COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES,
FAMILIALES ET SOCIALES

COMPTE RENDU N° 5

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 12 octobre 2005
(Séance de 16 heures 15)

12/03/95

Coprésidence de M. Jean-Michel Dubernard, président
de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales,
et de M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances,

puis coprésidence de M.  Pierre Morange, vice-président de la commission
des affaires culturelles, familiales et sociales, et de M.  Yves Bur

SOMMAIRE

 

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- Audition, conjointe avec la commission des finances, de M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités, sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 (ouverte au public)



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La commission des affaires culturelles, familiales et sociales a entendu M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités, sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006.

Le président Jean-Michel Dubernard a souhaité la bienvenue à M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités, et à M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille.

Les ministres sont venus aujourd'hui présenter le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006, dont les délais d'examen et de discussion par la représentation nationale sont particulièrement brefs cette année. Ce matin, lors de l'adoption du projet en Conseil des ministres, le Président de la République a souligné que le déficit de la sécurité sociale demeure trop élevé et qu'il faut renforcer l'esprit de responsabilité de tous pour retrouver l'équilibre.

Ce projet a été rédigé en ce sens. Conformément à la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale adoptée cet été, la présentation du projet de loi de financement a été profondément modifiée. Les conditions de la discussion ont changé et les prérogatives des parlementaires ont été renforcées. Ce sont près de 60 articles qu'ils devront examiner. Cette année, la discussion s'apparentera à une sorte d'expérimentation.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, s'est dit convaincu que le temps est venu de passer de la culture de la dépense publique à la culture de la performance de cette dépense, principe qui s'applique tout particulièrement aux dépenses sociales. Il convient pour cela de garantir la transparence et la clarté des financements, ce que la complexité des mécanismes et des structures actuels rend malaisé, mais aussi de stabiliser le dispositif de réduction des cotisations sociales. En effet, les taux de cotisations ont certes été ramenés de 46 % à 26 %, mais il n'est pas certain que les employeurs s'en soient rendus compte. L'important est donc, désormais, de plafonner et de clarifier l'ensemble du système, et ce dans la plus grande transparence.

M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités, a souhaité, avant de présenter dans le détail les mesures figurant dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006, revenir sur les principes qui le sous-tendent. Le premier de ces principes est la continuité dans la mise en œuvre des réformes engagées, qui visent à sauvegarder les fondements de la sécurité sociale. La réforme de l'assurance maladie, en particulier, repose sur la maîtrise médicalisée et les changements de comportements. Elle doit être menée dans la durée, avec persévérance et vigilance, pour obtenir des résultats durables, car voter est une chose, mais l'impérieuse nécessité est d'appliquer les décisions prises. Le gouvernement s'engage sur des objectifs précis et il est pleinement confiant que les résultats visés seront atteints. La même continuité s'impose s'agissant de la politique familiale.

Le projet est ensuite fondé sur la détermination absolue de parvenir au redressement des comptes. La réduction des déficits ne doit évidemment pas être recherchée pour elle-même, mais bien parce qu'ils déséquilibrent le système de sécurité sociale français et compromettent sa viabilité. Or la volonté du gouvernement est précisément d'assurer la pérennité de ce système, en le modernisant et en l'organisant mieux, afin de pouvoir faire face aux défis nouveaux que sont le vieillissement de la population et la poursuite du progrès médical. La réduction des déficits exige donc des efforts qui doivent être menés avec détermination, car si aucune mesure n'était prise, la tendance serait à une augmentation inexorable de la dépense annuelle de trois milliards d'euros. Cette augmentation est normale, en raison du vieillissement de la population, mais il faut en mesurer les conséquences.

Après les efforts demandés l'année passée aux Français, ce qui est demandé cette année dans ce projet, c'est un effort particulier à l'industrie du médicament et, dans une moindre mesure, aux organismes complémentaires. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale confirme le respect de l'orientation solidaire de la réforme. En témoignent en particulier l'amélioration du dispositif d'aide à l'acquisition d'une assurance complémentaire et l'augmentation de l'incitation faite aux assurances complémentaires de s'impliquer dans la gestion du dispositif de la couverture maladie universelle complémentaire (CMUC) par une hausse du montant de ce forfait. En témoigne également le renforcement du plan vieillissement et solidarités, celui du plan Alzheimer et celui des moyens consacrés à l'amélioration de la qualité de vie des personnes handicapées.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 ouvre également le chantier de la démographie médicale, en permettant une meilleure répartition des médecins sur le territoire par des mesures incitatives et non par le biais d'une coercition qui serait obligatoirement vouée à l'échec. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 traduit l'engagement pris par le gouvernement d'accompagner et de renforcer la modernisation de l'hôpital.

Le contexte financier dans lequel s'inscrit ce projet a été décrit en premier lieu par la dernière commission des comptes de la sécurité sociale. En 2005, le déficit de l'ensemble des comptes du régime général est stabilisé par rapport à 2004, à 11,9 milliards d'euros, malgré le redressement important de l'assurance maladie. Cette stagnation est d'abord due au fait que la situation financière de la sécurité sociale pâtit en 2005 du ralentissement de la croissance de la masse salariale : par rapport aux prévisions initiales de l'an dernier, 0,8 point de masse salariale a été perdu, ce qui se traduit par une moindre progression des recettes de 1,2 milliard d'euros. La réduction significative du déficit de l'assurance maladie, qui passe de 11,6 à 8,3 milliards, conformément aux engagements du gouvernement et grâce aux premiers effets de la mise en œuvre de la réforme, marque une rupture très nette avec le creusement du déficit que connaissait cette branche jusqu'en 2004. Elle n'est toujours pas suffisante, et ne suffit pas à compenser les soldes négatifs enregistrés par les autres branches. Au total, le déficit de l'ensemble du régime général se maintient donc au même niveau, élevé, qu'en 2004, soit 11,9 milliards d'euros. Il aurait été, sans la réforme de l'assurance-maladie, de 16 milliards d'euros. Le gouvernement a l'ambition et le devoir de le réduire significativement, pour préserver la viabilité du système de sécurité sociale, en le ramenant à 8,9 milliards d'euros, soit une baisse de 25 %.

Il est temps de moderniser la procédure de présentation des projets de loi de financement de la sécurité sociale. Il est de tradition, avant sa présentation en conseil des ministres et son dépôt sur le bureau des Assemblées, d'en exposer les grandes lignes à la commission des comptes de la sécurité sociale, puis de l'adresser aux différentes caisses de sécurité sociale afin qu'elles l'examinent et émettent un avis. Dorénavant, pour garantir la transparence de l'information, le projet de loi de financement sera transmis en même temps aux caisses et aux parlementaires, et fera l'objet d'une présentation exhaustive au moment de la commission des comptes afin que le débat public ait lieu dans les meilleures conditions, l'ensemble des acteurs disposant simultanément d'une information transparente et exhaustive.

En 2005, l'objectif national des dépenses de l'assurance maladie (ONDAM) sera respecté. Pour les soins de ville, cela se traduit par un important infléchissement des dépenses. Alors que les dépenses de soins de ville progressaient jusqu'en 2003 au rythme de 7 à 8 %, leur croissance, selon les dernières données de la CNAMTS, n'est que de 1,9 % pour les huit premiers mois de l'année 2005 par rapport à la même période de 2004, alors que le début de l'année a été marqué par une forte épidémie de grippe hivernale que la France n'a pas connue en 2004. L'inflexion est particulièrement nette pour les honoraires médicaux, qui affichent sur les premiers mois de l'année une quasi-stabilité. Elle est encore plus marquée pour les indemnités journalières, qui décroissent de 2,6 % sur les huit premiers mois de l'année, après des hausses de plus de 10 % en 2002 et de 6,6 % en 2003. Ces bons résultats doivent être confortés. Ils sont certes encourageants, mais ils ne doivent pas conduire à relâcher un effort qui doit être permanent. Les Français ont compris la nécessité d'un changement de comportement, comme en témoigne leur adhésion massive au dispositif du parcours de soins. Ils sont près de 32 millions à avoir désigné leur médecin traitant, soit deux tiers des assurés, ce qui fait mentir les Cassandre professionnelles. L'ensemble des règles relatives au parcours de soins entreront en vigueur à partir du 1er janvier 2006, avec la mise en place des « contrats responsables » entre les assurances complémentaires et les patients et l'instauration de la majoration de participation pour les assurés qui ne passent pas par leur médecin traitant.

Dans son article 57, le projet de loi de financement de la sécurité sociale comporte un important volet de renforcement de la lutte contre les fraudes et abus. Si l'on veut que la solidarité nationale continue de garantir à tous ceux qui en ont besoin un haut niveau de prise en charge de leurs dépenses de santé, il faut faire cesser les dépenses abusives, a fortiori frauduleuses, financièrement et moralement inacceptables. Le projet prévoit ainsi de poursuivre les efforts de contrôle des indemnités journalières et de sanction des comportements abusifs, d'obliger les caisses de sécurité sociale à engager des poursuites lorsqu'elles détectent des fraudes et de renforcer la coopération entre les organismes de sécurité sociale, parce qu'il n'est pas normal que les cloisonnements entre administrations puissent permettre aux fraudeurs d'échapper aux sanctions. L'article propose également un meilleur contrôle des ressources perçues à l'étranger, parce qu'il n'est pas supportable de voir certains étrangers bénéficier gratuitement de la CMU alors qu'ils perçoivent par ailleurs des revenus confortables dans leur pays, et un suivi renforcé des associations de domiciliation.

La maîtrise médicalisée sera également poursuivie. Le volet 2006 du plan de redressement permettra de dégager une économie de près de 900 millions d'euros. Des actions spécifiques porteront sur les actes de biologie et les transports sanitaires, dont les dépenses croissent à un rythme élevé, comme vient de le rappeler la Cour des comptes. Concernant notamment la biologie, il est prévu à l'article 27, conformément à la recommandation de la Cour, de simplifier la procédure en cas de simple adaptation de la nomenclature, afin de faire évoluer plus facilement la nomenclature en fonction des coûts de production. La mise en œuvre du « plan médicament » doit aussi être poursuivie. Trois axes guident la politique du gouvernement, dans la continuité du plan de redressement. Le premier est la prise en charge du médicament à son juste prix. Cet objectif sera poursuivi à travers la mise en cohérence des prix des médicaments génériques en France avec les prix européens, avec une baisse de 13 % du prix du répertoire du générique au 1er janvier 2006. Il s'agit également de la poursuite de l'incitation à la substitution avec un délai butoir de 24 mois pour le remboursement par l'assurance maladie, sur la base du prix du générique. Le plan sur les produits de santé est poursuivi avec notamment la montée en charge des nouveaux conditionnements de trois mois, la baisse de prix de certaines spécialités que le progrès permet de produire à meilleur coût, et la consolidation du système conventionnel avec le comité économique des produits de santé (CEPS) pour le prix du médicament à l'hôpital. Le développement des médicaments génériques représente en effet un axe privilégié de la réforme de l'assurance maladie. En trois ans, la part des médicaments génériques dans les prescriptions est ainsi passée de 30 à 60 %. Puisque 89 % des Français se déclarent aujourd'hui favorables aux médicaments génériques, il est nécessaire d'accentuer l'effort.

L'adaptation de la prise en charge des médicaments dont la Haute Autorité de santé a jugé le service médical rendu insuffisant a fait que 156 médicaments ne seront plus remboursés à partir du 1er mars 2006, et 62 autres verront leur prise en charge ramenée de façon temporaire à 15 %, jusqu'au début de 2008. Parallèlement, afin de favoriser la prise en charge du médicament à son juste prix, une baisse de 20 % sera appliquée au tarif de ces produits. Elle bénéficiera avant tout aux patients, ainsi qu'à l'assurance maladie obligatoire et aux assureurs complémentaires. Ces derniers seront libres de prendre en charge ces traitements au-delà du taux de 15 % ou non, dans la logique des contrats responsables que peuvent dès à présent proposer les assureurs complémentaires. Pour ce qui est de l'aménagement des contributions de l'industrie pharmaceutique à la modération des dépenses d'assurance maladie, deux mesures sont proposées à l'article 15. La première consiste en une augmentation de la taxe sur le chiffre d'affaires de médicaments remboursables, dont le taux sera porté de 0,6 % à 1,96 % à titre exceptionnel en 2006, pour un rendement attendu de 300 millions d'euros. La seconde est l'élargissement des accords conventionnels prix-volumes passés entre les industriels et le comité économique des produits de santé ; ces accords seront en effet étendus aux médicaments vendus par les pharmacies hospitalières aux patients de ville. L'ensemble de ces mesures conduit à un effort de 2,1 milliards, hors mesures de taxe, dont 990 millions au titre du volet 2006 du plan de redressement.

Mieux gérer l'assurance maladie, c'est aussi continuer à mieux organiser le système de santé à moyen terme, qu'il s'agisse du système hospitalier ou de la démographie des professions de santé et de leur répartition équilibrée sur le territoire. Le monde hospitalier est engagé dans une réforme de grande ampleur : réforme de la gouvernance, nouvelles règles de planification, modernisation de la gestion, tarification à l'activité sont des réformes de fond qui nécessitent un temps d'adaptation pour tous. Personne n'ignore ni la situation financière tendue de nombre d'établissements de santé, ni le défi considérable que représente la mise en œuvre des réformes profondes des modes de tarification et de gouvernance des hôpitaux. Il faut donc accompagner les établissements dans leurs efforts d'adaptation et les aider à réussir leur modernisation pour mieux répondre aux besoins des Français. Afin de permettre aux établissements de santé de poursuivre leur modernisation et de répondre à leurs missions de service public, les moyens consacrés à l'hospitalisation progresseront de plus de 2 milliards d'euros après prise en compte du dépassement 2005, soit une augmentation de 3,44 %. Ces moyens nouveaux permettront de faire face à l'accroissement de la masse salariale et à la hausse du coût de la vie. Ils financent également la relance de l'investissement prévue dans le plan hôpital 2007 et les plans de santé publique. En définissant de nouvelles modalités de financement pour les établissements de santé, le gouvernement a souhaité que les règles de tarification soient d'une part plus justes et équitables, d'autre part mieux harmonisées entre le secteur public et le secteur privé, « dans la limite des écarts justifiés par les différences dans la nature des charges », comme l'indique la formule consacrée. Les outils nécessaires à la mesure de ces écarts sont complexes et tous ne sont pas encore disponibles ; ils sont pourtant indispensables à la réussite de cette convergence des tarifs. Une convergence réussie est préférable à une convergence précipitée ; il a donc été confié à l'IGAS une mission sur les conditions de cette convergence. Les conclusions définitives seront remises à la fin de l'année. Cependant, sur la base des premières indications de cette mission, le projet est conduit à proposer d'adapter le calendrier en supprimant l'échéance intermédiaire de 2008. Les enjeux définitifs sont inchangés. Parallèlement, il faut souhaiter des progrès rapides dans la construction d'une échelle de coût commune public privé, gage d'une transparence accrue. Par ailleurs, afin de garantir une répartition territoriale équilibrée de l'offre de soins, l'article 30 comporte une disposition tirant les conséquences de la suppression de la carte sanitaire. Avec la publication des nouveaux schémas régionaux d'organisation sanitaire, en mars 2006, les contraintes liées à la carte sanitaire, jugée inadaptée par tous, auront en effet pris fin. La définition d'objectifs quantifiés d'activité, qui figureront dans les contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens négociés entre les établissements de santé et les agences régionales de l'hospitalisation, garantira que l'évolution de l'activité des établissements est strictement conditionnée à celle des besoins de santé de la population. Le Fonds de modernisation des établissements de santé publics et privés est quant à lui doté de 327 millions destinés à soutenir à la fois l'investissement des établissements et leur modernisation sociale. Afin d'atténuer la charge pesant sur l'assurance maladie, une partie des subventions d'investissement sera remplacée par des aides en fonctionnement permettant de prendre en charge les surcoûts liés à un recours accru à l'emprunt. Pour donner un nouvel élan à l'hôpital et promouvoir sa modernisation, il faut poursuivre les efforts d'amélioration de la gestion hospitalière. Le volet hospitalier du plan de réforme de l'assurance maladie sera poursuivi, à travers l'amélioration de la politique des achats et de la gestion interne des établissements, qui devront également s'engager dans la maîtrise médicalisée. Les prescripteurs hospitaliers, comme leurs collègues exerçant en ville, doivent être responsabilisés.

S'agissant de la démographie des professions de santé, chantier prioritaire, le projet comporte, dans ses articles 27, 29 et 39, des dispositions qui s'inscrivent dans le cadre du rapport rédigé par le professeur Yvon Berland et complètent les mesures relatives à la répartition des professions de santé sur le territoire déjà prises par le gouvernement. En particulier, les aides conventionnelles à l'installation seront élargies aux remplaçants : le remplacement, passage quasi obligé des jeunes professionnels avant l'installation, est en effet une période importante pour faire naître des vocations d'installation. Cette nouvelle aide pourra être versée aux jeunes médecins effectuant des remplacements dans des zones déficitaires, ce qui permettra également d'alléger la charge de travail des médecins installés dans ces zones. Par ailleurs, les patients qui consulteront un médecin récemment installé qui n'est pas leur médecin traitant ne se verront pas appliquer la majoration de ticket modérateur, de façon à ne pas pénaliser la constitution de clientèle des jeunes médecins. Les moyens du Fonds d'aide à la qualité des soins de ville (FAQSV) sont également renforcés, et sa pérennité enfin assurée dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale, afin d'affirmer sa vocation à financer des projets facilitant la permanence des soins ou la bonne répartition des professionnels sur le territoire. Ces propositions seront complétées dans le cadre du plan de démographie médicale que le gouvernement mettra en place d'ici le 1er janvier 2006 pour garantir à tous un égal accès aux soins sur tout le territoire.

Afin de favoriser le retour à l'emploi, le projet prévoit également des mesures visant à éviter la rupture des droits aux indemnités journalières maladie et maternité pour les chômeurs qui reprennent une activité. L'article 26 prévoit ainsi que les demandeurs d'emploi qui reprennent une activité puissent conserver les droits à indemnité journalière dont ils bénéficiaient au titre de leur régime chômage.

Enfin, pour faire face, notamment, au risque de pandémie de grippe d'origine aviaire, le projet prévoit une dotation accrue de l'assurance maladie au fonds de concours des plans de réponse aux menaces sanitaires graves, et le gouvernement proposera au parlement de porter le montant de la dotation pour la grippe aviaire à 200 millions.

L'ensemble de ces mesures se traduit par un ONDAM 2006 de 138,5 milliards d'euros, en progression de 2,7 % à périmètre constant et de 2,5 % hors CNSA. Comme indiqué, l'objectif de dépenses des établissements de santé devrait progresser de 3,44 % et l'objectif des soins de ville hors produits de santé de 3,2 %.

Pour atteindre l'objectif de réduction significative du déficit, des recettes complémentaires seront également affectées à l'assurance maladie. Le plan de redressement conçu à l'été 2004 avait en effet été bâti sur des hypothèses de croissance de la masse salariale de 4,7 %, alors que la prévision d'évolution de la masse salariale est aujourd'hui 3,7 %, différence qui fait perdre près d'un milliard d'euros de recettes à la branche maladie. Pour compenser cette perte, le projet prévoit de prélever par anticipation les cotisations dues sur les intérêts capitalisés des plans d'épargne-logement (PEL) de plus de dix ans. Cette mesure ne constitue pas un nouvel impôt. Ni les règles d'assujettissement des PEL ni le taux des cotisations perçues ne sont modifiés. Il s'agit simplement de prélever par anticipation des sommes immobilisées sur les comptes et qui, en tout état de cause, étaient dues au dénouement du plan. D'autres mesures de recettes plus ponctuelles sont proposées dans le projet, pour un montant total de 172 millions d'euros pour le régime général, dont 86 millions pour la branche maladie, 60 millions pour la branche vieillesse, 18 millions pour la branche famille et 9 millions pour la branche AT-MP. Une disposition vise à aménager le régime d'assujettissement aux cotisations sociales des indemnités de rupture. En outre, pour achever la mise en cohérence de la politique d'exonérations de charges sociales, il est proposé de supprimer l'abattement de 30 % des cotisations patronales créé en 1992 pour les salariés à temps partiel. Cet abattement a en effet cessé de s'appliquer aux nouvelles embauches un an après l'abaissement de la durée légale du travail. En le supprimant, le gouvernement rationalise le droit des exonérations. Les employeurs pourront appliquer le dispositif d'allégement général des cotisations sociales, la « réduction Fillon » qui a remplacé les anciennes aides. Pour les employeurs de salariés dont la rémunération est inférieure à 1,33 fois le SMIC, cette réduction est d'ailleurs plus avantageuse que l'abattement supprimé. D'autres mesures visent également à clarifier l'assiette des cotisations et contributions sociales et à renforcer les moyens de lutte contre le travail dissimulé, notamment en instaurant un système de sanctions administratives permettant d'exclure du bénéfice des aides à l'emploi les entreprises dans lesquelles du travail dissimulé a été constaté.

Une autre mesure de recette est proposée au profit de l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé : l'article 38 clarifie l'obligation faite aux annonceurs d'accompagner les publicités alimentaires de messages à caractère sanitaire ou, à défaut, de verser une contribution financière à l'Institut national de prévention et d'éducation à la santé (INPES). Cette mesure s'inscrit dans le cadre de la politique de prévention et de sensibilisation des consommateurs aux problèmes de santé publique dont l'impact financier est très lourd pour l'assurance maladie. Le forfait hospitalier journalier passera, comme décidé en 2004, de 14 à 15 euros.

Enfin, il est proposé d'instaurer une participation, plafonnée à 18 euros, sur les actes d'une valeur supérieure à 91 euros. Aujourd'hui, lorsqu'un assuré reçoit, en ville ou dans le cadre d'une hospitalisation, des soins médicaux d'un coût de plus de 91 euros, il est dispensé de ticket modérateur. Désormais, cette participation sera étendue aux actes d'une valeur supérieure à 91 euros et aux séjours hospitaliers au cours desquels un tel acte a été pratiqué, et plafonnée à 18 euros quel que soit le montant total des frais encourus. Cette participation ne concernera pas les personnes bénéficiant d'une exonération totale : les femmes enceintes, les nouveau-nés hospitalisés, les titulaires d'une rente pour accident du travail ou maladie professionnelle ou d'une pension d'invalidité, ainsi que les six millions de personnes reconnues atteintes d'une affection de longue durée. Elle ne portera pas non plus sur les actes de biologie et de radiologie. Pour les 92 % de Français qui en disposent, cette participation sera prise en charge par leurs complémentaires santé, lesquelles peuvent sans peine consentir à un tel effort, qui ne représente que 0,58% du montant total des remboursements qu'elles effectuent. La plus grande transparence doit prévaloir à ce sujet, afin que les Français sachent si les augmentations de primes qui leur seraient éventuellement demandées sont justifiées. Dans le cas des 4,7 millions de personnes couvertes par la CMUC, la participation sera acquittée par l'Etat.

Parallèlement, afin de permettre aux Français qui, pour des raisons financières, renoncent actuellement à souscrire un contrat de couverture complémentaire, l'aide à l'acquisition d'une complémentaire sera substantiellement relevée : le montant de l'aide sera ainsi porté de 75 à 100 euros par an pour les moins de 25 ans, de 150 à 200 euros pour les 25-59 ans, et de 250 à 400 euros pour les plus de 60 ans, ce qui représente une hausse de 60 %. Deux millions de Français sont concernés, et 265 000 seulement ont bénéficié du dispositif institué en 2004, qu'il fallait rendre plus attrayant encore et qu'il faudra mieux faire connaître. Par ailleurs, afin d'inciter davantage les organismes complémentaires à la gestion du dispositif de la CMU complémentaire, le projet prévoit de porter de 304,52 à 340 euros par an, soit une revalorisation de 11,6 %, le forfait de la CMUC. Par ailleurs, le taux de la taxe instaurée au profit du fonds CMU lors de la mise en place de la CMU en 2000 passera de 1,75 % à 2,5 %. Cette hausse, d'un rendement d'environ 200 millions, est très inférieure aux économies que les organismes complémentaires vont réaliser du fait des mesures prévues par le projet de loi de financement de la sécurité sociale dans le domaine du médicament.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille, a souligné que, s'il faut ne retenir qu'un chiffre du projet, ce serait la réduction de 25 % du déficit de la sécurité sociale en 2006. En effet, l'effort considérable consenti fera que le déficit passera de 11,9 milliards d'euros en 2005 à 8,9 milliards fin 2006. Si la réduction des déficits n'est pas une fin en soi, elle permettra de sauver l'assurance maladie et de dégager des marges supplémentaires pour faire face à l'évolution des besoins. On connaît les listes d'attente qui caractérisent le système britannique et on sait que le système américain laisse à l'écart non seulement les plus démunis, mais une bonne partie de la classe moyenne. Le modèle français de sécurité sociale que le gouvernement s'attache à préserver, c'est celui qui finance l'accès au progrès médical pour tous. On a beaucoup parlé du retrait de plusieurs médicaments de confort mais, ce faisant, on a oublié que 196 médicaments innovants et efficaces ont été ajoutés à la liste des médicaments remboursés et que le plan Hôpital 2007 a été mis en œuvre.

Le projet tient compte des mutations démographiques en cours en proposant d'augmenter de plus de 13 % les dépenses au bénéfice des personnes âgées dépendantes. Le rythme de création de places en institutions est doublé par rapport à ce qui était prévu dans le plan « vieillissement et solidarités » lancé en 2003 ; en deux ans, 20 000 places auront été créées dans les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), et 17 000 places pour services de soins infirmiers à domicile. Le même effort vaut pour les personnes atteintes de handicaps, avec une augmentation de 5 % de la partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale qui traite du handicap, et d'un peu plus de 6% en tenant compte de la participation de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA). Cela permettra de créer des places en établissements médico-sociaux et de financer le doublement des sommes servies par les départements au titre de l'allocation compensatrice pour tierce personne. Au total, le projet consacre plus de 800 millions d'euros aux soins destinés aux personnes âgées dépendantes et aux personnes handicapées en établissements médico-sociaux.

Dans le domaine de la politique familiale, la convention d'objectifs et de gestion signée avec la CNAF prévoit une évolution de 7,5 % par an du fonds national d'action sociale. Au total, 72 000 places de crèche auront ainsi été créées entre 2002 et 2008. Par ailleurs, conformément aux annonces faites lors de la dernière conférence de la famille et qui tendent à permettre de concilier vie familiale et vie professionnelle dans une France qui connaît le meilleur taux de natalité d'Europe, le projet offre une nouvelle possibilité aux parents, en créant un complément optionnel de libre choix d'activité grâce auquel l'un ou l'autre parent peut choisir de bénéficier, à partir du troisième enfant, d'un congé d'un an rémunéré à hauteur de 750 euros. Cette option permettra à celles ou ceux qui la choisiront de revenir plus facilement vers l'emploi, ce qui favorisera le bon déroulement de leur carrière. Pour donner suite à la conférence de la famille, le projet prévoit également la réforme de l'allocation de présence parentale auprès d'un enfant gravement malade. Elle sera désormais accessible à 13 000 familles au lieu de 3 000 actuellement ; de plus, un complément sera versé lorsque le traitement de l'enfant implique de déplacements importants. Le déficit de la branche famille est stabilisé à 1,1 milliard d'euros. Il est conjoncturel et le retour à l'équilibre est prévu pour 2009. Enfin, ce sont 250 000 familles qui auront accès à la PAJE d'ici à 2007, soit plus que les prévisions initiales.

Le déficit de l'assurance vieillesse sera ramené de 2 milliards d'euros à 1,4 milliard, en raison du « papy boom » mais aussi des départs anticipés à la retraite qui ont déjà profité à plus de 200 000 personnes qui avaient commencé à travailler très jeunes. Les bénéficiaires de ce dispositif seront 300 000 fin 2006. Cela a certes un coût, mais c'est un très grand progrès social. Pour faire face à ces dépenses accrues, la hausse des cotisations de 0,2 point décidée dans le cadre de la réforme des retraites prendra effet en 2006 selon une répartition entre part patronale et part salariale qui se fera dans un souci d'équité, après concertation avec les partenaires sociaux. Cette majoration contribuera fortement à la réduction du déficit de la branche vieillesse. Le projet prévoit également deux mesures relatives à la gestion des régimes de retraite. D'une part, il parachève l'intégration du régime vieillesse des cultes au régime général et d'autre part son article 47 prévoit l'instauration de nouvelles règles de gouvernance des régimes d'avantage social vieillesse gérés par les sections professionnelles de la caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés (CNAVTS).

Enfin, deux mesures sont prévues pour limiter le déficit du Fonds de solidarité vieillesse. En recettes, il est proposé d'élargir l'assiette de la contribution sociale de solidarité des sociétés en y incluant les entreprises du secteur public assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée. L'impact de cet élargissement est estimé à 70 millions d'euros, dont 56 millions pour le FSV et 14 millions pour la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés. En dépenses, il est proposé d'harmoniser les règles de service du complément d'allocation unique de solidarité avec celles des autres minima sociaux, en conditionnant son versement à la résidence sur le territoire. Jusqu'à présent, les lacunes de la législation ont en effet suscité un vaste effet d'aubaine, certains non-résidents bénéficiant d'un minimum vieillesse d'autant plus important qu'ils avaient peu travaillé en France. Cela jouera pour quelque 200 000 personnes en 2006 et, sachant que l'augmentation du nombre de bénéficiaires est de 10 à 15 % chaque année, il était grand temps d'agir. Cependant, on ne reviendra pas sur les droits acquis. Cette mesure devrait permettre de dégager une économie de l'ordre de 50 millions en 2006 et de 900 millions cumulés à la fin de 2009. Afin d'alléger les charges qui pèsent sur la FSV, le gouvernement avait proposé de lui transférer les excédents de la CNAVTS en 2004, proposition sur laquelle la CNAVTS a émis un avis négatif. Soucieux de concertation, le gouvernement a tenu compte de cet avis en décidant d'affecter cet excédent non pas au FSV, mais au Fonds de réserve des retraites.

S'agissant enfin de la branche des accidents du travail et des maladies professionnelles, la loi du 13 août 2004 avait invité les partenaires sociaux à émettre des propositions pour une réforme de la branche, qui devrait notamment passer par une refonte du système de tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles. Ils doivent encore le faire et, dans l'attente du résultat de cette concertation, le gouvernement propose de ramener de 590 à 175 millions le déficit prévisionnel de la branche, grâce à une augmentation provisoire et immédiate de 0,1 point du taux de cotisation.

Après l'exposé des ministres, le président Jean-Michel Dubernard a posé les questions suivantes :

- M. Philippe Séguin, Premier président de la Cour des comptes, s'est montré d'une extrême sévérité sur l'état des finances sociales lors de son audition par la commission sur le rapport 2005 de la Cour consacré à la sécurité sociale, en appelant à une « révolution » dans ce domaine. Compte tenu de la complexité des circuits et de l'effet déplorable des multiples raccommodages proposés année après année, une remise à plat du système ne s'impose-t-elle pas ?

- Compte tenu des résultats de l'étude menée par l'office parlementaire d'évaluation des politiques de santé (OPEPS) sur l'augmentation prévisible de la prévalence de la maladie d'Alzheimer et des maladies apparentées, comment le gouvernement prépare le choc financier que représentera la prise en charge de ces malades à l'horizon 2020 ?

- Les travaux de la mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (MECSS) portent sur l'organisation et les coûts de gestion des branches de la sécurité sociale ; est-ce que les conventions d'objectifs et de gestion (COG) conclues avec les branches maladie et vieillesse comportent bien l'objectif d'une amélioration dans ces deux domaines ? En particulier, comment sont calculées les enveloppes budgétaires ?

M. Gilles Carrez, rapporteur général, a rappelé que 20 milliards d'euros de recettes fiscales du budget de l'Etat doivent être désormais affectées au financement de la politique d'allégement des charges sur le travail, notamment sur les bas salaires. Il a demandé au ministre si la dynamique de ces recettes épousera exactement celle des allégements de charges et si une clause de « revoyure » est prévue comme il en existe une dans le cadre de la décentralisation en ce qui concerne les transferts de compétences et de recettes correspondantes. Il a également souhaité connaître le sentiment du ministre sur ce risque pour les comptes sociaux et lui a demandé s'il n'estimait pas venu le temps de la transparence sur les taux de cotisations.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances, a constaté que le gouvernement propose d'augmenter les cotisations vieillesse de 0,2 point. Pourtant, l'augmentation permanente des cotisations a ses limites et les pays scandinaves, ayant fait le constat d'une relation directe entre créations d'emplois et prélèvements obligatoires, ont entrepris de réduire délibérément ces derniers. La France doit donc faire un effort exceptionnel et ne pas devenir, en cette matière, le champion de l'Union européenne.

Sans revenir sur le cadrage financier de la réforme de l'assurance-maladie, qui est conforme à la loi du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie, M. Jean-Pierre Door, rapporteur pour les recettes et l'équilibre général, a posé les questions suivantes :

- Est-il possible d'aller plus loin dans certains domaines, pour les consultations externes à l'hôpital par exemple, ou en matière d'application aux pharmaciens des dispositions de la loi « Dutreil » relatives aux marges arrières.

- Concernant la question générale de l'avenir des ressources de la protection sociale, son financement est devenu complexe au point d'être illisible. Ne serait-il pas opportun de créer un organisme de concertation chargé de réfléchir à des réformes radicales ?

- Etant donnée la situation désastreuse du Fonds de financement des prestations sociales des non salariés agricoles (FFIPSA), dont le déficit est structurel, le comité de surveillance a proposé l'émission d'un emprunt dont les intérêts seraient amortis par l'Etat : quelle est la position du gouvernement sur la question ?

- Ne serait-il pas opportun d'étendre la réforme de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) portant création d'un directeur général aux autres branches du régime général. En outre, le gouvernement entend-il suivre les recommandations de la mission de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) et de l'Inspection générale des finances (IGF) relatives aux lacunes du pilotage de la gestion informatique des caisses en renforçant les moyens de la tutelle ? L'article 41 du projet de loi de finances semblant contredire l'idée d'un mécanisme garantissant une compensation automatique, à l'euro près, des exonérations de cotisations sociales par l'Etat, il serait nécessaire d'obtenir des précisions à ce sujet. Enfin, quel est l'état d'avancement des négociations relatives à la conclusion de la COG de la branche maladie ?

M. Jacques Domergue, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail, après avoir constaté que tout laisse à penser que l'ONDAM « soins de ville » sera respecté mais qu'un effort doit être fait sur la prescription des médicaments, a demandé au ministre de confirmer la baisse du prix des médicaments et la généralisation des tarifs forfaitaires de responsabilité.

Le poids de la prise en charge des affections de longue durée dans les dépenses de santé s'accroît : le périmètre des ALD ne doit-il pas être précisé ? Tel qu'il est rédigé, l'article 29 du projet, qui traite des mesures relatives à l'installation des jeunes médecins, les dispense du suivi du parcours de soins lors de leur installation, quelle que soit la zone considérée ; ne faudrait-il pas prévoir expressément que cette disposition s'appliquera à la condition que la nouvelle installation se fasse dans une zone paupérisée ou sous-médicalisée ?

Enfin, s'agissant de la convergence entre hôpitaux publics et hôpitaux privés, deux théories s'opposent : les hôpitaux privés souhaitent qu'elle soit réalisée au plus vite, conformément aux échéances prévues, les hôpitaux publics tiennent un discours inverse en insistant sur ce qu'ils tiennent pour le danger de la convergence. Quelle est la position du gouvernement ?

Après avoir demandé au ministre comment le gouvernement prévoit d'abonder le Fonds de réserve des retraites et comment il entend résorber le déficit du Fonds de solidarité vieillesse, Mme Cécile Gallez, rapporteure pour la branche vieillesse, a souhaité faire le point sur l'état d'avancement des conventions tripartites avec les établissements d'accueil des personnes âgées et demandé au ministre si la tarification pouvait être revalorisée pour tenir compte des difficultés particulières liées à la prise en charge de la maladie d'Alzheimer. Elle a ensuite posé les questions suivantes :

- les logements-foyers bénéficieront-ils de forfaits soins revalorisés annuellement, même s'ils ne signent pas ces conventions ?

- comment régler le problème de la prise en charge du transport des personnes âgées dépendantes si l'on souhaite développer l'accueil temporaire ou de jour ?

- le projet de loi réorganisant le régime des pharmacies à usage interne des établissements d'hébergement des personnes âgées, quel sera l'impact de ces modifications pour les résidents ?

- la mise aux normes de sécurité représente de très fortes dépenses pour les maisons de retraite et les logements-foyers : dans ce contexte, des aides à l'investissement pourraient-elles être prévues ? Les normes pourraient-elles être moins rigoureuses ?

- pourquoi le montant de l'allocation personnalisée d'autonomie versée aux personnes hébergées en établissement est plus faible que celui prévu pour les personnes vivant à leur domicile ? Cette allocation ne pourrait-elle pas être versée directement aux logements-foyers ?

- dans quel délai sera remis le rapport de faisabilité de l'IGAS et de l'IGF quant à la création d'une assurance complémentaire contre la dépendance proposée par le sénateur Alain Vasselle ?

Après avoir noté que la politique familiale menée depuis 2002 a consisté essentiellement à faciliter la conciliation entre vie professionnelle et vie privée par l'adoption de mesures aidant les familles à financer le recours à un mode de garde, Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure pour la branche famille, a jugé que cette politique doit être complétée par un autre volet, plus redistributif, destiné aux familles en situation de précarité. Ainsi, les familles monoparentales sont souvent réduites à vivre de l'allocation de parent isolé (API), car leur insertion professionnelle est impossible, faute de mode de garde rapidement mobilisable. Comment leur donner une réelle priorité pour l'obtention de places en crèche ? En 2004, la conférence de la famille avait retenu comme thème principal « Pauvreté et précarité » : quelles suites le gouvernement envisage-t-il de donner au rapport de M. Martin Hirsch ?

Puis elle a posé les questions suivantes :

- La création du nouveau congé parental de courte durée est présentée par le Premier ministre comme une première étape. A combien estime-t-on les bénéficiaires potentiels de ce dispositif ? Comment est-il envisagé de faire évoluer le congé parental ? Sera-t-il ouvert aux familles de deux, voire d'un enfant ?

- S'agissant des aides au logement, alors que les aides personnelles au logement n'ont pas été revalorisées depuis 2003, un simple relèvement de 1,8 % du loyer-plafond à compter du 1er septembre 2005 a été annoncé, le plafond de ressources et le forfait de charges restant inchangés. Le gouvernement peut-il apporter quelques éclaircissements sur cette question, essentielle pour les familles modestes dont le taux d'effort pour l'accès au logement ne cesse d'augmenter ? Pourquoi, par ailleurs, la branche famille devrait-elle supporter la totalité de la charge de l'APL versée aux familles locataires, alors que l'Etat en assumait 48,35 % jusqu'à présent ? Ce transfert de charges, estimé à 271 millions en 2005, est-t-il un nouveau signe du désengagement de l'Etat de la politique du logement ?

- La signature de la convention d'objectifs et de gestion de la CNAF résulte d'un compromis avec l'Etat, prévoyant notamment l'augmentation de 7,5 % par an du Fonds national d'action sociale (FNAS) pour la période 2005-2008, soit bien moins que les 13 % que souhaitait la caisse. Cette restriction des moyens destinés à l'action sociale imposera une plus grande sélectivité aux interventions de la branche. Quels domaines d'action en subiront les conséquences ?

- Alors que la prestation d'accueil du jeune enfant (PAJE) devait entrer en application pour tous les enfants à compter du 1er janvier 2007, le maintien des anciennes prestations « petite enfance » jusqu'en 2009 a été annoncé. Est-il exact que les économies ainsi réalisées - et estimées à 440 millions d'euros sur trois ans - permettront de financer la création du congé parental de longue durée ? Ou bien s'agit-il d'un désengagement de plus ?

En conclusion, la rapporteure pour la branche famille a signalé que beaucoup des questions qu'elle a adressées par écrit au gouvernement au cours des derniers mois étaient restées sans réponse et a demandé où en était leur traitement.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, a souligné que la réforme de l'assurance-maladie adoptée en 2004 repose sur la volonté de changer profondément les comportements des acteurs du système de santé. Un an après, force est de reconnaître que les résultats sont là, mais aussi qu'ils sont insuffisants. Le changement de comportement des prescripteurs a ainsi permis d'économiser 600 millions d'euros, mais ce n'est qu'un premier pas, et l'objectif visé en 2006 est d'un milliard et demi. Quant aux Français eux-mêmes, ils ont maintenant choisi, dans leur majorité, un médecin traitant, et sont incités à modifier leurs habitudes de consommation médicamenteuse. Enfin, les hôpitaux sont engagés dans une vaste réforme, et il est souhaitable que le plan Hôpital 2007 soit mis à profit pour encourager les changements susceptibles d'avoir un « retour sur investissement ».

La gestion du risque constitue, pour l'assurance maladie, une culture nouvelle, à laquelle elle n'est pas encore habituée. A titre d'exemple, il a fallu plus d'un an pour modifier les formulaires protocole inter-régime d'examen spécial (PIRES) relatifs aux affections de longue durée (ALD). Mais, au-delà du rythme d'avancement de la réforme, au-delà de l'optimisation des comportements, qui finira bien par atteindre ses limites, il faut poser sans attendre cette question fondamentale : l'équilibre passe-t-il par un simple accroissement des recettes, au risque d'alourdir le coût du travail, ou bien par une responsabilisation accrue des Français et des caisses complémentaires ?

S'agissant enfin de l'assurance vieillesse, le rythme, relativement faible, auquel est actuellement abondé le Fonds de réserve des retraites, dont les actifs n'atteignent que 25 milliards d'euros à ce jour, et ne devraient s'accroître que de 2 milliards en 2006, permet-il d'envisager qu'il puisse remplir, à l'horizon 2020, la fonction de « lissage » qui lui était assignée à l'origine ? Quel niveau devrait-il atteindre pour cela ? Le Premier ministre qui a décidé sa création, M. Lionel Jospin, envisageait 1 000 milliards de francs, soit environ 150 milliards d'euros...

M. Jean-Marie Le Guen a indiqué que le groupe socialiste ne partage pas l'enthousiasme avec lequel les ministres ont présenté le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006. C'est en effet un projet de loi de financement de la sécurité sociale lourdement déficitaire, qui fragilise durablement le système de protection sociale, et prétendre que le déficit serait deux fois plus élevé si la politique menée sous la précédente législature avait été poursuivie après 2002 n'est qu'un sophisme. Au demeurant, les prévisions pluriannuelles présentées, qu'il s'agisse de l'ONDAM ou des recettes, ne sont jugées crédibles par personne. Quant à l'idée de supprimer tout décalage entre le moment où certaines dispositions sont soumises à la concertation et celui où elles sont transmises au Parlement, on ne peut s'empêcher d'y voir, outre l'effet du récent et unanime avis négatif des caisses sur le présent projet, le souci que la presse ne fasse plus état prématurément de certaines mesures susceptibles d'être mal accueillies, tel le forfait de 18 euros sur les actes médicaux lourds, qui constitue au demeurant un précédent on ne peut plus regrettable.

Au-delà du caractère irréaliste et farfelu des tableaux de financement présentés, le plus contestable - du point de vue de la méthode - est que la plupart des mesures importantes annoncées ne sont pas dans le projet, qu'il s'agisse de la politique du médicament, de la politique hospitalière ou de la politique des soins de ville. Il est singulier qu'un an seulement après le vote de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale, le Parlement continue de débattre sur la base d'engagements purement verbaux du gouvernement ; ainsi, concernant la franchise élargie, seul le principe du forfait sera inscrit dans la loi, et son montant, de 18 euros initialement, pourra être réévalué par simple décret. La faible portée du vote du Parlement sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale est un élément supplémentaire d'affaiblissement du lien de confiance entre les citoyens et leurs gouvernants.

Mme Jacqueline Fraysse a déclaré, au nom du groupe des député(e)s communistes et républicains, s'être réjouie lorsque le ministre a annoncé un « coup de pouce » en faveur de l'hôpital, mais n'en avoir été que plus déçue en constatant que l'ONDAM hospitalier ne progresse que de 3,44 % - au lieu des 4,32 % réclamés par la Fédération hospitalière de France -, soit moins encore que les 3,6 % de l'an dernier - alors que la FHF demandait, cette fois, 4,74 %. Elle s'est par ailleurs préoccupée de l'endettement des hôpitaux : est-il vrai que 70 % des établissements publics sont endettés ?

Elle a ensuite posé les questions suivantes :

- Dans le domaine de la prévention et de la santé publique, des moyens importants ont certes été annoncés pour lutter contre le risque de grippe aviaire, mais il semble que l'Etat ne verse pas un centime et mette à contribution les caisses de sécurité sociale. N'est-ce pas pourtant une mission qui lui appartient en propre ?

- Dans le domaine du médicament, combien de produits nouveaux ont été mis sur le marché en 2005, et à quel prix, compte tenu des dispositions de 2002 relatives à la liberté tarifaire pour les médicaments nouveaux ?

- S'agissant des prévisions de recettes, le gouvernement confirme-t-il que le montant des exonérations de charges patronales non compensées s'élève à 21,6 milliards d'euros, et si oui, à quelle période de référence s'applique ce montant ? L'Etat envisage-t-il de payer un jour à la sécurité sociale les arriérés qu'il lui doit ?

- Enfin, la référence que, dans ses discours, le gouvernement fait à la solidarité n'est-il pas contradictoire avec les aides et incitations à la souscription de couvertures complémentaires ? La solidarité doit consister d'abord à garantir à chaque Français une bonne couverture de base, au lieu de la réduire sans cesse, par exemple par le nouveau forfait de 18 euros, au point que la France n'est plus, pour ce critère, qu'au dix-septième rang des pays de l'Organisation de coopération et de développement économique (OCDE).

M. Jean-Luc Préel, s'exprimant au nom du groupe UDF, a dit craindre que l'on ne perde de vue l'objectif qui doit être celui d'une politique de santé digne de ce nom : assurer l'égalité d'accès à des soins de qualité. La France s'oriente de plus en plus, en effet, vers une médecine à plusieurs vitesses : les dépassements d'honoraires, les baisses de taux de remboursement, l'augmentation du forfait hospitalier, le nouveau forfait de 18 euros aggravent l'inégalité devant la santé, au détriment de ceux qui n'ont pas les moyens de s'offrir une bonne couverture complémentaire.

S'agissant de l'institution du médecin traitant, il est abusif de présenter comme un succès le nombre de formulaires renvoyés ; on pourrait invoquer, inversement, l'enquête réalisée auprès de 14 000 médecins, dont 14 % seulement considèrent qu'il s'agit d'une bonne réforme !

Le gouvernement avait lui-même qualifié d'« historique » le déficit de 2004, qui s'élevait, toutes branches confondues à 11,9 milliards d'euros. Que dire de celui de 2005, dont le montant est identique, et qui, pour la première fois, touche les quatre branches ? Certes, le déficit de l'assurance maladie est réduit de 3 milliards d'euros, mais l'exploit n'a rien de remarquable, quand les recettes supplémentaires augmentent de 4,6 milliards, dont 2,2 milliards au titre de la contribution sociale généralisée (CSG), 0,8 milliard au titre de la contribution sociale de solidarité (C3S), 1 milliard au titre des taxes sur le tabac, de 0,5 milliard grâce au forfait d'un euro et 0,1 milliard grâce à l'augmentation du forfait hospitalier. Et si l'on ajoute au déficit de la sécurité sociale proprement dite celui du FSV, celui du FFIPSA  - privé cette année de la subvention de l'Etat - et celui de l'UNEDIC, on dépasse les 18 milliards d'euros. La vérité est que, comme l'a dit le Premier président de la Cour des comptes, la protection sociale n'est plus financée.

S'agissant du système de santé lui-même, l'hôpital va mal : la plupart des établissements ont des reports de charges, et le taux de 3,44 % retenu pour la progression de l'ONDAM est construit sur un rebasage. On ignore encore, en outre, le taux de tarification à l'activité pour 2006 : restera-t-il de 25 %, ou sera-t-il augmenté ?

La politique contractuelle menée ces trois dernières années avec l'industrie pharmaceutique risque fort, par ailleurs, d'être mise à mal par le revirement du gouvernement, qui a décidé unilatéralement, sans concertation, de la ponctionner de 2 milliards supplémentaires. S'il persiste dans cette voie, y aura-t-il encore une industrie pharmaceutique en France dans quelques années ?

Dans le domaine des soins ambulatoires, peut-on espérer la revalorisation des frais de déplacement, ainsi que leur harmonisation entre les différentes professions, le prix de l'essence étant le même pour tout le monde ?

Enfin, le Fonds d'aide à la qualité des soins (FAQSV) est doté de 100 millions d'euros, mais il est prévu de le mettre à contribution pour la mise en place du dossier médical personnel, dont le coût est estimé à un milliard d'euros par M. Dominique Coudreau, qui préside le groupement d'intérêt public de préfiguration du dossier médical personnel. Quelle sera la hauteur de sa participation ?

M. Denis Jacquat, après avoir rappelé que Mme Georgina Dufoix, lorsqu'elle était ministre en charge de la sécurité sociale, jugeait impossible que l'on arrive jamais à équilibrer la sécurité sociale, a loué, au nom du groupe UMP, les efforts et le volontarisme déployés par les ministres pour parvenir néanmoins à cette fin.

Leur souci de relever le défi de la longévité par une meilleure prise en charge des personnes âgées est à saluer ; cependant, l'obstacle que représente la difficulté de faire le partage entre ce qui relève du sanitaire et ce qui relève du médico-social est difficile, la frontière étant souvent ténue, voire subjective. L'on invoque souvent, s'agissant du taux d'encadrement des maisons de retraite, le modèle scandinave ou allemand ; cependant, des études comparatives réalisées entre établissements mosellans et sarrois ont fait apparaître que ce taux était en réalité plus faible dans ces derniers - et encore il comprend souvent des étudiants qui y travaillent bénévolement. Il ressort en outre du rapport réalisé par Mme Cécile Gallez au nom de l'OPEPS que, du fait du succès de la politique visant à favoriser le maintien à domicile, les personnes âgées le sont de plus en plus lorsqu'elles entrent en institution et qu'un grand nombre d'entre elles sont en fait atteintes de maladies neuro-dégénératives, plus que de handicaps physiques ou physiologiques. Peut-être conviendrait-il de prévoir, dans les établissements, davantage de lits adaptés à ces maladies que de lits médicalisés proprement dits ?

S'agissant des retraites, l'existence du Fonds de réserve, qui avait été une bonne initiative, n'a de sens que s'il est alimenté par des recettes pérennes. Sera-ce bien le cas ?

Enfin, il n'est pas gênant qu'il n'y ait pas de ligne budgétaire spécifique pour la lutte contre la grippe aviaire, distincte des autres actions de prévention.

Après avoir rappelé qu'il avait été rapporteur sur cette question à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, M. Denis Jacquat, a expliqué que son rapport, qu'il a défendu le lendemain même de la présentation du plan de prévention de la pandémie par le ministre, reprenait le contenu de l'intervention du ministre et qu'il a obtenu une approbation à l'unanimité.

M. Maxime Gremetz a estimé que la prétendue réforme de l'assurance maladie dont se targue le gouvernement n'en est pas une. Il s'agit simplement de réduire un peu le déficit et de faire payer les Français, en accélérant la privatisation des soins tout en étatisant, paradoxalement, la gouvernance. Pour être bien soigné, il est devenu impératif de disposer d'une bonne couverture complémentaire : toutes les mesures prises vont dans ce sens, la dernière en date étant l'institution d'une participation de 18 euros pour les actes médicaux lourds, qui rapportera autant que le cadeau fiscal fait aux 14 000 plus riches assujettis à l'impôt sur la fortune.

Aucun gouvernement n'a voulu aborder la question de fond : celle du financement même de la sécurité sociale. Pour garantir durablement celui-ci, il faudrait, comme n'ont cessé de le proposer les députés communistes et républicains, développer l'emploi, augmenter les salaires, et surtout réformer l'assiette, en taxant les revenus financiers, en revenant largement sur les quelque 21 milliards d'euros d'exonérations de cotisations patronales - qui sont, de l'aveu même du Premier président de la Cour des comptes, M. Philippe Séguin, un gaspillage générateur de simples effets d'aubaine - et en modulant les cotisations. Il n'est pas normal de mettre davantage à contribution l'entreprise qui embauche que celle qui licencie.

M. Gérard Bapt s'est d'abord inquiété des moyens dont disposera le Fonds d'aide à la qualité des soins de ville (FAQSV) pour remplir, en plus de toutes ses missions, celle de financer les structures participant à la permanence des soins, telles que les maisons médicales de garde ; il a ensuite plaidé pour que les praticiens hospitaliers titulaires d'un diplôme étranger voient leur statut, leurs conditions de travail et leur rémunération - souvent inférieure à 1 500 euros par mois , ce qui est scandaleux - revalorisés.

Il serait bon de connaître la date de publication des textes d'application de l'article 38 du projet relatif aux « messages publicitaires en faveur de boissons avec ajouts de sucres, de sel ou d'édulcorants de synthèse ou de produits alimentaires manufacturés ». En outre, il est très étonnant que l'affectation à l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé (INPES) du produit de la taxe de 1,5 % perçue lorsque ces messages ne comporteront pas d'information à caractère sanitaire suffisante soit présentée, aux termes mêmes de l'exposé des motifs de l'article, comme ouvrant la voie à un allégement de la contribution de l'assurance maladie au financement de l'INPES, de façon que sa part soit ramenée aux deux tiers de ce budget, au lieu de 71 % actuellement. Un tel dispositif est tout à fait contraire à l'esprit de l'article L. 2133-1 du code de la santé publique, tel que l'Assemblée l'avait adopté à l'initiative des députés membres du groupe d'études sur la prévention de l'obésité.

En réponse aux questions de Mme Cécile Gallez, le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille, a apporté les précisions suivantes :

- Le plan « Vieillissement et solidarités » et le plan « Alzheimer » se mettent en place bien plus vite que prévu : 261 lieux de consultation « mémoire » de proximité ont été créés, l'objectif étant de parvenir à 600. Grâce à ces centres de ressources et de diagnostic, il sera possible de proposer un dépistage, un diagnostic et, le cas échéant, un traitement, un accompagnement social, ainsi qu'une formation des aidants familiaux, au moment le plus efficace. De même, le programme de création de places, dont un certain nombre de places « Alzheimer », a pris de l'avance, et plus un seul établissement hébergeant des personnes âgées dépendantes (EHPAD) ne s'ouvre sans une section dédiée. L'objectif de création de 1 822 places « Alzheimer » en 2004 et d'un nombre équivalent en 2005 sera tenu. En outre, la tarification de ces établissements et la fixation de leur dotation minimale tiendront désormais compte de ce facteur.

- Il n'est actuellement pas possible de servir l'APA aux résidents des foyers-logements, à moins que ceux-ci ne se transforment en EHPAD et ne se conventionnent. Cela dit, le gouvernement est disposé à reconsidérer la question. Par ailleurs, il est prévu de revaloriser le forfait de soins applicable aux foyers-logements.

- Le transport sur prescription médicale de résidents d'un EHPAD est possible, l'établissement étant considéré comme un substitut du domicile, mais il serait possible de prévoir des possibilités supplémentaires d'exonérations.

- La modernisation des EHPAD pour faire face au vieillissement nécessite de lourds investissements et le gouvernement réfléchit actuellement à une initiative qu'il pourrait prendre pour favoriser ceux-ci.

MM. Pierre Morange et Dominique Tian se sont interrogés sur le calendrier de la convergence des tarifications applicables aux hôpitaux publics et aux hôpitaux privés et notamment sur l'étape 2008.

En réponse aux différents intervenants, M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités, a apporté les précisions suivantes :

- Le taux de réponse aux questions des parlementaires est, s'agissant du ministère de la santé, de 60 % pour le PLFSS, ce qui est davantage que par le passé, mais de 24 % seulement pour les questions relatives au projet de loi de finances. Des dispositions sont prises pour que la situation soit redressée d'ici la fin de la semaine. Cela dit, il faut rappeler que le nombre de questions relatives au PLF a été de 469 cette année au lieu de 260 l'année dernière - ce qui peut être une explication, mais en aucun cas une excuse.

- Des réflexions du Premier président de la Cour des comptes, rappelées par le président Jean-Michel Dubernard, sur les réformes successives de l'assurance maladie, a été tirée la conclusion qu'une réforme de fond est nécessaire ; l'ambition de la réforme actuellement mise en œuvre est de mériter cette appellation. Pour mieux organiser et mieux gérer le système de santé, il convient avant tout de réduire les dépenses inutiles, les doublons, les gaspillages, que dénonce à juste titre la Cour des comptes et que l'on peut estimer entre 6 et 8 milliards d'euros. Le dossier médical partagé y contribuera. Rien qu'en obtenant des « gros prescripteurs » qu'ils se rapprochent des bonnes pratiques qui font largement consensus chez leurs confrères, on réaliserait déjà des économies considérables. Il en va de même pour la consommation de médicaments, lorsque l'on songe que les trois quarts des boîtes vendues ne sont pas consommées entièrement, et qu'un cinquième ne sont même pas ouvertes !

- La question de la barémisation, abordée par le rapporteur général, est d'une grande complexité technique. Le « panier » de recettes transféré à l'ACOSS semble suffisamment dynamique, étant donné qu'il a évolué au même rythme que la masse salariale. Une clause de « revoyure » est cependant prévue pour 2007, afin d'évaluer le coût des allégements en 2006 et de vérifier qu'il n'y a pas de divergence significative.

- La loi du 13 août 2004, en faisant baisser le prix des génériques, a permis de réguler et de limiter les « marges arrière » des pharmaciens. C'est un sujet qui a fait l'objet d'une concertation entre le gouvernement et les représentants de la profession.

- Faut-il créer une nouvelle instance de réflexion et de concertation sur l'avenir de la sécurité sociale ? Le Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie est à même de jouer ce rôle, en tout cas pour sa partie, et à condition qu'il le souhaite : c'est aux partenaires sociaux représentés en son sein qu'il appartient de le dire.

- La maîtrise médicalisée des dépenses doit s'appliquer à la médecine de ville comme à l'hôpital, ainsi qu'aux prescriptions externes ; une convention a d'ailleurs été signée avec les représentants des transporteurs.

- S'agissant des affections de longue durée, c'est la Haute autorité de santé qui produira, en fonction de critères purement scientifiques, les référentiels nécessaires et les protocoles de soins. Elle a choisi de commencer par le diabète, les affections psychiatriques et l'hypertension artérielle. Tout cela se fera dans la plus grande transparence, en liaison avec les associations de patients. La logique reste bien une logique médicalisée et il n'est pas question de changer les règles d'admission en ALD.

- Les efforts demandés à l'industrie du médicament sont compatibles avec le maintien, et même le développement du secteur. Le gouvernement a choisi de privilégier l'action sur les prix parce que c'est elle qui donne les résultats les plus lisibles.

- En matière de tarification à l'activité, il n'y a pas, à ce jour, de constat partagé sur les écarts de coûts. Le gouvernement a donc confié une mission à l'IGAS, et a renoncé à l'idée d'une étape intermédiaire en 2008. Le fait que la MECSS se soit saisie du sujet est de nature à nous éclairer. Il n'y a aucune raison pour que l'échéance de 2012 ne soit pas respectée.

- Les aides à la primo-installation sont l'un des éléments du débat en cours sur la démographie médicale. La question de la réinstallation est différente, mais des incitations peuvent être envisagées en faveur des zones sous-médicalisées.

- La nécessité d'accompagner les établissements qui se restructurent est une évidence. Les établissements les plus dynamiques sont ceux qui ont le plus à gagner à la tarification à l'activité (TAA), mais il faudra, au cours des prochaines années, organiser des complémentarités qui profitent à tous les établissements, quelle que soit leur taille.

- Certes, il est compréhensible M. Jean-Marie Le Guen ne partage pas l'enthousiasme du gouvernement ; cependant, il est regrettable qu'il ne lui fasse pas confiance. Le déficit annoncé pour 2005 était de 8 milliards d'euros ; il sera de 8,3 milliards. Il est donc permis d'espérer que l'objectif de 6,1 milliards annoncé pour l'an prochain sera tenu. Quant aux prévisions pluriannuelles, elles ne tiennent évidemment pas compte de l'éventualité de recettes plus fortes que prévu, ni de celle de mesures nouvelles.

- La participation forfaitaire de 18 euros pour les interventions médicales lourdes a vocation à être prise en charge par les complémentaires. Lorsque l'on entend certains de leurs représentants prétendre que cela pourrait les conduire à relever leurs tarifs de 6 ou de 9 %, ou encore que l'obligation d'informer leurs assurés va alourdir leurs frais généraux, on ne peut qu'être choqué, car ces complémentaires vont réaliser, d'un autre côté, des économies importantes grâce à la baisse du prix des médicaments.

- Les nouveaux médicaments mis sur le marché étaient au nombre de 196 en 2004, et de 60 au cours des neuf premiers mois de 2005, selon le CEPS. Il n'y a pas de liberté tarifaire, et seuls huit médicaments ont bénéficié, depuis 2003, de la procédure accélérée d'autorisation de mise sur le marché. Il faut, cela dit, rémunérer à leur juste prix les produits qui constituent une véritable innovation thérapeutique, tel le nouveau traitement de la polyarthrite rhumatoïde, pris en charge à hauteur de 1 463 euros par mois ; il s'ensuit qu'un nombre réduit de médicaments innovants ne correspond pas forcément à une réduction équivalente des montants remboursés.

- S'agissant de l'endettement des hôpitaux, 30 à 35 % des dépenses d'investissement des établissements correspondent à des remboursements d'emprunts, ratio que la Banque de France considère comme normal et acceptable.

- S'agissant des situations relatives des établissements publics et privés et de l'exactitude de l'information selon laquelle 70 % des hôpitaux sont endettés, une réponse écrite sera adressée ultérieurement sur le premier point ; s'agissant du second point, ce chiffre date de septembre 2005 et ne tient compte ni de la récente délégation de crédits de 350 millions d'euros récemment signée, ni de celle, imminente, d'un montant de 450 millions. Les dotations des établissements auront augmenté de 2 milliards d'euros en 2005 par rapport à 2004.

- Si le gouvernement s'estime fondé à dire que l'institution du médecin traitant est un succès, c'est parce que 32 millions de Français ont déjà choisi le leur, qui était déjà, dans la grande majorité des cas, leur médecin de famille. Les personnes résolument hostiles sont finalement peu nombreuses : 11 % de la population selon les enquêtes d'opinion, et il y a tout lieu de croire que ce pourcentage va encore baisser.

- Quant à la politique du médicament, également critiquée par M. Jean-Luc Préel, d'aucuns avaient au contraire reproché au gouvernement son manque de vigueur ; il s'agit en fait d'une politique équilibrée, qui reste dans le cadre conventionnel.

- S'agissant des frais de déplacement des praticiens libéraux, une mesure d'actualisation des barèmes kilométriques sera bientôt adoptée.

- Le gouvernement sait gré aux députés du groupe communiste et républicain de s'attacher à assortir leurs critiques de propositions, quand bien même celles-ci ne lui semblent pas opportunes. La discussion du projet en séance publique sera l'occasion de poursuivre le débat de fond évoqué par M. Maxime Gremetz.

- Les maisons médicales de garde doivent absolument être pérennisées, et c'est pourquoi le Fonds d'aide à la qualité des soins de ville est chargé, entre autres, de cette mission. Grâce à un amendement voté l'an dernier par le Parlement, il dispose cette année de 60 millions supplémentaires, et sans doute de 150 millions en 2006, compte tenu des reliquats. Il reste à s'assurer que l'argent du FAQSV arrive bien sur le terrain.

- Un ensemble de mesures a été annoncé en faveur des praticiens hospitaliers, français ou étrangers, titulaires de diplômes étrangers. Quelque 600 places seront mises en 2006 aux concours qui leur sont réservés, dans toutes les spécialités.

- L'affectation à l'INPES de la taxe de 1,5 % sur les dépenses de publicité en faveur de certaines boissons sucrées vise bien à accroître les moyens de cet institut et il n'est pas question de chercher à réduire le montant de la participation de l'assurance maladie. Le gouvernement souhaite que la discussion de l'article 38 en séance publique permette de rassurer ceux qui, tel M. Gérard Bapt, s'en inquiéteraient.

- S'agissant enfin de la lutte contre le bioterrorisme et les menaces sanitaires, évoquée par M. Denis Jacquat, le choix qui a été fait en 2001 est celui d'un fonds de concours spécifique, alimenté par l'assurance maladie, mais qui pourra recevoir des financements supplémentaires si besoin est, car il n'est évidemment pas question de financer à moyens constants les actions qui seront nécessaires.

Répondant à une question de M. Jean-Pierre Door sur les moyens d'améliorer la situation du Fonds de solidarité vieillesse, le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille a précisé que le projet y pourvoit, tant par la suppression de l'« exportation » du minimum vieillesse que par les prélèvements anticipés sur les intérêts des PEL de plus de dix ans et par l'élargissement de la contribution sociale de solidarité des sociétés (CSSS). Ces trois mesures ont un rendement cumulé de 253 millions d'euros. Tout ce qui permet de faire progresser l'emploi améliore les comptes du FSV en réduisant ses charges au titre des demandeurs d'emploi. Il a ensuite apporté les réponses suivantes aux questions des commissaires :

- En réponse à M. Jean-Luc Préel, il a indiqué que les retraites seraient revalorisées de 1,8 % en 2006.

- A M. Denis Jacquat, il a indiqué que le ministère a lancé une mission relative à la répartition entre le médico-social et le sanitaire. Il semble en effet que 20 % seulement des personnes âgées résidant dans des établissements de long séjour aient besoin d'un traitement hospitalier et que les autres devraient être en EHPAD. L'analyse doit être affinée avant que des mesures soient prises. Il faut se féliciter de l'enquête citée par M. Denis Jacquat, qui montre que, contrairement à une idée reçue, le taux d'encadrement n'est pas moindre en France qu'en Allemagne.

- En réponse à M. Jean-Pierre Door, les COG signées avec la branche famille et avec la branche vieillesse comportent toutes deux des indicateurs de performance et de suivi.

- S'agissant des souhaits de MM. Jean-Pierre Door et Gilles Carrez d'étendre à toutes les branches du régime général les dispositions ayant modifié la gouvernance de la branche maladie, la principale difficulté pour la branche famille est l'apprentissage de la gestion du risque et non plus seulement la rapidité des remboursements. Les autres branches ont une gestion beaucoup plus simple et qui donne satisfaction ; aussi la question ne se pose-t-elle pas dans les mêmes termes ni avec la même urgence pour toutes. S'agissant de la productivité du réseau des caisses d'allocations familiales, la COG prévoit 3 000 départs en retraite pour 2 100 recrutements, soit le non-remplacement d'un agent sur trois. Cela constitue un effort de productivité considérable, ainsi que le prouve la prise en charge, sans moyens supplémentaires, des prestations familiales de 500 000 fonctionnaires.

- La transformation, de nature juridique, du BAPSA en FFIPSA ne modifie pas son mode de financement ; une réflexion sur la résorption du déficit est en cours sous l'égide du ministère de l'agriculture, mais cela n'a pas d'impact sur les comptes des régimes de sécurité sociale.

- Conformément aux préoccupations de Mme Marie-Françoise Clergeau, les familles en situation de précarité seront aidées. Le Premier ministre a annoncé une réforme des minima sociaux qui favorisera le retour à l'emploi tout en instituant des mesures d'accompagnement. Ainsi, les bénéficiaires de l'allocation de parent isolé auront un accès privilégié aux modes de garde et à des formations. Quant au rapport de M. Martin Hirsch, il a constitué une source de réflexion précieuse lors de l'élaboration du projet de financement.

- S'agissant de la réforme du congé parental, le projet traduit les décisions prises lors de la conférence de la famille en ouvrant la possibilité d'un congé d'un an rémunéré à hauteur de 750 euros mensuels aux parents de trois enfants et plus. Le gouvernement table sur 50 000 bénéficiaires, et l'on peut espérer que ces prévisions seront dépassées. Selon les résultats obtenus, le gouvernement envisagera d'étendre la mesure pour le deuxième enfant, et éventuellement pour le premier enfant, mais il est encore prématuré d'en décider.

- L'allocation logement a été revalorisée de 1,8 % le 1er septembre 2005. Pour ce qui est de la répartition de la charge des APL entre l'Etat et la branche famille, il est exact qu'une évolution a eu lieu : par souci de clarification, l'Etat paye désormais pour les célibataires et la branche famille pour les familles. Dans le même temps, la branche famille bénéficie de l'augmentation de la cotisation de l'Etat, passée de 5,2 % à 5,4 % pour un rendement de 100 millions d'euros, et de la réforme des tutelles et des curatelles, qui lui apporte 100 autres millions.

- Enfin, la COG garantit une augmentation de 7,5 % par an des crédits du fonds d'action sociale de la CNAF pendant les quatre prochaines années ; ainsi, 72 000 places de crèche auront pu être créées entre 2002 et 2008, ce qui représente un accroissement de 30 % du parc, sans qu'en pâtissent les autres actions sociales, et notamment les contrats « temps libre ».

M. Pierre Morange, président, a remercié les ministres pour leurs réponses précises. Il a souligné la durée exceptionnelle et la qualité des échanges avec les deux ministres, tous les nombreux députés présents qui le souhaitaient ayant pu s'exprimer longuement. Il a rappelé que la commission examinera les amendements à partir du mardi 18 octobre à 17 heures.


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