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le 29 octobre 2002
N° 256 - 2ème partie
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DOUZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 10 octobre 2002
RAPPORT
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN SUR
LE PROJET DE loi de finances pour 2003 (n° 230),
PAR M. GILLES CARREZ,
Rapporteur Général,
Député.
--
ANNEXE N° 33
JUSTICE
Rapporteur spécial : M. Pierre ALBERTINI
Député
____
Lois de finances.
CHAPITRE PREMIER : L'EXÉCUTION DES BUDGETS 2001 ET 2002
CHAPITRE II : L'ADMINISTRATION GÉNÉRALE ET L'INFORMATIQUE
CHAPITRE III : LES SERVICES JUDICIAIRES
I.- DES DÉLAIS DE JUGEMENT EXCESSIFS
III.- LES MOYENS DE FONCTIONNEMENT
IV.- L'ÉQUIPEMENT JUDICIAIRE 4
A.- LA CONSTRUCTION D'UN PALAIS DE JUSTICE : UN PROCESSUS LONG ET COMPLEXE 5
B.- LES EXERCICES 2001 ET 2002 6
C.- LES OPÉRATIONS DÉCONCENTRÉES 8
D.- LES OPÉRATIONS LOURDES GÉRÉES PAR L'AGENCE DE MAÎTRISE D'OUVRAGE 11
E.- LE PALAIS DE JUSTICE DE PARIS 12
CHAPITRE IV : LES SERVICES PÉNITENTIAIRES 14
I.- LA PRISE EN CHARGE DE LA POPULATION PÉNALE 14
A.- UN REBOND DE L'INFLATION CARCÉRALE TRÈS INQUIÉTANT 14
1.- Les facteurs d'évolution de la population carcérale 14
2.- Les problèmes nés de la surpopulation carcérale 15
3.- Les mineurs en détention 16
B.- LE « MILIEU OUVERT » 17
1.- Évolution des personnes et des mesures en milieu ouvert 17
a) La semi-liberté 18
b) La libération conditionnelle 18
c) Le placement sous surveillance électronique 18
2.- Les structures 19
a) Les services pénitentiaires d'insertion et de probation (SPIP) 19
b) Les centres pour peines aménagées 20
C.- LE TRAVAIL DES DÉTENUS : COMPTE N°904-11 « RÉGIE INDUSTRIELLE DES ÉTABLISSEMENTS PÉNITENTIAIRES » 21
II.- LES PERSONNELS PÉNITENTIAIRES 21
A.- UNE AUGMENTATION DES MOYENS 22
1.- La progression des effectifs 22
2.- L'amélioration des situations statutaires et indemnitaires 23
a) La filière des personnels de direction 23
b) La filière des personnels de surveillance 23
c) La filière des personnels d'insertion et de probation 24
d) La filière des personnels administratifs 25
3.- Présentation des demandes budgétaires pour 2003 25
B.- DE PROBABLES DIFFCULTÉS DE RECRUTEMENT 26
1.- Perspectives démographiques et impact de la bonification du cinquième 26
2.- L'École nationale d'administration pénitentiaire (ENAP) 26
III.- LA POLITIQUE D'ÉQUIPEMENT 28
A.- LES PROGRAMMES DE CONSTRUCTION EN COURS 28
1.- Le programme de construction de 4.000 places 28
Source : Direction de l'administration pénitentiaire 29
2.- Le programme de construction de 1.800 places 29
3.- La rénovation des cinq grands établissements 29
B.- LE NOUVEAU PROGRAMME 11.000 PLACES INSCRITS DANS LA LOPJU 29
C.- LES CRÉDITS D'ÉQUIPEMENT 30
PAGE BLANCHE 32
CHAPITRE V : LA PROTECTION JUDICIAIRE DE LA JEUNESSE 33
I.- LES JEUNES PRIS EN CHARGE 33
II.- LES MOYENS DE FONCTIONNEMENT 35
A.- LA RÉFORME EN COURS DOÎT ÊTRE ACCÉLÉRÉE 35
B.- LES MOYENS MATÉRIELS DE FONCTIONNEMENT 36
C.- LES MOYENS HUMAINS 37
1.- Les effectifs 37
2.- Le recrutement 37
3.- Les mesures statutaires et indemnitaire inscrites au projet de loi de finances pour 2003 38
III.- LES STRUCTURES D'ACCUEIL ET LA POLITIQUE D'ÉQUIPEMENT 38
A.- LA POLITIQUE IMMOBILIÈRE DE LA PJJ 39
B.- LES CENTRES DE PLACEMENT IMMÉDIAT (CPI) 40
C.- LES CENTRES ÉDUCATIFS RENFORCÉS (CER) 41
D.- LES CENTRES ÉDUCATIFS FERMÉS (CEF) 42
LES JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES 43
I.- UNE ACTIVITÉ EN AUGMENTATION CONSTANTE 43
A.- LES TRIBUNAUX ADMINISTRATIFS 43
B.- LES COURS ADMINISTRATIVES D'APPEL 44
C.- LE CONSEIL D'ÉTAT 45
II.- DES MOYENS DE FONCTIONNEMENT RENFORCÉS 46
A.- LES RESSOURCES HUMAINES : UNE PROGRESSION SENSIBLE DES EFFECTIFS CONFIRMÉE EN 2003 46
1.- Les effectifs 46
2.- Statut et rémunérations 49
a) La réforme du statut des magistrats 49
b) Le statut des greffes 50
Depuis la création des tribunaux administratifs en 1953, la gestion des magistrats, comme celle des agents de greffes, était assurée par le ministère de l'intérieur. Depuis le 1er janvier 1991, une distinction est faite entre la gestion des emplois qui relève exclusivement du Conseil d'État, et la gestion des personnels, qui est assurée conjointement avec le ministère de l'intérieur. 50
c) Les rémunérations 50
B.- LES MOYENS DE FONCTIONNEMENT MATÉRIEL 51
Total 51
III.- LES INVESTISSEMENTS 52
A.- LES TRIBUNAUX ADMINISTRATIFS ET LES COURS ADMINISTRATIVES D'APPEL 52
Source : Conseil d'Etat 53
B.- LE CONSEIL D'ÉTAT 53
PAGE BLANCHE 54
EXAMEN EN COMMISSION 55
La France compte près de 1200 juridictions, réparties sur 900 sites qu'il convient d'équiper, d'entretenir, de restructurer en fonction des besoins qui ne manquent de surgir. Depuis 1987, la prise en charge de ces bâtiments appartient en totalité au ministère de la justice et non plus aux collectivités locales. Relancé par la loi de programme, le mouvement tendant à mettre à niveau un équipement judiciaire largement défaillant, faute d'entretien pendant plusieurs décennies, se poursuit cette année. La Chancellerie doit ainsi gérer plus de 1,5 million de mètres carrés, auxquels s'ajoute le palais de justice de Paris. Il convient également de construire régulièrement de nouveaux palais.
L'effort important consenti depuis plusieurs années se poursuit donc dans ce projet de loi de finances, conformément aux orientations fixées par la loi d'orientation et de programmation, selon deux axes : la remise à niveau du parc immobilier existant tant en termes de mise en sécurité que d'amélioration du fonctionnement des juridictions ; l'apport de constructions neuves.
257 millions d'autorisations de programme sont inscrits au chapitre 57-60 (articles 20, 71 et 72) dans le projet de loi de finances pour 2003, contre 84 millions en 2002. Cela représente 36 % des autorisations de programme dont bénéficie le ministère de la justice. 105 millions d'euros de crédits de paiement sont également inscrits au projet de loi de finances, soit une progression de 32 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2002. Il s'agit certes d'une progression, mais les crédits disponibles pour l'exercice 2003 risquent d'être moins importants qu'en 2002 du fait de l`absence probable de reports, absence qui est la conséquence d'un très bon taux de consommation des crédits en 2002. Si les services judiciaires ne disposent pour l'exercice 2003 que des crédits ouverts en loi de finances initiale, il s'agira du plus faible montant depuis 1997. Cela sera-t-il suffisant ?
Les opérations d'équipement sont réparties en trois groupes :
· celles pouvant être traitées dans le schéma de production courante, celui de la déconcentration, sous la responsabilité du préfet. Ce sont les programmes de moins de 400 mille francs ; ils relèvent de l'entretien immobilier et du titre III ;
· les opérations individualisées, de moyenne ampleur, qui nécessitent un contrôle particulier de la chancellerie. Elles sont confiées aux antennes régionales de l'équipement (qui sous-traitent souvent avec les directions départementales de l'équipement (DDE) locales) et sont suivies par le bureau des opérations de la direction de l'administration générale ;
· enfin, les grandes opérations, autrefois directement prises en main par la délégation générale au programme pluriannuel d'équipement (DGPPE). La DGPPE avait été créée en 1991 pour superviser l'achèvement du programme de construction pénitentiaire, et pour accompagner la réalisation du programme pluriannuel d'équipement judiciaire. Il s'agissait d'une structure unique dans l'administration française, puisqu'elle prenait donc en maîtrise d'ouvrage directe les opérations les plus lourdes (catégorie 1). Une autre structure unique (ou presque, on trouve une structure proche au ministère de la culture) lui a succédé : à compter du 1er janvier 2002, un établissement public administratif, l'Agence de maîtrise d'ouvrage des travaux du ministère de la Justice, s'est substituée à la délégation générale au programme pluriannuel d'équipement.
Ce principe de répartition est globalement respecté depuis le début des années 90, même si des aménagements sont possibles en fonction des compétences des interlocuteurs déconcentrés. Lorsque les DDE apparaissaient trop limitées en terme de compétences pour les constructions publiques, la DGPPE (et maintenant l'AMOJ) a pris directement les choses en main.
Le processus de construction proprement dit est long et complexe :
L'inventaire des besoins et la gestion du patrimoine immobilier sont du ressort de la Direction des services judiciaires, et plus précisément de la sous-direction de l'organisation judiciaire et de la Programmation. C'est elle qui exprime la nature du besoin judiciaire, tant en hommes qu'en bâtiments. Une fois la décision prise de lancer une nouvelle construction, décision qui relève d'un arbitrage politique, la recherche foncière peut commencer. Elle se réalise sous la responsabilité du préfet, lequel procède à des repérages avec l'aide de la DDE. Ensuite les sites les mieux adaptés sont présélectionnés et des discussions s'engagent avec les élus locaux, les administrations... Il est parfois nécessaire de réaliser des études d'urbanisme complètes pour le compte des collectivités locales.
La durée moyenne des études préalables est de deux ans. Ensuite, la phase de conception du projet dure également deux ans, puis il faut compter de huit mois à un an pour la consultation et la mise au point des marchés de travaux et enfin 2 ans pour la réalisation des travaux. Toutes phases confondues, la durée moyenne de réalisation d'un projet est donc de sept à huit ans.
Les services judiciaires ont fait d'importants progrès dans la consommation tant des autorisations de programme que des crédits de paiement, pour peu que l'on mette à part le dossier du nouveau tribunal de grande instance de Paris. Au 31 août 2002, le taux de consommation était déjà supérieur à celui de l'année 2001, ce qui laisse présager une consommation quasi optimale des crédits sur l'ensemble de l'année.
En 2001, le taux de consommation des autorisations de programme a été de 49 % mais si l'on fait abstraction de l'enveloppe provisionnelle du nouveau TGI de Paris, le taux de consommation d'élève à 98 %. Les crédits de paiement ont été consommés à hauteur de 62,6 % soit une progression de 2 points par rapport à l'année 2000. Les reports sur 2002 ont été de près de 73 millions d'euros. 30 % de cette somme est constituée des crédits de paiement provisionnant l'achat du terrain devant accueillir le futur TGI de Paris. Hors TGI de Paris, le taux de consommation des crédits de paiement est de 70 % ce qui démontre une meilleure capacité de la Chancellerie à utiliser les ressources mises à sa disposition ainsi qu'une adéquation plus réaliste entre les enveloppes demandées et l'état d'avancement réel des opérations de paiement afférents. Les opérations lourdes de catégorie 1 ont consommé 70,9 % de leurs crédits tandis que les crédits déconcentrés l'étaient à 68 %.
En 2002, les autorisations de programme disponibles étaient de 254,6 millions d'euros (dont 65 % pour le nouveau tribunal de grande instance de Paris et dont l'utilisation d'interviendra qu'une fois le site choisi) et les crédits de paiement de 153,4 millions d'euros. Les autorisations de programme, hors celles mentionnées ci-dessus pour le nouveau tribunal de grande instance de Paris, ont à ce jour fait l'objet d'importantes affectations, notifications ou délégations. Ainsi, à la mi-août, les dotations en autorisations de programme de l'article 20 ont été utilisées à hauteur de 92 % et l'appel d'autorisations de programme de l'Agence de maîtrise d'ouvrage pour le second semestre 2002 englobera l'intégralité de la ressource aujourd'hui disponible. L'enveloppe des crédits de paiement devrait être quasi-intégralement consommée à l'issue du présent exercice. A ce jour, en effet, afin de répondre aux demandes présentées par les ordonnateurs secondaires et d'abonder en conséquence les dotations inscrites sur l'article 20, il a dû être procédé à un virement interne au débit de l'article 72 (tribunal de grande instance de Paris). D'autre part, la consommation programmée par l'Agence de maîtrise d'ouvrage (article 72) laisse également présager une utilisation optimale de la ressource puisqu'au 31 août 70 % des crédits étaient consommés.
Dans le projet de loi de finances pour 2003, 120 millions d'autorisation de programme et 32,5 millions de crédits de paiement sont inscrits à l'article 20 du chapitre 57-60 consacré aux opérations déconcentrées des services judiciaires. Pour les crédits de paiement, il s'agit d'une progression de 7 % par rapport à 2002 et de 45 % par rapport à 2001.
L'état général et la localisation des palais de justice tendent à démontrer que ce patrimoine, en grande majorité ancien et à caractère monumental, engendre d'importantes dépenses liées à sa mise en sécurité et à son adaptation aux besoins du service public. L'impact fort de la loi du 15 juin 2000 relative à la présomption d'innocence et aux droits des victimes est révélateur à cet égard de la nécessité d'adapter les bâtiments judiciaires à la mission régalienne dévolue au ministère, qui évolue elle-même au fil du temps.
Trois principaux facteurs doivent être mis en exergue : le caractère vaste et monumental de ce patrimoine ancien, son état ainsi que sa localisation, la sécurité de ces bâtiments.
L'essentiel du patrimoine judiciaire date du XIXème siècle. Il est classé monument historique à 80 %. Parfois, les monuments sont plus anciens, tel le Parlement de Normandie, qui a plus de 500 ans d'histoire. D'autres encore sont d'anciens évêchés ou couvents du XIIème siècle. Ainsi le ministère de la justice joue un rôle important de maintien du patrimoine historique de la France, ceci alors même que le ministère de la Culture ne participe pas au financement d'opérations immobilières sur des bâtiments publics classés appartenant à l'État.
L'état général des palais de justice est préoccupant et il importe de souligner les risques qu'ils font courir. Par exemple, les façades de Rouen qui se délitent, présentent non seulement une menace, mais un danger réel pour les passants. Il a donc fallu prendre des mesures conservatoires et il faudra trouver le financement des travaux de remise dans leur état initial des façades.
Le patrimoine judiciaire, qui jusqu'en 1987 relevait de la gestion des collectivités locales a souffert d'un défaut d'entretien. De manière régulière, des injonctions de fermer des sites judiciaires sont prises par les maires, en application des avis défavorables qu'ont émis les commissions de sécurité : les dernières en date concernent les tribunaux d'instance de La Rochelle et des Sables d'Olonne (mars et avril 2001). Le palais de justice de Laon, ancien évêché du XIIème siècle, fait actuellement l'objet d'un important diagnostic de solidité et des mesures de sécurité ont été prises. Il en va de même à Dunkerque. Pour assurer la continuité du service public, des mesures de sécurité sont à prendre, des relogements à réaliser, des travaux de rénovation lourds à entreprendre. A la suite de l'accident mortel par effondrement survenu au tribunal d'instance de Mortain, un audit a été lancé en fin d'année 2000 sur la sécurité/solidité et anti-incendie de très nombreuses juridictions à risques.
OPERATIONS DECONCENTREES
Opération |
Nature des travaux |
Coût estimé (en millions) |
État d'avancement |
Date de livraison |
AJACCIO |
restructuration, extension |
7,6 M€ (50 MF) |
études d'avant-projet sommaire en cours |
2ème semestre 2003 |
BASTIA |
reconstruction partielle /restructuration |
3,3 M€ (22 MF) |
appel d'offres travaux reconstruction en cours ; avant-projet sommaire restructuration approuvé |
2ème semestre 2002 |
BEZIERS |
restructuration, extension 1ère phase |
2,7 M€ (17,6 MF) |
appel d'offres travaux en cours |
2ème semestre 2002 |
BLOIS |
restructuration |
4,3 M€ (28 MF) |
opération livrée |
janvier 2001 |
BOBIGNY |
extension... |
5,9 M€ (39 MF) |
études de programmation en cours |
2ème semestre 2004 |
... et création d'une salle d'assises |
1,8 M€ (12 MF) |
études d'avant-projet sommaire en cours |
1er semestre 2002 | |
BORDEAUX |
restructuration et réhabilitation de la cour d'appel et du tribunal d'instance |
4,9 M€ (32 MF) |
études d'avant-projet détaillé en cours |
2ème semestre 2003 |
BRESSUIRE |
rénovation et restructuration |
1,1 M€ (7 MF) |
études d'avant-projet sommaire en cours |
1er semestre 2002 |
CAEN |
rénovation |
11,7 M€ (77 MF) |
études de programmation en cours |
1er semestre 2005 |
CAHORS |
restructuration et extension |
3,6 M€ (24 MF) |
études avant-projet sommaire en cours |
2ème semestre 2003 |
DIJON |
extension École Nationale des Greffes |
7,3 M€ (48 MF) |
études de programmation en cours |
2ème semestre 2004 |
DOUAI |
mise en sécurité |
3,8 M€ (25,2 MF) |
opération livrée |
juillet 2001 |
DUNKERQUE |
mise en sécurité |
2,8 M€ (18,7 MF) |
travaux en voie d'achèvement |
2ème semestre 2001 |
EPINAL |
restructuration, extension |
12,6 M€ (83 MF) |
opération livrée |
février 2001 |
LAON |
relogement et réhabilitation (1ère phase urgente ) |
6,9 M€ (45 MF) |
études de programmation en cours |
2ème semestre 2006 |
LAVAL |
construction d'un bâtiment neuf |
14,2 M€ (93 MF) |
études avant-projet sommaire en cours |
2ème semestre 2004 |
LE HAVRE |
construction tribunal de commerce et conseil de prud'hommes |
14 M€ (92 MF) |
étude de faisabilité en cours |
1er semestre 2007 |
LISIEUX |
réparation aile incendiée |
3,8 M€ (25 MF) |
consultation programmiste en cours |
2ème semestre 2004 |
LYON |
restructuration palais historique des 24 colonnes |
6,5 M€ (43MF) |
étude de faisabilité en cours |
2ème semestre 2004 |
MARSEILLE |
restructuration et mise à niveau technique |
9,6 M€ (63 MF) |
travaux en voie d'achèvement |
2ème semestre 2001 |
NANTERRE |
mise en sécurité, désamiantage, façades |
20,1 M€ (132 MF) |
études d'avant-projet détaillé en cours |
1er semestre 2005 |
NIORT |
extension, restructuration |
7,2 M€ (47 MF) |
études de programmation en cours |
1er semestre 2004 |
QUIMPER |
restructuration et extension |
3,3 M€ (22 MF) |
consultation programmiste en cours |
2ème semestre 2004 |
ROANNE |
reconstruction, extension |
10,4 M€ (68 MF) |
appel d'offres travaux en cours |
1er semestre 2003 |
RODEZ |
reconstruction, extension |
7,2 M€ (47 MF) |
travaux en cours |
1er semestre 2002 |
ROUEN |
restauration des façades |
7,3 M€ (48 MF) |
études de programmation en cours |
1er semestre 2004 |
SAINT-ÉTIENNE |
réhabilitation et restructuration |
17,5 M€ (115 MF) |
travaux en cours |
1er semestre 2003 |
STRASBOURG |
restructuration, extension |
18,9 M€ (124 MF) |
concours de maîtrise d'_uvre en cours |
1er semestre 2005 |
VERSAILLES |
création d'une salle d'assises |
1,7 M€ (11 MF) |
consultation de maître d'_uvre en cours |
1er semestre 2002 |
VESOUL |
restauration et restructuration |
3,1 M€ (20,5 MF) |
opération livrée |
janvier 2001 |
Prenant la suite de la délégation générale au programme pluriannuel d'équipement (DGPPE), l'Agence de maîtrise d'ouvrage des travaux du ministère de la justice a pour mission de gérer les opérations les plus importantes, telles que la construction de nouveaux palais de justice.
Pour ces opérations sous convention de mandat (article 71), 122 millions d'autorisations de programme sont inscrits au projet de loi de finances pour 2003. 67 millions seront consacrés à la poursuite d'opérations en cours et 35 millions à des opérations nouvelles parmi lesquelles on peut citer Bobigny, Châlon-sur-Saône, Douai, Laon et Rouen. 72 millions d'euros de crédits de paiement sont prévus soit une progression de 67 %.
OPÉRATIONS JUDICIAIRES DE CATÉGORIE 1 Opérations en cours |
||||||
Opération |
Juridictions |
Nature des travaux |
Coût |
État d'avancement |
Livraison | |
FORT DE FRANCE |
TGI/TI/TC/CPH |
Construction |
44M€ (290 MF) |
Fin des travaux |
juil-01 | |
MOULINS |
TI/TC/CPH |
Réaménagement |
4,3M€ (28,2 MF) |
Fin des travaux |
sept-01 | |
GRENOBLE |
CA/TGI/TI/TC/CPH |
Construction |
86M€ (563,3 MF) |
Travaux en cours |
mars-02 | |
BORDEAUX |
TGI |
Réfection des façades |
3M€ (20 MF) |
Appel d'offres en cours |
2ème semestre 2002 | |
TOULOUSE |
TGI/TI/CPH |
Construction |
58,5M€ (383 MF) |
Travaux en cours |
janv-03 | |
BESANÇON |
CA/TGI/TI/TC/ CPH |
Réhabilitation et extension |
35M€ (229,5 MF) |
Travaux en cours |
juin-03 | |
NARBONNE |
TGI/TI |
Construction |
16,8M€ (110 MF) |
Début des travaux |
sept-03 | |
PONTOISE |
TGI/TI/CPH |
Reconstruction |
71,1M€ (467,7 MF) |
Appel d'offres en cours |
déc-03 | |
THONON LES BAINS |
TGI/TI/TC/CPH |
Réaménagement |
20M€ (131 MF) |
Esquisse |
janv-04 | |
AVESNES SUR HELPE |
TGI/TI |
Construction |
18,3M€ (120 MF) |
Avant projet sommaire |
juil-04 | |
BASSE-TERRE |
CA/TGI/TI/CPH |
Restructuration |
16,8M€ (110 MF) |
Avant projet sommaire |
juin-06 | |
ROUEN |
TGI/TI |
Construction |
53,4M€ (350 MF) |
Études de programmatio |
sept-07 | |
ROUEN |
CA/TC/CPH |
Restructuration |
17,6M (115 MF) |
Études de programmation |
déc-09 | |
AIX EN PROVENCE |
CA/TC/CPH |
Reconstruction |
27,5M€ (180 MF) |
Études de programmation en cours |
juin-07 | |
VERSAILLES |
CA |
Réaménagement |
38,1M€ (250 MF) |
Études de programmation |
juin-07 | |
BOURGOIN JALLIEU |
TGI/TI/TC |
Construction |
14,5M€ (95 MF) |
Reprogrammation sur un projet finalisé |
juin-07 | |
CAYENNE |
TGI/TI |
Construction |
22,9M€ (150 MF) |
Études de programmation |
juil-07 | |
POINTE À PITRE |
TGI/TI |
Construction |
22,9M€ (150 MF) |
Études de programmation |
août-07 | |
CHARTRES |
TGI/TI |
Restructuration |
16,7M€ (110 MF) |
Études de programmation en cours |
sept-07 | |
FORT DE FRANCE |
CA |
Restructuration |
10,7M€ (70 MF) |
Études de programmation en cours |
oct-07 | |
PARIS |
TGI |
Construction |
229M€ (1.500 MF) |
Études préalables |
2010 |
15 millions d'euros d'autorisations de programme (inscrits à l'article 20 du chapitre 57-60) sont affectés cette année à ce site immense (190.000 m2 SHOB), qui réunit la Cour de Cassation, mais aussi la Cour d'Appel, le tribunal de grande instance et le tribunal de commerce, les plus chargés d'affaires de France. Ces autorisations de programme correspondent, en effet, au montant annuel de la maintenance lourde et de la mise aux normes de l'ensemble du palais de justice de Paris, entièrement classé monument historique. Cette dotation permet de maintenir l'activité dans un bâtiment dont le manque de surfaces et l'inadaptation ont été mis en exergue par différentes études.
Par ailleurs, le relogement du tribunal de grande instance de Paris hors des emprises surencombrées du Palais de justice demeure officiellement l'une des priorités du programme d'équipement judiciaire de la Chancellerie. Les besoins de surfaces (retenus aujourd'hui à 82.000 m² de surface hors _uvre nette) ont conduit dès 1999 à rechercher par prudence une assiette foncière susceptible de recevoir 100.000 m² à construire dans Paris intra-muros, ressort de la juridiction concernée. Dès l'origine, l'exercice s'est avéré difficile au vu du nombre limité des terrains potentiellement aptes à accueillir dans la capitale une telle implantation.
Trois sites répondant aux critères techniques et urbanistiques envisagés purent toutefois être sélectionnés et une étude analysant les avantages et les inconvénients de chacun d'eux a été financée en 2000 et 2001. Le site privilégié pour des raisons pratiques et techniques se situe sur la Z.A.C. Tolbiac. Or, récemment, la Ville de Paris a changé de position sur ce point, considérant que les lots T4, T5 et T6 n'étaient plus disponibles. Apparemment, celle-ci envisagerait de proposer les lots A8 et A9 en remplacement. La Chancellerie est prête à examiner ces propositions mais déplore fortement la disparition des lots précédemment envisagés, particulièrement adaptés aux besoins du tribunal de grande instance.
Comptablement, l'opération de construction du nouveau tribunal de grande instance de Paris se présente à ce jour comme suit : 167,7 millions d'euros d'autorisations de programme sont disponibles dont seulement 0,23 million a été consommé ; et 19,8 millions d'euros de crédits de paiement sont également inscrits au chapitre 57-60 article 72 dont seulement 116.357 ont été consommés. L'État est donc en mesure de lancer très rapidement l'opération. Aussi est-il impératif que la Chancellerie et la Ville de Paris trouvent un terrain d'entente afin que ce chantier, indispensable et pourtant perpétuellement repoussé, soit enfin lancé. Si l'on veut voir surgir de terre avant 10 ans un nouveau Palais de justice à la hauteur de l'activité des juridictions parisiennes, il est plus que temps d'agir.
Page blanche
I.- LA PRISE EN CHARGE DE LA POPULATION PÉNALE
Le nombre total de détenus en métropole et en outre mer s'établit au 1er juillet 2002 à 56.385. Ce nombre est en très nette progression par rapport à l'année précédente (49.718 au 1er juillet 2001). Il a augmenté en un an de 13,4 %. Or, historiquement, si la population carcérale avait connu une hausse importante de 50 % entre 1980 et 1996, passant de 36.934 à 55.062, depuis cette date, on notait une diminution de 13 % pour s'établir à 47.837 au 1er janvier 2001. C'est au mois d'octobre 2001 que cette évolution s'est inversée et, entre le 1er janvier 2002 et le 1er juillet 2002, la hausse s'est maintenue à un niveau très élevé : + 16 %.
Deux facteurs contribuent à l'évolution de la population carcérale : l'évolution des flux d'entrées en détention et celle de la durée moyenne de détention.
Les flux d'entrée en détention diminuent de façon constante depuis 1994. Le nombre de personnes incarcérées a baissé régulièrement de 1994 à 2001, passant de 88.754 à 67.308. Entre 2000 et 2001, les entrées ont diminué de 2,1 % (68.765 en 2000). Toutefois, cette dernière baisse cache d'importantes disparités. En effet, le mouvement de baisse important au 1er trimestre (- 9,5 % par rapport au 1er trimestre 2000) et second trimestre 2001 (-5,1 %) s'est ralenti au troisième trimestre (- 1 %) et s'est même inversé au quatrième trimestre où l'on a enregistré plus d'incarcérations qu'en 2000 (+ 8,5 %). Cette augmentation des entrées s'est prolongée au cours du 1er semestre 2002 (+ 23 % par rapport au 1er semestre 2001 !).
Parmi les entrées pour crime, les vols criminels plus particulièrement ont augmenté (+ 39 %), les viols et violences criminelles ayant augmenté dans une moindre proportion respectivement + 14 % et 23 %. Ces mouvements s'opposent à ceux observés entre 1994 et 2000 : le nombre d'incarcérations pour vol criminel avait marqué un fort recul (- 36 %), alors que les incarcérations pour viols ou violences criminelles enregistraient une augmentation (respectivement + 11 %, + 18 %). Parmi les entrées en détention pour délit, l'augmentation concerne plus particulièrement les délits de masse comme le vol avec circonstance aggravante (hors violence) (+ 33 %), les recels (+ 36 %), les entrées et séjours irréguliers sur le territoire national (+ 32 %) et les cessions et trafics de stupéfiants (+ 28 %).
La durée moyenne de détention, second facteur d'évolution de la population pénale, continue régulièrement d'augmenter. Elle est passée de 4,6 mois en 1980 à 8,4 mois en 2001. Au 1er janvier 2002, le nombre total de condamnés incarcérés est relativement stable comparé à 1996. En revanche, l'analyse de la structure par quantum de peine montre des évolutions différenciées. Le nombre des condamnés à moins de 5 ans a diminué de 11 % alors que les condamnés à 5 ans et plus a augmenté de 17 %. En terme de structure, les condamnés qui effectuent une peine de 5 ans et plus représentent 41 % de l'ensemble des condamnés au 1er janvier 2002. Au 1er janvier 2002, les condamnés exécutant une peine de 20 à 30 ans sont au nombre de 984 et les condamnés à perpétuité 578. Ces très longues peines forment 5 % des condamnés.
2.- Les problèmes nés de la surpopulation carcérale
On compte, au 1er juillet 2002, 47.982 places de détention dont 47.471 sont effectivement disponibles. L'augmentation de 16 % du nombre de détenus observée depuis janvier 2002 est intervenue alors que le nombre de places disponibles baissait légèrement (- 1,1 %). Aussi, le rapport entre le nombre de détenus et le nombre de places (densité de population carcérale) a crû passant de 101,2 % au 1er janvier 2002 à 118,8 % au 1er juillet 2002. On retrouve ainsi, les niveaux de densité atteints au début des années 1990. Toutefois, cette densité varie fortement selon la catégorie de l'établissement : elle s'établit, au 1er juillet 2002 à 134 % en maisons d'arrêt ; 40 maisons d'arrêt ou quartiers ont une densité comprise entre 150 % et 200 % et 18, une densité qui dépasse 200 %.
Le nombre de prévenus a baissé régulièrement entre le 1er janvier 2000 et le 1er juillet 2001, pour s'établir à 14.945 à cette dernière date, en partie grâce à la loi du 15 juin 2000 sur la présomption d'innocence. Toutefois, il a augmenté depuis un an de 24 % pour atteindre, au 1er juillet 2002, 18.469, soit 33 % de la population détenue.
Cette surpopulation n'est sans doute pas étrangère à la survenance d'actes d'auto-agressions (automutilations, tentatives de suicides ) ou d'agressions à l'égard des personnels de surveillance dont le nombre a triplé entre 1975 et 1996. Toutefois, d'autres facteurs jouent aussi : une étude récente de l'administration pénitentiaire montre explicitement le lien entre l'augmentation des agressions de personnel et les changements de caractéristiques de la population pénale (plus déstructurée et plus violente), ainsi que l'importance du rapport entre les détenus et le personnel, tant au niveau numérique (taux d'encadrement) qu'au niveau relationnel, la qualité du second dépendant évidemment largement du premier.
Cette surpopulation peut aussi entraîner le non-respect de certaines dispositions relatives aux régimes de détention prévus par le code de procédure pénale, notamment en ce qui concerne la séparation des prévenus et des condamnés. En outre, la surpopulation carcérale augmente la charge de travail des personnels, et notamment des personnels de surveillance, dans la mesure où l'organigramme d'un établissement pénitentiaire est calculé en fonction de sa capacité d'accueil théorique et non pas en fonction de son taux d'occupation.
Ces dernières années, l'Administration Pénitentiaire a été confrontée à l'accroissement du nombre des mineurs incarcérés :
- 2.247 sur l'ensemble de l'année 1993, 4167 en 1999 et 3141 en 2001 (Métropole seulement) ;
- 573 mineurs incarcérés au 1er janvier 1995, 718 au 1er janvier 2000 et 826 au 1er janvier 2002 en Métropole et en Outre-Mer.
Afin de faire face à cette augmentation, il a été décidé de réviser la carte des établissements habilités à l'accueil des mineurs et ce afin de :
- faire face aux variations importantes et imprévisibles de l'incarcération des mineurs, qui se traduisent soit par des sur-encombrements, soit par l'incarcération isolée de quelques mineurs, selon les établissements, ce qui dans les deux cas nuit à une prise en charge de qualité ;
- maintenir un maillage territorial conséquent afin de favoriser le maintien ou la restauration des liens des mineurs avec leur famille ainsi qu'avec les services de la P.J.J., chargés de leur suivi ;
- permettre des séparations entre les populations venant de zones fortement urbanisées et celles originaires de régions plus rurales ;
- accroître le nombre de places dans l'objectif de permettre le respect du principe de l'encellulement individuel des mineurs ;
- dimensionner dans les zones urbaines des quartiers de 20 à 25 places maximum, l'expérience montrant qu'au delà de ce nombre, il n'est plus possible d'assurer un travail de qualité. En cas de besoins dépassant ce seuil structurer le quartier mineur en deux structures de 20 places chacune ;
- créer dans les zones moins urbanisées des quartiers mineurs à petit effectif de 8 à 12 places. En effet, si le sur-encombrement des quartiers mineurs est un réel obstacle à la qualité de la prise en charge, l'isolement de quelques mineurs dans une aile de détention l'est tout autant. Un groupe de 8, apparaît comme un minimum pour permettre une dynamique et assurer la permanence des dispositifs tant en termes d'activités que de personnel.
La nouvelle carte pénitentiaire des établissements habilités à l'accueil des mineurs est définie par la circulaire en date du 26 octobre 2001. Elle porte à 59 le nombre d'établissements habilités à l'accueil des mineurs pour une capacité de 1.136 places (Métropole et Outre-Mer).
La Loi d'Orientation et de Programmation pour la Justice prévoit d'étendre la liste des établissements habilités à recevoir des mineurs afin que les capacités d'accueil soient plus importantes et mieux réparties sur le territoire national : 500 nouvelles places seront ainsi créées en deux ans d'une part dans les quartiers pour mineurs existants pour 350 d'entre elles et d'autre part par l'ouverture de nouveaux quartiers dans le cadre du programme 4000.
Au titre du projet de loi de finances pour 2003, 18 millions d'euros d'autorisations de programme seront consacrés à l'extension des quartiers mineurs. Par ailleurs, 90 créations d'emplois (dont 20 emplois de premiers surveillants et 10 C.S.P.) seront demandées au titre de la future loi de finances pour accompagner l'augmentation de la capacité des quartiers mineurs et assurer un encadrement spécifique suffisant.
La notion de « milieu ouvert » rassemble l'ensemble des mesures pénales qui constituent une alternative à l'incarcération. Sous la pression de l'inflation carcérale et sous l'influence des travaux de recherche relatifs à la réinsertion des personnes détenues, les autorités judiciaires ont développé des peines alternatives à l'enfermement total pour les personnes passibles de courtes peines, en recourant soit aux mesures de milieu ouvert, soit à la semi-liberté.
Au 1er janvier 2002, les services pénitentiaires d'insertion et de probation prennent en charge 140.622 personnes assignées à une mesure en milieu ouvert et suivent 156.398 mesures, soit 1,1 mesure par personne suivie. Entre 1995 et 2002, les personnes et mesures suivies en milieu ouvert ont augmenté respectivement de 38 % et 34 %. Toutefois, entre le 1er janvier 2001 et le 1er janvier 2002, le milieu ouvert marque un certain recul mais reste à un niveau très élevé. Ce recul est à prendre avec précaution, car trop récent pour en tirer des conclusions.
ÉVOLUTION DES MESURES EN MILIEU OUVERT
Année |
Personnes |
Mesures | ||||
SME* |
LC |
TIG* |
Autres mesures |
Total | ||
1995 |
102254 |
87776 |
5053 |
18928 |
5223 |
116980 |
1996 |
105222 |
86594 |
5089 |
20903 |
5520 |
118106 |
1997 |
117061 |
96523 |
5356 |
22812 |
5654 |
130345 |
1998 |
122959 |
104482 |
4775 |
23763 |
5534 |
138554 |
1999 |
131367 |
109349 |
4685 |
23952 |
5760 |
143746 |
2000 |
135020 |
113499 |
4852 |
24962 |
6275 |
149588 |
2001 |
141697 |
119764 |
5013 |
25411 |
7013 |
157201 |
2002 |
140622 |
119753 |
5904 |
23488 |
7253 |
156398 |
Évolution 1995-2002 |
37,5 % |
36,4 % |
16,8 % |
24,1 % |
38,9 % |
33,7 % |
* SME : sursis avec mise à l'épreuve, LC : Libération conditionnelle, TIG : Travail d'intérêt général, Autres mesures : contrôle judiciaire, ajournement avec mise à l'épreuve...
Source : Direction de l'administration pénitentiaire.
L'analyse plus précise par mesure souligne que l'augmentation observée depuis 1995 a concerné principalement les personnes suivies au titre d'un sursis avec mise à l'épreuve (+ 36 %), les personnes suivies au titre d'un travail d'intérêt général (+ 24 %) mais surtout d'une libération conditionnelle (+ 17 %) ayant augmenté de manière moindre. Ainsi, au 1er janvier 2002, les sursis avec mise à l'épreuve forment un peu plus des trois quarts des mesures suivies en milieu ouvert, les mesures de travail d'intérêt général représentent 15 % (contre 16,6 % au 1er janvier°1995).
Entre le 1er janvier 1995 et le 1er janvier 2002, le nombre de condamnés détenus en centre de semi-liberté a augmenté de 67 %. Toutefois, en dépit de cette augmentation, la part des condamnés en semi-liberté reste faible : ils représentent moins de 2 % de l'ensemble des condamnés. Trois éléments sont généralement avancés, pour expliquer le faible développement de cette mesure : un des obstacles au développement de la mesure est le nombre limité de places dans les centres de semi-liberté et quartiers de semi-liberté. Seules 1.966 places sont en effet disponibles pour cette mesure ; une autre difficulté tient à la définition des mesures d'aménagement de peine et à la concurrence qui existe notamment entre la semi-liberté et le placement à l'extérieur ; une troisième difficulté réside dans le suivi socio-éducatif de ces mesures.
L'article 125 de la loi n_2000-516 du 15 juin 2000 dispose que lorsque la peine privative de liberté prononcée est d'une durée inférieure ou égale à dix ans, ou que, quelle que soit la peine initialement prononcée, la durée de détention restant à subir est inférieure ou égale à trois ans, la libération conditionnelle est accordée par le juge de l'application des peines. Dans les autres cas, la libération conditionnelle est accordée par la juridiction régionale de la libération conditionnelle. Cette loi modifie donc celle du 4 janvier 1993 qui disposait que le juge de l'application devait statuer sur la situation des personnes condamnées dont la peine était inférieure à 5 ans au moment de l'incarcération. Le Garde des Sceaux statuait sur les autres cas.
La comparaison des données 2000 et 2001 souligne une légère augmentation du nombre de libérations conditionnelles octroyées (+ 5 %). Cette augmentation a principalement bénéficié aux condamnés à une peine comprise entre 5 et 10 ans (+ 148 %). Dans une moindre mesure, cette hausse a bénéficié aux condamnés à 10 ans et plus (+ 14 %). Par contre, entre le 1er semestre 2001 et le 1er semestre 2002, le nombre de libérations conditionnelles a diminué de 21 %. Le niveau plus faible de 2002 reste toutefois supérieur à celui observé au cours du 1er semestre 2000 (176 condamnés).
Lancée en octobre 2000, l'expérimentation du placement sous surveillance électronique est suivie aujourd'hui dans 13 juridictions. La situation au 1er août 2002 est la suivante :
- 363 mesures ont été prononcées depuis le début de l'expérimentation ;
- 272 sont terminées et 91 sont en cours ;
- 18 ont été retirées, dont 4 pour évasion.
Au terme de cette première phase d'expérimentation, le dispositif de placement sous surveillance électronique apparaît comme une mesure fiable d'exécution des peines et comme une réelle alternative à l'emprisonnement. Les magistrats ont prononcé cette mesure à l'égard de condamnés qui présentaient des gages d'insertion et pour lesquels l'emprisonnement aurait représenté une rupture familiale ou professionnelle importante. Les enquêtes préalables à la décision de placement sous surveillance électronique, réalisées par les services pénitentiaires d'insertion et de probation, ont permis d'adapter la décision judiciaire à la situation personnelle de chaque condamné. Les horaires d'assignation ont été fixés au regard des contraintes professionnelles et familiales des condamnés et la souplesse du dispositif technique a permis une adaptation de ces horaires d'assignation.
Au regard des résultats de l'expérimentation, le gouvernement a décidé la généralisation du placement sous surveillance électronique à l'ensemble des juridictions dans un délai de cinq ans. Ce délai est destiné à permettre au ministère de la Justice d'organiser ses services pour la mise en place de ce dispositif qui nécessite une forte mobilisation de ses personnels, une concertation entre les services judiciaires et les services pénitentiaires ainsi que la mise en place d'un dispositif fiable de contrôle des alarmes. Dès que l'architecture de fonctionnement aura été choisie par la direction de l'administration pénitentiaire, un appel d'offres sera lancé afin de sélectionner les prestataires qui seront appelés à fournir les dispositifs techniques de surveillance électronique ainsi que les services nécessaires au développement de la mesure à partir de fin 2003. Une mesure nouvelle de 2 millions d'euros est inscrite au projet de loi de finances pour 2003 afin de financer cette extension.
En 1998, l'administration pénitentiaire a engagé une réforme majeure de l'organisation et du fonctionnement de ses services chargés de l'insertion et de la probation. Répondant notamment à une modification du contexte d'intervention (évolution socio-économique avec une aggravation très nette de la situation économique et sociale des publics suivis, modification de l'environnement social avec le transfert au département des compétences en matière d'aide sociale...), aux évolutions importantes quantitatives et qualitatives de l'activité des services, aux transformations des méthodes de travail des travailleurs sociaux pénitentiaires, la réforme des services pénitentiaires d'insertion et de probation (spip), consacrée par le décret du 13 avril 1999, a permis de moderniser et de rendre plus lisible l'action de l'administration pénitentiaire pour l'exécution des mesures pénales et l'insertion des personnes placées sous main de justice.
Au 1er janvier 2002, les services pénitentiaires d'insertion et de probation prennent en charge 140.622 personnes en milieu ouvert (pour 156.398 mesures) et 54.950 détenus, soit en moyenne un ratio d'un travailleur social pour 100 personnes placées sous main de justice. Ils assument également la préparation des mesures d'aménagement de peines et la création des dispositifs de placement extérieur; ils pilotent la préparation à la sortie des personnes détenues, l'accès aux droits sociaux, la formation professionnelle et l'action culturelle des personnes incarcérées; ils participent au Projet d'Exécution de peine (PEP), à la lutte contre l'illettrisme et l'indigence. Ils ont un rôle de coordination départementale pour les activités physiques et sportives, les actions de lutte contre les toxicomanies et d'éducation pour la santé conduites en établissement pénitentiaire. Enfin, ils sont force de proposition en matière d'enseignement, de travail pénitentiaire et d'action sanitaire.
Ainsi, au titre du projet de loi de finances pour 2003, l'administration pénitentiaire entend financer les activités offertes aux détenus via les SPIP à hauteur de 800.000 euros pour compenser le retrait des activités commerciales (location de téléviseurs) des associations socio-culturelles. Les SPIP verront leurs moyens d'intervention renforcés de 350.000 euros afin de consolider et d'augmenter les dispositifs d'animation et d'accompagnement de la population placées sous main de Justice.
Depuis 1995, les services pénitentiaires d'insertion et de probation ont bénéficié de 687 créations d'emplois brutes de travailleurs sociaux afin de mieux répondre à l'augmentation significative de leur charge de travail (plus de 100 % de mesures de milieu ouvert en 10 ans) et à la diversification de leurs missions. La création de 152 emplois de personnels d'encadrement a permis d'engager une véritable structuration de la fonction de management des services. La capacité administrative des services a été renforcée par 60 transferts d'emplois de la DSJ et 90 créations, dont 43 personnels de catégorie pour la mise en place en 2003 des régies comptables d'avances et de recettes. Au titre du projet de loi de finances pour 2003, l'administration pénitentiaire a demandé la création de 200 emplois spécifiquement dédiés aux services pénitentiaires d'insertion et de probation : 150 travailleurs sociaux et 50 personnels administratifs.
Différents des maisons d'arrêt, peu adaptés à des traitements personnalisés, ces nouveaux types d'établissements pénitentiaires visent à améliorer la prise en charge de condamnés à de courtes ou moyennes peines, à moins d'un an de leur libération. Résolument tournés vers la réinsertion et un retour rapide des personnes en milieu libre, ces établissements offrent un régime de vie progressif, basé sur un apprentissage de l'autonomie et une responsabilisation des condamnés, afin d'élaborer un projet de sortie favorisant l'accès à des mesures d'aménagement de peine. Ils peuvent également accueillir des détenus bénéficiant d'une mesure de semi-liberté ou d'un placement extérieur.
Les caractéristiques des centres pour peines aménagées sont adaptées à leur mission : peu de sécurité passive, mais un encadrement en personnel spécialisé, avec notamment une présence affirmée des travailleurs sociaux, des partenaires extérieurs (logement, formation, travail, santé...) et des personnels de surveillance exerçant une mission un peu comparable à celle qu'ils remplissent dans les quartiers mineurs, davantage tournée vers l'animation et le tutorat. Le cadre juridique mis en place en 2002 par le décret n_ 2002-663 du 30 Avril 2002, permet de définir les critères d'accès au CPA et d'insister sur la démarche volontaire du détenu. En effet il est prévu par le texte que l'affectation dans un CPA ne peut être décidée qu'avec l'accord du condamné.
L'expérimentation de ce nouveau type d'établissement est prévue sur trois sites existants dans le patrimoine pénitentiaire : l'ancienne prison hôpital de Marseille-Baumettes, l'ancien centre pénitentiaire de Metz-Barrès et l'actuel centre de semi-liberté de Villejuif.
C.- LE TRAVAIL DES DÉTENUS : COMPTE N°904-11 « RÉGIE INDUSTRIELLE DES ÉTABLISSEMENTS PÉNITENTIAIRES »
L'objet de ce compte de commerce est de retracer les opérations relatives à la fabrication et à la vente d'objets divers par les ateliers industriels des établissements pénitentiaires ainsi qu'aux travaux de bâtiments effectués pour le compte de l'administration pénitentiaire sur crédits budgétaires et aux conditions prévues par la loi.
Le compte spécial supporte, en dépenses, le prix des matières premières, le coût du renouvellement du matériel, la rémunération du travail des détenus, les frais généraux et le remboursement au budget général des traitements et indemnités des agents affectés à la régie industrielle. Les dépenses atteindraient 23,115 millions d'euros en 2003. Il reçoit, en recettes, le produit de la vente des objets fabriqués et le montant des travaux de bâtiments évoqués ci-dessus. Ces recettes atteindraient 23,415 millions d'euros en 2003.
En 2001, la RIEP employait en moyenne 1.240 personnes détenues dans ses ateliers répartis dans 28 établissements. La rémunération journalière moyenne est de 23,8 euros.
Votre Rapporteur spécial vous renvoie à l'excellent rapport de notre collègue Sénateur, M. Paul Loridant, « Prisons : le travail à la peine » sur la RIEP et, plus généralement, sur le travail en milieu carcéral. Est en particulier évoquée l'hypothèse d'une transformation de la RIEP en établissement public pénitentiaire de réinsertion par le travail et la formation professionnelle. Cette solution a des avantages (facilité accrue en matière de gestion du personnel, suppression de l'obligation de recours à des marchés publics pour les achats de fourniture...) comme des inconvénients (soumission au régime fiscal des entreprises, coût de la modification de statut des agents...). Votre Rapporteur spécial souhaite en tous cas que la réflexion se poursuive à ce sujet au sein de l'administration pénitentiaire comme sur les autres points soulevés par M. Loridant.
II.- LES PERSONNELS PÉNITENTIAIRES
Les effectifs, tous corps confondus, des services pénitentiaires sont en hausse régulière depuis 10 ans. La loi d'orientation et de programmation pour la justice est venue confirmer cette tendance en prévoyant la création de 3.740 emplois sur les cinq prochaines années. Ces créations d'emplois permettront d'une part de renforcer la prise en charge des mineurs et, d'autre part, d'accompagner la modernisation de l'administration pénitentiaire. Le projet de loi de finances pour 2003 est donc la première étape de cette programmation et prévoit la création de 870 emplois.
C'est moins que l'an dernier puisque la loi de finances initiale pour 2002 avait créé 1.525 emplois. Néanmoins, 700 de ces 1.525 emplois avaient été créés « pour renforcer les établissements pénitentiaires dans le cadre de la mise en _uvre de la RTT », contrairement à la politique affichée par le précédent gouvernement de non-création d'emplois dans la fonction publique lors du passage aux 35 heures. Le gouvernement anticipe une année 2003 difficile à ce niveau puisqu'il a provisionné 18,7 millions d'euros afin de payer « un volume significatif d'heures supplémentaires » pour assurer la mise en _uvre progressive de l'ARTT.
Les effectifs des services pénitentiaires sont passés de 22.704 en 1992 à 27.755 dix ans plus tard soit une augmentation de 22 %. En 2002, l'effectif budgétaire de l'administration pénitentiaire de 27.755 agents se repartit de la manière suivante : 472 personnels de direction, 21.749 personnels de surveillance, 2.430 personnels administratifs, 719 personnels techniques, 2.214 personnels socio-éducatifs et 171 agents contractuels.
CRÉATIONS D'EMPLOIS 1990-2003
Année |
Nombre |
Nombre d'emplois consacrés |
Effectifs |
1990 |
2.053 |
1927 (programme 13000) |
21.407 |
1991 |
811 |
511 (programme 13000) |
22.407 |
1992 |
399 |
208 (programme 13000) |
22.704 |
1993 |
430 |
23.071 | |
1994 |
450 |
23.477 | |
1995 |
550 |
23.908 | |
1996 |
730 |
230 (ouverture des établissements de Ducos |
24.619 |
1997 |
211 |
127 (ouverture de Remire-Montjoly (Guyane)) |
24.786 |
1998 |
300 |
12 (programme 4000) |
25.086 |
1999 |
344 |
25 (programme 4000) |
25.474 |
2000 |
386 |
30 (ouverture d'un CPA) |
25.868 |
2001 |
530 |
215 (programme 4000) |
26.233 |
2002 |
1.525 |
276 (programme 4000) |
27.755 |
2003 |
870 |
477 (programme 4000) |
28.590 |
Total |
9.589 |
Source : Direction de l'administration pénitentiaire.
Malgré cette hausse constante des effectifs, les besoins en personnels et la tension qu'ils occasionnent sur la gestion des effectifs sont très importants, eu égard à la prise en charge des personnes placées sous main de justice, voire cruciaux pour une administration en charge d'une mission de sécurité publique.
870 créations d'emplois sont demandées au titre du projet de loi de finances pour 2003 et concerneront cinq mesures prioritaires :
- l'ouverture des établissements du programme 4000 ;
- le renforcement des services pénitentiaires d'insertion et de probation ;
- la création de place de détention pour mineurs ;
- la prise en charge des escortes des détenus pour consultation médicale ;
- l'ouverture des Unités Hospitalières Sécurisées Inter-régionales (UHSI).
Une réforme statutaire est intervenue en 1998 mais elle n'offrait pas de débouchés suffisamment importants en nombre aux fonctionnaires issus du corps des directeurs des services pénitentiaires. Aussi une nouvelle réforme est-elle intervenue en 2002 afin de doter ces fonctionnaires d'une carrière plus rapide et plus fluide entre les différents grades. Par ailleurs les personnels de direction bénéficient d'une prime de sujétions spéciales, intégrée dans le calcul des droits à pension, d'une indemnité de responsabilité dont les montants moyens annuels varient de 2327 à 3962 euros et tiennent compte de la classification des établissements pénitentiaires.
La filière des personnels de surveillance (20.226 agents soit 78,4 % des effectifs) a fait l'objet d'une réforme statutaire en 1993 et comprend deux corps : le corps des gradés et surveillants (du niveau de la catégorie C) et le corps des chefs de service pénitentiaire (du niveau de la catégorie B). S'agissant des gradés et surveillants, ce corps a fait l'objet d'un alignement statutaire sur le corps homologue de la police nationale. Si la carrière des surveillants apparaît globalement satisfaisante, celle des chefs de service pénitentiaire n'était guère attractive. Les écarts relativement faibles entre les indices des grades composant les deux corps du personnel de surveillance ne rendait que très peu compte de la différence importante de responsabilité assumée.
En vue de trouver les bases d'un équilibre entre les deux niveaux hiérarchiques, une réforme statutaire du corps des chefs de service pénitentiaire a été finalisée. Le décret n_2001-730 du 31 juillet 2001 portant modification du décret n_93-1113 du 21 septembre 1993 relatif au statut particulier du personnel de surveillance de l'administration pénitentiaire, consacre une réforme d'ensemble du statut particulier des chefs de service pénitentiaire. Suite à cette réforme, les dispositions relatives à l'avancement et à la scolarité de ces personnels doivent maintenant être révisées.
Par ailleurs, une réforme concernant les fonctions spécialisées exercées par les personnels de surveillance est envisagée. En effet, ces personnels ne disposent pas de perspectives de carrière tenant compte des responsabilités assumées quotidiennement ainsi que de leurs compétences spécifiques. Ainsi, il est notamment prévu que les actuels chargés d'application informatique rejoignent par voie de détachement la filière technique et que les actuels formateurs soient détachés sur un statut d'emploi. Les travaux de réflexion et de concertation avec les organisations syndicales sont en cours.
Concernant le régime indemnitaire, suite au protocole d'accord du 18 octobre 2000, un certain nombre des indemnités perçues par les personnels de surveillance ont été revalorisées. Les personnels de surveillance perçoivent : une prime de sujétions spéciales calculée en pourcentage du traitement brut et intégrée dans le calcul des droits à pension ; une indemnité pour charges pénitentiaires pour ceux exerçant leurs fonctions au contact permanent de la population pénale ; une indemnité de nuit ; une indemnité de dimanche et jour férié. Les chefs de service pénitentiaire bénéficient en outre de l'indemnité de responsabilité allouée aux personnels de direction, lorsqu'ils assurent les fonctions de chef d'établissement ou d'adjoint au chef d'établissement.
Les personnels socio-éducatifs se répartissent en deux filières : le personnel de service social (485 agents) et le personnel d'insertion et de probation (1.618 agents) sur les 25.794 agents que compte l'administration pénitentiaire, soit 1,9 % pour le secteur social et 6,3 % pour le personnel d'insertion et de probation, ce dernier étant placé sous statut spécial. Cette situation originale, liée à l'histoire des intervenants socio-éducatifs à l'administration pénitentiaire introduit une certaine complexité de gestion de ces deux filières qui assument depuis 1986 des missions identiques.
Dans le cadre de la réforme des services d'insertion et de probation, un statut d'emploi de directeur des services pénitentiaires d'insertion et de probation a été créé. La création de ce statut a permis d'identifier un nouveau métier et positionne clairement le directeur des services pénitentiaires d'insertion et de probation vis-à-vis de l'ensemble de ses interlocuteurs (personnels pénitentiaires, autorités judiciaires, autorités du département et partenaires locaux).
L'organisation et les dispositions statutaires de cette filière n'apparaissent aujourd'hui plus satisfaisantes. Pour les chefs des services d'insertion et de probation, le corps homologue de la Protection Judiciaire de la Jeunesse (chefs de service éducatifs) a obtenu une revalorisation indiciaire. De plus, le statut des personnels d'insertion et de probation ne bénéficie pas d'une surindiciarisation autorisée par le statut spécial car il est aligné sur les autres corps de travailleurs sociaux. Par ailleurs, ces personnels doivent faire face à une charge de travail qui s'est lourdement accrue avec l'augmentation des effectifs de personnes prises en charge ainsi qu'avec les obligations nouvelles dues aux différentes mesures législatives. Enfin, le statut d'emploi de directeur des services pénitentiaires d'insertion et de probation constitue le seul débouché de carrière pour les travailleurs sociaux ; or, il ne leur offre pas de réelles perspectives de carrière.
Ainsi un projet de réforme statutaire de l'ensemble de la filière d'insertion et de probation est à l'étude.
Concernant le régime indemnitaire, ces personnels bénéficient d'une indemnité de sujétions spéciales calculée en pourcentage du traitement brut, dont le montant est intégré dans le calcul des droits à pension. Suite au protocole d'accord signé entre la garde des sceaux et les organisations syndicales représentatives des personnels d'insertion et de probation en janvier 2002, une augmentation de deux points de cette indemnité a été obtenue : elle passe donc à 19 % du traitement brut. De même, suite à ce protocole, il est prévu une augmentation à hauteur d'un point au 1er janvier 2003, puis de nouveau un point au 1er janvier 2004.
A compter du 1er janvier 2002, l'ensemble des personnels administratifs et de service des services déconcentrés de l'administration pénitentiaire voit leur régime de retraite modifié selon les modalités suivantes: par dérogation à l'article 61 du code des pensions civiles et militaires de retraite, leur émolument correspondant aux indices servant au calcul des retenues pour pension est majoré de la prime de sujétion spéciale. En contrepartie la retenue pour pension prévue également dans cet article sera majorée de 2,2 % passant du taux de 7,85 % à 10, 05 % à compter du 1er janvier 2002. En conséquence, leur pension de retraite est liquidée sur la base de leur émolument prévu à l'article L 15 du dit code, majoré de la prime de sujétions spéciales. Ils bénéficient ainsi des mêmes avantages pour leur régime de retraite que les autres personnels de l'administration pénitentiaire.
Il est encore trop tôt pour établir un premier bilan d'une mesure financière à long terme, notamment par une demande de mise à la retraite avant la limite d'âge par le biais d'une cessation progressive d'activité. Néanmoins, les premiers effets se mesurent par l'accroissement des demandes de réintégration de personnels de l'administration détachés et le souhait pour les personnels d'autres ministères de venir en détachement afin de bénéficier de l'intégration de la prime de sujétion spéciale dans leur pension.
Le budget 2003 avec une enveloppe statutaire de 995.138 euros doit permettre de finaliser la réforme statutaire des personnels de direction et de préparer la réforme de la filière des personnels d'insertion et de probation :
Une enveloppe indemnitaire de 19,3 millions d'euros est par ailleurs demandée afin d'assurer la mise en oeuvre progressive de l'aménagement et la réduction du temps de travail (18,7 millions), qui nécessite notamment le paiement d'un volume significatif d'heures supplémentaires.
Les forts départs en retraite des personnels surveillants de 1999 et surtout 2000 (1.100 départs) se sont beaucoup atténués en 2001, et l'année 2002 devrait être très proche de celle-ci. Le niveau général des retraites devrait rester relativement stable, voire légèrement régresser, jusqu'en 2007, au regard des comportements observés face à la bonification du cinquième. Après 2007, le niveau des départs devrait croître pour revenir à un niveau important après 2012, voisin de celui constaté en 2000. Ainsi, les départs en retraite devraient concerner entre 600 et 650 personnels de surveillance selon les années d'ici à 2010.
Rappelons que la bonification du cinquième a pour objectif de compenser l'abaissement de la limite d'âge à 55 ans instaurée pour tenir compte de la pénibilité de l'accomplissement de la mission de sécurité des personnels de surveillance. Ce dispositif est identique à celui dont bénéficie le personnel actif de la police nationale. L'article 88-1 de la loi de finances rectificative pour 2001 est venu modifier légèrement ce dispositif puisqu'il permet à certains agents de rester en activité au-delà de la limite d'âge. Il répond ainsi à un double objectif: d'une part, ne pas systématiquement priver l'administration des compétences d'agents d'expérience qui souhaitent poursuivre leur activité et, d'autre part, autoriser ceux d'entre eux qui sont entrés tardivement dans l'administration pénitentiaire à prolonger leur activité au delà de cette limite d'âge. L'abaissement de la limite d'âge des personnels de surveillance a en effet entraîné de 1996 à 2000, un nombre très élevé (environ 3.000) de départs à la retraites d'agents expérimentés. Par ailleurs, nombre d'agents entrés tardivement dans l'administration pénitentiaire sous l'empire de l'ancienne législation qui fixait à 60 ans la limite d'âge de leur corps se sont vus contraints de partir à la retraite à l'âge de 55 ans avec un taux de pension faible et inférieur au traitement dont ils pouvaient escompter bénéficier lorsqu'ils ont été recrutés.
Le premier bilan de cette mesure peut-être considéré comme largement positif : ce dispositif a permis de proposer une solution équilibrée aux personnels de surveillance de l'administration pénitentiaire souhaitant prolonger leur activité professionnelle. 40 agents ont bénéficié par anticipation de cette mesure dès la fin de l'année 2001 et pour l'année 2002, 62 autorisations de prolongation d'activité ont été accordées auxquelles s'ajoutent 10 demandes au titre des années 2003 et 2004. Ce qui porte l'ensemble des autorisations à 112.
La formation des personnels regroupe la formation initiale et les formations d'adaptation statutaires assurées par l'École nationale d'administration pénitentiaire (ENAP) et la formation continue assurée principalement par les services régionaux et dans une moindre mesure par l'ENAP.
Les enjeux à relever pour l'année 2002 ont consisté à pérenniser le fonctionnement de l'École suite aux changements induits les années précédentes : la réorganisation intervenu depuis 1999, sa délocalisation à AGEN réalisée en 2000, sa transformation en établissement public administratif en 2001. Par ailleurs, ces changements sont intervenus dans le cadre d'une montée en charge de l'activité de l'École.
L'ENAP a vu ses effectifs d'élèves et de stagiaires accueillis passer de 2.548 au cours de l'année 1998 à 3.608 en 1999 et 4.457 en 2000. En 2001, l'ENAP prévoyait d'accueillir près de 5000 élèves et stagiaires. Ce sont les promotions de surveillants qui ont été le plus massivement concernées. Ceci touche aussi bien la taille des promotions que leur rythme d'arrivée à l'école. De la 139ème à la 141ème, les promotions comptent entre 100 et 200 élèves. Elles en comptent 300 en moyenne entre la 142ème et la 147ème et elles atteignent 400 et 500 à partir de la 148ème. Alors que les entrées en formation étaient limitées à trois par an, l'école a reçu quatre formations de surveillants au cours de l'année 2000 et s'apprêtait à en recevoir quatre nouvelles en 2001. Concrètement, cette croissance des effectifs a des conséquences : augmentation du groupe d'élèves surveillants (de 15 à 20/25 élèves par groupe), féminisation des élèves surveillants, difficulté à trouver des lieux de stage (en particulier pour les élèves conseillers d'insertion et de probation).
C'est probablement une augmentation de près de 50 % des capacités d'accueil de l'ENAP à laquelle il va falloir procéder sous peine de ne pas pouvoir tenir le rythme de recrutement, sauf à sacrifier la durée de formation (de 8 mois aujourd'hui), comme à l'occasion du programme 13.000 où elle avait été ramenée à 2 mois, avec des conséquences fâcheuses sur la qualité de la formation.
En outre, c'est également en amont du recrutement que se rencontrent des difficultés : de manière générale, le recrutement des surveillants est complexe, car le nombre de candidats est en diminution, et la déperdition entre le nombre de reçus et le nombre de ceux qui entrent en formation à l'ENAP atteint jusqu'à 30 %. L'administration pénitentiaire se heurte en effet à une forte concurrence de services publics voisins, tels que la police. Le réservoir de candidats se restreint de ce fait au moment où, par ailleurs, une forte campagne de communication a été engagée. Ce constat a été perçu dans le dernier concours ouvert récemment où seuls 6.600 candidats environ se sont inscrits.
Aussi trois mesures d'ajustement sont demandées au titre du projet de loi de finances pour 2003 pour l'ENAP : un ajustement des crédits de fonctionnement eu égard à l'augmentation du nombre d'élèves (197.566 euros). Un ajustement lié aux dernières réformes indemnitaires et statutaires (268.382 euros). Enfin, un ajustement des crédits de personnels en raison du GVT (178.000 euros).
Par ailleurs, des moyens nouveaux sont prévus : la priorité en 2003 pour l'école est de renforcer ses effectifs afin de pouvoir répondre, tant en terme de formation qu'en terme de soutien administratif, à l'augmentation du nombre d'élèves. L'ENAP demande ainsi la création de 20 emplois (871.449 euros). Enfin, il convient de noter que le ministère de la justice, via l'AMOTMJ, s'engage à construire un nouveau bâtiment pour permettre la montée en puissance de l'école (10 millions d'euros).
III.- LA POLITIQUE D'ÉQUIPEMENT
Il s'agit là d'un des principaux enjeux des cinq prochains exercices budgétaires : la loi d'orientation et de programmation prévoit la construction de 11.000 places dont 7.000 nouvelles, les 4.000 autres remplaçant des places par trop vétustes.
L'administration pénitentiaire dispose à ce jour de 187 établissements, comprenant 118 maisons d'arrêt, 23 centres de détention, 6 maisons centrales, 25 centres pénitentiaires, 14 centres de semi-liberté et 1 hôpital pénitentiaire. À ces locaux spécifiques, il convient d'ajouter les sièges des directions régionales (9+ une mission pour l'outre-mer) et les sièges des directions et services pénitentiaires d'insertion et de probation (SPIP).
Ce patrimoine représente un peu plus de 2,8 millions de m2 dont la quasi-totalité est propriété domaniale. C'est l'un des plus importants ensembles immobiliers appartenant à l'État. Le parc pénitentiaire est caractérisé également :
- par sa grande dispersion sur le territoire : chaque département, à l'exception du Gers, dispose au moins d'une maison d'arrêt ;
- par son ancienneté : 57 % des établissements ont été construits avant 1920 ;
- par son hétérogénéité architecturale (anciennes prisons d'ancien régime, forts, casernements et camps militaires, couvents et abbayes, hôpitaux...) ;
- par sa spécificité fonctionnelle dont la traduction est le souci constant de la sécurité.
106 établissements sur 187 offrent moins de 200 places de détention et accueillent seulement 17 % de la population pénale. 50 % de la capacité d'accueil du parc est concentré dans les 40 établissements comptant au moins 400 places.
Ce programme résulte de la loi de programmation pour la justice du 6 janvier 1995 dont le volet pénitentiaire allouait trois milliards de francs en autorisations de programme sur 5 ans aux équipements pénitentiaires. Il a permis de faire face aux situations les plus critiques en supprimant 5 établissements vétustes. Il prévoit la réalisation de 6 nouveaux établissements à Sequedin (59), Le Pontet (84), Seysses (31), Chaucoin-Neufmontiers (77), la Farlède (83) et Liancourt (60) en deux tranches dont la première a été lancée à l'automne 2000 et la seconde à l'automne 2001. Ce programme est évalué à 290 millions d'euros. Le coût de chaque établissement sera d'environ 45,7 millions d'euros pour un coût moyen de la place entre 65.550 euros et 68.600 euros.
CALENDRIER DU PROGRAMME 4000
Établissement |
Date de début |
Date prévisionnelle de mise en service |
Seysses |
Octobre 2000 |
Janvier 2003 |
Le Pontet |
Novembre 2000 |
Mars 2003 |
Sequedin |
Janvier 2003 |
2ème trimestre 2005 |
Liancourt |
Septembre 2001 |
Fin 2003 |
La Farlède |
Janvier 2002 |
Avril 2004 |
Chauconin |
Septembre 2002 |
Début 2005 |
Ce programme de construction résulte des décisions prises en 1999 et 2000 concernant la reconstruction de trois maisons d'arrêt particulièrement vétustes : celles de Saint-Denis de la Réunion, de Lyon-Perrache et de Nice.
Ces trois établissements n'en sont qu'au stade de la recherche foncière, recherche qui s'avère particulièrement difficile.
Ce programme, décidé en 1998 concernait en priorité les cinq plus grands établissements (maisons d'arrêt de Fleury-Mérogis, Fresnes et Paris-La Santé, centre pénitentiaire de Marseille-Baumettes, établissement de Loos-les-Lille) pour lesquels le coût de la rénovation ne pouvait être intégrée dans l'enveloppe annuelle des crédits de rénovation de l'administration pénitentiaire. À ce jour, aucun de cinq programmes n'a dépassé le stade des études et le projet Loos-les-Lille a été abandonné. Pour les autres, les travaux sont programmés pour durer entre 7 et 10 ans, s'ils commencent.
L'administration pénitentiaire a mené en 2001-2002 une réflexion sur ses besoins dans la perspective d'une refonte de la carte pénitentiaire. À partir d'une évaluation théorique des besoins et du constat de l'existant, un premier bilan du déficit de places disponibles a pu être dressé par direction régionale et par catégorie d'établissements pénitentiaires.
La nouvelle carte pénitentiaire a été élaborée en tenant compte des paramètres suivants ;
- augmenter la capacité du parc pénitentiaire à hauteur des besoins ; accroître le nombre de cellules afin de permettre, lorsque cela est nécessaire, l'encellulement individuel ;
- disposer d'établissements pénitentiaires adaptés aux profils des détenus et situés dans les zones de forte délinquance.
Ainsi 11.000 places nouvelles doivent être créées. Ce vaste programme de construction entraînera la fermeture de 4.000 places vétustes.
Les moyens mobilisés par les programmes d'équipement pénitentiaire apparaissent très importants. Depuis 1997, ils ont été constamment abondés, que ce soit par les lois de finances initiales ou rectificatives. Cette croissance des moyens se heurte à la capacité de dépenses du ministère, dont la relative faiblesse entraîne d'importants reports de crédits à la fin de chaque exercice. Ainsi, le tableau suivant fait ressortir l'ampleur de ces reports et abondements en comparant la dotation en loi de finances initiale et le montant des crédits disponibles. On constate, en fait, que plus les crédits augmentent, plus le taux de consommation chute, la capacité d'absorption des crédits restant, elle, stable autour 55 millions d'euros.
Certes, les années 2001 et 2002 (82 %) semblent bien meilleures en raison du lancement effectif du programme 4.000 et donc de la consommation des crédits y afférant. Il faudra néanmoins veiller attentivement à ce que ce rythme haché de consommation des crédits ne se renouvelle pas avec le programme 11.000.
CRÉDITS D'ÉQUIPEMENT DES SERVICES PÉNITENTIAIRES (ancien chapitre 57-20, nouveau chapitre 57-60, articles 40, 50 et 73) en millions d'euros |
||||||||||
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
2002(1) |
2003 |
|||
Crédits de paiement | ||||||||||
Loi de finances initiale (2) |
78,66 |
44,06 |
42,38 |
66,77 |
90,75 |
65,12 |
102,34 |
148 | ||
Disponibles |
87,35 |
62,96 |
58,57 |
117,10 |
181,76 |
181,39 |
158,42 |
|||
Consommation |
37,18 |
55,66 |
32,86 |
40,89 |
58,57 |
118,53 |
129,03 |
|||
Taux de consommation |
42,6 |
88,4 |
56,11 |
34,92 |
32,22 |
65,35 |
81,45 |
|||
Autorisations de programme | ||||||||||
Loi de finances initiale (2) |
51,83 |
50,16 |
156,11 |
139,03 |
90,30 |
280,51 |
279,38 |
371 | ||
Disponibles |
57,18 |
64,37 |
198,66 |
313,48 |
265,10 |
488,75 |
560,96 |
|||
Consommation |
44,73 |
32 |
55,62 |
260,09 |
58,88 |
173,15 |
88,88 |
|||
Taux de consommation |
78,2 |
49,70 |
28 |
82,97 |
22,21 |
35,43 |
15,84 |
|||
(1) au 11 octobre 2002. | ||||||||||
(2) budget voté, sauf 2003 (projet de loi de finances). | ||||||||||
Source : ministère de la justice. |
Les mesures présentées dans le cadre du projet de loi de finances pour 2003 s'inscrivent d'une part dans le cadre des orientations présentées dans la loi de programmation et, d'autre part, dans la poursuite des actions de modernisation du parc pénitentiaire.
285,5 millions d'euros d'autorisations de programme sont demandés au titre du présent projet pour mettre en _uvre la première tranche annuelle de la programmation :
- le nouveau programme de construction de 11.000 places (176 millions d'euros) ;
- la construction d'établissements spécialisés pour mineurs (45 millions d'euros) ;
- l'extension de la capacité des quartiers mineurs (18 millions d'euros) ;
- la sécurisation des établissements pénitentiaires (9,5 millions d'euros) ;
- l'extension des locaux de l'ENAP (10 millions d'euros).
103 millions d'euros sont demandés au titre des programmes engagés avant la présentation de la LOPJ :
- le complément de financement du programme de 1.800 places (24 millions d'euros) ;
- la rénovation des 5 grands établissements (41 millions d'euros) ;
- le programme annuel d'entretien-rénovation du parc pénitentiaire (38 millions d'euros).
LA PROTECTION JUDICIAIRE DE LA JEUNESSE
Les crédits de la protection judiciaire de la jeunesse au titre du projet de loi de finances pour 2003 s'inscrivent, pour l'essentiel, dans le cadre de la loi d'orientation et de programmation. Cette loi définit trois orientations principales pour les services de la PJJ qui représentent l'essentiel des moyens nouveaux demandés au titre du PLF :
- prendre en charge les mineurs récidivistes ou violents ;
- prévenir la récidive et répondre à tous les actes de primo-délinquance ;
- renforcer l'administration et la formation pour améliorer la gestion et le contrôle des services.
La PJJ représente 11,23 % des crédits du ministère de la Justice, soit 565,611 millions d'euros. Le budget est en hausse de 4,81 %, 7,86 % pour le secteur public et 0,94 % pour le secteur habilité. 314 créations d'emplois sont prévues ainsi que 26 millions d'euros d'autorisations de programme dont 11 millions au titre de la loi de programmation. Celle-ci est donc plus que respectée cette première année, ce dont se félicite votre Rapporteur spécial.
Malgré tout, ces augmentations de moyens ne doivent pas masquer l'absence de réformes d'une administration en perte de repères au moment où elle est la plus sollicitée. Ses missions ont considérablement évolué ces dix dernières années du fait de la mutation de la population prise en charge, sans qu'une réflexion approfondie sur la doctrine et les objectifs de la PJJ ait eu lieu. Au-delà, c'est l'ensemble de la stratégie en matière de lutte contre la délinquance des mineurs qui est à repenser. Il y a une juxtaposition d'institutions qui campent sur leur territoires respectifs sans réelle coopération : la PJJ, les magistrats, les services sociaux des conseils généraux, l'Éducation nationale bien sur. Ce sont tous ces secteurs qu'il faut faire travailler ensemble afin de lutter efficacement contre cette délinquance, grand échec de notre société.
Les secteurs publics et habilités suivent en permanence 150.000 jeunes placés sous protection judiciaire, dont les trois quarts sont confiés au secteur habilité. Les deux secteurs assurent par ailleurs 80.000 mesures d'investigation (sommaire ou approfondie) sur un mineur ou une famille. Compte tenu des entrées et sorties des mineurs sous régime de protection judiciaire, les deux secteurs ont suivi 260.000 jeunes en 2000, non compris les mineurs confiés à des tiers dignes de confiance ou à des institutions non habilitées et non recensées par le Ministère (les services des conseils généraux, par exemple).
Le mode le plus fréquent de prise en charge est celui du milieu ouvert, qui représente 78 % des mesures en secteur habilité et 96 % des mesures en secteur public. Les mesures de placement sont retenues seulement lorsqu'une rupture entre le jeune et son milieu s'est, soit établie, soit doit intervenir dans l'intérêt du mineur. Le secteur habilité concentre 95 % des mesures de placement prononcées.
Cette répartition contrastée des mineurs et mesures entre secteurs public et habilité est stable depuis 1994 car elle résulte d'abord des compétences respectives de ceux-ci : le secteur public est seul compétent pour exercer les mesures pénales à l'égard des mineurs (hors placements et mesures de réparation).
Dès lors :
- Le secteur public suit prioritairement les mineurs délinquants et les « grands adolescents (plus de 13 ans) » : 92 % des jeunes dans le secteur public ont plus de 13 ans contre 43 % en secteur habilité.
- Cette prédominance de mineurs délinquants explique la forte proportion de garçons en secteur public (85 % contre 54 % en secteur habilité).
- De même, les jeunes de plus de 18 ans sont relativement nombreux en secteur public, notamment en raison de la poursuite de prise en charge dans le cadre pénal d'une infraction commise en qualité de mineur.
- L'essentiel des décisions pénales prononcées par les juges des enfants relèvent du milieu ouvert (contrôle judiciaire, liberté surveillée, T.I.G. et S.M.E....), ce qui a pour conséquence première de concentrer l'action du secteur public sur le milieu ouvert (96 % des mesures en secteur public contre 78 % en secteur habilité).
Le secteur habilité concentre son activité sur les mesures civiles d'assistance éducative et, à titre marginal, sur les mesures de réparations pénales (qui sont également suivies par le secteur public). Cela explique pourquoi le secteur habilité concentre 95 % des placements (qui sont principalement des mesures civiles) et 90 % des mesures de milieu ouvert civil.
Toutefois, l'importance relative des secteurs public et habilité au sein de chaque département varie fortement en fonction de la présence ou de l'absence de l'un ou l'autre des secteurs institutionnels de la protection de l'enfance.
La population prise en charge par les deux secteurs (y compris en centre de jour) passe de moins de 125.000 en 1991 à plus de 150.000 en 2001 (+ 20 % en 10 ans). La population hors centre de jour passe de moins de 135.000 en 1995 à près de 150.000 en 2001 (+ 11 %). Au sein de cette population, le secteur public suivait moins de 30.000 mesures (hors centre de jours) en 1991 contre presque 38.000 en 2001(+ 26 %). La progression du secteur habilité est de même ordre (plus de 91.000 en 1991 et moins de 113.000 en 2000 (+ 23 %).
Cette croissance comparable en pourcentage de l'activité des deux secteurs s'accompagne d'une évolution très différenciée des typologies de mineurs, ainsi que des secteurs à qui ils sont confiés :
- la population de mineurs sous protection judiciaire comportait 9 % de mineurs délinquants en 1991 et 19 % en 2000 ;
- les mineurs en danger, qui représentaient 87 % de l'effectif 1991, sont ramenés à 78 % de la population suivie en 2001 ;
- la part de jeunes majeurs reste faible et stable sur toute la période (3 % de l'effectif total dont 2,3 % de l'effectif du secteur public et 3,4 % de la population en secteur habilité en 2001). Ils sont fréquemment en placement/hébergement (14 % de la population hébergée).
L'accroissement de la population sous protection judiciaire tient donc principalement à l'augmentation de jeunes faisant l'objet de mesures pénales prononcées par les magistrats de la jeunesse. Ceux ci sont saisis de plus en plus souvent par les services de police et de gendarmerie où les faits élucidés mettant en cause des mineurs progressent de 23 % pour ces cinq dernières années.
La composition de la population des jeunes confiés au secteur habilité reste stable (95 % des jeunes lui sont confiés au titre de l'enfance en danger tandis que la part de mineurs délinquants reste insignifiante) alors que le secteur public concentre son activité en faveur des mineurs délinquants qui représentent 33 % de la population du secteur public en 1991 et 71 % en 2001 (soit + 146 %). Le secteur public confirme donc sa spécialisation autour d'un public plus difficile qui appelle des modes de prises en charges adaptés et des structures d'accueil plus typées.
Inversement, les mineurs en danger deviennent une population minoritaire en secteur public (- 51 % entre 1991 et 2001, représentant 62,5 % des mineurs en 1991 à 26,3 % en 2001). Autrement dit, ne serait-ce que pour éviter autant que faire se peut d'accueillir en un même lieu des mineurs délinquants et des mineurs en danger, il semble qu'une partie de l'enfance en danger, autrefois confiée au secteur public, a été transférée vers le secteur habilité. La croissance en volume de l'activité du secteur habilité est ainsi partiellement la conséquence de la croissance de la délinquance des mineurs et de sa prise en charge presque exclusive par le secteur public.
II.- LES MOYENS DE FONCTIONNEMENT
La réforme de l'organisation départementale de la P.J.J. lancée par la circulaire du 15 mai 2001 a pour objectif d'améliorer les conditions d'exercice des missions pour les services de la P.J.J. Partant du constat d'un cloisonnement très important entre les services et entre les fonctions éducatives, qui créait une discontinuité dans le parcours des jeunes de grande fragilité et d'un isolement des personnels, quatre objectifs principaux ont été dégagés :
- donner à l'ensemble des services de la P.J.J. qui travaillent sur un département, dans le cadre des Orientations Nationales Prioritaires, un cadre commun, le Projet Départemental, qui permettra d'élargir la palette des réponses et d'organiser la complémentarité entre secteur public, associatif et les autres acteurs du champ social ;
- mieux intégrer l'exercice des missions du Tribunal dans le dispositif départemental en favorisant les prises en charge pluri-disciplinaires des mesures et une meilleure prise en compte des territoires d'intervention ;
- mettre en place une organisation plus opérationnelle qui associe les dispositifs par fonction éducative (milieu ouvert, placement, insertion) et une plus grande implication sur le territoire, en appui aux Politiques Publiques de proximité ;
- renforcer l'animation institutionnelle, le soutien et l'accompagnement des professionnels.
En cours d'application, cette réforme doit être poursuivie et encouragée. Pour autant, elle ne saurait remplacée une réforme de plus grande envergure de l'ensemble des acteurs intervenant dans la protection des mineurs.
Ces crédits recouvrent les moyens de fonctionnement des services du secteur public (chapitre 34-34) et les dépenses informatiques (chapitre 34-05, article 50). Ils atteignaient 62,486 millions d'euros en loi de finances initiale pour 2002. Ces crédits avaient faiblement augmenté l'an dernier malgré la hausse importante des effectifs. En 2003, ils devraient atteindre 67,615 millions d'euros soit une augmentation de près de 8 %, soit un quasi doublement par rapport à l'évolution de l'an dernier.
Ces moyens nouveaux doivent permettre de :
- renforcer le dispositif de traitement des mineurs récidivistes (quartiers mineurs et création de centres fermés) : 0,894 millions d'euros ;
- développer la prévention de la récidive (milieu ouvert, classes relais,...) : 0,629 millions d'euros ;
- renforcer les ressources des services de formation : 0,987 millions d'euros ;
- accompagner les créations d'emplois : 0,497 millions d'euros.
Alors qu'ils avaient stagné autour de 6.000 entre 1985 et 1996, les effectifs de la PJJ sont passés de 6.145 en 1997 à 7.439 en 2002, soit une augmentation de 21 %.
Le projet de loi de finances pour 2003 prévoit la création de 314 emplois qui correspondent à la première année d'exécution de la loi d'orientation et de programmation pour la justice qui prévoit la création de 1.250 emplois sur les cinq prochaines années. On peut relever que ce chiffre représente plus d'1/5 des emplois prévus par la loi d'orientation. Le présent projet propose donc la création 180 éducateurs, 24 directeurs, 16 psychologues, 8 agents techniques d'éducation, 19 secrétaires administratifs, 8 assistant sociaux, 8 infirmiers, 29 adjoints administratifs, 20 attachés et 2 contractuels,
Ces créations d'emplois sont réparties, en fonction des objectifs inscrits dans la loi d'orientation. Elles correspondent pour 2003 à la mise en _uvre de trois objectifs majeurs, inscrits dans l'exposé des motifs de la loi de programme :
- offrir une prise en charge adaptée et renforcée pour les mineurs récidivistes ou violents lorsque les dispositifs traditionnels d'accueil dans les structures d'hébergement n'ont pas eu le résultat escompté ; la création des centres éducatifs fermés répond à cette demande de même qu'une participation importante des services éducatifs dans le suivi des jeunes incarcérés dans les quartiers mineurs (124 emplois au total) ;
- prévenir la récidive par une amélioration qualitative et quantitative de la prise en charge, en milieu ouvert notamment (128 emplois au total) ;
- mettre à niveau les services de formation et d'administration (62 emplois au total).
Les recrutements seront donc importants ces prochaines années. Cela doit être l'occasion d'un renouvellement des personnels de la PJJ dont le modèle traditionnel n'est plus adapté à la population qu'elle a désormais en charge. Il convient en effet de privilégier la compétence à partir d'une sélection plus adaptée et la professionnalisation grâce à des formations initiales davantage orientées vers les métiers et à une meilleure reconnaissance de l'expérience professionnelle.
Pour ce qui concerne plus particulièrement les éducateurs, la D.P.J.J. a d'ores et déjà engagé une réflexion sur les conditions permettant de sélectionner ses futurs agents, quel que soit leur parcours antérieur, sur leurs potentialités et leurs acquis professionnels. Cette réforme qui nécessite une modification statutaire est d'autant plus nécessaire que la situation démographique aidant, le recrutement dans la fonction publique ne sera sans doute pas aussi aisé demain qu'il ne l'est aujourd'hui. A titre d'exemple, en ce qui concerne les éducateurs, et bien que le nombre de postes offerts soit en constante augmentation depuis 1998, on constate un effritement significatif du nombre de candidatures spontanées. De 44 candidats pour un poste (session 1998), nous sommes passés à 16 candidats (session 2002).
En matière de recrutement, toutes les nouvelles modalités généralisées par la loi n° 2001-2 du 3 janvier 2001 sont introduites. Afin de privilégier les personnes ayant déjà une expérience, il est prévu l'accès au corps par la voie du troisième concours et par la voie du choix, la possibilité de la reconnaissance de l'expérience professionnelle en équivalence des conditions de titres ou diplômes pour faire acte de candidature au concours externe. Le concours externe pourrait être également organisé sur titres.
Deux provisions sont inscrites en faveur des réformes statutaires des directeurs (révision de la grille indiciaire) et des agents techniques d'éducation. Le montant des provisions inscrit est de 0,25 million d'euros pour la réforme statutaire des directeurs et de 0,15 million d'euros pour la réforme statutaire des agents techniques d'éducation. Ces deux provisions s'ajoutent aux deux provisions déjà obtenues en loi de finances initiale pour 2002.
Les autres catégories de personnels bénéficieront aussi de pyramidages statutaires et de transformations d'emplois liées aux besoins des services pour un montant total de 0,456 million d'euros dont la transformation de 28 emplois d'agents administratifs en 28 emplois d'adjoints administratifs. Cette dernière mesure constitue la troisième tranche du plan de transformation des emplois d'agents administratifs en adjoints administratifs initié en 2001.
Au niveau indemnitaire, les crédits nécessaires à la mise en _uvre du protocole indemnitaire de décembre 2001 sont inscrits, soit 2,3 millions d'euros. Par ailleurs, l'indemnité spécifique d'hébergement est revalorisée (0,546 million d'euros).
III.- LES STRUCTURES D'ACCUEIL ET LA POLITIQUE D'ÉQUIPEMENT
La PJJ disposera grâce au projet de loi de finances pour 2003 de 26 millions d'autorisations de programme (dont 11 millions pour l'application de la loi de programmation). Les crédits de paiement de 6,2 millions d'euros se répartissent en 4 millions pour les services votés et 2,2 millions pour les mesures nouvelles (dont 1,1 million pour la création des centres éducatifs fermés).
La D.P.J.J. dispose actuellement d'un parc immobilier d'une superficie d'environ 360.000 m² correspondant à plus de 790 implantations réparties sur tout le territoire. Son activité est regroupée dans 535 entités administratives distinctes, composées de services éducatifs auprès de tribunal, de centres d'action éducative comprenant des centres éducatifs renforcés, de foyers d'action éducative, de centres de placement immédiat et d'administrations territoriales (Directions Départementales et Directions Régionales).
La configuration de ce patrimoine a beaucoup évolué au cours de ces 20 dernières années. Depuis 1980, l'évolution des méthodes pédagogiques a nécessité une transformation du patrimoine immobilier affecté à la P.J.J. Les grands internats, dont les coûts d'entretien et de fonctionnement élevés ne se justifiaient plus, ont été progressivement remplacés par des structures de petites ou moyennes dimensions, insérées en milieu urbain et assurant une ou plusieurs fonctions (hébergement, milieu ouvert, formation professionnelle).
De 1995 à 1999, les opérations d'équipement de la P.J.J. se sont situées dans le cadre fixé par la Loi de programme relative à la Justice concernant notamment l'amélioration des conditions de prise en charge en hébergement par la création de nouveaux foyers, la rénovation de locaux vétustes, le développement de services de milieu ouvert et de centres d'activités de jour, avec un effort particulier pour la mise aux normes de sécurité.
Par ailleurs, la P.J.J. a dû répondre aux exigences fixées par les orientations gouvernementales, arrêtées à l'issue du conseil de sécurité intérieure des 8 juin 1998 et 27 janvier 1999 en matière de lutte contre la délinquance des mineurs. Ces dispositions visaient au renforcement des prises en charge de jeunes délinquants en hébergement et en centres d'activités de jour, à l'immédiateté et la continuité de la prise en charge des mineurs les plus difficiles. A ce titre, la P.J.J. est engagée dans la réalisation d'un programme de création de 50 centres de placement immédiat (CPI) et de 100 centres éducatifs renforcés (CER).
Pour ce faire, la P.J.J. a mis en oeuvre, dès 1999 à partir de locations, avec poursuite de 2000 à 2002 sur un programme d'acquisition et travaux d'adaptation, la création de nouvelles unités d'hébergement collectif ou la transformation de services existants, répondant au cahier des charges des C.P.I. et des C.E.R. L'implantation de ces nouveaux services se réalise en tenant compte de la géographie prioritaire des 26 départements dits très sensibles.
Depuis fin 2000 - début 2001, la P.J.J. est également engagée par la signature des contrats de plan État-Régions couvrant la période 2000-2006, pour un montant de plus de 22,4 millions d'euros. Cet engagement porte essentiellement, en matière d'équipement, sur la réalisation de centres d'insertion scolaire et professionnelle en partenariat avec les collectivités territoriales. En particulier, dans la région Ile de France, l'engagement de la P.J.J., dans ce domaine est de 9 millions d'euros sur la durée du plan et a permis au cours des 3 premières années, le lancement d'opérations de création ou d'adaptation de 6 centres d'insertion scolaire et professionnelle, 5 autres sont programmés.
Les perspectives pour les années à venir tiennent compte des nouvelles dispositions inscrites dans la Loi d'Orientation et de Programmation pour la Justice qui prévoit sur une durée de 5 ans, la création de centres éducatifs fermés afin de pouvoir disposer de 600 places au total, secteur public et associatif confondus. Cette mesure s'entend soit par extension de capacité des centres éducatifs renforcés existants accueillant actuellement 5 à 6 jeunes, soit par création de structures nouvelles. Ainsi sur la durée de la loi de programme, le secteur public de la P.J.J. créera des C.E.F., sur la base de 6 à 10 places par unité, pour un montant en investissement de 55 millions d'euros.
Les C.P.I. ouverts depuis le lancement du programme en 1999 sont au nombre de 43, dont 3 sous la responsabilité du secteur associatif habilité. L'ouverture de 7 CPI (6 créations et 1 transformation) est programmée pour 2002/2003.
Depuis le lancement du programme jusqu'en mars 2002, 2.453 mineurs ont été pris en charge dans les C.P.I. Malheureusement, les CPI n'ont pas été utilisés conformément à leur vocation : face à une pénurie de places dans les foyers ou dans les centres, les magistrats utilisent les instruments dont ils disposent sans que ceux-ci soient parfaitement adaptés.
L'évaluation produite par le Cabinet d'Ingénierie Sociale (CIRESE) mettait en avant les conséquences négatives du mode de gestion des personnels induit par les règles de la Fonction Publique ; recrutement par la voie unique du concours, formation initiale "généraliste" et surtout affectations des éducateurs sur un mouvement annuel, centralisé et basé essentiellement sur les points dus à l'ancienneté...
Ce mode de gestion ne permet pas de constituer des équipes sur un projet partagé et dans un ancrage local, ce qui explique la différence avec les C.E.R. mis en place avec le préalable d'un projet pédagogique élaboré en commun par le collectif de personnels et affectation sur une base de volontariat.
La généralisation aux C.P.I. de ce que le CIRESE appelle les « principes de l'éducation renforcée » passe donc par des réformes de structure à la P.J.J., certaines préconisations du rapport dépassant la seule compétence de cette dernière. C'est dans cet esprit que des perspectives de gestion nouvelle sont en cours d'élaboration. La D.P.J.J. va ainsi s'inscrire dans l'espace ouvert par la loi de modernisation de la Fonction Publique de janvier 2001 en diversifiant les modalités de recrutement. Un projet de décret d'application est en cours d'élaboration.
Par ailleurs, le remplacement des éducateurs en congés maladie ou maternité se fera plus rapidement grâce à des recrutements d'éducateurs sur contrat à durée déterminée. La question de la déconcentration de la gestion des personnels est actuellement à l'étude pour permettre une meilleure adéquation entre les situations des personnels et leur affectation sur un lieu professionnel. Enfin, une réforme de la formation initiale des éducateurs sera mise en place à la rentrée prochaine.
La réalisation du programme de création de 100 C.E.R. décidé, par le Conseil de la Sécurité Intérieure (C.S.I.) de janvier 1999, se poursuit. Elle se terminera courant 2003.
Fin 1998, 13 structures avaient été ouvertes par le secteur associatif. Depuis de nouveaux centres ont été ouverts: 1999 : 7 centres ; 2000 : 14 centres ; 2001 : 9 centres ; 2002 : 6 centres (au 31 juillet). Depuis 1996, il y a donc eu la création de 59 centres - 4 ont été fermés et 1 connaît actuellement une suspension d'activité qui risque d'être définitive. Au 1er juillet 2002, 54 C.E.R. fonctionnent (sur 62 créés).
Les C.E.R. ont pour mission de prendre en charge les mineurs très fortement ancrés dans la délinquance, particulièrement les multirécidivistes, ou en situation de grande marginalisation. Cette prise en charge s'effectue dans le cadre de programmes d'activités intensifs avec un encadrement éducatif permanent; elle a pour objet de mettre les mineurs en situation de rupture par rapport à leur mode de vie habituel et de préparer les conditions de leur réinsertion.
La mise en place de ce programme par la D.P.J.J. se fait par l'ouverture de nouvelles structures dans le secteur public, ou la validation de projets présentés par le secteur associatif habilité par le Ministère de la Justice. Le secteur public de la P.J.J. gère ainsi 9 C.E.R. qui fonctionnent sur la base d'un encadrement de 8 personnes (7 éducateurs et un Chef de service) et ont une capacité d'accueil de 6 à 7 mineurs chacun).
Le secteur associatif habilité justice gère actuellement 45 C.E.R. qui fonctionnent compte tenu de l'application de la législation du travail et de la convention collective qui régit ce secteur, sur la base de 10 à 11 personnels (dont 1 chef de service et 0,5 psychologue), pour une capacité d'accueil de 6 à 7 mineurs pour chaque C.E.R.
Les perspectives de création sont les suivantes, prioritairement dans le secteur associatif habilité : 13 projets ont été validés par le comité national de pilotage et sont en cours de montage administratif et 30 projets sont en préparation avant passage en comité de pilotage.
L'ouverture des tous ces centres devrait être effective, échelonnée à partir de fin 2002 et sur l'ensemble de l'année 2003.
Les principales difficultés tiennent aux réactions souvent négatives de l'environnement local des sites d'implantation des centres et aux problèmes rencontrés pour constituer des équipes homogènes et expérimentées, aptes à prendre en charge des mineurs aux comportements très difficiles.
Pour le secteur public, cette dernière difficulté est aggravée par ses modes de gestion propres, déterminés par les règles de la fonction publique, qui fragilisent les expériences de C.E.R. Ainsi lorsqu'il y a une défaillance de personnels, même en nombre restreint, le mouvement d'affectation étant annuel et centralisé, la structure se retrouve dans l'impossibilité de fonctionner jusqu'à la rentrée suivante. Il y a également une difficulté spécifique à constituer des équipes volontaires, avec des personnels qui ne sont pas tous originaires de la région d'implantation du centre, contrairement au secteur associatif habilité qui peut recruter en premier lieu un porteur de projet, les autres personnels faisant l'objet d'une embauche le plus souvent au niveau local et en conformité avec le projet retenu.
Ce manque de souplesse, pour des raisons qui relèvent le plus souvent des actuelles règles de la fonction publique a été relevé par le cabinet CIRESE dans son "évaluation des dispositifs P.J.J. de prise en charge des mineurs multirécidivistes ou en grande difficulté". Les nouveaux champs de réformes ouverts par la Loi de Modernisation de la Fonction Publique de janvier 2001 devraient apporter des améliorations significatives en termes de recrutement, de formation et d'affectations des personnels.
Les C.E.F. s'inscrivent dans une palette de réponses graduées en direction des mineurs délinquants comme le dernier maillon avant la mise en détention.
Les C.E.F. permettront le placement de mineurs délinquants, de 13 à 18 ans, dans une structure très encadrée avec un contrôle judiciaire ou un sursis d'épreuve qui les contraindra à respecter les obligations du placement sous peine d'une mise en détention provisoire.
Ces centres fonctionneront avec des activités quotidiennes à forte dimension d'insertion sociale et professionnelle. Certains pourront être spécialisés sur la prise en charge des publics de 13-16 ans avec un accompagnement scolaire permanent défini et mis en _uvre en partenariat étroit avec l'E.N.
Le programme pour les cinq ans à venir prévoit l'ouverture de 600 places dans des C.E.F. Ceux-ci seront mis en place par le secteur public de la P.J.J. et par le secteur associatif habilité.
Le calendrier pour 2003 prévoit la création de 19 centres ; la définition des contenus et les rythmes de la mise en place sur les cinq ans à venir seront précisés après l'élaboration d'un cahier des charges qui fournira le cadre concret à partir duquel seront lancés les projets dans le secteur public et dans le secteur associatif.
Une 1ère phase expérimentale doit être lancée à la fin de l'année 2002. Elle portera sur au moins trois centres.
LES JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES
Les crédits des juridictions administratives, Conseil d'État compris, atteindront 152,99 millions d'euros, en hausse de 6,8 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2002. 100 emplois seront créés, dont 42 emplois de magistrats, 46 emplois d'agents de greffe dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel et 12 emplois au Conseil d'État. Il s'agit d'une première application de la loi d'orientation et de programmation pour la justice dont l'un des objectifs est de ramener à un an les délais de jugement devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel. La loi prévoit ainsi la création de 480 emplois budgétaires, dont 210 emplois de magistrats et 270 emplois d'agents de greffe, pour un coût total de 73,47 millions d'euros. Par ailleurs, 531.216 euros sont inscrits au projet de loi de finances pour 2003 dans les crédits de vacation afin de financer l'embauche de 170 assistants de justice dans les juridictions administratives comme l'ont autorisé les articles 37 et 38 de la loi d'orientation et de programmation.
I.- UNE ACTIVITÉ EN AUGMENTATION CONSTANTE
Les juridictions administratives, en 2001, ont été saisies au total de 151.371 affaires et en ont réglé 146.254. Le nombre d'affaires réglées est donc inférieur aux affaires enregistrées ce qui entraîne une augmentation du stock. Celui-ci reste donc très important et entraîne des délais de jugement tout à fait anormaux. Par ailleurs, la situation varie énormément selon le degré de juridiction mais aussi entre les juridictions d'un même niveau.
Ainsi, ce sont les Cours administratives d'appel qui sont aujourd'hui complètement embouteillées suite au transfert de compétences du Conseil d'État. Celui-ci a pu réduire ses délais de jugement mais au détriment des premiers niveaux de juridictions, et en particulier des cours d'appel, dont les délais se sont considérablement allongés. Ainsi, pour le justiciable, qui fréquente plus le tribunal administratif que le Conseil d'État, l'évolution est négative. Un rééquilibrage des moyens entre les niveaux de juridiction est indispensable.
TRIBUNAUX ADMINISTRATIFS | |||||||||
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 (1) | |
Affaires enregistrées brutes |
94.774 |
106.434 |
101.575 |
106.985 |
132.918 |
120.567 |
126.410 |
134.560 |
57.945 |
Affaires enregistrées nettes |
88.949 |
97.025 |
95.246 |
101.590 |
123.834 |
117.429 |
113.059 |
123.354 |
56.116 |
Affaires jugées (net) |
82.870 |
90.103 |
91.371 |
96.367 |
104.615 |
112.206 |
118.991 |
120.773 |
61.713 |
Affaires en stock (net) |
171.311 |
179.874 |
183.641 |
188.653 |
207.920 |
209.247 |
201.534 |
203.303 |
196.781 |
Affaires par magistrat (net) |
189 |
193 |
188 |
191 |
211 |
214 |
196 |
221 |
|
Délai moyen théorique d'élimination des stocks |
2 ans, 1 mois |
2 ans |
2 ans |
1 an, |
2 ans |
1 an, |
1 an, |
1 an, 8 mois |
|
(1) au 31/06/2002 Source : Conseil d'État. |
Le nombre d'affaires enregistrées en données nettes s'est accru de près de 76 % entre 1990 et 2001. Cependant, si la progression a été à peu près constante de 1990 à 1998, une inversion de la tendance depuis 1998 a semblé se dessiner en 1999. Elle était illusoire : il s'agissait simplement de la conséquence du « pic » conjoncturel lié à l'opération de régularisation des titres de séjour des étrangers : l'année 1999 marque ainsi un recul du volume d'affaires enregistrées de 5,2 % (par rapport à 1998) qui masque une progression de près de 16 % par rapport à 1997. Idem pour 2000 : la baisse de 3,7 % affichée cache une progression de 11,3 % par rapport à 1997. En 2001, on a assisté à une reprise de l'augmentation des requêtes enregistrées dans les tribunaux administratifs qui ne s'explique que partiellement par la tenue d'élections locales cette année là.
Parallèlement, le nombre d'affaires jugées s'accroît lui aussi de façon régulière depuis 1990 et a plus que doublé en onze ans. Cette évolution favorable reflète à la fois les effets du renforcement des effectifs et l'amélioration de la productivité au sein des juridictions. Pour la première fois, le ratio des affaires jugées sur les affaires enregistrées a dépassé en 2000 les 100 % atteignant 105 % soit une augmentation de 9 points par rapport à 1999. Toutefois, si la progression du nombre d'affaires demeure en 2001, celle-ci d'est réduite à 1,5 % et les tribunaux administratifs ayant dû faire face à une forte reprise des rentrées, le ratio des affaires jugées sur les affaires enregistrées a été ramené à 98 % cette année.
Aussi, le stock d'affaires en cours, qui avait enregistré pour la première fois une baisse de près de 4 % en 2000, inversant ainsi la tendance observée depuis une décennie, a renoué avec cette hausse en 2001 en progressant de 1 %. Ce stock demeure donc trop important au regard de la capacité de jugement des tribunaux et le délai moyen de jugement reste de 1 an et 8 mois, soit une baisse de 2 mois par rapport à 1999 et de 10 mois par rapport à 1990. Des progrès importants ont été faits mais ils restent encore insuffisants.
COURS ADMINISTRATIVES D'APPEL | |||||||||
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 (1) | |
Affaires enregistrées brutes |
9.435 |
12.121 |
15.553 |
14.350 |
17.135 |
18.633 |
17.803 |
17.468 |
8.277 |
Affaires enregistrées nettes |
7.804 |
9.057 |
12.168 |
12.477 |
14.330 |
16.056 |
16.540 |
15.375 |
7.652 |
Affaires jugées (net) |
5.786 |
6.110 |
6.317 |
7.461 |
9.199 |
11.390 |
12.906 |
12.928 |
7.115 |
Affaires en stock (net) |
9.392 |
12.269 |
18.383 |
24.016 |
29.334 |
33.798 |
37.723 |
40.073 |
40.365 |
Affaires par magistrat (net) |
61 |
65 |
64 |
68 |
75 |
84 |
94 |
84 |
|
Délai moyen de jugement |
1 an 7 mois |
1 an |
2 ans |
2 ans |
2 ans |
2 ans |
2 ans, |
3ans, 1 mois |
|
(1) au 31/06/2002 Source : Conseil d'État. |
Depuis 1992, les cours administratives d'appel connaissent, en raison du transfert échelonné de l'appel des recours pour excès de pouvoir, qui s'est achevé en 1995, une progression des entrées sans précédent : le nombre annuel d'affaires enregistrées a triplé entre 1992 et 2000, et l'augmentation était encore de 3 % en 2000. Cette tendance s'est inversée pour la première fois en 2001, avec une diminution de 7 % du nombre des entrées.
Conjointement, le volume des affaires traitées a plus que doublé entre 1992 et 2001 pour se stabiliser autour de 13.000 affaires. Malheureusement, cette tendance à la hausse s'est interrompue ces deux dernières années puisque le nombre d'affaires jugées par les cours d'appel n'a augmenté que de 0,2 % en 2001, soit la hausse la plus faible depuis 1995. L'effet amplificateur dû à la mise en service des cours d'appel de Marseille et de Douai semble épuisé ce qui est particulièrement inquiétant vu l'ampleur du stock.
En effet, le rapport des affaires traitées sur les affaires enregistrées reste préoccupant : il s'établit à 78 % seulement en 2000, et à 84 % en 2001, amélioration résultant essentiellement de la réduction du nombre d'affaires enregistrées. Par conséquent, et malgré l'amélioration de ce rapport depuis 1999, les stocks continuent de s'accroître par effet mécanique. En 2001, le stock global d'affaires en instance représente près du triple de leur capacité de jugement annuelle, si bien que le délai théorique d'élimination du stock (3 ans et 1 mois) ne s'améliore pas de façon significative.
ÉVOLUTION DU CONTENTIEUX TRAITÉ PAR LES JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES | |||||||||
CONSEIL D'ÉTAT | |||||||||
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 (1) | |
Affaires enregistrées brutes |
9.197 |
12.447 |
8.091 |
8.314 |
10.232 |
12.747 |
12.800 |
12.793 |
7.865 |
Affaires enregistrées nettes |
8.743 |
9.162 |
7.527 |
7.193 |
8.427 |
12.330 |
12.274 |
13.642 |
7.351 |
Affaires jugées (net) |
11.314 |
10.598 |
11.684 |
11.228 |
9.450 |
10.988 |
12.236 |
12.553 |
6.963 |
Affaires en stock (net) |
19.403 |
18.016 |
13.756 |
10.385 |
8.479 |
10.067 |
10.159 |
10.227 |
10.281 |
Affaires par magistrat (net) |
135 |
120 |
101 |
98 |
81 |
85 |
95 |
97 |
|
Délai moyen de jugement |
1 an |
1 an |
1 an |
1 an |
1 an |
11 mois |
10 mois |
10 mois |
(1) au 31/06/2002
Après une forte progression des affaires enregistrées en 1995, suivi d'un fléchissement en 1996 et 1997, le Conseil d'État connaît une nouvelle augmentation des entrées en 1998 et surtout en 1999 (+ 46 %), liée notamment au contentieux des visas qu'il connaît en premier ressort, et à celui des reconduites à la frontière dont il est le juge d'appel. Depuis 3 ans, le nombre des affaires enregistrées reste à un niveau élevé (plus de 12000 affaires par an) en raison de l'importance du contentieux des étrangers. L'année 2001 quant à elle, a été marquée par le contentieux des élections municipales et cantonales du mois de mars et par l'entrée en vigueur au 1er janvier 2001 des dispositions issues de la loi du 30 juin 2000 relative au référé administratif.
Face à cette évolution, le volume des affaires jugées a progressé de 35,43 % entre 1990 et 2001, ce qui a permis de faire régulièrement baisser le délai théorique d'élimination du stock de 2 ans et 3 mois à 10 mois. Si on avait pu constater en 1999 un déficit des sorties par rapport aux entrées pour 1300 affaires, on enregistre en 2000 et en 2001 un nombre d'affaires jugées en net augmentation qui équilibre le nombre d'entrées.
Ainsi, le stock, qui avait augmenté (+ 18,73 %) en 1999, pour la première fois depuis 1994 et le transfert de compétences aux cours d'appel, s'est stabilisé en 2000 et 2001. Il reste donc inférieur à la capacité annuelle de jugement et le délai théorique d'élimination du stock passe de 11 à 10 mois. En outre, ce stock s'est rajeuni et comprend un moins grand nombre d'affaires anciennes. En 2001, 88 % des affaires en instance sont enregistrées depuis moins de deux ans.
II.- DES MOYENS DE FONCTIONNEMENT RENFORCÉS
Pour faire à l'accroissement du contentieux durant la dernière décennie, les juridictions administratives ont bénéficié d'un important renforcement de leurs moyens de fonctionnement tant en personnels qu'en moyens matériels, renforcement qu'a confirmé et amplifié la loi d'orientation et de programmation pour la justice.
Les magistrats des juridictions administratives sont recrutés de trois manières différentes : par le biais de l'École nationale d'administration, par le tour extérieur et par un concours complémentaire. Par ailleurs, un recrutement particulier destiné à pourvoir les cours administratives d'appel lors de leur constitution avait été organisé.
L'article 7 de la loi n° 86-14 du 6 janvier 1986 fixant les règles garantissant l'indépendance des membres des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel prévoit que les magistrats administratifs sont recrutés parmi les anciens élèves de l'École nationale d'administration. Cette voie concerne moins du tiers des membres des tribunaux et cours administratifs.
Depuis 1986, un tour extérieur est prévu pour les conseillers de deuxième et de première classe. Il est ouvert à raison d'un poste sur trois pour les conseillers de deuxième classe et d'un poste sur sept pour les conseillers de première classe aux fonctionnaires de l'État et de la fonction publique territoriale appartenant à un corps de catégorie A justifiant de dix ans de service public et aux magistrats de l'ordre judiciaire. Une trentaine fonctionnaires en détachement sont venus, en outre, renforcer les effectifs des juridictions administratives.
Le législateur a régulièrement autorisé des recrutements exceptionnels afin de faire face à la croissance régulière du contentieux. La loi n° 97-276 du 25 mars 1997 portant dispositions statutaires relatives au corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel a adapté ces dispositions à la réforme du statut des magistrats des tribunaux et cours. 40 % des magistrats des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel sont issus de ce recrutement extérieur.
Le tableau ci-dessous retrace l'évolution des modes de recrutements depuis 1994.
LES VOIES DE RECRUTEMENT DES CONSEILLERS DE COURS ADMINISTRATIVES D'APPEL (1994-2001) | |||||||
Année |
École nationale d'administration |
Tour |
Recrutement complémentaire |
Détachement (1) |
Loi n°70-2 |
Total |
|
1995 |
10 |
7 |
18 |
19 |
2 |
56 | |
1996 |
10 |
6 |
17 |
17 |
2 |
52 | |
1997 |
9 |
6 |
19 |
16 |
2 |
52 | |
1998 |
12 |
6 |
20 |
23 |
3 |
64 | |
1999 |
12 |
7 |
19 |
21 |
2 |
61 | |
2000 |
11 |
6 |
17 |
14 |
2 |
51 | |
2001 |
11 |
10 |
23 |
18 |
2 |
64 | |
2002 |
11 |
9 |
26 |
10 |
3 |
59 | |
(1) De 1995 à 1999, les 71 magistrats recrutés à titre temporaire au titre de la loi de programme Source : Conseil d'État. |
Ainsi, il convient de relever que le nombre de recrutements demeure relativement élevé depuis 1994. L'essentiel de ces recrutements a été réalisé sur la base de recrutements complémentaires autorisés par des textes législatifs spéciaux ou par le biais de détachements. De fait, le principe selon lequel les magistrats sont recrutés parmi les élèves de l'École nationale d'administration a été mis à mal par les besoins des juridictions et par la stabilité de la taille des promotions de l'École.
De 1998 à 2003 on relève une accélération des créations d'emplois de magistrats avec 205 créations contre 92 entre 1991 et 1997. Parallèlement, 265 emplois d'agents de greffe ont été créés entre 1991 et 1997, auxquels sont venus s'ajouter 231 nouveaux emplois entre 1998 et 2002.
Ces agents se répartissent ainsi :
Conseil d'État |
Tribunaux administratifs |
||||||
Membres |
Personnels |
Effectif total |
Magistrats |
Agents de greffe |
Effectif total |
Total CE, TA et CAA | |
1998 |
217 |
317 |
534 |
662 |
927 |
1.589 |
2.123 |
1999 |
217 |
325 |
542 |
683 |
959 |
1.642 |
2.184 |
2000 |
217 |
330 |
547 |
723 |
997 |
1.720 |
2.267 |
2001 |
217 |
336 |
553 |
764 |
1.040 |
1.804 |
2.357 |
2002 |
216 |
341 |
557 |
804 |
1.080 |
1.884 |
2.441 |
2003 |
216 |
353 |
563 |
846 |
1.126 |
1.972 |
2.541 |
On constate donc que si les effectifs totaux ont augmenté de 40 % entre 1991 et 2001, sur la même période, le nombre total d'affaires enregistrées au Conseil d'État et dans les juridictions administratives a augmenté de 70 % et le nombre de décisions rendues de 80 %.
Le projet de loi de finances pour 2003 prévoit la création de 88 postes dont 42 emplois de magistrats et 46 emplois d'agents de greffe. Ces créations de postes de magistrats se répartissent de la manière suivante :
· 1 président HED, pour présider un tribunal administratif dont le niveau d'activité justifie la création d'une 5ème chambre (probablement le tribunal administratif de Strasbourg) ;
· 2 présidents HEC, pour créer une nouvelle chambre dans une cour administrative d'appel et une nouvelle section au tribunal administratif de Paris ;
· 8 présidents HEBbis, pour renforcer l'encadrement dans les tribunaux administratifs (vice-président au tribunal administratif élevé à 5 chambres, vice-président de section au tribunal administratif de Paris), pour accroître le nombre d'assesseurs dans les cours administratives d'appel et poursuivre la mise en place des nouvelles procédures d'urgence ;
· 22 premiers conseillers, pour poursuivre la mise en place des nouvelles procédures d'urgence, permettre la création de nouvelles chambres dans les cours administratives d'appel et répondre aux dispositions de plus en plus nombreuses imposant la présence de magistrats administratifs dans les commissions administratives ;
· 9 conseillers, pour créer de nouvelles chambres dans les tribunaux administratifs.
Pour être pleinement efficace, l'accroissement du nombre de magistrats doit être accompagné d'un renforcement continu des greffes et des moyens de fonctionnement.
En 1995, le ratio personnel de greffe/magistrat était de 1,39. Il est de 2,1 pour les chambres régionales des comptes et de 3 pour les juridictions judiciaires. La loi de programme de 1995 prévoyait de porter ce ratio à 1,5. Ce ratio est aujourd'hui de 1,34 ; malgré des créations de postes importantes, celles-ci sont donc encore insuffisantes.
- Tribunaux administratifs et cours administratives d'appel
De 1995 à 2000, 154 emplois de greffe ont été créés, auxquels s'est ajouté le transfert de 10 emplois en provenance du ministère de l'intérieur, pour accompagner le transfert de charges résultant de la modification des modalités de taxation des commissaires enquêteurs, ce qui a porté les effectifs des greffes à 997 en 2000.
Année |
Effectifs budgétaires |
Effectifs réels sur postes budgétaires |
1997 |
895 |
857 |
1998 |
927 |
898 |
1999 |
959 |
928 |
2000 |
997 |
988 |
2001 |
1040 |
1003 |
2002 |
1080 |
1065 |
Le projet de loi de finances pour 2003 prévoit la création de 46 emplois d'agents de greffe dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel.
- Conseil d'État
Année |
Effectifs budgétaires |
Effectifs réels sur postes budgétaires |
1997 |
309 |
284 |
1998 |
317 |
292 |
1999 |
325 |
296 |
2000 |
330 |
300 |
2001 |
336 |
307 |
2002 |
341 |
322 |
Pour 2001, le nombre de créations a été limité à 6. Pour 2002, il s'est élevé à 5 emplois et 10 emplois supplémentaires sont prévus dans le projet de loi de finances pour 2003.
Les nouvelles dispositions statutaires, issues de la loi n°97-276 du 25 mars 1997 ont permis des améliorations significatives. Le statut actuel comporte une succession de grades simplifiée plus en rapport avec l'organisation des juridictions administratives. Le déroulement de carrière a été facilité par la réduction du nombre de grades. L'échelonnement indiciaire du grade de premier conseiller a été revalorisé. Ces avancées très positives ne doivent pas masquer certaines difficultés qui subsistent pour le déroulement de carrière des magistrats débutants. Certes, les conseillers de tribunal administratif, issus du concours interne et du 3ème concours de l'E.N.A. bénéficient désormais d'un reclassement indiciaire dans le corps des tribunaux administratifs plus favorable qu'auparavant. Mais la réforme n'a pas permis d'améliorer la situation des magistrats issus du concours externe de l'E.N.A.
En dépit de ces difficultés, les nouvelles dispositions statutaires, ainsi que la redéfinition des grandes lignes du régime indemnitaire, ont été bien accueillies par les membres du corps, qui ont été sensibles à l'intérêt porté par les pouvoirs publics à la juridiction administrative, à l'heure où celle-ci est de plus en plus sollicitée par les justiciables.
Les nouvelles dispositions statutaires expliquent en grande partie que le corps des T.A. et des C.A.A. soit devenu plus attractif puisque, contrairement aux années antérieures à 1998, les postes offerts à la sortie de l'E.N.A. ont été pourvus en totalité et que le nombre de demandes de détachement dans le corps ait fortement progressé. Cependant, les efforts méritent d'être poursuivis, notamment sur le plan indemnitaire, afin de conserver au corps ce caractère attractif. A ce titre, la loi d'orientation et de programmation pour la Justice prévoit une amélioration du régime indemnitaire des membres du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, afin de garantir à ceux-ci le même niveau de rémunération que les corps comparables issus de l'E.N.A.
Depuis la création des tribunaux administratifs en 1953, la gestion des magistrats, comme celle des agents de greffes, était assurée par le ministère de l'intérieur. Depuis le 1er janvier 1991, une distinction est faite entre la gestion des emplois qui relève exclusivement du Conseil d'État, et la gestion des personnels, qui est assurée conjointement avec le ministère de l'intérieur.
Ainsi la création des emplois de greffe et leur gestion financière appartiennent au Conseil d'État qui définit les besoins et répartit les dotations nécessaires. La répartition des emplois entre les différentes juridictions est arrêtée par le Conseil d'État. En revanche, les agents des greffes appartiennent à des corps du ministère de l'intérieur. Ainsi les procédures pour l'arrivée dans une juridiction administrative pour les positions statutaires ou pour le déroulement de la carrière sont celles régissant les personnels du ministère de l'intérieur. On peut se demander si cette dualité de gestion a encore un sens.
Pour les membres du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, un nouveau régime d'attribution des indemnités a été mis en place depuis le 1er janvier 1998. Les indemnités se décomposent désormais en deux parts : une part fixe forfaitaire calculée en fonction de l'indice réel du magistrat et non plus de l'indice moyen du grade comme auparavant, et une part modulable dont l'attribution est décidée par le chef de juridiction, en fonction du travail fourni par le magistrat. Par ailleurs, au 1er juillet 2002, le taux de primes des magistrats a été porté de 37 % à 41 %, dont 36 % versés mensuellement. Des réévaluations sont prévues dans le cadre de la loi d'orientation et de programmation pour la Justice, afin d'aligner les indemnités sur celles des corps comparables issus de l'ENA. Ainsi, le taux de primes des magistrats devrait passer à 45 % au 1er juillet 2003 puis à 47.75 % au 1er juillet 2004.
Par ailleurs, un décret du 5 novembre 2001 a institué une nouvelle bonification indiciaire en faveurs des membres du Conseil d'État exerçant des responsabilités supérieures. Un décret identique a été pris pour les membres des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel.
Pour 2003, les principales mesures indemnitaires concernent les ajustements de la dotation relative à l'indemnité forfaitaire versée aux membres des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, la revalorisation de leur régime indemnitaire et l'ajustement des indemnités versées aux agents de greffe des juridictions administratives de province.
Pour permettre une gestion plus souple de l'emploi des crédits informatiques du Conseil d'État, ils sont intégrés dans le chapitre des dépenses de fonctionnement du Conseil d'État (chapitre 34-51). Un article de prévision 30 est donc créé tandis que l'article 31 du chapitre 34-05 « Dépenses d'informatique et de télématique » est supprimé.
Dans le cadre de la loi d'orientation et de programmation pour la justice (2003-2007), il est prévu que des moyens nouveaux seront affectés au fonctionnement des juridictions administratives. Près de 10 millions d'euros au total sur 5 ans devraient ainsi venir abonder les crédits de fonctionnement.
Dans un premier temps, le projet de loi de finances pour 2003 prévoit une augmentation de 1,06 million d'euros du budget de fonctionnement du Conseil d'État et des juridictions administratives (dont 482.939 euros pour le Conseil d'État et 576.225 euros pour les juridictions administratives). Celui-ci s'élèvera alors à 15,235 millions d'euros. Ces crédits nouveaux permettront de financer des opérations nouvelles ou d'augmenter certains postes de dépenses aujourd'hui sous dimensionnés par rapport à l'état et à l'activité des juridictions administratives : relogement du service de la formation du Conseil d'État, améliorations en matière de documentation juridique, de parc immobiliers, de maintenance des nouvelles installations de sécurité au tribunal administratif de Bastia, prise en compte des besoins nouveaux en matière de mobiliers de bureau, renforcement des moyens de communication etc... ;
MOYENS MATÉRIELS DES JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES (lois de finances initiales) (1) (en millions d'euros) | ||||||||
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 |
2003 (PLF) |
|||
Informatique Chapitre 34-05, article 31 |
4,53 |
4,11 |
4,41 |
4,88 |
5,107 |
0 | ||
Fonctionnement Chapitre 34-51 |
12,68 |
12,76 |
12,91 |
13,02 |
14,18 |
21,17 | ||
17,21 |
16,87 |
17,32 |
17,89 |
19,28 |
21,17 | |||
(1) hors commission pour la transparence financière de la vie politique et transfert consécutif à la suppression de la franchise postale. Source : Conseil d'État. |
Après un premier schéma directeur 1995-1998, dominé par la mise en place de l'application « SKIPPER », un nouveau schéma directeur a été défini pour la période 2000-2003. Il a été décidé, dans ce cadre, de finaliser les outils de gestion des activités contentieuses et consultatives, de moderniser et développer les outils de gestion interne et développer les systèmes de communication. L'année 2002 s'est caractérisée par la mise en place du projet J@NET dont l'objet est de mettre en place l'infrastructure d'interconnexion des juridictions administratives. Par ailleurs, le projet JASON, qui doit parachever SKIPPER est en cours de réalisation : en effet la longueur du déploiement de SKIPPER a entraîné la réalisation de trois niveaux de développement différents. Les prochaines années devront permettre d'unifier ces niveaux, afin d'obtenir, pour les trois types de juridictions un même outil perfectionné et évolutif. Ce nouvel outil pourrait être définitivement mis en place en 2004. Les moyens informatiques prévus par le projet de loi de finances pour 2003 sont de 5,94 millions d'euros, soit une progression d'environ 830.000 euros
Concernant l'équipement, la loi d'orientation et de programmation pour la justice prévoit 60 millions d'euros d'autorisations de programme et 30 millions de crédits de paiement sur les cinq prochaines années: trois nouvelles juridictions sont prévues (une Cour administrative d'appel et deux tribunaux administratifs). Ainsi 12 millions d'euros d'autorisations de programme et 4,47 millions de crédits de paiement sont demandés dans le projet de loi de finances pour 2003 à l'article 57-51.
Votre Rapporteur tient à souligner que, ces dernières années, plus encore que les autres services du ministère de la justice, les juridictions administratives ont eu beaucoup de mal à consommer leurs crédits d'équipement. En 2001, le taux de consommation n'a été que de 57.64 % et en 2002 les reports étaient supérieurs aux crédits ouverts en loi de finances initiale ! Au 31 août 2002, le taux de consommation n'était encore que de 30,5 % laissant présager de nouveaux reports en fin d'année. Cette sous-consommation semble conjoncturelle (gel républicain, retard dans certains travaux) mais une plus grande efficacité dans l'utilisation des crédits d'équipement est absolument indispensable pour accompagner les augmentations d'effectifs et de moyens de fonctionnement.
Le Conseil d'État assure la gestion du parc immobilier des juridictions administratives, qui relevait auparavant du ministère de l'intérieur. Depuis, de nombreux relogements sont intervenus : tribunaux de Bordeaux, de Caen de Montpellier, de Poitiers, d'Amiens et de Clermont-Ferrand. Les juridictions de Lyon ont également été relogées. Nombre de locaux ont également été étendus. Ce fut le cas des tribunaux de Grenoble, de Rouen, de Dijon et de Nantes et de Nice. Par ailleurs, un tribunal, à Melun, a été créé, ainsi qu'une cour d'appel, à Marseille. Le relogement de la cour administrative d'appel de Paris a été décidé en 1994. Une première tranche a débuté en 1996. Mais l'opération a été considérablement retardée. Elle a recommencé au mois de février 2000 et devrait s'achever en 2003, soit un retard de près de deux ans.
Pour 2003, les crédits demandés seront principalement consacrés travaux d'extension de la cour administrative d'appel de Marseille, à la poursuite des travaux de mise en conformité du tribunal administratif de Marseille et à la rénovation de ceux de Rennes, Melun, Bordeaux, Grenoble et Rouen.
CRÉDITS DE PAIEMENT DU CHAPITRE 57-51 ARTICLE 20 POUR LES TRIBUNAUX ADMINISTRATIFS
ET LES COURS ADMINISTRATIVES D'APPEL
(en millions d'euros)
2000 |
2001 |
2002 |
2003 | |
Report |
2,90 |
3,08 |
3,76 |
2,53 |
Loi de finances initiale |
7,17 |
3,84 |
3,28 |
2,67 |
Crédits disponibles |
10,07 |
7,3 |
7,72 |
5,2 |
Consommation |
6,99 |
3,62 |
4,70 |
4 |
% de consommation |
69,44 |
49,6 % |
65 % |
77 % |
De nombreux travaux de rénovation, de réhabilitation, de restructuration des locaux et d'amélioration de la sécurité ont été entrepris ces dernières années. Ainsi, en 1997, la bibliothèque a été modernisée. En 1998 et 1999, ont eu lieu des travaux d'aménagement des locaux pris à bail au Centre d'affaires du Louvre, des travaux d'infrastructures techniques et des travaux de rénovation des salles d'assemblée générale et des sections administratives.
Pour 2003, les crédits de paiement, en baisse sensible par rapport à l'an dernier, seront consacrés à l'aménagement de bureaux et, surtout, à la restauration de l'aile du Palais Royal donnant sur la place Colette.
CRÉDITS DE PAIEMENT DU CHAPITRE 57-51 ARTICLE 10 POUR LE CONSEIL D'ÉTAT
2000 |
2001 |
2002 |
2003 | |
Report |
0,35 |
2,05 |
1,04 |
0,495 |
Loi de finances initiale |
1,97 |
1,63 |
1,41 |
1,8 |
Crédits disponibles |
3,39 |
3,87 |
1,96 |
2,295 |
Consommation |
1,34 |
2,82 |
1,46 |
1,8 |
% de consommation |
39,53 |
73 % |
74,7 % |
78 % |
Au cours de sa séance du 23 octobre 2002, la Commission a examiné les crédits de la Justice.
Votre Rapporteur spécial, a indiqué qu'il se contenterait de présenter les grandes orientations et les principaux indicateurs de ce budget. Il s'agit du premier projet de loi de finances appliquant la loi d'orientation et de programmation pour la justice et c'est donc à travers ce prisme que ce budget doit être évalué, en particulier au regard des innovations contenues dans la loi d'orientation que sont la création d'un juge de proximité et de centres éducatifs fermés. Le présent projet contient une mesure prévue par la loi d'orientation, dans son chapitre consacré à l'aide aux victimes, qui est l'extension de l'aide juridictionnelle aux victimes sans condition de ressources, en cas de crimes particulièrement odieux, ce qui est très positif.
Comme premier budget d'application de la loi d'orientation, l'exercice est réussi. Pour autant, c'est dans les prochaines années que l'on pourra vérifier la réalité de la volonté du Gouvernement de donner à la justice les moyens promis. Les enseignements de la précédente loi de programmation incitent à la prudence.
Les crédits de paiement du ministère de la justice dépassent pour la première fois les cinq milliards d'euros, la progression globale étant de 7,43 %. Néanmoins, cela ne représente toujours qu'1,84% du budget de l'État, signe de la tradition d'indifférence dont a souffert ce ministère au cours de ces dernières décennies. Les autorisations de programme sont en très forte progression, de + 95 %, et atteignent 706 millions d'euros. Les effectifs du ministère sont légèrement supérieurs à 69.000 et 2.042 créations nettes d'emplois sont prévues dans le projet de loi de finances pour 2003.
Le ministère de la justice n'est pas seulement celui de la justice stricto sensu, puisque les services judiciaires ne représentent que 42 % des crédits. Les services pénitentiaires en représentent 30 %, l'administration centrale 14 %, la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) 11 %, et la justice administrative 3 %. Concernant la PJJ, des progrès significatifs doivent être effectués, comme l'a souligné le récent rapport du cabinet d'études CIRESE. C'est en particulier le problème de l'élargissement du recrutement des éducateurs qui doit être traité. Quant à la justice administrative, son engorgement reste très inquiétant, surtout au niveau des cours administratives d'appel.
Deux difficultés peuvent être soulevées :
- d'une part, le rythme de consommation des crédits d'équipement est très fluctuant et globalement insuffisant. La chancellerie ne saurait se contenter d'une gestion erratique alors que des défis importants en matière d'investissement se profilent. A ce sujet, le rôle de l'agence de maîtrise d'ouvrage des travaux de la justice sera essentiel et il est très positif que 13 emplois supplémentaires lui soient affectés dans le présent projet.
- d'autre part, la seule augmentation des moyens ne saurait suffire. Des réformes de fond sont indispensables, par exemple sur la carte judiciaire.
Il convient de reprendre la réflexion sur une future loi pénitentiaire, sur le sens de la peine de l'emprisonnement et des perspectives d'amendement des détenus. Il faudra aussi redéfinir les métiers de la justice : les métiers de magistrat du siège ou du parquet sont largement différents et une dissociation de leur carrière semble à terme inévitable. Enfin concernant la prévention de la délinquance des jeunes, la réponse ne saurait provenir exclusivement de la PJJ mais doit résulter d'une approche englobant aussi bien la famille, que l'école, les forces de police et les services sociaux.
M. Jean-Louis Dumont a fait part de son inquiétude quant au niveau des candidats admis à l'École nationale de la magistrature, à l'heure où d'importants recrutements sont prévus dans le cadre de ce budget et de la mise en place de la justice de proximité. Au-delà même des questions qui se posent sur la conscience professionnelle de tel ou tel magistrat, c'est bien le niveau de compétence des auditeurs de justice qui est en cause, ainsi que leur comportement personnel, qui peut faire douter de leur aptitude à avoir quelque considération pour les justiciables, en particulier les plus jeunes d'entre eux. Il n'est pas normal que la justice soit rendue selon l'humeur ou la disponibilité du juge, et que le passage d'une moyenne de 450 enfants placés à 700 soit dû au seul remplacement d'un juge pour enfants par un autre.
L'amendement qui sera présenté par le Rapporteur spécial et le Président de la Commission des finances est certes, fort intéressant, mais il conviendrait de le compléter par une demande d'évaluation de l'action des centres éducatifs renforcés. On connaît le taux de réussite de ce genre de structure, qui est de l'ordre de 50 %, pour un coût important. Mais l'abaissement de l'âge de l'entrée dans la délinquance, vers 14 ans aujourd'hui, appelle une véritable évaluation, rendue par des observateurs extérieurs.
Par ailleurs, il apparaît opportun de tirer un bilan du programme de construction d'établissements pénitentiaires lancé il y a une quinzaine d'années par M. Albin Chalandon. La montée en charge a pu être lente ici où là, et aujourd'hui ce programme semble avoir tenu ses promesses, malgré des lacunes persistantes en termes d'accueil des familles et de réinsertion des détenus. Quant à la justice administrative, il faut souligner son extrême lenteur et les aléas de ses raisonnements juridiques, qui rebutent plus d'un décideur public local.
En réponse, votre Rapporteur spécial a estimé que la qualité du recrutement et de la formation des magistrats, de l'ordre judiciaire comme de l'ordre administratif, était certes essentielle, et que le niveau des auditeurs de justice était tout à fait satisfaisant. D'autres questions se posent effectivement dans ce domaine, et en particulier celle de la féminisation du corps judiciaire : alors qu'à présent le rapport hommes/femmes est équilibré, il va bientôt pencher vers une prépondérance des femmes, ce qui ne sera pas sans incidence en termes de productivité des juridictions, le problème de l'adéquation entre vie professionnelle et vie familiale devenant plus aigu. En outre, les juridictions doivent, autant que possible, être représentatives de la société, du point de vue du sexe, de l'âge, de la condition sociale ; à cet égard le corps des magistrats gagnerait à un meilleur fonctionnement du recrutement au tour extérieur, rare et décevant en France, et beaucoup plus développé dans d'autres pays. Quant aux différences de charges de travail ou de conscience professionnelle entre magistrats, on ne peut les nier. L'évaluation fait d'ailleurs défaut en ce domaine, et il est dommage qu'aucun poste supplémentaire ne soit créé dans ce budget à l'Inspection générale des services judiciaires.
Un autre problème soulevé implicitement est celui de l'inamovibilité des magistrats du siège, consubstantielle à leur statut. La mobilité présente l'avantage d'enrichir l'expérience professionnelle et d'éloigner le risque des connivences locales. Enfin, il n'existe pas de statistiques sur l'obsolescence comparée des prisons relevant du programme lancé par M. Albin Chalandon et des autres établissements. On sait en revanche que leur coût unitaire par place est inférieur. Une évaluation serait en effet opportune, au moment où se poursuit le plan de création de 4.000 places. L'accompagnement des familles et des détenus constitue un enjeu fondamental, que le ministre a bien cerné.
Votre Rapporteur spécial a ensuite présenté un amendement, déposé conjointement avec le Président Pierre Méhaignerie, en précisant qu'il remplissait bien l'objectif d'évaluation évoqué, en visant, au-delà des prisons, à connaître l'efficacité de l'ensemble de la chaîne pénale, à travers des rapports d'étape annuels. Cet amendement reprend, terme à terme, un article de la loi d'orientation et de programmation pour la justice adopté par le Parlement et censuré par le Conseil constitutionnel. Selon l'argumentation fort peu convaincante de celui-ci, un tel article n'avait sa place qu'en loi de finances ; c'est l'occasion qui est saisie ici.
M. Georges Tron, exprimant son accord sur le fond de l'amendement, a indiqué que l'évaluation constituait une question de principe, non seulement dans la perspective de la mise en _uvre de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances, mais aussi pour la réforme de l'État dans son ensemble. Cette préoccupation est partagée par tous, y compris par quelqu'un comme Didier Migaud, à qui il faut rendre hommage sur ce point.
La Commission a adopté cet amendement. Elle a également, sur proposition de votre Rapporteur spécial, adopté les crédits de la justice et vous demande d'émettre un vote favorable à leur adoption.
N° 0256- 33.- Rapport de M. Pierre Albertini sur le projet de loi de finances pour 2003 - (Justice)
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