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APRES L'ART. 7 SEPTIES
N° 412
ASSEMBLEE NATIONALE
13 janvier 2006

ENGAGEMENT NATIONAL POUR LE LOGEMENT - (n° 2709 rectifié)

Commission
 
Gouvernement
 

AMENDEMENT N° 412

présenté par

Mme Guigou, MM. Le Bouillonnec, Brottes, Mmes Lepetit, Gautier, Génisson, Saugues,

M. Dumont, Mme Darciaux, MM. Bono, Ducout, Mme Lebranchu, MM. Cohen, Boisserie,

Mmes Lignières-Cassou, Robin-Rodrigo
et les membres du groupe Socialiste

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ARTICLE ADDITIONNEL

APRES L'ARTICLE 7 SEPTIES, insérer l'article suivant :

« Il est créé un permis de louer.

Ce permis sera délivré par la commune après déclaration de la part du propriétaire bailleur de la conformité du logement proposé aux normes de décences définies par le décret n° 2002-120 du 31/01/2002 relatif aux caractéristiques du logement décent. Le logement devra en outre assurer l’inviolabilité de la vie privée des occupants (serrures aux portes et boîtes aux lettres), et comporter un système de chauffage adapté et conforme aux normes en vigueur.

Ce permis sera exigé préalablement à toute mise en location par un bailleur privé (hors logement social) d’un logement de moins de 28 m2, ou faisant partie d’un immeuble ancien ou non initialement prévu pour l’habitation.

Un décret déterminera les normes nécessaires et leur application dans les différents types d’habitats.

Ce permis ouvrira en outre le droit au versement en tiers payant des allocations de la CAF au bailleur.

Sur décision du maire de la commune, les Services Communaux d’Hygiène et de Santé (SCHS) pourront réaliser des visites pour vérifier la conformité effective du logement aux normes définies pour le permis de louer. Tout propriétaire bailleur qui se rendra coupable de fausse déclaration dans l’attribution du permis de louer, ou qui aura mis en location un logement visé par l’alinéa 3 de la présente loi sans permis de louer sera passible d’une amende de 500 à 5 000 euros pour une première infraction, et de 5 000 à 50 000 euros en cas de récidive dans les cinq années suivant une première condamnation. »

EXPOSÉ SOMMAIRE

La pénurie de logements sociaux permet aux « marchands de sommeil » de prospérer. Parce qu’il n’y a pas assez de logements abordables, de nombreux propriétaires louent à des tarifs scandaleux des habitations insalubres et dégradées, voire des garages ou d’autre bâtiments inadaptés, qui n’ont pas été conçus pour être des logements.

Il ne suffit pas, pour prendre en compte ce problème, de compter sur la création de logements sociaux, même si la construction de logements sociaux doit être notre première priorité. Il faut aussi comprendre qu’une partie du domaine privé représente un logement social de fait. Nous devons impérativement trouver un moyen de garantir un seuil minimal de décence à ceux qui louent dans le privé, et ne pas nous contenter de la situation actuelle, aux sanctions lentes et inefficaces.

Le décret de janvier 2002 sur le logement indécent, pris dans le cadre de l’application de la loi SRU, et qui s’attaquait à ce problème, n’a cependant pas donné tous les résultats espérés. Fort peu d’actions ont abouti et le problème perdure car c’est sur le locataire que porte la responsabilité de prévenir et de dénoncer les dégradations auprès de son propriétaire. Mais les locataires de marchands de sommeil connaissent généralement mal leurs droits, et ne sont parfois pas à même de les faire valoir. La crainte de se retrouver complètement privés de logement les rend parfois complices involontaires de leur propriétaire indélicat. La situation est trop inégalitaire pour qu’ils puissent faire valoir leurs droits. Il faut donc renverser la charge de la preuve : c’est au propriétaire bailleur de prouver que son logement respecte les normes.

Pour cela, il est nécessaire d’instaurer un permis de louer.

La Belgique a déjà décidé d’instaurer ce permis de louer ou « permis de location », et le système semble bien fonctionner. Nous pouvons nous en inspirer pour proposer l’instauration d’un permis de louer pour certains immeubles ou logements, définis par leur taille, leur ancienneté ou leur usage initial. Pour les immeubles visés par le dispositif, les propriétaires devront déclarer la conformité des logements qu’ils mettent en location aux normes de décence: normes de surface, d’équipement, de sécurité et de salubrité, notamment celles définies par le décret du 31 janvier 2002. Ces normes de décence doivent en outre inclure le chauffage, qui est à l’origine de beaucoup d’accidents et de maladies, et la protection de la vie privée (portes, boîtes aux lettres.) D’autres éléments pourraient s’avérer nécessaires : un décret d’application permettra d’adapter ces normes aux réalités du terrain. Le décret permettrait en outre de définir avec plus de souplesse des éléments tels que l’ancienneté des bâtiments ou leur situation géographique, pour mieux prendre en compte les spécificités du logement rural. Sur la base de cette déclaration, les services municipaux délivreront un permis de louer, préalable à toute mise en location. Sur proposition du maire de la commune, des visites des Services Communaux d’Hygiène et de Sécurité vérifieront si le logement est effectivement conforme aux déclarations du propriétaire ; et les sanctions en cas d’infraction doivent être lourdes, particulièrement pour la récidive. Pour éviter que l’instauration de ce permis ne renchérisse les loyers, ce permis doit ouvrir le droit au versement en tiers payant des allocations de la CAF.

Nous avons de telles normes pour les constructions, nous avons des règles très détaillées pour l’établissement des visas et le regroupement familial. Le logement locatif mérite le même contrôle, car le logement est un bien de première nécessité, qui conditionne la réalisation de droits fondamentaux comme le droit à la santé, ou le droit à un emploi.

Il ne s’agit pas, par ce permis, de soupçonner les propriétaires en général d’être des marchands de sommeil. La plupart respectent les règles de décence et font faire les travaux qui s’imposent dès qu’ils en voient la nécessité. D’autres encore n’ont pas les moyens de faire les travaux nécessaires, et ceux-là il faut pouvoir les aider. Mais précisément le permis de louer, par la déclaration préalable qu’il implique pour déclencher la procédure, permet de manifester cette bonne foi. Ce n’est qu’ainsi que nous pourrons réellement définir une politique volontariste de lutte contre le logement indécent.