N° 259

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 10 octobre 2002

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2003 (n° 230),

TOME IV

AFFAIRES ÉTRANGÈRES

FRANCOPHONIE ET

RELATIONS CULTURELLES INTERNATIONALES

PAR M. FRANÇOIS ROCHEBLOINE,

Député

--

SOMMAIRE

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INTRODUCTION 5

I - LA SITUATION DE L'AGENCE POUR L'ENSEIGNEMENT
      FRANÇAIS À L'ÉTRANGER (AEFE)
6

II - L'ACTION AUDIOVISUELLE EXTÉRIEURE 10

EXAMEN EN COMMISSION 27

AMENDEMENT ADOPTÉ PAR LA COMMISSION 31

PERSONNES ENTENDUES PAR LE RAPPORTEUR 33

Mesdames, Messieurs,

Comme chaque année, la Commission des Affaires étrangères est saisie pour avis des crédits relatifs aux relations internationales extérieures et la francophonie. L'analyse budgétaire de ces crédits est malaisée, car ils sont répartis sur les trois agrégats budgétaires intéressant le ministère des Affaires étrangères : celui regroupant les moyens des services centraux et du réseau diplomatique consulaire à l'étranger, celui retraçant l'action de solidarité envers les Français de l'étranger ainsi que les moyens du service public d'enseignement français à l'étranger, et enfin, celui regroupant les moyens de coopération et d'interventions multilatérales. La réforme en cours de la présentation des lois de finances devrait permettre de clarifier cette situation en regroupant l'ensemble des crédits affectés à l'action culturelle extérieure de la France en un seul programme.

Les crédits concourant à l'action culturelle extérieure de la France à l'étranger s'élèvent pour 2003 à 1,3 milliard d'euros et relèvent à 82 % du ministère des Affaires étrangères et à 8,6 % du ministère de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Les autorisations de programmes intéressant les Affaires étrangères sont passées de 33,84 millions d'euros en 2002 à 35,60 millions d'euros en projet de loi de finances pour 2003 (+5,2 %), tandis que les dépenses ordinaires et les crédits de paiement passent de 1,08 à 1,11 milliard d'euros en 2003 (+2,3 %).

Quant aux crédits concourant au développement de la langue française et de la francophonie, ils atteignent 0,88 milliard d'euros pour 2003 et sont pour plus de 90 % mis en _uvre par le ministère des Affaires étrangères. Le total des autorisations de programme du ministère des affaires étrangères passe de 33,85 millions d'euros en 2002 à 35,62 pour le projet de loi de finances pour 2003 (+5,2 %) tandis que les dépenses ordinaires et les crédits de paiement passent de 749,19 à 802,13 millions d'euros (+7 %).

Cette année, votre Rapporteur souhaiterait attirer l'attention de la Commission sur deux points : la situation budgétaire de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE) et les perspectives de l'action audiovisuelle extérieure.

I - LA SITUATION DE L'AGENCE POUR L'ENSEIGNEMENT FRANÇAIS À L'ÉTRANGER (AEFE)

A - Présentation générale de l'AEFE

L'Etat apporte son concours aux établissements scolaires français à l'étranger par l'intermédiaire de l'AEFE, qui a été instituée par la loi n° 90-588 du 6 juillet 1990 en la forme d'un établissement public national à caractère administratif. Cette loi plaçait l'AEFE sous la tutelle des ministres des Affaires étrangères et de la Coopération. Les deux ministères ayant fusionné en janvier 1998, elle est désormais sous la seule tutelle du Quai d'Orsay.

Les missions de l'agence sont les suivantes :

L'AEFE gère directement 65 des établissements scolaires français à l'étranger. Ces établissements, dits en gestion directe, sont la transposition à l'étranger des établissements publics français. Elle a par ailleurs passé convention avec 203 autres établissements, gérés par des associations à statut privé étranger (associations de parents d'élèves le plus souvent) ou par des associations métropolitaines comme l'Alliance Française ou la Mission Laïque Française.

Dans ces établissements en gestion directe ou conventionnés, l'AEFE peut affecter et rémunérer des personnels titulaires du ministère de l'Éducation nationale ; elle peut également attribuer des subventions pour la formation continue, le projet d'établissement, le fonctionnement, les investissements ; elle a, enfin, la faculté de verser des bourses aux enfants français. L'agence n'a toutefois n'a pas de lien juridique avec 141 des établissements scolaires français à l'étranger. Dans ces établissements, dits non conventionnés, elle peut néanmoins attribuer des subventions de fonctionnement et verser des bourses aux enfants français.

Évolution des effectifs scolaires
de 1997 à 2002

Nationalité

1997-1998

1998-1999

1999-2000

2000-2001

2001-2002

Français

64 605

66 069

66 951

67 779

68 474

Nationaux

70 680

72 062

70 415

69 009

67 820

Etrangers-tiers

20 799

19 803

21 111

21 267

21 956

TOTAL

156 084

157 934

158 477

158 055

158 250

Répartition géographique des élèves

de 1997 à 2002

Zone géographique


1997-1998


1998-1999


1999/2000


2000/2001


2001/2002

Europe occidentale
Europe centrale et orientale
Amérique du Nord
Amérique latine
Maghreb
Afrique champ
Afrique hors champ
Moyen-Orient
Asie/Océanie
Océan indien

36 658

 2 669

 9 892
23 292
21 815
30 693

 5 509
17 017
 8 539

36 364

 2 814

10 283
24 244
21 746
30 787

 5 689
17 379
 8 628

37 250

 2 894

10 197
23 973
21 339
30 744

 5 820
17 583
 8 677

35 709

 3 920

10 196
23 532
22 894
19 852

 5 936
17 442
 9 016
 9 558

35 432

 5 386

 9 452
22 438
21 337
21 641

 5 958
17 919
 8 802
 9 755

TOTAL

156 084

157 934

158 477

158 055

158 250

Source : Agence pour l'Enseignement français à l'étranger

B - Les contraintes financières liées à la réforme des rémunérations

Le budget pour 2002 s'élève à 405,71 millions d'euros, dont plus de 82 % correspondent aux charges de personnel. Celles-ci sont intégralement couvertes par la subvention de l'Etat, dont le montant représente 82,83 % des produits prévus. Dans le projet de loi de finances pour 2003 la dotation de l'AEFE passe de 314,24 à 337,78 millions d'euros (+7,7 %).

La contribution des parents d'élèves s'élève pour sa part à 66,275 millions d'euros en 2002, soit une augmentation de plus de 10 % par rapport à 2001.

Pour 2003 l'Agence doit à la fois tenir compte de l'augmentation des effectifs des élèves (voir supra), de l'accroissement du nombre de boursiers, de la rémunération des personnels enseignants des nouveaux établissements de Kaboul et d'Alger et du coût de la réforme des rémunérations des enseignants résidents. Cette réforme, opérée par la voie réglementaire au début de l'année, a diminué le différentiel de rémunération entre les enseignants expatriés et les enseignants résidents à compter du 1er septembre 2002, sauf pour les établissements des États-Unis pour lesquels un moratoire a été prévu jusqu'au 1er septembre 2003. Afin de financer le surcoût de 14,6 % lié à la progression générale de la rémunération des résidents, l'Agence doit, à terme, diminuer le nombre d'enseignants expatriés. Ce rééquilibrage ne pourra s'opérer que dans le cadre des mouvements de personnel et il nécessitera donc plusieurs années scolaires.

Il est donc pour le moins contradictoire que le projet de loi de finances prévoie simultanément une mesure nouvelle non reconductible de 15,5 millions d'euros pour financer le coût de la réforme des rémunérations des personnels résidents tout en prévoyant de réduire ces mêmes crédits de 6,4 millions d'euros au titre d'une « rationalisation du réseau de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger » qui concerne à la fois les effectifs et les moyens.

Si cette mesure devait être adoptée, elle aurait pour conséquence le déconventionnement de plusieurs établissements à la rentrée prochaine, ce qui pourrait aboutir à leur fermeture. Une telle situation étant de toute évidence contraire à la volonté manifestée par le Gouvernement de favoriser la présence d'établissements d'enseignement français à l'étranger, votre Rapporteur ne peut que déplorer cette disposition et souhaite qu'une solution soit trouvée lors de la discussion budgétaire.

II - L'ACTION AUDIOVISUELLE EXTÉRIEURE

L'audiovisuel extérieur doit faire l'objet d'une attention particulière des pouvoirs publics, car le projet de chaîne d'information continue, appelé de ses v_ux par le chef de l'Etat, devrait prochainement voir le jour. Il n'est donc pas inutile de rappeler quels sont aujourd'hui les acteurs de ce secteur, dont la tutelle est exercée par le ministère des Affaires étrangères, car la nouvelle chaîne d'information devra trouver sa place dans un paysage complexe caractérisé par l'empilement et l'enchevêtrement des structures.

A - Un paysage complexe

1) Le cadre budgétaire

· Le bilan des années précédentes

Depuis 1998, le ministère des Affaires étrangères a entrepris de rééquilibrer le budget de l'action audiovisuelle extérieure en faveur de la télévision. Sans méconnaître le caractère irremplaçable des radios internationales dans les zones en crise et les régions les plus pauvres (notamment l'Afrique), il a estimé que la télévision extérieure ne disposait pas de moyens financiers à la hauteur de la place qu'occupe aujourd'hui ce média dans la plupart des pays.

Dans cette perspective, et sur la base des orientations annoncées dès 1998, une relance de l'effort budgétaire en faveur de l'action audiovisuelle extérieure est intervenue en 1999, marquée par une augmentation nette des moyens consacrés à la télévision de 14,48 millions d'euros (95 MF), financée par une partie des économies réalisées sur l'onde courte radiophonique et pour l'essentiel par redéploiement au sein du budget de l'action culturelle, scientifique et technique du ministère (avec notamment un transfert de missions de CFI à TV5).

Cette tendance s'est poursuivie, à un degré moindre, en 2000 et 2001, avec une nouvelle augmentation des moyens de TV5, financée par redéploiement sur le budget du ministère, de 3,81 millions d'euros (25 MF) en 2000 et de 1,52 millions d'euros (10 MF) en 2001, qui a permis à la chaîne de poursuivre la mise en place du plan de modernisation élaboré par M. Jean Stock. En revanche, l'évolution des subventions allouées aux autres opérateurs a été gelée. Le coût des mesures sociales négociées par RFI en 2000 a, pour sa part, été financé en 2000 et 2001 par des dotations complémentaires non reconductibles sur la redevance.

En juin 2001, l'aboutissement des négociations entre les partenaires francophones de TV5, débouchant sur la création de TV5 Monde, structure unique de pilotage de la chaîne basée à Paris sous responsabilité essentiellement française, est venu modifier considérablement les perspectives de cet opérateur, avec des conséquences budgétaires importantes sur la contribution française au financement de la chaîne francophone. Cette réforme des structures de TV5 conduit mécaniquement à augmenter la contribution française annuelle de 3,22 millions d'euros (21,1 MF).

· Les orientations pour 2003

Pour 2003, le montant des dépenses ordinaires et des crédits de paiement prévu en loi de finances pour l'audiovisuel extérieur s'élève à 165 millions d'euros, soit une baisse de 1,9 %. Cet ajustement intervient après une hausse de 2,36 % en 2002, mais le gel des crédits votés en loi de finances initiale pour 2002 (à hauteur de 4,2 millions d'euros) a annulé en totalité l'effet des mesures nouvelles décidées l'an dernier.

Dans ce contexte particulièrement contraint, le ministère des Affaires étrangères a choisi de maintenir l'effort budgétaire décidé en faveur de TV5 (+ 5,1 millions d'euros) afin de financer la relance de la chaîne sur le continent américain et notamment aux Etats-Unis.

S'agissant de RFI, qui connaît une situation budgétaire très tendue depuis plusieurs années, il a également été décidé de maintenir la totalité de l'augmentation prévue (+ 0,76 million d'euros, s'ajoutant à une augmentation de la redevance de 5,34 millions d'euros) et d'autoriser en outre l'entreprise à utiliser la totalité de ses excédents de gestion disponibles sur l'année 2002. Le ministère des Affaires étrangères a choisi d'augmenter la dotation de RFI de 0,7 million d'euros (+ 1%), alors même que le financement de cet opérateur sur la redevance diminue pour sa part de 0,44 million d'euros (- 0,8%), compte tenu de la non reconduction de la mesure de 1,5 million d'euros accordée en loi de finances rectificative au titre de l'exercice 2002. A défaut d'un abondement de la dotation en redevance dans le prochain collectif budgétaire, RFI sera donc contrainte en 2003 d'engager des redéploiements.

La dotation des autres opérateurs (RMC-Moyen-Orient, CFI, Portinvest, Médi 1) a, pour sa part, été gelée, voire diminuée quand leur situation financière le permettait.

La ligne « bouquets satellitaires » sera réduite de 6,71 millions d'euros à 2,55 millions d'euros, les candidats à ce type d'aides étant dès à présent informés qu'elles ne seront plus reconduites en 2004. Compte tenu des engagements à long terme pris par les chaînes concernées en termes de contrats satellitaires, il n'a pas en effet pas été jugé opportun d'interrompre brutalement cette politique en 2003.

La ligne « Euronews » sera supprimée, les modalités d'une éventuelle poursuite du soutien de l'Etat à cette chaîne actuellement en grande difficulté à la suite du retrait de l'opérateur britannique ITN étant examinées dans le cadre de la réflexion en cours sur le projet de chaîne internationale d'information.

La politique de soutien à l'exportation (disques, programmes audiovisuels, cinéma) a été préservée mais le soutien à la diffusion internationale des chaînes françaises, dont l'enveloppe a dû être amputée, devra être concentrée sur un nombre plus restreint de projets.

*

*       *

Dans l'attente des décisions qui devraient être prises d'ici la fin de l'année, le projet de loi de finances pour 2003 ne reflète donc que partiellement les ambitions de la politique audiovisuelle extérieure qui sera menée au cours du prochain exercice. Le projet de nouvelle chaîne d'information internationale, probablement ciblée dans un premier temps sur le monde arabe, devra se traduire par des mesures nouvelles spécifiques en faveur du ministère des Affaires étrangères en loi de finances rectificatives pour 2002.

DOTATIONS AUX OPERATEURS AUDIOVISUELS EXTERIEURS

chapitre 42-14

En millions d'euros

BÉNÉFICIAIRE

1999

2000

2001

2002

LFI

2002

exécution

2003

RFI

RMC Moyen Orient

65,86

4,27

69,59

4,27

68,91

5,41 (1)

69,67

4,27

69,67

4,27

70,37

4,27

Medi 1

1,07

1,07

2,59 (2)

1,07

- (3)

0,61

TV5

49,28

53,59

56,41 (4)

58,63

58,65

60,80

CFI

23,32

23,06 (5)

22,52

22,52

22,03

22,50

Portinvest (Le Sat)

2,33

1,95

1,65

1,65

0,70

1,00

France télévision

0,96

0,96

1,11

0,96

1,11

0,75

Diffusion TV Maghreb

1,07

1,07(6)

-

-

-

-

Bouquets satellitaires

3,35

4,98

3,10

6,71

4,85 (7)

2,55

Euronews

0,61

0,61

0,61

0,61

0,61

-

Soutien à l'exportation

0,93

1,23

1,88

2,13

2,12

2,15

TOTAL

153,05

162,38

164,19

168,22

164,01(8)

165,00

1 - redéploiement pour financer les deux dernières tranches de la licence à Chypre

2 - redéploiement pour financement éventuel du projet télévision Médi 1 Sat

3 - autorisation donnée à Médi 1 de prélever 1,07 sur sa dotation complémentaire 2001

4 - dont 0,46 M€ de report 2000 au titre de TV5 Afrique et 0,61 de dotation exceptionnelle "sommet de Beyrouth"

5 - dont 2,02 M€ versés à la Sofirad pour recapitalisation de sa filiale

6 - versés en 2001 sur crédits de report 2000 à France Télévision Distribution pour solde de tout compte (ayants droits Tunisie)

7 - appel à projets en cours

8 - gel 4,2 M€

Eléments de comparaison nationaux et internationaux

Le budget 2003 du ministère des Affaires étrangères s'élève à 4,11 milliards d'euros, en hausse de 13,3 % (effet FED). Les crédits du chapitre 42-14, réservés à l'action audiovisuelle extérieure, baissent de 3,21 millions d'euros, soit -1,9 %, mais avec la perspective d'un effort complémentaire en loi de finances rectificative 2002 (et une incertitude sur la pérennité de cet effort dans le projet de loi de finances pour 2004).

Pour leur part, les ressources publiques allouées par le ministère de la Culture et de la Communication en 2003 au secteur public de l'audiovisuel (redevance et remboursements d'exonération) sont arrêtées à 2 538,40 M€, en progression de 2 % par rapport à la loi de finances pour 2002.

Le différentiel de progression entre l'audiovisuel extérieur et l'audiovisuel national, au détriment du premier, n'est pas nouveau. Déjà, entre 1999 et 2001, les crédits du chapitre 42-14 avaient progressé de 3,7% pendant que les dotations de l'Etat (redevance et crédits budgétaires) aux chaînes publiques nationales progressaient de 13,3%. Avec les chaînes privées, le différentiel de moyens est encore plus spectaculaire : entre 1999 et 2000, le chiffre d'affaires de TF1 avait progressé de 22,4 %, celui de M6 de 18% et celui de Canal+ de 17%.

Par comparaison avec le budget 2002 de TV5 pour le monde entier (82,1 M€, dont 65,2 M€ financés par la France), le budget de RFO, pour les seuls DOM-TOM, est de 223,4 M€ et celui d'Arte France, pour une couverture de l'Europe, de 186,1 M€, complété par un montant équivalent du côté allemand. Le budget programmes d'Arte représente trois fois le budget de TV5 : Arte dispose ainsi d'un budget moyen de 90 000 à 120 000 € par film tandis que TV5, qui doit acquitter des droits pour une diffusion dans le monde entier, ne dispose que de 22 800 €.

La Deutsche Welle (radio+TV), qui a pourtant connu un plan d'économies en 2000, conserve, avec un budget de 284,4 M€ en 2002, des moyens nettement supérieurs aux dotations cumulées de TV5, CFI, RFI, Somera et Médi 1. Le financement public de RFI n'atteint que 40,6 % de celui du BBC World Service, son homologue britannique (300,6 M€ en 2002), qui bénéficiera par ailleurs d'ici 2003 d'un effort financier supplémentaire de 16%.

2) La télévision extérieure

· TV5

TV5 est aujourd'hui reçue par quelques 132 millions de foyers. Ses huit signaux (France-Belgique-Suisse, Europe, Afrique, Asie, Orient, Etats-Unis, Amérique latine et Québec-Canada), sont diffusés à travers 42 transpondeurs satellitaires reçus en réception directe ou dans 24 bouquets numériques, ou alimentant plus de 6000 réseaux câblés et MMDS. En termes d'audience, les enquêtes portant sur 72% du parc de réception de la chaîne montrent que, mesuré sur trois semaines, le nombre de téléspectateurs regardant TV5 est de 37,6 millions. L'Europe représente 46% de l'audience globale de la chaîne, le Maghreb 29% et l'Afrique sub-saharienne 17%.

Créée en 1983 à l'initiative du Ministère des Affaires étrangères sous la forme d'un GIE, « Satellimages-TV5 » est une association des trois télévisions publiques françaises TF1, Antenne 2, FR3. Ce groupement a pour objectif d'organiser une programmation à partir des émissions fournies gratuitement par ces trois sociétés, et de les faire diffuser par satellite sur l'Europe où les téléspectateurs ont ainsi la possibilité de regarder la télévision en français.

La structure ainsi constituée signe ensuite une convention avec la Société Suisse de Radiodiffusion et de Télévision (TSR) et la Radio Télévision belge de la Communauté française (RTBF) qui acceptent de participer à la programmation sur les mêmes bases de gratuité, créant ainsi TV5 dont la gestion est confiée au GIE. Si la TSR intervient dès lors en direct dans le financement de la chaîne aux côtés de la France, c'est la Communauté Française de Belgique qui prend en charge la participation belge. En janvier 1985, le Consortium de Télévision Québec-Canada (CTQC) qui regroupe des télévisions publiques comme la Société Radio-Canada et Télé Québec, ainsi que des entreprises privées, rejoint les professionnels européens et devient le sixième partenaire de Satellimages-TV5.

La chaîne devient société anonyme en 1991 et les partenaires français de la chaîne (TF1 ayant quitté le GIE en 1987 au moment de sa privatisation) sont rejoints par l'INA et la SOFIRAD, holding qui gère les participations de l'Etat français dans l'audiovisuel. Ce changement de statut ne modifie pas fondamentalement les relations entre les associés de TV5, désormais actionnaires. Le nouveau statut a cependant le mérite de clarifier leurs rapports financiers, d'identifier leurs contributions respectives et d'améliorer le processus décisionnel au sein d'une structure désormais responsable de sa gestion devant les actionnaires et les gouvernements bailleurs de fonds. La tutelle de la chaîne continue à être exercée par une « Conférence des ministres » des quatre pays partenaires. La répartition des contributions financières de chacun au budget de fonctionnement de la chaîne (frais communs) est arrêtée comme suit : 6/9èmes pour les partenaires français ; 1/9ème pour chacun des autres.

Par ailleurs, le processus d'adossement de TV5 à l'ensemble des chaînes publiques françaises est renforcé. La Sept-Arte (12,5 %), La Cinquième (12,5 %) et RFO (4%) deviennent actionnaires de la chaîne francophone et sont représentées à son conseil d'administration. France Télévision voit sa part dans le capital de TV5 légèrement augmentée (34,9 %). La Sofirad disparaît de l'actionnariat de TV5, tandis que l'INA y conserve une participation symbolique (2,6 %). A l'automne 1999, les premiers programmes produits par la Sept-Arte et La Cinquième sont mis à l'antenne de TV5. A la suite de la loi du 1er août 2000, les sociétés France 2, France 3 et la Cinquième ont transféré les actions qu'elles détenaient au sein de Satellimages-TV5 à la société holding France Télévision. Le conseil d'administration a agréé ce transfert le 29 novembre 2000, France Télévision détenant dès lors 47,44 % du capital de Satellimages-TV5.

Aux lourdeurs générées par la complexité des structures de TV5 du fait de l'existence de deux pôles gestionnaires, s'était ajoutée depuis 1998 l'apparition d'une TV5 à deux vitesses : l'amélioration incontestable des chaînes diffusées depuis Paris en termes de qualité et d'impact, consécutive à la nomination de M. Stock à la tête du pôle parisien et aux efforts financiers consentis par le ministère, avait rendu de plus en plus manifestes les faiblesses de la gestion canadienne sur les Amériques : stagnation de la chaîne au Canada et en Amérique latine et surtout échec flagrant aux Etats-Unis.

Lancé à l'initiative de la France à l'occasion de la Conférence ministérielle de Vevey en octobre 2000, le processus de réforme a officiellement abouti le 22 juin 2001 à un relevé de décisions arrêtant le nouveau dispositif et signé par les Ministres. Depuis le 1er août 2001, TV5 a la configuration suivante :

- Une structure unique : Satellimages SA est devenue TV5 Monde, chargée d'éditer une programmation régionalisée en 7 signaux, ce qui se traduit concrètement par un transfert à Paris de la responsabilité des signaux à destination de l'Amérique latine et des Etats-Unis.

- Un patron unique : le Président du Conseil d'administration de TV5 Monde est également son Président directeur général, et a toute autorité sur la programmation de la chaîne (hors Canada). Il s'agit là à l'évidence d'un point-clé de la réforme du point de vue français, qui va améliorer la cohérence et l'efficacité de l'action de TV5.

- La France, actionnaire et bailleur de fonds majoritaire, détient l'essentiel du pouvoir, moyennant des dispositifs de protection des actionnaires minoritaires : il est prévu un mécanisme d'alerte, dit "sonnette d'alarme", avec possibilité de suspendre une décision lésant gravement un partenaire, ainsi qu'une concertation qualifiée d'« approfondie » quant au choix du dirigeant de TV5 Monde, dispositions de nature à favoriser le consensus entre les partenaires. Compte tenu de la majorité dont disposent les représentants des chaînes publiques françaises au sein du conseil d'administration de TV5 Monde, toute décision reste en pratique du ressort de la France.

- Un pôle affilié est maintenu à Montréal, exclusivement chargé du Canada : compte tenu du statut privilégié dont jouit TV5 au Canada où elle bénéficie d'une licence de service national, un pôle restreint et autonome chargé de poursuivre la diffusion de TV5 dans ce pays, est maintenu à Montréal. Ce pôle conserve, par délégation de TV5 Monde (et moyennant refacturation), les fonctions relatives à l'enseignement du français, à la facturation et au sous-titrage pour les Etats-Unis et l'Amérique latine.

Le lancement de deux nouveaux signaux sous responsabilité du pôle parisien vers le continent américain constitue le volet le plus spectaculaire de la réforme de TV5. Les principales composantes de cette amélioration sont les suivantes :

- dans la logique de régionalisation de plus en plus poussée qui prévaut à Paris depuis 1999, TV5 Etats-Unis et TV5 Amérique Latine sont désormais deux chaînes dont la programmation, largement indépendante, prend en compte, autant que possible, les fuseaux horaires et les habitudes de consommation locales de la télévision ; les attentes spécifiques du public de chaque zone en matière de programmes ; les droits disponibles (ou financièrement accessibles) pour chaque zone ;

- une refonte de la grille, composée de cinq blocs distincts de programmes clairement identifiés qui regroupent dans des tranches horaires homogènes des émissions de même nature. Visant à cumuler des publics complémentaires, aisément identifiables et faciles à promouvoir, ces cinq blocs seront respectivement consacrés à l'information, à la fiction, aux enfants, au sport et à la découverte des meilleures productions des chaînes partenaires.

- la mise en place d'une politique de distribution et de promotion dynamisée aux Etats-Unis passe par la priorité donnée au câble numérique, grâce aux accords cadres récemment signés avec les opérateurs multi-systèmes AOL Time Warner et AT_T. La chaîne TV5 a désormais la possibilité de négocier une diffusion auprès de grands bassins d'abonnés potentiels (Los Angeles, San Francisco, Boston, New York). La réception satellitaire n'est pas abandonnée, mais ses conditions de réception technique et de commercialisation améliorées. Enfin, la promotion de la chaîne est confiée à une direction régionale basée aux Etats-Unis, dont la mission sera de mettre en place des outils d'information et de promotion de la chaîne auprès des relais professionnels, institutionnels et communautaires prescripteurs de TV5 (notamment via Internet).

La part essentielle de ces améliorations doit trouver une traduction dans le budget du Ministère des Affaires étrangères, d'autant que la France finance plus des trois quarts du budget de TV5 : sa contribution au budget 2002 (près de 82 millions d'euros au total) est de 65,2 millions d'euros contre un financement des gouvernements suisse, belge et canado-québécois de 11,2 millions d'euros et des ressources propres s'élevant à 5,5 millions d'euros. La Cour des comptes a d'ailleurs récemment critiqué cette situation en estimant que le poids des autorités françaises dans la définition de la stratégie de la chaîne n'était pas proportionnel à son implication financière.

· Canal France International

Depuis 1998, l'organisation de CFI est articulée autour de deux pôles, CFI-Pro (banque de programmes professionnelle cryptée, diffusée sur quatre zones) et CFI-TV (chaîne grand public diffusée en clair sur l'Afrique subsaharienne, fabriquée à coût marginal par réutilisation des programmes de CFI-Pro Afrique). Depuis juin 2000, s'est ajoutée la gestion du bouquet satellitaire africain Le Sat.

Après la nomination d'un nouveau Président en octobre 2001, l'année 2002 a été une année de transition et de réflexion, éclairée notamment par un rapport particulier de la Cour des Comptes sur la période 1991-1999 et par une mission d'audit stratégique demandée par le Ministre des affaires étrangères à l'Inspection générale des Affaires étrangères. Il est apparu en effet que l'évolution parfois erratique et contradictoire des missions de CFI depuis sa création en 1989, les changements intervenus récemment dans le paysage audiovisuel africain, l'évolution de la politique de coopération du ministère des Affaires étrangères et enfin l'arrivée des nouveaux actionnaires France télévision (75 %) et ARTE (25 %) dans le capital de la société étaient autant de raisons qui rendaient nécessaire la définition de nouvelles orientations établissant clairement le rôle dévolu à l'avenir par l'Etat à cette société. 

Les premières orientations de cette réflexion sont les suivantes :

La nomination rapide d'un directeur général, sur proposition de France télévision et d'Arte France au Ministre des Affaires étrangères, devrait permettre l'élaboration d'un plan d'action définissant zone par zone, pour chaque type de métier, les priorités et les modalités de mise en _uvre. Ce plan devra être assorti d'un calendrier et de premiers éléments budgétaires ainsi que de propositions de rapprochement avec les équipes de France Télévision et d'Arte France.

Au plan financier, la situation de CFI, analysée par un audit extérieur en juillet 2002, est saine. Grâce à des reprises de provisions, l'exercice 2001 a fait apparaître, un résultat positif qui ne peut cacher la fragilité structurelle de l'entreprise liée, par définition, à sa mission de service public. L'exercice 2002 devrait être de nouveau équilibré, mais au détriment des achats de programmes proposés par CFI-Pro.

En 2003 la subvention annuelle du ministère des Affaires étrangères à CFI devrait être maintenue à son niveau des années antérieures. On doit donc constater que les marges de man_uvre de l'entreprise sont plus faibles que jamais et que le volume de programmes acquis pour l'activité de banque dans un marché marqué par la hausse des prix est devenu la seule variable d'ajustement, alors même qu'il s'agit du c_ur de métier de CFI.

On rappellera qu'au cours des dernières années, l'entreprise a d'ores et déjà réalisé, à la demande du ministère des Affaires étrangères, un effort considérable de rationalisation de ses charges (notamment du dispositif satellitaire) et de mobilisation de ses ressources (reprises de provisions, indemnisation de France Télécom pour l'affaire Arabsat) qui semble aujourd'hui pour l'essentiel parvenu à son terme. Seuls ces efforts ont permis d'assainir la situation financière de CFI, par l'intermédiaire d'une recapitalisation, et de faire face à l'augmentation de ses coûts à périmètre inchangé, malgré le gel du niveau de la subvention publique depuis 1999.

· Portinvest (Le Sat)

Filiale à 100% de CFI depuis juin 2000, Portinvest est opérateur du bouquet multichaînes Le Sat en Afrique subsaharienne. Présent dans 46 pays francophones, anglophones et lusophones, Le Sat compte à la mi-2002 plus de 86 000 abonnés. Le Sat propose actuellement France 2, France 5, Arte, CFI-TV, TV5-Afrique, Canal+ Horizons, MCM Africa, Planète, Mangas, Euronews, RTL9, Festival et Tiji, ainsi que plusieurs chaînes de radio.

La rationalisation de la gestion de Portinvest opérée par CFI, les efforts faits pour améliorer le recouvrement des créances dues par les réseaux MMDS africains et pour lutter contre le défaut de déclaration du nombre d'abonnés effectifs, ainsi que le développement commercial du bouquet ont eu un effet positif sur les résultats d'exploitation 2000 et 2001. Ces meilleurs résultats ont permis de diminuer progressivement la subvention du ministère des Affaires étrangères. Pour 2002, le budget prévisionnel de Portinvest prévoit la poursuite de cette évolution favorable.

Cependant, Portinvest va devoir s'adapter à l'arrivée d'une nouvelle offre satellitaire de programmes français depuis le lancement en mai 2002 de deux nouveaux bouquets, Canal Satellite Horizons (avec comme opérateur Media Overseas, filiale du groupe Vivendi-Universal) qui commercialise une quinzaine de chaînes françaises (notamment TF1, France 2 et TV5) et Net TV qui propose 6 chaînes, dont Euronews et la chaîne adulte XXL. Cette évolution montre que le pari fait en 1997 de lancer un bouquet sur financement public en Afrique subsaharienne pour occuper le terrain à défaut d'opérateurs privés français est en passe d'être gagné : le marché a mûri et apparaît aujourd'hui comme potentiellement rentable.

Dès lors, la question du maintien d'un opérateur satellitaire public dans cette zone se pose. Dans l'immédiat, Portinvest conserve un rôle essentiel en complément des opérateurs privés qui devraient concentrer leurs efforts et leur politique tarifaire sur le marché le plus rentable, celui des expatriés et des classes aisées africaines. Il apparaît à cet égard nécessaire de maintenir également une offre de programmes français accessible aux couches les moins favorisées de la population que seul Le Sat assure aujourd'hui. La perte inéluctable des abonnés les plus rentables en réception directe qui vont plus ou moins rapidement rejoindre les nouveaux bouquets devrait dans ces conditions détériorer les résultats de Portinvest et imposer le maintien, voire l'augmentation, de la subvention du ministère dans les prochaines années. Une discussion a cependant été engagée avec Media Overseas en vue d'examiner dans quelles conditions cet opérateur pourrait à terme plus ou moins rapproché reprendre à sa charge les missions de Portinvest.

· Appui au développement international des chaînes de télévision françaises

La politique de soutien financier aux chaînes de télévision françaises présentes dans des bouquets satellitaires diffusés à l'étranger, engagée en 1999, s'est poursuivie, avec des résultats plutôt contrastés. Tous les opérateurs privés soulignent l'extrême difficulté d'exporter des chaînes thématiques françaises, dont l'économie - même au plan national - reste très déficitaire. Après cinq ans d'efforts, on doit constater que l'implication - marginale - des pouvoirs publics n'a pas eu l'effet de levier attendu et que la situation des chaînes qui ont fait le pari de l'exportation ne s'est pas améliorée. En conséquence, le ministère des Affaires étrangères a informé les chaînes concernées que la politique d'aide satellitaire serait définitivement interrompue en 2004 et que de nouveaux mécanismes de soutien seront mis à l'étude en concertation avec les professionnels.

· Soutien aux exportations de programmes audiovisuels français

L'appui aux efforts des exportateurs de produits culturels français est resté un objectif stratégique de premier rang qui s'est traduit par un effort budgétaire continu du ministère des Affaires étrangères depuis 1998 et par une mobilisation systématique des postes diplomatiques aux côtés des professionnels exportateurs et de l'outil spécialisé qu'est, en matière de programmes de télévision, TVFI. Sur la dernière période, les résultats enregistrent un tassement pour les programmes audiovisuels (126,7 millions d'euros en 2001 contre 129,3 millions d'euros en 2000), dans un marché mondial en nette régression.

3) La radio extérieure

· Le groupe RFI

Au cours des dernières années, RFI a entrepris une modernisation considérable de ses programmes et de ses moyens de diffusion qui l'a confortée dans sa position de troisième radiodiffuseur international, après la BBC et Voice of America et à égalité avec la Deutsche Welle. On estime généralement qu'avec sa filiale RMC Moyen-Orient, RFI compte ainsi plus de 45 millions d'auditeurs réguliers dans le monde. RFI poursuit actuellement un important programme de numérisation de la diffusion et de la production qui nécessite des moyens nouveaux.

En 2002, tout en suivant l'évolution des techniques satellitaires, RFI a poursuivi ses développements en relais FM et en reprises. En Europe centrale, RFI a ouvert deux relais en 2001, à Sarajevo et Dresde. En Afrique de l'Ouest, RFI a consolidé sa présence au delà des capitales : Zinder et Maradi au Niger, Ziguinchor au Sénégal. Dix ans après le vote de la loi sur l'audiovisuel au Cameroun, RFI a pu installer un relais à Yaoundé et a expédié le matériel pour deux autres relais (Douala et Bafoussam). L'ouverture d'un relais à Kinshasa, seconde ville francophone au monde, et à Lubumbashi coïncide avec le changement à la tête de la République Démocratique du Congo. Enfin RFI pénètre en Afrique australe anglophone avec un relais à Maseru, et la signature d'un accord avec Windhoek. Certains accords de reprise sur l'ensemble du continent s'accompagnent d'appui en matériel. Il convient de signaler par exemple la percée de RFI en Tanzanie sur une radio de Dar es-Salaam.

Dans l'attente de la conclusion des projets au Moyen-Orient, il convient de souligner que RFI a entrepris les travaux de réhabilitation des installations de Radio Liban, qui reprend ses programmes 12h/24. RFI est en outre présente sur la zone par l'intermédiaire de sa filiale à 100%, la SOMERA qui diffuse 16h30 par jour sur le Proche et Moyen Orient un programme, majoritairement en arabe (15h), très écouté et important pour la présence française dans la région. C'est la première radio internationale de la zone. La diffusion se fait en ondes moyennes à partir d'un émetteur basé à Chypre. Par ailleurs, RFI explore systématiquement les possibilités de diffuser en FM dans les pays de la région. Un premier contrat a été signé en août 1997 pour une diffusion 24h/24 à Amman. Ont ouvert ensuite des relais à Doha, Manama et Khartoum. Des pourparlers sont en cours pour le Yémen, les Emirats arabes unis et le Koweït.

Outre ces développements, RFI a poursuivi son travail d'adaptation des contenus, des formats et des horaires de certaines émissions en langues étrangères, afin de répondre au cadre stratégique défini par le ministère des Affaires étrangères. Sans oublier la nécessité de maintenir le lien entre la France et les communautés françaises à l'étranger, celui-ci estime que les auditeurs étrangers doivent constituer la cible prioritaire de RFI. A l'intérieur de cet ensemble, on peut identifier, entre francophones et non-francophones absolus, des francophones « émergents », « apprenants », voire « dormants », qui sont d'intérêt stratégique pour la consolidation de nos positions, et auxquels il convient de réserver une attention privilégiée. Dans le choix de ces cibles et des moyens de les atteindre (vecteurs techniques, langues de diffusion), une analyse du pouvoir d'achat, de l'implantation urbaine ou rurale, du niveau de participation aux processus décisionnels des populations visées doit également intervenir.

Pour le ministère des Affaires étrangères, l'objectif principal de RFI doit être de chercher à influencer les élites francophones ou francophiles : la conséquence, dans un contexte budgétaire très contraint, en est la priorité accordée aux grandes langues véhiculaires mondiales, par opposition aux langues vernaculaires. Ceci n'empêche pas qu'à titre exceptionnel, il puisse être envisagé une diffusion en langue vernaculaire, afin d'élargir le public visé au-delà des élites traditionnellement intéressées par RFI, mais cela ne doit être le cas que si le contexte politique justifie une décision en ce sens.

Au total, dans un monde dont l'évolution impose une adaptation permanente des priorités géostratégiques, alors que l'effet budgétaire bénéfique des économies réalisées sur l'onde courte en 1999 est aujourd'hui passé et que les marges de progression des dotations de l'Etat sont devenues très étroites, voire nulles, il convient plus que jamais que RFI hiérarchise ses priorités en matière de publics cibles, de zones géographiques et de modes de diffusion. Le contrat d'objectifs et de moyens, actuellement en cours d'élaboration à l'initiative des tutelles, sera l'occasion pour l'opérateur de procéder à cet effort de réflexion indispensable.

Le ministère des Affaires étrangères a demandé depuis plusieurs années à RFI de mener son développement à effectifs constants, estimant même que les investissements consentis en matière de numérisation des processus de production devraient conduire à des économies sur la masse salariale. Cette contrainte budgétaire est actuellement d'autant plus difficile pour la chaîne que la réforme des 35 heures pèse sur son organisation et sur ses coûts de gestion.

· Les autres radios de l'audiovisuel extérieur

D'autres opérateurs concourent également à la présence radiophonique internationale de la France :

Radio France diffuse certaines de ses chaînes sur deux satellites, Eutelsat HB1 pour l'Europe et la Méditerranée et Astra 1G/1H pour l'Europe. A ces diffusions satellitaires s'ajoute la diffusion de France Inter vers les Caraïbes, l'Océan Indien et le Pacifique sud, prise en charge financièrement par RFO dans le cadre de son cahier des charges pour la couverture des DOM-TOM. Par débordement naturel, et à coût nul pour le budget de l'Etat, certains accords de reprises dans des pays étrangers de ces zones ont été conclus (Maurice).

La Sofirad ne conserve plus pour rôle dans le domaine radiophonique extérieur que le portage des participations minoritaires françaises dans Africa N°1 et dans Médi 1, qui ont vocation à être cédées dans le cadre de la liquidation.

Africa N°1 est une société de droit gabonais dont le capital est réparti entre des actionnaires nationaux (60%) et la SOFIRAD (40%). Il est envisagé que les parts de la Sofirad soient à l'avenir portées par un pool d'actionnaires associant RFI, un groupe privé français et des intérêts gabonais. Ce montage fait actuellement l'objet d'une négociation délicate avec les autorités gabonaises, dont la position apparaît complexe. Elle présente la particularité d'être la seule radio panafricaine. Elle est diffusée en modulation de fréquence dans les capitales de douze pays africains francophones (Abidjan, Bamako, Bangui, Brazzaville, Cotonou, Dakar, Kigali, Kinshasa, Libreville, N'djamena, Niamey, Ouagadougou) ainsi qu'en Guinée Equatoriale. Cette radio dispose aussi d'une filiale française, Eurafripub, diffusée à Paris (107,5Mhz). Les programmes sont essentiellement faits d'informations et de musiques africaines. Depuis la création d'Africa N°1, une assistance technique permanente a été prise en charge par la coopération française. Elle a été gérée dans le cadre d'un marché avec la Sofirad jusqu'en 1992 et en assistance technique directe à partir de cette date. Un transfert progressif des responsabilités a été décidé en accord avec la partie gabonaise.

RMI, qui émet sous le nom de Médi 1, est née en 1980 d'une volonté politique commune française et marocaine. Radio généraliste bilingue (moitié français et moitié arabe), d'information internationale, de services et de divertissements, RMI a ses studios installés à Tanger. Elle est principalement diffusée en ondes longues et en ondes courtes, mais aussi en modulation de fréquence et par satellite (Eutelsat II F 2). Elle couvre ainsi l'ensemble du bassin méditerranéen occidental, c'est à dire le grand Maghreb; elle peut être aussi reçue en Espagne, en Italie et en France. En outre, elle a négocié des reprises de ses programmes d'actualité sur de nombreuses stations FM en France. Elle est aussi présente sur Worldspace. Son audience totale est d'environ 23 millions d'auditeurs. Elle est particulièrement écoutée en Algérie où elle dépasse même les chaînes nationales, avec une audience de plus de 40%. Elle est détenue à 49 % par la SOFIRAD, par l'intermédiaire de la CIRT, qui gère le personnel français de la chaîne (20 journalistes et techniciens).

B - Quelles perspectives ?

En appelant de ses v_ux la création d'une chaîne d'information continue internationale française, le Président de la République a attiré l'attention sur la situation de l'audiovisuel extérieur. Force est de constater que ce secteur souffre à la fois d'un empilement et d'un enchevêtrement des structures, qui ne facilite pas la tâche des pouvoirs publics. Il apparaît dans ce contexte indispensable de clarifier les conditions d'exercice de la tutelle et les financements.

La complexité du paysage audiovisuel extérieur français s'explique par l'absence de choix clair entre une logique de concentration des moyens, qui aurait pu intégrer les opérateurs spécialisés dans l'audiovisuel extérieur au sein des grandes sociétés publiques existantes (Radio France et France Télévision), et une logique de spécialisation fondée sur les spécificités de la communication à l'échelle internationale. La tutelle du Quai d'Orsay sur l'audiovisuel extérieur est ainsi justifiée par sa compétence en matière de diffusion culturelle et de défense du rayonnement de notre langue et de notre pays. Dans le même temps, elle entraîne inévitablement une certaine dispersion des moyens par rapport aux grandes entreprises publiques audiovisuelles placées sous la tutelle du ministère de la culture et de la communication.

Cette situation s'est compliquée par la mise en place de participations et de financements croisés entre le secteur audiovisuel national et extérieur. RFI a ainsi peu à peu accrû la part de son financement provenant de la redevance, qui représente aujourd'hui environ 40 % de son budget, tandis que la contribution du ministère des Affaires étrangères stagne depuis cinq ans. Un tel financement est d'autant moins justifié que les personnes assujetties à la redevance ne constituent pas la cible de la chaîne, tandis que la majorité de ses auditeurs n'y sont, par définition, pas assujettis. Quant à France Télévision et Arte elles sont mises à contribution par la détention de parts de capital de TV 5 ou de CFI et par la fourniture de programmes, dont une part est opérée à titre gratuit. La tutelle interétatique de TV 5 complique en outre la donne, car elle alourdit le processus de décision et rend plus difficile la définition d'une stratégie cohérente.

Les auditions faites par votre Rapporteur ont montré les limites de cette organisation très complexe. A tout le moins, il conviendrait d'améliorer la coordination des différentes tutelles du secteur audiovisuel, qui s'est révélée insuffisante par le passé. Cette tutelle est en effet exercée par le ministère des Affaires étrangères, par le biais de la direction de l'audiovisuel extérieur et des techniques de communication rattachée à la DGCID et par le ministère de la Culture et de la communication, qui ne dispose pas en la matière de services propres, mais bénéficie du concours de la direction du développement des médias (ancien SJTI), qui relève du Premier ministre. Le transfert de ce service vers le ministère chargé de la communication relève du bon sens et serait sans aucun doute un progrès en terme d'efficacité.

La création de la future chaîne d'information continue internationale, inspirée par le modèle de CNN International ou de BBC World, soulève de nombreuses interrogations : quel public, quels supports, quels moyens ?

Le dispositif actuel de TV 5 et de CFI vise principalement un public d'expatriés, de voyageurs et d'étrangers francophones, laissant de côté les décideurs et les leaders d'opinion étrangers, qui ne maîtrisent pas nécessairement le français. Il conviendra donc de développer des programmes qui ne soient pas exclusivement en Français, afin de toucher cette dernière cible. Une telle approche, justifiée par le nombre relativement faible de francophones dans le monde, plaide pour une certaine régionalisation des programmes. Elle devrait donc, sur ce point, s'écarter de CNN international qui émet de manière uniforme dans l'ensemble des pays.

Les pouvoirs publics devront par ailleurs définir le support de la nouvelle chaîne. TV 5, qui a entrepris de fabriquer ses propres journaux d'information, n'est sans doute pas le meilleur support, car son statut de chaîne intergouvernementale francophone ne lui donne ni la souplesse, ni l'indépendance nécessaire. La chaîne d'information continue européenne implantée à Lyon, Euronews, dont France télévision possède 28 % du capital aux côtés d'autres chaînes publiques européennes, pourrait constituer un bon instrument de développement de la nouvelle chaîne. Mais cette opération serait au prix d'une importante mutation : accroissement de la part du capital détenue par les opérateurs français, investissements massifs et changement de la programmation, aujourd'hui axée sur le « tout image ».

L'audition de MM. Marc Tessier, président de France Télévision et de Jean-Paul Cluzel, PDG de RFI, a montré l'intérêt de ces deux sociétés pour le projet d'une chaîne d'information du service public. Elle a également permis de mettre en évidence la difficulté de rapprocher des organisations habituées à travailler séparément. Le choix français de séparer radio et télévision au sein de l'audiovisuel extérieur apparaît donc aujourd'hui incontestablement comme un facteur dommageable de dispersion.

La future chaîne d'information continue devra donc s'appuyer sur les différents opérateurs existants. Elle nécessitera en tout état de cause la mise en place de synergies nouvelles et des moyens supplémentaires importants. A titre d'exemple, M. Marc Tessier a indiqué lors de son audition que CNN international ne publiait pas de bilan, du fait du caractère lourdement déficitaire de son activité ; il a rappelé que la publicité couvrait moins de la moitié des coûts de BBC world, et seulement un tiers des coûts d'Euronews. M. Jean-Paul Cluzel estime pour sa part que pour disposer d'un instrument performant, il est nécessaire d'envisager un budget minimal annuel compris entre 40 et 50 millions d'euros et un investissement initial de 15 millions d'euros.

Dans ce contexte, le projet d'une chaîne d'information continue limitée, dans un premier temps, au seul monde arabe devrait permettre d'éviter la dispersion des moyens tout en servant au mieux les intérêts de notre politique extérieure en matière audiovisuelle.

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa réunion du mercredi 6 novembre, la Commission a examiné pour avis les crédits des Relations culturelles internationales et de la Francophonie pour 2003.

Après l'exposé du Rapporteur, M. Richard Cazenave l'a remercié de sa présentation très claire, qui montre bien la complexité de l'action audiovisuelle extérieure. Il a estimé qu'il serait intéressant de s'inspirer des expériences qui fonctionnent aux Etats-Unis, au Royaume-Uni ou en Allemagne. Les chaînes de ces pays, à l'image de CNN, savent proposer des programmes qui répondent aux attentes des spectateurs.

Concernant l'AEFE, il a demandé si le Rapporteur disposait de chiffres sur les élèves scolarisés dans des établissements relevant de la Mission laïque. Par ailleurs, il s'est interrogé sur la possibilité de développer une offre privée pour répondre à une demande non satisfaite d'enseignement français par des publics solvables, à l'image de ce que font les pays anglo-saxons.

M. Bruno Bourg-Broc a estimé que l'empilement des structures dans le domaine de l'audiovisuel extérieur se retrouvait également dans celui de la diffusion du français et des institutions de la francophonie. Quant à TV5, il est normal que sa ligne éditoriale manque de cohérence dans la mesure où il s'agit d'une chaîne multinationale, même si un effort a été fait pour adapter les programmes en fonction des continents.

Il a ajouté que, au-delà des importants succès diplomatiques de la francophonie, ce qui compte vraiment est l'augmentation de l'apprentissage de la langue française.

Sur l'AEFE, M. Bruno Bourg-Broc a indiqué qu'il voterait l'amendement de M. Rochebloine, mais a souhaité savoir s'il existait des moyens d'évaluation de l'action de cette agence. En effet, en raison de la hausse des frais de scolarité, elle perd même du terrain chez nos propres expatriés. Il s'est également interrogé sur l'absence de bourses pour les enfants non français scolarisés dans les lycées français.

En ce qui concerne les établissements culturels, où en est le projet de réduire le nombre de centres culturels en Allemagne de douze à six et qu'en est-il des crédits accordés aux Alliances françaises ?

Enfin, M. Bruno Bourg-Broc a souhaité en savoir plus sur le projet d'ouverture d'une « Maison de la Francophonie » à Paris en 2006.

M. François Loncle a estimé que les crédits présentés par le Rapporteur, qui concernent l'action culturelle extérieure, ne sont pas bons. Aussi, contrairement au budget de la coopération, qui comporte des éléments positifs et sur lequel il s'est abstenu, le groupe socialiste votera contre ce budget.

Il a regretté que les propositions du rapport de M. Yves Dauge sur les centres culturels, publié sous la précédente législature, ne trouvent pas de traduction dans ce budget, alors qu'elles avaient été unanimement saluées.

Sur l'AEFE, il a indiqué qu'il voterait l'amendement du Rapporteur et il s'est félicité de la réouverture du Lycée français de Kaboul, rendu possible grâce à de nombreuses initiatives, y compris la participation financière des groupes RPR et socialiste de l'Assemblée nationale et de cinquante députés.

En ce qui concerne l'audiovisuel extérieur, il serait dangereux de copier CNN. Et contrairement à ce qu'a estimé le Rapporteur, il n'est pas non plus souhaitable de trop rapprocher TV5 et RFI de France Télévision et de Radio France, leur autonomie étant un de leurs atouts.

M. François Rochebloine a apporté les réponses suivantes : la chaîne américaine CNN est un modèle contestable, car elle cumule l'inconvénient d'être extrêmement chère et très lourdement déficitaire ; le nombre d'élèves scolarisés dans le réseau de l'Agence de l'enseignement français à l'étranger est de 158 250 pour la dernière année scolaire, sans qu'il soit possible de distinguer la part de ceux qui sont scolarisés dans les établissements de la Mission laïque ; la francophonie ne se limite pas à une succession de sommets, mais elle doit aussi être accompagnée d'actes, ce qui souligne l'importance d'institutions telles que l'AEFE ; la suppression de centres culturels en Allemagne est tout à fait regrettable et il conviendra d'en demander les justifications en séance ; il n'est pas exact d'affirmer que le ministère des Affaires étrangères n'a pas donné suite au rapport de M. Yves Dauge sur le réseau culturel français, car le ministère a engagé une réflexion et une concertation avec les personnels concernés pour améliorer le fonctionnement des centres culturels qui souffrent aujourd'hui d'un manque de moyens ; le financement de la Maison de la Francophonie n'est pas prévu dans les documents budgétaires, mais il relève du financement multilatéral de l'organisation francophone.

Le Rapporteur pour avis ayant présenté un amendement visant à rétablir les crédits supprimés à hauteur de 6,4 millions d'euros au détriment de l'Agence de l'enseignement français à l'étranger, la Commission a adopté cet amendement à l'unanimité.

Conformément aux conclusions du Rapporteur, la Commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits des Relations culturelles internationales et de la Francophonie pour 2003.

Amendement adopté par la Commission

Loi de finances pour 2003 - (n° 230)

(Deuxième partie)

AMENDEMENT

Présenté par

M. François ROCHEBLOINE,

Rapporteur pour avis au nom

de la Commission des Affaires étrangères

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ARTICLE 36

ETAT B

TITRE III

Affaires étrangères

Majorer les crédits de 6 400 000 euros.

EXPOSE SOMMAIRE

Cet amendement s'applique au chapitre 36-30.

Il vise à rétablir les crédits supprimés par la mesure nouvelle négative n° 11-002 inscrite dans le projet de loi de finances au détriment de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE).

Cette mesure présentée comme une « rationalisation du réseau de l'AEFE » aurait pour conséquence le déconventionnement de plusieurs établissements français à l'étranger, alors même que l'effort entrepris par l'AEFE pour diminuer le coût de sa masse salariale ne portera ses fruits qu'au cours des prochaines années. Il est donc proposé de maintenir les moyens de l'Agence, afin de garantir la présence d'établissements d'enseignements français dont l'utilité est reconnue par tous pour le rayonnement de notre pays.

Personnes entendues par le Rapporteur

 

N° 0259 - 04 - Avis de M. François Rochebloine sur le projet de loi de finances pour 2003 - Affaires étrangères, Francophonie et relations culturelles internationales


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