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COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES,
FAMILIALES ET SOCIALES

COMPTE RENDU N° 42

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 15 mars 2006
(Séance de 10 heures 30)

12/03/95

Présidence de M. Jean-Michel Dubernard, président.

SOMMAIRE

 

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- Examen, en deuxième lecture, du projet de loi modifié par le Sénat relatif à la lutte contre le dopage et à la protection de la santé des sportifs - n° 2611

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La commission a examiné, en deuxième lecture, sur le rapport de M. Dominique Juillot, le projet de loi modifié par le Sénat relatif à la lutte contre le dopage et à la protection de la santé des sportifs - n° 2611.

M. Dominique Juillot, rapporteur, a présenté les principaux changements introduits dans le projet de loi par le Sénat. Il a rappelé que sur les vingt-sept articles que compte désormais le texte, seize ont fait l'objet d'un vote conforme par les deux assemblées et onze sont toujours en navette, dont quatre nouveaux articles introduits par le Sénat.

Les principales modifications apportées par le Sénat sont les suivantes :

- Le fonctionnement de l'Agence française de lutte contre le dopage est clarifié.

- L'agence peut diligenter, de sa propre initiative, des contrôles à l'occasion de compétitions internationales se déroulant en France, même si la fédération internationale compétente n'a pas décidé d'agir elle-même, sous réserve d'agir en coordination et avec l'accord de ladite fédération.

- L'articulation entre programme national de contrôle et groupes cibles est amélioré.

- Le rôle des antennes médicales de prévention du dopage est renforcé à l'égard des sportifs sanctionnés pour dopage : un athlète sanctionné ne pourra pas reprendre la compétition sans avoir eu au préalable un entretien avec un médecin appartenant à l'une de ces antennes qui lui délivrera une attestation.

Cette procédure représente un réel progrès mais il conviendrait à l'avenir d'instaurer un véritable suivi médical obligatoire pour les athlètes sanctionnés pour dopage, ce qui n'est pas possible actuellement en raison de l'absence de contraintes à l'égard des sportifs qui ne sont plus licenciés auprès d'une fédération. Il serait souhaitable de mettre en place un suivi permettant de détecter des pratiques de dopage pendant la durée d'une éventuelle suspension et de fournir une aide psychologique et médicale à ceux qui ont résolument tourné le dos à de telles pratiques.

- Les plages horaires durant lesquelles peuvent avoir lieu les contrôles lors de compétitions ou d'entraînement et ceux au domicile de l'athlète ont été précisées. Dans le premier cas les contrôles peuvent être effectués à tout moment du déroulement de ces manifestations ; dans le second ils ne peuvent se dérouler qu'entre 6 heures et 21 heures afin de respecter l'intimité de la vie privée des sportifs.

- Les compétences jusqu'ici exercées par le ministère de la jeunesse, des sports et de la vie associative pour la répression du dopage des animaux sont transférées à l'agence ; cette modification résulte d'un amendement gouvernemental qui a abrogé la loi n° 89-432 du 28 juin 1989 relative à la répression du dopage des animaux.

Ces nouvelles dispositions ne s'appliqueront qu'aux manifestations et compétitions sportives auxquelles participent des animaux organisées par des fédérations sportives agréées par le ministère de la jeunesse, des sports et de la vie associative : par exemple, les compétitions organisées ou autorisées par la fédération française d'équitation, la fédération française de pentathlon moderne, la fédération française de Pulka et traîneau à chien, ainsi que les fédérations de course camarguaise et landaise. En revanche, les courses de chevaux, comme le Grand prix d'Amérique, qui sont organisées sous l'égide de l'association France galop -  laquelle gère les hippodromes de Longchamp, Auteuil, Chantilly, Deauville, Maisons-Laffitte et Saint-Cloud -  ne sont pas concernées par ce dispositif mais relèvent du code des courses.

En conclusion, le rapporteur a souligné que le Sénat a adopté ce texte à l'unanimité comme l'avait fait l'Assemblée nationale en première lecture. Il apparaît aujourd'hui urgent de mettre ces dispositions en vigueur afin que la nouvelle agence puisse travailler sereinement et lutter efficacement contre les dérives qui ternissent malheureusement le sport et les grands événements, comme ce fut le cas lors des récents jeux olympiques d'hiver qui se sont déroulés à Turin.

Un débat a suivi l'exposé du rapporteur.

M. Alain Néri a précisé que si ce projet de loi avait été adopté à l'unanimité en première lecture, en dépit de certaines réserves du groupe socialiste, c'était pour manifester la volonté unanime de la représentation nationale de s'engager résolument dans la lutte contre le dopage aux côtés de l'Agence mondiale antidopage et soutenir ainsi auprès du Comité international olympique la candidature de Paris pour l'organisation des jeux olympiques de 2012.

Les réserves néanmoins formulées lors de la première lecture se sont avérées tout à fait justifiées, comme le prouvent les difficultés rencontrées dans la lutte contre le dopage lors des jeux olympiques d'hiver à Turin. Ces jeux ont démontré les limites de la lutte contre le dopage lorsque certaines fédérations internationales ne sont pas déterminées à prendre les mesures adéquates : 900 contrôles ont été opérés sans aucun résultat puisque les tests de détection de l'érythropoïétine (EPO) se sont révélés négatifs, alors même que certains sportifs n'ont pu participer aux compétitions car leur taux d'hématocrite était trop élevé. Les opérations conduites par la police italienne n'ont fait que masquer l'inaction de la fédération.

M. Jean Bardet a souligné qu'il ne fallait pas négliger les effets de l'altitude.

M. Alain Néri a poursuivi son propos en indiquant que le rôle des antennes médicales a été considérablement réduit par un amendement du Sénat qui le limite désormais à l'attribution d'« attestations » aux sportifs sanctionnés pour dopage et qui souhaitent reprendre la compétition. Qu'en est-il du suivi médical de ces athlètes alors qu'ils présentent des risques médicaux considérables en raison de l'absorption durable de substances toxiques ?

Quant aux autorisations d'usage thérapeutique, qui visent à permettre à des sportifs atteints de pathologies chroniques de suivre un traitement alors que les substances médicamenteuses en cause sont inscrites sur la liste des produits interdits, elles ne peuvent que susciter des interrogations. Ces aménagements ouvrent la porte à de nombreux abus car il n'est pas certain que les médecins traitants soient toujours en mesure d'évaluer les risques de détournement de certains médicaments.

Enfin, la transformation du Conseil de prévention et de lutte contre le dopage, qui était une autorité administrative indépendante, en Agence française de lutte contre le dopage, qui elle est une autorité publique indépendante, est regrettable. Le laboratoire de Châtenay-Malabry joue un rôle majeur en matière de recherche sur le dopage et son intégration au sein de l'Agence ne doit surtout pas remettre en cause son rôle dans ce domaine.

M. Jean-Marie Gevaux s'est dit satisfait de voir le texte examiné en deuxième lecture même si des délais plus rapides auraient été préférables, ce qui a été impossible du fait d'un calendrier parlementaire trop chargé, et a souhaité savoir si les antennes médicales de prévention du dopage pourraient organiser de leur propre initiative des contrôles anti-dopage lors des compétitions. Concernant le suivi médical des athlètes sanctionnés pour dopage, il est nécessaire de mettre en place un contrôle qui s'inscrive dans la durée afin de prévenir les cas de rechute et permettre un accompagnement psychologique de ces sportifs. Quant aux autorisations d'usage thérapeutique, les risques de dérive liés à la méconnaissance de certains médecins à l'égard des usages détournés de certains médicaments sont réels ; il conviendrait donc d'encadrer ces autorisations de manière très rigoureuse afin d'éviter les usages frauduleux et de prévoir des sanctions exemplaires. L'adoption de ce texte est désormais urgente pour que la lutte anti-dopage continue d'être menée de manière exemplaire dans notre pays.

Après avoir souligné que le dopage pose un problème sérieux pour l'image du sport, M. Simon Renucci a jugé utile et pédagogique de mettre en place une prise en charge globale d'une discipline afin de l'étudier in extenso et de parvenir à éradiquer le fléau du dopage. Sur ce sujet de société, il doit être possible de trouver un accord entre les différents groupes pour une politique ambitieuse, même si elle conduit la France à se singulariser par rapport aux autres nations.

Après avoir rappelé que son vote en première lecture n'avait pas été influencé par la perspective de voir les jeux olympiques d'été se dérouler à Paris, M. Henri Nayrou a rappelé que près d'un an s'est écoulé entre la première lecture et la deuxième à l'Assemblée nationale. Pendant cette période, la candidature de Paris n'a pas été retenue pour l'organisation des jeux olympiques de 2012 et les jeux olympiques d'hiver se sont déroulés à Turin. Or cette dernière compétition a mis en évidence la dure réalité des choses : les moyens de contrôle ont montré leurs limites. Si 900 contrôles ont été effectués, le véritable feuilleton médiatique autour de l'équipe autrichienne a souligné l'inefficacité des instances internationales pour démasquer les tricheurs.

S'agissant du texte examiné aujourd'hui, sur onze articles encore en navette seuls deux présentent un intérêt de fond. L'article 2 vise le fonctionnement de la nouvelle agence et il sera difficile de revenir sur les choix effectués. En revanche l'article 6, qui concerne les autorisations d'usage thérapeutique (AUT), mériterait d'être modifié à la lumière des révélations portant sur les analyses effectuées sur le coureur cycliste Lance Amstrong lors du Tour de France de 1999. Le texte aurait donc pu être renforcé pour répondre concrètement au problème du dopage et mettre en place les modalités d'un combat efficace. Certes, le présent dispositif législatif est le bienvenu mais la volonté politique n'est pas suffisamment affichée et les moyens restent insuffisants, ce qui suscite une grande insatisfaction.

Le président Jean-Michel Dubernard a souligné les incertitudes liées à l'affaire Lance Amstrong et regretté que la campagne de presse qui s'en est suivie ait peu avoir un effet négatif sur les patients atteints du même type de cancer lesquels voyaient dans la guérison de ce sportif, puis dans ses performances, un formidable espoir de guérison.

M. Henri Nayrou a rappelé que, depuis 1999, la lutte contre le dopage est le fait de progrès de la recherche médicale pour que les tricheurs n'aient pas une longueur d'avance. La frontière entre la prise de produits dopants et l'absorption de médicaments à usage thérapeutique est à la fois incertaine et évolutive et requiert des compétences dans le domaine médical. Même si la bonne foi des sportifs doit être présumée, le système actuel comporte une large part d'hypocrisie.

Le président Jean-Michel Dubernard a fait état de son scepticisme à l'égard de l'idée selon laquelle la chimiothérapie, en matière de lutte contre le cancer des testicules, conduirait à l'accroissement des performances sportives.

En réponse aux intervenants, le rapporteur a apporté les précisions suivantes :

- La procédure relative à ce texte n'a aucun lien avec la compétition pour obtenir le déroulement des jeux olympiques d'été à Paris en 2012 ; en outre il n'est pas sûr que son adoption aurait changé quoi que ce soit aux jeux d'olympiques d'hiver de Turin.

- Les autorisations d'usage thérapeutique font débat depuis longtemps. Il convient pour autant de se mettre en conformité avec les prescriptions de l'Agence mondiale antidopage. Le texte comporte en outre une avancée puisque ces autorisations seront désormais demandées a priori, avant les compétitions.

- La prise en charge globale de certaines disciplines est déjà mise en place dans les faits, notamment grâce au suivi longitudinal. Cependant, il est étonnant de constater que le dopage concerne des événements que l'on pourrait croire épargnés. À titre d'exemple, des contrôles effectués sur des concurrents amateurs lors du dernier marathon de Paris ont montré des résultats positifs, alors même qu'il ne s'agit pas d'une compétition officielle.

- S'agissant de la coupe du monde de rugby, le texte permet à l'agence de procéder à des contrôles, certes avec l'accord de la fédération internationale.

La commission est ensuite passée à l'examen des articles.

Chapitre ier

Organisation de la lutte contre le dopage

Article 2 : Agence française de lutte contre le dopage

La commission a examiné un amendement de M. Alain Néri visant à ce que le laboratoire national de dépistage du dopage de Chatenay-Malabry relève de la double tutelle du ministère en charge des sports et du ministère en charge de la santé.

M. Alain Néri a expliqué que le laboratoire, qui a joué un rôle exemplaire dans la lutte contre le dopage, doit rester public et que l'amendement permet de conjuguer efficacement les volets « recherche » et « prévention » de la lutte contre le dopage.

Le rapporteur a précisé que le texte comporte des garde-fous visant à garantir l'indépendance de la structure, grâce au statut particulier du directeur des contrôles et du directeur des analyses. En cas de surcharge de travail, le laboratoire peut déléguer des travaux à d'autres laboratoires indépendants.

Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la commission a rejeté l'amendement.

La commission a adopté l'article 2 sans modification.

Article 3 bis : Organisation interne de l'Agence française de lutte contre le dopage

La commission a adopté l'article 3 bis sans modification.

Article 4 : Ressources de l'agence et recrutement de personnels

La commission a adopté l'article 4 sans modification.

Article 5 : Rôle des antennes médicales de prévention du dopage de l'agence et recrutement de personnels

La commission a adopté l'article 5 sans modification.

Article 6 : Autorisations d'usage thérapeutique

La commission a examiné un amendement de M. Alain Néri précisant qu'un sportif qui s'est vu prescrire un traitement médical comprenant des substances interdites est placé en arrêt de travail pour cause de maladie.

M. Alain Néri a estimé que le dopage est devenu si sophistiqué que les contrôles les plus efficaces sont les contrôles inopinés. Certains sportifs sont prêts à tout et notamment à utiliser des autorisations d'usage thérapeutique à des fins détournées. La règle devrait être simple : si l'on est malade, on ne peut pas participer à une compétition. Cet amendement se fonde donc sur un souci d'égalité et sur le respect nécessaire de l'éthique sportive. On peut en effet craindre qu'il se trouve un médecin insuffisamment informé, ou bien complaisant, pour rédiger l'ordonnance nécessaire.

Le rapporteur a souligné que l'amendement propose de supprimer les autorisations d'usage thérapeutique qui sont prévues par le code mondial antidopage. En outre, l'amendement pose le problème d'un arrêt de travail automatique pour les sportifs amateurs qui ne relèvent pas de la médecine du travail au titre de leurs activités sportives.

M. Alain Néri a jugé nécessaire de mettre fin à l'hypocrisie des contrôles, citant l'exemple des jeux olympiques d'Atlanta où un très fort pourcentage des athlètes était asthmatiques, si bien que l'on est conduit à se demander si les fédérations sportives ne devraient pas rechercher en priorité des enfants asthmatiques pour les transformer en champions.

Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la commission a rejeté l'amendement.

La commission a adopté l'article 6 sans modification.

Article 9 : Modalités d'organisation des contrôles antidopage

La commission a adopté l'article 9 sans modification.

Article 12 bis : Coordination

La commission a adopté l'article 12 bis sans modification.

Article 13 : Compétences des fédérations en matière de sanctions disciplinaires

La commission a adopté l'article 13 sans modification.

Article 15 bis : Rôle des AMPD à l'égard des sportifs sanctionnés

La commission a adopté l'article 15 bis sans modification.

Chapitre ii

Surveillance médicale des sportifs

Article 19 bis : Lutte contre le dopage animal

La commission a adopté l'article 19 bis sans modification.

Chapitre iii

Dispositions diverses et transitoires

Article 21 : Entrée en vigueur de la loi

La commission a adopté l'article 21 sans modification.

Puis, la commission a adopté l'ensemble du projet de loi sans modification.


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