N° 258
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DOUZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 10 octobre 2002.
AVIS
PRÉSENTÉ
AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES, DE L'ENVIRONNEMENT ET DU TERRITOIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2003 (n° 230),
TOME VI
ÉCONOMIE, FINANCES et INDUSTRIE
INDUSTRIE - ÉNERGIE
PAR M. JACQUES MASDEU-ARUS,
Député.
--
Voir le numéro : 256 (annexe 16)
Lois de finances.
INTRODUCTION 5
I. - L'ÉVOLUTION D'ENSEMBLE DES CRÉDITS 7
II. - LES MESURES DESTINÉES À AMÉLIORER L'ENVIRONNEMENT DES ENTREPRISES INDUSTRIELLES 9
A. LA POLITIQUE DE LA QUALITÉ 9
B. LES CENTRES TECHNIQUES 10
C. LE FINANCEMENT DES ÉCOLES D'INGÉNIEURS 11
1. Les écoles des mines 11
2. Les autres écoles d'ingénieurs 11
III. - LES CRÉDITS DE LA RECHERCHE ET DE L'INNOVATION 12
A. LES GRANDS PROGRAMMES DE RECHERCHE INDUSTRIELLE 12
B. PMI, INNOVATION ET DIFFUSION DES TECHNOLOGIES 12
IV. - LE SOUTIEN BUDGÉTAIRE AU SECTEUR DE L'ÉNERGIE 14
1. Le soutien budgétaire à l'énergie nucléaire et les crédits du Commissariat à l'énergie atomique (CEA) 14
2. La Commission de régulation de l'électricité (CRÉ) 16
3. Le Réseau de recherche sur les technologies pétrolières et gazières 16
4. L'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) 16
5. L'Institut français du pétrole (IFP) 17
V. - L'ACCOMPAGNEMENT DES MUTATIONS INDUSTRIELLES 18
A. LE RECUL MÉCANIQUE DES CRÉDITS DESTINÉS À SOUTENIR LES SECTEURS EN CRISE SE POURSUIT 18
1. La situation de Charbonnages de France 18
2. L'interdiction des aides à la commande limite le soutien public à la construction navale 18
B. LA RECONVERSION DES BASSINS MINIERS ET SIDÉRURGIQUES 19
1. Le Fonds d'industrialisation des bassins miniers (FIBM) 19
2. Le Fonds d'industrialisation de la Lorraine (FIL) 20
3. Les sociétés de conversion 20
4. L'« après-mines » 20
VI. - LA SITUATION ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE D'ÉLECTRICITÉ DE FRANCE 22
A. LA DÉGRADATION CONTINUE DES RÉSULTATS DE LA MAISON-MÈRE 25
1. La hausse des charges de personnel 26
2. La dérive des consommations en provenance de tiers 28
B. LA TRES FAIBLE RENTABILITE DES FILIALES 30
1. Le bilan d'ensemble médiocre de la diversification internationale 30
2. Des aventures internationales difficilement justifiables 33
C. LES CONSEQUENCES POUR L'AVENIR 36
1. Les perspectives d'évolution des résultats 36
2. Evolution de la valeur d'EDF depuis 1998 38
EXAMEN EN COMMISSION 41
MESDAMES, MESSIEURS,
L'industrie française est au c_ur de notre relative prospérité. L'industrie manufacturière assure, en effet, directement près de 20 % de notre produit intérieur brut. Les pouvoirs publics ne peuvent donc se désintéresser de ce secteur d'activité essentiel. Toutefois, les succès obtenus par notre industrie sont d'abord les succès d'entrepreneurs et d'entreprises de toutes tailles qui ont besoin non d'une intervention tatillonne de l'administration mais bien d'un Etat facilitateur, agissant pour améliorer constamment leur environnement économique et ainsi leur compétitivité, notamment en encourageant l'innovation, la formation et en assurant un approvisionnement énergétique fiable et bon marché. A ce volet offensif de l'action des pouvoirs publics doit s'ajouter une politique plus défensive visant à accompagner les mutations industrielles des secteurs en déclin. Ces deux axes sont clairement au c_ur de la politique qu'entend conduire le Gouvernement dans le secteur de l'industrie et que traduit le projet de loi de finances pour 2003.
Votre rapporteur regrette en revanche que l'intervention publique en matière industrielle ne permette plus à l'Etat, depuis plusieurs décennies, de jouer également un rôle de stratège par l'encouragement de grands projets. Ce n'est pas, en effet, faire preuve de nostalgie que rappeler les succès, dont notre économie tire encore profit, de certains grands programmes notamment dans les domaines aérospatial (Ariane, Airbus) ou énergétique (programme électronucléaire) dont beaucoup trouvent leur origine dans des initiatives prises par le général de Gaulle. Votre rapporteur espère donc un renouveau de l'Etat stratège, par exemple dans les domaines porteurs d'avenir de l'économie numérique et des biotechnologies. Une telle action dépasse toutefois largement le cadre des crédits du seul ministère de l'industrie.
Hors crédits affectés aux secteurs de la poste et des télécommunications et à périmètre constant, les dotations budgétaires allouées à l'industrie dans le projet de loi de finances pour 2003 s'élèvent, en dépenses ordinaires et crédits de paiement, à 1 830 millions d'euros en recul de 1,66 % par rapport à la loi de finances pour 2003. Les autorisations de programme sont, en revanche, presque stables (- 0,14 %).
Un effort plus important pour tenir compte des besoins qui existent notamment en matière de soutien à l'innovation industrielle, fer de lance de notre compétitivité industrielle de demain, aurait naturellement été souhaitable. Pour autant, il importe de relever que, dans un contexte budgétaire particulièrement difficile, le ralentissement de la baisse des crédits consacrés à l'industrie, dont la diminution avait été de plus de 4 % en 2002, est très sensible. En outre, les reports probables des crédits disponibles fin 2002 devraient permettre de maintenir la capacité d'intervention du ministère. Enfin, l'évolution d'ensemble des crédits ne doit pas masquer plusieurs éléments très positifs notamment en ce qui concerne la formation et la régulation. C'est pourquoi la commission est favorable à l'adoption des crédits de l'industrie et de l'énergie pour 2003.
Le présent rapport expose, de manière détaillée, l'évolution des crédits de l'industrie et de l'énergie pour 2003. Votre rapporteur souhaite compléter, chaque année, cette analyse traditionnelle en évoquant, de manière plus approfondie, un aspect des politiques industrielle et énergétique. Cette année, il a ainsi étudié la situation économique et financière d'Electricité de France, principal établissement public du secteur de l'énergie dans notre pays.
I. - L'ÉVOLUTION D'ENSEMBLE DES CRÉDITS
Les crédits de l'industrie figurent dans le fascicule budgétaire du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie. Il s'agit des crédits regroupés dans 3 agrégats :
- l'agrégat 21 comprenant les moyens concourant à la mise en _uvre des politiques conduites dans le domaine de l'énergie et des matières premières,
- l'agrégat 22 comprenant les moyens d'intervention directs en faveur de l'investissement, de la recherche industrielle et de l'innovation dans les entreprises et
- l'agrégat 24 comprenant les moyens consacrés à « l'accompagnement des mutations industrielles ».
Il faut ajouter à ces crédits une partie de ceux qui figurent dans l'agrégat 23 qui regroupe les moyens permettant de conduire une action sur l'environnement et le développement de la compétitivité des entreprises. Celui-ci comprend en effet également des moyens consacrés au secteur de la poste et des télécommunications qui ne rentrent donc pas dans le champ du présent avis.
Enfin, il convient, pour avoir une vision exacte de l'évolution des crédits par rapport à l'exercice précédent, de neutraliser les effets de structure liés aux modifications de périmètre qui constituent des changements de présentation budgétaire et non une évolution réelle des moyens. Le tableau ci-après présente l'évolution des crédits à périmètre constant :
ÉVOLUTION DES CRÉDITS DE L'INDUSTRIE PAR AGRÉGAT
À PÉRIMÈTRE CONSTANT
(en euros)
2 0 0 2 |
2 0 0 3 | ||
Agrégat 21 |
AP |
122 888 000 |
123 558 000 |
CP |
508 554 151 |
717 383 457 | |
Chapitre 44-80 |
AP |
- |
- |
Article 70 Institut français du pétrole (budgétisation) |
CP |
- |
- 200 000 000 |
Agrégat 21 |
AP |
122 888 000 |
123 558 000 |
(à périmètre constant) |
CP |
508 554 151 |
517 383 457 |
Agrégat 22 |
512 381 000 |
507 414 000 | |
460 491 951 |
405 994 629 | ||
Chapitre 44-80 Article 10 (nouveau) |
AP |
- |
- |
CP |
- |
- 3 750 000 | |
Agrégat 22 |
AP |
512 381 000 |
507 414 000 |
(à périmètre constant) |
CP |
460 491 951 |
402 244 629 |
Agrégat 23 |
AP |
43 276 000 |
55 023 000 |
680 934 431 |
681 194 819 | ||
Chapitre 44-80 |
- |
- | |
Article 30 |
- 3 599 103 |
- | |
Crédits du secteur des postes et télécommunications |
- |
- | |
Article 60 chapitre 44-80 |
AP |
- 5 793 000 |
- 5 500 000 |
Article 30 chapitre 43-01 |
- |
- | |
Article 71 chapitre 36-10 |
- |
- | |
Article 72 chapitre 36-10 |
- |
- | |
Article 73 chapitre 36-10 |
- |
- | |
Article 15 chapitre 34-98 |
CP |
- 430 014 446 |
- 422 707 212 |
Chapitre 37-06 (intégralité) |
- |
- | |
Article 10 chapitre 41-10 |
- |
- | |
Chapitre 63-04 (intégralité) |
- |
- | |
Agrégat 23 |
37 483 000 |
49 523 000 | |
(Crédits de l'industrie à périmètre constant) |
247 320 882 |
258 487 607 | |
Agrégat 24 |
51 773 000 |
42 993 000 | |
(périmètre inchangé) |
CP |
644 757 330 |
652 025 000 |
TOTAL : |
AP |
724 525 000 |
723 488 000 |
Crédits à l'industrie à périmètre constant |
CP |
1 861 124 314 |
1 830 140 693 |
Source : Projet de loi de finances pour 2003.
II. - LES MESURES DESTINÉES À AMÉLIORER L'ENVIRONNEMENT DES ENTREPRISES INDUSTRIELLES
L'agrégat 23 regroupe les actions portant sur l'environnement et la compétitivité des entreprises. Les crédits ainsi agrégés s'élèvent dans le projet de loi de finances pour 2003, en dépenses ordinaires et crédits de paiement, à 681,19 millions d'euros.
Toutefois, plus de 60 % des dotations placées sous l'agrégat 23 relèvent du secteur de la poste et des télécommunications. Cela est notamment le cas des crédits consacrés au transport de presse et de ceux affectés au Groupe des écoles de télécommunications, à l'Agence nationale des fréquences ou à l'Autorité de régulation des télécommunications.
En réalité, les dotations finançant des activités strictement industrielles ne s'élèvent qu'à 258,48 millions d'euros. Elles progressent de plus de 4,5 % par rapport à la loi de finances pour 2002. Cet effort reste particulièrement appréciable compte tenu de l'importance des dépenses concernées. Celles-ci sont en effet principalement regroupées autour de trois postes : l'action en faveur de la qualité, le financement des centres techniques et des organismes assimilés et, enfin, celui des écoles d'ingénieurs placées sous la tutelle du secrétariat d'Etat à l'industrie.
La politique de la qualité comprend, pour l'essentiel, des interventions en matière de normalisation, de certification et de métrologie traditionnellement rassemblées au sein des chapitres 44-93 et 64-94 du projet de loi de finances. Une modification de la nomenclature est toutefois intervenue cette année en raison de la suppression de trois articles (les articles 90 du chapitre 44-93, 30 du chapitre 64-92 et 40 du chapitre 64-94) et de la création d'un nouvel article, l'article 40 du chapitre 64-92 vers lequel ont été transférés les crédits en compte dans les deux articles supprimés du titre VI. Ce nouvel article a vocation à financer le soutien d'actions collectives en faveur des petites et moyennes industries qui incluent la promotion de la normalisation et de la qualité. Il sera donc présenté ci-après, ce qui correspond à son rattachement à l'agrégat 23, même s'il aurait également trouvé sa place au sein de l'agrégat 22, analysé plus bas.
L'importance de la politique de la qualité ne doit pas être sous-estimée car on sait à quel point la qualité et la normalisation sont aujourd'hui des éléments majeurs de compétitivité. L'exemple traditionnel le démontrant est celui de nos voisins allemands. Il convient toutefois de rappeler que l'intervention des pouvoirs publics en la matière vient en complément d'une action très dynamique des entreprises et de leurs organisations professionnelles.
Votre rapporteur se félicite donc particulièrement de la progression de ces crédits qui passent en dépenses ordinaires et crédits de paiement de 60,4 millions d'euros à 61,1 millions d'euros, à périmètre constant.
L'évolution des autorisations de programme, qui reculent de 12 %, est sensiblement moins favorable mais s'explique pour l'essentiel par l'ajustement des dotations du Laboratoire national d'essais qui avaient très fortement progressé en 2002 (+ 150 %).
Les centres techniques industriels créés par la loi n° 48-1228 du 22 juillet 1948 sont des établissements d'utilité publique créés par arrêté du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Conformément à l'article 2 de cette loi, ils ont pour objet de promouvoir le progrès des techniques, de participer à l'amélioration du rendement et à la garantie de la qualité dans l'industrie.
A cet effet, ils coordonnent et facilitent diverses initiatives ; ils exécutent ou font exécuter des travaux de laboratoire et d'ateliers expérimentaux ; ils participent en particulier aux enquêtes sur la normalisation et à l'établissement de règles permettant le contrôle de la qualité.
Traditionnellement, les ressources des centres techniques et organismes assimilés provenaient de diverses taxes parafiscales. Certaines d'entre elles sont arrivées progressivement à échéance à partir de 2000. En outre, la loi organique n° 2001-692 du 1er juillet 2001 organise un dispositif transitoire d'extinction des taxes parafiscales qui s'étend jusqu'au 31 décembre 2003. A terme et comme cela est déjà le cas pour certains d'entre eux, les ressources de l'ensemble des centres techniques et organismes assimilés auront donc sans doute vocation à relever du budget général.
Celui-ci répartit les crédits concernés entre trois articles regroupant chacun les dotations allouées aux organismes relevant respectivement des secteurs de la fonderie et de la mécanique, du textile et de l'habillement et d'autres secteurs tels la papeterie, l'ameublement, le bâtiment ou l'horlogerie.
En 2003, l'enveloppe globale versée aux centres techniques est quasiment stable par rapport à 2002 et est répartie comme suit :
(en euros)
LFI 2002 |
PLF 2003 | |
Organismes relevant du secteur de la fonderie et de la mécanique |
36 272 196 |
35 512 196 |
Organismes relevant des secteurs du textile et de l'habillement |
14 237 028 |
14 970 028 |
Organismes relevant d'autres secteurs |
12 375 996 |
12 375 996 |
Total |
62 885 220 |
62 858 220 |
L'effort exceptionnel, en particulier dans le contexte budgétaire, consenti en faveur de la formation constitue l'un des éléments les plus positifs du projet de loi de finances pour 2003 pour ce qui concerne l'industrie. Il concerne pour l'essentiel les moyens alloués aux écoles des mines.
En dépenses ordinaires et crédits de paiement, les dotations des écoles des mines progressent en effet de plus de 3,3 % par rapport à la loi de finances pour 2002 pour atteindre 100,5 millions d'euros. L'effort est encore plus net pour ce qui concerne les autorisations qui font plus que doubler en passant de 10,5 à 23,9 millions d'euros, ce qui ouvrira la possibilité d'investissements nouveaux importants.
Il convient, en outre, de rappeler que parallèlement aux formations initiales, continues et spécialisées de haut niveau qu'elles dispensent, les écoles des mines jouent également un rôle majeur dans le domaine de la recherche à finalité industrielle. L'effort consenti prépare donc doublement l'avenir puisqu'il concerne à la fois la recherche et la formation. Les écoles des mines tirent d'ailleurs des ressources importantes des contrats de recherche ou de transfert technologique conclus avec les entreprises qui viennent s'ajouter aux moyens donnés par l'Etat.
Deux autres écoles d'ingénieurs sont financées sur le budget de l'industrie : l'école supérieure d'électricité (Supélec) et l'école nationale supérieure de création industrielle (ENSCI).
Les dotations versées à Supélec sur les crédits du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie figurent au chapitre 43-01. Elles sont stables en 2003 à 6,89 millions d'euros après une forte progression (+ 12,5 %) en 2002.
Les dotations versées à l'école nationale supérieure de création industrielle (ENSCI) sur les crédits du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie sont reconduites dans le projet de loi de finances pour 2003 à hauteur de 1,43 million d'euros.
III. - LES CRÉDITS DE LA RECHERCHE ET DE L'INNOVATION
Un soutien vigoureux à la recherche et à l'innovation industrielles, qui conditionnent notre compétitivité de demain, est une nécessité. Aussi, c'est peut-être sur ce point que votre rapporteur exprimera quelques regrets sur la prudence du projet de budget pour 2003 tout en comprenant que le cadrage d'ensemble impose des choix difficiles.
Les dotations allouées à la recherche, l'innovation et au développement des PMI reculent en effet. Ces crédits sont, pour l'essentiel, regroupés dans l'agrégat 22. Elles s'élèvent pour 2003, en dépenses ordinaires et crédits de paiement à 402,24 millions d'euros en fort recul par rapport à l'exercice précédent. Les autorisations de programme demandées pour 2003 reculent également dans une moindre proportion et s'élèvent à 507,41 millions d'euros.
Une grande partie de la baisse des crédits de l'agrégat 22 est imputable au chapitre 66-01 dont la vocation est le financement des grands programmes de recherche.
En effet, ce chapitre est dans le projet de loi de finances pour 2003 doté de 166,25 millions d'euros en dépenses ordinaires et crédits de paiement. Cette dotation est en recul de 22 % par rapport aux crédits votés pour 2002. Compte tenu des reports de crédits, le montant des crédits disponibles restera toutefois très supérieur aux consommations des exercices précédents et donc suffisant pour couvrir les besoins. En outre, les autorisations de programme sont presque stables.
Il convient de rappeler que l'enveloppe budgétaire du chapitre 66-01 sert à soutenir la recherche à travers quatre vecteurs : les grands programmes européens labellisés Eureka, les grands programmes interministériels nationaux, l'appel à propositions technologies-clés et le programme « Société de l'information ».
La diffusion des technologies vers les PMI et l'accès de ces dernières à l'innovation est assurée dans le cadre de plusieurs procédures. L'Agence nationale de valorisation de la recherche (ANVAR) intervient en effet dans ce domaine pour lequel sont également mobilisés des crédits dans le cadre de la procédure ATOUT. Enfin, le soutien à l'investissement des PMI poursuit des objectifs voisins.
Dans le projet de loi de finances pour 2003, les dotations prévues pour l'Agence nationale pour la valorisation de la recherche (ANVAR) s'élèvent en dépenses ordinaires et crédits de paiement à 142,47 millions d'euros. Elles progressent donc légèrement par rapport à 2002, exercice pour lequel elles étaient de 142,45 millions d'euros. Les autorisations de programme sont stables à 121,96 millions d'euros.
Cette dotation s'inscrit dans le cadre du contrat quadriennal conclu en 2000 entre l'Etat et l'ANVAR qui dégage quatre priorités :
- renforcer les actions « sur-mesure » en faveur de la création d'entreprise en amont de la concrétisation des projets ;
- soutenir les transferts de technologie ;
- mobiliser davantage des financements complémentaires de ceux de l'agence afin d'augmenter l'effet de levier et
- favoriser la mise en relation des PME avec des partenaires pertinents.
L'objectif de la procédure ATOUT est de faciliter la diffusion vers les PMI, même les plus modestes, des technologies essentielles pour l'avenir de l'industrie.
Les crédits finançant ce dispositif sont, pour partie inscrits au chapitre 44-80, article 20 et pour partie inscrits au chapitre 64-92, article 20. Les dotations du chapitre 44-80 sont stables à 3,2 millions d'euros. Il en est de même des autorisations de programme ouvertes par le chapitre 64-92 qui s'élèvent à 32 millions d'euros. En revanche, les crédits de paiement du chapitre 64-92 connaissent, comme en 2002, un très fort recul par rapport à l'exercice précédent. Ils passent, en effet, à 17,4 millions d'euros contre 25,61 millions d'euros en 2002 et 28,96 millions d'euros en 2001.
Les crédits finançant les actions de développement industriel régional, inscrits à l'article 10 du chapitre 64-92, s'élèvent en crédits de paiement à 72,93 millions d'euros en recul de 3,8 % par rapport à la loi de finances pour 2002. L'évolution des autorisations de programme est plus favorable puisque leur recul n'est que de 1,6 % de sorte qu'elles atteignent 75,16 millions d'euros.
Ces crédits servent à financer l'investissement immatériel à travers trois outils : les Fonds régionaux d'aide au conseil (FRAC), l'Aide au recrutement de cadres (ARC) et les Fonds régionaux d'aide au transfert technologique (FRATT) qui aident les PMI à recevoir les conseils techniques de laboratoires.
Par ailleurs, le fonds de développement des PMI (FDPMI) soutient l'investissement matériel des entreprises. Orienté prioritairement vers les zones défavorisées, ce fonds a pour vocation de favoriser l'élévation du niveau technologique des PMI et d'accroître ainsi leurs performances. Les investissements soutenus doivent s'inscrire dans un projet global de développement et représenter un effort significatif de la part de l'entreprise.
IV. - LE SOUTIEN BUDGÉTAIRE AU SECTEUR DE L'ÉNERGIE
Les crédits affectés au secteur de l'énergie et des matières premières, regroupés dans l'agrégat 21, s'élèvent dans le projet de loi de finances pour 2003 à 717,38 millions d'euros en dépenses ordinaires et crédits de paiement et à 123,56 millions d'euros en autorisations de programme. L'année 2003 a toutefois été marquée par une modification permanente de périmètre liée à la budgétisation des ressources de l'Institut français du pétrole. A périmètre constant, les dépenses ordinaires et crédits de paiement demandés au titre de l'agrégat 21 ne représentent plus que 517,38 millions d'euros. Ils progressent néanmoins de plus de 1,7 %, la progression des autorisations de programme, qui ne sont pas affectés par les évolutions de périmètre, étant moins rapide (+ 0,5 %).
Cette progression est particulièrement heureuse compte tenu de l'importance de la politique énergétique pour l'ensemble de notre économie. Elle rompt en outre de manière nette avec la très forte baisse des crédits de cette politique dans la loi de finances pour 2002.
RESSOURCES CIVILES DU CEA
(budgets initiaux)
(en millions d'euros)
1998 |
1999 |
2000 (1) |
2001 (1)(2) |
2002(1) (3) |
2003(1) (3) | |
Prestations, recettes externes et recettes exceptionnelles |
673 |
690 |
658 |
1 508 |
595 |
620 |
INDUSTRIE : |
||||||
Subvention de fonctionnement |
445 |
451,2 |
316 |
359 |
367 |
368,8 |
Crédits d'investissement |
49,6 |
57 |
57 |
57 |
57 |
57 |
Total industrie |
494,6 |
508,2 |
373 |
416 |
424 |
425,8 |
RECHERCHE : |
||||||
Subvention de fonctionnement |
445 |
454,2 |
462 |
449 |
442,3 |
444,8 |
Crédits d'investissement |
49,6 |
57 |
57 |
57 |
57 |
57 |
Total recherche |
494,6 |
511,2 |
519 |
506 |
499,3 |
501,8 |
TOTAL RESSOURCES CIVILES |
1 662,2 |
1 709,4 |
1 550 |
2 430 |
1 518,3 |
1 547,6 |
(1) Hors IPSN.
(2) Incluant la constitution initiale en numéraire du fonds dédié au financement du démantèlement et de l'assainissement des installations nucléaires civiles du CEA.
(3) A partir de 2002, le titre IV du CEA ne comprend plus la subvention de fonctionnement du Délégué à la sûreté et à la radioprotection des installations et activités nucléaires intéressant la défense (DSND) qui fait l'objet d'une ligne spécifique.
Le projet de loi de finances pour 2002 prévoit une subvention civile globale de l'Etat (recherche + industrie) de 927,6 millions d'euros, répartie en 813,6 millions d'euros au titre des subventions de fonctionnement et en 114 millions d'euros de crédits d'investissement. Cette subvention est quasiment stable par rapport à la loi de finances pour 2002.
Il importe de rappeler que, contrairement à une opinion trop répandue, tous les moyens du CEA ne sont pas consacrés à la recherche dans le domaine nucléaire comme l'indique l'affectation indicative des moyens aux programmes de recherche présentée ci-après :
(en millions d'euros)
2001 |
2002 (1) |
2003 (1) | |
Recherche et technologie pour l'énergie nucléaire |
758 |
745 |
763 |
Recherche et technologie pour l'innovation industrielle |
211 |
226 |
230 |
Recherche fondamentale |
424 |
434 |
404 |
Diffusion des connaissances scientifiques et technologiques |
77 |
65 |
77 |
Total |
1 472 |
1 470 |
1 474 |
(1) Prévision.
Source : ministère de l'industrie.
En revanche, le soutien budgétaire à l'énergie nucléaire est également assuré au titre de l'industrie par l'intermédiaire de deux autres lignes budgétaires pour des montants beaucoup plus modestes.
Il s'agit, en premier lieu, des crédits ouverts par le chapitre 44-80, article 51 destinés notamment à financer l'inventaire national des déchets radioactifs conduit actuellement par l'Agence nationale des déchets radioactifs (ANDRA). Ces crédits reculent, en apparence, de manière brutale (- 74 %) en 2003 pour atteindre 1,98 million d'euros. Cette évolution s'inscrit toutefois dans une évolution comptable liée à la mise en place de la nouvelle Direction générale de la sûreté nucléaire et de la radioprotection et ne se traduira pas, selon les informations transmises à votre rapporteur par le Gouvernement, par un recul réel des moyens d'intervention.
D'autre part, l'article 92 du chapitre 54-93 comprend des crédits destinés au financement d'études de sûreté nucléaire et de radioprotection. Ils progressent sensiblement en autorisations de programme (+ 6,6 %) mais reculent très fortement en crédits de paiement (- 23 %). Les montants concernés sont toutefois modestes : 1,15 million d'euros en autorisations de programme et 830 000 euros en crédits de paiement.
La loi n° 2000-108 du 10 février 2000 de modernisation et développement du service public de l'électricité a institué la Commission de régulation de l'électricité (CRÉ) qui a été installée le 30 mars 2000. Elle a vocation à voir son activité croître fortement en raison, d'une part, de l'extension de son champ de compétences à la régulation du secteur du gaz naturel prévu par le projet de loi relatif aux marchés énergétiques et, d'autre part, du fait de l'accroissement prévisible du nombre des consommateurs d'énergie éligibles.
C'est pourquoi les moyens de cette instance sont sensiblement renforcés dans le projet de loi de finances pour 2003. Les crédits destinés à la rémunération de ses personnels progressent ainsi de 14,37 %, les crédits de fonctionnement restant quasiment stables.
Le réseau de recherche sur les technologies pétrolières et gazières se substitue à l'ancien fonds de soutien aux hydrocarbures. Comme celui-ci, il est destiné à promouvoir notre industrie parapétrolière en aidant au développement de technologies pétrolières et gazières et alloue aux entreprises une aide à leurs programmes de recherche et développement dans le domaine de l'exploration et de la production d'hydrocarbures. Ces aides, qui peuvent couvrir jusqu'à 50 % du budget des programmes, sont remboursables en cas de succès.
Le projet de loi de finances pour 2003 prévoit une vive diminution des crédits de paiement consacrés à ce réseau qui s'établissent à 14,1 millions d'euros soit un recul de près de 44 % par rapport aux crédits votés pour 2002. Cette évolution traduit un retour de ces crédits à un niveau proche de celui qui était le leur en 2000 après une hausse exceptionnelle en 2001. Les reports de crédits prévisibles doivent permettre le maintien de la capacité d'intervention. En outre, les autorisations de programme restent stables à 25,15 millions d'euros.
Une des évolutions les plus significatives du projet de loi de finances pour 2003 dans le secteur de l'énergie est la restauration des moyens d'intervention de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME). Ceux-ci avaient été brutalement réduits par la loi de finances pour 2002. Le projet de loi de finances pour 2003 prévoit de les accroître des deux tiers ce qui permet de les porter à plus de 32,25 millions d'euros. Les subventions de fonctionnement ainsi que les autorisations de programme sont par ailleurs stabilisées.
Cet effort budgétaire conséquent traduit concrètement l'engagement de la majorité en faveur des sources renouvelables d'énergie et de la maîtrise de l'énergie. Il s'inscrit pleinement dans la volonté de promotion du développement durable réaffirmée par le Président de la République lors du sommet de Johannesburg.
L'Institut français du pétrole (IFP) est un établissement professionnel de droit privé à but non commercial. Il s'agit d'un centre de recherche de premier plan au niveau mondial dont l'action s'inscrit résolument dans une perspective de développement durable. Les recherches conduites visent, en effet, à maximiser les ressources d'hydrocarbures disponibles, qui seront nécessaires pour faire face à la croissance considérable des besoins mondiaux en énergie, et à développer des solutions techniques permettant de réduire l'impact sur l'environnement de l'utilisation de ces combustibles.
L'IFP dispose de ressources propres, notamment tirées de l'activité de recherche, et de concours publics. Jusqu'à cette année, l'essentiel de ces concours provenait d'une taxe parafiscale affectée perçue sur produits pétroliers et sur le gaz naturel. Cette année, pour la première fois, les concours publics à l'IFP sont toutefois budgétisés, une subvention, inscrite à l'article 70 du chapitre 44-80 se substituant au produit de la taxe parafiscale.
La subvention prévue pour le projet de loi de finances pour 2003 s'élève à 200 millions d'euros. Ce montant est légèrement supérieur au produit qui était attendu de la taxe. L'opération n'entraîne donc pas de réduction de moyens pour l'IFP et s'inscrit dans un processus général de suppression des taxes parafiscales, mis en _uvre en application de la loi organique du 1er août 2001 qui dispose que toutes les taxes parafiscales doivent être supprimées au plus tard le 31 décembre 2003.
La budgétisation des ressources de cet organisme ne se traduira pas par une réduction de moyens, le contrat d'objectifs 2001-2005 garantissant un financement public pérenne et stable. Elle consacre, en outre, la reconnaissance de l'intérêt collectif attachée à ses missions. Au cours des années à venir, votre rapporteur sera extrêmement attentif au respect des engagements pris dans le cadre de ce contrat d'objectifs qui conditionne le développement de l'IFP. Or, celui-ci est nécessaire compte tenu de l'intérêt pour l'ensemble de notre économie des recherches conduites, qui contribuent au dynamisme de nos secteurs pétrolier et para-pétrolier qui doivent préserver leur rang mondial, et au vu de leur inscription dans une dynamique de développement durable, dont l'encouragement figure parmi les priorités de la majorité.
V. - L'ACCOMPAGNEMENT DES MUTATIONS INDUSTRIELLES
L'aide de l'Etat à Charbonnages de France consiste, d'une part, en une dotation en capital provenant du compte d'affectation spéciale n° 902-24 et, d'autre part, en une subvention inscrite à l'article 10 du chapitre 45-10.
Pour l'année 2003, les besoins en dotations en capital exprimés par Charbonnages de France s'élèvent à 495 millions d'euros. Le montant de la dotation attribuée n'a toutefois pas encore été arrêté.
Les crédits ouverts au chapitre 45-10 permettent à l'Etat de répondre à ses engagements passés puisqu'ils couvrent principalement les charges représentées par les prestations aux anciens mineurs et portant sur la gestion des sites arrêtés ainsi qu'une part des charges d'emprunt. Cette dotation s'élève dans le projet de loi de finances pour 2003 à 444 millions d'euros en très léger recul (- 0,66 %) par rapport à l'exercice précédent.
La situation de Charbonnages de France reste préoccupante. Le déficit d'exploitation continue de se creuser notamment sous l'effet du recul du chiffre d'affaires ce qui se traduit par un accroissement continue de la subvention ramenée à la tonne extraite comme l'indique le tableau ci-après :
1999 |
2000 |
2001 |
2002 | |
Subvention à la tonne extraite en équivalent charbon (euros/tonne équivalent charbon calculé selon normes CECA) |
95,68 |
128,90 |
157,5 |
231,8 |
Le 19 décembre 1994, un accord a été signé sous l'égide de l'OCDE prévoyant la suppression des aides directes (aides aux chantiers) et des aides indirectes (aides aux armateurs) à quelques exceptions près (aides à la recherche, aides sociales en cas de restructurations industrielles, aides horizontales accessibles en fait à d'autres secteurs, système de crédit intérieur). Cet accord n'est toujours pas appliqué faute de ratification par les Etats-Unis.
Un règlement européen a néanmoins interdit, après le 31 décembre 2000, les aides à la commande. Ce règlement admet les aides à la fermeture partielle ou totale et étend à la construction navale les dispositifs accessibles aux autres secteurs industriels concernant les aides à la recherche et au développement, au sauvetage et à la restructuration d'entreprises en difficulté, aux investissements pour innovation et à la protection de l'environnement.
La situation de notre industrie navale a été affectée par cette interdiction, le maintien de pratiques anti-concurrentielles de la part de la Corée du Sud étant avéré. Les négociations engagées, de longue date, avec la Corée pour trouver une solution à l'amiable au litige ayant échoué, la Commission européenne a annoncé le 30 septembre 2002 son intention de saisir l'Organisation mondiale du commerce et d'autoriser l'octroi temporaire et limité d'aides d'État aux constructeurs de l'Union.
Pour l'instant, les aides à la commande restent toutefois interdites et, même si le financement d'aides accordées avant le 31 décembre 2000 reste bien sûr assuré, le soutien financier public au secteur recule mécaniquement de manière progressive. Ainsi, les crédits destinés à l'aide à la construction navale reculent de près de 6,5 % en 2003 et s'établissent à 97 millions d'euros.
Les actions financées par le FIBM visent à améliorer l'environnement des entreprises, de façon à favoriser leur implantation industrielle sur les anciens sites miniers. Les programmes soutenus concernent notamment l'aménagement de terrains et de locaux industriels, la reconquête de friches industrielles, la création de centres de transfert de technologie ou la formation initiale ou continue. Le FIBM n'a en général pas vocation à apporter une aide directe à l'entreprise ; son action est le plus souvent complétée par l'intervention financière des sociétés de reconversion sous forme de prêts ou d'apports en fonds propres ainsi que par les autres actions en faveur des entreprises, engagées par l'État ou les collectivités territoriales.
Les moyens alloués au FIBM connaissent, en 2003, une évolution contrastée. Les crédits de paiement progressent en effet très fortement puisqu'ils triplent quasiment pour atteindre 21 millions d'euros. En revanche, les autorisations de programme reculent mais dans une proportion bien plus modeste puisqu'elles passent de 19,06 millions d'euros à 17 millions d'euros.
Cette évolution corrige celle des années précédentes durant lesquelles une progression rapide des autorisations de programme avait été décidée sans que les crédits de paiement nécessaires pour les honorer connaissent une croissance similaire. Pendant plusieurs exercices, la résorption du stock de crédits de paiement, accumulé pour l'essentiel en raison d'une sous-consommation très marquée en 1998 et 1999, avait permis de supporter ces évolutions divergentes. Cette résorption, aujourd'hui achevée, rendait nécessaire les nouveaux moyens qui sont alloués.
En 2003, les autorisations de programme du FIL reculent sensiblement et passent de 12,2 millions d'euros à 7 millions d'euros. Les crédits de paiement subissent une évolution parallèle et s'élèvent, dans le projet de loi de finances pour 2003, à 3,95 millions d'euros.
Il convient toutefois de noter que la consommation des crédits du FIL est extrêmement irrégulière en raison du poids relatif de quelques très gros dossiers d'aide de sorte que l'évolution des crédits ne peut être appréciée de manière pertinente qu'à moyen terme.
Deux sociétés de conversion émanent de Charbonnages de France :
- la financière du Nord-Pas-de-Calais (FINORPA), société de conversion des Charbonnages de France, dont le périmètre initial d'intervention, fixé au bassin minier, a été élargi en 1993 à l'ensemble des zones en difficulté de la région, puis, courant 1994, à la totalité du Nord-Pas-de-Calais ;
- la société financière pour favoriser l'industrialisation des régions minières (SOFIREM) qui intervient sur le bassin houiller lorrain et, par l'intermédiaire de la société de réindustrialisation du bassin de Decazeville (SORID), dans le Centre-Midi.
La FINORPA a engagé en 2001, 37,5 millions d'euros au profit de 197 projets. Ces interventions ont permis la création ou le maintien de plus de 5 361 emplois contre 5017 emplois en 2000.
Pour sa part, la SOFIREM a soutenu 69 projets à hauteur de 13 millions d'euros Ces projets devraient conduire à la création ou au maintien de 2 194 emplois. L'activité de la société a ainsi été sensiblement plus dynamique qu'en 2000, exercice durant lequel la société n'avait soutenu que 60 projets pour un montant total de 8,5 millions d'euros.
L'intervention des pouvoirs publics pour lutter contre les affaissements de terrain causés par la présence de galeries de mines et leurs conséquences comprend trois volets : la prévention des affaissements, l'indemnisation de ceux qui en sont victimes et, lorsque cela est absolument nécessaire, le déplacement des populations susceptibles d'être en danger.
Les travaux de sécurité dans les mines sont financés par les crédits inscrits à l'article 10 du chapitre 57-91. Le projet de loi de finances pour 2003 propose de leur consacrer 6,2 millions d'euros en autorisations de programme et 8,24 millions d'euros en crédits de paiement. Ces dotations sont en net recul par rapport à celles ouvertes par la loi de finances pour 2002.
En revanche, les moyens consacrés à exproprier les personnes susceptibles d'être victimes des affaissements, inscrits à l'article 20 du chapitre 57-91, progressent vivement, les autorisations de programme et les crédits de paiement passant à 2,76 millions d'euros contre 1,22 million d'euros dans la loi de finances pour 2002.
Enfin, les indemnisations versées aux sinistrés, financées par l'article 40 du chapitre 46-93, reculent, les autorisations de programme ouvertes en 2002 n'étant pas reconduites et les crédits de paiement passant à 228 000 euros.
VI. - LA SITUATION ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE D'ÉLECTRICITÉ DE FRANCE
Votre rapporteur a décidé de compléter, chaque année, l'analyse des crédits de l'industrie et de l'énergie figurant traditionnellement dans le présent avis budgétaire par l'examen plus approfondi d'une politique ou d'un organisme du secteur. Cette année, il a choisi de s'intéresser plus particulièrement à Electricité de France, établissement public qui est à la veille de transformations sans précédent compte tenu de la libéralisation croissante de son marché et des perspectives d'évolution de son statut. En outre, depuis plusieurs mois, des informations troublantes se font jour quant à la gestion de cette entreprise.
Sur un sujet d'une telle importance, la représentation nationale ne peut borner son information aux éléments circulant dans la presse, aussi bien informée soit-elle. La persistance d'inquiétudes quant à la situation économique et financière d'un établissement public d'une telle importance, qui est le patrimoine de tous les Français, n'est pas acceptable. Elle l'est d'autant moins qu'EDF est un grand service public dont la construction depuis la Libération, s'est faite grâce à la compétence et au dévouement exemplaires de ses personnels, encore illustrés à l'occasion des tempêtes de 1999. Une aussi belle entreprise ne doit, en aucun cas, être mise en péril en raison d'une gestion hasardeuse dont ses agents seraient les premières victimes. C'est pourquoi la situation économique et financière d'EDF figure parmi les préoccupations importantes de l'Assemblée nationale depuis son renouvellement comme l'attestent les auditions successives de M. François Roussely, président d'EDF, en juillet puis en septembre 2002.
Or, les réponses apportées lors de ces auditions successives par la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire puis par la commission des finances de notre Assemblée n'ont pas permis de lever toutes les interrogations, loin s'en faut.
La persistance d'inquiétudes paraît, en outre, particulièrement regrettable à la veille de l'éventuelle ouverture du capital et dans un contexte marqué par une sensibilité particulière des investisseurs à la sincérité des comptes des entreprises. Les petits porteurs et les agents de l'entreprise, notamment, ne pourront manquer de faire le parallèle avec le cas de France Télécom, pourtant profondément différent.
C'est pourquoi votre rapporteur a jugé nécessaire d'essayer de faire la lumière sur la situation économique et financière d'EDF.
Il n'a malheureusement pas été en mesure de le faire d'une manière aussi complète qu'il l'aurait souhaité. La communication de certaines pièces lui a en effet été refusée par EDF. Votre rapporteur a, en particulier, demandé que lui soient transmis des procès-verbaux des conseils d'administration d'EDF et d'EDF International. Or, alors qu'en réponse à une question de M. Jean-Pierre Nicolas lors de son audition par la commission de la production en juillet dernier, M. François Roussely avait indiqué « tenir à la disposition » de celui-ci ces pièces, les demandes de ce député pour en obtenir communication sont restées sans réponse et il a été répondu à votre rapporteur qu'il appartenait au seul Gouvernement de les transmettre.
L'analyse de la situation économique et financière d'EDF par votre rapporteur reste donc incomplète. Elle devra être poursuivie de manière plus exhaustive par le Parlement, dans un autre cadre institutionnel, ou par le Gouvernement. Une telle analyse compléterait sans doute d'ailleurs utilement la mission sur le rôle de l'Etat actionnaire confiée par le ministre de l'économie et des finances à M. Jean-Pierre Jouyet, directeur du Trésor.
Un fait se dégage, toutefois, de manière claire : EDF n'atteint, à ce jour, aucun des objectifs fixés par le contrat de groupe comme l'indique le tableau suivant, communiqué à votre rapporteur par le Gouvernement :
Objectif du contrat |
2000 |
2001 | |
Rentabilité de l'actif économique |
10 % en 2003 |
7 % |
5,7 % |
Rentabilité des capitaux propres |
> 8 % (en moyenne) |
8,4 % |
6,2 % |
Dette nette/Capitaux propres |
_ 1,25 en 2003 |
1,23 |
1,46 |
EBE/Charges financières |
> 7,5 |
7,53 |
5,33 |
En outre, les résultats obtenus tendent même à s'éloigner de manière croissante des objectifs fixés comme l'illustre, par exemple, l'évolution de la rentabilité des capitaux propres depuis 1998 :
Votre rapporteur démontrera ci-après que cette évolution est imputable à la gestion de l'entreprise qui s'est révélée incapable de maîtriser ses coûts, ce qui est particulièrement préoccupant dans un contexte d'ouverture croissant à la concurrence pesant sur les produits.
Au cours des dernières années, toute la stratégie de l'entreprise a, en effet, été tendue vers un unique objectif, choisi par sa direction et sans doute plus accessible à celle-ci que l'amélioration des ratios financiers recommandée par le contrat de groupe : la réalisation, en 2005, de 50 % du chiffre d'affaires hors du marché français de l'électricité.
La diversification de l'activité en France étant sérieusement entravée par le principe de spécialité inhérent au statut d'établissement public, l'entreprise s'est lancée à la poursuite de cet objectif par une politique très ambitieuse d'acquisitions internationales gouvernée manifestement davantage par la recherche de la taille que par celle de la rentabilité. Dans le même temps, la maîtrise des coûts, en France, ne semble pas avoir constitué une priorité.
Par voie de conséquence, l'entreprise a perdu des années précieuses pour se préparer au choc d'une concurrence croissante. La dégradation continue des résultats de la maison-mère en atteste. En outre, le développement international conduit peut être sévèrement critiqué non sur son principe mais quant à ses modalités.
Il était, en effet, parfaitement légitime qu'EDF ait souhaité se développer à l'étranger. Le recul mécanique de sa part de marché en France, avec la libéralisation appelée à croître du secteur, et la perspective de voir constitué un marché intégré de l'énergie sur une partie au moins du continent européen justifiait clairement cette politique. Ce n'est toutefois pas parce que des acquisitions à l'étranger étaient légitimes que n'importe quel achat à n'importe quel prix était judicieux.
L'objectif pertinent n'aurait pas du être, en effet, le développement du chiffre d'affaires à l'étranger par l'addition d'entreprises disparates sans considération pour leur situation économique mais le dégagement de synergies industrielles au sein d'un groupe fortement intégré d'entreprises rentables. Or, à l'aune de ce critère, les opérations réalisées paraissent peu satisfaisantes comme votre rapporteur l'indiquera ci-après.
En outre, cette stratégie a mobilisé des ressources considérables et a été sérieusement entravée par le statut d'établissement public. Celui-ci a, en effet, constitué un obstacle de nature politique dans certains Etats, au mépris du droit communautaire, mais il a également représenté une contrainte sur le plan économique en raison de la faiblesse des fonds propres de l'entreprise, faute de recapitalisation par l'Etat, que celle-ci s'est efforcée de pallier en utilisant tous les instruments financiers et comptables disponibles, par exemple par la réalisation d'opérations de titrisation de créances massives. La course à la taille d'EDF s'est donc heurtée au principe de réalité qui a d'ailleurs conduit à réviser à la baisse l'enveloppe dévolue aux acquisitions internationales.
Dès lors, l'objectif de réaliser, en 2005, 50 % du chiffre d'affaires hors du marché français de l'électricité semble, de fait, abandonné aussi rapidement qu'il avait été fixé et sans davantage de justification. Privée ainsi de stratégie, EDF va donc devoir abandonner l'enivrante frénésie d'acquisitions pour s'atteler à la recherche ingrate de gains de productivité et de clients qui est le quotidien d'une véritable entreprise. Naturellement, dans un contexte social tendu par les perspectives d'évolution du statut, de tels efforts s'imposent au plus mauvais moment. Dès lors, et compte tenu d'autres éléments qui seront évoqués ci-après, votre rapporteur est très prudent quant aux perspectives d'avenir du groupe.
La situation économique d'EDF se dégrade continûment depuis plusieurs années. Un indicateur synthétique, l'excédent brut d'exploitation (EBE), qui est le solde entre les produits d'exploitation et les charges d'exploitation qui ont été consommées pour obtenir ces produits, permet de mesurer cette dégradation. Les comptes sociaux d'EDF révèlent que ce solde a reculé, depuis 1998, de 22,5 % en passant de 9 508 millions d'euros à 7 370 millions d'euros.
M. François Roussely a indiqué, en juillet, à notre commission qu'une augmentation de 1 % du tarif de l'électricité pour les consommateurs non-éligibles représentait un supplément de recettes de 200 millions d'euros en année pleine. On peut donc évaluer, sans prendre en compte la situation des filiales, qu'une augmentation des tarifs de 10,7 % serait nécessaire pour rétablir, au niveau de 1998, la situation économique d'EDF maison-mère. Il convient, en outre, de rappeler que l'ouverture croissante du marché à la concurrence réduira la base de clients non-éligibles soumis à des tarifs administrés. Avec une ouverture de l'ordre des deux tiers du marché, prévue dès 2004, l'augmentation de tarifs nécessaire pour rétablir, au niveau de 1998, la situation économique d'EDF maison-mère serait plutôt de l'ordre de 15 à 20 % et ce, sans prendre en compte le risque de mauvaises surprises venues des filiales.
Le graphique ci-après indique l'évolution de l'excédent brut d'exploitation depuis 1998 :
Cette situation s`explique par la conjonction de deux séries d'évolutions simples : alors que la production stagne (progression cumulée depuis 1998 inférieure à 1 %), toutes les charges progressent, qu'il s'agisse des consommations en provenance de tiers, c'est-à-dire des achats et services extérieurs, (+ 15 % depuis 1998) ou des charges de personnel (+ 6,7 % depuis 1998).
L'évolution des charges de personnel, en premier lieu, peut sembler préoccupante. Elles sont en effet passées de 6 710 millions d'euros () en 1998 à 7 162 millions d'euros en 2001.
En réponse à M. Yves Deniaud qui s'inquiétait de cette dérive, M. François Roussely a indiqué à la commission des finances que « la masse salariale évoquée par M. Yves Deniaud inclut le poids des retraites, celui des départs anticipés et le coût des heures supplémentaires nécessitées par la réparation des dégâts dus aux tempêtes » et que « la masse salariale est en vérité aujourd'hui comparable à ce qu'elle était en 1998 ». L'explication, qui parait largement dégager la responsabilité de la direction de l'établissement public, doit être précisée.
L'évocation des heures supplémentaires liées aux tempêtes de décembre 1999, tout d'abord, parait singulièrement peu convaincante. Une multiplication d'heures supplémentaires liées aux tempêtes de 1999 aurait du se traduire par une augmentation brutale en 2000 des charges de personnel ne se renouvelant pas ensuite. Or, la dérive des charges de personnel s'inscrit dans une tendance d'évolution régulière et s'accroît encore en 2001. Comment expliquer, en outre, que, selon les informations communiquées à votre rapporteur, les charges de personnel continuent d'augmenter en 2002 ? Enfin, il convient de rappeler qu'une provision de 455,36 millions d'euros avait été constituée au titre des comptes pour 1999 afin de couvrir « les charges exposées au titre des réparations et des engagements pris vis-à-vis des clients » et que cette provision, distincte d'une autre provision passée pour reconstruction des ouvrages détruits, a été intégralement reprise en 2000 (note 10 aux comptes consolidés pour 2000).
L'accroissement mécanique de la charge des retraites lié à l'augmentation du nombre d'ayants droits, en second lieu, a, certes, joué un rôle dans l'augmentation des charges salariales mais celui-ci a été, en réalité, assez limité.
Entre 1998 et 2001, la charge des retraites pour EDF s'est, en effet, accrue de 99 millions d'euros(). Sur la même période, les charges de personnel ont progressé de 452 millions d'euros. La progression de la charge des retraites a été très significative, celle des charges de personnel est néanmoins très supérieure. La différence est de 353 millions d'euros (2,3 milliards de francs).
Reste donc le troisième élément évoqué par M. François Roussely, c'est-à-dire le coût des départs à la retraite anticipés dits « départs dérogatoires en inactivité ». Celui-ci s'avère en effet comme un facteur déterminant de l'augmentation des charges de personnel. Selon les informations transmises à votre rapporteur par la direction d'EDF, la prise en charge par EDF du surcoût pour le régime de retraites des industries électriques et gazières lié à ces départs anticipés a coûté à l'entreprise, en 2001, 145 millions d'euros.
Contrairement à la présentation qui en est faite par la direction de l'établissement public, cette charge ne peut être assimilée à l'augmentation mécanique de la charge des retraites. Celle-ci s'impose en effet à l'entreprise par le simple jeu de la démographie. En revanche, l'apparition nouvelle de cette charge de compensation des « départs dérogatoires en inactivité » résulte, elle, d'un choix de gestion fait lors de la conclusion des deux accords successifs de réduction du temps de travail qui ont ouverts aux agents ces possibilités.
La progression des charges de personnel que l'entreprise pouvait maîtriser a donc bel et bien été de 353 millions d'euros entre 1998 et 2001 soit une augmentation sur la période de 7,3 %. Cette évolution, qui peut apparaître modérée, est en réalité inquiétante.
Au cours de la période concernée, EDF a, en effet, connu un fort renouvellement des effectifs en procédant, d'après les informations transmises par le Gouvernement à votre rapporteur, à l'embauche de 18 119 personnes entre 1999 et 2001 dans le cadre d'un accord de réduction du temps de travail en remplacement d'un nombre de départs en inactivité équivalent. Compte tenu de l'effet de l'ancienneté sur la rémunération, il est évident qu'un renouvellement aussi important de l'effectif a favorisé la maîtrise de la masse salariale. Pourtant, en prenant en compte le coût des départs anticipés qui ont permis un renouvellement d'une telle ampleur, les charges de personnel ont continué de croître.
Les agents recrutés sont, en outre, maintenant dans l'entreprise et devront être rémunérés dans les décennies à venir. Le coût réel de cette politique se traduira donc durablement dans les comptes. On ne peut dès lors que regretter que des gains de productivité permettant une réduction des effectifs () n'aient pas été recherchés.
Sans doute, aurait-il fallu pour cela que les gains de productivité ne soient pas effacés par la réduction du temps de travail. On sait, en effet, que l'entreprise a choisi de permettre à ses agents de passer à un temps de travail hebdomadaire de 32 heures. Le rapport du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie sur l'Etat actionnaire indique que, fin décembre 2000, « 31 618 agents avaient un temps de travail inférieur ou égal à 32 heures »(). Les charges de personnel ont donc continué à progresser non seulement malgré le rajeunissement des effectifs mais alors même que le volume de travail rémunéré reculait.
Cela est d'autant plus préoccupant que, là aussi, les effets négatifs des décisions prises vont se faire sentir dans les années à venir. Il est, à cet égard, particulièrement étonnant de rappeler que, devant notre commission, M. François Roussely lui-même s'est félicité, compte tenu de son influence néfaste sur la « mobilisation collective », du « succès modéré » rencontré par l'accord de réduction du temps de travail qu'il avait pourtant négocié avec les partenaires sociaux et dont il saluait, en introduction au rapport d'activité du groupe pour 1999, le caractère « remarquable ».
La cause majeure de la dégradation de la situation financière de l'entreprise est liée à la vive croissance des consommations en provenance de tiers qui ont augmenté de 1 673 millions d'euros entre 1998 et 2001.
Pour expliquer cette évolution, M. François Roussely soulignait, devant notre commission, le poids croissant de l'obligation d'achat en indiquant que « l'obligation d'achat de l'électricité produite par des installations de cogénération, et peut-être demain, par des éoliennes, se traduisait par un surcoût de 900 millions d'euros par an qui n'est pour l'instant pas compensé. »
Il est vrai que la répartition de l'évolution des consommations en provenance de tiers entre les différents postes met en évidence le fort accroissement des achats d'énergie. Il paraît toutefois difficile d'attribuer celui-ci au seul poids croissant de l'obligation d'achat depuis 1998.
En effet, l'obligation d'achat n'est pas un mécanisme nouveau puisqu'il trouve son origine dans un décret du 20 mai 1955. Si le phénomène a incontestablement connu un vif développement dans les années récentes, en raison pour l'essentiel du niveau des tarifs fixés au profit de certaines filières, EDF réalisait déjà, en 1998, des achats d'énergie liés à l'obligation d'achat. L'accroissement du coût de l'obligation d'achat est donc inférieure au montant des achats d'électricité imposés en 2001, lui-même inférieur à l'augmentation des consommations en provenance de tiers.
Votre rapporteur a sollicité d'EDF des éléments lui permettant d'évaluer cet accroissement. Les chiffres qui lui ont été transmis font état d'une augmentation des achats d'électricité imposée par l'obligation d'achat qui seraient passés, selon EDF, de 459 millions d'euros en 1998 à 1 557 millions d'euros en 2001. Votre rapporteur a été vivement surpris de l'importance du montant de ces achats en 2001 qui, selon ces chiffres auraient été supérieurs aux achats imposés en 2002, première année pour laquelle des données publiques provenant d'une autre source qu'EDF sont disponibles, alors que tous les éléments à sa disposition le conduisaient à penser que la charge de l'obligation d'achat allait croissant même si le rythme de cette croissance ralentissait.
Par acquis de conscience, votre rapporteur a donc sollicité la Commission de régulation de l'électricité (CRE), chargée d'évaluer le montant des charges de service public et donc notamment le montant des charges résultant de l'obligation d'achat. Celle-ci lui a indiqué que, dans le cadre des travaux de prévision de ces charges pour 2003, Electricité de France avait, en juillet 2002, indiqué que le montant des achats au titre de l'obligation d'achat pour l'année 2001 s'élevait à 1 403 millions d'euros et non 1 557 millions d'euros comme indiqué à votre rapporteur. Un tel écart jette naturellement un doute fâcheux sur la fiabilité de l'ensemble des informations communiquées par EDF à votre rapporteur.
Selon les chiffres de la CRE, l'augmentation des achats imposés au titre de l'obligation d'achat à EDF entre 1998 et 2001 s'élève donc à 944 millions d'euros. Ce montant est naturellement très supérieur à l'évolution sur la même période de la charge nette de l'obligation d'achat, l'électricité dont l'acquisition est imposée se substituant à d'autres achats ou à la production propre de l'entreprise et lui permettant donc de réduire ses charges. Pour 2002, le surcoût prévu de l'obligation d'achat était ainsi de l'ordre des deux tiers du coût d'achat. En tout état de cause, l'obligation d'achat n'explique qu'une fraction de l'augmentation des consommations en provenance de tiers sur la période.
D'autres explications avancées à votre rapporteur ne sont pas davantage convaincantes. Ainsi, EDF a précisé à votre rapporteur qu'une part de l'augmentation des achats d'énergie était liée aux nouvelles relations contractuelles entre EDF et la Compagnie nationale du Rhône (CNR), mises en _uvre à partir d'avril 2001 qui ont entraîné une augmentation de 202 millions d'euros des achats d'énergie. Toutefois, il apparaît que si ces nouvelles relations contractuelles ont bien contribué à l'augmentation des achats d'énergie, elles ont, simultanément, permis une diminution de 356 millions d'euros des redevances versées à la CNR. Celles-ci étaient également comptabilisés parmi les consommations en provenance de tiers, de sorte que les nouvelles relations contractuelles avec la CNR, loin d'expliquer la dérive continue de ce poste, ont, au contraire, eu un effet net positif de 154 millions d'euros sur son évolution.
Une explication plus sérieuse, mais encore partielle, semble être liée aux versements, prévus par le contrat de groupe, de primes d'assurances destinées à couvrir une partie des engagements futurs au titre des retraites. Ces primes, qui n'étaient pas versées en 1998, se sont élevées à 548 millions d'euros en 2001 (note 25 aux comptes sociaux).
En tout état de cause et compte tenu des quelques postes sur lesquels des économies ont été réalisées, notamment en raison des nouvelles relations contractuelles avec la Cogema et avec la CNR, les diverses explications apportées par EDF ne rendent donc pas pleinement pas compte de l'accroissement rapide des consommations en provenance de tiers. Celle-ci s'explique donc, comme l'augmentation des charges de personnel, par des causes internes à l'entreprise et notamment par la forte croissance des dépenses de services extérieurs. Il a été précisé à votre rapporteur que celle-ci s'expliquait notamment par un renouvellement important des outils informatiques.
Bref, la dégradation de la situation financière d'EDF résulte de l'augmentation des charges qui ne peut être expliquée seulement par des causes exogènes. La dégradation des comptes est donc bel et bien imputable à un manque de rigueur dans la gestion. Le fait que l'intérêt de la direction de l'entreprise ait été tout entier accaparé, depuis plusieurs années, par l'expansion internationale de celle-ci n'y est sans doute pas totalement étranger.
Tant du point de vue industriel que financier, le bilan de la diversification internationale conduite n'est guère satisfaisant. Deux opérations paraissent, en outre, particulièrement difficiles à justifier.
Selon la note 4 aux comptes sociaux d'EDF pour 2001, la somme des dividendes versés à l'établissement public par ses filiales s'est élevée à 160 millions d'euros. Soixante-dix millions d'euros proviennent des participations dans Areva et Total Fina Elf. Cinquante cinq millions d'euros ont été versées par les sociétés immobilières du groupe qui ont, comme la société mère, procédé à des cessions d'actifs immobiliers. Les autres filiales réunies ont versées, en 2001, 35 millions d'euros de dividendes, l'essentiel - soit 28 millions d'euros - provenant de la filiale belge Semobis, présente dans le groupe avant 1998.
Les grandes acquisitions internationales réalisées à partir de 1999, en grande partie par l'intermédiaire d'EDF International, ne contribuent donc pas au résultat d'EDF. Cela résulte, pour l'essentiel, de ce que le résultat pour l'exercice 2001 d'EDF International est très fortement négatif. Les comptes sociaux d'EDF (note 4) mentionnent ainsi une perte de 553 millions d'euros en 2001. Les comptes sociaux d'EDF International indiquent en revanche une perte de 1 392 millions d'euros.
Cette perte s'explique par un accroissement de 1 599 millions d'euros des provisions pour dépréciation d'actifs passées dans les comptes d'EDF International, essentiellement en raison des situations argentine et brésilienne. Les comptables et commissaires aux comptes d'EDF International estiment donc que la valeur des titres détenus par cette société en Amérique latine a perdu 1 599 millions d'euros (10,5 milliards de francs) en 2001.
Les conséquences d'un tel gouffre financier sont naturellement hors de proportion avec la situation des autres filiales du groupe. Il serait pourtant faux de penser que celles-ci sont particulièrement prospères.
EDF a, en effet, communiqué à votre rapporteur un document de synthèse relatif à la rentabilité de ses acquisitions européennes récentes. Selon celui-ci, la rentabilité économique des entreprises acquises à l'étranger est, dans un cas, de 5,1 % et, dans tous les autres, inférieure à 2,5 % et souvent négative.
Les calculs réalisés par votre rapporteur aboutissent à des résultats tout aussi inquiétants pour les deux principales acquisitions européennes récentes d'EDF, London Electricity et EnBW.
Ainsi, selon les comptes d'EDF International, London Electricity a été acquise par EDF en décembre 1998 au prix de 1,39 milliard de livres sterling, soit, au cours d'alors, 1,97 milliards d'euros, auquel il convient d'ajouter la dette nette de London Electricity qui s'élevait alors à 500 millions de livres sterling. Le coût total de l'acquisition a donc été de 2 471 millions d'euros. Le résultat de l'exercice 2001 a été de 65 millions d'euros, selon les comptes sociaux d'EDF International, soit 2,63 % du coût total de l'acquisition.
De même, selon les comptes sociaux d'EDF International (faits marquants de l'exercice), l'acquisition de 34,5 % des parts d'EnBW a coûté 3 341 millions d'euros à EDF International et le résultat net du groupe allemand en 2001 a été de 165 millions d'euros. Ce résultat est toutefois négatif selon les normes comptables françaises comme l'a expliqué M. Jacques Chauvin, directeur financier d'EDF lors de l'audition de M. François Roussely par la commission des finances.
Le moins que l'on puisse dire est, donc, que les résultats des investissements au Royaume-Uni et en Allemagne ont été décevants sur le plan financier. EDF n'est toutefois pas un investisseur financier mais un acteur industriel. C'est donc également au plan industriel qu'il convient d'apprécier les acquisitions réalisées et les synergies dégagées.
Pour EnBW, il est trop tôt pour le faire, EDF étant entré dans le capital de cette entreprise en 2001. On rappellera toutefois que l'appréciation de cette acquisition sur le plan industriel devra prendre en compte les contreparties négociées avec la Commission européenne pour que celle-ci autorise l'opération. Pour être autorisé à acquérir des parts d'EnBW, l'électricien français s'est, en effet, engagé à mettre à la disposition de ses concurrents 6 000 MW de capacités de production situées en France ce qui représente une puissance équivalente à celle détenue, en Italie, par Edison dont EDF a vainement tenté de prendre le contrôle.
En ce qui concerne London Electricity, en revanche, dont l'acquisition date maintenant de bientôt quatre ans, il est légitime de rechercher d'ores et déjà les synergies dégagées. L'évolution des comptes d'EDF maison mère, analysée plus haut, n'atteste pas qu'il ait été tiré profit de celles-ci. Du point de vue de London Electricity, la comparaison des résultats de 2000 et de ceux de 2001 met en évidence un recul du chiffre d'affaires et une progression de nombreuses charges et notamment des dépenses administratives. Là encore, les synergies ne sont donc pas évidentes.
Il convient, en outre, de rappeler qu'à l'image du groupe EDF, London Electricity a réalisé une intense croissance externe notamment en acquérant :
- la centrale thermique classique de West Burton d'une puissance de 2 000 MW (pour un coût de 592 millions d'euros « moins un ajustement pour les coûts de désulfurisation » selon le rapport annuel pour 2001 de London Electricity Group Plc qui diffère sur ce point des comptes consolidés d'EDF International qui comptabilisent cette centrale à un prix d'acquisition de 675 millions d'euros),
- le réseau de distribution Eastern, filiale britannique de TXU, (pour un coût de 903 millions d'euros auquel il faut ajouter la prise en compte d'une dette de 1 210 millions d'euros) ainsi que
- Seeboard (pour un coût total d'environ 2,35 milliards d'euros en incluant la dette reprise ainsi que le coût d'engagements d'achat d'électricité).
Entre novembre 2001 et juin 2002, le coût total des acquisitions britanniques d'EDF via London Electricity Group s'élève donc, au moins, à 5 055 millions d'euros (soit 33,15 milliards de francs). Le coût de cette croissance externe, qui a entraîné un vif accroissement des dettes financières de London Electricity, pèsera, naturellement, à l'avenir, sur les résultats consolidés du groupe.
Les perspectives des principales filiales d'EDF en Europe appellent donc une appréciation prudente. On ne la retrouve pas dans le document de synthèse relatif à la rentabilité des acquisitions d'EDF depuis 1998 transmis par l'entreprise à votre rapporteur qui évoque, pour 2005, des rentabilités économiques en vive augmentation. Aucun élément ne permet toutefois de juger de la validité de ces projections.
Votre rapporteur n'est pas, non plus, en mesure de porter un jugement sur les multiples acquisitions de moindre importance réalisées à l'étranger. Il ne peut donc, à ce stade, qu'attirer l'attention sur l'ampleur des investissements réalisés dans divers Etats et notamment au Mexique (le montant de l'investissement connu pour quatre des cinq centrales réalisées s'élevant pour celles-ci à plus de 880 millions de dollars selon le rapport d'activité d'EDF International) et en Egypte (le montant de l'investissement s'élevant à 670 millions de dollars selon le rapport d'activité d'EDF International).
Tant sur les plans financier qu'industriel, il parait en tout cas difficile de justifier le prix des deux grandes acquisitions étrangères récentes d'EDF. Toutefois, si le bilan des opérations conduites au Royaume-Uni et en Allemagne n'est pas bon, M. François Roussely a indiqué à notre commission sa volonté de développer les synergies industrielles qui finiront peut-être par donner un sens à ces acquisitions. Les mêmes espoirs ne semblent pas permis pour d'autres aventures internationales.
« EDF a investi les marchés brésilien et argentin en 1992, à une époque où ces pays pouvaient être considérés comme des relais de croissance pour l'entreprise permettant de constituer des actifs mobilisables en cas de besoin. Nul ne pouvait prévoir l'évolution de l'économie argentine qui, à cette époque, était bâtie sur un taux de change de un peso pour un dollar. Cette parité n'existe plus. » déclarait François Roussely à l'occasion de son audition par la commission des finances de notre Assemblée, le 18 septembre dernier. Cette explication ne rend nullement compte de la réalité.
Nul, nous dit M. Roussely, ne pouvait prévoir « l'évolution de l'économie argentine ». En 1992, admettons-le, encore que le choix de marchés à l'époque émergents mais qui ont, depuis, sombré pour « constituer des actifs mobilisables en cas de besoin » parait pour le moins curieux. Mais le choix qu'il conviendrait de justifier n'est pas celui de 1992, qui au demeurant n'est pas celui que la direction actuelle de l'entreprise doit assumer, mais bien celui de 2001.
En effet, s'il est vrai que la présence d'EDF en Argentine date de 1992, la prise de contrôle d'Edenor est, elle, très récente. L'acquisition par EDF (via sa filiale EDF International, elle-même relayée, pour partie, par sa filiale EASA) de 49 % des parts d'Edenor a, en effet, été réalisée au printemps 2001. Selon la presse de l'époque, cette prise de contrôle aurait coûté 627,6 millions de dollars à l'électricien français. EDF a également acquis, en mai et en juin 2001, les parts de deux autres partenaires, Astra et Saur. Le total de l'investissement est, selon le rapport d'activité d'EDF International, de 1 191 millions d'euros. La note 14 aux comptes consolidés d'EDF International précise, en outre, que les dettes financières d'Edenor s'élèvent à 628 millions d'euros.
Il ne paraît pas déraisonnable d'espérer qu'un investisseur s'apprêtant à placer près de 1,2 milliards d'euros dans un pays pour acquérir l'entière propriété d'une entreprise lourdement endettée en devises s'interroge un instant sur les perspectives économiques de ce pays et notamment sur la pérennité du cours de sa monnaie.
Or, qu'au printemps 2001, la direction d'EDF n'ait pas été capable de prévoir l'évolution de la situation argentine, il faut bien l'admettre. Que nul n'ait, alors, pu le faire paraît, en revanche, difficile à démontrer. Qu'aurait, en effet, appris un quidam curieux à la lecture de la presse française ? Qu'on en juge par ces quelques titres, en gardant en mémoire que la prise de contrôle d'Edenor a fait l'objet d'un « memorandum of understanding » le 21 février 2001 mais que le contrat correspondant n'a été signé que le 30 mars 2001, l'opération étant « finalisée » le 21 avril 2001 () et que les parts de certains partenaires ont été acquises en mai et en juin 2001 :
« L'Argentine s'enlise dans la crise financière » (Les Echos, 25 avril 2001) ; « Les craintes de défaillance de l'Argentine se renforcent et font tâche d'huile » (L'Agefi, 24 avril 2001) ; « Argentine : L'extension à l'euro de la convertibilité fait renaître le spectre de la dévaluation » (Dépêche AFP, 16 avril 2001) ; « Marchés émergents : les craintes des investisseurs se propagent aux résidents » (L'Agefi, 5 avril 2001) ; « Les agences Fitch et Moody's abaissent à leur tour leurs notes sur l'Argentine » (La Tribune, 30 mars 2001) ; « Ruée vers les banques sud-américaines » (La Tribune, 27 mars 2001) ; « Le nouveau ministre de l'Economie argentin jette déjà l'éponge » (La Tribune, 21 mars 2001) ; « La détérioration politique et financière en Argentine suscite l'inquiétude » (L'Agefi, 20 mars 2001) ; « L'Argentine dans la tourmente après l'annonce d'un plan d'austérité » (Les Echos, 19 mars 2001).
Etait-il, dans ces conditions, impossible de prévoir une possible dégradation de la situation argentine ? Il est difficile de le croire. Une certaine prudence aurait du s'imposer. Des critiques similaires peuvent être faites pour ce qui concerne les investissements brésiliens du groupe dont les derniers datent de juillet 2001 et février 2002 mais dont certains avaient été réalisés plus tôt, notamment en 1998 et en 2000. Le résultat d'ensemble de ces opérations est éloquent.
Les titres des filiales d'EDF en Argentine et au Brésil (Edenor et Light ainsi que Easa et Lidil qui sont des holdings détenant des participations dans ces deux sociétés) sont inscrits au bilan d'EDF International pour une valeur nette totale de 1 635 millions d'euros. Cette valeur nette résulte du provisionnement pour dépréciation par EDF International de 1 455 millions d'euros en 2001. Elle reste néanmoins très optimiste.
En effet, selon les comptes sociaux d'EDF International, la perte cumulée des filiales argentines et brésiliennes, en 2001, a été de 966 millions d'euros et les dettes financières de Light et d'Edenor s'élèvent à 1 318 millions d'euros. Dans ces conditions, il parait peu probable qu'un investisseur soit prêt à acquérir ces sociétés à la valeur comptable nette qu'elles conservent dans les comptes d'EDF International. On se permettra de douter que quiconque soit aujourd'hui prêt à payer pour la totalité du capital de Light les 260 millions d'euros consacrés par EDF au début de l'année à l'acquisition de 6,4 % des parts de cette société.
Enfin, pour évaluer d'une manière complète l'exposition d'EDF International au risque sud-américain, il importe de rappeler que cette société a octroyé un prêt de 606 millions d'euros à sa filiale Light et que sont inscrits parmi les créances d'EDF International, 103 millions d'euros d'impôts différés sur pertes reportables au titre de Light dont le groupe ne pourrait tirer profit que si la situation brésilienne s'améliorait sensiblement. L'hypothèse parait si peu probable que le commissaire aux comptes a jugé nécessaire d'attirer l'attention dans son rapport, sur les incertitudes entourant la recouvrabilité de ces créances. Les comptes consolidés du groupe EDF (note 17), singulièrement plus optimistes, estiment en revanche que « les perspectives de résultat permettent une récupération dans un avenir proche ».
EDF s'est lancé, à la fin du printemps 2001, dans une prise de contrôle de l'électricien italien Edison, contrôlé par Montedison en acquérant 20 % du capital de cette société. Cette opération déclenche un tollé politique en Italie que n'avait, semble-t-il, pas prévu l'électricien français. En contradiction évidente avec le droit communautaire, le Gouvernement italien adopte un décret-loi sur mesure qui limite, dans le secteur électrique, à 2 % les droits de vote d'un actionnaire non coté détenant, sur son marché national, une position dominante, bref les droits de vote d'EDF. Le ministre italien du Trésor, M. Visco, estime qu'EDF doit vendre ses parts d'Edison.
Pour sortir de cet imbroglio, EDF s'associe à Fiat. Avec d'autres partenaires, les deux entreprises prennent le contrôle de 83 % de Montedison par l'intermédiaire d'une holding, Italenergia. EDF détient aujourd'hui 24,6 % des parts de cette société, devenue depuis Italenergia Bis. La législation italienne n'évolue pas et continue de faire obstacle, toujours au mépris du droit communautaire, à une éventuelle prise de contrôle par EDF. Le lancement par la Commission européenne, mercredi 16 octobre, d'une procédure d'infraction contre l'Italie permet toutefois d'espérer une prochaine évolution de cette législation.
Les comptes d'EDF et d'EDF International ne permettent pas de faire toute la lumière sur cette opération. Ce qui est manifeste, en revanche, c'est que l'intervention de Fiat n'a nullement débloqué la situation pour EDF. Cette intervention semble pourtant avoir été coûteuse. Sur ce point toutefois, les chiffres dont dispose votre rapporteur et provenant d'EDF et de diverses sources publiques sont, pour partie, contradictoires notamment pour ce qui concerne la valeur des divers actifs industriels apportées directement et indirectement par Fiat à Italenergia, de sorte qu'il ne lui est pas possible d'évaluer de manière incontestable le coût de l'intervention de Fiat.
La situation est, à ce jour, la suivante : EDF ne contrôle pas Italenergia Bis, holding contrôlant Montedison, et n'est, d'ailleurs, pas encore autorisé à le faire par le droit italien. D'après un communiqué de presse d'Italenergia publié mercredi 18 septembre dernier confirmant des informations rendues publiques le 14 juin, EDF s'est engagé à acheter les parts de tous ses partenaires dans Italenergia Bis. Interrogé sur ce point alors même que paraissait le communiqué de presse d'Italenergia, François Roussely a refusé, devant la commission des finances, de reconnaître la réalité de ces engagements hors bilan.
Selon le communiqué de presse d'Italenergia, aux termes de ces promesses d'achat, Fiat pourrait vendre à EDF « ses 24,6 % dans Italenergia Bis pour un montant au moins égal à 1,15 milliard d'euros ». La presse a évoqué des chiffres significativement supérieurs. En tout cas, si les autres partenaires bénéficient de conditions financières identiques, le montant total de l'engagement d'EDF s'élève au moins à 3 830 millions d'euros (25,1 milliards de francs). Il va de soi que ces partenaires n'exerceront ces options de vente que si la situation d'Italenergia Bis le justifie de leur point de vue. En réalité, ou l'acquisition s'avère surévaluée et EDF hérite de l'ensemble ou elle est rentable auquel cas FIAT pourrait exercer l'option d'achat dont cette entreprise dispose sur 14 % du capital et se retrouver alors, compte tenu du fait qu'elle détient déjà 24,6 % des parts, avec 38,6 % de celle-ci contre 20 % pour EDF, les autres partenaires étant alors en situation d'arbitre.
Les comptes publiés permettent de juger la situation économique et financière d'EDF au 31 décembre 2001 ce que votre rapporteur s'est efforcé de faire. Celle-ci apparaît doublement préoccupante pour l'avenir car elle laisse craindre une dégradation ultérieure accrue des résultats et, dans la perspective de l'ouverture du capital, une importante perte de valeur.
Les perspectives de résultat paraissent incertaines tant à court qu'à moyen termes, surtout compte tenu des engagements de longue durée (retraites, démantèlement des centrales, aval du cycle du combustible) pesant sur l'entreprise.
Après avoir jugé, lors de son audition par la commission en juillet, que les résultats de son groupe allaient en 2002 « frôler le rouge », M. François Roussely a estimé, lors de son audition par la commission des finances en septembre, que ce résultat serait finalement en « mesure de s'éloigner, dans le bon sens, de la zone critique » sous réserve « des marge d'incertitudes en la matière, par exemple s'agissant des conditions climatiques ». Sans doute, les services d'EDF prévoient-ils un hiver exceptionnellement rigoureux car on comprend mal comment des comptes sincères pourraient aboutir, en 2002, à un résultat significativement positif...
L'ensemble des éléments qui ont conduit, selon M. François Roussely, à l'augmentation des charges pesant sur l'entreprise en 2001 ont, en effet, vocation à peser à nouveau sur celui de 2002 et leur charge va croissant. De nouvelles installations bénéficiant de l'obligation d'achat entrent ainsi en service, mois après mois. De même, la charge des retraites, liées à la détérioration du ratio actifs/inactifs, s'accentue chaque année. Seules les heures supplémentaires liées aux tempêtes de 1999 vont-elles peut-être, enfin, se tarir...
Cette situation est particulièrement préoccupante à la veille d'une accélération rapide de l'ouverture à la concurrence du marché de l'électricité. Les comptes de 2001 ne reflètent encore que très partiellement cette nouvelle réalité. En effet, en 2001, EDF n'avait encore perdu que peu de clients mais la part de marché perdue s'est accrue rapidement à partir de l'automne 2001. Selon le rapport annuel de la Commission de régulation de l'électricité pour 2002, EDF avait perdu 7 % du marché ouvert à la concurrence en septembre 2001 et 21 % en avril 2002. EDF avait donc perdu, en avril 2002, 6,3 % du marché français.
Ces pertes de marché vont inéluctablement se refléter dans les comptes à partir de 2002. On sait, également, que le résultat avant impôt du groupe en 2001 n'a été positif (1 551 millions d'euros) que grâce à des éléments exceptionnels, dont le principal est la renégociation des contrats conclus avec la Cogema qui a eu un impact positif de 1 285 millions d'euros (note 23 des comptes sociaux d'EDF), mais qui comprennent également des produits de cessions d'immeubles et de terrains.
Ces opérations ont dégagé des plus-values qui s'élèvent à 579 millions d'euros, dont 488 millions d'euros pour les actifs directement cédés par la maison mère et 91 millions d'euros pour les actifs cédés par des filiales. Selon les informations transmises à votre rapporteur par EDF, le montant total des cessions d'actifs immobiliers réalisées par EDF, pour l'essentiel au cours des exercices 2000 et surtout 2001, a été de 1 400 millions d'euros.
Le contrat de groupe 2001-2003 prévoit, en outre, la poursuite de l'investissement dans des fonds externalisés pour couvrir les engagements de retraite au même rythme que durant la période 1997-2000 sur laquelle le montant investi a été de 2,1 milliards d'euros. Or, le montant des primes nettes versées pour 2001 n'a été que de 500 millions d'euros. Si ce montant n'est pas significativement augmenté en 2002, l'entreprise n'aura atteint que moins de la moitié de l'objectif fixé par le contrat de groupe aux deux tiers de celui-ci et devra donc accroître très sensiblement, en pratique doubler, ses versements en 2003.
EDF a, en outre, confirmé à votre rapporteur l'information donnée dans la presse faisant état de dotations importantes aux provisions en 2002 pour tenir compte de la dégradation de la situation sud-américaine.
Dans ces conditions, un résultat positif en 2002 parait bien peu probable.
A l'horizon 2005-2008, ce qui apparaît particulièrement préoccupant à votre rapporteur est la perspective d'une poursuite des tendances actuelles qui conduirait au risque d'un effet de ciseaux associant, d'une part, la baisse des produits sous l'effet direct (perte de clients) et indirects (pression sur les prix) de la concurrence et, d'autre part, la poursuite de l'augmentation des charges.
EDF a précisé à votre rapporteur que la notion de point mort, c'est-à-dire le niveau de chiffre d'affaires auquel les produits couvrent exactement les charges, lui était difficilement applicable et que le montant de celui-ci n'était donc pas estimé. On peut néanmoins rappeler que les différentes charges (consommations en provenance de tiers, charges de personnel, impôts et taxes) représentent plus de 75 % de la production de l'exercice 2001. Il est donc évident que l'entreprise aura à faire face à de graves difficultés si son chiffre d'affaires en France recule de manière significative sous l'effet de la concurrence comme le laissent craindre les exemples étrangers caractérisés par une libéralisation plus précoce.
Il faut rappeler enfin que la seconde directive devrait imposer une ouverture d'au moins deux tiers du marché en 2004 ce qui aura pour conséquence, d'une part, d'augmenter encore le nombre de clients perdus par EDF et, d'autre part, de limiter le nombre de consommateurs domestiques captifs soumis à un tarif administré et susceptibles de financer le rétablissement de la santé économique de l'établissement public.
Toute réflexion sur la situation d'EDF doit être conduite en conservant en mémoire le fait que l'entreprise va rapidement avoir à se préparer à faire face à deux charges considérables, celle des retraites, d'une part, et celle liée au démantèlement des centrales nucléaires et à la fin du combustible, d'autre part. Dans le cas des retraites, une décision prochaine des pouvoirs publics, au terme de la négociation engagée par la branche avec les personnels, devrait permettre de clarifier les choses. Dans le cas des engagements liés aux spécificités de la production nucléaire, la survenance de la charge n'interviendra que progressivement et, en tout cas pour ce qui concerne le démantèlement, à un horizon relativement éloigné même si aucune assurance n'existe quant au prolongement de la durée de vie des centrales en activité. Les sommes concernées sont toutefois telles que l'entreprise ne pourra éluder longtemps la préparation sérieuse de l'avenir d'autant que l'édiction de règles communautaires en la matière semble envisagée.
Or, dans les deux cas, les moyens aujourd'hui disponibles pour couvrir les engagements sont hors de toute proportion avec les besoins prévisibles. Pour les retraites, ce fait est bien connu puisque la valeur du fonds externalisé s'élevait, fin 2001, à 2 128 millions d'euros pour un engagement de plusieurs dizaines de milliards d'euros.
La situation est similaire pour ce qui concerne les dépenses liées au démantèlement des centrales nucléaires et à l'aval du cycle du combustible. Dans un souci louable de préparation de l'avenir, le contrat de groupe 1997-2000 a, en effet, prévu la constitution d'un portefeuille d'actifs dédiés. Au 31 décembre 2001, ces actifs dédiés représentaient 1 585 millions d'euros (note 3 aux comptes sociaux pour 2001). A la même date, les provisions correspondant aux dépenses liées au démantèlement des centrales nucléaires et à l'aval du cycle du combustible, qui ne constituent qu'une classification comptable sans que les moyens correspondants soient identifiés mais permettent de les évaluer, étaient de 27 milliards d'euros.
L'évolution de la situation économique et financière d'EDF présente un intérêt particulier dans le contexte de l'ouverture envisagée du capital de cette entreprise. Elle influence, en effet, la valeur de cette entreprise qui fait partie de notre patrimoine commun.
Le seul travail publié évaluant Electricité de France a été réalisé par la Fondation Concorde. La méthodologie employée n'est pas exempte de critiques de sorte que la valeur obtenue paraît contestable. Mais si la méthode est fragile en valeur absolue, elle est néanmoins susceptible de rendre compte de l'évolution relative de la valeur du groupe depuis 1998.
La première étape du calcul conduit à évaluer la valeur de la maison mère à partir de l'excédent brut d'exploitation, en appliquant un multiple, au demeurant optimiste, de 8,8. Avec cette méthode, on aboutit à une valeur de la maison mère de 64,85 milliards d'euros en 2001. Elle était de 83,67 milliards d'euros en 1998. La diminution de la valeur du groupe est de 18,82 milliards d'euros (123 milliards de francs).
La seconde étape consiste à ajouter la valeur des participations dans les filiales et à retrancher celle, actualisée, de la dette financière. La Fondation Concorde estimait, qu'en 2001, ces deux montants se compensaient « à peu près ».
En affinant le calcul, on peut évaluer, toujours selon la méthodologie de la Fondation Concorde, la valeur actualisée de la dette financière nette. Celle-ci est passée de 19 470 millions d'euros en 1998 à 22 209 millions d'euros en 2001. La valeur actualisée de la dette nette selon les hypothèses retenues par la fondation Concorde est donc passée de 13 251 millions d'euros à 15 115 millions d'euros. L'augmentation de la valeur actualisée de la dette donc la diminution de la valeur du groupe est de 1 864 millions d'euros (12,2 milliards de francs).
L'évaluation de la valeur des participations est plus délicate. La valeur totale des participations, au 31 décembre 2001, est évaluée par les comptes sociaux d'EDF à 14 881 millions d'euros dont 9 681 millions d'euros pour EDF International. Au 31 décembre 1998, il était de 34 641 millions de francs soit 5 281 millions d'euros dont 2 995 millions d'euros de valeur brute (avant provisions qui ne sont pas ventilées dans les comptes sociaux de 1998) pour EDF International. Sur la base des comptes sociaux d'EDF, la valeur totale des participations, donc du groupe, a donc augmenté de 9 600 millions d'euros entre 1998 et 2001.
Par voie de conséquence, on peut évaluer, en première analyse, que la valeur nette du groupe a diminué de 11 084 millions d'euros (72,7 milliards de francs) entre 1998 et 2001.
Ce chiffre repose sur la valorisation des participations des filiales par les comptes d'EDF au 31 décembre 2001. La perte réelle de valeur du groupe entre 1998 et 2001 est sans doute supérieure.
Lors de sa réunion du mardi 15 octobre 2002, la commission a examiné, pour avis, sur le rapport de M. Jacques Masdeu-Arus, les crédits de l'industrie et de l'énergie pour 2003.
Après l'exposé du rapporteur, M. Patrick Ollier, président, a salué le travail important de celui-ci puis M. Jean-Yves Le Déaut est intervenu pour nuancer la présentation optimiste faite des crédits de l'industrie pour 2003. Il a tout d'abord rappelé que la hausse des crédits de l'ADEME ne traduisait qu'une remise à niveau après une baisse destinée à permettre l'apurement des sous-consommations passées.
Puis, il a regretté que seulement 19 % des crédits du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie soient affectés à la politique industrielle et que seulement 1 % d'entre eux soient destinés aux PME et aux PMI, pourtant particulièrement créatrices d'emplois. Il a également vivement regretté que le projet de loi de finances pour 2003 ne mette pas en _uvre le renforcement des moyens de l'inspection des installations classées pourtant jugé nécessaire de manière unanime par la Commission d'enquête sur la sûreté des installations industrielles et des centres de recherche et sur la protection des personnes et de l'environnement en cas d'accident industriel majeur. Enfin, il a dénoncé le manque de moyens de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) dont les ressources sont inférieures à la somme de celles dont disposaient les deux organismes fusionnés en son sein, l'Institut de protection et de sûreté nucléaire (IPSN) et l'Office de protection contre les rayonnements ionisants (OPRI).
En réponse, M. Jacques Masdeu-Arus, rapporteur pour avis des crédits de l'industrie et de l'énergie, a précisé qu'il n'avait pas évoqué la situation de l'inspection des installations classées car les moyens des directions régionales de l'industrie, de la recherche et de l'environnement au titre de leurs missions de prévention des pollutions et des risques figuraient non au budget du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie mais à celui du ministère de l'écologie et du développement durable.
M. Patrick Ollier, président, a souligné que la commission était unanimement attachée à ce que l'inspection des installations classées dispose des moyens nécessaires au bon exercice de ses missions.
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Conformément aux conclusions du rapporteur pour avis, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de l'industrie pour 2003.
N° 0258 - 06 - Avis de M. Jacques Masdeu-Arus sur le projet de loi de finances pour 2003 - Economie, finances et industrie : Industrie-Energie
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() Ce montant intègre la charge des compensations avec les autres régimes légaux de retraite qui s'élevait, pour l'exercice 1998 à 167,7 millions d'euros (note 26 aux comptes sociaux) et qui constitue effectivement une charge de personnel mais qui était comptabilisée, jusqu'au 1er janvier 2001, parmi les impôts et taxes. Cette charge est désormais comptabilisée en charges de personnel faussant ainsi la comparaison des charges de personnel de l'exercice 2001 avec celles des exercices antérieurs sans le retraitement auquel il a été procédé.
() La note 25 aux comptes sociaux d'EDF précise, en effet, que la contribution d'EDF à l'équilibre du régime des industries électriques et gazières s'élève à 1 959 millions d'euros en incluant les compensations avec les autres régimes légaux. La note 26 aux comptes sociaux du rapport annuel de 1998 précisait pour sa part que la contribution d'équilibre à la charge de l'entreprise s'élevait pour cet exercice à 11,1 milliards de francs à laquelle s'ajoutait 1,1 milliard de francs au titre des compensations avec les autres régimes légaux de retraite, soit 12,2 milliards de francs ou 1 860 millions d'euros.
() Selon les notes 21 aux comptes sociaux pour 1998 et 2001, les effectifs ont augmenté entre le 31 décembre 1998 et le 31 décembre 2001 qu'il s'agisse de l'effectif moyen annuel à équivalent temps plein(+ 129 agents) ou de l'effectif total au 31 décembre (+ 1 264 agents). On se souvient que M. François Roussely avait indiqué à la commission des finances que « les effectifs de l'entreprise ont diminué de 1 500 personnes depuis le 31 décembre 1998 ». EDF a précisé à votre rapporteur que ce chiffre traduisait l'évolution des effectifs entre le 31 décembre 1998 et la fin septembre 2002 et que, début octobre 2002, l'effectif s'établissait à 112 918 agents.
() On se souvient qu'en réponse à une question de M. François-Michel Gonnot lui demandant s'il était exact que le quart du personnel travaillait 32 heures par semaine, M. François Roussely avait indiqué à la commission de la production que l'horaire hebdomadaire collectif de 32 heures concernait moins de 20 % du personnel puis avait précisé à la commission des finances qu'il convenait de « distinguer entre les 20 % du personnel qui ont opté pour un horaire collectif de travail à 32 heures payées 35, et les 5 % qui ont choisi de travailler 32 heures, pour des raisons personnelles ». EDF a précisé à votre rapporteur qu'au 31 décembre 2001, 23 252 agents avaient un horaire hebdomadaire de 32 heures en réduction collective du temps de travail et 5 571 agents avaient un horaire hebdomadaire de 32 heures en temps choisi individuel. Par comparaison avec les chiffres du rapport sur l'état actionnaire, le nombre total d'agents dont le temps de travail est inférieur ou égal à 32 heures aurait donc diminué de 2 795 courant 2001.
() Communiqué de presse publié par EDF le 27 avril 2001.