N° 259
______
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DOUZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 10 octobre 2002
AVIS
PRÉSENTÉ
AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2003 (n° 230),
TOME I
AFFAIRES ÉTRANGÈRES
AFFAIRES EUROPÉENNES
(ARTICLE 33 : ÉVALUATION DU PRÉLÈVEMENT OPÉRÉ SUR LES RECETTES DE L'ÉTAT AU TITRE DE LA PARTICIPATION DE LA FRANCE AU BUDGET DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES)
PAR M. ROLAND BLUM,
Député
--
Voir le numéro 256 (annexe n° 2)
Lois de finances
SOMMAIRE
___
INTRODUCTION 5
I - L'ACCORD DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL
SUR UN BUDGET DE RIGUEUR 6
A - LA COMMISSION EUROPÉENNE DEMANDE UNE PRISE EN COMPTE
DES DÉPENSES ADMINISTRATIVES LIÉES À LA PRÉPARATION DE L'ÉLARGISSEMENT 6
B - LE CONSEIL TIENT COMPTE D'UNE CERTAINE SOUS-CONSOMMATION
DES CRÉDITS COMMUNAUTAIRES 7
1) La Politique agricole commune 8
2) La Politique régionale 8
3) Les politiques internes 9
4) Les dépenses administratives 9
C - LA PLACE DE LA FRANCE DANS LE BUDGET COMMUNAUTAIRE 10
1) Les contributions des Etats membres 10
2) La France au quatrième rang des contributeurs nets et
au deuxième rang des bénéficiaires en 2000 11
D - L'IMPACT DU NOUVEAU SYSTÈME DE RESSOURCES PROPRES
SUR LA CONTRIBUTION FRANÇAISE 11
II - LA POLITIQUE EXTÉRIEURE DE L'UNION 13
A - UNE PROGRESSION MODESTE DES CRÉDITS LIÉE AUX DIFFICULTÉS PERSISTANTES RENCONTRÉES DANS L'EXÉCUTION DES PROGRAMMES 13
1) Les priorités du Conseil 13
2) L'exécution des actions extérieures toujours globalement insatisfaisante 14
B - LA POURSUITE DE LA RECONSTRUCTION ET DE LA STABILISATION
DANS LES BALKANS OCCIDENTAUX 15
C - L'AIDE AUX TERRITOIRES PALESTINIENS 16
D - LES ENGAGEMENTS EN FAVEUR DE L'AFGHANISTAN 17
E - LES INCERTITUDES QUANT AU FINANCEMENT DE LA PESC
ET DE LA PESD 18
1) Le Conseil favorable à une hausse préventive de la dotation PESC 18
2) La préparation de la première opération dans le cadre de la PESD 19
III - LA PRÉPARATION DE L'ÉLARGISSEMENT 21
A - LE BILAN DES AIDES DE PRÉ-ADHÉSION 21
B - LE VOLET FINANCIER DE L'ÉLARGISSEMENT 22
C - L'EXEMPLE DE LA SLOVÉNIE 23
CONCLUSION 26
Audition de Mme Noëlle Lenoir, Ministre déléguée aux Affaires européennes 37
EXAMEN EN COMMISSION 51
Mesdames, Messieurs,
Le Conseil de l'Union européenne a adopté, en première lecture, le 19 juillet 2002, le projet de budget communautaire pour 2003 établi à 99,5 milliards d'euros en crédits d'engagement et 97 milliards d'euros en crédits de paiement. Ces montants représentent une augmentation de 0,9% pour les premiers et 1,4% pour les seconds, par rapport au budget initial pour 2002.
Le projet de budget arrêté par le Conseil doit répondre aux priorités définies pour 2003 : poursuivre la réforme de la politique agricole commune décidée à Berlin en 2000, permettre la programmation de la politique structurelle de la Communauté et, enfin, consacrer les moyens nécessaires à la préparation de l'élargissement.
Les années 2003 et 2004 seront riches d'évènements marquants pour la construction européenne et l'adaptation du budget aux nouvelles étapes de celle-ci apparaît de plus en plus difficile, même si l'exercice semble avoir été accompli sans tensions excessives, à ce jour, pour le projet de budget 2003.
Tout d'abord, la Convention européenne devra clore ses travaux en juin 2003 au plus tard, et une Conférence intergouvernementale lui succèdera pour la négociation d'un nouveau traité.
Ensuite, la phase de pré-adhésion touchera à sa fin pour dix pays candidats à l'intégration au sein de l'Union européenne. Le Conseil européen de Copenhague, réuni les 12 et 13 décembre prochains, devrait prendre acte de la conclusion du processus de négociation pour ces dix pays. L'année 2003 sera alors l'année de la finalisation, puis de la signature des dix traités d'adhésion, puis de la ratification par tous les Parlements nationaux des Quinze et des futurs membres, ainsi que par le Parlement européen.
L'établissement du projet de budget pour 2003 a fait l'objet d'un relatif consensus entre les institutions européennes ; la Commission européenne cependant n'a pas été suivie par le Parlement européen et le Conseil dans sa demande d'accroissement des effectifs pour faire face aux missions nouvelles suscitées par l'élargissement. Il est vrai que des recrutements avaient été inscrits au budget, les années précédentes.
D'autres questions ont surgi : la création d'un fonds de solidarité pour aider les pays - membres de l'Union et candidats - victimes des graves inondations de l'été 2002, à effectuer les reconstructions nécessaires. Ce fonds devrait faire l'objet d'une ligne budgétaire nouvelle en 2003. Le Conseil a manifesté le souhait de mieux doter la Politique extérieure et de sécurité commune, et de pouvoir mobiliser des fonds de manière à pouvoir réagir en urgence. Un aménagement devrait être trouvé avec le Parlement européen, en attendant une réforme de principe ultérieure.
Les tensions budgétaires risquent pourtant de s'accroître pour le projet de budget 2004, avec la montée en puissance des dépenses d'élargissement et la question de la compensation budgétaire envisagée pour remédier au déséquilibre que connaîtront certains pays candidats, passant d'une situation de bénéficiaires de l'aide de pré-adhésion à une situation de contributeurs, et parfois même de contributeur net.
La contribution française au budget s'établit à 15,8 milliards d'euros. Ce prélèvement est en hausse de 8,2% par rapport au prélèvement qui devrait être effectivement effectué pour 2002. (Il est en baisse de 6,5% par rapport à la loi de finances initiale pour 2002).
Votre Rapporteur souligne à cet égard que s'ouvrira dès 2003 la réflexion sur une nouvelle réforme des ressources propres de l'Union, réflexion à laquelle notre pays, dont la contribution au budget communautaire est vouée à s'alourdir, doit participer avec détermination afin de contribuer à établir un système plus équitable et plus lisible que le système actuel, en tout état de cause inadapté à l'élargissement.
I - L'ACCORD DU PARLEMENT EUROPÉEN ET
DU CONSEIL SUR UN BUDGET DE RIGUEUR
A - La Commission européenne demande une prise en compte des dépenses administratives liées à la préparation de l'élargissement
La Commission proposait dans son avant-projet de budget présenté le 15 juin 2002 une augmentation du budget de 1,4% en crédits d'engagement et de 2,7% en crédits de paiement, respectant globalement la discipline budgétaire décidée par le Conseil européen de Berlin en mars 1999.
PERSPECTIVES FINANCIÈRES DE L'UNION POUR LES ANNÉES 2000-2006
(en millions d'euros, en prix courants pour les quatre premières années,
prix 2003 pour les suivantes)
CREDITS POUR ENGAGEMENTS |
2000 |
2001 |
2002 |
2003 |
2004 |
2005 |
2006 |
1. AGRICULTURE Dépenses PAC (à l'exclusion du développement rural) Développement rural et les mesures d'accompagnement |
41 738 35 352 4 386 |
44 530 40 035 4 495 |
46 587 41 992 4 595 |
47 378 42 680 4 698 |
46 285 41 576 4 709 |
45 386 40 667 4 719 |
45 094 40 364 4 730 |
2. ACTIONS STRUCTURELLES Fonds structurels Fonds de cohésion |
32 678 30 019 2 659 |
32 720 30 005 2 715 |
33 638 30 849 2 789 |
33 968 31 129 2 839 |
33 652 30 922 2 730 |
33 384 30 654 2 730 |
32 588 29 863 2 725 |
3. POLITIQUES INTERNES |
6 031 |
6 272 |
6 558 |
6 796 |
6 915 |
7 034 |
7 165 |
4. ACTIONS EXTERIEURES |
4 627 |
4 735 |
4 873 |
4 972 |
4 983 |
4 994 |
5 004 |
5. ADMINISTRATION (2) |
4 638 |
4 776 |
5 012 |
5 211 |
5 319 |
5 428 |
5 536 |
6. RESERVES Réserve monétaire Réserve pour aides d'urgence Réserve pour garantie de prêts |
906 500 203 203 |
916 500 208 208 |
676 250 213 213 |
434 0 217 217 |
434 0 217 217 |
434 0 217 217 |
434 0 217 217 |
7. AIDES DE PRE-ADHESION Agriculture Instruments structurels de pré-adhésion PHARE (pays candidats) Elargissement Administration |
3 174 529 1 058 1 587 0 - |
3 240 540 1 080 1 620 0 - |
3 328 555 1 109 1 664 6 851 395 |
3 386 564 1 129 1 693 9 778 445 |
3 386 564 1 129 1 693 12 572 489 |
3 386 564 1 129 1 693 15 375 489 |
3 386 564 1 129 1 693 18 168 489 |
TOTAL DES CREDITS POUR ENGAGEMENTS |
93 792 |
97 189 |
107 523 |
111 923 |
113 546 |
115 421 |
117 375 |
TOTAL DES CREDITS POUR PAIEMENTS - UE à 15 |
91 322 |
94 730 |
100 078 |
102 767 |
99 553 |
97 659 |
97 075 |
DISPONIBLE POUR ADHESION (crédits pour paiements) |
4 397 |
7 266 |
9 626 |
12 387 |
15 396 | ||
PLAFOND DE CREDITS POUR PAIEMENTS - UE à 21 |
104 475 |
110 033 |
109 179 |
110 046 |
112 471 | ||
Plafond des ressources propres |
1,27 % |
1,27 % |
1,27 % |
1,24 % |
1,24 % |
1,24 % |
1,24 % |
On rappellera que les perspectives financières fixées en 1999 reposent sur l'hypothèse, qui prévalait alors, d'un élargissement à six pays en 2002, et non dix en 2004.
La Commission s'est donc montrée cette année plus rigoureuse qu'en 2001, où elle avait sollicité pour 2002 une augmentation de 4,2% en CE. L'avant-projet prévoyait des marges sous le plafond de dépenses pour les rubriques agriculture, politiques internes et actions extérieures. Cependant, la Commission demandait des dépassements concernant les besoins de l'administration pour préparer l'élargissement (rubrique 5) et les actions structurelles, notamment la restructuration de la pêche en Espagne (rubrique 2) où elle prévoyait la mobilisation de l'instrument de flexibilité permettant de faire face à des dépenses imprévues.
On notera que le calcul des ressources propres et les plafonds ont été modifiés pour intégrer la nouvelle décision 2000/597/CE du 29 septembre 2000 sur les ressources propres entrée en vigueur le 1er mars 2002 après avoir été ratifiée par les Etats membres. En conséquence de cette décision, le plafond des ressources propres doit être désormais exprimé, non plus en pourcentage du Produit national brut des Etats membres, mais en pourcentage du Revenu national brut. En conséquence, le plafond de ressources propres est passé à 1,24% du RNB communautaire (contre 1,27% du PNB communautaire). L'ajustement réalisé assure la neutralité budgétaire du changement de système comptable.
Le Conseil n'a pas suivi la Commission et a refusé le recours à l'instrument de flexibilité pour les dépenses administratives ou autres. Il a décidé d'accroître les marges sous les plafonds de dépense pour pouvoir faire face à des dépenses imprévues - ainsi par exemple pour les actions extérieures. Il a effectué un ajustement sur les besoins calculés au plus près pour la dépense agricole, et tenu compte du taux d'exécution pour les fonds structurels et les aides de pré-adhésion.
B - Le Conseil tient compte d'une certaine sous-consommation des crédits communautaires
Le projet de budget adopté par le Conseil le 19 juillet 2002 s'établit à 99,5 milliards d'euros en crédits d'engagement (en augmentation de 0,9%) et à 97 milliards d'euros en crédits de paiement (en augmentation de 1,4%).
Projet de budget pour 2003,
adopté en première lecture par le Conseil
En millions d'euros
|
|
|
Evolution 2001/2002 |
Evolution 2001/2002 |
Marge sous plafond des perspectives financières |
Agriculture |
44.829 |
44.829 |
+ 1,3 % |
+ 1,3 % |
2.548 |
Actions structurelles |
|
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|
|
0 |
Politiques internes |
|
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|
Actions extérieures |
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|
Administration |
5.364 |
5.364 |
+ 3,6 % |
+ 3,6 % |
16 |
Réserves |
434 |
434 |
- 35,8 % |
- 35,8 % |
0 |
Aide à la pré-adhésion |
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Le Parlement européen a soutenu le Conseil sur le principe d'une limitation des dépenses administratives, les deux autorités budgétaires convenant que la préparation des institutions à l'élargissement doit s'effectuer par un redéploiement du personnel et non pas par des embauches trop nombreuses. Le recours à l'instrument de flexibilité a ainsi été évité.
Il a par ailleurs été convenu d'autoriser, si les circonstances l'exigent, le recours à la réserve d'aide d'urgence pour financer des opérations de gestion civile des crises.
Votre Rapporteur résumera les principales évolutions qui affectent l'enveloppe des principales politiques de l'Union.
1) La Politique agricole commune
On soulignera que l'exécution des dépenses agricoles s'élève en 2001 à 96% du montant inscrit au budget, contre 99% en 2000. Globalement, les dépenses agricoles ont progressé de 4% par rapport à 2000, évolution qui s'explique principalement par l'entrée en vigueur progressive de la réforme de la PAC de 1999.
La non utilisation des crédits pour un montant de 1,9 milliards d'euros enregistrée en 2001 porte presque intégralement sur les dépenses de marché (1,8 milliard d'euros), et principalement sur la viande bovine (610 millions d'euros). Cette sous-consommation a en fait permis de financer dès 2001 une partie des dépenses générées par l'épidémie de fièvre aphteuse.
Le taux de consommation des dépenses de développement rural s'est élevé à 96% du plafond des perspectives financières, contre 93% en 2000, assurant une progression de ces dépenses de 4,5% et témoignant, là encore de l'ampleur prise par les programmes de développement rural des Etats membres.
Cette tendance à une certaine surestimation des dépenses agricoles semble se confirmer pour le premier semestre 2002 ; toutefois, une sous-consommation des crédits pourrait permettre de financer les mesures annoncées par la Commission à la suite des inondations qui ont frappé plusieurs pays d'Europe.
La Commission avait évalué les besoins de la PAC à 45 118 millions d'euros, dont 40 420 millions d'euros pour les dépenses de marché. Le Conseil a décidé d'opérer une réduction de 288 millions d'euros sur les seules dépenses de marché, en attendant de disposer des prévisions finalisées de la Commission.
Le projet de budget du FEOGA-Garantie pour 2003 s'établit à 44 830 millions d'euros. Il permet de financer les trois priorités agricoles pour 2003 : la dernière étape de la réforme de la PAC de 1999, la réforme du secteur ovin et caprin de 2001 ainsi que la dégradation de certains secteurs à l'exportation.
Au total, les dépenses agricoles progresseront de 1,3%. Le Conseil a prévu une marge importante sous le plafond de dépenses (2,54 milliards d'euros), afin de pouvoir prendre les mesures nécessaires si une crise agricole se produisait.
Le projet de budget pour 2003 prévoit un montant de 33,9 milliards d'euros en CE et 33 milliards d'euros en CP, soit une hausse respective de 0,4% et 2,6%.
Le Conseil a opéré une diminution de 525 millions d'euros de la dotation par rapport à la proposition de la Commission. Cette diminution porte de manière homogène sur l'ensemble des actions et tient compte des mauvaises exécutions successives. Elle est limitée par rapport aux montants très élevés des soldes 2000 et 2001 mais est le résultat d'un compromis au sein du Conseil entre les pays de la cohésion et les autres Etats membres. Elle est assortie d'une déclaration prévoyant le recours à un budget rectificatif si les crédits de paiement inclus dans le budget 2003 s'avéraient insuffisants.
Le projet de Fonds de solidarité
La Commission européenne a présenté, le 18 septembre, une proposition de règlement portant modalités d'application d'un Fonds de solidarité de l'Union européenne. Cette dernière se dote ainsi d'un instrument pouvant être mis en _uvre à bref délai, parallèlement aux fonds structurels, à la suite des récentes inondations et dans l'éventualité de catastrophes ultérieures. Les Etats membres, ainsi que les pays candidats avec lesquels des négociations d'adhésion sont en cours, pourront avoir recours à ce Fonds de solidarité.
Selon le texte proposé par la Commission européenne, est considérée comme majeure toute catastrophe qui occasionne des dégâts estimés à plus d'un milliard d'euros ou représentant plus de 0,5% du PIB de cet Etat.
Pour instaurer ce fonds, la Commission a tout d'abord proposé un budget rectificatif pour 2002, prévoyant une dotation de 500 millions d'euros pour cette année. Par la suite, le montant annuel maximum qui pourrait être mobilisé s'élève, d'après la proposition de la Commission, à un milliard d'euros. Un quart du total annuel devrait rester disponible jusqu'au 1er octobre de chaque année. Pour 2002, la dotation serait constituée par redéploiement de crédits non utilisés, puis, à partir de 2003, par création d'une ligne budgétaire.
L'ensemble des politiques internes (rubrique 3) bénéficiera d'une augmentation de 1,8% par rapport à 2002. On rappellera que 71% de cette rubrique financent la recherche et les réseaux transeuropéens, la part restante étant affectée à des mesures dans une vingtaine de domaines dont l'éducation et la formation.
4) Les dépenses administratives
Les dépenses administratives sont par leur montant comparables à celles relatives aux politiques internes et aux actions extérieures. Depuis une vingtaine d'années, elles ont fortement augmenté, au rythme des différents élargissements et de la création de nouvelles institutions, passant de 501,6 millions d'écus en 1977 à 5,33 milliards d'euros dans le présent projet de budget, soit une multiplication par 10. Dans le même temps, les effectifs des institutions communautaires ont connu une très forte progression, passant de 14 728 agents en 1977 à 30 777 en 2000.
Le coût de la préparation de l'élargissement au cours de l'année 2003 a concentré les enjeux de la procédure budgétaire. En effet, si 450 millions d'écu avaient été provisionnés dès 1999, dans le cadre des perspectives financières, au titre de l'impact de l'élargissement sur les frais administratifs, ce renforcement ne pourra intervenir qu'au cours de la première année d'adhésion des pays candidats, soit en 2004.
La Commission avait demandé la création de 500 postes pour faire face au travail inhérent à la clôture des négociations d'adhésion, proposant la mobilisation partielle de l'instrument de flexibilité.
Comme il a été déjà mentionné, le Conseil a retenu une approche rigoureuse en insistant sur la nécessité pour les institutions de maintenir la progression de leurs dépenses administratives dans la limite du taux d'adaptation des plafonds de la rubrique 5, soit + 3,5 %.
Au total, le budget de fonctionnement des institutions de l'Union a été fixé par le Conseil à 5,33 milliards d'euros, soit une augmentation de 157 millions d'euros (+ 3 %) par rapport au budget 2002. Les dépenses courantes sont quasi stabilisées et progressent de 26 millions.
Le projet de budget intègre la création de 311 emplois permanents répartis entre le Conseil (236), la Cour de justice (53), la Cour des Comptes (14), le Comité économique et social (7) et le Médiateur (1). Le Conseil a refusé de nouvelles embauches pour la Commission, constatant un niveau élevé de vacances d'emplois (entre 700 et 900) ; et considérant que des gains sont possibles par réorganisation interne. Il est vrai que la création de 700 postes avait été acceptée par le Conseil et le Parlement pour les années 2001 et 2002.
C - La place de la France dans le budget communautaire
1) Les contributions des Etats membres
Le tableau suivant représente la part relative de chaque Etat membre dans le financement du budget communautaire :
(en pourcentage)
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 |
2003 | |
Belgique |
3,8 |
3,9 |
3,9 |
4,3 |
3,9 |
3,8 |
Danemark |
2,1 |
2,0 |
1,9 |
2,1 |
2,1 |
2,1 |
Allemagne |
25,1 |
25,5 |
24,8 |
25,5 |
23,4 |
23,0 |
Grèce |
1,6 |
1,6 |
1,5 |
1,7 |
1,7 |
1,7 |
Espagne |
7,0 |
7,6 |
7,3 |
8,1 |
8,3 |
8,2 |
France |
16,5 |
17,0 |
16,5 |
17,6 |
17,8 |
17,3 |
Irlande |
1,2 |
1,3 |
1,2 |
1,4 |
1,3 |
1,3 |
Italie |
12,9 |
13,0 |
12,5 |
13,8 |
14,5 |
14,2 |
Luxembourg |
0,3 |
0,2 |
0,2 |
0,3 |
0,2 |
0,2 |
Pays-Bas |
6,2 |
6,2 |
6,2 |
6,9 |
5,9 |
6,0 |
Autriche |
2,5 |
2,5 |
2,4 |
2,6 |
2,3 |
2,3 |
Portugal |
1,3 |
1,5 |
1,4 |
1,5 |
1,5 |
1,5 |
Finlande |
1,4 |
1,5 |
1,4 |
1,5 |
1,5 |
1,5 |
Suède |
2,9 |
2,8 |
3,0 |
3,0 |
2,6 |
2,7 |
Royaume-Uni |
15,2 |
13,4 |
15,8 |
9,9 |
12,9 |
14,2 |
2) La France au quatrième rang des contributeurs nets et au deuxième rang des bénéficiaires en 2000
La contribution française au budget communautaire devrait s'établir à 15,8 milliards d'euros pour le budget 2003 (calcul fondé sur le montant prévisionnel du budget communautaire).
Si sur le long terme, cette contribution est en progression (1,25 milliards de francs en 1971, 56,1 milliards en 1990), le montant inscrit dans le projet de loi de finances (PLF) 2003 diminue de 6,3% par rapport à l'estimation proposée dans le PLF 2002 (16,9 milliards d'euros), mais en forte hausse par rapport à la prévision d'exécution du prélèvement sur recettes pour 2002 (14,6 milliards d'euros, soit une hausse de 8%).
Au total, le prélèvement communautaire pour 2003 se décompose comme suit :
- ressources propres traditionnelles : 1 495 millions d'euros
- ressource TVA : 4 070 millions d'euros
- ressource PNB : 8 705 millions d'euros
- financement de la correction britannique : 1 530 millions d'euros.
L'impact total sur le budget de l'Etat doit toutefois s'apprécier après déduction des frais de perception des ressources propres traditionnelles, restitués à la France et inscrits en recettes non fiscales (375 millions d'euros en 2003).
La France apporte une contribution nette au budget communautaire, le niveau tendanciel du solde français étant compris entre - 0,5 et - 2,5 milliards d'euros (on notera que 1,2 milliard d'euros équivalent à 0,10% PIB français). En 2000, notre solde s'établissait à - 1,4 milliard d'euros, selon l'estimation effectuée par la Commission, ce qui place la France au quatrième rang des contributeurs nets, derrière l'Allemagne, le Royaume-Uni et les Pays-Bas.
Notre contribution s'est donc alourdie par rapport à 1999, année pour laquelle la France se plaçait au septième rang des pays contributeurs nets. Notre pays se trouve, selon les années et les modes de calcul, entre le 4ème et le 7ème rang en termes de contribution.
La France est cependant le deuxième bénéficiaire de la dépense communautaire, derrière l'Espagne (en 2000, la France est passée au premier rang, de façon tout de même exceptionnelle, en raison de la sous-exécution conjoncturelle des dépenses destinées à l'Espagne). Notre pays est toujours le premier bénéficiaire des dépenses agricoles, et les aides qu'il perçoit au titre des fonds structurels sont également à l'origine de cette situation très favorable.
D - L'impact du nouveau système de ressources propres sur la contribution française
Dans le cadre d'un accord global sur l'Agenda 2000, le Conseil européen de Berlin a arrêté les grandes orientations de la nouvelle décision « ressources propres » entrée en vigueur en 2002. Elle implique une modification sensible de la part relative de chaque type de ressource au sein de la partie recettes du budget.
Si le budget des Communautés reste financé par les cinq types de ressources propres « classiques », dont le plafond reste fixé à 1,27% du PNB communautaire, la part relative des différentes ressources est appelée à évoluer progressivement :
- la ressource TVA va être progressivement et pour moitié remplacée par la ressource PNB : le taux d'appel maximal de la ressource TVA sera ramené à 0,75% en 2002 et à 0,50% en 2004 ;
- les frais de perception au titre des ressources propres traditionnelles sont relevés de 10% à 25%, à titre rétroactif à partir de 2001 ;
- les clés de répartition du financement de la correction britannique vont être modifiées : la contribution de l'Autriche, l'Allemagne, les Pays-Bas et la Suède au titre de la compensation en faveur du Royaume-Uni va être ramenée à 25% de la contribution normale.
La mise en place de ce système conduit à une augmentation sensible de la contribution française. La ristourne accordée aux pays précités sur le paiement de la contribution britannique est très largement supportée par la France, ainsi que par l'Italie.
Le relèvement des frais de perception sur les ressources propres traditionnelles aura également pour effet d'accroître la contribution française. Il bénéficiera aux Etats membres dont la part des ressources propres traditionnelles dans la contribution est élevée (Pays-Bas notamment, pour lesquels les droits de douane représentent 30% environ de la contribution, contre moins de 10% pour la France). Il affectera la France dans la mesure où la réduction de la contribution au budget au titre des ressources propres traditionnelles sera compensée par une augmentation de la contribution au titre de la ressource PNB, pour laquelle la France est le deuxième contributeur communautaire.
Votre Rapporteur considère que notre pays doit préparer des propositions en prévision de la prochaine réforme du régime des ressources propres prévue pour 2004. Il lui semble particulièrement contestable de pérenniser la correction britannique - qui date de 1994- alors que la situation du Royaume-Uni a beaucoup évolué et que l'on s'apprête à intégrer dans l'Union européenne des pays dont le revenu intérieur brut est moindre, et qui devraient théoriquement participer au financement de cette correction.
II - LA POLITIQUE EXTÉRIEURE DE L'UNION
A - Une progression modeste des crédits liée aux difficultés persistantes rencontrées dans l'exécution des programmes
Cette année, la Commission, se basant sur la constatation des difficultés récurrentes de l'exécution, n'a pas proposé le dépassement du plafond des crédits de la rubrique 4 tels qu'ils sont inscrits dans les perspectives pluriannuelles. Elle a proposé une augmentation de 2,3% des crédits d'engagement, que le Conseil a limitée à 1,8%. De même, le Conseil a ramené à 0,3%, au lieu de 0,6%, la progression des crédits de paiement.
Actions extérieures : budget 2002 et projet de budget pour 2003
Budget 2002 |
Projet de budget 2003 |
Variation en % budget 2002 | ||||
CE |
CP |
CE |
CP |
CE |
CP | |
Aide humanitaire |
441,8 |
441,8 |
470,0 |
470,0 |
6,4 |
6,4 |
Aide alimentaire |
455,0 |
421,0 |
454,6 |
401,5 |
- 0,1 |
-4,6 |
Coopération PVD Asie |
488,0 |
465,1 |
556,5 |
474,9 |
14,0 |
2,1 |
Amérique latine |
346,7 |
318,4 |
324,0 |
292,2 |
- 6,5 |
- 8,2 |
Afrique du Sud |
124,8 |
148,5 |
127,0 |
127,5 |
1,8 |
- 14,1 |
Méditerranée |
861,4 |
683,7 |
753,9 |
720,7 |
- 12,5 |
5,4 |
BERD |
0,0 |
8,4 |
0,0 |
8,4 |
0,0 |
0,0 |
Europe orientale |
473,9 |
543,0 |
490,4 |
491,1 |
3,5 |
- 9,6 |
Balkans |
765,0 |
782,0 |
684,6 |
775,0 |
- 10,5 |
- 0,9 |
Autres actions de coopération |
419,6 |
411,2 |
447,1 |
436,9 |
6,6 |
6,3 |
Démocratie et droits de l'Homme |
104,0 |
100,7 |
88,5 |
90,0 |
- 14,9 |
- 10,62 |
Accords de pêche |
193,2 |
196,2 |
194,0 |
199,2 |
0,4 |
1,5 |
Volet externe des politiques communautaires |
|
|
|
|
|
|
PESC |
30,0 |
35,0 |
47,5 |
50,0 |
58,3 |
42,9 |
Malte Chypre Turquie |
21,0 |
20,4 |
174,0 |
52,9 |
728,6 |
159,3 |
Total rubrique |
4 803,1 |
4 666,2 |
4 891,9 |
4 680,9 |
1,8 |
0,3 |
Plafond |
4 972 |
|||||
Marge |
80,1 |
L'augmentation prévue par la Commission prenait en compte la poursuite du programme de reconstruction en Afghanistan, le financement accompagnant l'adoption de deux règlements sur les maladies liées à la pauvreté et une dotation renforcée de 28 millions d'euros pour l'aide humanitaire dans les situations d'urgence.
Le Conseil a fait prévaloir une autre priorité : il a porté à 80 millions d'euros la marge disponible sous le plafond de la rubrique « actions extérieures » afin de préserver les moyens de faire face à de nouvelles crises internationales en 2003. En contrepartie, le Conseil a décidé un ensemble de diminutions des crédits d'engagement qui ne devraient par remettre en cause les programmes en cours.
Le Conseil a décidé une progression des crédits destinés à la PESC, qui passent de 30 à 47,5 millions d'euros. Il s'agit notamment de prévoir le financement de la force de police en Bosnie (20 millions d'euros), pour laquelle l'Union européenne assurera la relève à partir du 1er janvier 2003.
Le tableau ci-dessus fait apparaître la multiplicité des actions extérieures de l'Union, et celle des destinations géographiques qui risque de conduire à l'éparpillement, ainsi que la variété de la nature des aides (coopération, soutien de la démocratie et des droits de l'homme) qui peut laisser craindre le saupoudrage.
On constate cependant, au cours des dix dernières années, une réorientation et une concentration des crédits vers certaines régions au détriment d'autres.
Tout d'abord, l'aide publique au développement (APD), qui représentait, selon la définition de l'OCDE, 90% des dépenses d'actions extérieures en 1990, représente aujourd'hui moins de 75% de ces dépenses, dotations du Fonds européen de développement (FED) incluses. La part consacrée aux pays les moins avancés s'est réduite à 20% de l'APD, les aides tendant à se concentrer vers les pays à revenu intermédiaire offrant de meilleures perspectives commerciales.
Ensuite, on soulignera que pendant cette dernière décennie, l'Union a clairement réorienté ses efforts d'abord vers l'Est du continent européen, puis vers les Balkans. Les programmes d'assistance technique destinés aux Balkans et à la Méditerranée totalisent 34% du budget des aides extérieures et ce pourcentage atteint 44% si l'on inclut les programmes à destination de l'Europe centrale.
Il est de l'intérêt politique et économique de l'Union de concentrer son aide sur les régions voisines, afin de contribuer à leur stabilité et de forger un vaste marché économique et commercial dont l'intégration progresse. Cependant, il faudrait s'interroger sur l'impact que peuvent avoir les multiples autres interventions, leur complémentarité ou leur valeur ajoutée par rapport aux interventions des Etats membres dans les mêmes pays.
2) L'exécution des actions extérieures toujours globalement insatisfaisante
Le niveau d'exécution global des actions extérieures a connu un léger recul en 2001 par rapport à 2000. Le taux d'exécution des actions, qui était de 91,4% en 2000, est descendu à 86,2% en 2001. Le montant des « restes à liquider » a donc progressé l'année dernière, alors que la Commission a déjà procédé à l'annulation de 600 millions d'euros d'engagements dormants.
Cependant, la situation diffère selon les zones géographiques considérées. Les programmes engagés dans certaines zones ont connu une montée des paiements : c'est le cas des Balkans avec une progression de 36% de la consommation du programme CARDS, c'est le cas de l'Asie, avec le programme ALA, et c'est également le cas de la Méditerranée, avec une progression de 17% de la consommation sur le programme MEDA. Il faut rappeler toutefois que le programme MEDA conserve un reste à liquider très élevé de 3,7 milliards d'euros.
Par contre, les décaissements ont diminué vers l'Amérique latine et vers les Républiques issues de l'ex-URSS - les paiements sur le programme TACIS ont reculé de 11% en 2001 et de 10% à nouveau pendant le premier semestre 2002.
Le bilan de la réforme de la gestion de l'aide extérieure engagée en 2000 par la Commission est encore incomplet. Il semble que la déconcentration de l'aide vers les délégations de l'Union semble avoir un effet positif sur l'accélération des décaissements. Par ailleurs, le recours croissant à l'aide budgétaire, que la Commission a développée dans les pays méditerranéens, améliore aussi la rapidité des décaissements, les autorités bénéficiaires définissant de façon plus autonome les actions à conduire. D'autres questions se poseront néanmoins : celle du maintien de la qualité des projets et celle du contrôle de l'utilisation des crédits.
B - La poursuite de la reconstruction et de la stabilisation dans les Balkans occidentaux
En 2000, l'Union a créé un nouvel instrument unique canalisant l'aide aux pays des Balkans, et réunissant les programmes antérieurement mis en place : le programme CARDS.
Ce programme s'inscrit dans une logique générale, le processus de stabilisation et d'association lancé en 1999 et dont la force a été réaffirmée lors du sommet de Zagreb qui s'est tenu sous la présidence française de l'Union européenne, le 24 novembre 2000. Le processus de stabilisation et d'association repose sur l'idée que la perspective d'intégration, à terme, dans l'Union européenne, ouverte lors des conseils européens de Cologne et de Feira (qui leur avait reconnu la qualité de « candidats potentiels à l'adhésion ») constitue le principal levier vis-à-vis des pays de la région. Il se traduit par la négociation et la conclusion d'Accords de stabilisation et d'association (ASA) et est accompagné du programme CARDS qui permet d'accompagner et de conforter le processus de réformes. Les pays bénéficiaires sont avantagés par des préférences commerciales asymétriques exceptionnelles.
Le programme CARDS était initialement consacré à la reconstruction économique. Les principaux secteurs concernés étaient les transports (routes, ponts et ouvrages d'art, nettoyage du lit du Danube), l'énergie (fourniture d'énergie, remise en état des centrales électriques, des mines de charbon, des lignes à haute tension), l'eau (adduction et usines de retraitement), les lignes de télécommunications et la réhabilitation des logements et services sociaux (habitations, écoles, dispensaires).
Depuis 2002, le programme CARDS s'est recentré sur les questions relatives à la stabilisation économique, la création d'une économie de marché concurrentielle et le renforcement institutionnel. Il a ainsi vu la part consacrée au renforcement et à la modernisation des administrations croître jusqu'à 30%, dans le cadre des programmes par pays.
S'agissant de la reconstruction, le programme semble porter ses fruits, comme en témoignent les améliorations constatées tout d'abord dans le domaine de l'énergie, qui a été le principal secteur d'intervention de l'Union européenne : remise en route des centrales électriques et hydroélectriques, reconstruction des lignes électriques. Les améliorations sont également constatées dans le domaine des transports (réhabilitation de routes), du logement (reconstruction de maisons détruites), de l'eau (reconstruction des adductions d'eau et de centrales de traitement et d'assainissement).
S'agissant de la stabilisation économique et de la réorientation du programme vers le renforcement institutionnel, il est encore difficile de porter des appréciations, le processus venant de débuter.
Le programme CARDS accuse cependant certaines faiblesses, comme un manque de coordination générale entre les projets, trop « déconnectés » les uns des autres. L'exemple le plus frappant en est la question de l'énergie au Kosovo où la réhabilitation des centrales Kosovo B1 et B2 ne s'est pas accompagnée parallèlement d'une modernisation de la compagnie d'électricité KEK, chargée de la maintenance et de l'utilisation. La dimension régionale du programme devrait être accrue, en reliant entre eux les programmes des différents pays concernés, en particulier dans le domaine de l'énergie et notamment de l'électricité.
Pour répondre à la situation d'urgence au Kosovo, en République de Serbie et au Monténégro, la Commission a créé en 1999 l'Agence européenne pour la reconstruction, dont le siège a été fixé à Salonique avec un centre opérationnel à Pristina. Sa compétence a été étendue à l'ARYM. L'agence gère les aides-projets mises en _uvre dans le cadre du programme CARDS, ainsi que les actions encore engagées dans le cadre des programmes antérieurs OBNOVA et PHARE.
On soulignera que le fonctionnement de l'Agence échappe aux blocages et aux lenteurs dans le déboursement des crédits souvent reprochés à la Commission dans la mise en _uvre de l'aide extérieure européenne. Quelques chiffres témoignent de l'efficacité de l'Agence dont le travail et l'efficience ont été salués par le Parlement européen et la Cour des Comptes européenne : 94% des fonds inscrits pour l'année 2000 ont été déboursés ; pour 2001, 92% des fonds de la première tranche ont été contractés (25% déboursés) et 60% de la seconde tranche pour 2001 ont été contractés.
Si l'on prend en compte, en 2000, l'ensemble de l'aide communautaire fournie aux Balkans occidentaux, 45% des actions ont été effectuées au titre de l'aide alimentaire d'urgence et 40% au titre des opérations de reconstruction.
C - L'aide aux Territoires palestiniens
L'Union européenne est le premier bailleur de fonds de l'Autorité palestinienne, qu'elle a soutenue à hauteur de 1,4 milliard d'euros depuis 1994, en additionnant les prêts et les dons. Au cours des deux exercices 2000 et 2001, cette aide correspond, pour l'ensemble des différentes rubriques, à un montant global de 369 millions d'euros engagés et 332 effectivement déboursés.
L'aide financière de l'Union européenne aux Territoires palestiniens transite par plusieurs canaux qui correspondent à des affectations différentes. L'essentiel de cette assistance s'établit comme suit :
a) l'aide humanitaire (93 millions) et alimentaire (101 millions) depuis 1994. L'Union européenne a déboursé près de 15 millions d'euros en avril 2002, pour des équipements médicaux tels que des centres de soins d'urgence, l'achat de médicaments ou encore la distribution d'eau potable. De même, l'agence européenne ECHO a déboursé, en 2002, 25 millions d'euros pour procurer essence, nourriture et eau à la Cisjordanie et à Gaza.
b) la contribution communautaire au budget de l'UNRWA (306 millions auxquels s'ajoutent 620 millions de contributions bilatérales des Etats membres) depuis 1994. L'aide accordée aux réfugiés palestiniens, à travers l'UNRWA, se montait à 57 millions d'euros en 2001 et 55 millions d'euros en 2002.
c) l'aide budgétaire directe, mise en place de façon régulière depuis la reprise de l'Intifada, qui vise à compenser le manque à gagner résultant du gel des transferts financiers par Israël en octobre 2000 (155 millions d'euros). Cette aide couvre environ 10% des besoins budgétaires de l'Autorité palestinienne.
Face à l'interruption prolongée des transferts financiers, la Commission a proposé aux Etats membres la transformation du reliquat de 60 Millions d'euros de la « facilité de trésorerie spéciale » en aide directe budgétaire non remboursable, c'est-à-dire en dons. Cette aide, initialement conçue comme temporaire, tend à s'inscrire dans la durée. Ainsi, les Etats membres sont-ils convenus de prolonger l'aide budgétaire directe jusqu'à février 2003, à raison de 10 millions d'euros par mois.
d) l'aide-projet a quasiment été supprimée en 2001 et 2002, à cause des violences et des destructions commises dans la région. Au début 2002, la Commission a remis un chiffrage des dommages causés par l'armée israélienne sur des équipements et des projets financés par l'Union européenne (Commission et Etats membres) ; le total de ces dommages était évalué à près de 17 millions d'euros.
En 2001, un seul projet a été engagé, celui relatif à l'assistance au secteur hospitalier et à sa gestion (1,95 Millions d'euros). En 2002, seule une aide d'urgence en faveur du ministère palestinien de la santé a pu être mise en _uvre (10 Millions d'euros). Par ailleurs, une aide de 10 millions d'euros a été fournie en 2002 aux municipalités palestiniennes pour éviter l'effondrement des services municipaux.
Pour 2002-2003, quatre projets pourraient voir le jour pour 22 Millions d'euros : un soutien aux PME de Jérusalem-Est, un renforcement du système judiciaire palestinien, un soutien au secteur de la santé, et un soutien d'urgence aux hôpitaux palestiniens de Jérusalem-Est.
D - Les engagements en faveur de l'Afghanistan
Dans le cadre de la conférence des donateurs qui s'est tenue à Tokyo les 21 et 22 janvier 2002, l'Union européenne s'est engagée à participer au plan de reconstruction de l'Afghanistan à hauteur d'environ 200 millions d'euros pour 2002 et à maintenir un effort important les quatre années suivantes. La Commission s'est fixé pour objectif de mobiliser un milliard d'euros sur cinq ans.
Par ailleurs, les engagements de contributions nationales des Etats membres pour 2002 s'élèvent à 400 millions d'euros (dont 27 pour la France, l'Allemagne assurant la plus importante participation avec 80 millions d'euros, suivie des Pays-Bas avec 70 millions d'euros. Les autres contributions importantes sont celles des Etats-Unis (296 millions d'euros en 2002), du Japon avec 500 millions d'euros sur 2 ans et l'Arabie Saoudite avec 221 millions d'euros sur 3 ans.
Les crédits correspondants aux engagements de l'Union ont été inscrits dans le budget pour 2002 pour un montant de 155 millions d'euros. A mi-année, 51 millions avaient été engagés et déboursés et près de 70 millions de contrats étaient en cours de finalisation.
Par ailleurs, le Conseil a approuvé à l'occasion de l'adoption du projet de budget pour 2003 un renforcement des crédits humanitaires de 25 millions d'euros pour 2002 à partir de la réserve pour aides d'urgence. En outre, la Commission a prévu de soumettre à l'automne à l'autorité budgétaire une proposition de mobilisation de tout ou partie des crédits disponibles dans la marge sous le plafond de la rubrique 4 en 2002, soit 70 millions d'euros, afin d'initier le lancement de la seconde phase du plan de reconstruction. Le montant d'aide de 200 millions d'euros, sur lequel l'Union s'est engagée, sera ainsi très probablement atteint, voire dépassé, en 2002.
Les principales actions programmées dans le cadre de la première phase du plan de reconstruction correspondent au financement du soutien du nouveau pouvoir afghan et de son administration, à des actions de déminage et à la remise en état des infrastructures urbaines pour un total de 37 millions d'euros.
Pour 2003, la Commission prévoit de ramener l'effort de l'Union européenne en faveur de l'Afghanistan à hauteur de 170 millions d'euros. La part prévue pour l'aide humanitaire devrait décroître au profit d'une montée en charge du plan de reconstruction. Le repli du montant de l'engagement par rapport à 2002 s'explique par la prise en compte du rythme d'absorption de montants importants de crédits mobilisés sur de très courtes périodes.
E - Les incertitudes quant au financement de la PESC et de la PESD
Le financement de la politique étrangère et de sécurité commune est régi par l'article 28 du Traité sur l'Union européenne. Ce financement est pour partie communautaire (chapitre B8) et pour partie national - dépenses afférentes à des opérations ayant des implications militaires ou dans le domaine de la défense. La sous section B8 du budget général de l'Union européenne regroupe les crédits affectés à la politique étrangère et de sécurité commune.
De façon plus détaillée, on précisera que la ligne B8-010 sert essentiellement à financer la mission de surveillance de l'Union européenne dans les Balkans (EUMM). La ligne B8-011 finance un certain nombre d'actions de l'Union en matière de non-prolifération et de désarmement en Russie, de lutte contre l'accumulation d'armes légères et de petit calibre au Mozambique, au Cambodge, en Ossétie du Sud, en Amérique du Sud, en Albanie, et des actions en matière de déminage. La ligne B8-012 sert à financer des actions d'appui au processus de paix au Proche-Orient (dans le cadre de la mission du représentant spécial M. Moratinos et dans le cadre du programme d'assistance à l'Autorité palestinienne pour lutter contre les actions terroristes), des actions d'appui au Pacte de stabilité pour l'Europe du Sud-Est, une contribution à la mission de facilitation du dialogue intercongolais, une aide aux gardes-frontières géorgiens, un appui à la mise en place d'une présence multinationale intérimaire de sécurité au Burundi ; c'est enfin sur cette ligne que sera financée la mission de police de l'Union européenne en Bosnie-Herzégovine.
1) Le Conseil favorable à une hausse préventive de la dotation PESC
Le volume des crédits inscrits pour le financement des dépenses opérationnelles de la PESC a été très variable d'une année sur l'autre. Depuis l'exercice 2000 cependant, la tendance est à une baisse continue et rapide du volume des crédits inscrits au chapitre B8, pour deux raisons principales :
- plusieurs dépenses, initialement imputées sur le chapitre PESC, ont été progressivement transférées vers d'autres chapitres du budget communautaire, B7 notamment (observation des élections, déminage, participation communautaire à la Minuk et au Bureau du Haut représentant, mécanisme de réaction rapide).
- les crédits ont été régulièrement sous-consommés.
Le Parlement européen en a tiré argument pour diminuer le budget PESC, ce qui est en contradiction fondamentale avec l'incapacité de principe à programmer ce type de dépense.
L'exécution budgétaire montre depuis 1998 une relative stabilité, autour de 30 millions d'euros, hors toute opération de gestion de crise.
Une telle évolution à la baisse méconnaîtrait la nature même des dépenses de la PESC et ne permettrait pas d'anticiper le développement des capacités opérationnelles du deuxième pilier. La France a donc cherché, avec ses partenaires du Conseil, à augmenter les dotations prévues initialement dans l'avant-projet de budget général présenté par la Commission européenne, pour porter le total de la sous-section B8 à 47,5 millions d'euros en crédits d'engagement pour 2003, ce qui permettrait une meilleure prise en charge commune de nouvelles charges, et notamment celles entraînées prochainement par la mission de police de l'Union en Bosnie-Herzégovine ou par des actions d'assistance technique aux pays tiers en matière de lutte contre le terrorisme. Un accord est intervenu sur ce point au Conseil, mais il reste encore soumis à un accord global avec le Parlement européen qui n'interviendra qu'à l'issue de la seconde lecture.
La hausse « préventive » du chapitre B8 pour parer aux événements imprévus doit être poursuivie par la suite, mais elle se heurtera à des limites : l'Accord interinstitutionnel du 6 mai 1999 interdit toute création de réserve au sein du chapitre B8 ; et l'abondement de la ligne « actions urgentes » (B8-014) ne doit pas dépasser 20% du montant global du chapitre PESC. Ces contraintes sont en fait liées à des considérations institutionnelles relatives au rôle budgétaire du Parlement européen et à la nature intergouvernementale de la PESC.
La Commission a quant à elle proposé la création d'un nouvel instrument de « super-flexibilité », qui a été unanimement repoussé par les Etats membres, considérant que les instruments nécessaires au sein du budget communautaire existaient. En revanche, les conditions d'utilisation de la réserve d'aide d'urgence pour de véritables actions d'urgence, non prévues, de gestion civile des crises dans le cadre de la PESC (c'est l'exemple de la reprise intérimaire de la mission de police de l'ONU en Bosnie en 2002) ont été assouplies dans le cadre de la discussion entre Parlement européen et Conseil sur le projet de budget 2003. Il s'agissait par là de pallier l'absence actuelle de mécanismes d'urgence utilisables pour la PESD. Cette solution reviendrait à recourir en cours d'année au jeu des virements de crédits et des budgets rectificatifs et supplémentaires (BRS), pour lequel le Parlement européen conserve le dernier mot.
Cette solution n'est pas pleinement satisfaisante. D'autres solutions devraient être explorées, qui nécessiteraient une modification de l'Accord institutionnel de 1999 ou du traité. Elles devraient être étudiées dans le cadre des travaux actuellement menés par la Convention sur l'avenir de l'Europe.
2) La préparation de la première opération dans le cadre de la PESD
Le Conseil de l'Union a adopté deux décisions, en 2002, précisant les modalités de financement des opérations de gestion de crise qui pourront être conduites au titre de la politique européenne de sécurité et de défense.
Tout d'abord, l'action commune adoptée par le Conseil le 11 mars 2002 a précisé les modalités de financement de la mission de police de l'Union européenne en Bosnie-Herzégovine, mission qui constituera la premier projet civil de gestion des crises au titre de la PESD. Cette mission doit assurer la relève du groupe international de police des Nations unies en Bosnie, à partir du 1er janvier 2003.
Pour l'année 2002, 14 millions d'euros sont financés sur le budget communautaire (sous-section B8) pour les dépenses de l'équipe de planification et les équipements de la mission. Pour les années suivantes, de 2003 à 2005, le budget prévisionnel annuel de la mission sera de 38 millions d'euros, répartis comme suit :
. 17 millions d'euros au maximum en indemnités journalières de subsistance et 1 million pour les frais de voyage, qui seront financés par ceux qui les occasionnent. La France prendra donc en charge à titre national ce type de dépenses pour les personnes (policiers et gendarmes) qu'elle mettra à la disposition de la mission ; le coût exact dépendra donc du nombre de Français qui seront retenus dans la mission ;
. 20 millions d'euros pour le fonctionnement opérationnel, le personnel local et le personnel civil international : ces coûts seront financés par le budget communautaire.
Le Conseil « affaires générales » du 17 juin 2002 a par ailleurs adopté, après de difficiles et longues négociations, des conclusions précisant les modalités concrètes de financement d'une opération militaire de l'Union européenne. Ce texte était indispensable pour permettre à l'Union de répondre à la volonté exprimée par les Chefs d'Etat et de gouvernement au Conseil européen de Séville de voir l'Union européenne reprendre la mission de l'OTAN en Macédoine. La France n'engagera cependant de dépenses nationales qu'à compter du jour où l'Union aura décidé de lancer sa première opération militaire européenne.
III - LA PRÉPARATION DE L'ÉLARGISSEMENT
A - Le bilan des aides de pré-adhésion
On rappellera que le Conseil européen de Berlin de mars 1999 avait institué une 7ème rubrique financière dotée, pour la période 2000 - 2006, de 3,12 milliards d'euros par an, au profit de dix pays d'Europe centrale et orientale candidats, Chypre et Malte bénéficiant d'une programmation distincte au sein de la rubrique 4. Cette rubrique 7 consacrée à la pré-adhésion comporte des financements de 1560 millions d'euros par an pour le programme PHARE, 1040 millions d'euros par an pour l'instrument structurel ISPA (afin de co-financer des infrastructures de transports et d'environnement) et 520 millions d'euros par an pour le programme SAPARD d'aide à l'agriculture et au développement rural.
Les aides de pré-adhésion pour la période 2000-2006
Allocations indicatives annuelles en millions d'euros
Pays candidats |
Phare |
Sapard |
ISPA |
TOTAL | ||
Minimum |
Maximum |
Minimum |
Maximum | |||
Bulgarie |
100 |
52.1 |
83.2 |
124.8 |
235.3 |
276.9 |
Rép. tchèque |
79 |
22.1 |
57.2 |
83.2 |
158.3 |
184.3 |
Estonie |
24 |
12.1 |
20.8 |
36.4 |
56.9 |
72.5 |
Hongrie |
96 |
38.1 |
72.8 |
104 |
206.9 |
238.1 |
Lettonie |
30 |
21.8 |
36.4 |
57.2 |
88.2 |
109 |
Lituanie |
42 |
29.8 |
41.6 |
62.4 |
113.4 |
134.2 |
Pologne |
398 |
168.7 |
312 |
384.8 |
878.7 |
951.5 |
Roumanie |
242 |
150.6 |
208 |
270.4 |
600.6 |
663 |
Slovaquie |
49 |
18.3 |
36.4 |
57.2 |
103.7 |
124.5 |
Slovénie |
25 |
6.3 |
10.4 |
20.8 |
41.7 |
52.1 |
TOTAL |
1085 |
520 |
1040 |
Le programme PHARE se concentre sur les priorités définies par le Conseil, à la majorité qualifiée, dans les Partenariats pour l'adhésion, pour amener les pays candidats au respect des critères de Copenhague. 30% des crédits PHARE sont consacrés au renforcement institutionnel (jumelages entre administrations des Etats membres et celles des pays candidats) pour la reprise et l'application de l'acquis communautaire et 70% à des investissements visant l'alignement sur les normes et règles de l'Union, ainsi que la cohésion économique et sociale.
Le programme PHARE évolue pour se rapprocher du système des fonds structurels : la moitié des crédits PHARE destinés aux investissements sera affectée à la cohésion économique et sociale, soit en fait 35% des crédits dont bénéficie le programme.
Les interventions du programme se concentrent notamment sur les secteurs suivants : justice et affaires intérieures, avec l'équipement des frontières, la normalisation et la standardisation du marché intérieur, le contrôle financier (audit interne et externe), l'environnement et l'énergie. Ces derniers volets s'articulent avec des investissements plus lourds en termes d'infrastructures, cofinancés par ISPA : stations d'épuration des eaux, usines de traitement et de recyclage des déchets, infrastructures routières et ferroviaires.
Les administrations françaises se sont particulièrement investies dans le volet institutionnel du programme PHARE, par les jumelages avec les administrations des pays candidats. Depuis leur lancement en 1998, 503 jumelages ont été lancés, représentant un budget de 471,22 millions d'euros. La France est présente en qualité de chef de file ou de partenaire dans 25% des projets, ce qui la place en deuxième position derrière l'Allemagne. C'est dans le secteur des finances publiques et du marché intérieur que la participation française est la plus importante, suivie par l'agriculture, la justice et les affaires intérieures, le développement régional et l'environnement.
Les effets de ces programmes et de la stratégie arrêtée à Berlin sont régulièrement mesurés par la Commission dans ses rapports annuels de progrès. La progression des négociations d'adhésion et la clôture de certains chapitres complexes, comme l'environnement, en sont une illustration, les pays candidats étant parvenus à se doter d'une stratégie de reprise de l'acquis assortie de plans de financements soutenus par les crédits communautaires. Dans le domaine de la justice et des affaires intérieures, les effets les plus visibles portent sur l'équipement des services de police aux frontières ou l'informatisation et la mise en réseau des postes consulaires pour la délivrance des visas.
B - Le volet financier de l'élargissement
Près d'une décennie après avoir commencé, l'exercice de l'élargissement de l'Union entre dans sa phase la plus délicate : le calcul des contributions des futurs membres au budget de l'Union européenne et de l'enveloppe financière qui leur sera allouée. La Commission européenne a présenté aux Etats membres les sommes que chaque pays candidat devrait recevoir de l'Union européenne en 2003, année qui précédera les premières adhésions attendues, et au cours des trois premières années d'adhésion (2004, 2005, 2006). Les estimations font actuellement l'objet d'un examen attentif au groupe de travail « élargissement » du Conseil des ministres et par les pays candidats eux-mêmes. La question sensible est de savoir comment éviter que les contributions des nouveaux membres ne détériorent fortement leur situation. En clair, le calcul de la Commission indique que cinq pays seront perdants en termes nets : Chypre, la République tchèque, la Hongrie, la Slovénie et Malte.
Votre Rapporteur donnera deux exemples. La République tchèque serait la plus touchée par ce mécanisme défavorable : après avoir reçu 158 millions d'euros en 2003, son « manque à gagner » serait de 342 millions d'euros en 2004 et de 109 millions d'euros en 2005. La Slovénie aura bénéficié d'une aide de pré adhésion de 45 millions d'euros en 2003, pour perdre ensuite 174 millions d'euros en termes nets en 2004, 144 millions en 2005 et 116 millions en 2006.
Cette situation s'explique par le fait que les versements qui seront attendus des pays candidats concernés seront supérieurs au financement dont ils bénéficieront. Les nouveaux Etats devront verser leur contribution au budget communautaire, c'est à dire le versement, comme tout Etat membre, d'une combinaison de ressources propres, de TVA, de prélèvement sur le PNB et aussi une contribution au remboursement que l'Union européenne verse chaque année au Royaume-Uni depuis 1984. Ces obligations dépasseront les avantages financiers qu'ils tireront de l'aide de pré adhésion, l'aide à l'agriculture, les fonds structurels et autres.
Aussi a t-il été envisagé que l'Union apporte une compensation budgétaire aux nouveaux membres afin de corriger ce déséquilibre. Toutefois, cette compensation ne pourra être fixée que lorsque l'Union européenne aura pu établir plus précisément la position nette de chacun des nouveaux Etats membres.
Cependant, si la France et d'autres Etats membres ont soutenu dès le début le principe d'une compensation, d'autres pays, comme l'Allemagne et les Pays-Bas, s'y sont d'abord opposés. Une évolution est en cours, permettant d'espérer une solution acceptée par les Quinze avant le Conseil européen de Bruxelles (24-25 octobre), qui doit adopter l'ensemble des dispositions financières de l'élargissement.
La méthode de calcul de cette compensation pose des difficultés. Une hypothèse a été évoquée consistant à prélever une part du Fonds de cohésion : elle a logiquement rencontré les réticences des quatre Etats membres bénéficiaires du fonds.
La méthode la plus simple, évitant de remettre en cause les « acquis » financiers d'autres Etats, serait un versement budgétaire égal à la différence entre le solde net de ces pays pour la première année d'adhésion et le solde net dont ils bénéficient actuellement.
Cette question, à laquelle on peut ajouter celle du versement des aides directes agricoles, très attendues par les futurs Etats membres, laisse augurer des tensions auxquelles devra faire face le budget 2004.
Votre Rapporteur mentionnera la situation de la Slovénie, pays candidat dans lequel il s'est rendu les 19 et 20 septembre derniers, car elle illustre à la fois les efforts accomplis par les pays candidats et l'acuité des questions qui restent à résoudre, pour les Quinze, avant le prochain Conseil européen de Bruxelles.
L'économie slovène a connu une croissance régulière, proche de 4 % par an, depuis 1993. Chypre excepté, la Slovénie a le revenu par habitant (15 000 dollars en parité de pouvoir d'achat) le plus élevé de tous les candidats à l'adhésion à l'Union, se situant à 72 % de la moyenne communautaire.
Les priorités du gouvernement au cours des dernières années ont été les suivantes.
La principale a été la préparation à l'adhésion à l'Union européenne, qui passe par la reprise de l'acquis communautaire et la poursuite des réformes et des privatisations (ces dernières provoquant toutefois des controverses qui retardent la libéralisation de l'économie). La Slovénie est parvenue assez tôt à la clôture provisoire de 28 chapitres de négociations et on soulignera qu'elle a été le premier pays à achever les négociations sur les chapitres « techniques », dès la fin de la présidence belge.
Les efforts accomplis pour la transposition de l'acquis ont conduit la Commission à considérer, dans son rapport de progrès présenté le 9 octobre, que la Slovénie est prête pour une adhésion à l'Union en 2004. L'économie du pays est d'ailleurs jugée prête, de même que l'économie chypriote, à affronter dès aujourd'hui la concurrence du marché unique.
La deuxième priorité est de rejoindre l'OTAN : la Slovénie escompte y parvenir à l'occasion du sommet de Prague de l'Alliance atlantique en novembre 2002.
Enfin, la Slovénie poursuit l'achèvement de la normalisation des relations avec les Etats voisins et avec les autres Etats issus de l'ex-Yougoslavie, qui constitue également un objectif majeur.
La Slovénie a présenté clairement ses priorités pour la phase finale des négociations, dans un document remis en juin par le Premier ministre Drnovsek au Président de la Commission européenne Romano Prodi.
L'objectif affiché par Ljubljana est d'obtenir un paquet financier plus favorable que celui proposé par la Commission, et en particulier d'éviter d'être contributeur net au budget communautaire.
Tout d'abord, la Slovénie demande la possibilité de compléter dès 2004, et pendant toute la durée de la période transitoire, les aides directes de l'Union européenne par des aides agricoles nationales à hauteur du montant total auquel le pays aurait droit en tant que bénéficiaire à part entière de la PAC. Les Slovènes, à la différence des autres candidats, sont prêts à accepter le « phasing in » des aides directes proposé par la Commission, c'est-à-dire des aides limitées à 25% en 2004 et augmentant progressivement jusqu'à 2013, si cette solution devait être retenue pour tous les nouveaux membres.
Cette revendication revêt pour la Slovénie une importance capitale, car elle est le seul pays candidat à avoir mis en place une véritable politique agricole, inspirée de celle de l'Union européenne ; si cette demande n'était pas satisfaite, l'adhésion signifierait une détérioration de la situation des agriculteurs, d'autant plus que, les prix agricoles slovènes étant supérieurs aux prix communautaires, l'intégration dans les mécanismes de la PAC entraînera mécaniquement une baisse du revenu des agriculteurs. D'après les Slovènes, cette revendication, sans coût pour l'Union européenne, serait soutenue par la Commission.
La Slovénie demande par ailleurs un montant supplémentaire de fonds européens pour le développement rural : elle souhaite bénéficier de 5 % de l'enveloppe proposée, soit près de 90 millions d'euros en moyenne annuelle de 2004 à 2006 (contre les 2 % prévus par la Commission, qui représentent 33 millions par an). La Commission, tout en mettant en avant les faibles marges disponibles, souligne cependant la possibilité que la Slovénie bénéficie d'une partie conséquente de la réserve prévue au budget de développement rural (76 millions jusqu'en 2004), ce pays disposant d'ores et déjà des capacités d'absorption nécessaires, et notamment d'un programme de développement rural aligné sur les mesures communautaires.
La Slovénie a accepté en juillet dernier la clôture du chapitre politique régionale. Elle bénéficiera, aux termes de la position commune, de 1,5 % de l'enveloppe accordée aux nouveaux membres au titre de l'objectif 1 (l'ensemble du territoire étant éligible), et entre 1,7 et 2,7 % des crédits du fonds de cohésion. De manière générale, les Slovènes estiment insuffisant le montant prévu par la Commission au titre de la politique régionale, et souhaitent bénéficier de fonds structurels équivalents à 1,5 % de leur PNB contre 0,5 à 0,7 % dans le schéma actuel.
Enfin, la Slovénie souhaite le relèvement des quotas et des quantités de référence, en particulier en ce qui concerne le lait et le sucre. Les discussions se poursuivent actuellement avec la Commission.
De façon générale, les Slovènes veulent éviter de se trouver en situation de contributeurs nets après l'adhésion, et demandent à bénéficier d'un arrangement transitoire approprié permettant de réduire leur contribution au budget communautaire.
La France soutient dans son principe la demande exprimée par la Slovénie que les aides communautaires puissent être complétées par des aides nationales. Le Gouvernement appuie le principe de différenciation, la situation objective de chaque pays devant être prise en compte, et s'est prononcé en faveur de l'octroi progressif des aides directes aux nouveaux membres dès l'adhésion. La proposition de la Commission de phasing in jusqu'en 2013, semble constituer un compromis équilibré.
Le projet de budget 2003 est à présent soumis à l'examen du Parlement européen. La seconde lecture par le Conseil ECOFIN/ Budget aura lieu le 25 novembre. Le budget sera définitivement arrêté par le Président du Parlement européen, après seconde lecture du Parlement, entre le 16 et le 19 décembre.
En conclusion, votre Rapporteur rappellera que le budget initial de la Communauté pour 2002 représentait 1,04% du montant prévisionnel du PNB communautaire. Le prélèvement sur recettes effectué par le projet de loi de finances pour 2003, qui est donc de 15,8 milliards d'euros, représente 1,01% du PNB français. Cette contribution place la France en position médiane. En effet, des pays tels que la Suède, l'Allemagne, les Pays-Bas, l'Autriche, ont une contribution plus importante en proportion de leur PNB.
Ces données doivent être considérées au moment où les négociations sur l'élargissement deviennent plus aiguës autour de la question du « paquet financier », c'est-à-dire du financement de l'élargissement.
Comme votre Rapporteur l'a déjà mentionné, les Etats membres devront, dans les prochaines semaines, résoudre des questions très difficiles : quel système d'aides directes mettre en place en faveur des agriculteurs des nouveaux Etats membres ? Comment éviter que ces Etats, du fait du délai de versement des crédits communautaires au titre de la PAC ou des fonds structurels, ne soient contributeurs nets pendant les deux premières années de leur adhésion ?
Le Gouvernement est, à juste titre, favorable à une compensation financière pendant les premières années de l'élargissement. Mais celui-ci comporte d'autres obstacles à surmonter de la part des Etats membres, et notamment de la France. Il en est ainsi de la modification du système de ressources propres, qui doit impérativement évoluer ; il est en effet difficilement justifiable de maintenir comme un acquis communautaire la ristourne britannique. Mais des évolutions devront aussi s'effectuer, inéluctablement, en ce qui concerne la PAC et son financement, auxquelles notre pays devra se préparer.
Aussi devons-nous entreprendre une réflexion sur ces évolutions, afin de les préparer et d'être une force de proposition. Cette réflexion doit inclure l'hypothèse d'une progression - contrôlée - du budget communautaire, si l'on veut lui conserver son rôle d'outil de cohésion économique et sociale dans l'Union européenne.
Audition de Mme Noëlle Lenoir,
Ministre déléguée aux Affaires européennes
La Commission a entendu Mme Noëlle Lenoir, Ministre déléguée aux Affaires européennes, le mercredi 2 octobre 2002.
Le Président Edouard Balladur a accueilli Mme Noëlle Lenoir, précisant qu'outre la présentation du projet de budget communautaire pour 2003, il serait souhaitable d'évoquer le processus d'élargissement et les travaux de la Convention sur l'avenir de l'Europe.
Mme Noëlle Lenoir a présenté tout d'abord le projet de budget communautaire pour 2003 adopté en première lecture par le Conseil de l'Union, le 22 juillet 2002. Trois caractéristiques importantes et positives se dégagent.
La première traduit une grande volonté de coopération entre les autorités budgétaires que sont le Conseil et le Parlement européen. Cette année, le Conseil est parvenu dès la première lecture, le 19 juillet, à un accord avec le Parlement européen qui permet de régler la question sensible des dépenses administratives, importante pour la préparation de l'élargissement.
La deuxième caractéristique est un bon équilibre entre le souci de rigueur et un financement satisfaisant des politiques européennes. Le projet de budget s'établit à 99,5 milliards d'euros en crédits d'engagement, soit une augmentation de 0,9% par rapport au budget 2002, et à 97 milliards d'euros en crédits de paiement, soit une hausse de 1,4% par rapport à 2002. Le total des crédits de paiement correspond à 1,01% du PNB communautaire. Ce projet de budget s'inscrit pleinement dans le cadre des perspectives financières arrêtées par le Conseil européen de Berlin en mars 1999, la marge sous plafond s'établissant à 2,8 milliards d'euros.
Dans une période marquée par la nécessité d'un retour à l'équilibre des budgets nationaux, le Conseil a accentué l'effort de maîtrise du budget communautaire en proposant une évolution des dépenses plus modérée que celle de l'avant-projet de budget présenté par la Commission. Le Conseil a en effet jugé excessive la hausse proposée pour plusieurs lignes de crédits, qui ne tenait notamment que très peu compte de la forte sous-consommation des crédits du budget communautaire constatée en 2000 (8,3 milliards d'euros) comme en 2001 (15,4 milliards d'euros). L'accord intervenu couvre les dépenses administratives des différentes institutions, et comme l'avaient demandé plusieurs parlementaires français, la préparation des institutions à l'élargissement doit, pour l'essentiel, être effectuée par redéploiement du personnel, et non par des embauches trop nombreuses.
Les crédits affectés aux dépenses agricoles, qui s'élèvent à 44,7 milliards d'euros, permettront de financer efficacement la PAC, qui figure toujours au premier rang des dépenses communautaires (environ 45% du budget communautaire). Le budget consacré à la solidarité extérieure de l'Union a été maintenu à 4,7 milliards d'euros. Près de 81 millions d'euros supplémentaires seront débloqués par l'Union européenne pour l'Afghanistan.
Enfin, le projet de budget s'inscrit dans un contexte de meilleure utilisation des ressources non exploitées et de mobilisation des ressources face à des situations d'urgence. La programmation des fonds structurels pour la période 2000-2006 a pris du retard et les enveloppes disponibles ont été jusqu'à présent faiblement consommées. Aussi, des efforts de gestion ont-ils été entrepris par les Etats, parmi lesquels la France - avec notamment une expérimentation menée en Alsace - afin de résorber cette sous-exécution. On constate donc un effort pour progresser vers un budget plus réaliste dans les deux sens : en réduisant la progression des enveloppes sous-consommées et en augmentant le taux d'utilisation de ces crédits.
La réaction européenne à l'occasion des inondations témoigne du même souci de mobilisation des financements inutilisés. Face aux événements tragiques qu'ont connus plusieurs pays d'Europe centrale, les fonds structurels et les crédits de pré-adhésion ont été réorientés très rapidement afin de reconstruire les zones sinistrées. La France pourrait, de même, faire jouer ces mécanismes de flexibilité après les inondations survenues dans le département du Gard.
L'ampleur des inondations a en outre suscité une réflexion sur la mise en place d'un fonds européen de solidarité, avec des ressources nouvelles, dont les modalités sont actuellement débattues.
Le montant du prélèvement communautaire s'élève à 15,8 milliards d'euros, en réduction de 6,3% par rapport à la loi de finances initiale 2002. Il est cependant en hausse de 8% par rapport à la prévision d'exécution du prélèvement sur recettes pour 2002. Ces évolutions divergentes tiennent aux incertitudes sur les soldes excédentaires.
La France reste structurellement contributeur net, à un niveau compris entre - 0,5 et - 2,5 milliards d'euros, soit moins de 0,2% du PIB national. Cette contribution nette devrait, avec l'élargissement, s'accroître légèrement puisque des pays au niveau de vie inférieur au nôtre vont nous rejoindre. Néanmoins, on ne peut mesurer les conséquences de l'élargissement à la seule aune budgétaire.
Notre pays est par ailleurs le deuxième bénéficiaire de la dépense communautaire.
Mme Noëlle Lenoir a ensuite abordé la préparation de l'élargissement en précisant les principes qui fondent les positions françaises.
Tout d'abord, les échéances doivent être respectées. Le 9 octobre, des rapports de progrès pour les 13 pays candidats (y compris la Turquie) devront identifier les pays prêts à adhérer, soit vraisemblablement les 10 pays les plus avancés dans leurs négociations d'adhésion. Puis, le Conseil européen de Bruxelles des 24 et 25 octobre devrait adopter une position commune de l'Union sur le paquet financier, ce qui constituera la base de la négociation finale avec les pays candidats. Enfin, la conclusion des négociations au Conseil européen de Copenhague en décembre devrait permettre la ratification des accords d'adhésion en 2003 et l'entrée des nouveaux membres en 2004.
Les deux chapitres relatifs au paquet financier de l'élargissement qui restent ouverts avec l'ensemble des pays candidats portent sur l'agriculture et les dispositions budgétaires et financières. Le Gouvernement soutient la proposition de la Commission, qu'il souhaiterait éventuellement voir ajustée à la baisse sur les fonds structurels et refuse tout lien entre le processus d'élargissement et la réforme de la PAC.
Un refus par les Irlandais de la ratification du Traité de Nice à l'issue du référendum du 19 octobre prochain perturberait ce calendrier. Il pourrait en être de même en ce qui concerne l'évolution des négociations à Chypre et de l'évolution de la situation en Turquie.
Le Gouvernement a insisté, avec succès, sur le contrôle du respect des engagements souscrits par les pays candidats (monitoring), notamment dans les domaines de la sécurité sanitaire, de la lutte contre l'immigration clandestine et la criminalité transfrontière. Ce contrôle sera poursuivi après l'adhésion.
La Ministre déléguée aux Affaires européennes a enfin évoqué la Convention sur l'avenir de l'Europe, désormais engagée dans la phase d'étude des propositions, avant d'entrer dans la phase finale d'élaboration de propositions. Le Président Valéry Giscard d'Estaing s'est engagé à présenter un « canevas » de traité constitutionnel avant le Conseil européen d'octobre, lequel sera progressivement complété à partir du résultat des groupes de travail.
Les principales positions défendues par le Gouvernement français sont les suivantes :
- un véritable traité constitutionnel intégrant la Charte des droits fondamentaux ;
- la personnalisation de l'Union européenne avec un Président et un Ministre des Affaires étrangères ;
- la construction plus poussée d'un espace de sécurité, de liberté et de justice avec la création de mécanismes pour empêcher que les frontières arrêtent les policiers et les juges mais pas les criminels et l'adoption d'une politique commune en matière d'immigration ;
- enfin, des progrès sur la gouvernance économique.
En conclusion, la Ministre déléguée aux Affaires européennes a regretté que les Français soient les plus réservés parmi les citoyens des Quinze à l'égard de l'élargissement. Une stratégie de communication, notamment ciblée sur les jeunes, est actuellement élaborée avec des initiatives régionales en association étroite avec les élus locaux et la participation de personnalités européennes, notamment des pays candidats. Une campagne ambitieuse d'information sur l'élargissement devrait ainsi être lancée par le Premier ministre dans les prochaines semaines.
Rappelant que la France occupait la deuxième position en volume avec 17 % du prélèvement communautaire, M. Roland Blum a tout d'abord souhaité savoir comment évoluait la contribution des autres Etats membres depuis la réforme des ressources propres intervenue en 2002. Il a également demandé quelles étaient les causes de la sous-exécution des programmes financés par les fonds structurels.
La Ministre déléguée aux Affaires européennes a souligné le caractère irritant du « chèque britannique ». En 1984, les quatorze Etats membres ont accepté de prendre en charge deux tiers de la contribution nette du Royaume-Uni, ce qui a représenté pour la France 1,7 milliard d'euros en 2002. En outre, l'Allemagne, la Suède et les Pays-Bas ont obtenu une ristourne entraînant mécaniquement une augmentation de la participation française à cette contribution. La France demande que cette situation soit prise en considération lors des futures négociations sur la PAC, qui ne devraient pas intervenir avant 2007. Une solution est souhaitable, le Royaume-Uni n'étant pas parmi les plus déshérités des Etats membres.
A cet égard, le Président Edouard Balladur a posé la question de savoir si la décision de 1984 concernant le « chèque britannique » avait une valeur perpétuelle.
La Ministre déléguée aux Affaires européennes a précisé que l'existence du « chèque britannique » résultait d'une décision de principe du Conseil européen de Fontainebleau en 1984 qui constituait un acquis pour les Britanniques, et ne pouvait être renégocié que dans le cadre d'un accord global.
M. Hervé de Charette a approuvé la décision du Gouvernement de lancer prochainement une campagne d'explication de l'élargissement et estimé que, même si l'élargissement était acquis, il ne fallait pas se limiter au point de vue national. Ainsi la Commission des Affaires étrangères devrait s'intéresser à la perception que les autres pays ont de cet élargissement.
En matière budgétaire, l'élargissement entraînera de nouveaux besoins et de nouvelles demandes de la part de l'administration européenne. Cependant les nouveaux membres contribueront au budget communautaire et la facture à payer pourra être divisée entre vingt-cinq pays. A ce sujet, il a souhaité obtenir des informations sur la planification budgétaire établie pour les années à venir à partir de l'élargissement.
Enfin, si 10 % de l'argent prélevé au sein de l'Union européenne n'est pas utilisé et si 45 % du budget est consacré à la PAC, se pose la question de savoir si cet argent est bien utilisé.
M. René André a tout d'abord souhaité faire quelques observations concernant les fonds structurels. D'une part, les conditions sous-tendues par les projets financés par ces fonds ne sont pas toujours en parfaite adéquation avec les besoins des régions. D'autre part, jusqu'à il y a peu, la mise en place des financements était compliquée au niveau national.
S'agissant du budget de l'Union, il a souligné que le passage de quinze à vingt-cinq membres entraînerait des dépenses d'interprétariat importantes, ce qui soulève la question de l'utilisation des langues.
Il a également demandé un point de situation sur le référendum irlandais portant sur la ratification du Traité de Nice.
De même, il a souhaité obtenir l'avis de Mme Noëlle Lenoir sur la création d'un procureur européen, dont la compétence serait limitée aux fraudes intracommunautaires et aux contrôles en matière commerciale, de contrefaçon et de protection des marques.
La Ministre déléguée aux Affaires européennes a indiqué que les fonds structurels et de cohésion, deuxième poste du budget communautaire, représentant pour la France 16 milliards d'euros sur la période 2000-2006, étaient devenus difficiles à consommer en raison du changement de leur mode d'attribution, avec la mise en _uvre d'un nouveau document unique de programmation (le docup), difficile à comprendre et à utiliser. Les élus locaux qui veulent présenter des programmes de développement éligibles à ces fonds connaissent des difficultés liées à cette période de transition.
En France, la situation est complexe du fait de la multiplication des administrations compétentes pour l'attribution des fonds : DATAR au niveau national, Secrétariat général pour les Affaires régionales (SGAR) au niveau régional. La procédure d'instruction des demandes et d'attribution des fonds est actuellement centralisée mais il est possible qu'elle soit décentralisée à nouveau ; une décision doit être prise par le Gouvernement, notamment au vu des résultats de l'expérience en cours en Alsace.
Mme Noëlle Lenoir a reconnu que les Français craignaient l'élargissement qui, pourtant, devrait être apprécié dans sa globalité. Certes, sur le plan quantitatif, la France contribuera davantage ; sur les 15,8 milliards d'euros actuellement prévus pour financer la préparation de l'élargissement, la France versera 2,5 milliards d'euros dès l'an prochain.
Du point de vue économique, l'élargissement permettra un accroissement des échanges commerciaux déjà multipliés par sept ou huit depuis 1992. Les investissements français dans les dix pays candidats ont déjà considérablement augmenté. La France est devenue l'un des premiers investisseurs dans ces pays. De nombreuses entreprises françaises s'y sont implantées et y connaissent une forte progression de leur chiffre d'affaires. De leur côté, les dix pays candidats, après avoir connu pendant plusieurs années une chute de leur PNB, ont retrouvé leur niveau de production de 1989 et connaissent une croissance moyenne de 4% environ. Le libre échange est à présent effectif pour les produits industriels, ce qui est largement profitable à notre balance commerciale, et il en sera de même à terme pour les produits agricoles.
L'importance politique de l'élargissement n'est plus à démontrer. On peut ajouter que si l'Allemagne consacre 75 milliards d'euros par an depuis dix ans pour financer la réunification, l'Union ne devrait consacrer que 15 milliards à l'élargissement actuel, beaucoup mieux préparé.
La Ministre déléguée aux Affaires européennes a expliqué qu'il existait une planification budgétaire à moyen terme et une évaluation année par année. L'augmentation des effectifs de la Commission est liée à la diversification des missions de l'Union européenne et à leur extension géographique. Le Parlement européen a souhaité limiter l'augmentation des effectifs de la Commission et des redéploiements interviendront pour couvrir les nouvelles missions.
Un résultat positif au référendum irlandais du 19 octobre n'est pas acquis. L'Irlande a bénéficié d'un volume de crédits européens très important, mais redoute l'élargissement et craint, en tant que petit pays, les réformes institutionnelles qu'il implique. Si le résultat du référendum du 19 octobre était négatif, l'élargissement serait très difficile à mettre en _uvre, puisque le Traité de Nice, qui établit les systèmes de pondération de vote et de majorité qualifiée dans une Union élargie, visait justement à le préparer.
Il existe aujourd'hui onze langues officielles au sein de l'Union européenne et l'élargissement va compliquer la situation en augmentant les frais d'interprétariat. Certes, depuis l'adhésion de la Grande-Bretagne, le français n'est plus utilisé comme langue de rédaction initiale des documents communautaires que dans 30 % des cas contre 80 % auparavant, mais il demeure l'une des principales langues de travail de l'Union et il est globalement bénéficiaire du système en place. La France soutient par ailleurs avec l'Allemagne un projet de développement du multilinguisme, en exigeant notamment des fonctionnaires européens qu'ils parlent trois langues étrangères en plus de leur langue naturelle, ce qui devrait permettre le choix de la langue française.
S'agissant de la politique pénale européenne, un mandat d'arrêt européen va être prochainement mis en place par transposition d'une directive. L'institution d'un procureur européen procède de la même logique : il s'appuierait sur Eurojust, qui permet la coordination des parquets des pays membres, et devrait pouvoir diligenter des enquêtes transfrontières pour certaines infractions - crime organisé, blanchiment, terrorisme ou traite des êtres humains. Le Gouvernement souhaite ainsi améliorer l'efficacité de la lutte contre certains crimes en étendant les attributions du procureur européen au-delà du seul traitement des affaires de fraude au budget communautaire.
M. Jacques Myard a considéré que la diversité du budget européen confinait à la dispersion des moyens dans la mesure où l'on distinguait deux grandes masses, la PAC et les fonds structurels, et pour le reste un saupoudrage. Sans contester la nécessité de venir en aide aux régions sinistrées par une catastrophe naturelle, il a estimé que les fonds structurels, et plus particulièrement le fond envisagé pour financer les catastrophes naturelles, n'avaient aucune véritable justification et que les protocoles financiers seraient plus efficaces.
Concernant la création d'un procureur européen, il a fait valoir que cela aurait pour conséquence de changer l'ordonnancement juridique de la construction européenne au regard de l'article 5 du Traité de Rome, selon lequel il revient aux Etats d'appliquer les règles normatives de l'Union européenne, et que la création d'un procureur européen constituerait l'amorce d'un pouvoir fédéral. Ce procureur devrait mettre en _uvre une politique judiciaire, ce qui pose la question de l'autorité qui définirait cette politique, alors que l'on sait tout le problème que cela pose en France.
M. François Guillaume a insisté sur le problème de la sous-consommation des crédits qui a atteint 15 milliards d'euros en 2001 par rapport à un budget d'environ 100 milliards, et a jugé qu'il ne fallait pas se réjouir de cette manne restituée aux Etats, dans la mesure où ces économies se font sur les fonds structurels et l'enveloppe agricole, en particulier le FEOGA-Garantie.
Il s'est par ailleurs inquiété du transfert progressif, soit des moyens, soit des actions du FEOGA-Garantie vers le FEOGA-Orientation, se demandant s'il n'était pas le résultat d'une man_uvre de certains Etats membres pour apparenter le FEOGA-Orientation à un fonds structurel. En effet, certains Etats souhaiteraient que certaines dépenses agricoles soient portées dans la catégorie des dépenses non obligatoires.
Enfin, il a souligné qu'il n'était pas dans l'intérêt de l'Union européenne de suivre certains Etats membres, où l'agriculture ne tient pas une place importante, qui recommandent de passer d'une agriculture productive à une agriculture plus environnementale. L'agriculture européenne est totalement intégrée depuis longtemps et le chapitre agricole doit s'adresser à toutes les agricultures de l'Union sans faire le bilan de qui reçoit et qui paie.
Mme Noëlle Lenoir a indiqué que le fonds de solidarité communautaire devait être abondé à hauteur de 500 millions d'euros pour la présente année et à hauteur d'un milliard pour les exercices suivants. Si ce fonds devait être pérennisé, le Gouvernement français a fait valoir au Conseil Affaires générales que les sommes versées ne devaient pas être gelées inutilement et que leur versement devait être conditionné par la mise en _uvre d'actions préventives et de systèmes d'assurance par les pays concernés.
Abordant la question des fonds structurels, elle a estimé qu'ils assuraient la cohésion économique et sociale entre les pays de l'Union et qu'ils constituaient un gage d'intégration pour les nouveaux Etats membres.
Revenant sur la question du procureur européen, elle a considéré qu'il ne s'agissait pas de créer une institution fédérale, mais de tirer les conséquences du principe de la libre circulation au sein de l'espace Schengen, alors même que les enquêteurs des différents pays continuent à agir dans un cadre territorial limité.
Concernant la politique agricole commune, la France a soutenu l'idée selon laquelle l'agriculture était une activité économique compétitive constituant un atout à l'exportation pour l'Europe. Conformément aux engagements pris au Conseil européen de Berlin en 1999, aucun changement des principes de la politique agricole commune ne doit avoir lieu avant la fin de l'année 2006, même si des discussions peuvent s'engager avant. A cet égard, si la protection de l'environnement constitue un objectif nouveau dont il faut tenir compte, elle ne saurait justifier une remise en cause de l'importance de la politique agricole commune au sein de l'Union européenne.
Préférant parler d'unification ou de réunification de l'Europe plutôt que d'élargissement, M. François Loncle a rappelé que l'état de l'opinion publique française était connu dans les dix pays candidats à l'élargissement, contribuant ainsi à donner une mauvaise image de notre pays. Une campagne en la matière s'avère donc nécessaire et le Parlement devrait mener ce type de projet ou du moins y être associé. Les Français souhaitent en effet savoir où sont les limites géographiques et politiques de l'Union et si les pays candidats à l'adhésion seront associés ou intégrés. Concernant l'adhésion de Chypre par exemple, on ignore toujours quelle sera l'implication de la Turquie.
M. Jean Glavany a relevé que l'élargissement était bien réglé dans le principe mais pas dans ses modalités, la reprise de l'acquis communautaire étant très variable d'un pays candidat à l'autre. La question se pose donc de savoir si le moment venu, l'Union acceptera que rentrent simultanément des pays qui sont prêts et des pays qui ne le sont pas. Ainsi, pourra-t-on résister aux pressions qui s'exerceront pour l'adhésion de la Pologne ?
S'agissant de la réforme de la PAC, il s'est dit perplexe, voire réservé, devant l'attitude de blocage du Président de la République devant toute discussion avant 2007, qui n'est que la date butoir du cadre budgétaire et financier, ce qui n'empêche nullement la Commission européenne de faire évoluer la PAC politiquement au sein de ce cadre. En adoptant une attitude de blocage sur l'agriculture, la France se met en difficulté sur tout le reste vis-à-vis de ses partenaires, et notamment de l'Allemagne dont ont peut dire que la revendication à être traitée de façon équitable est loin d'être irrecevable. Vis-à-vis des pays de l'Europe de l'Est, il faut leur expliquer comment les aides vont évoluer, tout comme vis-à-vis de l'OMC d'ailleurs.
Mme Noëlle Lenoir a indiqué que les Français étaient souvent considérés dans les pays candidats comme plutôt hostiles à l'élargissement. Il est certain qu'il sera indispensable de mener une campagne d'information ambitieuse, en mobilisant les élus locaux, en organisant des événements avec des personnalités de tous les domaines (culturel, sportif...). Il faudra aller au-delà d'une campagne uniquement institutionnelle. La Ministre déléguée aux Affaires européennes a précisé qu'elle avait rencontré récemment sur ce sujet les différentes associations d'élus locaux.
Sur Chypre, l'espoir demeure de trouver une solution politique avant la fin de l'année. Il faut d'ailleurs noter que tous les autres pays candidats qui avaient des contentieux historiques anciens (la République Tchèque avec l'Allemagne, la Slovénie avec l'Autriche) les ont réglés. De plus, la question de Chypre pose celle de la Turquie, qui a pris un relief particulier suite aux attentats du 11 septembre. En effet, l'adhésion de la Turquie est alors devenue un enjeu stratégique qui intéresse au-delà des frontières de l'Europe. En votant en août dernier une loi qui abolit la peine de mort, reconnaît la liberté d'expression et les droits des minorités, la Turquie a montré sa bonne volonté. La difficulté tient dans le fait que les Turcs souhaiteraient que les Quinze leur donnent à Copenhague une date pour l'ouverture des négociations. En tout état de cause, il faut attendre le rapport de progrès de la Commission, le 9 octobre, et les résultats des élections qui auront lieu le 3 novembre prochain.
Mme Noëlle Lenoir a estimé qu'en principe les dix candidatures envisagées seront acceptées, même si certains ont plus de mal que d'autres à mettre en _uvre l'ensemble de l'acquis communautaire. Ainsi, la Pologne, qui avait pris un très bon départ, connaît quelques difficultés. Mais il semble peu envisageable de ne pas accepter l'adhésion de la Pologne et de ses 40 millions d'habitants. Aussi faudra t-il accompagner les pays qui connaissent des difficultés : dans le domaine de la sécurité alimentaire par exemple, la France a demandé à ce qu'un système de suivi très poussé soit mis en _uvre afin de surveiller les abattoirs polonais, qui ne sont pas encore tous aux normes européennes. De toute façon, cela serait une erreur de croire que l'adhésion constituera une rupture, il s'agit au contraire d'une évolution qui se fait progressivement depuis plusieurs années déjà.
En ce qui concerne la politique agricole commune, il n'y a pas de blocage de la part de la France contre des discussions. Il nous semble cependant prématuré d'engager des négociations globales sur ce sujet. Tout d'abord, une éventuelle réforme devrait prendre en compte la question du « chèque britannique ». Ensuite, il est inopportun de mélanger les débats : une éventuelle discussion sur la réforme de la PAC pourrait ainsi avoir des conséquences catastrophiques sur l'opinion française vis-à-vis de l'élargissement, sur le modèle du télescopage en 1992 de la réforme de la PAC et du référendum sur le Traité de Maastricht. Enfin, cette réforme semble moins urgente alors que les Etats-Unis ont encore augmenté leurs aides directes agricoles, qui dépassent dorénavant de 30 à 60 % par exploitation celles accordées aux agriculteurs européens.
M. Jean-Paul Bacquet a demandé si la sous-consommation des fonds structurels était une spécificité française et cité l'exemple de sa région, l'Auvergne, où les élus locaux sont confrontés au summum de la technocratie européenne lorsqu'il tentent de monter des projets cohérents et intéressant l'Europe, où les aides du SGAR ne sont pas à la hauteur et où les fonds européens arrivent souvent alors que les autres aides cumulées (départementales et régionales) sont caduques.
Par ailleurs, il a souhaité savoir si les négociations sur Kaliningrad aboutiraient avant l'élargissement.
M. André Schneider a demandé si, dans la première partie du projet de loi de finances pour 2003, relative au prélèvement communautaire, une ligne était consacrée au soutien du rôle européen de Strasbourg. Il a fait observer que la première tranche du projet de TGV ne desservait même pas Strasbourg, s'arrêtant à Baudricourt, ce qui continue à défavoriser la liaison avec cette capitale régionale.
M. Paul Quilès a fait savoir qu'en tant qu'élu local il attendait depuis un an et demi le versement d'un financement dans le cadre des fonds structurels, et ce malgré le soutien des autorités tant au niveau national qu'européen. En attendant, les banques s'enrichissent à hauteur de 50 000 euros par mois au détriment de sa collectivité locale. Ces retards de paiement sont scandaleux et destructeurs du travail des élus.
Mme Noëlle Lenoir a considéré qu'il s'agissait là d'un cas exemplaire, illustratif d'une situation apte à décourager les esprits les plus européens. Pourtant, dans certains pays comme l'Espagne, les procédures semblent plus efficaces et les fonds davantage consommés.
La Ministre déléguée aux Affaires européennes s'est dite scandalisée de la nouvelle campagne actuellement menée contre Strasbourg comme siège du Parlement européen, puis probablement ensuite de la Cour européenne des droits de l'Homme que Luxembourg souhaiterait accueillir. Afin d'affirmer la vocation européenne de Strasbourg, Mme Noëlle Lenoir a rencontré les élus de la ville et déclaré qu'il fallait se donner les moyens de ses ambitions, notamment en liaison avec le secrétaire d'Etat aux transports, M. Dominique Bussereau. En effet, il faut reconnaître que le TGV-Est et l'amélioration de la desserte entre Strasbourg et Bruxelles ne sont pas des investissements économiquement rentables, mais qu'ils relèvent d'un choix politique. Mme Noëlle Lenoir a donc souhaité pouvoir compter sur le soutien constant de la Commission des Affaires étrangères dans la défense de cette cause.
Le problème de la sous-consommation des fonds structurels est un mal européen puisqu'ils constituent les deux tiers des dépenses non consommées. Mais, il est vrai que la situation est particulièrement mauvaise en France, problème qu'il faut lier à la problématique plus générale de la réforme de l'Etat.
Le Président de la République a insisté sur la nécessité de trouver un accord qui satisfasse la Russie sur la question de Kaliningrad, ce pays étant un partenaire très important de l'Union européenne. Un accord entre les Quinze a été obtenu au Conseil Affaires générales du 30 septembre qui essaye de concilier les différents impératifs : les habitants de Kaliningrad pourraient disposer d'un document de transit simplifié - une sorte de « pass » - au lieu d'un visa, afin de se rendre dans le reste de la Russie. De plus, une liaison ferroviaire à grande vitesse à travers la Lituanie pourrait être mise à l'étude.
Le Président Edouard Balladur a indiqué qu'ayant eu des conversations au sujet de Kaliningrad lors de la mission qu'il a conduite en Russie, il lui a semblé que les difficultés s'aplanissaient progressivement, et qu'il restait à résoudre le problème de la circulation du train reliant Kaliningrad à la Russie à une vitesse suffisante pour dissuader les tentatives de franchissement illégal de la frontière.
Il a estimé qu'une partie du problème concernant le siège du Parlement européen tenait au fait que beaucoup de réunions avaient lieu à Bruxelles, ce qui suppose de transporter des fonctionnaires, des interprètes et d'innombrables documents. Une solution consisterait à demander que toutes les réunions aient lieu à Strasbourg. Il a rappelé qu'en 1994, au moment de choisir le siège de la Banque centrale européenne, un accord implicite avait été conclu avec l'Allemagne qui acceptait que le Parlement siège à Strasbourg si la France acceptait Francfort pour la BCE.
Il a considéré que l'élargissement était inéluctable et ne pouvait se faire sans la Pologne. Il convient d'être réaliste : si l'on veut appliquer les mêmes règles et faire bénéficier des mêmes aides tous les pays, anciens ou nouveaux membres, il faudra augmenter les contributions des Etats, ce à quoi la situation budgétaire ne se prête guère. Si l'on ne le souhaite pas, alors la réforme des principales politiques communautaire s'imposera.
En conclusion, il a estimé qu'au moment où le calendrier se bouscule - l'élargissement est concomitant de la réforme des institutions, et celle-ci s'effectuera dans une Union élargie -, il convient de faire preuve du plus grand réalisme dans une situation extrêmement difficile.
Au cours de sa réunion du mercredi 9 octobre, la Commission a examiné pour avis les crédits des Affaires européennes pour 2003.
M. Roland Blum a indiqué que le Conseil de l'Union européenne avait adopté, en première lecture, le 19 juillet 2002, le projet de budget communautaire pour 2003 établi à 99,5 milliards d'euros en crédits d'engagement et 97 milliards d'euros en crédits de paiement. Ces montants représentent une augmentation de 0,9 % pour les premiers et 1,4 % pour les seconds par rapport au budget initial pour 2002.
Le Rapporteur a souligné que les années 2003 et 2004 seront riches d'événements marquants pour la construction européenne et que l'adaptation du budget aux nouvelles étapes de celle-ci apparaît de plus en plus difficile, même si l'exercice semble avoir été accompli sans tensions excessives, à ce jour, pour le projet de budget 2003.
En effet, l'établissement du projet de budget pour 2003 a fait l'objet d'un relatif consensus entre les institutions européennes ; cependant le Parlement européen et le Conseil n'ont pas suivi la Commission européenne dans sa demande d'accroissement des effectifs pour faire face aux missions nouvelles suscitées par l'élargissement. Il est vrai que plus de 700 recrutements avaient été inscrits, pour la Commission, au budget les années précédentes.
Le Conseil a tenu compte du taux d'exécution des crédits dans les diverses rubriques du budget et a décidé d'augmenter les marges sous les plafonds de dépenses pour faire face à d'éventuelles dépenses imprévues.
La contribution française au budget s'établit à 15,8 milliards d'euros. Ce prélèvement est en hausse de 8,2 % par rapport au prélèvement qui devrait être effectivement réalisé pour 2002.
Le Rapporteur a ensuite présenté brièvement l'évolution des crédits consacrés aux différentes politiques de l'Union.
Il a notamment indiqué que si la Commission avait évalué les besoins de la PAC à 45,118 milliards d'euros, le Conseil avait toutefois décidé d'opérer une réduction de 288 millions d'euros sur les dépenses de marché, en attendant de disposer des prévisions finalisées de la Commission. Les dépenses agricoles progresseront de 1,3 % en 2003. Une marge importante a été prévue sous le plafond de dépenses (2,54 milliards d'euros), afin de répondre à une éventuelle crise agricole en 2003.
Le Rapporteur a mentionné le projet de création d'un Fonds de solidarité européen, appelé à intervenir en faveur des pays membres ou candidats victimes de graves catastrophes naturelles comme les inondations de l'été 2002.
En ce qui concerne les dépenses administratives, le Conseil a retenu une approche rigoureuse en insistant sur la nécessité pour les institutions de maintenir la progression de leurs dépenses administratives dans la limite du taux d'adaptation des plafonds de la rubrique 5, soit + 3,5 %. Aussi les créations de postes dans les institutions communautaires ont-elles été limitées, l'adaptation aux nouvelles missions liées à l'élargissement devant se faire par redéploiements.
Le Rapporteur a ensuite rappelé que la France apportait une contribution nette au budget communautaire, son solde s'établissant pour l'année 2000 à - 1,4 milliard d'euros, ce qui place notre pays au quatrième rang des contributeurs nets, derrière l'Allemagne, le Royaume-Uni et les Pays-Bas.
Il a souligné que la France restait cependant le deuxième bénéficiaire de la dépense communautaire, derrière l'Espagne. Notre pays est toujours le premier bénéficiaire des dépenses agricoles, et les aides qu'il perçoit au titre des fonds structurels sont également à l'origine de cette situation très favorable.
Le Rapporteur a ensuite présenté les éléments d'actualité caractérisant les actions extérieures de l'Union. Cette année, la progression des crédits consacrés à l'action extérieure sera limitée à 1,8% en crédits d'engagement et 0,3% en crédits de paiement. Cette progression légère devrait néanmoins permettre de faire face à la poursuite du programme de reconstruction en Afghanistan.
Le Conseil a par ailleurs décidé la progression des crédits destinés à la PESC, qui passent de 30 à 47,5 millions d'euros. Il s'agit notamment de prévoir le financement de la force de police en Bosnie (20 millions d'euros), pour laquelle l'Union européenne assurera la relève à partir du 1er janvier 2003.
Le niveau d'exécution global des actions extérieures a connu un léger recul en 2001 par rapport à 2000, le taux d'exécution des actions, qui était de 91,4 % en 2000, passant à 86,2 en 2001. Le montant des « restes à liquider » a donc progressé l'année dernière, alors que la Commission a déjà procédé à l'annulation de 600 millions d'euros d'engagements dormants.
Cependant, la situation diffère selon les zones géographiques : les programmes engagés dans les Balkans, (programme CARDS), en Asie (programme ALA) et en Méditerranée (programme MEDA) ont connu une exécution en progression. Par contre, les décaissements ont diminué vers l'Amérique latine et vers les Républiques issues de l'URSS (programme TACIS).
Le Rapporteur a expliqué les modalités de l'aide européenne dans les Balkans, à destination de l'Autorité palestinienne et, enfin, pour la reconstruction de l'Afghanistan. Pour ce dernier pays, il a souligné que la Commission s'était fixé pour objectif de mobiliser un milliard d'euros sur cinq ans.
Le volume des crédits à inscrire pour le financement des dépenses opérationnelles de la PESC fait l'objet d'un débat entre le Conseil et le Parlement européen. Malgré la stabilité de l'exécution de ces crédits, autour de 30 millions d'euros, le Conseil souhaite, pour anticiper le développement des capacités opérationnelles du deuxième pilier, augmenter les dotations pour porter le total à 47,5 millions d'euros pour 2003.
Enfin, le Rapporteur a expliqué que le processus de l'élargissement de l'Union engagé il y a près d'une décennie entrait dans sa phase la plus délicate, celle du calcul des contributions des futurs membres au budget de l'Union européenne et de l'enveloppe financière qui leur sera allouée.
La Commission européenne a présenté aux Etats membres les sommes que chaque pays candidat devrait recevoir de l'Union européenne en 2003, année qui précédera les premières adhésions, et au cours des trois premières années d'adhésion (2004, 2005, 2006). La question sensible est de savoir comment éviter que les contributions des nouveaux membres conjuguées à la fin des aides de pré-adhésion ne détériorent leur situation financière. Cinq pays seront perdants en termes nets : Chypre, la République tchèque, la Hongrie, la Slovénie et Malte.
Le Rapporteur a donné l'exemple de la République tchèque, qui serait la plus touchée par ce mécanisme défavorable : après avoir reçu 158 millions d'euros en 2003, son « manque à gagner » serait de 342 millions d'euros en 2004 et de 109 millions d'euros en 2005. Cette situation s'explique par le fait que les versements qui seront attendus des pays candidats concernés seront supérieurs au financement dont ils bénéficieront. Les nouveaux Etats devraient donc devenir immédiatement contributeurs nets au budget communautaire, ce qui est mal compris par leur opinion.
Aussi a t-il été envisagé que l'Union apporte une compensation budgétaire aux nouveaux membres afin de corriger ce déséquilibre. Les Quinze travaillent actuellement à élaborer un arrangement transitoire, qui devrait être prêt avant le Conseil européen de Bruxelles (24-25 octobre), lequel doit adopter l'ensemble des dispositions financières de l'élargissement.
S'agissant des sommes affectées au remboursement des dommages causés par les catastrophes naturelles, M. Gilbert Gantier a demandé des précisions sur le mode de répartition adopté.
Par ailleurs, il a souhaité savoir comment étaient calculées les contributions assignées et les recettes versées aux pays candidats, dans la mesure où certains d'entre eux affichent une situation nette négative.
M. Jean-Claude Lefort a jugé paradoxal le fait que le prélèvement obligatoire demandé à la France soit supérieur en montant à la progression du budget français au moment où notre pays est mis à l'index par la Commission européenne du fait de la progression de son budget.
Concernant l'élargissement, il a estimé que le moment était venu de permettre à l'Assemblée nationale de s'exprimer sur cette question. Par ailleurs, il a rappelé que l'Union européenne était un espace de solidarité. Après des années d'attente qui désespèrent l'opinion publique et d'innombrables formalités à accomplir, les pays candidats sont en droit de trouver le même système de solidarité qui a joué pour l'adhésion de l'Espagne ou du Portugal en leur temps. Même s'il faut augmenter les contributions des Etats membres, il faut avoir le courage de cette solidarité et celui de dire aux futurs adhérents qu'ils ne seront pas contributeurs nets dès leur entrée dans l'Union.
Le Président Edouard Balladur a fait observer que le taux de progression des dépenses et le déficit étaient deux notions différentes, tout en reconnaissant que cette distinction constituait une forme d'échappatoire.
Le Rapporteur a répondu aux intervenants.
Le Fonds de solidarité serait réservé aux catastrophes naturelles majeures. Les Etats membres, ainsi que les pays candidats avec lesquels des négociations d'adhésion sont en cours, pourraient avoir recours à ce Fonds de solidarité.
En l'état actuel des discussions, serait considérée comme majeure toute catastrophe qui occasionne des dégâts estimés à plus de trois milliards d'euros ou représentant plus de 0,6 % du PIB de l'Etat qui en est victime. La Commission a prévu une dotation de 500 millions d'euros pour cette année, puis, par la suite, le montant annuel maximum qui pourrait être mobilisé s'élèverait à un milliard d'euros. Un quart du total annuel devrait rester disponible jusqu'au 1er octobre de chaque année. A titre d'exemple, il semble que les régions touchées par les inondations du Gard ne seraient pas éligibles, mais que les sinistres dus aux tempêtes de 1998 l'auraient été. Mais la définition du seuil d'utilisation des fonds, qui touche à la définition de la notion de solidarité européenne, n'est pas encore arrêtée.
Les nouveaux Etats membres devront apporter dès 2004 leur contribution au budget communautaire comme les Quinze, c'est-à-dire le versement, comme tout Etat membre, d'une combinaison de ressources propres, de TVA, de prélèvement sur le PNB et aussi une contribution au remboursement que l'Union européenne verse chaque année au Royaume-Uni depuis 1984, si le mécanisme des ressources propres restait inchangé. Ces obligations dépasseront pour certains pays les avantages financiers qu'ils tireront de l'aide à l'agriculture, des fonds structurels et autres financements.
D'où l'idée de compensation. Pour calculer celle-ci, la méthode la plus simple, évitant de remettre en cause les « acquis » financiers d'autres Etats, serait un versement budgétaire égal à la différence entre le solde net de ces pays pour la première année d'adhésion et le solde net dont ils bénéficient actuellement.
Cette question, à laquelle on peut ajouter celle du versement des aides directes agricoles, très attendues par les futurs Etats membres, laisse augurer des tensions auxquelles devra faire face le budget 2004.
Le Rapporteur a indiqué qu'il souscrivait entièrement à l'observation de M. Jean-Claude Lefort. La contribution française au budget communautaire devrait s'établir à 15,8 milliards d'euros pour le budget 2003. Sur le long terme, cette contribution est en progression. Toutefois, le montant inscrit dans le projet de loi de finances 2003 est en diminution de 6,3 % par rapport à l'estimation proposée dans le PLF 2002 (16,9 milliards d'euros), mais en forte hausse par rapport à la prévision d'exécution du prélèvement sur recettes pour 2002 (14,6 milliards d'euros, soit une hausse de 8 %). La contribution française augmentera légitimement avec l'élargissement ; et cela doit être expliqué aux citoyens. De même on ne peut dire aux citoyens des nouveaux Etats membres qu'ils seront contributeurs nets et connaîtront une dégradation de leur situation financière.
Le budget communautaire suit une progression modérée. Le plafond des ressources propres ne dépasse pas en 2003 1,27 % du PNB communautaire, comme fixé en 1999. Mais notre contribution progresse régulièrement également du fait de l'instauration, en 2002, d'un nouveau système de ressources propres qui conduit à une augmentation sensible de la contribution française. La ristourne accordée à l'Allemagne, l'Autriche, les Pays-Bas et la Suède sur le paiement de la contribution britannique a aussi pour effet de la faire largement supporter par la France, ainsi que par l'Italie d'ailleurs.
Suivant les conclusions du Rapporteur, la Commission a émis un avis favorable à l'adoption de l'article 33 du projet de loi de finances pour 2003.
N° 0259 - 01 - Avis de M. Roland Blum sur le projet de loi de finances pour 2003 - affaires étrangères - affaires européennes
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Les perspectives financières font l'objet d'ajustements techniques annuels (l'actualisation correspond à + 2% pour la PAC et les fonds structurels, et à l'inflation communautaire pour les autres rubriques) et peuvent être révisées, si besoin est, avec l'accord du Conseil et du Parlement pour faire face à des situations non prévues lors de la fixation des plafonds (à la majorité qualifiée si la révision est inférieure à 0,03% du PNB communautaire ; à l'unanimité au-delà)
A cette occasion, le Conseil a également entériné un virement de 30 Millions d'euros au bénéfice de l'Afrique australe confrontée à de graves risques de famine, et de 10 Millions d'euros au bénéfice des ONG intervenant auprès de la population civile dans les villes palestiniennes.