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ART. 11
° N° 291 (4ème rect.)
ASSEMBLEE NATIONALE
30 novembre 2005

PARCS NATIONAUX - (n° 2347)

Commission
 
Gouvernement
 

AMENDEMENT N° 291 (4ème rect.)

présenté par

le Gouvernement

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ARTICLE 11

Rédiger ainsi cet article :

« Le titre III du livre III du code de l’environnement est complété par un chapitre IV ainsi rédigé :

« Chapitre IV

« Agence des aires marines protégées et Parcs naturels marins

« Section I

« Agence des aires marines protégées

« Art. L. 334-1. – I. – Il est créé un établissement public national à caractère administratif dénommé « Agence des aires marines protégées ».

« II. – L’agence anime le réseau des aires marines protégées françaises et contribue à la participation de la France à la constitution et à la gestion des aires marines protégées décidées au niveau international.

« A cette fin elle peut se voir confier la gestion directe d’aires marines protégées, elle apporte son appui technique administratif et scientifique aux autres gestionnaires d’aires marines protégées, et suscite des projets d’aires marines protégées afin de constituer un réseau cohérent. Elle contribue ainsi à la mise en œuvre des engagements internationaux de la France en faveur de la diversité biologique marine et côtière.

« Elle peut en outre être chargée par l’Etat de toutes actions en rapport avec ses missions statutaires.

« III. – Les aires marines protégées visées au présent article comprennent :

« 1° Les parcs nationaux ayant une partie maritime, prévus à l’article L. 331-1 ;

« 2° Les réserves naturelles ayant une partie maritime, prévues à l’article L. 332-1 ;

« 3° Les arrêtés de biotopes ayant une partie maritime, prévus à l’article L. 411-1 ;

« 4° Les parcs naturels marins prévus à l’article L. 334-3 ;

« 5° Les sites Natura 2000 ayant une partie maritime, prévus à l’article L. 414-1 ;

« 6° Le domaine public maritime affecté ou remis en gestion au Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres.

« Le décret en conseil d’Etat mentionné à l’article L. 334-8 fixe la liste des autres aires marines protégées concernées par l’agence. »

« Art. L. 334-2. – I. – L’agence est administrée par un conseil d’administration composé de représentants de l’Etat pour deux cinquièmes au moins, de représentants des gestionnaires d’aires marines protégées ou de leurs conseils ou comités de gestion, de collectivités territoriales intéressées et de leurs groupements compétents, des organisations représentatives des professionnels, d’organisations des usagers de la mer, du Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres, d’associations de protection de l’environnement, des établissements publics de l’Etat compétents pour la recherche en mer, et du personnel, ainsi que de personnalités qualifiées.

« Des agents de la fonction publique territoriale peuvent être mis à disposition de l’agence.

« II. – Les ressources de l’agence sont notamment constituées par des contributions de l’Etat et, le cas échéant, des gestionnaires d’aires marines protégées, et des collectivités territoriales, par toutes subventions publiques ou privées et, s’il y a lieu, par des redevances pour service rendu et le produit de taxes. »

Section II

« Parcs naturels marins

« Art. L. 334-3. – Des parcs naturels marins peuvent être créés dans les eaux placées sous la souveraineté de l’Etat et, le cas échéant, en continuité avec celles-ci, dans les eaux placées sous sa juridiction, ainsi que sur les espaces appartenant au domaine public maritime, pour contribuer à la connaissance du patrimoine marin ainsi qu’à la protection et au développement durable du milieu marin. La création de parcs naturels marins situés en partie dans les eaux sous juridiction de l’Etat tient compte des dispositions de la convention des Nations unies sur le droit de la mer du 10 décembre 1982, notamment de sa partie XII.

« Le décret  créant un parc naturel marin est pris après enquête publique. Il fixe les limites du parc, la composition du conseil de gestion et arrête les orientations de gestion du parc naturel marin. »

« Art. L. 334-4. – I. – La gestion de cette catégorie d’aires marines protégées est assurée par l’Agence des aires marines protégées prévue à l’article L. 334-1.

« II. – Un conseil de gestion est constitué pour chaque parc. Il est composé de représentants locaux de l’Etat, de représentants des collectivités territoriales intéressées et de leurs groupements compétents, d’organisations représentatives des professionnels, d’organisations des usagers de la mer, d’associations de protection de l’environnement et de personnalités qualifiées.

« Le conseil de gestion se prononce sur les questions intéressant le parc. Il élabore le plan de gestion du parc. Il définit les conditions d’une assistance technique aux projets des collectivités territoriales qui veulent s’y associer. Il peut recevoir délégation du conseil d’administration de l’agence. »

« Art. L. 334-5. – Le plan de gestion détermine les mesures de protection, de connaissance, de mise en valeur et de développement durable à mettre en œuvre dans le parc naturel marin.  Il comporte un document graphique indiquant les différentes zones du parc et leur vocation. Il est mis en révision tous les quinze ans au moins.

« L’Agence des aires marines protégées peut attribuer des subventions destinées au financement de projets concourant à la mise en œuvre du plan de gestion.

« L'Etat, les collectivités territoriales et les organismes qui s’associent à la gestion du parc naturel marin veillent à la cohérence de leurs actions et des moyens qu'ils y consacrent avec les orientations et les mesures du plan de gestion.

« Lorsqu’une activité est susceptible d’altérer de façon notable l’espace maritime d’un parc naturel marin, l’autorisation à laquelle elle est soumise ne peut être délivrée que sur avis conforme de l’Agence des aires marines protégées ou, sur délégation, du conseil de gestion. Cette procédure n’est pas applicable aux activités répondant aux besoins de la défense nationale, de l’ordre public, de la sécurité maritime et de la lutte contre la pollution. »

« Art. L. 334-6. – I. – Sans préjudice des compétences des officiers et agents de police judiciaire et des autres agents spécialement habilités, peuvent être recherchées et constatées dans le parc naturel marin par les agents de l’établissement public chargé des parcs naturels marins, commissionnés à cet effet par l’autorité administrative et assermentés :

« 1º Les infractions à la police des eaux et rades définies à l'article 63 du code disciplinaire et pénal de la marine marchande ;

« 2º Les infractions à la police des rejets définies aux articles L. 218-10 à L. 218-19, L. 218-22 et à l'article L. 218-73 du présent code ;

« 3° Les infractions à la police de la signalisation maritime définie aux articles L. 341-1, L. 341-2 du code des ports maritimes et aux dispositions prises pour leur application ; 

« 4º Les infractions à la police des biens culturels maritimes définies aux articles L. 544-5 à L. 544-7 du code du patrimoine ;

« 5º Les infractions aux dispositions du décret du 9 janvier 1852 sur l'exercice de la pêche maritime et de ses textes d’application.  En tant qu'agents chargés de la police des pêches, les agents mentionnés au premier alinéa disposent pour effectuer les contrôles des prérogatives prévues à l'article 14 du décret du 9 janvier 1852 précité ;

« 6° Les infractions mentionnées à l’article L. 322-10-1 du présent code relatif à l’accès aux espaces gérés par le Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres ;

« 7° Les infractions mentionnées aux articles L. 332-20 et L. 332-22 relatifs aux réserves naturelles ;

« 8° Les infractions mentionnées à l’article L. 362-5 relatif à la circulation des véhicules terrestres à moteur dans les espaces naturels ;

« 9° Les infractions mentionnées à l’article L. 415-1 relatif à la protection de la faune et de la flore.

« II. – Les procès-verbaux dressés par ces agents font foi jusqu'à preuve contraire. Ils sont adressés aux autorités administratives ou judiciaires selon les procédures prévues pour les infractions constatées. »

« Art. L. 334-7. – Sans préjudice des sanctions pénales encourues, toute atteinte à l’intégrité et à la conservation du domaine public inclus dans le périmètre d’un parc naturel marin, ou de nature à compromettre son usage, constitue une contravention de grande voirie constatée, réprimée et poursuivie par voie administrative.

« Elle est constatée par les agents visés à l’article L. 334-6, sans préjudice des compétences des officiers et agents de police judiciaire et des autres agents spécialement habilités.

« Les personnes condamnées sont tenues de réparer ces atteintes et encourent les amendes prévues pour les contraventions de cinquième classe et les cas de récidive. Elles supportent les frais des mesures provisoires et urgentes que le conseil de gestion a pu être amené à prendre pour faire cesser le trouble apporté au domaine public par les infractions constatées.

« Le directeur de l’Agence des parcs naturels marins et, sur délégation, ses représentants auprès des conseils de gestion, ont compétence pour saisir le tribunal administratif, dans les conditions et suivant les procédures prévues par le code de justice administrative. »

« Art. L. 334-8. – Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application du présent chapitre. »

EXPOSÉ SOMMAIRE

Le Gouvernement a entendu les remarques et critiques de la commission des affaires économiques et de l’environnement, ainsi que les propositions très constructives de M. BIGNON concernant le besoin d’une ambition plus grande du projet et de mettre en perspective l’outil « parc naturel marins » au sein d’une politique des aires marines protégées. Dans son discours à l’occasion des 30 ans du Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres, en juillet dernier, le Président de la République a en effet rappelé les enjeux maritimes de la France et a situé la création des parcs naturels marins dans le cadre d’une ambition maritime renouvelée.

La France a l’impérieuse responsabilité, sociale et économique pour les générations présentes et à venir, de participer à l’organisation d’un réseau mondial d’aires marines protégées propres à préserver les ressources de la mer. Cette responsabilité, sociale et économique, a été rappelée le mois dernier par la Commission européenne dans sa proposition de directive sur la stratégie marine.

La nouvelle proposition du Gouvernement, inspirée par M. Bignon, vise à appliquer la Charte de l’environnement, en mer et à donner une plus grande ambition maritime à cette loi à la hauteur des obligations internationales de la France. Il s’agit d’une évolution raisonnée et responsable, d’une synergie et d’une impulsion pour une véritable politique française des aires marines protégées, faisant appel à une large gamme d’acteurs et de formes juridiques, sans s’interdire d’innover comme il est proposé de le faire pour les parcs naturels marins.

Le présent amendement vise à proposer un outil capable de valoriser le travail déjà fait sous des formes juridiques assez diverses mais prioritairement réglementaires, de le capitaliser notamment dans ses aspects techniques et scientifiques, de trouver de nouvelles solutions pour de vastes espaces marins riches en biodiversité, essentiellement côtiers mais pouvant aller par continuité dans les eaux sous juridiction française, où se manifeste de nombreux usages, et d’aller ainsi de l’avant pour assurer une crédibilité internationale à la France.

La création de cet établissement doit permettre également de réaliser des économies d’échelle et de mutualiser des moyens.

La France doit innover dans l’esprit qu’elle a su développer par ailleurs de façon originale en défendant les logiques de partenariat et de contrat contre le tout réglementaire qui tente parfois les instances internationales et communautaires. Prendre le parti d’une grande ambition sur les aires marines protégées redonnerait à la France de l’audience dans un débat actuellement dominé par les pays du nord de l’Europe avec lesquels la France ne partage pas nécessairement une communauté d’analyse et de vision.

Cette proposition de réécriture de l’article 11 répond à la demande de la commission qui appelait de ses vœux un souffle et une ambition qui lui semblaient se dégager insuffisamment du projet du gouvernement. Elle dessine un vaste projet fédérateur où tous les partenaires passionnés par la mer et sa protection peuvent se retrouver. Elle remet en perspective la contribution des parcs naturels marins.

En ce qui concerne le champ d’application potentiel des parcs naturels marins, quelques précisions doivent ici être apportées. La rédaction proposée distingue, conformément au vocabulaire international, les eaux placées sous la « souveraineté » de l'Etat côtier, à savoir les eaux intérieures et la mer territoriale, de celles placées sous sa « juridiction », eaux qui ne s'étendent pas au-delà de 200 milles marins des lignes de base à partir desquelles est mesurée la largeur de la mer territoriale. La référence au domaine public maritime est par ailleurs modifiée car la rédaction du projet de loi se révélait ambiguë quant au classement le domaine public correspondant à l’estran, c’est-à-dire à la zone de balancement des marées, alors que cette ambition était clairement affichée par le gouvernement dans l’exposé des motifs.

Espace sous juridiction nationale, la zone économique exclusive (Z.E.E), définies par la loi n° 76-655 du 16 juillet 1976 modifiée relative à la zone économique et à la zone de protection écologique au large des côtes du territoire de la République, confère à la France des droits souverains aux fins d’exploration et d’exploitation, de conservation et de gestion des ressources naturelles, biologiques ou non, de la colonne d’eau, des fonds marins et de leur sous-sol. Ces droits souverains trouvent également à s’appliquer pour toute activité se déroulant dans la Z.E.E et qui a une finalité économique.

Au nombre des cas dans lesquels la convention reconnaît une juridiction (capacité à entreprendre des actions en tenant dûment compte des conditions posées par la convention), figure la protection et la préservation du milieu marin. La convention des Nations unies sur le droit de la mer, signée à Montego Bay le 10 décembre 1982 (en vigueur en France depuis 1996, désignée parfois par son acronyme anglo-saxon U.N.C.L.O.S.), consacre une partie entière à cette question, la partie XII à laquelle il convient de se référer dès lors qu’un Etat entend légiférer dans ce domaine et que son action touche à l’équilibre droits et des devoirs que constitue la Z.E.E.

La création d’un parc naturel marin en partie sur la Z.E.E (ou en partie sur la Zone de Protection Ecologique, son équivalent en mer Méditerranée) qui contribuerait, ainsi que le dit le futur article L. 334-3 à la protection du milieu marin, correspond bien à un objectif qui entre dans la juridiction de l’Etat côtier. La mise en œuvre d’une telle action, si elle n’est pas proscrite par la Convention, est cependant encadrée par ses dispositions notamment la section 5 de la partie XII qui s’intitule explicitement « réglementation internationale et droit interne visant à prévenir, réduire et maîtriser la pollution du milieu marin ».