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APRES L’ART. 5
N° 20
ASSEMBLEE NATIONALE
4 mai 2005

DROIT COMMUNAUTAIRE DANS LE DOMAINE DE LA JUSTICE - (n° 2233)

AMENDEMENT N° 20

présenté par

M. BLESSIG, rapporteur
au nom de la commission des lois,
MM. BIGNON, LAGARDE, MARIANI et PANDRAUD

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ARTICLE ADDITIONNEL

APRES L’ARTICLE 5, insérer l’article suivant :

« I. — Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

« 1° Après l’article L. 2224-35, sont insérés une division, un intitulé et un article L. 2225-1 ainsi rédigés :

« Chapitre V

« Service public du stationnement payant

« Art. L. 2225-1. – En vue de contribuer à la mise en œuvre des politiques de déplacements urbains, les communes, leurs groupements et les syndicats mixtes sont compétents pour organiser le service public du stationnement payant sur voirie et dans les parcs publics de stationnement.

« Les délibérations prises à cet effet ne font pas obstacle à l’application de l’article L. 2213-6. »

« 2° L’article L. 2333-87 est ainsi rédigé :

« Art. L. 2333-87. –  I. – En application de l’article L. 2225-1, le conseil municipal ou l’organe délibérant d’un établissement public de coopération intercommunale ou d’un syndicat mixte compétent peut établir, sur des emplacements qu’il détermine, les redevances de stationnement sur voirie et les modalités de leur paiement.

« La délibération relative à ces redevances domaniales doit être compatible avec les dispositions du plan de déplacements urbains s’il existe. Elle établit le tarif applicable à chaque zone de stationnement payant. Le tarif peut n’être applicable qu’au delà d’une certaine durée limitée de stationnement ; il peut être progressif en fonction de la durée du stationnement ; il peut prévoir des montants de redevance spécifiques pour certaines catégories d’usagers, notamment les résidents.

« II. – La délibération mentionnée au I peut également établir une pénalité forfaitaire applicable en cas d’absence de paiement de la redevance de stationnement prévue au I ou d’insuffisance de paiement. Le montant de la pénalité forfaitaire est au plus égal à 50 fois le tarif horaire maximal de la redevance de la zone concernée sans pouvoir excéder le montant des contraventions de la 1re classe fixé par l’article 131-13 du code pénal.

« Le titulaire du certificat d’immatriculation du véhicule est tenu de payer la pénalité forfaitaire en cas d’absence de paiement de la redevance de stationnement ou d’insuffisance de paiement, dûment constatée par un agent du service de stationnement habilité par le maire, le président de l’établissement public de coopération intercommunale ou du syndicat mixte, par un agent de police municipale ou par un garde-champêtre ; ces agents sont compétents pour percevoir la redevance et la pénalité forfaitaire. Toutefois, le titulaire du certificat d’immatriculation est exonéré du paiement de la pénalité forfaitaire s’il établit qu’à la date des faits le véhicule était soustrait à sa garde en raison d’un vol ou toute autre cause de force majeure.

« À défaut de paiement immédiat, la pénalité forfaitaire est notifiée au redevable, qui dispose d’un délai de 30 jours pour acquitter son paiement. À défaut de paiement dans ce délai, un titre de recette peut être émis et adressé au comptable public compétent en vue du recouvrement du montant de cette redevance ; les montants mis en recouvrement sont majorés d’un supplément, représentatif des frais de recherche, de poursuite et de recouvrement. Dans le même cas, le maire, le président de l’établissement public de coopération intercommunale ou du syndicat mixte peut demander au représentant de l’État dans le département d’immatriculation du véhicule, de faire opposition à tout transfert de la carte grise. L’État détermine par arrêté un montant dû à chaque consultation du fichier national des immatriculations, payé par l’autorité compétente en matière de stationnement, il s’ajoute à la pénalité forfaitaire due par le titulaire du certificat d’immatriculation du véhicule.

« Les agents mentionnés au deuxième alinéa et l’autorité compétente en matière de stationnement peuvent obtenir des services de l’État communication de l’identité et de l’adresse du titulaire du certificat d’immatriculation de tout véhicule pour lequel a été constatée l’absence ou l’insuffisance de paiement de la redevance de stationnement, tels qu’ils figurent au fichier national des immatriculations.

« Par dérogation aux dispositions de l’article L. 121-1 du code de la route, le titulaire du certificat d’immatriculation du véhicule est responsable pécuniairement des infractions à la réglementation sur le stationnement des véhicules pour lesquelles seule une redevance majorée est encourue, à moins qu’il n’établisse l’existence d’un événement de force majeure ou qu’il ne fournisse des renseignements permettant d’identifier l’auteur véritable de l’infraction. Dans le cas où le véhicule était loué à un tiers, cette responsabilité pèse, avec les mêmes réserves, sur le locataire. Lorsque le certificat d’immatriculation du véhicule est établi au nom d’une personne morale, la responsabilité pécuniaire prévue au premier alinéa incombe, sous les mêmes réserves, au représentant légal de cette personne morale.

« Le comptable public peut recouvrer les condamnations pécuniaires par voie d’opposition administrative adressée aux personnes physiques ou morales qui détiennent des fonds pour le compte du débiteur ou qui ont une dette envers lui.

« III. – Le produit des redevances et pénalités forfaitaires de stationnement est affecté, selon le cas par la commune, l’établissement public de coopération intercommunale ou le syndicat mixte, au financement des dépenses d’investissement ou d’exploitation contribuant à l’amélioration des transports publics, d’actions d’organisation et d’aménagement du stationnement public, d’actions d’amélioration de la circulation routière, ou de mise en œuvre des autres actions prévues par le plan de déplacements urbains s’il existe.

« En cas de transfert de la compétence de stationnement payant sur voirie d’une ou plusieurs communes à un établissement public, en application des dispositions de l’article L. 5211-4–1, une convention peut être passée entre les communes intéressées et l’établissement public pour prévoir, les modalités de reversement par l’établissement public d’une partie du produit des redevances et pénalités forfaitaires du stationnement payant sur voirie à ces communes représentant l’ensemble des charges de la commune relatives au stationnement payant sur voirie et son contrôle.

« Les collectivités territoriales et les établissements publics compétents en matière de stationnement payant sur voirie peuvent assurer en commun la gestion de ce service.

« En cas de délégation de service public, la convention détermine la part du produit des redevances et des pénalités forfaitaires de stationnement qui doit être versée au budget de la commune ou de l’établissement public compétent ainsi que les modalités de ce versement.

« IV. – Dans l’hypothèse où le conseil municipal ou l’organe délibérant de l’établissement public de coopération intercommunale ou du syndicat mixte ne mettrait pas en œuvre la compétence prévue au II, la dite compétence est exercée par le préfet.

« Dans ce cas, les agents habilités pour constater l’absence ou l’insuffisance de paiement sont les agents de la police nationale ou de gendarmerie et le recouvrement est exercé par le comptable public compétent dans les conditions décrites au II.

« Dans ce cas, par exception au III, un quart du produit des pénalités forfaitaires est reversé au budget de l’État au titre des frais de gestion.

« Le montant de la pénalité forfaitaire est déterminé selon les modalités déterminées par le décret en Conseil d’État prévu au VI et ne peut être supérieur à 50 fois le tarif horaire maximal de la redevance de la zone concernée sans pouvoir excéder le montant des contraventions de la 2e classe fixé par l’article 131-13 du code pénal.

« En région Île-de-France, les autorités compétentes en matière de stationnement payant sur voirie reversent le quart du produit des redevances et pénalités forfaitaires perçues au syndicat des transports d’Île-de-France.

« V. – La juridiction de proximité statuant en matière civile est compétente pour tout recours relatif au recouvrement d’une redevance ou pénalité forfaitaire de stationnement. La contestation du titre de recette mentionné au II doit être formée dans le délai de quinze jours à compter de sa notification. L’action n’est recevable que si le demandeur justifie du paiement préalable du montant figurant dans le titre de recette à moins qu’il n’apparaisse au juge que ce paiement serait de nature à entraîner des conséquences d’une exceptionnelle gravité.

« La juridiction de proximité statue en dernier ressort lorsque le montant des redevances et redevances forfaitaires contestées est inférieur ou égal à 3 800 € et à charge d’appel au delà. »

« 3° Le dernier alinéa de l’article L. 2512-14 est complété par les mots « ou par les agents du service de stationnement habilités par le maire. »

« II. – Les dispositions ci-dessus sont applicables à compter du 1er janvier 2006 »

« III. – Les pertes de recettes pour l’État sont compensées, à due concurrence, par la création de taxes additionnelles aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

EXPOSÉ SOMMAIRE

Le présent amendement vise à permettre l’expérimentation et la mise en place d’un dispositif tendant à décentraliser et dépénaliser le stationnement payant sur voirie.

Le stationnement payant sur voirie est actuellement une compétence de la commune, mais la fixation du montant de l’amende pour non-paiement et son recouvrement relèvent de l’État. Il serait logique de donner à la collectivité une pleine compétence sur un instrument essentiel d’une politique volontariste des déplacements urbains.

Cette remarque conduit à suggérer de mettre en place pour les collectivités qui le souhaiteraient une procédure décentralisée. Pour cela, la dépénalisation est un préalable nécessaire. En effet, le maintien de la nature pénale des infractions de stationnement ne permettrait pas un traitement différencié sur le territoire. Il est donc proposé de transformer la sanction pénale en sanction administrative.

Dès lors peuvent se présenter deux cas de figure pour les collectivités :

1°) Soit la collectivité opte pour la procédure décentralisée

Dans ce système, stationner sur un emplacement autorisé donnera lieu au paiement d’une redevance domaniale. L’ensemble des mesures relatives au stationnement payant sera alors de la compétence des communes, établissements publics de coopération intercommunale ou syndicats mixtes. Cette compétence comprendra notamment la fixation du prix du stationnement et celle du montant de la pénalité forfaitaire due par l’utilisateur en situation d’absence ou d’insuffisance de paiement. À défaut de paiement de cette pénalité, le service en charge du stationnement pourra demander aux services de l’État les noms et adresses du titulaire du certificat d’immatriculation du véhicule pour la lui notifier. En cas de non-paiement dans un délai de 30 jours, la redevance forfaitaire, majorée des frais de recherche, de poursuite et de recouvrement, sera mise en recouvrement par le comptable public. Une éventuelle réclamation pourra être portée devant le juge de proximité au civil (et non plus devant le tribunal de police au pénal). Afin d’éviter l’engorgement de la juridiction civile et les manœuvres dilatoires des récalcitrants, l’introduction de cette requête sera subordonnée au paiement préalable du montant notifié.

Le produit des redevances et pénalités de stationnement reviendra directement aux collectivités compétentes et sera affecté, selon le cas, par la commune, l’établissement public de coopération intercommunale ou le syndicat mixte, au financement des dépenses d’investissement ou d’exploitation contribuant à l’amélioration des transports publics, d’actions d’organisation et d’aménagement du stationnement public, ou de mise en œuvre des autres actions prévues par le plan de déplacements urbains s’il existe. Bien entendu la commune pourra au préalable déduire le coût représenté par l’ensemble des charges lui revenant touchant au stationnement payant sur voirie et son contrôle.

En cas de transfert de la compétence de stationnement payant sur voirie d’une ou plusieurs communes à un établissement public, une convention peut être passée pour fixer les modalités de financement des frais restant à la charge de la commune. En cas de délégation de service public, la collectivité pourra imposer à son délégataire de reverser une partie du produit des redevances de stationnement au budget de la commune ou de l’établissement public compétent, selon des modalités à définir par convention.

2°) Soit la collectivité souhaite maintenir la procédure centralisée

Dans ce cas, la collectivité continue de définir comme aujourd’hui les tarifs de stationnement et de percevoir le produit de la redevance. La nouvelle compétence liée à la définition de la pénalité est exercée par le Préfet. Les services de l’État (police, gendarmerie et comptable public) continuent d’assurer le constat de l’insuffisance ou de l’absence de paiement, et le recouvrement. L’État peut percevoir des frais de gestion proportionnels aux pénalités.

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Soutenir que ce dispositif serait une porte ouverte à une augmentation par rapport au montant des actuelles amendes de stationnement est erroné. Au contraire, bien des collectivités auront intérêt à fixer une redevance majorée faible mais dont elles assureront effectivement le recouvrement. Ainsi, tout en n’augmentant pas le montant des amendes actuelles, il sera possible de dissuader effectivement de frauder et d’accroître la ressource perçue.

L’adoption d’une telle proposition constituerait un geste clair de la volonté de soutenir la politique de transports collectifs et d’aménagement urbain menée par les agglomérations. L’État ne soutenant plus directement les investissements des autorités organisatrices en matière de transport collectif urbain, nous aurions là une ressource nouvelle pérenne et à même de leur permettre de conduire une politique volontariste. C’est pourquoi, une réforme par l’État du système de recouvrement des amendes ne correspondrait pas à une vraie solution. Il s’agit de donner aux collectivités la maîtrise de leur politique de déplacements (d’où la décentralisation), de leur permettre de concéder et d’avoir des ressources nouvelles pour les transports collectifs (d’où la dépénalisation).