petites entités permettant de mieux répondre aux dysfonctionnements.

M. Patrick Rimbert a salué l'ambition du projet de loi soumis à l'examen du Parlement. Ambitieuse, la loi d'orientation sur la ville de 1991 l'était également, notamment en matière de mixité sociale, mais ses réalisations ont été modestes. Il convient donc de tirer les enseignements de son échec relatif pour que celui-ci ne soit pas renouvelé à l'avenir.

Le projet de loi contient de nombreuses avancées en matière d'urbanisme, par exemple avec la mise en place des schémas de cohérence territoriale. Il a néanmoins souhaité obtenir des précisions sur l'étendue du périmètre du schéma de cohérence et les conséquences qu'il est susceptible d'induire pour les communes limitrophes, mais non couvertes par celui-ci. Il conviendrait également d'éclaircir la forme que prendra le débat appelé à précéder l'enquête publique sur les schémas de cohérence, les plans locaux d'urbanisme et les plans de déplacements urbains.

Par ailleurs, les centres commerciaux implantés à la périphérie des agglomérations génèrent de fréquents déplacements de leurs utilisateurs. Il est donc souhaitable de se pencher sur les conditions dans lesquelles ces centres seront intégrés aux schémas de cohérence.

En matière de déplacements, une responsabilité importante de coordination sera transférée à un syndicat mixte. Il a donc souhaité obtenir des précisions sur le contenu de ce syndicat et les conditions dans lesquelles il sera appelé à établir un partenariat avec les collectivités territoriales.

S'agissant, en troisième lieu, des dispositions relatives à l'habitat, la volonté de développer la mixité sociale ne peut qu'être approuvée. Le problème majeur relève plutôt des moyens consacrés au développement de cette mixité : il est en effet probable que certaines communes préféreront payer les amendes prévues par le projet de loi plutôt que de construire des logements sociaux, de sorte que le risque de voir la ségrégation sociale perdurer semble bien réel.

M. Patrick Rimbert s'est également interrogé sur l'évolution des relations entre les villes et l'Etat, et notamment sur les modalités selon lesquelles le « droit à la qualité de la ville » sera susceptible d'être placé sous le contrôle du préfet.

Il a conclu son propos en évoquant la question des copropriétés dégradées. Le droit actuel accorde de nombreuses protections aux propriétaires bailleurs, qui ne trouvent pas leur contrepartie dans une protection suffisante du locataire. Il conviendrait ainsi que les droits de ce dernier soient garantis sur le plan de la salubrité du logement occupé, éventuellement sous le contrôle du juge.

M. Alain Cacheux a également salué les avancées réelles du projet de loi, qui doivent donner un nouveau souffle à une loi d'orientation pour la ville que le temps a peu à peu vidée de son contenu.

Il a noté que le texte soumis au vote du Parlement s'inscrit dans le prolongement des lois sur l'orientation et l'aménagement durable du territoire et sur la simplification intercommunale. L'articulation de la loi sur la solidarité et le renouvellement urbains avec celles-ci lui semble toutefois pouvoir être encore améliorée. De même, il faudrait réfléchir à la possibilité de faire du schéma directeur de l'équipement commercial un document véritablement prescriptif.

Il a ensuite présenté trois observations principales.

Les mesures proposées en matière de mixité urbaine marquent une volonté politique forte et lui apparaissent très positives. Une réflexion doit néanmoins être menée sur la différence de statut entre les agglomérations couvertes par un programme local de l'habitat et les communes qui en sont privées. Le rôle du représentant de l'Etat, dont on connaît l'importance au sein des commissions d'attribution de logements, doit aussi être précisé.

Si l'effort consenti en faveur de la pérennisation du logement social ne peut que susciter l'approbation, il a estimé en revanche que les rapports entre l'Etat et les organismes HLM doivent évoluer vers une plus grande contractualisation.

En matière d'insalubrité, le texte demeure dans une logique réparatrice, qu'atteste le rapprochement des mécanismes relatifs au péril et ceux relatifs à l'insalubrité. Au contraire, la mise en place d'une logique de prévention serait bienvenue, qui pourrait prendre la forme d'une suspension du paiement du loyer par le locataire si le propriétaire ne respectait pas les obligations à sa charge. Il est vrai que le rapport de force s'exerce souvent au bénéfice de ce dernier, ce qui donne une certaine actualité à la proposition de mettre en place un permis de louer pour les logements anciens et les petits logements et qui serait l'équivalent du contrôle technique applicable aux véhicules.

M. Eric Doligé a tout d'abord critiqué les conditions dans lesquelles le débat s'engageait sur ce projet de loi ; les grandes lignes de ce texte venant à peine d'être rendues publiques, il est difficile de se rendre compte de l'ambition affichée par le Gouvernement à son sujet. Il a en outre indiqué que les différentes associations d'élus locaux, départementaux et régionaux auraient souhaité être davantage associées à son élaboration. Il s'est réjoui que le ministre de l'équipement, des transports et du logement ait déclaré ne pas vouloir opposer les secteurs ruraux aux zones urbaines : il est en effet nécessaire, pour l'équilibre de notre territoire et de sa population, de poursuivre et amplifier les efforts de la collectivité en faveur du monde rural.

Il a récusé l'idée, précédemment énoncée par le ministre délégué à la ville, selon laquelle il existerait un clivage droite-gauche quant à l'intérêt porté au logement social. Il a en revanche affirmé que l'effort des communes rurales en faveur de ce secteur était particulièrement soutenu, malgré la faiblesse de leurs moyens.

Evoquant la volonté affichée du Gouvernement de simplifier par ce texte les procédures d'urbanisme, il a considéré que la tendance qui consiste à ne pas prendre en compte les périodes de vacances dans le calcul des délais de consultation des habitants, lors des procédures d'enquête publique, aboutissait trop souvent à retarder la réalisation effective d'équipements collectifs indispensables.

Il s'est par ailleurs demandé, en liaison avec le débat actuellement engagé à propos de la mission confiée à M. Pierre Mauroy sur l'avenir de la décentralisation, si certaines des modifications projetées, notamment les procédures retenues pour l'élaboration des schémas de cohérence territoriale, ne risquaient pas d'aboutir à hiérarchiser entre eux les différents niveaux de collectivités territoriales. De même, derrière la volonté affirmée de renforcer la décentralisation, ne dissimule-t-on pas un plan de recentralisation, les préfets étant appelés à disposer de pouvoirs accrus dans l'élaboration des documents d'urbanisme tandis que l'Etat s'impliquera de plus en plus directement dans le contenu des schémas.

S'agissant enfin du volet du projet de loi relatif aux déplacements, il a regretté que les départements, également autorités organisatrices de transport, n'aient pas été associés en amont à la réflexion.

M. Jean-Jacques Filleul s'est déclaré favorable à ce projet, notamment s'agissant de la partie relative aux déplacements. Il a insisté sur l'importance de l'entrée de la région Ile-de-France dans le Syndicat des transports parisiens (STP), ce qui modifie de fait le mode de financement de la RATP. Il a souhaité que cette réforme soit l'occasion de permettre à ce grand opérateur de transport public de pouvoir pleinement exprimer son savoir-faire dans d'autres grandes métropoles.

Abordant le projet de confier à l'ensemble des régions l'autorité en matière d'organisation du transport public ferroviaire régional, il a exprimé son accord avec l'idée de procéder à ce transfert de compétences, dans l'ensemble des régions, le 1er janvier 2002. Il a souhaité que le débat parlementaire permette d'assouplir les conditions dans lesquelles plusieurs régions pourront contracter pour organiser ensemble certaines dessertes. Citant l'exemple de la desserte « Interloire » (Orléans-Tours-Nantes), organisée par deux régions expérimentales, la région Centre et les Pays de la Loire, il a considéré que de telles liaisons inter-cités répondaient efficacement aux besoins des populations. Il a souhaité que soient évitées de trop grandes disparités tarifaires entre les régions et souligné que la généralisation de ce transfert de compétences allait bouleverser la situation du chemin de fer au plan national.

Abordant la politique proposée dans les agglomérations, il s'est réjoui que le projet de loi ait privilégié la structure du syndicat mixte, qui permettra de répondre de la manière la plus efficace aux besoins dans les zones urbaines et périurbaines. Il conviendra toutefois d'examiner avec précision le périmètre de ces syndicats, dont la définition risque d'exiger des arbitrages dans certains cas.

Il a considéré que la création de plans de déplacements urbains (PDU) plus coercitifs constituait un véritable moyen pour améliorer les conditions de circulation et de stationnement dans les agglomérations. S'agissant de l'Ile-de-France, il a estimé qu'il faudra probablement définir plusieurs PDU s'intégrant dans un plan d'ensemble.

Il a souhaité que la notion de stationnement soit clarifiée car il s'agit d'un outil d'aménagement et d'organisation des déplacements, à l'intérieur de la zone urbaine comme en liaison avec les secteurs périurbains. Il s'est également réjoui que, pour la première fois, la question des transports de marchandises fasse partie intégrante de la politique de déplacements au sein des agglomérations. Il a enfin espéré que grâce à cette loi le montant des dotations publiques en faveur du transport urbain puisse être augmenté.

M. Michel Vaxès a déclaré partager les généreux objectifs du projet de loi, qui intègrent la perspective d'un développement cohérent de la ville et la lutte contre la ségrégation sociale et spatiale, en organisant la diversité de l'offre locative et la mixité sociale.

Il a toutefois fait part de certaines interrogations. Ainsi, si les intentions exprimées en faveur de la mixité sont très généreuses, on peut se demander si des moyens suffisants seront ouverts pour permettre leur traduction concrète dans la politique de la ville. La mixité n'est pas seulement une affaire d'espace ; elle doit également prendre en compte les questions de peuplement. Un meilleur contrôle de celles-ci est nécessaire pour éviter une paupérisation accélérée des quartiers, car un accroissement de l'offre conduit trop souvent à n'attirer que les personnes les plus solvables. C'est pourquoi il a suggéré que le critère du revenu moyen par habitant soit pris en considération pour analyser le niveau de mixité sociale atteint, afin de réussir les politiques de reconquête des villes.

Il a évoqué le fait que la liste des communes contenant moins de 20 % de logements sociaux ne reflétait pas la réalité sociale de certaines grandes villes, comme Marseille, où la grande misère des quartiers Nord s'oppose au caractère très résidentiel des quartiers Sud sans pour autant constituer une quelconque mixité. C'est pourquoi il a émis l'idée que le calcul de la densité de logements sociaux soit effectué, dans les principales villes, par arrondissement et non pas globalement sur l'ensemble du territoire de la commune.

Evoquant la nécessité de construire démocratiquement les projets d'agglomération en association avec les populations, il a indiqué que les dispositions de la loi n° 99-586 du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale, relatives à la politique d'agglomération, se mettaient plus rapidement en place que celles relatives à la politique urbaine, notamment du fait du problème de la maîtrise des sols. Seule une élaboration démocratique des schémas de cohérence territoriale et des plans locaux d'urbanisme, associant les habitants de l'ensemble des communes de l'agglomération, est en mesure d'éviter l'apparition de situations conflictuelles sur ce point. Il a suggéré à ce propos que soit instituée l'obligation de procéder, préalablement à l'élaboration des schémas de cohérence territoriale et des plans locaux d'urbanisme, à un diagnostic partagé entre les communes concernées des atouts dont elles disposent, des dysfonctionnements qu'elles connaissent, des besoins en services publics et équipements collectifs qu'elles ressentent. Alors les documents d'urbanisme qui interviendront après cette phase traduiront les aspirations des populations concernées.

Il a enfin fait état de sa préoccupation à propos des moyens financiers qui seront consacrés à la mise en _uvre des dispositions envisagées. Il a ainsi estimé que l'ambition affichée du projet de loi devrait être traduite dans le projet de loi de finances pour 2001, dont l'élaboration va bientôt être engagée.

M. Daniel Marcovitch a indiqué que le projet de loi s'inscrivait aussi dans la filiation de la loi n° 98-657 du 29 juillet 1998 d'orientation relative à la lutte contre les exclusions.

Il a rappelé que la construction locative sociale traverse une période difficile, marquée par une sous-consommation récurrente des crédits PLA. Le choix de la majorité de pénaliser les collectivités territoriales réticentes est un choix politique fort, même si le montant de l'amende infligée peut sembler modeste. Un aménagement de ses modalités de calcul est envisageable, en introduisant par exemple un mécanisme de progressivité. La définition retenue du logement social soulève également quelques difficultés. Il conviendrait ainsi de ne pas y inclure les logements financés par un prêt locatif intermédiaire ; inversement le logement privé d'occupation sociale ne s'y trouve pas inclus.

En matière d'accession à la propriété, le caractère « accessoire » que cette activité peut représenter pour un organisme HLM doit être précisé.

Le rétablissement de la mixité sociale se heurte enfin à la réalité démographique et humaine des grandes agglomérations : c'est ainsi qu'à Paris, au-delà d'un nombre de logements sociaux insuffisants, c'est la question du rééquilibrage entre l'est et l'ouest de la ville qui est prioritaire.

M. Jean-Marc Nudant a jugé que, pour intéressantes qu'elles soient, les dispositions sur la mixité contenues dans le projet de loi seraient d'application délicate. A Dijon, par exemple, il manque 4300 logements pour arriver au quota requis de 20 %. Or, il existe dans cette ville un secteur sauvegardé d'une surface de 20 hectares, la quasi totalité des terrains est déjà construite - particulièrement dans le centre ville -, et afin de réduire la densité d'habitations de certaines zones, des démolitions d'anciennes barres d'immeubles ont été entreprises. Il y a donc une véritable pénurie de terrains et l'application à la lettre du quota de 20 % pourrait conduire à la construction de nouveaux grands ensembles.

Il a ensuite soulevé le problème de la définition de la notion de logement social, se demandant par exemple si des opérations d'amélioration de l'habitat avec conventionnement relevaient du logement social.

Pour M. Pierre Ducout, le projet de loi répond à des impératifs de solidarité, de cohérence et de renforcement de la démocratie locale. Il s'est interrogé sur les aires pertinentes qu'il convenait de retenir, rappelant qu'à côté de la notion d'agglomération existait celle d'« aire urbaine » employée par l'INSEE. Il s'est félicité de la nécessité affirmée de mettre en place des syndicats mixtes tant pour l'organisation des transports urbains que pour l'élaboration des schémas de cohérence territoriale. Certains aspects du texte nécessitent toutefois des compléments : l'urbanisme commercial, le devenir des schémas en cours, l'application d'un seuil unique de 20 % pour renforcer la mixité de l'habitat (seuil qui est peut être pertinent pour l'Ile-de-France mais qui n'est pas nécessairement adapté dans certaines communes périurbaines de province). Comme plusieurs de ses collègues, M. Pierre Ducout a enfin souhaité qu'une définition plus précise du logement social soit inscrite dans le texte.

M. Marc-Philippe Daubresse s'est déclaré d'accord avec les objectifs poursuivis par le projet de loi mais il a estimé que la qualité de ce texte serait mesurée à la méthode employée pour les satisfaire. La simplification nécessaire du code de l'urbanisme ne peut s'apprécier au nombre d'articles abrogés. En la matière, il ne faut pas que les juridictions administratives soient systématiquement appelées à interpréter les règles que les élus ne savent comment appliquer (comment, par exemple, interpréter la notion de compatibilité entre certains schémas ou documents d'urbanisme ?)

Il a ensuite indiqué que la diversité de l'habitat ne passait pas uniquement par le développement de l'habitat collectif. Par ailleurs, en matière de logement social, la volonté des communes de construire n'est pas suffisante car se posent également des problèmes de financement et d'offre foncière. Il a enfin déclaré que les règles contraignantes concernant la construction de logements sociaux pourraient être contournées par des communes très riches ayant les moyens de payer les pénalités sanctionnant leur déficit de logements sociaux. En la matière, les agglomérations doivent jouer un rôle de régulateur.

M. Jean-Marie Morisset a tout d'abord indiqué que l'expérience l'avait conduit à se méfier des lois trop ambitieuses, et qu'il n'avait pu qu'être conforté dans cette prudence par le bilan récemment dressé par M. Daniel Marcovitch du volet « logement » de la loi d'orientation contre les exclusions.

Il a estimé que des clarifications nombreuses devront être apportées au cours du débat. Ainsi, alors que les responsabilités des collectivités territoriales se trouvent largement décrites, celles qui reposent sur l'Etat paraissent plus imprécises. De même, l'articulation des schémas de cohérence territoriale avec les chartes de développement prévues par la récente loi sur l'intercommunalité reste dans l'ombre. Le souci de simplification des procédures n'est pas contestable dans son principe, mais le texte superpose des responsabilités dans des conditions de lisibilité incertaine.

En matière de transports, la solution de la coordination de l'action des différentes collectivités intéressées au sein d'un syndicat mixte ne lui semble pas satisfaisante.

Enfin, en matière de construction locative sociale, l'introduction d'une pénalisation financière ne saurait se substituer à la nécessité d'une réflexion globale sur la répartition spatiale de cette construction sur l'ensemble du territoire.

M. Jean-Michel Marchand s'est félicité de ce projet visant « à reconstruire la ville sur la ville » pour prendre en compte l'impératif de mixité sociale.Il a estimé que le milieu rural doit être également intégré dans la politique du logement social. Il a apprécié que le problème que posent les copropriétés dégradées soit abordé par ce texte mais a en revanche regretté que les questions relatives aux logements foyers (en particulier celles portant sur les foyers de travailleurs migrants) en soient absentes alors que les résidents de ces foyers n'ont pas le statut de locataire et ne bénéficient pas d'un usage privatif des locaux qu'ils occupent.

Mme Janine Jambu a jugé ce projet de loi important et attendu. S'agissant d'un texte aussi technique elle a souhaité que les objectifs politiques apparaissent plus clairement dans l'exposé des motifs. Elle a ensuite abordé plusieurs points qui, pour être positifs, nécessiteraient quand même quelques éclaircissements : la mise en _uvre des schémas de cohérence territoriale, la répartition géographique des logements sociaux, le développement de la concertation dans le secteur locatif, la résorption de l'habitat insalubre, le problème des copropriétés dégradées et la redéfinition du rôle de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat. Elle a estimé qu'il convenait également de s'interroger sur le problème du financement des mesures contenues dans ce projet de loi.

Abordant le problème du logement social, elle a indiqué que l'image de celui-ci était faussée parce que beaucoup de gens assimilaient logements sociaux et HLM. Dans ce domaine, il faut clarifier les rôles respectifs de l'Etat, des collectivités territoriales et des autres intervenants. Des contreparties sociales doivent pouvoir être demandées au secteur privé, en particulier dans le domaine de l'attribution des logements. Elle s'est enfin interrogée sur le devenir des offices d'HLM, et le fonctionnement d'organismes tel le conseil d'administration de la caisse de garantie du logement social (CGLS) et a exprimé ses réticences quant au statut particulier des OPAC.

M. Jean Proriol a regretté que le projet de loi et notamment son exposé des motifs, ne présente pas d'analyse de l'échec actuel du logement social. S'il y a quelques années, l'importance de la demande en matière de prêts locatifs aidés (PLA) a conduit les préfets à les rationner, depuis environ trois ans, le phénomène s'est inversé et l'on constate aujourd'hui que l'offre de PLA est excédentaire. En conséquence, il s'est interrogé sur la pertinence du maintien des plafonds actuels de loyers HLM et a demandé quelle serait la collectivité chargée de couvrir les déficits encourus par les organismes HLM.

Soulignant la mauvaise image dont souffraient ces derniers, il a estimé qu'il convenait d'y remédier, à la fois en restaurant les logements et en facilitant la cohabitation de leurs habitants qui constitue un des problèmes les plus difficiles à résoudre. En outre, s'agissant des logements sociaux, de nombreuses vacances peuvent être observées, du fait notamment de la création de nouvelles unités de type pavillonnaire. Il a estimé que cette situation nécessitait d'envisager à terme la destruction des immeubles ainsi délaissés, notamment les barres et les tours.

Puis, il a regretté que le projet de loi ne garantisse pas la maîtrise des sols pour les collectivités locales. Il a enfin exprimé ses doutes sur la possibilité de décréter la mixité sociale et sur le choix de la voie collective pour atteindre cet objectif : si le projet de loi est ambitieux, il n'a pas les moyens de ses objectifs et sa mise en _uvre sera complexe.

En réponse aux intervenants, M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement, a apporté les précisions suivantes :

- le projet de loi devrait permettre de donner un nouvel élan à la réalisation de logements sociaux. Ainsi, s'il est prévu de passer de 80 000 à 70 000 PLA budgétés, 10 000 logements devraient bénéficier de la mise en place du PLUS. Sur les 80 000 PLA budgétés en 1998, seuls 50 000 ont été consommés. Le projet de loi devrait inciter à la création de 20 000 logements sociaux supplémentaires dans les communes. S'il y a eu effectivement baisse continue de la consommation des crédits destinés aux PLA depuis 1995, le Gouvernement a pris des mesures afin d'enrayer cette tendance : baisse du taux de la TVA et des taux des prêts aidés, augmentation des aides à la pierre ou encore actualisation des plafonds de ressources pour favoriser la mixité ou encore restauration des capacités d'intervention du 1 % logement. La contribution qui sera demandée aux communes n'ayant pas suffisamment de logements sociaux ne constitue pas une pénalité versée au budget de l'Etat ; ce mécanisme ne détourne donc pas les sommes ainsi versées du financement du logement social ;

- concernant les acquisitions foncières auxquelles les communes devront procéder, elles bénéficient d'un amortissement porté de 32 ans à 50 ans. Ce mécanisme de financement visant toutes les acquisitions, les communes pourront donc faire l'achat de logements anciens tout en favorisant la mixité sociale dans de bonnes conditions financières ;

- des vacances peuvent être certes constatées en matière de logement social, mais elles sont dues au rejet exprimé par la population et notamment les jeunes générations. Aussi le Gouvernement souhaite-t-il encourager la démolition des logements anciens si elle s'accompagne d'opérations de relogement. Il convient de noter que ce relogement doit être perçu comme un progrès par la population visée et doit donc aller au-delà des blocages existants, liés soit à un attachement affectif au lieu de résidence soit à un statut social acquis au sein du quartier dégradé ;

- il est certain que le débat parlementaire sera l'occasion de soulever des questions et d'améliorer de nombreux points du projet de loi. Pour autant, ce dernier constitue une grande avancée en matière de démocratie représentative dans le cadre de l'élaboration des nouveaux documents d'urbanisme. Notamment, la définition du périmètre des schémas de cohérence territoriale devra se faire en accordant la plus grande attention aux préoccupations exprimées sur le terrain. Le Préfet arrêtera le périmètre du schéma pour autant qu'il n'aura pas été désavoué par les communes concernées, qui pourront s'exprimer par une règle de double majorité selon les critères de la population et du nombre des communes. Le schéma devra prévoir une bonne articulation entre les agglomérations et les espaces ruraux, qui devront pouvoir être entendus lors de la procédure de son élaboration. La démocratie participative sera améliorée par la mise en _uvre d'une concertation en amont et la généralisation de la procédure de l'enquête publique ;

- s'agissant de la répartition des logements sociaux au sein d'une collectivité, il conviendra peut être de compléter le projet de loi afin que la nouvelle offre contribue à améliorer la mixité urbaine et sociale. Si le schéma de cohérence territoriale de Paris sera constitué par le schéma directeur de la région Ile-de-France, dont l'élaboration a demandé un travail important, il pourrait être envisagé de mettre en _uvre une mixité au niveau des arrondissements de grandes villes comme Paris ou Marseille, sachant que de telles dispositions ne devraient pas remettre en cause la loi n° 82-1169 du 31 décembre 1982 relative à l'organisation administrative de Paris, Marseille, Lyon et des établissements publics de coopération intercommunale.

Puis M. Claude Bartolone, ministre délégué à la ville, a précisé les points suivants :

- si la loi d'orientation pour la ville donne lieu à un bilan mitigé, elle a malgré tout permis à 209 communes de lancer des programmes de logements sociaux. Le projet de loi augmente le nombre de communes visées par l'obligation de construction et institue un mécanisme d'épargne de précaution, qui sera abondé chaque année. Le préfet pourra en outre se substituer à une commune manifestement défaillante ; il n'est évidemment pas souhaitable d'en arriver à utiliser cette disposition. Le Gouvernement a fait le « pari de l'intelligence » ;

- concernant le montant de la contribution due par les communes n'ayant pas un nombre suffisant de logements sociaux, le Gouvernement est ouvert aux propositions qui pourront s'exprimer lors du débat parlementaire. Notamment, il est possible d'envisager de créer des paliers de contributions différents en fonction du nombre de logements sociaux manquants ;

- s'agissant de la ville de Dijon, 7 400 unités de logements sociaux ont été construites entre les deux recensements de la population et 3 800 logements sont vacants dans cette ville ;

- le Gouvernement est favorable à la construction de logements sociaux dans les communes rurales, particulièrement souhaitable compte tenu du phénomène croissant de « rurbanisation ». Pour autant, de telles opérations ne peuvent être réalisées qu'après concertation entre l'Etat et les collectivités locales afin d'analyser les besoins en équipements sociaux ;

- les vacances constatées en matière de logement social ne sont pas nombreuses mais concentrées. Le projet de loi s'attaque à cet aspect afin de prendre en compte ceux qui n'ont plus le choix de leur résidence ;

- les foyers et résidences sociales sont compris dans la catégorie des logements sociaux visés par le seuil des 20 %. Il convient d'encourager la transformation d'anciens foyers en résidences sociales ;

- les villes de Paris, Lyon et Marseille sont dans des situations différentes mais pourraient donner lieu à une réflexion commune concernant l'objectif de mixité sociale ;

- les logements sociaux visés par le seuil de 20 % peuvent être définis comme le patrimoine des bailleurs sociaux dans le cadre du dernier recensement. Toutefois, le Gouvernement examinera avec attention toute proposition visant à modifier cette définition lors du débat parlementaire. Plus largement, ce dispositif devra permettre d'accroître la solidarité entre les collectivités locales afin de lutter contre les déséquilibres urbains.

M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement, a apporté les précisions suivantes :

- le Gouvernement a cherché à ce que le projet de loi soit compatible à la fois avec les objectifs de la « commission pluraliste chargée de tracer des perspectives pour l'avenir de la décentralisation » présidée par M. Pierre Mauroy, la loi n° 99-533 du 25 juin 1999 d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire et la loi n° 99-586 du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale. Les conclusions de la mission présidée par Mme Questiaux et visant à moderniser la procédure d'enquête publique donneront lieu au dépôt d'un projet de loi en 2001 ; ce dernier complétera utilement le présent projet de loi ;

- le Gouvernement a engagé depuis plus d'un an une concertation en amont, notamment avec les associations des maires des grandes villes de France et des villes de banlieues, l'association des maires de France, le conseil national des transports, le conseil national de l'habitat, l'association des régions de France. Le ministre recevra prochainement l'association des départements de France et le comité des finances locales. Le débat parlementaire sera également un moment privilégié pour clarifier et enrichir le projet de loi ;

- concernant les schémas de cohérence territoriale, leur élaboration sera soumise à enquête publique, ce qui n'est pas le cas actuellement pour les schémas directeurs ;

- pour ce qui concerne les syndicats mixtes, il s'agit de coordonner l'action des différentes autorités compétentes afin de prendre en compte la dimension périurbaine ; ils se constitueront sur la base du volontariat. Si un syndicat mixte crée un nouveau mode de transport, il pourra instituer un versement destiné au financement des transports en commun sur la totalité de son périmètre dès lors qu'il y organise l'ensemble des services publics réguliers. L'institution de ce versement s'inscrit dans la limite du plafond de 1,8 % de la masse salariale ;

- concernant le prélèvement logement, le représentant de l'Etat pourra disposer d'un pouvoir de substitution. En Ile-de-France, il sera possible de refuser l'agrément nécessaire à la construction de bureaux aux communes défaillantes ;

- si le permis de louer évoqué pour garantir que les logements soient décents n'est pas prévu par le projet de loi, il est possible de suspendre le paiement du loyer dû pour un logement insalubre, solution préférable à la suppression des allocations logement proposées par certains, qui aurait pour conséquence de pénaliser davantage encore les victimes ;

- le développement de la contractualisation et de la territorialisation est certes nécessaire mais il relève plutôt des pratiques sur le terrain que de la loi ;

- en ce qui concerne l'élargissement des compétences de la RATP, le ministre à titre personnel en comprend la motivation mais il estime qu'il risque d'être difficile et qu'il pourrait avoir notamment pour contrepartie la mise en concurrence pour le transport en Ile-de-France ;

- la question de la compatibilité des plans locaux d'urbanisme avec les schémas de cohérence se pose déjà pour ce qui concerne l'articulation des plans d'occupation des sols avec les schémas directeurs. Le projet de loi ne complique donc pas davantage le droit. En outre, si une commune estime ses intérêts essentiels menacés par un schéma de cohérence elle peut, sous certaines conditions, en sortir.

M. André Lajoinie, président, a évoqué le risque que se constituent des communautés d'agglomérations répondant au souci de certaines communes de s'exonérer de leur devoir de mixité sociale.

M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement, lui a répondu qu'il fallait travailler sur ce point mais que l'outrance d'un fait ne devait pas conduire à la paralysie et qu'il fallait préserver la possibilité de modulations dans le cadre d'une agglomération où existe un équilibre global.

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