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COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES,
FAMILIALES ET SOCIALES

COMPTE RENDU N° 31

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 18 janvier 2006
(Séance de  16 heures 15)

12/03/95

Présidence de M. Bernard Perrut, vice-président,

puis de M. Christian Kert, vice-président.

SOMMAIRE

 

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- Examen de la proposition de loi de M. Jean-Luc Préel relative à la création d'un ordre national de la profession d'infirmier et d'infirmière - n° 2309


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- Informations relatives à la commission

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La commission a examiné, sur le rapport de M. Jean-Luc Préel, la proposition de loi de M. Jean-Luc Préel relative à la création d'un ordre national de la profession d'infirmier et d'infirmière - n° 2309.

Avant d'en venir à l'ordre du jour de la réunion, M. Bernard Perrut, président, a fait part du souhait de plusieurs membres de la commission d'être tenus informés et de participer à la discussion du projet de loi relatif au droit d'auteur et aux droits voisins dans la société de l'information, sur lequel la commission ne s'est pas saisie pour avis, notamment en auditionnant le ministre de la culture.

M. Pierre-Christophe Baguet a fait valoir que les députés des différentes commissions devaient apprendre à travailler davantage en coordination. Une telle coordination a pu être mise en place avec la commission des finances pour l'examen des lois de finances. Il a indiqué être intervenu en séance publique lors de l'examen des crédits des médias pour 2006 pour s'étonner que la commission des affaires culturelles ne se soit pas saisie pour avis de ce projet de loi alors même que la transposition de la directive européenne est attendue depuis 2001. De nombreux députés et le ministre de la culture lui-même ont regretté cette absence de saisine pour avis.

Il a ensuite fait part de sa satisfaction quant à la proposition du président de l'Assemblée nationale de scinder la commission des affaires culturelles, familiales et sociales en deux commissions pour la prochaine législature, l'une compétente pour les affaires sociales et l'autre pour les questions culturelles qui constituent des enjeux de société et représentent un poids économique non négligeable.

M. Bernard Perrut, président, a indiqué que le président Jean-Michel Dubernard a proposé à M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication, de venir cet après-midi même devant la commission, proposition que le ministre a déclinée tout en faisant savoir qu'il était d'accord pour venir devant la commission. Puis il a proposé de passer à l'examen de la proposition de loi de M. Jean-Luc Préel, rappelant que la création d'un ordre des infirmiers avait donné lieu au dépôt de propositions de lois à plusieurs reprises sous les différentes législatures par différents parlementaires.

M. Jean-Luc Préel, rapporteur, a estimé que la création d'un ordre des infirmiers et infirmières est aujourd'hui à la fois une nécessité et une urgence. La finalité de cette proposition est d'organiser la profession infirmière de manière démocratique dans l'intérêt des malades mais aussi de reconnaître une profession qui occupe une place centrale dans le système de santé. Les mentalités ont évolué en ce sens, y compris chez les infirmières salariées.

La profession infirmière est de loin la profession la plus nombreuse parmi les professions de santé puisqu'elle compte plus de 460 000 membres, dont 60 000 exercent à titre libéral. Quant au rôle des infirmières, il a beaucoup évolué ces dernières années du fait de l'évolution des techniques médicales qui nécessitent une grande compétence pour l'application de protocoles complexes et exigent une formation initiale et continue de qualité. Cette technicité n'a pas supprimé, pour autant, le rôle des infirmières dans le soutien moral et psychologique des malades. Elles assurent la permanence des soins et ont un contact étroit avec les malades qu'elles accompagnent dans les derniers instants. Elles participent aux soins mais aussi à la prévention et à l'éducation à la santé. Il est donc nécessaire de définir et de faire respecter des principes déontologiques propres à la profession afin de garantir une qualité et une sécurité optimale des soins.

L'absence d'organe fédérateur de la profession conduit à l'éclatement de sa représentation, partagée entre plus de 150 associations et syndicats professionnels. La représentativité de ces organisations est par ailleurs très faible puisque seuls 4 % adhèrent à une confédération syndicale et 8 % à une association professionnelle. Les pouvoirs publics ne disposent pas en conséquence d'un organe représentatif et donc d'un interlocuteur clairement identifié alors que se posent de manière de plus en plus aigue des problèmes de déontologie, d'éthique, de formation initiale et continue, ainsi que de définition et d'évaluation des bonnes pratiques. Or il est indispensable que les pouvoirs publics disposent d'un interlocuteur représentatif pour discuter, par exemple, des soins palliatifs et de la fin de vie ou encore des transferts de tâches ou d'activités entre les diverses professions médicales envisagés par les rapports de MM. Berland et Matillon.

Cette situation est également dommageable au plan international et notamment européen. La France est ainsi sous-représentée au Conseil international des infirmières où elle occupe la 37e place alors que l'importance numérique de la profession, si sa représentation était unifiée, devrait en faire la première section nationale.

Il apparaît donc à tous les observateurs qu'un organe fédérateur des infirmiers et infirmières est nécessaire. Le Conseil des professions paramédicales créé par la loi du 4 mars 2002, à la suite du rapport de M. Philippe Nauche, n'est pas la bonne réponse. Quatre ans après la promulgation de la loi, le conseil n'a toujours pas été mis en place ; en outre, les masseurs-kinésithérapeutes et les pédicures-podologues ont obtenu entre-temps la création d'un ordre professionnel et ne participeront donc pas à ce conseil. Quoi qu'il en soit, dès l'origine ce conseil présentait deux défauts majeurs : son caractère interprofessionnel, qui l'empêche de prendre en compte les problèmes spécifiques de chacune des professions concernées ; sa limitation aux seuls professionnels libéraux, laissant de côté les salariés alors que les problèmes éthiques, déontologiques et de formation concernent l'ensemble de la profession.

Il apparaît donc nécessaire de proposer une structure regroupant l'ensemble des infirmiers et infirmières libérales et salariées. De nombreuses professions bénéficient d'un ordre et c'est le cas aujourd'hui de la quasi-totalité des professions de santé : les médecins qui sont 206 000, les chirurgiens-dentistes qui sont 41 000, les pharmaciens qui sont 69 000, les sages-femmes qui sont 15 500, les masseurs-kinésitérapeutes qui sont 56 000, les pédicures-podologues qui sont 7 500. Or les 460 000 infirmières sont de très loin la profession la plus nombreuse.

Il existe aujourd'hui un réel consensus en faveur de la création d'un ordre parmi les infirmières libérales et cette idée a également beaucoup progressé au sein des infirmières salariées. Le groupement d'intérêt professionnel en soins infirmiers (GIPSI), et l'association pour un ordre des infirmiers et infirmières de France (APOIIF) militent pour la création de cet ordre. Récemment, un groupement de 38 associations, dont le GIPSI, la Fédération nationale des infirmières (FNI) et le Syndicat des infirmières et infirmiers libéraux (SNIL), s'est constitué sous l'appellation du « Groupe Saint-Anne » pour réclamer la création d'un tel ordre. Cette demande figurait également parmi les revendications majeures lors de la journée nationale d'action du 12 mai 2005. Le dernier salon infirmier, qui s'est tenu le 14 octobre 2005, avait pour principal thème la création d'un ordre infirmier. Le groupe d'études de l'Assemblée nationale sur les professions de santé, présidé par M. Richard Mallié, a auditionné le 7 décembre 2005 les représentants des infirmières et a pu constater à cette occasion que la demande était forte et pressante. Il y a quelques jours, le directeur général de la santé puis le ministre de la santé ont reçu une délégation qui a expressément revendiqué la création d'une instance de régulation professionnelle. La proposition de loi s'inscrit logiquement dans cette démarche, qui rencontre un large assentiment dans la profession. Elle a été cosignée par l'ensemble des députés UDF et par 63 députés UMP. Il y a quelques jours, M. Richard Mallié et Mme Maryvonne Briot ont à leur tour adressé à leurs collègues une proposition de loi similaire pour cosignature.

Il ne reste plus par conséquent qu'à passer à l'acte, même s'il est vrai que demeure un problème soulevé par les confédérations syndicales qui souhaitent continuer à représenter l'ensemble des personnels hospitaliers, y compris les infirmières salariées. Mais il convient de bien différencier le rôle des syndicats, qui ont pour vocation de défendre les intérêts matériels et moraux de la profession et de porter ses revendications, de celui d'un ordre professionnel. Il faut à nouveau rappeler que les problèmes déontologiques, éthiques, de formation sont les mêmes pour les infirmières libérales et salariées et qu'il est donc souhaitable de disposer d'une structure ordinale représentant l'ensemble de la profession.

La proposition de loi, préparée avec les représentants des professionnels, attribue de larges compétences à l'ordre des infirmiers. Il bénéficiera tout d'abord des compétences traditionnelles d'un ordre professionnel : le maintien des principes de moralité, le respect des devoirs professionnels, des règles éthiques et déontologiques ou encore la gestion des conflits par la profession. Mais la proposition de loi innove en prévoyant que l'ordre est l'interlocuteur unique du ministère pour les orientations de la politique de santé publique, la discussion des projets de réglementation de la profession, les actions de formation initiale et continue avec la possibilité de délivrer un label de qualité, la définition des bonnes pratiques, le transfert d'activités et de tâches. L'ordre sera également chargé de valider et enregistrer les diplômes et de réaliser le suivi démographique de la profession.

Bien entendu, les instances de l'ordre seront démocratiques : chaque professionnel disposera d'une voix ; les dirigeants seront élus pour quatre ans et par collège afin de représenter équitablement les divers modes d'exercice (cadres infirmiers, infirmiers spécialisés, infirmiers salariés, infirmiers libéraux). Il sera également possible de lui adjoindre des représentants des usagers en cas de conflit avec ceux-ci et de tenir des séances communes avec le conseil de l'ordre des médecins.

Par ailleurs, il a été choisi de privilégier l'échelon régional, ce qui est conforme à l'évolution vers la régionalisation de la santé et la réforme des conseils de l'ordre existants. L'autre raison de ne pas retenir l'échelon départemental réside dans la volonté de simplifier les structures et de ne pas alourdir le futur ordre mais aussi de réduire les frais de fonctionnement et par voie de conséquence le niveau des cotisations. La réintroduction de l'échelon départemental est néanmoins possible par voie d'amendement.

Enfin, quelques amendements rédactionnels ont été préparés pour tenir compte des modifications apportées par l'ordonnance n° 2005-1040 du 26 août 2005 qui est intervenue postérieurement au dépôt de cette proposition.

En conclusion, le rapporteur a souligné que la création d'un ordre des infirmiers et infirmières est aujourd'hui une nécessité et qu'il est urgent de le mettre en place.

Un débat a suivi l'exposé du rapporteur.

Mme Maryvonne Briot a indiqué que le projet de création d'un ordre des infirmiers et infirmières est un débat qui revient régulièrement à l'Assemblée nationale depuis dix ans et rappelé qu'en janvier 2003, déjà, elle était intervenue en séance publique lors de l'examen d'une précédente proposition de loi de M. Jean-Luc Préel sur le même sujet.

La présente proposition répond incontestablement à des problèmes d'ordre juridique. Ainsi, les infirmières libérales sont contrôlées, sans assistance juridique adaptée, par les caisses primaires d'assurance maladie qui peuvent les sanctionner lourdement. Des commissions régionales et nationales sont prévues par une loi de 1980 mais ne sont toujours pas en place faute de décret d'application. La chambre disciplinaire de première instance instituée par la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades n'a toujours pas été créée. Le Conseil supérieur des professions de santé ne s'occupe pas, de son côté, des infirmières. Il existe donc un vide juridique qui maintient la profession dans une forme d'insécurité.

Il apparaît donc nécessaire de créer une instance de régulation de la profession qui représente l'ensemble des infirmières, salariées comme libérales. C'est pour cette raison que de nombreux députés ont cosigné en mai 2005 la proposition de loi de M. Jean-Luc Préel. Depuis cette date la profession s'est toutefois organisée : 38 associations et syndicats se sont structurés en un groupement qui a tenu 30 réunions de concertation en régions. Des états généraux seront organisés prochainement pour examiner collectivement les souhaits exprimés en régions par les infirmières, en faire une synthèse et adopter des propositions communes à toute la profession. Dans l'attente de la tenue de ces états généraux, il n'est pas possible que la représentation parlementaire prenne position sur l'organisation de la profession. Il est donc prématuré de discuter de la proposition de loi de M. Jean-Luc Préel car les députés ne peuvent aujourd'hui préjuger du résultat de cette discussion. En ce domaine il est en effet capital d'aboutir à un consensus, la loi devant traduire en droit les souhaits des personnes concernées.

D'ores et déjà, il ressort des différentes réunions tenues en régions qu'il est nécessaire de mettre en place, dans un souci de proximité, une structure départementale de régulation de la profession. Une instance de conciliation pourrait être mise en place à l'échelon départemental, laquelle se distinguerait de l'instance disciplinaire au niveau régional et de la procédure d'appel à l'échelon national. Lorsque les attentes précises de la profession seront connues les députés devront donc retravailler complètement le texte de la proposition de loi. Dans l'attente, il convient de ne pas passer à l'examen des articles.

M. Marc Bernier s'est déclaré d'accord avec Mme Maryvonne Briot pour considérer que la proposition de loi constitue en quelque sorte du « déjà vu », puisqu'en 2003 une proposition identique s'était heurtée à l'hostilité des professionnels. Il n'existe pas en effet chez ces derniers de volonté unanime de créer un ordre professionnel et cela pour de multiples raisons. Tout d'abord la phase de concertation, essentielle dans ce domaine, qui a été entamée par le ministre de la santé, n'est pas achevée ; ensuite le texte ignore la représentation des infirmiers au niveau départemental ; enfin l'écart entre la situation des infirmiers libéraux et des infirmiers hospitaliers n'est pas pris en compte. Il est cependant exact que les salariés qui représentent la grande majorité des infirmiers ont besoin d'un organisme de défense et que les professionnels exerçant sous la forme libérale souhaitent un organisme représentatif spécifique qui matérialise leur poids économique. Le fait d'introduire des cotisations obligatoires constitue un véritable casus belli à l'égard des salariés ; il conviendrait à tout le moins de moduler leur niveau. Cette proposition de loi n'est donc pas adaptée et surtout est prématurée.

Mme Catherine Génisson s'est félicitée de l'accord unanime pour reconnaître la place de plus en plus grande des infirmiers et des infirmières dans la chaîne de soins et l'exposé des motifs qui s'inspire des revendications de cette profession est tout à fait légitime. Mais cette reconnaissance doit s'inscrire dans un cadre plus large prenant en compte l'évolution du système de santé. Les transferts de compétence et le travail en réseau sont contradictoires avec la mise en place de structures catégorielles. Il est regrettable que le conseil des professions paramédicales n'ait pas été créé et que l'on ait rétabli d'autres ordres professionnels qui segmentent inutilement l'offre de soins. Il est indispensable d'attendre les remontées du terrain car il n'existe actuellement pas de consensus au sein de la profession, notamment entre les salariés et les libéraux. Il faut réfléchir à une organisation générale des professions de santé, d'autant que l'on a vu les limites du fonctionnement de l'ordre des médecins qui ne s'est pas révélé à la hauteur des besoins notamment en ce qui concerne la permanence des soins. Sur la forme, le texte est largement perfectible car il néglige le niveau départemental et les relations entre les différents niveaux de représentation. Mais la principale critique porte sur la compétence qui serait donnée à l'ordre en matière de délivrance de label de qualité pour les actions de formation continue, ce qui doit être du ressort de l'État. Il faut se garder de traiter les problèmes de façon catégorielle et il est donc préférable de ne pas passer à l'examen des articles du texte.

M. Pierre-Christophe Baguet  a déclaré ne pas partager cet avis. Les infirmiers sont la profession clé du système de santé et ils jouent également un rôle essentiel en matière de lien social. Cette profession est d'ailleurs classée en tête des professions reconnues par l'opinion publique. Or ils se sentent négligés et rejetés. Ainsi, dans les conseils généraux toutes les professions de santé sont représentées officiellement sauf les infirmiers. Pourtant ils ont des revendications légitimes à faire valoir - formation professionnelle, indemnités kilométriques comparables à celle des médecins, ... - qui ne peuvent aboutir faute d'une représentation efficace. Le dépôt de plusieurs propositions de loi sur ce sujet témoigne qu'il est possible d'avancer, le cas échéant en ajoutant un échelon départemental. L'UDF est très attachée à faire progresser l'idée d'un ordre national des infirmiers et cette proposition, bien entendu amendable, mérite d'être examinée dès à présent.

Mme Claude Greff a fait part de son accord avec l'analyse de la situation de la profession infirmière développée par Mme Maryvone Briot et Mme Catherine Génisson. La constance de M. Jean-Luc Préel à vouloir créer un ordre confine à l'obstination, surtout que la proposition de loi qu'il présente aujourd'hui est identique à celle qu'il avait présentée en 2003 alors que la situation a totalement évolué. Il faut écouter les professionnels, décider avec les autres et non pas à leur place, et ne pas se précipiter.

M. Simon Renucci a estimé que la véritable question est celle de la clarification des rôles. La nécessaire représentation départementale et régionale de la profession d'infirmier pour traiter des questions de formation, de discipline ou d'éthique ne nécessite pas la création d'un ordre professionnel. Si l'on envisage néanmoins la création d'un ordre, il faut clarifier l'objectif : à quoi va-t-il servir et quel sera le niveau de représentation ? C'est une question importante qui mérite d'être de nouveau abordée dans l'avenir.

M. Olivier Jardé a salué l'unanimité des analyses sur l'importance de la place des infirmiers dans la chaîne de soin. Leur rôle s'accroît en raison de transferts de tâches et de la démographie médicale, notamment dans le domaine des soins palliatifs. La nécessité d'un ordre professionnel s'impose pour organiser le respect des devoirs, la moralité et la gestion des conflits. Cet ordre a toute sa place dans la vie quotidienne de la profession. La critique tenant à l'absence de représentation au niveau départemental est surprenante car la réforme envisagée de l'ordre des médecins devrait avoir pour effet d'organiser la représentation de cette profession au seul niveau régional. Pourquoi cette démarche ne serait-elle pas pertinente pour les infirmiers ? Quant aux cotisations, toutes les professions de santé en payent. Sans doute n'existe-t-il pas aujourd'hui un consensus politique pour instaurer un ordre professionnel des infirmiers mais ce sera inéluctablement le cas dans un avenir proche.

M. Claude Leteurtre a insisté sur le fait que, si la profession se mobilise en vue de la création d'une telle instance, c'est précisément en raison d'un déficit de représentation. C'est ainsi que doivent être interprétés les taux de 4 % de syndiqués et 8 % de personnes impliquées dans une association parmi les infirmiers et les infirmières. La nécessité de la reconnaissance de cette profession se fait ressentir de manière de plus en plus cruelle et aiguë. La création d'un ordre constituerait une réponse à un certain nombre de problèmes, tel celui des transferts de compétences. Il manque indéniablement un interlocuteur, un outil, qui puisse œuvrer aussi en matière de morale et de déontologie. Il est certes nécessaire d'écouter les souhaits des professionnels, mais le besoin existe et le texte propose une réponse même s'il est évidemment perfectible. Par ailleurs, il faut rappeler le retard français en ce qui concerne la transposition de la directive communautaire relative à la formation des infirmières.

Mme Hélène Mignon s'est étonnée du concert de louanges à l'égard des ordres. Évoquant son expérience passée de médecin, elle a estimé que de telles instances ne constituent pas une solution aux problèmes rencontrés par les infirmières. Ce qui est nécessaire, c'est une organisation professionnelle capable de traiter aussi bien les problèmes strictement professionnels et organisationnels qu'éthiques. On peut d'ailleurs se demander pour quelle raison le conseil des professions médicales créé il y a quelques années n'a pas été installé. Il existe aujourd'hui un consensus pour ne pas adopter cette proposition de loi, lequel repose sur des idées communes et non sur une posture politicienne.

En réponse aux différents intervenants, le rapporteur a apporté les éléments d'information suivants :

- La création d'un ordre professionnel est une nécessité, comme l'ont reconnu au cours de la présente discussion de nombreux intervenants, mais c'est également une urgence. Il s'agit d'offrir une organisation à l'ensemble de la profession, que ses membres exercent à titre salarié ou libéral. Les problèmes auxquels est confrontée la profession sont divers, comme la question des soins palliatifs ou encore les transferts de compétences. Il faut rappeler qu'aujourd'hui, lorsque se réunissent des professionnels de santé aux plans national ou international, aucune instance ne peut prétendre représenter les infirmières.

- Cette demande est très ancienne et a été évoquée aussi bien lors de l'audition du « groupe Sainte-Anne » par le groupe d'étude de l'Assemblée nationale sur les professions de santé, qu'à l'occasion des revendications du printemps 2005 et du salon infirmier d'octobre dernier. Il faut souligner que la tenue d'états généraux a justement pour objectif de faire accélérer le processus en faveur de la création d'un ordre. Il est donc fallacieux de prétendre que la présente proposition est prématurée en raison de la réunion des états généraux de la profession.

- Concernant l'institution d'un échelon départemental, on peut relever qu'aujourd'hui les différents ordres évoluent dans le sens du choix de l'échelon régional. Le secteur de la santé dans son ensemble va d'ailleurs vers cette régionalisation. Le choix de l'échelon régional, au détriment de l'échelon départemental, a été effectué à la demande des groupements d'infirmières. En outre, ce choix conduit à l'adoption d'une structure institutionnelle plus légère, aux coûts de fonctionnement moindres et donc de cotisations moins importantes. En tout état de cause, rien n'empêche l'adoption d'amendements, à l'Assemblée nationale ou au Sénat, pour améliorer la rédaction du texte : c'est la règle du débat parlementaire.

- Le débat sur les cotisations obligatoires n'a pas lieu d'être. Il faut garder à l'esprit que de telles cotisations sont versées par les médecins salariés ainsi que par les kinésithérapeutes ou les podologues qui sont dans le même cas : c'est le propre des professions qui bénéficient d'un ordre.

- Comme toute structure, un ordre vaut par les hommes et les femmes qui agissent en son sein. Tout adhérent dispose d'une voix et participe au choix de ses représentants, ce qui est parfaitement démocratique.

- De nombreux intervenants reconnaissent la légitimité d'une structure pour représenter l'ensemble de la profession. À cet égard, le conseil national tel qu'il avait été adopté il y a quelques années présentait deux inconvénients : d'une part, il était pluriprofessionnel et ne permettait donc pas une prise en compte suffisante des besoins spécifiques de chaque profession ; d'autre part, il était réservé aux seules infirmières libérales. Or les problèmes sont largement les mêmes pour les infirmières salariées.

- Il convient d'insister encore sur la nécessité et l'urgence d'instituer une telle structure, demandée par la quasi-totalité des infirmières libérales et par beaucoup d'infirmières salariées. Le présent texte est une base, qu'il est possible d'améliorer par voie d'amendements, mais il est important de profiter de cette occasion pour signifier la volonté du Parlement de créer cette structure importante pour le monde de la santé.

M. Christian Kert, président, a remercié le rapporteur pour la qualité de ses réponses et de son rapport.

Relayant la demande de Mmes Maryvonne Briot et Catherine Génisson, M. Christian Kert, président, a proposé aux commissaires de ne pas engager la discussion des articles, de suspendre les travaux de la commission et de ne pas présenter de conclusions sur le texte de la proposition de loi, tout en soulignant que cette position n'empêche ni la discussion en séance publique, ni la publication d'un rapport incluant le compte rendu des travaux de la commission au cours desquels chacun a eu tout loisir de s'exprimer.

Suivant la proposition du président, la commission a décidé de suspendre l'examen de la proposition de loi et de ne pas présenter de conclusions.

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Informations relatives à la commission

La commission a désigné les membres d'une éventuelle commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif à l'égalité salariale entre les femmes et les hommes :

Titulaires

Suppléants

M. Jean-Michel Dubernard (UMP)

Mme Geneviève Levy (UMP)

M. Edouard Courtial (UMP)

Mme Gabrielle Louis-Carabin (UMP)

Mme Arlette Grosskost (UMP)

Mme Françoise de Panafieu (UMP)

Mme Bérengère Poletti (UMP)

M. Bernard Perrut (UMP)

Mme Marie-Jo Zimmermann (UMP)

M. Pierre-Christophe Baguet (UDF)

Mme Catherine Génisson (SOC)

M. Gaëtan Gorce (SOC)

M. Alain Néri (SOC)

Pas de candidat désigné (CR)

Elle a ensuite désigné les membres d'une éventuelle commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif au retour à l'emploi et au développement de l'emploi :

Titulaires

Suppléants

M. Jean-Michel Dubernard (UMP)

Mme Chantal Bourragué (UMP)

M. Laurent Wauquiez (UMP)

M. Georges Colombier (UMP)

M. Maurice Giro (UMP)

M. René Couanau (UMP)

M. Jean-Marie Rolland (UMP)

M. Bernard Perrut (UMP)

M. Dominique Tian (UMP)

M. Rodolphe Thomas (UDF)

Mme Martine Carillon-Couvreur (SOC)

Mme Hélène Mignon (SOC)

M. Michel Liebgott (SOC)

Pas de candidat désigné (CR)


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