COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES,
FAMILIALES ET SOCIALES

COMPTE RENDU N° 19

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 1er décembre 2004
(Séance de 10 heures)

12/03/95

Présidence de M. Jean-Michel Dubernard, président,

puis de M. Pierre Morange, vice-président

SOMMAIRE

 

pages

- Examen de la proposition de loi de M. Yves Censi visant à améliorer les retraites des maîtres de l'enseignement privé sous contrat - n° 1757 (M. Yves Censi, rapporteur)


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- Information relative à la commission

 

La commission a examiné, sur le rapport de M. Yves Censi, sa proposition de loi visant à améliorer les retraites des maîtres de l'enseignement privé sous contrat - n° 1757.

M. Yves Censi, rapporteur, a indiqué que la proposition de loi n° 1757 a pour ambition d'améliorer, sur deux points, la situation des maîtres des établissements d'enseignement privés sans modifier les équilibres de la législation en vigueur. Il s'agit de :

- clarifier le statut des maîtres contractuels enseignant dans des établissements privés, qui fait l'objet d'une interprétation divergente du Conseil d'Etat et de la Cour de cassation ;

- rapprocher la situation des maîtres agréés et contractuels des établissements privés sous contrat de celle des maîtres enseignants dans des établissements publics en mettant en place un nouveau régime public de retraite additionnel obligatoire prolongeant l'actuel régime temporaire de retraite de l'enseignement privé.

Ces deux mesures traduisent, en fait, des principes figurant dans le code de l'éducation.

Concernant le statut des maîtres, la proposition de loi tend à réaffirmer - et non pas à instituer - le rattachement à l'Etat des maîtres contractuels des établissements d'enseignement privés sous contrat d'association. Les appréciations divergentes du Conseil d'Etat, qui leur reconnaît le statut d'agent public contractuel de l'Etat, et de la Cour de cassation, qui les considère comme des salariés de droit privé, rendent nécessaire l'intervention du législateur pour inscrire explicitement dans le code de l'éducation leur statut d'agent public qui résulte des intentions mêmes du législateur de 1959. Il s'agit donc de confirmer une volonté du Parlement qui permet de sécuriser les établissements. La multiplication des contentieux depuis une douzaine d'années commençe en effet à affecter la bonne gestion des établissements.

Les maîtres conserveront les droits sociaux et économiques qui sont les leurs. Cette mesure de clarification ne touche en aucune manière à l'enseignement dispensé, ni au fonctionnement des établissements d'enseignement privés.

Le code de l'éducation est très elliptique sur cette question du statut contractuel des maîtres puisque la dernière phrase du deuxième alinéa de son article L. 442-5 dispose seulement que l'enseignement dans les classes faisant l'objet d'un contrat d'association entre l'Etat et l'établissement d'enseignement privé « est confié, en accord avec la direction de l'établissement, soit à des maîtres de l'enseignement public, soit à des maîtres liés à l'Etat par contrat. »

Il ressort clairement que le statut de ces enseignants est d'ordre contractuel. Ceux-ci ne relèvent aucunement du statut de la fonction publique qui place les fonctionnaires dans une position de subordination statutaire légale et réglementaire excluant toute existence de contrat entre ces agents et l'Etat. L'article 911-1 du code de l'éducation dispose en effet que « sous réserve des dispositions du présent livre, les dispositions statutaires de la fonction publique de l'Etat s'appliquent aux membres des corps de fonctionnaires du service public de l'éducation. »

La proposition de loi ne vise aucunement à fonctionnariser les maîtres contractuels. Elle clarifie leur statut d'agent public contractuel de l'Etat, qui est un statut particulier dans l'enseignement.

Du point vue du droit, le contrat provisoire comme le contrat définitif lie chaque maître à l'Etat. Cependant sa nature a donné lieu à débat pour ceux liant les maîtres enseignant dans les établissements d'enseignement privés sous contrat d'association.

Dans les établissements privés sous contrat simple, les personnels enseignants sont, sans ambiguïté, liés à leur école ou à l'organisme de gestion collective par un contrat de droit privé régi par le code du travail. La proposition de loi ne concerne pas les écoles sous contrat simple pour ce qui est de ses dispositions relatives au statut des maîtres.

Par ailleurs, dans tout contrat, l'Etat est employeur et peut rompre le lien. Cependant, dans le cas des maîtres des établissements privés sous contrat d'association, pour le Conseil d'Etat, ce lien est celui unissant un agent contractuel de droit public à l'Etat car le maître contractuel enseignant dans un établissement privé n'exerce pas une activité privée ; il exécute une mission de service public. Il faut souligner, à ce titre, que la loi ne reconnaît qu'un enseignement public : au plan juridique, les termes d'enseignement privé sont un abus de langage lorsqu'ils s'appliquent aux établissements sous contrat.

Pour la Cour de cassation, le contrat est de droit privé car l'employeur direct du maître est l'établissement privé ; le contrat relève donc du code du travail et les contentieux entre signataires relèvent donc de la juridiction des prud'hommes. Pour la Cour de cassation, le fait que l'Etat soit recruteur, rémunérateur et contrôleur n'emporte pas la compétence exclusive de la juridiction administrative : par sa signature du contrat le recteur ne fait que consacrer le choix de recrutement d'un chef d'établissement ; ce contrat a donc un pur caractère « de rémunération et de classement ». La Cour de cassation considère donc que le lien de subordination du maître au chef d'établissement emporte le caractère privé du contrat. D'où l'ambiguïté que la proposition souhaiter lever.

Si cette divergence d'appréciation des deux ordres de juridiction ne s'est pas traduite par des conflits de jurisprudence matériellement préjudiciables aux enseignants, il trouble néanmoins le bon fonctionnement des établissements et il convient de clarifier une situation que les commentateurs signalent comme une des zones majeures de difficultés de l'édifice législatif.

Cette double facette juridique dans l'environnement pédagogique de l'enseignement général, que tous les pères de la législation sur l'enseignement dans les établissements privés ont voulu libre mais unique, n'est pas satisfaisante. Elle a donné lieu ces dernières années à un contentieux croissant, majoritairement devant les juridictions de l'ordre judiciaire. Elle pénalise les établissements et les gestionnaires du régime des maîtres contractuels.

La proposition de loi sort le contrat des maîtres du cadre du code du travail. Leurs titulaires doivent cependant pouvoir continuer à bénéficier des institutions sociales et des droits qui sont les leurs à ce jour. Au même titre que les enseignants titulaires de la fonction publique travaillant dans une classe sous contrat d'association, les maîtres contractuels pourront bénéficier de la représentation syndicale, de la protection des délégués du personnel, des avantages des comités d'entreprise et de la sécurité des comités d'hygiène et de sécurité. En effet, comme les fonctionnaires détachés, l'exercice de leur activité professionnelle dans un établissement privé justifie qu'ils bénéficient de ces dispositions à défaut de dispositions équivalentes ou de réglementation établie sur ces points dans l'enseignement public.

Le rapporteur a ensuite précisé certaines des conséquences juridiques de la proposition de loi.

Concernant les comités d'entreprise, les maîtres contractuels doivent pouvoir continuer à être électeurs et éligibles. Les inspecteurs du travail pourront être amenés à intervenir en cas de réclamation concernant les élections puisque cette attribution d'ordre technique ne concerne pas le statut d'agent public ou l'Etat employeur. En outre, comme pour l'élection des délégués du personnel, les tribunaux d'instance ne peuvent que rester compétents pour connaître des litiges.

Une obligation de versement de contributions par les établissements privés devrait toutefois être prévue afin de préserver le financement des comités d'entreprise, l'Etat ne pouvant pas apporter un tel financement à ces structures privées. C'est le seul point auquel il convient de veiller particulièrement ; un amendement sera présenté en ce sens lors de la réunion de la commission en application de l'article 88 du Règlement.

Par ailleurs, en matière de compensation du temps de représentation des enseignants délégués syndicaux, délégués du personnel, ou membres d'un comité d'entreprise, les règles explicites du droit public s'appliqueront.

En matière de convention collective, la situation actuelle peut perdurer. Il n'existe pas de tels accords concernant les maîtres contractuels. Il ne peut en exister compte tenu de leur qualité d'agent public. On peut d'ailleurs ainsi observer que cette qualité a toujours prévalu depuis 1959. Les conventions collectives sont conclues avec les syndicats représentatifs des personnels travaillant dans les établissements privés et concernent l'ensemble des maîtres du primaire, professeurs du secondaire des classes hors contrat, services administratifs, techniques et économiques, documentalistes des classes hors contrat, animateurs, psychologues, etc.

Par ailleurs, dès lors que les maîtres contractuels ne sont pas régis par les dispositions du code du travail, le financement de leur indemnité de départ en retraite ne sera pas à la charge des établissements privés, qui ne peuvent plus être assimilés à leur employeur. Le dispositif législatif mettant en place un régime public additionnel de retraite, assorti d'un financement de l'Etat, fera l'objet d'un amendement du gouvernement pour la discussion en séance publique. Ce nouveau régime compensera largement la disparition de l'indemnité de départ en retraite, mais pour les maîtres devant partir dans les prochaines années en retraite un dispositif transitoire leur accordant une indemnité dégressive est en cours de finalisation.

En matière de prévention, une différence majeure existe en effet entre le régime des maîtres contractuels qui permet de servir un capital décès équivalent à trois années de salaire alors que les enseignants titulaires ou contractuels de l'Etat ne disposent que d'une somme équivalente à un an de traitement. Ce régime favorable résulte d'un cumul des avantages de l'assurance de base et d'une affiliation au régime de prévoyance de l'AGIRC. Cette affiliation a été réalisée alors même que les agents publics ne peuvent relever d'une convention collective. Il convient en tout état de cause de veiller à conserver l'acquis des deux années de capital décès pour les maîtres ayant cotisé. Plusieurs options sont envisageables ; un dispositif pourrait ainsi être étudié avec l'AGIRC, ou éventuellement avec la Mutualité générale de l'éducation nationale (MGEN), ou à partir du régime temporaire de retraite des maîtres des établissements d'enseignement privés, mais ces questions doivent relever en priorité de la négociation sociale.

Une négociation est donc nécessaire, ce que permet la date d'entrée en vigueur de la proposition de loi au 1er septembre 2005.

Concernant l'institution d'un régime de retraite additionnel, la proposition de loi vise à donner une traduction supplémentaire à l'exigence d'équivalence des situations dans lesquelles sont placés les maîtres titulaires de l'enseignement public et les maîtres des établissements d'enseignement privés liés à l'Etat par contrat. Ce principe de traitement social équitable résulte de la loi n° 77-1285 du 25 novembre 1977, dite loi Guermeur. Ce point, qui s'intègre dans le processus attendu de revalorisation des retraites des maîtres agréés et contractuels, ne fait pas l'objet de difficulté particulière.

La montée en puissance du nouveau régime s'accompagnera d'une dégressivité de l'indemnité de départ en retraite. Ce point est en cours de discussion et de finalisation. Il fera l'objet d'un amendement examiné en article 88. La dégressivité devra être définie par voie réglementaire.

Un débat a suivi l'exposé du rapporteur.

M. Pierre Morange, président, a tout d'abord remercié celui-ci pour la qualité de son intervention.

Après avoir déclaré souhaiter en être également signataire, M. Pierre Hellier a estimé qu'il s'agit d'une très bonne proposition de loi, qui permettra de lever les ambiguïtés actuelles liées au statut des maîtres contractuels et de verser aux enseignants des établissements privés sous contrat des pensions de retraite plus proches de celles des maîtres de l'enseignement public, ce qui est tout à fait justifié dans la mesure où il s'agit en réalité d'agents publics contractuels. Cette proposition de loi préserve la liberté qui doit être celle des établissements privés.

M. Pierre-Christophe Baguet a posé les deux questions suivantes :

- Comment sera appliquée la proposition de loi aux directeurs d'établissement qui n'enseignent plus et qui seraient de ce fait exclus du dispositif proposé par ce texte ? Pour avoir le statut de maître contractuel il est en effet prévu que les enseignants doivent assurer au minimum une heure de cours par semaine.

- Il semble y avoir une certaine forme de « chantage », en particulier dans le rectorat de Versailles, concernant la dotation versée par l'Etat aux établissements privés : est-il réellement envisagé de diminuer son montant, en contrepartie des dispositions de la proposition de loi par ailleurs tout à fait justifiées ?

M. Dominique Richard a également jugé bienvenue cette proposition de loi étant donné le nombre de contentieux auxquels cette question a donné lieu, même si le tribunal des conflits a contribué à clarifier la situation des enseignants du privé en 1999. Ce texte permet par ailleurs d'opérer un rapprochement entre la situation des enseignants des établissements publics et des établissements privés sous contrat, dont le principe est posé par la loi du 25 novembre 1977, dite loi Guermeur, mais qui n'est pas réellement entré en vigueur à défaut de parution du décret d'application. Il faut enfin saluer l'existence d'un très large consensus parmi les organisations syndicales sur cette question, puisque la FEP-CFDT, le SNEC-CFTC, le SPELC et le SNPEFP-CGT ont signé le relevé de conclusions du 21 octobre dernier.

Il importe par ailleurs de garantir une réelle sécurité juridique quant à l'interprétation des dispositions prévues par ce texte mais le rapporteur a d'ores et déjà apporté des réponses à l'ensemble de ces questions dans son rapport, qui fait partie des débats préparatoires auxquels il sera possible de se référer pour appliquer la future loi.

Plusieurs points méritent néanmoins d'être précisés :

- Quelles seront les conséquences fiscales de ce texte pour les établissements d'enseignement s'agissant en particulier du « versement transport » en zone périurbaine qui est versé pour le transport des personnels par l'Organisme de gestion de l'enseignement catholique (OGEC) ?

- Les dispositions relatives aux droits sociaux des enseignants seront-elles appliquées avant ou après les prochaines élections prud'homales ?

- Alors que le relevé de conclusions prévoit une montée en charge du régime de retraite additionnel, qui commencera par le versement d'un droit de 5 %, et progressera d'un point par palier de cinq ans, serait-il possible d'accélérer ce rapprochement entre les enseignants du public et du privé, en fixant par exemple à quinze ans, au lieu de vingt-cinq, l'échéance de l'entrée en vigueur effective d'un régime de retraite équivalent ?

Après avoir regretté que le gouvernement ait dans une certaine mesure manqué de courage politique en n'allant pas jusqu'au bout de sa démarche par le dépôt d'un projet de loi sur cette question, M. Yvan Lachaud a déclaré partager les propos tenus par le rapporteur s'agissant de la nécessaire clarification du statut des enseignants. Un problème demeure cependant : celui du financement des comités d'entreprise car l'OGEC conserve la charge du financement de leur fonctionnement, qui représente 0,2 % de la masse salariale. Il ne paraît pas possible de faire prendre en charge par l'Etat ce financement via le forfait d'externat.

Il semble par ailleurs un peu indécent de fixer une échéance aussi tardive pour l'alignement des prestations de retraite de ces personnels sur celles des maîtres titulaires de l'enseignement public. En effet, dans dix ans, il y aura encore environ 10 % d'écart entre le montant des pensions de retraite versées aux enseignants du public et du privé, contre 25 % actuellement. Ainsi les enseignants du secteur privé titulaires du CAFEP acquitteraient en moyenne 1 400 euros de cotisations supplémentaires par rapport à leurs homologues du public titulaires du CAPES alors que leurs prestations de retraite seraient inférieures de 800 euros à celle de leurs homologues du secteur public. Il apparaît donc nécessaire d'accélérer la mise en œuvre du principe d'égalité de traitement entre les enseignants du public et du privé car ces derniers ont trop longtemps été insuffisamment considérés.

En réponse aux propos tenus par M. Yvan Lachaud, M. Lionnel Luca a estimé que l'on ne peut pas tout à la fois déplorer le fait qu'une très grande majorité de lois soit d'initiative gouvernementale et critiquer le manque de courage du gouvernement lorsque le Parlement a la possibilité de débattre d'une telle proposition de loi inscrite à l'ordre du jour prioritaire.

Ce texte attendu constitue en tout état de cause un progrès majeur, qui recueille un très large soutien non seulement des organisations syndicales mais surtout de l'ensemble des enseignants. Il importe cependant de rappeler que seul l'enseignement privé sous contrat, qui est soumis aux mêmes règles que celles applicables au service public de l'éducation, est concerné par les dispositions prévues par la présente proposition de loi. Cette précision est importante, car il ne s'agit en aucun cas de faire en quelque sorte « un cadeau » à l'ensemble des établissements privés mais, au contraire, de procéder à la nécessaire correction des inégalités actuelles entre les enseignants du public et du privé sous contrat, puisqu'ils sont soumis aux mêmes obligations mais ne bénéficient pas des mêmes avantages. A cet égard, on peut également regretter que le traitement de ces personnels soit encore parfois scandaleusement inégalitaire. Ce texte constitue donc un premier pas très important pour remédier à une situation injuste qui perdure depuis plusieurs années.

Mme Corinne Marchal-Tarnus a également salué cette initiative très attendue par les enseignants des établissements privés sous contrat qui représentent plus de 15 % de l'ensemble des enseignants. Des précisions pourraient-elles être apportées concernant le problème de la validité restreinte des concours afin notamment de permettre aux enseignants du privé d'intégrer, s'ils le souhaitent, la fonction publique ?

Après avoir indiqué souhaiter également co-signer cette proposition de loi, qui permettra d'apporter enfin des réponses à une question ancienne, Mme Martine Aurillac s'est interrogée sur la conformité de certaines de ses dispositions avec les règles de recevabilité financière posées par l'article 40 de la Constitution. Il semble par ailleurs impensable que les enseignants des établissements privés sous contrat ne bénéficient pas de droits réellement équivalents à ceux des enseignants publics avant environ vingt-cinq ans : il est donc nécessaire d'accélérer l'entrée en vigueur du rattrapage proposé avec le secteur public par ce texte. Enfin, les dispositions du volet retraite concernent-elles l'ensemble des établissements privés, qu'ils soient ou non sous contrat ?

En réponse aux intervenants, le rapporteur a apporté les précisions suivantes :

- Les dispositions sur les retraites contenues dans la proposition de loi s'appliquent à tous les maîtres agréés ou contractuels des établissements privés sous contrat .

- S'agissant des signataires de la proposition de loi, les commissaires sont invités à consulter le texte disponible en ligne sur le site de l'Assemblée nationale, qui est régulièrement mis à jour, plutôt que le document mis en distribution le 1er octobre 2004.

- S'agissant du problème des directeurs d'établissement qui n'enseignent plus, leur statut sera celui des employés de droit privé mais ils bénéficieront des nouvelles prestations de retraite en proportion du montant des cotisations qu'ils auront versées, selon les règles habituelles en matière d'assurance vieillesse, s'ils décident d'enseigner au moins une heure dans la semaine.

- Il semble que la présentation qui en en faite lors de certaines discussions syndicales ne corresponde pas à la réalité de ce texte, qui n'est pas encore voté et qui ne saurait, en tout état de cause, justifier un quelconque chantage, s'agissant notamment des dotations versées aux établissements privés. Le rapport contient des précisions sur les conséquences emportées par ce texte en matière de droits syndicaux. Mais il faut souligner que la proposition de loi n'entend pas revenir sur les droits existants. Un amendement en cours d'élaboration les confortera.

- Il est exact qu'un réel consensus politique et syndical existe sur la nécessité d'améliorer la situation des maîtres de l'enseignement privé et qu'il est urgent de profiter de cet élan ;

- Au 1er septembre 2005, tous les maîtres des établissements privés sous contrat d'association élus aux conseils prud'homaux ne pourront plus y siéger.

- Les maîtres contractuels ne seront plus électeurs et éligibles aux conseils des prud'hommes et ne relèveront plus de leur juridiction mais de celle des tribunaux administratifs.

- L'accord syndical du 21 octobre 2004 n'est qu'un relevé de conclusions à l'issue de discussions. Il constitue un cadre général rendant nécessaire la poursuite des négociations. Les écarts constatés entre les différents niveaux de retraite qui ont été présentés constituent des données moyennes, qui ne reflètent pas toujours les situations individuelles. Il est difficile pour le législateur de se substituer pour toutes les précisions techniques aux partenaires sociaux.

M. Pierre Morange, président, a précisé que l'examen de la proposition de loi est inscrit à l'ordre du jour du Sénat du 21 décembre et a fait observer qu'il faudra interroger en séance publique le ministre sur le calendrier prévisible des négociations à venir et sur les intentions du gouvernement.

Puis le rapporteur a poursuivi ses réponses aux intervenants :

- Après son vote par l'Assemblée nationale, la proposition de loi aura le même impact qu'un projet de loi qui aurait été présenté par le gouvernement. Il faut d'ailleurs se réjouir de l'intérêt que le gouvernement a immédiatement manifesté sur le sujet et des garanties qu'il entend apporter pour satisfaire les demandes des députés que l'article 40 de la Constitution ne permet pas de traduire par des amendements parlementaires.

- Il faut garantir et consolider l'accord de financement dans les entreprises et faire confiance aux partenaires sociaux pour accélérer le processus de régularisation et d'amélioration des retraites.

- S'agissant de la validité restreinte des concours du privé au regard de l'accès à l'enseignement dans les établissements publics, ce problème n'entre pas dans le cadre de la proposition de loi qui se limite au statut du contrat des maîtres des établissements privés, mais c'est un sujet majeur.

- Il faut clarifier les conséquences juridiques liées à la nature du contrat et à la singularité de ce type d'enseignement, mais le dispositif d'ensemble assure une véritable sécurisation financière. L'esprit général de la loi sur l'enseignement consiste à donner le libre choix de l'école et du type d'enseignement pour chaque famille. Il ne faut pas qu'un barrage financier ou des distorsions de carrière des enseignants viennent limiter ce choix entre l'enseignement - qui reste toujours l'enseignement public - dans un établissement public ou dans un établissement privé.

M. Yvan Lachaud a salué le courage politique du rapporteur et des co-signataires de la proposition de loi. On doit cependant regretter l'absence d'initiative du gouvernement depuis deux ans sur ce problème malgré les demandes réitérées des responsables de l'enseignement catholique. Une initiative gouvernementale aurait été préférable car elle aurait évité les écueils de l'article 40 de la Constitution et les inquiétudes actuelles liées aux délais de pleine application du dispositif sur les retraites qui pourraient prendre plus de vingt ans, ce qui n'est pas tenable. Quant aux chefs d'établissements, qui ont un statut de droit privé, ils peuvent se placer sous le statut d'agent contractuel de droit public s'ils assurent un enseignement d'une heure par semaine. Il est toutefois opportun que les chefs d'établissement restent en principe des agents de droit privé, et donc rémunérés par l'OGEC pour les établissements d'enseignement catholiques, afin de garantir la liberté d'enseignement. L'obligation pour l'OGEC de financer les comités d'entreprise pose un problème en raison de la lourdeur de cette charge. Pourquoi la masse salariale servant au calcul du versement de la contribution de 0,2  % due par l'OGEC inclut-elle des salaires qu'elle ne verse pas ? il serait logique que l'Etat ou les agents publics contribuent aux comités d'entreprise dont ils bénéficient.

Par ailleurs, pour des maîtres ayant une qualification correspondant au CAPES, on constate une différence de 1 400 euros entre les cotisations des maîtres titulaires de l'enseignement public et les maîtres contractuels des établissements privés, au détriment de ces derniers. Serait-il possible de proposer un amendement permettant d'accélérer le rattrapage de l'écart entre les deux situations ?

M. Dominique Paillé a remercié à son tour le rapporteur pour son initiative. Cette capacité à agir sans attendre une initiative du gouvernement est un signe de la vitalité du Parlement. On doit cependant s'inquiéter des délais annoncés pour le rattrapage des retraites ; il faut souhaiter que le texte à venir soit reçu comme un cadre avec une date butoir, laissant ouverte la possibilité pour les partenaires sociaux de réduire les délais.

La commission est ensuite passée à l'examen des articles.

Article 1er  : statut des maîtres des établissements privés sous contrat d'association

La commission a examiné un amendement du rapporteur précisant le statut contractuel des maîtres liés à l'Etat par contrat.

Le rapporteur a précisé que l'amendement ajoute trois éléments à la proposition de loi qu'il a déposée :

- il précise que les maîtres contractuels enseignant dans des établissements privés sous contrat d'association sont, et ont toujours été, des agents publics contractuels de l'Etat ;

- il rappelle que l'enseignement est confié à ces agents publics dans le respect du caractère propre de l'établissement privé ;

- il indique que, nonobstant l'existence du caractère propre de chaque établissement privé, l'enseignement s'exerce dans le respect de la liberté de conscience de tous les maîtres enseignants.

La commission a adopté l'amendement.

Elle a ensuite examiné un amendement de M. Jean-Michel Dubernard tendant à supprimer le dernier alinéa de l'article.

Le rapporteur s'est déclaré favorable à l'amendement qui vise à écarter le risque d'irrecevabilité de la proposition de loi au regard de l'article 40 de la Constitution.

M. Pierre Christophe Baguet a proposé avant de procéder à cette suppression d'attendre de connaître la position du gouvernement qui envisage de déposer un amendement organisant le financement des mesures contenues dans la proposition de loi.

Le président ayant précisé qu'il faut néanmoins se prononcer sur l'amendement, le rapporteur a communiqué le texte du projet d'amendement élaboré par le gouvernement.

La commission a adopté l'amendement.

Puis, la commission a examiné un amendement du rapporteur visant à sécuriser la situation des maîtres contractuels dans tous les cas de figure, qu'ils disposent d'un contrat définitif sans avoir d'affectation, qu'ils disposent d'un contrat provisoire à l'issue du concours d'admission ou qu'ils soient à la recherche de leur premier poste.

Le rapporteur a indiqué que son amendement vise à reconnaître par la loi les droits attachés au recrutement par concours des maîtres contractuels enseignant dans des établissements privés sous contrat d'association. Il sécurise leur droit à bénéficier en priorité des contrats et services d'enseignement disponibles dans les établissements.

Cette disposition est utile en raison du système d'affectation des maîtres. Les lauréats du concours d'accès au certificat d'aptitude aux fonctions de maître dans les classes du second degré sous contrat bénéficient du droit à être inscrits sur une liste d'aptitude à l'enseignement, mais doivent chercher un poste

L'amendement vise trois situations :

- celle des maîtres qui, bien que disposant d'un contrat définitif, n'ont plus de service d'enseignement en raison de la décision du chef d'établissement de supprimer leur classe ou leur service d'enseignement : ces maîtres sont reversés au rectorat et doivent trouver un nouvel établissement d'accueil ;

- celle des maîtres titulaires d'un contrat provisoire accordé par le rectorat à l'issue du concours d'admission et qui recherchent des services d'enseignement ;

- celle des lauréats du concours qui recherchent pour leur premier poste, afin de disposer d'un contrat provisoire, un établissement d'accueil.

Les services vacants visés sont ceux correspondant à des contrats définitifs ou provisoires et non aux services attribués aux maîtres délégués qui sont des auxiliaires assurant le remplacement de maîtres dont le service d'enseignement est protégé, à la suite d'un arrêt maladie ou d'un congé maternité par exemple.

La commission a adopté l'amendement.

La commission a adopté l'article 1er ainsi modifié.

Article additionnel après l'article 1er : Extension des droits aux personnels enseignants et aux documentalistes des établissements agricoles privés sous contrat

La commission a examiné un amendement du rapporteur portant article additionnel et visant à étendre aux personnels enseignants et aux documentalistes des établissements d'enseignement agricole sous contrat les mêmes droits que ceux proposés pour les établissements privés d'enseignement général.

Le rapporteur a précisé que les personnels enseignants et les documentalistes, dont le régime est identique, des établissements d'enseignement agricole sous contrat doivent pouvoir bénéficier des clarifications utiles apportées à la situation des maîtres contractuels des établissements d'enseignement privés sous contrat d'association apportées par l'article 1er de la proposition de loi.

A l'exception de quelques dispositions spécifiques d'une portée limitée, les maîtres de l'enseignement agricole dispensé dans les établissements sous contrat avec l'Etat sont en effet dans une situation comparable à celle des maîtres contractuels des établissements privés d'enseignement général et technique. Toutefois, le recrutement des maîtres de l'enseignement agricole est effectué sur titre, sans concours. Le concours est nécessaire seulement pour l'inscription sur l'échelle indiciaire de rémunération des maîtres certifiés.

Les maîtres de l'enseignement agricole ayant perdu leur emploi bénéficient déjà d'une priorité d'accès aux services d'enseignement vacants en application du troisième alinéa de l'article L. 813-8 du code rural.

L'amendement supprime en outre une disposition transitoire devenue sans objet figurant à la dernière phrase du deuxième alinéa de l'article L. 813-8 du code rural.

La commission a adopté l'amendement.

Article 2 : Gage financier

La commission a examiné un amendement de coordination de M. Jean-Michel Dubernard tendant à supprimer l'article.

Le rapporteur a indiqué qu'il s'agit là aussi d'éviter l'application de l'article 40 de la Constitution.

La commission a adopté l'amendement.

La commission a donc supprimé l'article 2.

Article additionnel après l'article 2 : Extension des dispositions aux collectivités d'outre-mer à statut particulier

La commission a adopté un amendement du rapporteur portant article additionnel visant à transposer, par ordonnance, les mesures prévues par la proposition de loi aux législations et aux réglementations existantes dans les collectivités d'outre-mer à statut particulier.

La commission a adopté l'amendement.

Après l'article 2

M. Yvan Lachaud a présenté un amendement prévoyant qu'en 2007 le gouvernement déposerait au Parlement un rapport évaluant la possibilité d'une égalité des cotisations et des pensions de retraite pour les enseignants de l'enseignement public et de l'enseignement privé sous contrat.

Le rapporteur s'est déclaré défavorable pour des motifs rédactionnels, le terme d'égalité n'étant pas approprié en la matière. En outre, la loi Guermeur de 1977 n'a pas prévu de mettre en place une égalité ou une parité de situation entre les maîtres du public ou du privé, qui conduirait à fonctionnariser ces derniers, mais seulement d'appliquer aux maîtres des établissements d'enseignement privés sous contrat les mesures qui seraient accordées en matière de rémunération et d'avantage social aux maîtres titulaires de l'enseignement public.

M. Lionnel Luca tout en partageant l'appréciation du rapporteur sur l'inadaptation du terme égalité, s'est déclaré favorable au dépôt d'un rapport afin de donner un signe fort au personnel concerné de l'urgence de réduire les disparités existantes entre les enseignants de l'enseignement public et ceux de l'enseignement privé sous contrat. Un rapport d'évaluation paraît indispensable. Il a proposé que l'on utilise le terme d'harmonisation plutôt que celui d'égalité.

M. Pierre-Christophe Baguet s'est interrogé sur la pertinence de la date de 2007 et a proposé de retenir l'expression « évaluer la poursuite du rapprochement » entre la situation des enseignants du public et ceux du privé sous contrat.

Le rapporteur estimant que la précision de la terminologie était très importante, il a suggéré à M. Yvan Lachaud de revoir la rédaction de ses amendements pour la réunion de la commission en article 88.

L'auteur de l'amendement a retiré son amendement.

Article additionnel après l'article 2 : Date d'entrée en vigueur de la proposition de loi

Le rapporteur a présenté un amendement portant article additionnel et indiquant que les dispositions de la présente loi entreraient en vigueur le 1er septembre 2005. Il a précisé que ce délai permettra d'harmoniser le début de l'année scolaire et le début de la mise en application des nouvelles dispositions et donnera le temps nécessaire à la négociation sociale.

La commission a adopté l'amendement.

Titre

La commission a adopté un amendement du rapporteur rédigeant comme suit le titre de la proposition de loi : « Proposition de loi relative à la situation des maîtres des établissements d'enseignement privés sous contrat ». Ce nouveau titre vise à prendre en compte les dispositions relatives à la nature des contrats liant les maîtres à l'Etat. Il supprime la référence à la notion d'enseignement privé, le code de l'enseignement ne visant à donner une base légale qu'à l'enseignement public ou l'enseignement au sens large.

Puis la commission a adopté l'ensemble de la proposition de loi ainsi rédigée.

*

Information relative à la commission

La commission a désigné Mme Janine Jambu candidate à la commission au conseil d'administration de l'Agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail, en remplacement de Mme Muguette Jacquaint, démissionnaire.


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