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APRÈS L'ART. 3
N° 3 Rect.
ASSEMBLÉE NATIONALE
24 janvier 2006

ÉGALITÉ DES CHANCES - (n° 2787)

Commission
 
Gouvernement
 

AMENDEMENT N° 3 Rect.

présenté par

le Gouvernement

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ARTICLE ADDITIONNEL

APRÈS L'ARTICLE 3, insérer l'article suivant :

I. – Les employeurs qui entrent dans le champ du premier alinéa de l’article L. 131-2 du code du travail peuvent conclure, pour toute nouvelle embauche d’un jeune âgé de moins de 26 ans, un contrat de travail dénommé « contrat première embauche ».

L’effectif de l’entreprise doit être supérieur à vingt salariés dans les conditions définies par l’article L. 620-10 du code du travail.

Un tel contrat ne peut être conclu pour pourvoir les emplois mentionnés au 3° de l’article L. 122-1-1 du code du travail.

II. – Le contrat de travail défini au I est conclu sans détermination de durée. Il est établi par écrit.

Ce contrat est soumis aux dispositions du code du travail, à l’exception, pendant les deux premières années courant à compter de la date de sa conclusion, de celles des articles L. 122-4 à L. 122-11, L. 122-13 à L. 122-14-14 et L. 321-1 à L. 321-17 de ce code.

La durée des contrats de travail, y compris des missions de travail temporaire, précédemment conclus par le salarié avec l’entreprise dans les deux années précédant la signature du  contrat première embauche, ainsi que la durée des stages réalisés au sein de l’entreprise sont prises en compte dans le calcul de la période prévue à l’alinéa précédent.

Ce contrat peut être rompu à l’initiative de l’employeur ou du salarié, pendant les deux premières années courant à compter de la date de sa conclusion, dans les conditions suivantes :

1° La rupture est notifiée par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ;

2° Lorsque l’employeur est à l’initiative de la rupture et sauf faute grave ou force majeure, la présentation de la lettre recommandée fait courir, dès lors que le salarié est présent depuis au moins un mois dans l’entreprise, un préavis. La durée de celui-ci est fixée à deux semaines, dans le cas d’un contrat conclu depuis moins de six mois à la date de la présentation de la lettre recommandée, et à un mois dans le cas d’un contrat conclu depuis au moins six mois ;

3° Lorsqu’il est à l’initiative de la rupture, sauf faute grave, l’employeur verse au salarié, au plus tard à l’expiration du préavis, outre les sommes restant dues au titre des salaires et de l’indemnité de congés payés, une indemnité égale à 8 % du montant total de la rémunération brute due au salarié depuis la conclusion du contrat. Le régime fiscal et social de cette indemnité est celui applicable à l’indemnité mentionnée à l’article L. 122-9 du code du travail. À cette indemnité versée au salarié s’ajoute une contribution de l’employeur, égale à 2 % de la rémunération brute due au salarié depuis le début du contrat. Cette contribution est recouvrée par les organismes mentionnés au premier alinéa de l’article L. 351-21 du code du travail conformément aux dispositions des articles L. 351-6 et L. 351-6-1 du même code. Elle est destinée à financer les actions d’accompagnement renforcé du salarié par le service public de l’emploi en vue de son retour à l’emploi. Elle n’est pas considérée comme un élément de salaire au sens de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale.

Toute contestation portant sur la rupture se prescrit par douze mois à compter de l’envoi de la lettre recommandée prévue au 1°. Ce délai n’est opposable aux salariés que s’il en a été fait mention dans cette lettre.

Par exception aux dispositions du deuxième alinéa, les ruptures du contrat de travail envisagées à l’initiative de l’employeur sont prises en compte pour la mise en œuvre des procédures d’information et de consultation régissant les procédures de licenciement économique collectif prévues au chapitre Ier du titre II du livre III du code du travail.

La rupture du contrat doit respecter les dispositions législatives et réglementaires qui assurent une protection particulière aux salariés titulaires d’un mandat syndical ou représentatif.

En cas de rupture du contrat, à l’initiative de l’employeur, au cours des deux premières années, il ne peut être conclu de nouveau contrat première embauche entre le même employeur et le même salarié avant que ne soit écoulé un délai de trois mois à compter du jour de la rupture du précédent contrat.

Le salarié titulaire d’un contrat première embauche peut bénéficier du congé de formation dans les conditions fixées par les articles L. 931-13 à L. 931-20-1 du code du travail.

Le salarié titulaire d’un contrat première embauche peut bénéficier du droit individuel à la formation prévu à l’article L. 933-1 du code du travail prorata temporis, à l’issue d’un délai d’un mois à compter de la date d’effet du contrat. L’organisme paritaire agréé mentionné à l’article L. 931-16 de ce code assure la prise en charge des frais de formation, de transport et d’hébergement ainsi que de l’allocation de formation due à ce salarié.

L’employeur est tenu d’informer le salarié, lors de la signature du contrat, des dispositifs interprofessionnels lui accordant une garantie et une caution de loyer pour la recherche éventuelle de son logement.

III. – Les travailleurs involontairement privés d’emploi, aptes au travail et recherchant un emploi au sens de l’article L. 351-1 du code du travail, ayant été titulaires du contrat mentionné au I pendant une durée minimale de quatre mois d’activité ont droit, dès lors qu’ils ne justifient pas de références de travail suffisantes pour être indemnisés en application de l’article L. 351-3 du code du travail, à une allocation forfaitaire versée pendant deux mois.

Le montant de l’allocation forfaitaire ainsi que le délai après l’expiration duquel l’inscription comme demandeur d’emploi est réputée tardive pour l’ouverture du droit à l’allocation, les délais de demande et d’action en paiement, le délai au terme duquel le reliquat des droits antérieurement constitués ne peut plus être utilisé et le montant au-dessous duquel l’allocation indûment versée ne donne pas lieu à répétition sont ceux applicables au contrat nouvelles embauches.

Les dispositions de la section 4 du chapitre Ier du titre V du livre III du code du travail sont applicables à l’allocation forfaitaire.

Les dispositions de l’article L. 131-2, du 2° du I de l’article L. 242-13 et des articles L. 311-5 et L. 351-3 du code de la sécurité sociale ainsi que celles des articles 79 et 82 du code général des impôts sont applicables à l’allocation forfaitaire.

Cette allocation est à la charge du fonds de solidarité créé par la loi n° 82-939 du 4 novembre 1982 relative à la contribution exceptionnelle de solidarité en faveur des travailleurs privés d’emploi.

L’État peut, par convention, confier aux organismes mentionnés à l’article L. 351-21 du code du travail ou à tout organisme de droit privé la gestion de l’allocation forfaitaire.

Un accord conclu dans les conditions prévues à l’article L. 351-8 du code du travail définit les conditions et les modalités selon lesquelles les salariés embauchés sous le régime du contrat institué au I peuvent bénéficier de la convention de reclassement personnalisé prévue au I de l’article L. 321-4-2 du code du travail. À défaut d’accord ou d’agrément de cet accord, ces conditions et modalités sont fixées par décret en Conseil d’État.

EXPOSÉ SOMMAIRE

Pour traduire la priorité absolue que constitue l’emploi des jeunes pour le Gouvernement, le présent amendement institue un « contrat première embauche » qui est spécifiquement réservé aux jeunes de moins de vingt-six ans embauchés par des entreprises de plus de vingt salariés.

Le constat montre que les différentes politiques de l’emploi qui ont été menées jusqu’à ce jour sont restées de peu d’effet sur une précarité des jeunes générations qui n’est pas acceptable. Le taux de chômage des jeunes est de 23 % contre 9,6 % pour l’ensemble de la population, le taux s’élevant à 39 % pour les jeunes sans qualification. À la sortie de leurs études, il leur faut parfois attendre huit à onze ans avant de trouver un emploi stable. Ce n’est en effet qu’à l’âge moyen de 33 ans que le taux des jeunes bénéficiant d’un contrat à durée indéterminée rejoint le taux moyen de contrats à durée indéterminée en France.

Tout doit en conséquence être fait pour instituer un nouveau cadre juridique qui constitue une passerelle de la situation actuelle de précarité, concrétisée par des successions de stages, de contrats à durée déterminée très courts, de missions de travail temporaire et de périodes de chômage souvent non indemnisées, vers le contrat de travail à durée indéterminée de droit commun.

Tel est l’objet du « contrat première embauche » qui propose des droits nouveaux qui prennent en compte la situation spécifique des jeunes salariés.

C’est un contrat écrit à durée indéterminée qui, tout en relevant pour l’essentiel du code du travail et du droit conventionnel applicable, repose, pendant une période de consolidation de deux ans, sur un équilibre différent du contrat de droit commun. Au-delà de cette période, le contrat est entièrement soumis au régime de droit commun du contrat à durée indéterminée.

Cet équilibre propre à la période de consolidation repose, d’une part, sur un souci de sécurité juridique renforcé de nature à inciter les employeurs à embaucher de jeunes salariés, d’autre part, sur des droits nouveaux pour le salarié.

Pendant la période de consolidation, le contrat peut être rompu à l’initiative du salarié ou de l’employeur par lettre recommandée avec avis de réception. La contestation de la rupture se prescrit par douze mois à compter de sa notification, à la condition toutefois que le salarié en ait été avisé.

Les conditions de rupture respectent les prescriptions de l’ordre public social. Les prescriptions assurant par exemple la protection des salariés titulaires d’un mandat syndical ou représentatif sont applicables de même que celles censurant les licenciements reposant sur une cause illicite. Enfin, les licenciements éventuels sont comptabilisés dans le décompte des effectifs ouvrant la procédure de licenciement collectif.

Par ailleurs, sont institués des droits nouveaux au profit des jeunes salariés en matière de préavis, d’indemnité de licenciement, de droit individuel à la formation et de couverture renforcée du risque chômage.

Le préavis croît en fonction de l’ancienneté, il est de deux semaines pour une ancienneté inférieure à six mois et d’un mois pour une ancienneté comprise entre six mois et un an.

La rupture, à l’initiative de l’employeur pendant la période de consolidation, ouvre droit pour le salarié à une indemnité de 8 % du montant total de la rémunération brute due au salarié depuis la conclusion de son contrat. Cette indemnité n’est soumise ni à l’impôt sur le revenu ni à cotisations sociales. À cette indemnité s’ajoute une contribution de l’employeur égale à 2 % du montant de la rémunération brute versée depuis le début du contrat, recouvrée par les ASSEDIC et destinée à financer les actions d’accompagnement renforcé du salarié par le service public de l’emploi en faveur de son retour à l’emploi.

Par ailleurs, l’amendement assure au salarié dont le contrat a été rompu pendant la période de consolidation une couverture renforcée du risque chômage. Il permet aux salariés qui ne justifient pas de droits suffisants pour bénéficier de l’assurance chômage, de bénéficier d’une allocation forfaitaire, financée par l’État, de 16,40 € par jour pendant deux mois. Dans des conditions définies par les partenaires sociaux, ou à défaut par décret, le salarié pourra également prétendre au bénéfice de la convention de reclassement personnalisé instituée par la loi du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale en faveur des salariés qui ont fait l’objet d’un licenciement économique dans les entreprises de moins de 1 000 salariés.

Une innovation essentielle vise à prendre la période de stage ou toute autre période de travail ou de formation accomplie par le jeune dans l’entreprise dans le décompte de la période de consolidation correspondant à un contrat. Cette mesure s’inscrit dans la démarche engagée par le gouvernement visant à valoriser les stages en entreprise.

Le droit à la formation sera largement ouvert puisque le droit individuel à la formation, prévu par l’article L. 933-1 du code du travail, pourra être mobilisé dès la fin d’un délai d’un mois à compter de la signature du contrat.

Enfin, le jeune sera informé des dispositifs auxquels il peut avoir accès au titre du 1 % logement, afin de faciliter son accès à un logement autonome.

Ainsi, loin de contribuer à la précarisation des jeunes salariés, l’amendement ouvre en leur faveur une voie nouvelle qui, à la différence des contrats à durée déterminée ou les contrats de travail temporaire qui constituent à ce jour le lot commun de trop nombreux jeunes, a vocation à constituer une passerelle vers un emploi stable de droit commun.