Accueil > Archives de la XIe législature > Comptes rendus de la commission de la production et des échanges (1999-2000)

ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION DE LA PRODUCTION ET DES ÉCHANGES

COMPTE RENDU N° 54

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 3 mai 2000
(Séance de 16 heures 15)

Présidence de M. André Lajoinie, président

SOMMAIRE

 

page

- Audition de M. Jean GLAVANY, ministre de l'agriculture et de la pêche, sur le projet de loi d'orientation sur la forêt (n° 2332).


2

   

La commission a entendu M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche, sur le projet de loi d'orientation sur la forêt (n° 2332).

M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche, a fait observer en préambule que son audition avait lieu un an, jour pour jour, après le colloque sur la forêt organisé par M. François Brottes et le groupe d'études sur la forêt qu'il préside, à l'Assemblée nationale.

Il a ensuite indiqué qu'héritière d'une longue histoire juridique, la législation forestière française était le reflet de siècles d'interactions entre l'homme et le patrimoine naturel.

Il appartient à la politique forestière d'accompagner l'évolution de notre environnement écologique, économique et social, dont les frontières s'étendent aujourd'hui à l'ensemble de la planète. La forêt, qui incarne le long terme et le cycle des générations, apparaît souvent anachronique et fragile, dans un monde dominé par le court terme. Elle recèle pourtant des atouts et porte en elle des valeurs qui sont indispensables pour l'équilibre de notre société actuelle et future. Le travail législatif, qui s'inscrit par définition dans la durée, trouve là un domaine d'application fondamental : les parlementaires contribueront à bâtir aujourd'hui les forêts, le cadre de vie et les matériaux que connaîtront nos arrière-petits enfants.

Le ministre a indiqué que trois objectifs principaux avaient présidé aux travaux d'élaboration du projet de loi.

Le premier résulte du positionnement de la loi française dans le cadre juridique international, en pleine évolution après le Sommet de la Terre de Rio (1992), avec les conventions des Nations-Unies sur la biodiversité, les changements climatiques... et la nécessité de relier le droit français à un droit international de l'environnement émergeant.

Le deuxième objectif principal tient à une ouverture accrue à la société, dont les demandes, explicites ou implicites, sont de plus en plus complexes : fonctions économiques (avec par exemple l'enjeu de la certification de l'éco-matériau bois), fonctions environnementales (avec par exemple l'impact d'un bassin versant forestier sur la qualité d'une eau minérale), fonctions sociales (avec, bien au-delà des seuls loisirs en forêt, toute une dimension paysagère et culturelle). La loi doit se donner les moyens de rapports rénovés entre forêt et société.

En dernier lieu, le projet de loi vise à valoriser l'atout économique que représente le patrimoine forestier français en croissance continue depuis plusieurs dizaines d'années, dans un monde où la demande en bois augmente.

Le ministre a ensuite rappelé que la dernière loi sur la forêt datait de 1985. Le présent projet de loi s'inscrit dans une dynamique renouvelée entre tous les acteurs et partenaires de la politique forestière qui s'est traduite ces dernières années par trois évolutions majeures :

- tout d'abord, l'adhésion de tous les partenaires du secteur aux constats et aux recommandations du rapport établi pour le Premier ministre en 1998 par M. Jean-Louis Bianco. Intitulé « La forêt, une chance pour la France », ce rapport soulignait notamment l'opportunité d'un engagement résolu en faveur de la promotion de la gestion durable multifonctionnelle des forêts, du renforcement de la compétitivité économique de la filière forêt-bois, de la consolidation des emplois actuels et de la création de nouveaux emplois, essentiellement dans le monde rural ;

- la négociation d'une stratégie forestière nationale pour quinze ans a été la première manifestation de cette volonté de rénovation. Issue d'une très large concertation menée en liaison avec les acteurs économiques et de nombreux partenaires institutionnels et associatifs _uvrant dans l'aménagement du territoire, le cadre de vie, le tourisme et les loisirs et la protection de l'environnement, cette stratégie a pour objectif d'apporter une vision prospective et un plan d'action à moyen terme ;

- une réforme des financements forestiers a été conduite par le Gouvernement à travers la budgétisation, par la loi de finances pour 2000, des dépenses du fonds forestier national antérieurement assumées par un prélèvement sur la filière économique au titre d'une taxe parafiscale. Cette mesure a été saluée unanimement par les acteurs de la filière.

Le ministre a ensuite rappelé que le projet de loi avait été finalisé après les intempéries de décembre 1999 qui ont durement touché une grande partie du territoire. Un plan national pour la forêt a été mis en place rapidement par le Gouvernement pour faire face aux dégâts sans précédent subis par le patrimoine forestier et en préparer la reconstitution. Sa mise en _uvre ne fait que conforter le choix politique d'un cadre juridique renouvelé, favorisant une mobilisation solidaire des acteurs de la forêt et du bois.

Le ministre a indiqué que ses services travaillaient à l'élaboration du projet de loi depuis deux ans. Il aurait été débattu devant le Parlement cette année, même s'il n'y avait pas eu les deux tempêtes de décembre 1999. Il a jugé que cet événement nous servait car il donne un écho au projet de loi dans l'opinion, mais nous desservait également car il rend difficile la mise en _uvre d'une politique de très long terme lorsque tous les propriétaires consacrent leur énergie à gérer les dégâts et à souhaiter une indemnisation.

Le ministre a ensuite fait valoir que le projet de loi d'orientation sur la forêt s'articulait autour de quatre points forts.

Le premier de ces points est d'inscrire la gestion des forêts françaises, héritage d'une longue histoire, dans le cadre international de gestion durable des forêts, notamment le cadre des conférences ministérielles du processus paneuropéen d'Helsinki sur la protection et la valorisation des forêts en Europe.

C'est à ce souci que répond en particulier l'introduction d'un livre préliminaire dans le code forestier, qui permet de regrouper les lignes directrices qui fondent la gestion forestière, pour les présenter de manière structurée et cohérente. Ce nouveau titre assurera la lisibilité des engagements de la France en matière de gestion durable. Notre pays rejoindra ainsi les autres grands pays forestiers qui ont rénové leur loi forestière selon les principes de gestion durable.

Le deuxième point fort du projet de loi tient aux réponses qu'il propose aux nouvelles attentes de la société vis-à-vis des forêts : cadre de vie, accueil et loisirs, environnement, protection de l'air et de l'eau, production et utilisation d'éco-matériaux à base de bois. A cet effet, plusieurs principes et mesures se dégagent :

- l'affirmation de la vocation multifonctionnelle de la forêt ;

- la diversification de la palette des documents de gestion durable des forêts capables de motiver et de répondre aux besoins d'un plus grand nombre de propriétaires (avec en particulier l'instauration de deux nouveaux outils : le règlement type de gestion et le code de bonnes pratiques sylvicoles) ;

- la création de chartes de territoires forestiers, outils de formalisation de projets multifonctionnels ancrés dans les réalités de terrain. Celles-ci s'apparentent aux contrats territoriaux d'exploitation mis en place par la loi d'orientation agricole du 9 juillet 1999 ;

- la recherche d'une meilleure protection de la forêt contre les menaces de dégradation, notamment les incendies contre lesquels une meilleure prise en compte des interfaces entre zones urbaines et zones rurales permettra une lutte plus efficace ;

- la diversification des modes de financement de la gestion forestière par la reconnaissance des fonctions actuellement non marchandes ;

- l'extension de certains avantages fiscaux (exonération temporaire de taxe foncière non bâtie) à des techniques de gestion basées sur la régénération naturelle, favorisant la diversité des peuplements forestiers ;

- l'introduction de la possibilité de la dation.

Le troisième point fort du projet de loi est de confirmer l'importance économique de la forêt avec la production d'une ressource renouvelable - le bois - créatrice de valeur ajoutée et d'emplois. De nouveaux degrés de liberté permettront aux acteurs de la filière de s'adapter à un marché mondial très concurrentiel.

Trois mesures importantes correspondant à cette orientation sont inscrites dans le projet de loi :

- un assouplissement des relations commerciales entre l'Office national des forêts (ONF) et ses clients, pour augmenter la sécurité et la fluidité des approvisionnements des entreprises ;

- des dispositions en faveur de l'élévation de la qualification professionnelle dans le secteur des travaux forestiers (cette qualification pouvant résulter d'une expérience validée), de l'amélioration des conditions de sécurité, de la lutte contre le travail dissimulé, de la stabilité des entreprises et du développement des emplois en milieu rural ;

- des facilités pour développer la solidarité de filière et structurer les organisations interprofessionnelles, assorties d'un cadrage du processus d'écocertification de la gestion durable.

Le quatrième point fort du projet de loi est d'engager les acteurs de la filière forêt-bois à structurer ensemble, et avec leurs partenaires d'autres secteurs, des projets intégrés de développement local et de gestion des territoires. Le projet de loi introduit à cet égard :

- des espaces renouvelés de concertation et de négociation, dont les chartes de territoire forestier ;

- une modulation des pouvoirs de police en matière de défrichement en fonction de l'importance de l'occupation de la forêt dans l'espace rural ;

- une mise en cohérence des actions de développement forestier avec les objectifs de gestion durable multifonctionnelle, en vue d'une meilleure articulation entre les centres régionaux de la propriété forestière, les chambres d'agriculture et l'ONF ;

- le regroupement dans un établissement public nouveau de deux structures nationales de la forêt privée : la commission nationale de la propriété forestière et l'association nationale des centres régionaux de la propriété forestière ;

- la création d'un Conseil national de l'expertise foncière, agricole et forestière ;

- le souci d'une meilleure coordination des actions de recherche.

S'ajoutent à ces points forts un renforcement de la police forestière, notamment en matière de contrôle des coupes et d'infractions aux principes de gestion durable, et de nombreuses dispositions de toilettage et de mise en cohérence du code forestier.

Le ministre a conclu en indiquant que le projet de loi affirmait le rôle de l'Etat dans la politique forestière et ouvrait largement la voie à la contractualisation avec les collectivités territoriales et les acteurs locaux.

De même, le succès de la politique forestière réclame la participation active des autres départements ministériels ; le secteur forêt-bois concourt à la réalisation de leurs objectifs et est tributaire de leurs décisions. Le ministre chargé de la forêt attend d'eux une attention particulière pour concrétiser ces synergies chaque fois que nécessaire. Ce projet de loi d'orientation sur la forêt s'applique à la forêt dans sa globalité et sa diversité. Il a pour objectif de garantir à la collectivité une gestion durable du patrimoine forestier, tant public que privé. Il s'attache à satisfaire les demandes exprimées aujourd'hui par la société et d'assurer la transmission d'un patrimoine non dégradé et plus riche, dont les potentialités permettront aux générations futures d'assurer leurs propres besoins avec les priorités de demain.

C'est la définition même de la gestion durable des forêts, dont le texte qui est soumis au Parlement a pour ambition de préciser le cadre.

M. François Brottes, rapporteur du projet de loi d'orientation sur la forêt, a estimé que le texte présenté par le ministre de l'agriculture et de la pêche est particulièrement important, car il exprime avant tout une stratégie politique ; ce texte a aussi une dimension technique marquée, supprimant d'ailleurs plus d'articles du code forestier, qu'il n'en propose de nouveaux.

La discussion du projet de loi d'orientation sur la forêt, a poursuivi M. François Brottes, s'inscrit dans un contexte multiforme ; celui, tout d'abord, d'un bon budget de la forêt pour 2000, qui prévoyait tout à la fois une augmentation de 45  % des crédits et une suppression des taxes qui alimentaient le fonds forestier national (FFN), suppression qui a été très positive pour les entreprises de première transformation et les scieurs.

Autre élément du contexte dans lequel prend place la discussion du projet de loi, l'intervention d'un « plan national » à la suite des intempéries de décembre 1999, lesquelles ont confirmé certaines fragilités de la filière : des approvisionnements trop étroits, la difficile mutualisation des risques, les « diktats » des acheteurs sur les vendeurs, la difficulté à organiser une cohérence interprofessionnelle, la vulnérabilité des petits propriétaires forestiers, des communes forestières et de l'Office national des forêts (ONF) lui-même.

Le projet de loi s'inscrit dans le contexte aussi d'une loi de finances rectificative qui n'a pas entendu oublier la forêt, prévoyant des dotations complémentaires pour l'ONF, le passage à un taux de 5,5  % pour la TVA applicable aux travaux forestiers et la suppression des droits de mutation pour les petites parcelles. Il est souhaitable d'ailleurs que le taux de 5,5  % s'applique aussi dans l'avenir à la TVA sur la fourniture de bois de chauffage collectif, comme il est souhaitable que soit prévue la déduction des charges liées à la tempête du revenu professionnel des propriétaires forestiers.

Dernier élément du contexte, la « charte bois construction environnement » dont la mise en _uvre doit être reliée au décret d'application de « la loi sur l'air », afin d'inciter à l'utilisation de bois dans les constructions, qui est évidemment d'intérêt général.

M. François Brottes a souhaité avoir des précisions sur la date de signature de cette charte ainsi que sur celle de publication dudit décret.

Analysant ensuite le contenu même du projet de loi d'orientation sur la forêt, M. François Brottes a estimé que ce texte avait un caractère « refondateur », les fondements de la politique forestière française étant en toute hypothèse très anciens, la première ordonnance sur la forêt remontant à 1346 et le code actuel puisant sa source dans le code forestier de 1827.

Le caractère « refondateur » du projet de loi se manifeste sous quatre aspects. Ce texte, tout d'abord, n'est pas seulement « franco-français », la définition de la « gestion durable » faisant écho, par exemple, aux orientations retenues par les conférences d'Helsinki ou de Rio. Le projet de loi marque ainsi, tout particulièrement, dans son article premier, une prise de conscience irréversible du fait que la forêt française a désormais une responsabilité planétaire pour la survie des hommes et de la biodiversité.

Le projet de loi d'orientation sur la forêt, c'est le deuxième point, ne s'adresse pas seulement aux forestiers. La reconnaissance qu'il opère de la « multifonctionnalité » montre bien que la dimension économique du secteur forêt-bois n'est pas seule concernée, que les aspects environnementaux (la lutte contre l'effet de serre, le maintien de la biodiversité, la préservation des paysages, la protection contre les risques naturels) et les aspects sociaux (l'accueil du public, la découverte de la nature, l'encouragement à la promenade) sont également concernés. Ces dernières dimensions visent ainsi directement l'ensemble de la population, qui a du reste trop souvent des « idées fausses » sur l'exploitation des forêts, ce texte pouvant être le moyen d'aller vers plus de transparence et de compréhension. Le projet de loi veille de la même façon à la protection des écosystèmes, en traitant du défrichement, des coupes, des activités de protection ou de prévention.

Autre orientation du projet de loi, il permet une plus grande implication des territoires. A partir de la mise en _uvre de « chartes de territoires », il devrait rendre possible ainsi une valorisation différenciée des différents massifs, tant il est vrai que la forêt recouvre des réalités très différentes d'est en ouest et du nord au sud.

Enfin et, c'est son dernier aspect « refondateur », le projet de loi redynamise la « filière bois ». Le bois y apparaît comme un matériau « renouvelable », qui a des qualités intrinsèques incomparables ; encore faut-il qu'il ne s'enferme pas dans le ghetto de la construction bois. Encore faut-il que, maillon après maillon, la filière organise la traçabilité du produit et donne des garanties d'origine à l'utilisateur final.

La forêt française demeure à cet égard abondante, puisque la tempête n'a concerné qu'un volume correspondant à deux fois la récolte marchande annuelle de bois. D'autres mesures devraient permettre d'ailleurs de redynamiser la filière : la révision des modes de vente, le regroupement des propriétaires forestiers, la moralisation du travail des entreprises de travaux forestiers, la consolidation de l'interprofession, la clarification du rôle des différentes institutions.

Soulignant l'importance de ce grand « chantier législatif », qui concerne 30  % du territoire national et 100  % de nos concitoyens, M. François Brottes a demandé au ministre de l'agriculture et de la pêche d'apporter des précisions sur plusieurs points :

- les dispositions fiscales applicables aux régénérations naturelles seront-elles identiques à celles dont bénéficient les plantations artificielles ?

- de quels financements bénéficieront les « chartes de territoires » ainsi que les fonctions non marchandes de la forêt ?

- les modalités d'attribution de l'écocertification seront-elles précisées ?

- est-il raisonnable de considérer que 30 à 40  % de la forêt échappent aux exigences de la « gestion durable » ?

- l'effort mené pour le regroupement des petites parcelles est-il suffisant ?

- un dispositif sera-t-il retenu pour créer un « fonds d'épargne forestier » ?

M. Pierre Ducout a relevé plusieurs points positifs dans le projet de loi d'orientation sur la forêt :

- l'accent y est mis sur le rôle économique, environnemental et social de la forêt, tout en présentant comme majeure sa fonction économique, ce qui est cohérent compte tenu de l'accroissement des superficies boisées ;

- la spécificité des massifs est reconnue ; sur ce point, il n'y a pas une, mais des forêts en France ;

- les chartes de territoires forestiers constituent une réelle avancée ;

- les spécificités des forêts périurbaines sont reconnues, ce qui va dans le sens d'un encouragement à la prise en compte du rôle social de la forêt ;

- les moyens relatifs à la prévention des incendies sont confortés ;

- l'organisation interprofessionnelle est encouragée, ce qui constitue une évolution positive compte tenu des insuffisances actuelles ;

- en matière de recherche, il convient de disposer de moyens suffisants pour assurer l'adaptation de la forêt aux nouveaux enjeux économiques ;

- les dispositions relatives au centre national professionnel de la propriété forestière vont dans le bon sens.

Puis, M. Pierre Ducout a émis certaines observations. Concernant les conséquences de la tempête, qui a d'ailleurs pris la forme d'une tornade en Gironde et en Dordogne, les propriétaires doivent maintenant dégager les chablis (arbres tombés), ce qui se révèle impossible dans les endroits les plus touchés. Ces tornades posent, plus généralement, la question de la pérennité de la filière bois en Aquitaine, où le problème de la définition de la forêt en tant que patrimoine ou culture se pose de manière cruciale. M. Pierre Ducout a en outre estimé qu'il convenait d'aller plus loin en matière d'incitations à l'organisation de la sylviculture privée, notamment grâce à une réorganisation des structures et à des encouragements financiers au remembrement.

Pour conclure son propos, il a attiré l'attention sur les besoins de financement importants pour réparer les dégâts liés à la tempête : les chablis doivent être stockés puis transportés, et il convient que les crédits nécessaires à ces opérations ne soient pas bloqués par la direction du budget. En outre, d'ici la fin de l'année, il sera nécessaire de mener une réflexion sur les conditions d'indemnisation des petits sylviculteurs aux revenus les plus faibles, comme certains retraités agricoles, pour lesquels l'exploitation forestière constitue un complément de revenu indispensable.

M. Pierre Micaux a estimé que le projet de loi était un texte sérieux et complexe, compte tenu du nombre de ses articles et de ses références à de nombreux codes, ce qui ne simplifiait ni la tâche du Gouvernement, ni celle des parlementaires. Il a noté que le projet de loi s'appuyait sur une démarche volontariste. Néanmoins, il a regretté la trop grande place qu'il accordait à l'Etat par rapport aux propriétaires privés, voire même à l'Office national des forêts. Il a insisté sur les efforts à faire vis-à-vis de la propriété privée, qui constitue le mode prédominant de détention de la forêt et qui est pourtant mal gérée. En particulier, le rôle économique de la forêt privée n'a pas donné lieu à un traitement adéquat alors que son rendement est actuellement deux à trois fois inférieur à celui des forêts domaniales en futaie. C'est pourquoi il convient de regrouper au maximum les parcelles tout en respectant la propriété privée.

M. Pierre Micaux a par ailleurs noté que le fonds forestier national était supprimé et s'est inquiété en conséquence de l'avenir des crédits qui l'abondaient et de la satisfaction des besoins pour une gestion durable de la forêt.

Il a en outre regretté que le projet de loi n'aborde pas la question de la formation professionnelle et, plus largement, celle de l'enseignement dans l'ensemble de la filière bois, afin d'inscrire dans la durée la réflexion menée à l'occasion de l'examen du projet de loi. Il a notamment cité les exemples de l'école supérieure du bois et de l'école nationale du génie rural, des eaux et des forêts.

Concernant les mesures prises par le Gouvernement à la suite des deux tempêtes, M. Pierre Micaux a estimé que si les crédits affectés étaient peut-être suffisants, ils n'étaient « débloqués » que lentement, alors que certaines essences forestières ne peuvent attendre. C'est notamment le cas du pin ou du hêtre. Les questions de transport n'ont en outre pas été traitées de manière appropriée. Il est pourtant urgent de résoudre l'ensemble de ces problèmes, compte tenu des difficultés rencontrées à l'exportation avec la chute des cours. Il a enfin demandé quelle serait la date d'examen du projet de loi en séance publique.

M. André Lajoinie, président, a répondu que l'examen du texte devrait avoir lieu en juin prochain.

M. Jean-Michel Marchand s'est félicité en préambule que ce texte s'inscrive dans l'esprit du sommet de Rio et de la Conférence ministérielle pour la protection des forêts en Europe d'Helsinki comme en atteste la prise en compte de la nécessaire protection de la biodiversité et des biosystèmes.

Après avoir rappelé que les tempêtes de décembre avaient montré l'attachement des Français à leurs forêts, il s'est demandé de quels moyens bénéficieront les fonctions forestières non marchandes, suggérant de les financer par la fiscalité écologique.

S'agissant des plans de gestion, il a craint que le dispositif ne conduise à encourager les projets les moins ambitieux au regard de la protection de l'environnement.

Dans le même esprit, le « toilettage » du code forestier ne doit pas conduire à réduire les mesures de protection et à limiter les pouvoirs de la police des forêts.

Il a enfin rappelé l'urgence qu'il y avait à indemniser les petits exploitants forestiers victimes de la tempête et qui ne peuvent trouver de débouchés pour les bois tombés.

M. Eric Doligé a insisté sur l'importance de la formation. Il a ainsi regretté qu'après les tempêtes de décembre, les autorités du département du Loiret avaient constaté qu'il manquait, dans ce département, des bûcherons pour remettre les forêts en état. Des chômeurs et des bénéficiaires du RMI ont donc suivi des formations. Ils se sont heurtés à une première difficulté car ils devaient eux-mêmes fournir leur matériel. Puis, une fois leur formation achevée, ils n'ont pu trouver de débouchés sur place, alors que la forêt domaniale d'Orléans était loin d'être déblayée, car l'ONF prétendait ne pas pouvoir embaucher directement ces personnes. Ils ont fini par être employés dans la forêt vosgienne, l'Etat prenant en charge leurs frais de déplacement. Au contraire, dans les forêts privées, le bruit des tronçonneuses était ininterrompu, les propriétaires ayant eu recours à des bûcherons belges, anglais ou allemands dont les employeurs supportaient des charges moindres.

Aujourd'hui, dans l'Orléanais, la forêt publique est à terre et la forêt privée est totalement nettoyée de ses chablis.

M. Claude Jacquot a jugé ce projet de loi équilibré et a estimé qu'il ouvrait les grands chantiers attendus. Tout en respectant les engagements internationaux, il apporte des réponses fiscales et simplifie l'appareil législatif par un « toilettage » du code forestier. Il a toutefois regretté que l'ensemble des problèmes de la filière bois - de la sylviculture à la deuxième transformation du bois - et que la question du bois-énergie ne soient pas abordés dans le texte. La réforme de la vente des coupes est à cet égard une proposition intéressante, mais insuffisante pour tirer l'ensemble de la filière vers le haut.

Quant aux chartes de territoires forestiers, elles permettront d'affirmer la diversité des massifs forestiers. Leur spécificité doit conduire à mettre en place des outils adaptés.

Il a également souhaité l'instauration d'un dispositif plus coercitif en matière de distance d'implantation des forêts par rapport à certaines infrastructures et a appelé de ses v_ux un regroupement et une meilleure coordination de la recherche dans le domaine forestier.

Enfin, bien que les aides des centres régionaux de la propriété forestière soient importantes, il importe d'offrir des outils efficaces de gestion aux petits propriétaires forestiers.

M. Léonce Deprez a souhaité insister sur le caractère plurifonctionnel de la forêt, qui constitue un outil important dans le développement de l'économie touristique. La forêt représente en effet un atout attractif, qui favorise en retour la plurisaisonnalité de cette activité.

Il a souligné à ce propos l'importance pour les communes touristiques et leurs structures de coopération de développer leurs forêts pour mieux valoriser leur territoire. En outre, la plantation d'arbres sur de grandes superficies abandonnées par les cultures agricoles constitue un moyen pour contrôler l'extension géographique des agglomérations.

Il a considéré que les communes touristiques devraient s'attacher à développer et favoriser l'utilisation du bois pour la construction ce qui contribuerait à leur valorisation.

Il a regretté que la France doive importer massivement du papier, parce que la filière nationale du bois ne permet pas de répondre aux besoins. Le développement de ce débouché doit être favorisé, notamment par une clarification du régime de taxation applicable. A ce titre, il a craint que la mise en place de la taxe générale sur les activités polluantes ne freine la croissance de l'activité sylvicole.

En conclusion, il a estimé qu'une meilleure reconnaissance de l'activité forestière contribuerait à mieux développer l'emploi dans ce secteur.

M. Jean-Pierre Dufau a insisté sur l'importance du projet de loi, dont l'actualité est renforcée par les tornades de décembre dernier. Il a considéré à ce sujet, qu'après les décisions rapides d'aide financière aux victimes qui ont été prises, il était urgent de procéder désormais au versement d'avances.

Il a considéré que les conséquences de ce phénomène météorologique pourraient être mises à profit pour diversifier les essences plantées, moderniser les techniques d'exploitation et accroître les débouchés de la filière.

Il a souligné la volonté du Gouvernement de prendre en compte la multiplicité des aspects de la forêt où l'Etat doit occuper toute sa place. Il a estimé que les problèmes liés au morcellement de la propriété sylvicole et à la dimension des parcelles pourraient être résolus par l'élaboration de stratégies adaptées. A ce titre, les difficultés dues à la multiplicité des petites parcelles doivent conduire à unifier leur système de gestion.

Il a souhaité qu'un système de préemption foncière soit mis en place pour intégrer des parcelles privées dans des espaces plus vastes d'intérêt public.

Abordant le financement de la lutte contre les incendies, il s'est réjoui que l'Etat se soit engagé à compenser les pertes de recettes liées à la disparition du fonds forestier national, tout en demandant des précisions sur les modalités qui étaient envisagées.

Il a insisté sur la nécessité d'améliorer la formation aux différents métiers du bois, au-delà du manque conjoncturel de bûcherons dû aux conséquences des tornades. Il conviendrait également de sensibiliser les élèves des écoles d'architecture aux possibilités d'utilisation du bois dans les constructions et à l'importance de ce matériau.

Il a enfin souhaité que la recherche dans la filière soit renforcée par une meilleure coordination entre les chercheurs, afin de renforcer la compétitivité du secteur et d'améliorer la valorisation des différentes essences.

M. Robert Galley s'est interrogé sur les causes des tempêtes de décembre 1999 dont le fait qu'elles aient arraché, notamment à Versailles, des arbres plantés au 18ème siècle, illustre le caractère exceptionnel. Il a estimé essentiel pour l'avenir de nos forêts de déterminer si de tels phénomènes météorologiques étaient susceptibles de se reproduire et à quelle échéance.

M. Robert Galley a rappelé que ces tempêtes résultaient du déplacement de masses d'air chaud en provenance de l'Atlantique et qu'il conviendrait donc de déterminer si les changements climatiques, peut-être liés à l'effet de serre, expliquaient ces événements. Il a souhaité que cette réflexion puisse être conduite au plus haut niveau, par exemple par l'Académie des sciences, et a souhaité que l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques ou le Gouvernement, qui dispose de davantage de moyens, se saisisse de cette question.

M. Robert Galley a conclu en jugeant qu'une telle étude constituerait le plus utile des prologues à la mise en _uvre d'un projet de loi qu'il a, à titre personnel, estimé convenable.

M. Joseph Parrenin a estimé que les accidents liés aux tempêtes illustraient la nécessité de maîtriser l'ouverture des forêts. Il a ainsi indiqué que dans sa circonscription, malgré toutes les consignes de prudence, deux décès et le cas d'un jeune homme de vingt-trois ans devenu paraplégique, mettaient en évidence le fait que les métiers de la forêt demandent une véritable qualification et présentent des risques.

M. Joseph Parrenin a ensuite souhaité que l'application des bonnes décisions, bien perçues dans l'opinion, tirant les conséquences des tempêtes soit plus rapide. Il a toutefois jugé que le dispositif commençait à se mettre en place et, qu'au regard de l'ampleur de ces catastrophes, il était évident que du temps serait nécessaire pour réagir. Il a également espéré que cette expérience permette aux pouvoirs publics d'être, à l'avenir, prêts.

Rappelant qu'il était l'élu d'un des départements les plus boisés de France, le Doubs, M. Joseph Parrenin s'est ensuite étonné de ne pas trouver dans ce projet de loi davantage de dispositions relatives à la réglementation des boisements. Il a estimé que celle-ci ne prenait en compte jusqu'à présent que les intérêts agricoles et non la préoccupation paysagère, ce qui a abouti notamment à la fermeture complète de vallées, parce que des résineux sont plantés partout.

M. Jean Proriol a indiqué qu'il avait beaucoup apprécié, d'une part, le rapport de M. Jean-Louis Bianco et, d'autre part, le travail conduit dans le cadre du groupe d'études sur la forêt présidé par M. François Brottes.

Parmi les documents communiqués par le Gouvernement, l'étude d'impact du projet de loi lui a semblé intéressante et relativement claire. En ce qui concerne le projet de loi proprement dit, M. Jean Proriol a indiqué partager l'opinion de M. Pierre Ducout : la première fonction de la forêt est une fonction économique, même s'il en existe d'autres, comme on le répète d'ailleurs depuis près de trente ans.

Il a ensuite évoqué les mesures prises pour faire face aux dégâts entraînés par les tempêtes dont il a noté que si elles avaient sûrement été fort appréciées par les scieurs et l'ensemble de ceux qui, dans la filière, bénéficient de ces aides à l'abattage , au transport et au stockage, il n'en était pas de même pour les petits propriétaires. M. Jean Proriol a ainsi évoqué le cas d'un petit propriétaire du canton de La Chaise-Dieu en Haute-Loire qui, ayant subi plus de 600 000 francs de dégâts ne se voit proposer qu'une exonération fiscale de 1 400 francs. Il a alerté le ministre sur la nécessité de faire davantage en faveur des victimes.

M. Jean Proriol a ensuite regretté que nos forêts, y compris les forêts domaniales compte tenu des habitudes de l'ONF, soient sous-exploitées. Il a jugé que des éclaircies étaient nécessaires au développement harmonieux de la forêt et qu'elles étaient insuffisantes faute d'incitations de l'aval de la filière. De ce point de vue, le projet de loi qui n'incite pas à l'utilisation de bois lui est apparu insuffisant, en particulier en regard des expériences de primes à l'utilisation du bois conduites par certains conseils régionaux notamment en Auvergne.

En ce qui concerne la gestion de la forêt privée, M. Jean Proriol a estimé que l'abaissement du seuil de superficie au-delà duquel les forêts sont soumises à un plan de simple gestion était une bonne mesure mais que sa mise en _uvre risquait d'être difficile compte tenu du manque de moyens des centres régionaux de la propriété forestière actuellement sollicités de toute part et qui ont dû recruter sous contrat à durée déterminée des personnels supplémentaires.

Il a également évoqué l'article 34 du projet de loi organisant la profession d'expert foncier et agricole et d'expert forestier, question sur laquelle il a indiqué avoir eu l'occasion de travailler dans le cadre du groupe d'études sur la forêt. M. Jean Proriol s'est étonné de constater que cet article dans sa rédaction issue du Conseil d'Etat propose l'institution d'un Conseil national de l'expertise foncière, agricole et forestière présidé par un membre de cette juridiction. Il a rappelé que cela était tout à fait inhabituel, une étude réalisée à sa demande sur cette question par les services de l'Assemblée mettant en évidence qu'une telle disposition n'est pas prévue pour l'ordre des sages-femmes, ni pour celui des médecins, ni pour celui des masseurs-kinésithérapeutes, ni pour celui des dentistes - bien que dans ce cas un conseiller d'Etat puisse siéger avec voix délibérative au Conseil de l'Ordre sans le présider -, non plus que pour ceux des pharmaciens, des vétérinaires ou des architectes. M. Jean Proriol a donc souhaité savoir si le ministre serait prêt à accepter un amendement supprimant cette disposition.

Enfin, M. Jean Proriol a rappelé que la profession d'exploitant forestier ainsi que l'avaient illustré les récentes tempêtes, était parmi les plus difficiles exercées dans notre pays en particulier par sa pénibilité, par ses horaires, par les risques qu'elle entraîne et par sa rémunération compte tenu de la fréquente dépendance vis-à-vis de donneurs d'ordre. Il a jugé nécessaire d'encourager l'exercice de cette activité par des exonérations fiscales ou sociales spécifiques.

M. Jean-Claude Daniel a regretté que la technique du contrat territorial d'exploitation n'ait pu être utilisée à l'occasion de la tempête de décembre 1999 ; il a souhaité qu'une réflexion soit menée sur ce point dans l'éventualité d'une nouvelle crise.

M. Jean-Claude Daniel a souhaité également que l'on étudie concrètement les conditions de transport du bois en grumes et il a regretté que ce transport ait pu se révéler impossible, parce que des wagons n'avaient pas été fournis. Il a demandé également pourquoi l'on ne favorisait pas le transport du bois par voie d'eau et souhaité que l'on réduise le système de « maquignonnage ».

M. Marc Dumoulin a indiqué que la discussion du projet de loi d'orientation sur la forêt était particulièrement attendue. Il a souhaité que le statut des bûcherons des départements alsaciens et mosellan soit pris en compte et souligné que le problème du stockage du bois n'était pas correctement réglé. Il a demandé que soit prévue une véritable régulation du marché du bois.

En réponse aux intervenants, le ministre a apporté les précisions suivantes :

- s'agissant de l'exonération de la taxe foncière sur les propriétés non bâties applicable aux régénérations naturelles, le projet de loi prévoit l'existence d'un délai techniquement nécessaire pour permettre de constater la réalité de ces régénérations ;

- le choix de la formule des chartes de territoires forestiers prouve que l'Etat n'est pas seul concerné par les questions forestières ; il s'agit là d'un outil nouveau, à caractère contractuel, qui se distingue de la technique du « contrat territorial d'exploitation », puisqu'on est en présence d'une démarche collective ; ces chartes mobiliseront des financements d'origines diverses ;

- les dispositions retenues en matière de certification sont dérivées de la politique de gestion de la qualité ; différents systèmes sont à cet égard possibles ; quant à la question de l'institution d'un « plan épargne forêt », elle pourrait recevoir une solution à l'occasion du débat parlementaire ;

- le passage à un taux de TVA de 5,5 % sur la fourniture de bois de chaleur produite à partir de chauffage collectif est effectivement souhaitable, mais suppose la modification d'une directive communautaire ;

- le projet de loi n'oblige pas au dégagement des arbres tombés (les chablis) ; il prévoit simplement la possibilité d'y obliger en cas de risques avérés ;

- les propriétaires forestiers sont tous éligibles aux aides ; mais il est vrai que les centres régionaux de la propriété foncière n'ont pas la possibilité d'identifier les plus petits d'entre eux ;

- la mise en place du plan pour la forêt consécutif aux tempêtes de décembre 1999 s'est révélée complexe, s'agissant d'une situation inédite, pour laquelle l'on ne disposait pas d'une sorte de « mémoire » d'un plan précédent ; l'exemple de l'Allemagne, qui a défini un programme d'action complexe au bout de plusieurs mois en 1990 est à cet égard révélateur de la difficulté de l'exercice ;

- l'indemnisation des petits propriétaires est apparue elle aussi difficile, compte tenu du fait qu'il s'agissait d'indemniser des pertes de biens assurables non assurés et qu'il fallait éviter les risques de généralisation à d'autres situations ;

- l'Office national des forêts et ses agents ont joué un rôle remarquable à l'occasion de la tempête de décembre 1999, y compris en matière économique, en s'opposant aux tentatives de spéculations ;

- le fonds forestier national n'est pas supprimé, mais intégralement budgété et 190 millions de francs ont été ajoutés à cette ligne de crédits. Cette mesure marque donc un réengagement de l'Etat dans la politique forestière ;

- concernant les mesures prises après la tempête et notamment l'appel à des bûcherons professionnels, le Gouvernement a eu à prendre en compte plusieurs contraintes. En premier lieu, il a souhaité respecter l'impératif de sécurité, en prohibant le recours à des non professionnels. Cela a permis d'éviter des situations dangereuses, comme cela a été le cas en Allemagne où l'on a dénombré plus de cent décès dans les deux mois qui ont suivi la tempête. En second lieu, le Gouvernement a pris l'initiative de solliciter 4 500 chômeurs inscrits à l'Agence nationale pour l'emploi et ayant une expérience du travail forestier. Bien évidemment, les solidarités nationale et internationale ont également joué, ce qui a permis à la France de bénéficier, entre autres, du concours de Guyanais, de Belges ou de Canadiens. Tout recours au travail clandestin a été exclu. Si le Gouvernement a tenté de réagir au mieux, il a été conscient que la totalité des chablis ne pourrait être récupérée ;

- en matière d'utilisation du bois comme source d'énergie, l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie et le ministère de l'aménagement du territoire travaillent actuellement à un programme, dont une partie figure déjà dans les contrats de plan Etat-régions. S'agissant de la recherche l'article 35 du projet de loi y est consacré. Un groupe de travail réunissant l'Institut national de la recherche agronomique et le Centre national du machinisme agricole, du génie rural et des eaux et forêts a également été mis en place pour tirer les leçons de la tempête ;

- s'agissant de la politique touristique, le chapitre III du titre Ier du projet de loi traite de l'accueil du public en forêt, en mettant l'accent sur le rôle des collectivités locales et notamment des communes ;

- la taxe parafiscale qui alimentait le fonds forestier national a été supprimée. La création d'éventuelles autres taxes n'a donné lieu, pour l'instant, à aucun arbitrage ;

- le statut des personnes intervenant en milieu forestier est traité à l'article 6 du projet de loi et en constitue un élément important ;

- l'orientation de l'enseignement en écoles d'architecture vers le matériau bois constitue un réel problème auquel travaille le Gouvernement ;

- concernant la tempête elle-même, on constate que les parcelles ont été touchées de manière très différente les unes des autres, l'ampleur des dégâts dépendant à la fois des essences, de l'âge des arbres et des couloirs de vent, les tornades ayant été très localisées. La tempête a constitué un phénomène exceptionnel, qui n'avait pas été observé depuis au moins un siècle. Le ministre a déclaré, à titre personnel, qu'il ne croyait pas à la thèse d'un réchauffement de la planète, mais plutôt au dérèglement du système climatique de l'hémisphère nord, en raison des activités humaines. C'est pourquoi, une accélération des phénomènes atypiques ne peut être exclue. Il convient donc de tirer les leçons de la tempête en matière de prévisions météorologiques ;

- la réglementation des boisements pour prendre en compte les aspects paysagers est traitée à l'article 14 du projet de loi. Cette mesure y a été insérée après la tempête. Pour autant, il faut éviter tout jugement « à l'emporte-pièce » selon lequel il y aurait les « bons feuillus » et les « mauvais résineux ». La France est d'ailleurs boisée en majorité de feuillus ;

- les fonctions économique, sociale et environnementale de la forêt sont liées. Il est bénéfique à l'environnement d'exploiter une forêt, d'y couper des arbres âgés pour les remplacer par des arbres jeunes. Il n'y a donc pas lieu d'opposer l'exploitation forestière, activité économique et les préoccupations environnementales ;

- l'organisation de la profession d'expert forestier est prévue à l'article 34 du projet de loi. Il ne s'agit pas d'un ordre, d'une part, parce que le Conseil d'Etat a estimé que la démographie de cette profession n'était pas suffisante, d'autre part, parce que le Gouvernement n'était pas attaché à une telle forme juridique. La réflexion menée au sein du Conseil d'Etat a conclu à un système inspiré de celui qui existe dans le secteur automobile. Le Gouvernement reste ouvert à toute proposition d'amendements sur ce point ;

- les contrats territoriaux d'exploitation peuvent contenir des volets forestiers. Ils n'ont pas été facilement utilisés pour l'instant, mais les contrats territoriaux sont encore des instruments récents ;

- les premières aires de stockage bien équipées et largement subventionnées ont été inaugurées récemment.

M. André Lajoinie, président, s'est félicité en conclusion de la qualité des interventions des commissaires et des réponses de M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche ; il a estimé que cela augurait bien du travail que l'Assemblée nationale mènerait sur le projet de loi.

--____--


© Assemblée nationale