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COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES,
FAMILIALES ET SOCIALES

Mercredi 8 novembre 2006

Séance de 9h30

Compte rendu n° 10

Présidence de M. Jean-Michel Dubernard, président,
puis de M. Pierre Morange, vice-président

 

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Projet de loi de finances pour 2007 :

– Avis sur les crédits de la mission « Culture » (M. Christian Kert, rapporteur)

– Avis sur les crédits de la mission « Enseignement scolaire » (Mme Irène Tharin, rapporteure)

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La commission des affaires culturelles, familiales et sociales a examiné pour avis, sur le rapport de M. Christian Kert, les crédits pour 2007 de la mission « Culture ».

M. Christian Kert, rapporteur, a indiqué que selon le vœu du président de la commission, il structurerait son exposé en deux parties en présentant dans un premier temps une analyse du budget de la culture pour 2007 et en étudiant dans un second temps un thème relatif au secteur : l’action culturelle internationale du ministère de la culture.

La mission « Culture » sera dotée en 2007 de 2,766 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 2,694 millions d’euros en crédits de paiement, auxquels s’ajouteront 116,6 millions d’euros pour la mission interministérielle « Recherche culturelle et culture scientifique ». Il s’agit d’un bon budget puisqu’il augmente de 62,1 millions d’euros en autorisations d’engagement (soit + 2,15 % par rapport à 2006) et de 73,7 millions d’euros en crédits de paiement (soit + 2,63 % par rapport à 2006).

La deuxième bonne nouvelle apportée par ce budget concerne l’entretien du patrimoine. Nombre de parlementaires avaient averti le ministre de la culture sur les dangers d’une diminution des crédits dans ce domaine. Lors d’un déplacement du Premier ministre à Amiens le 14 septembre, il a été annoncé un financement annuel et pérenne de 70 millions d’euros pour le Centre des monuments nationaux. Compte tenu des délais de mise en place, c’est même en pratique le montant cumulé de deux exercices, soit 140 millions d’euros, qui seront affectés en 2007 au patrimoine.

En matière d’archéologie, 9 millions d’euros sont prévus pour le financement de l’Institut national de recherches archéologiques préventives (INRAP). S’agissant des musées, les priorités pour 2007 concernent à la fois le lancement du chantier du musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée (MUCEM), au Fort Saint-Jean à Marseille (5 700 m2 dédiés aux expositions, un auditorium de 400 places et des activités pédagogiques), la poursuite des grands chantiers d’investissement du musée du Louvre et enfin le financement de la rénovation du tympan Est du musée d’Orsay. L’année 2007 s’annonce donc comme une année exceptionnelle de relance du patrimoine.

Pour ce qui concerne la création, les crédits sont également en augmentation. Près de 70 % du programme sont consacrés au spectacle vivant, 21 % au livre et à la lecture, 5 % aux arts plastiques et 4 % au soutien aux industries culturelles. Le spectacle vivant, première priorité, est donc conforté puisque les crédits qui lui sont consacrés augmentent de plus de 7 %. Ce programme abonde notamment le fonds de professionnalisation et de solidarité des intermittents du spectacle à hauteur de 5 millions d’euros. Il faut saluer la grande constance du ministre de la culture à sauver le régime d’assurance chômage des intermittents du spectacle. La deuxième priorité concerne l’accompagnement des projets artistiques ou d’investissement des établissements publics de spectacle vivant, notamment la construction d’une salle de répétition pour la Comédie française et le financement de la réouverture de la salle Pleyel. Enfin, il faut noter la poursuite des travaux d’équipements culturels en régions comme la finalisation du programme des salles de Zénith et d’auditorium.

Avec l’évocation des régions, c’est la troisième dominante de ce budget qui est mise en valeur au travers de l’effort de réorientation des investissements sur les régions : 42,46 % des crédits de paiement seront consacrés aux équipements de province contre seulement 40 % en 2004. Pour les élus de province, c’est bien évidemment une bonne nouvelle. Cela permettra de contribuer à plusieurs projets d’investissements comme le théâtre de l’archipel à Perpignan, le théâtre national de Bretagne, l’auditorium d’Aix-en-Provence ou encore celui de Bordeaux.

Le programme « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » est en augmentation de 6 % environ pour les autorisations d’engagement et les crédits de paiement. Il s’agit ici des crédits de fonctionnement du ministère, des directions régionales des affaires culturelles (DRAC), des services départementaux de l’architecture et du patrimoine (SDAP) et de l’ensemble des crédits du Centre national de la cinématographie. Grâce à cette augmentation, plusieurs mesures pourront être financées, comme la poursuite de l’effort mené en faveur des établissements publics d’enseignement supérieur, la poursuite du plan de relance de l’éducation artistique et culturelle, avec 500 000 euros de crédits supplémentaires, le lancement des travaux de la Cité nationale de l’histoire de l’immigration au Palais de la Porte Dorée et le soutien des actions de politique internationale du ministère.

C’est cette action internationale qui est développée dans le cadre de la deuxième partie du rapport, intitulée « Répondre à un désir de France », selon la belle formule utilisée par Christian Saglio, directeur de l’institut culturel français à Dakar, écrivain, et neveu de Pierre Teilhard de Chardin.

Si les crédits de l’action culturelle augmentent de près de deux millions d’euros en 2007, ils avoisinent seulement 0,70 % du budget de la culture. On peut s’étonner de cette faiblesse qui est due à la mauvaise habitude prise de procéder à des abattements pour abonder des actions parfois éloignées de ses objectifs telles que l’exposition universelle de Saragosse sur l’eau et le développement durable ou le plan d’urgence en faveur des banlieues en 2005, mais qui s’explique également par le rôle budgétaire majeur du ministère des affaires étrangères dans ce domaine. Par ailleurs, des crédits d’autres actions de la mission « Culture » abondent de façon complémentaire l’action culturelle internationale du ministère. Si l’augmentation des crédits ne permet pas au programme d’atteindre les 1 % du budget de la culture, cinq axes de travail importants sont néanmoins conduits.

Le premier axe concerne la défense de la diversité culturelle, qu’il s’agisse du cinéma ou de l’audiovisuel. À ce sujet, une interrogation plane sur la Roumanie, pays francophile et francophone, par ailleurs nouvel entrant au sein de l’Union européenne, qui recevait jadis TF1, France 2 et France 3, Arte et TV5. Elle ne reçoit plus ni TF1, ni France 2, ni France 3 et la diffusion de TV5 a été interrompue quelques jours après la fin du sommet de la francophonie à Bucarest !

Le président Jean-Michel Dubernard a indiqué qu’il se trouvait à l’hôpital de Bucarest à Noël 1989, deux jours avant l’arrivée de Bernard Kouchner, au moment de la chute du régime Ceauscescu. Tout le personnel du bloc, infirmières et aides-soignants compris, parlait français, ce qui permettait à l’équipe de travailler presque comme à Lyon.

Le rapporteur a répondu que la représentation nationale devait se saisir de ce dossier en coopération avec le parlement roumain. S’agissant de l’action du ministère en faveur du cinéma, le Fonds Sud cinéma s’adresse aux projets de films étrangers de création destinés à une exploitation en salles en France et à l’étranger.

Le deuxième axe de travail du ministère de la culture à l’international concerne la diffusion des cultures étrangères en France. Des opérations de grande envergure, saisons ou festivals, mettent régulièrement à l’honneur les cultures étrangères, comme l’année de la Chine ou du Brésil par exemple. Il convient ici de saluer les opérations menées par la structure « Culture France » dirigée par M. Olivier Poivre d’Arvor.

Le troisième axe concerne l’accueil des professionnels de la culture et des artistes étrangers en France, auxquels sont proposés des stages de formation, des stages d’immersion dans les établissements publics ou les maisons d’édition, mais également des bourses de séjour ou des résidences dans les centres culturels.

Le quatrième axe concerne la coopération technique et l’aide au développement dans le domaine de la sauvegarde du patrimoine. Dans beaucoup de pays émergents ou sous-développés, c’est bien entendu une notion fragile, d’où la nécessité d’y envoyer des experts qualifiés dans le domaine du patrimoine et l’architecture.

Enfin, le cinquième axe de travail concerne la valorisation de l’expertise et du savoir-faire culturel français. On retrouve cette préoccupation notamment dans le soutien apporté par le ministère à l’association des architectes français à l’export (AFEX) et dans les aides au Bureau export de la musique.

Comment s’organise concrètement la complémentarité des deux ministères en matière de politique culturelle internationale ? Une répartition historique attribue au ministère chargé des affaires culturelles l’accueil des cultures étrangères en France et à celui des affaires étrangères le rayonnement de la culture française à l’étranger. Si cette distinction demeure, elle tend à s’effacer dans les faits et cette banalisation est finalement souhaitable. L’exemple de CulturesFrance illustre bien cette complémentarité entre les deux ministères. CulturesFrance est née de la fusion de l’association française d’action artistique (AFAA) et de l’association pour la diffusion de la pensée française (ADPF). Elle sera prochainement dotée d’un statut d’établissement public et constitue désormais l’opérateur délégué des deux ministères pour l’ensemble des échanges culturels internationaux. CulturesFrance sera dotée d’un budget de plus de 30 millions d’euros en 2007. On peut par ailleurs espérer un développement des échanges entre les régions françaises et les pays étrangers grâce à l’action de cette agence. CulturesFrance pourrait également devenir formateur des acteurs de la culture étrangers, pour le compte du ministère de la culture.

Le travail conjoint entre les deux ministères s’effectue en transparence, en compréhension et en bonne intelligence ; le succès français à l’Unesco avec l’adoption de la convention sur la diversité des expressions culturelles est un bel exemple de ce travail conjoint.

L’exemple concret de l’action culturelle de la France au Sénégal, pays de Léopold Sedar Senghor permet de mieux cerner cette complémentarité. Il est vrai que lorsque l’on arrive à Dakar et qu’on y découvre la grande pauvreté, on peut s’interroger sur l’utilité de l’action culturelle. En réalité, cette utilité est incontestable. Beaucoup de parlementaires français n’ont peut-être pas conscience que le Sénégal a plongé économiquement mais c’est en définitive Erik Orsenna qui a raison de souligner dans la préface du livre de Christian Saglio, intitulé Sénégal : « Le Sénégal a changé. Bien des illusions sont mortes, rongées par les paresses, les indolences, les forfanteries, les corruptions. Mais un nouveau pays surgit déjà sous l’ancien. C’est un pays auquel nous attachent des liens trop forts et trop divers : la vie est trop courte, décidément, pour tous les dénombrer. » Un déplacement au Sénégal a permis au rapporteur de constater la richesse des activités des instituts culturels ainsi que la manière dont ces lieux permettent l’échange des cultures.

Deux instituts culturels français fonctionnent, l’un à Dakar, l’autre à Saint-Louis. La tutelle est exercée par le ministère des affaires étrangères ; cependant ces deux instituts ont des relations étroites avec le ministère de la culture et de la communication, ses établissements publics ainsi que les DRAC. Le but de ces instituts est certes de faire connaître la culture française, mais également d’aider à la promotion des talents des artistes sénégalais, de participer à l’alphabétisation des populations ou encore d’organiser des débats de société avec des intervenants de pays francophones. L’organisation de débats d’idées permet en particulier une confrontation intellectuelle dans un cadre francophone. Lors de ces débats s’exprime un « désir de France », un besoin d’entendre la voix de ses penseurs et de ses intellectuels et de la confronter à celle des universitaires, journalistes et écrivains sénégalais. Les instituts apportent un soutien marqué à la musique sénégalaise, principal vecteur de l’expression artistique du Sénégal et de son rayonnement. Il y a environ 3 000 groupes de rap au Sénégal, dont une partie est connue en France et aux États-Unis. L’institut de Dakar essaie en outre de revitaliser le théâtre Daniel Sorano, au passé si riche, par une programmation de productions françaises et sénégalaises et par son soutien à un festival.

Le Sénégal attend beaucoup de la France en matière de sauvetage de son patrimoine. Ainsi le Centre de recherche et de documentation du Sénégal (CRDS), à Saint-Louis du Sénégal, dispose de moyens obsolètes de conservation de ses ouvrages ; ses cadres et personnels sont en attente de conseils et d’assistance. Le ministère de la culture français s’honorerait à envoyer un archiviste ou un bibliothécaire afin de sauver ce centre d’un lent naufrage.

La ville de Saint-Louis, bâtie par des colons français au XVIIè siècle, et aujourd’hui classée au patrimoine mondial, est un lieu exemplaire. Elle a bénéficié en 2002 d’une convention de coopération décentralisée conclue avec la communauté urbaine de Lille afin de sauvegarder son patrimoine. Cette convention a reçu le soutien du ministère de la culture français et poursuit trois objectifs : réaliser un inventaire du patrimoine, sensibiliser les populations et préparer l’avenir par un plan de sauvegarde et de mise en valeur (PSMV). Ces efforts commencent à porter leurs fruits. Un autre exemple de coopération aboutie est l’île de Gorée, « l’île aux esclaves », qui fait penser à cette phrase de Victor Hugo : « Il n’y a pas d’homme qui ait le droit d’en posséder un autre ». Il s’agit d’une île préservée, dont le patrimoine est remarquablement entretenu grâce à des actions de coopération entre l’Etat français et le Sénégal, mais surtout grâce à la mobilisation de sa population et d’une équipe municipale dynamique. Il existe un très beau projet, celui de la création d’une « Villa Médicis d’Afrique », la villa Senghor. Il s’agit d’abord de sauver de la ruine l’un des bâtiments majeurs de l’île de Gorée et ensuite de répondre à la demande croissante de la communauté artistique sénégalaise et africaine. Ce lieu pourrait abriter une résidence d’artistes, une maison d’hôtes et un musée d’art contemporain. Les montants nécessaires sont importants et il paraît peu probable que le ministère des affaires étrangères puisse participer de manière substantielle au projet. Cependant le ministère de la culture pourrait soutenir le lancement des études préalables. En conclusion, il est donc bien légitime de parler de culture dans ce pays, aussi pauvre soit-il.

Il subsiste quelques interrogations d’ordre général sur les modalités de l’action culturelle internationale française. Il convient d’abord de réaffirmer l’importance d’une action conjointe et cohérente du ministère des affaires étrangères et du ministère de la culture. Il serait également indispensable d’accroître la lisibilité des crédits. Enfin il faudrait que l’action culturelle internationale puisse davantage se développer grâce au mécénat et à des actions de partenariat public-privé.

Un débat a suivi l’exposé du rapporteur.

Le président Jean-Michel Dubernard a estimé qu’il s’agit d’un très beau sujet, complémentaire à celui présenté par M. Patrick Bloche et concernant les écoles françaises à l’étranger. Plutôt qu’un « désir de France », il conviendrait peut-être d’évoquer une « nostalgie de France ». Il semble que les milieux universitaires, en particulier, regrettent le temps où l’on travaillait la main dans la main, alors que la culture américaine tend à s’imposer. Compte tenu de la convergence de vues entre les deux rapporteurs, malgré leur appartenance à des groupes différents, il serait opportun d’organiser une action conjointe, par le biais d’une tribune dans la presse par exemple.

M. Patrick Bloche a relevé que les deux rapports mettent en évidence le paradoxe d’une action culturelle internationale historiquement portée par le ministère des affaires étrangères mais également soutenue par l’expertise et les crédits du ministère de la culture et du ministère de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Cela souligne la nécessité d’une action interministérielle cohérente.

M. Pierre Morange, président, a estimé que le rapport de M. Christian Kert est remarquable. Plus que jamais, la nécessité d’une coordination interministérielle apparaît nécessaire.

M. Dominique Richard a salué un projet de budget qui permet de mieux prendre en compte la nécessité de la préservation du patrimoine historique. Ce problème a fait l’objet de nombreuses alertes ces dernières années. Grâce à ses 42 000 monuments inscrits ou classés, la France reste la première destination touristique mondiale. Le patrimoine est un élément essentiel de l’aménagement du territoire ; il permet par ailleurs la conservation et la transmission de savoir-faire ancestraux. La ressource pérenne introduite par le projet de loi de finances pour 2007 doit être saluée.

Il faut également saluer l’issue heureuse de la crise de l’intermittence, qui s’est conclue par l’engagement de signature du protocole d’accord du 18 avril 2006 par deux syndicats pour l’instant.

L’interruption de la diffusion de TV5 en Roumanie est regrettable. Elle a été causée par une décision unilatérale des câblo-opérateurs locaux : l’explosion de l’offre en matière de chaînes de télévision conduit malheureusement à des hausses inquiétantes de tarifs d’accès aux bouquets.

Le rapporteur a posé une question légitime : est-il fondé de s’intéresser à la culture dans une région aussi pauvre que l’Afrique ? Bien sûr ! La reconnaissance de l’expression culturelle est la première forme du respect que l’on doit à ces hommes. Ainsi, le Burkina-Faso, dépourvu de ressources naturelles, a développé une filière d’artisanat d’art et une filière cinématographique, permettant le développement d’un secteur économique florissant. Ces efforts contribuent donc au développement économique, tout en rendant sa fierté à ce pays.

S’agissant des questions de formation, il est nécessaire de ne pas se limiter à la formation technique. Il faut aussi développer la formation à la gestion culturelle des infrastructures et des équipements. Ainsi, dans le domaine du cinéma, le festival « Cinéma d’Afrique », à Angers, développe un intéressant volet relatif à la formation.

M. Pierre Morange, président, a rappelé que Mme Henriette Martinez a évoqué en séance publique la nécessité d’une loi de programmation dans le secteur de la coopération.

M. Patrick Bloche a félicité le rapporteur pour la qualité de ses travaux, en soulignant la convergence des démarches des deux rapporteurs. Si le ministère des affaires étrangères a la responsabilité historique de l’action culturelle internationale, ce poids tend à s’effacer graduellement. Cependant il conduit encore trop souvent à des arbitrages budgétaires défavorables aux autres ministères.

Cette année, le rapport pour avis sur les crédits du programme « Rayonnement culturel et scientifique » met en exergue le fait que les cinq écoles françaises à l’étranger participent au rayonnement culturel international et scientifique de la France. Or ces écoles sont financées par les crédits du ministère de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. La démarche conjointe des deux rapporteurs ne pouvait avoir lieu qu’au sein de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Il convient de relever que l’expression « désir de France », préférable à celle de « nostalgie de France », provient du rapport d’un parlementaire en mission remis en 1998 au gouvernement de M. Lionel Jospin.

Un point particulier pourrait faire l’objet d’un consensus au sein des commissaires : il s’agit de l’accueil des artistes étrangers en France. Certes, il faut maintenir une politique des visas. Cependant on pourrait accueillir en France de manière plus large des personnes devant se former et n’ayant pas encore le statut de professionnels de la culture. C’est à ce prix que la France retrouvera une attractivité qui s’est dégradée depuis vingt ans.

Le groupe socialiste est très insatisfait du projet de budget du ministère de la culture pour 2007. Chaque année, depuis trop longtemps, et plus particulièrement depuis 2002, le ministre de la culture organise une conférence de presse triomphaliste pour annoncer que son budget pour l’année suivante sera en augmentation. Cependant, au moment de l’examen du projet de loi de finances, mais surtout en cours d’exécution budgétaire, les députés s’aperçoivent que ce n’est pas exact. Ainsi, pour 2007, il est annoncé une augmentation des crédits de 7,8 % alors qu’après avoir fait les calculs, à périmètre constant, les autorisations d’engagement augmenteront de 2,2 % et les crédits de paiement de 2,6 %. Le budget de la culture pour 2007 sera donc en quasi-stagnation. À titre d’illustration de cette désinformation, on peut également citer les 140 millions d’euros destinés au Centre des monuments nationaux. On pourrait se réjouir de l’importance de ces crédits mais la lecture du projet de loi de finances montre que l’enveloppe budgétaire est destinée à couvrir deux exercices : 2006 et 2007.

M. Dominique Richard a fait observer que 24 millions d’euros de crédits « dégelés » s’ajouteront à cette dépense en 2007.

M. Patrick Bloche en est convenu mais a souligné que le budget du patrimoine pour 2008 sera d’emblée frappé d’une baisse mécanique de 70 millions d’euros.

Le ministère de la culture annonce que des crédits supplémentaires seront ouverts pour financer la restauration des monuments historiques qui ne sont pas la propriété de l’État. Or le projet de loi de finances est paradoxal sur ce point : si les autorisations d’engagement augmentent de 40 millions d’euros (+ 32 %), les crédits de paiement baissent de 23 millions d’euros (– 23 %). Cette situation budgétaire est préoccupante car elle peut conduire l’État à se mettre dans l’incapacité de payer les travaux qu’il a commandés. Depuis 2004, des factures impayées pour un montant de 100 millions d’euros se sont ainsi accumulées.

Le projet de budget de la culture pour 2007 contient de nombreuses autres sources d’insatisfaction :

– de grandes opérations nationales sont lancées à Paris, en région parisienne et à Marseille (musée des civilisations, de l’Europe et de la Méditerranée). Elles sont justifiées mais, hormis le musée de Marseille, tout est donné à Paris et à sa région. Ce choix est contestable et contesté ;

– les dépenses d’investissement sont budgétisées mais l’on doit s’interroger sur la programmation des dépenses de fonctionnement des futures structures ;

– les crédits de l’architecture sont en régression ;

– l’évolution des crédits destinés aux acquisitions est inquiétante ;

– les crédits pour la création n’augmentent que de 1,2 % ;

– les crédits pour les arts plastiques, pour l’industrie culturelle et pour certaines actions de la transmission des savoirs sont en chute libre ;

– l’évolution des crédits de l’éducation artistique est inquiétante si l’on regarde le projet de budget du ministère de l’éducation nationale.

– Les crédits pour les politiques territoriales s’effondrent.

Par ailleurs, la crise de l’emploi dans le secteur culturel perdure. Le protocole du 18 avril 2006 soulève toujours de grandes inquiétudes même s’il a été signé par certaines centrales syndicales. Ce texte n’est pas bon et va saper la solidarité interprofessionnelle ; l’importance des fonds affectés au fonds de professionnalisation et de solidarité en est la preuve.

Mme Irène Tharin a remercié le rapporteur pour la passion qu’il a mise dans son sujet d’étude. Le rapport donne une indispensable ouverture sur le monde. Il faut faire preuve de beaucoup de sensibilité pour parler de la culture dans un pays où la pauvreté est aussi importante. Il faut être fier de la culture française mais il est pertinent de promouvoir la culture sénégalaise. Ce pays aspire à garder un lien avec la culture française.

En réponse aux différents intervenants, le rapporteur a donné les éléments d’information suivants :

– Dans le domaine de l’audiovisuel et de l’information, il faut exercer une veille permanente sur nos chaînes à l’étranger. Les événements en Roumanie peuvent très bien arriver dans un autre pays. La France ne dispose malheureusement pas d’un outil centralisant ces informations. Pour la Roumanie, il est heureux que les groupes d’amitié France-Roumanie des assemblées française et roumaine aient pu réagir rapidement et informer les parlementaires.

– Le lancement de France 24 ne doit pas conduire à se replier sur cette chaîne pour assurer la promotion audiovisuelle de la culture française à l’étranger, car elle n’a pas les mêmes missions qu’Arte et TV 5.

– On ne peut qu’être surpris par le nombre de jeunes Sénégalais qui veulent quitter leur territoire, même au prix de leur vie. Ce sont des athlètes, pour réussir l’exploit de la traversée, et ils ne sont pas incultes. Ils veulent rejoindre l’Europe car il la considère comme une terre de culture ; il y a chez eux un désir de culture et de France. Au Sénégal, il y a une vraie passion pour la France.

– Comme le soulignait le président Jean-Michel Dubernard, il serait utile de rassembler les efforts des députés de droite et de gauche pour promouvoir l’action culturelle française à l’étranger dans sa globalité.

– Le ministère de la culture continue à investir beaucoup en région parisienne, mais progressivement des crédits d’investissement sont réorientés vers la province. Ainsi, sont financés le théâtre de l’Archipel  à Perpignan, le théâtre national de Bretagne à Rennes et deux auditoriums à Aix-en-Provence et à Bordeaux.

– Il y aura moins de variation des crédits consacrés au patrimoine car les 70 millions d’euros prévus chaque année sont pérennes.

– Les crédits du spectacle vivant représentent 70 % du programme relatif à la création. Cela marque une réelle volonté politique de soutien au spectacle vivant.

M. Pierre Morange, président, a conclu que l’Afrique a besoin d’une construction aussi bien culturelle que politique et économique car ce continent est encore trop éclaté. La France doit apporter sa contribution dans tous les domaines, y compris en matière sanitaire, car elle a une pensée universaliste respectueuse des cultures.

Puis, conformément aux conclusions du rapporteur, la commission a donné un avis favorable à l’adoption des crédits pour 2007 de la mission « Culture ».

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Puis la commission des affaires culturelles, familiales et sociales a examiné pour avis, sur le rapport de Mme Irène Tharin, les crédits pour 2007 de la mission « Enseignement scolaire ».

Après avoir indiqué qu’elle développerait plus particulièrement le thème qu’elle a retenu pour son avis, soit le rôle et la place des parents dans le fonctionnement de l’école, Mme Irène Tharin, rapporteure, a rappelé que le budget de la mission « Enseignement scolaire » est de loin le premier budget de l’État avec 59,5 milliards d’euros de crédits (si on inclut les crédits de l’enseignement technique agricole) en 2007, soit 22 % des dépenses totales de l’État.

Mais le défi à relever aujourd’hui n’est plus celui de l’augmentation des moyens consacrés à l’enseignement scolaire, mais de leur meilleure utilisation dans l’intérêt des élèves en vue d’une meilleure performance de l’ensemble du système éducatif. Selon les deux audits de modernisation de l’État publiés le 17 octobre dernier et établis conjointement par les inspections générales des finances et de l’éducation nationale, en quinze ans le coût annuel moyen d’un collégien a augmenté de 33 %, passant de 6 413 euros en 1990 à 7 401 en 2004, et celui d’un lycéen de 50 % pour atteindre 10 000 euros en 2004, sans que les performances globales des élèves soient à la hauteur de cet investissement.

À cette recherche d’une plus grande efficacité et d’une amélioration des résultats scolaires de tous les jeunes, il faut incontestablement associer les parents. Historiquement, l’école de la République, investie d’une mission émancipatrice des futurs citoyens, se concevait comme un sanctuaire aussi protégé que possible des influences extérieures et notamment de celle des familles. Mais au fil des années on est passé d’une école sanctuaire à une école ouverte sur la société, ce qui ne va pas toujours de soi et justifie de traiter notamment de la question des relations avec les parents.

Pour ce qui est de l’aspect strictement budgétaire, il convient de noter en premier lieu que les crédits proposés pour 2007 affichent une baisse par rapport à 2006, d’environ 2 % en euros constants (en tenant compte de l’inflation). Mais cette baisse résulte, d’une part, du transfert vers les collectivités locales de 23 403 équivalent temps plein (ETP) de personnels techniciens, ouvriers et de services (TOS) en application de la loi du 13 août 2004 sur l’approfondissement de la décentralisation et, d’autre part, des évolutions démographiques.

En effet, la tendance générale est à la baisse des effectifs d’élèves même si cette tendance s’est légèrement inversée dans le primaire : les classes élémentaires du CP et du CM2 ont vu leurs effectifs augmenter de 1,1 % dans le secteur public et de 0,3 % dans le secteur privé depuis 2004. Dans le second degré, depuis 1990 les établissements publics et privés ont perdu 224 300 élèves.

Pour tenir compte de cet élément démographique, le projet de loi de finances prévoit la suppression de 2 400 emplois dans le secondaire (2 000 emplois dans le public et 400 emplois dans le secteur privé). À l’inverse le budget prévoit la création de 500 emplois de professeurs des écoles dans le secteur public et de 100 emplois dans les écoles privées. Le nombre de postes offerts pour les concours de recrutement des deux niveaux restera stable : 11 000 pour le premier degré et 10 000 pour le second degré.

Cette rationalisation des crédits permet, par ailleurs, de créer 300 postes d’infirmières pour la rentrée 2007 et 50 emplois d’assistants de service social, afin de respecter les engagements de la loi du 23 avril 2005 d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école.

Ce qu’il est important de souligner également dans ce budget, c’est qu’il concentre les efforts financiers sur les catégories d’élèves qui en ont le plus besoin avec des mesures telles que :

– l’attribution de 89 000 bourses au mérite pour les élèves boursiers ayant obtenu une mention au brevet ;

– la montée en puissance des programmes personnalisés de réussite éducative (PPRE), qui mobilisent les équipes éducatives autour des élèves ayant des difficultés pour acquérir les connaissances et les compétences du socle commun. Au 1er janvier 2007, 1 000 assistants pédagogiques seront recrutés afin d’accompagner la généralisation de ce dispositif. Le projet de loi de finances prévoit en outre le financement, en année pleine, de 50 000 emplois de vie scolaire, recrutés sur des contrats d’avenir, dans le premier et le second degré. Cofinancés par le ministère de l’éducation nationale et le ministère de l’emploi et de la cohésion sociale, ces emplois seront affectés à des tâches administratives et à des fonctions d’assistance éducative ; il faut souligner sur ce point le travail de partenariat conduit par les ministères concernés ;

– enfin l’accompagnement renforcé des élèves en situation de handicap, avec la création de 166 unités pédagogiques d’intégration (UPI) pour lesquelles 200 emplois d’enseignants et 166 emplois de d’auxiliaires de vie scolaire seront créés.

Ce rapide tour d’horizon des crédits appelle deux remarques.

La première concerne l’amélioration de l’enseignement des langues vivantes. Outre la généralisation de l’enseignement d’une langue vivante à l’école primaire, la loi d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école a mis l’accent sur la nécessité d’améliorer l’enseignement des langues vivantes dans le secondaire, notamment en procédant au dédoublement des classes lorsque les effectifs le justifient, en commençant par la classe de terminale. L’effort dans ce sens doit être poursuivi d’autant que M. Gilles de Robien, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, a souhaité que ces dédoublements soient étendus le plus rapidement possible aux classes de première.

La seconde observation porte sur un sujet très important, les progrès effectués dans le domaine de l’orientation. La rapporteure a rappelé à cet égard que, dans le rapport qu’elle a remis au Premier ministre le 8 septembre 2005 en qualité de parlementaire en mission, elle a formulé de nombreuses propositions tendant à améliorer l’orientation des élèves tant au niveau scolaire qu’universitaire. Parmi ces propositions, l’une des plus importantes porte sur l’apprentissage, dès l'âge de 14 ans, pour remédier à l’échec scolaire et à l’abandon prématuré de leurs études par trop de jeunes. Le rapport préconise également que l’éducation nationale s’efforce d'améliorer les relations entre l’école et l’entreprise et que soit prévue dans les programmes une véritable éducation à l'orientation.

On peut constater avec satisfaction que les choses évoluent. L’apprentissage junior est devenu une réalité et l’apprentissage est présenté désormais comme une voie d’orientation au même titre que les autres. La création de l’option découverte professionnelle mériterait toutefois d’être rendue obligatoire pour tous les élèves. La circulaire du 27 mars 2006 prévoit qu’au lycée, à titre expérimental, il est proposé de consacrer dix heures par an à l’information sur les métiers et l’enseignement supérieur. Par ailleurs, tous les recteurs ont été invités à coordonner l’action des différents services de l’État et des établissements publics qui interviennent en matière d’orientation, d’insertion et d’information sur les métiers. Des conventions doivent être conclues entre l’État et les différents services compétents précisant les modalités de cette coordination. Pour continuer à progresser, il faudrait surtout améliorer la formation des conseillers d’orientation-psychologues, qui pêche souvent par un manque de connaissance du monde économique et du marché de l’emploi. Enfin, le décret du 11 septembre 2006 institue un délégué interministériel à l'orientation placé auprès des ministres chargés de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de l'insertion professionnelle des jeunes, qui est notamment chargé de la mise en place et du suivi d'un schéma national de l'orientation et de l'insertion professionnelle.

La question du rôle des parents dans la réussite scolaire de leurs enfants peut être abordée par le biais de l’orientation car l’institution se substitue trop souvent aux familles dans les choix essentiels pour l’avenir des enfants. Un récent sondage effectué auprès de parents et d’enseignants montre que 77 % des parents interrogés et 74 % des enseignants estiment qu’à l’heure actuelle l’école fonctionne bien. Toutefois, les appréciations sont plus contrastées sur les relations entre l’école et les parents ou encore sur l’encadrement et le suivi des élèves.

L’école ne peut pas tout toute seule et elle doit s’appuyer sur des compétences externes, l’accord des acteurs concernés est large à ce propos et le gouvernement a consacré ce principe avec l’adoption d’un décret en date du 29 juillet 2006 consolidant le rôle et la place des parents d’élèves à l’école. La collaboration de l’institution et des familles, mais aussi des associations qui peuvent dans certains cas contribuer au rapprochement entre l’école et les parents les plus éloignés de la culture scolaire, est largement reconnue comme une des conditions de la réussite des élèves. Cette exigence avait été particulièrement mise en évidence dans le cadre du débat national sur l’école qui s’est déroulé de septembre 2003 à mars 2004 à la demande du Président de la République.

Des divergences existent cependant entre les différents acteurs quant à la nature exacte de cette nécessaire collaboration et de ses limites. Mettre du lien, au-delà des textes réglementaires, entre l’institution et les familles et ouvrir largement l’école sur le monde extérieur c’est, à l’instar de ce que font de nombreux pays étrangers, améliorer les chances de réussite de tous les élèves. Les élus municipaux ont un rôle important à jouer pour l’ouverture de l’école et son rapprochement avec les parents, le tout au bénéfice des enfants.

Les droits des parents d’élèves ont été récemment consolidés. Une large concertation a été menée pour la préparation du décret du 29 juillet 2006 et de la circulaire du 25 août 2006 sur le rôle et la place des parents à l’école, qui officialisent des pratiques existantes. Ces textes ont été approuvés par tous les acteurs du système éducatif, ce qui est suffisamment rare pour être souligné. Les parents se voient ainsi reconnaître un droit d’information, un droit de participation et un droit de réunion.

Le droit d’information signifie l’accès des parents aux informations nécessaires au suivi de la scolarité de leurs enfants et à celles relatives à l’organisation de la vie scolaire. Le conseil d’école ou le conseil d’administration, dans le secondaire, doivent prévoir les conditions d’organisation du dialogue avec les parents.

Des réunions de rentrée doivent être organisées au cours desquelles le contenu du règlement intérieur de l’établissement est présenté aux parents et chaque enseignant doit préciser les enjeux et les programmes de l’année. Des rencontres trimestrielles avec les parents sont également prévues pour faire le point sur la situation de leur enfant et les informer des actions de soutien personnalisé envisagées. À cette occasion, les livrets et les bulletins scolaires doivent être remis en main propre aux parents par un enseignant de la classe afin d’avoir un échange sur les progrès de leur enfant ou ses difficultés. S’il y a lieu, il est prévu de s’assurer de l’aide d’un interprète extérieur. C’est effectivement une mesure des plus utiles, par exemple pour les communautés d’origine turque ou algérienne dans le pays de Montbéliard : le dialogue doit pouvoir être mené avec les parents, et pas seulement avec l’aîné des enfants, ce qui est souvent le cas lorsque les parents ne maîtrisent pas la langue française.

Les parents, cela n’est pas nouveau même si les associations de parents voient leurs moyens améliorés, sont représentés dans les différentes instances scolaires tels que le conseil d’école, le conseil d’administration, les conseils de classe ou encore les commissions d’appel compétentes en matière d’orientation.

Pour ce qui est des recours exercés par les parents contre les décisions des conseils de classe et des résultats obtenus, on observe que depuis dix ans, globalement, les taux d’appel baissent et les taux d’appels satisfaits augmentent. L’écoute semble donc meilleure.

Mais il faut également améliorer les pratiques. Les droits ne valent évidemment que par l’usage que l’on en fait et il faut de ce point de vue déplorer les forts taux d’abstention qui caractérisent les élections des représentants des parents d’élèves dans les différentes instances. De même, on sait bien que les parents qui viennent voir les professeurs sont souvent ceux dont les enfants ne rencontrent pas de réels problèmes. Une note d’étape sur le rôle et la place des parents à l'école émanant d’inspecteurs généraux de l'éducation nationale plaide pour que la participation des parents aille au-delà de la présence formelle aux instances participatives de l'établissement et pour qu’ils soient consultés sur le projet éducatif des établissements. Ils ne sont pas les seuls à considérer que le rôle des parents ne devrait pas se limiter au fonctionnement de la cantine et à la préparation de la kermesse.

Tout cela revient à dire que des efforts sont encore nécessaires pour rapprocher l’école et les familles. L’effort majeur doit porter sur la formation des enseignants. Tous les acteurs de la communauté éducative s’accordent pour dire que la transformation de la relation des enseignants et des parents passera par la formation et que cet apprentissage est une garantie de professionnalisme.

Le cahier des charges réformant le fonctionnement des instituts universitaires de formation des maîtres (IUFM), qui devrait être prochainement adopté, devra proposer un module de formation obligatoire sur la prise en compte du rôle des parents et la résolution des conflits avec les familles, car les enseignants sont trop souvent démunis face à des situations conflictuelles. Il est en effet essentiel de mettre en œuvre une véritable politique d’accueil des parents afin que l’école leur devienne plus familière et plus accessible.

La circulaire de rentrée du 25 août 2006 prévoit la mise à disposition des locaux scolaires en dehors des heures de classe pour des séances de formation des parents. Il ne faut pas que cette disposition reste lettre morte, car l’échange entre parents peut, en particulier, aider ceux qui sont en grande difficulté dans leurs relations avec leurs enfants. Les maires, en veillant à la disponibilité de locaux, ont un rôle à jouer en la matière. Il est important que le gouvernement confirme par un signal clair cette politique de l’ouverture de l’école aux parents en indiquant rapidement quels financements sont prévus pour encadrer ces activités hors du cadre habituel des obligations de service des différents personnels et pour rémunérer les différents intervenants.

Conformément à la demande des chefs d’établissement, il faudrait également apporter une clarification juridique et financière au problème du partage des responsabilités entre les établissements publics locaux d’enseignement (EPLE) et les collectivités territoriales pour toutes les activités périscolaires qui se déroulent dans les établissements.

La rapporteure a enfin invité la commission à émettre un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Enseignement scolaire ».

Un débat a suivi l’exposé de la rapporteure.

M. Pierre Morange, président, a salué les qualités de proximité de l’analyse de la rapporteure ainsi que le pragmatisme du sujet retenu, qui touche l’ensemble des citoyens.

M. Bernard Perrut s’est félicité de cette présentation synthétique des crédits de l’enseignement scolaire ainsi que de la pertinence des thèmes évoqués. Il faut toutefois regretter que seuls quatre commissaires soient présents pour la discussion du budget le plus important de la Nation, puisqu’il représente environ 22 % du total du budget de l’État.

Le véritable défi est de savoir si le projet de budget contribue à améliorer l’égalité des chances. La rapporteure a apporté un certain nombre de réponses à cette question, mais il découle de ses analyses que les seuls moyens financiers ne suffisent pas toujours à aboutir à des résultats concluants.

La relance de l’ambition scolaire est un thème essentiel et il faut, de ce point de vue, saluer l’augmentation du nombre de bourses au mérite qui passent de 28 500 à 100 000. Le développement du soutien aux élèves en difficulté, sur l’ensemble du territoire national, est également une nécessité et la mise en place des programmes personnalisés de réussite éducative (PPRE) va de ce point de vue dans le bon sens. L’affectation à ces programmes de 1 000 assistants pédagogiques dès le 1er janvier 2007 est un gage de réussite.

En 2005 et 2006, 151 000 enfants en situation de handicap ont été accueillis dans les établissements scolaires. Ce chiffre est encourageant mais il convient d’aller plus loin encore, afin de réduire les écarts existant entre les différentes communes et de dépasser les réserves de certains enseignants ou de parents.

La question de la santé scolaire est évidemment cruciale. Le présent budget prévoit la création de 300 postes d’infirmières dans les établissements scolaires en 2007 et développe le rôle des assistants de service social. Ces premiers pas sont importants, même s’ils sont encore insuffisants.

Favoriser une meilleure orientation des élèves constitue une priorité absolue, comme l’a notamment montré le rapport sur cette question remis au Premier ministre par la rapporteure en 2005. Un certain nombre de mesures ont déjà été prises pour favoriser une meilleure orientation : le gouvernement a insisté sur la nécessité d’une meilleure coordination par les recteurs des différents services concernés ; une circulaire en date de mars 2006 a réaffirmé que l’orientation est partie intégrante de la démarche éducative ; lors de cette rentrée 2006, un délégué interministériel a été nommé avec pour mission la réforme du service public de l’orientation ; de façon générale, chacun s’accorde sur l’intérêt de l’élaboration de schémas d’orientation professionnelle efficients.

Mais il faut, plus encore, procéder à une réforme et une rationalisation profondes de l’ensemble des structures qui ont la charge de l’orientation, après une réflexion sur le fonctionnement des centres d’information et d’orientation (CIO). Ces derniers sont surtout défaillants, lorsqu’il s’agit d’accompagner les jeunes vers l’emploi après leur sortie du système scolaire. Les jeunes se tournent alors vers les missions locales, en une démarche plus pragmatique. Dans la même perspective, il serait important d’introduire à l’école l’enseignement d’une véritable culture de l’entreprise. Enfin, le développement de dispositifs comme l’apprentissage ou le contrat jeunes en entreprise vont aussi dans le sens d’une meilleure information et orientation des élèves. L’ensemble de ces propositions sera repris dans le rapport pour avis qui doit être présenté au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales sur les crédits de la mission « Travail et emploi ».

Le dernier point est peut-être l’un des plus importants : il s’agit de la place accordée aux familles et du rôle des parents dans l’accompagnement scolaire de leurs enfants. S’il est vrai que les enfants sont tous différents, et que tous ont des talents, encore faut-il que ces talents soient révélés. Leur découverte tardive, que ce soit par l’Éducation nationale ou par les parents, est parfois à l’origine de véritables difficultés pour les élèves. S’il est important de reconnaître des droits aux parents, droit à l’information, droit de participation et de réunion, il est aussi essentiel d’en faire une réalité dans la pratique. De ce point de vue, l’école des parents, évoquée par la rapporteure et prévue par la circulaire du 25 août 2006, doit prendre toute sa place. Mais il faut aller plus loin et promouvoir une véritable école de la parentalité, dans l’intérêt même des enfants.

Mme Martine David a félicité la rapporteure pour le choix du thème retenu pour cet avis budgétaire, tant est vitale la question de l’amélioration de la participation des parents à l’école, et ce quel que soit le niveau scolaire concerné. Il est important d’en parler et de favoriser, à cette fin, l’implication locale de l’ensemble des partenaires de l’Éducation nationale.

La rapporteure considère que le défi à relever aujourd’hui n’est plus d’augmenter les moyens consacrés à l’enseignement scolaire mais d’optimiser leur utilisation. Mais en fait les crédits ne sont pas seulement stabilisés puisqu’ils diminuent. Le projet de loi de finances prévoit encore plusieurs milliers de suppressions de postes d’enseignants. Au total, depuis 2002, on dénombre 22 000 suppressions de postes d’enseignants dans les premier et second degrés. Il s’agit là d’une véritable saignée infligée au système éducatif, car ce sont autant d’adultes qui ne seront pas présents dans les établissements pour encadrer les élèves qui en ont tant besoin.

Il est vrai que certains efforts ont été accomplis en faveur des personnes en situation de handicap. Mais quel décalage entre les annonces fortement médiatisées, qui ont suscité tellement d’espoir chez les parents, et les résultats obtenus qui les ont forcément déçus.

Par exemple, une école maternelle, dans une commune du département du Rhône, a récemment accepté d’accueillir trois enfants en situation de handicap compte tenu de la promesse de partage d’un emploi de vie scolaire avec un collège voisin. Or un vote du conseil d’administration de ce collège vient de décider que ce partage n’était finalement plus envisageable, sans qu’aucune solution alternative soit proposée, toutes les démarches s’avérant vaines. Cet exemple, qui n’est sans doute pas un cas isolé, montre bien qu’il aurait fallu être plus mesuré dans les annonces.

Concernant la création de 300 postes d’infirmières, encore faut-il souligner qu’il s’agit de 100 emplois équivalents temps plein. De manière générale, l’action accomplie en faveur du développement de la santé scolaire n’est pas satisfaisante si l’on se rappelle l’importance des besoins d’accompagnement médical de certains enfants, pour lesquels l’action familiale est insuffisante. En particulier, il faut noter l’absence de toute création de postes de médecins scolaires. Or, à l’évidence, il y a là un défi majeur à relever pour l’Éducation nationale.

Par ailleurs, un amendement a été déposé par les commissaires membres du groupe socialiste, qui vise à supprimer l’article 89 de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales. En effet, cet article remet en cause une situation d’équilibre, qui avait été obtenue sur le terrain, concernant la question du financement par les communes des dépenses de fonctionnement des écoles publiques et des écoles privées. Aujourd’hui, un recours est pendant devant le Conseil d’État, et le gouvernement a déclaré le statu quo sur ce dossier dans l’attente de cette décision. Dans l’incertitude, il est néanmoins nécessaire d’alerter la commission sur cette question et ensuite le gouvernement à l’occasion de la discussion en séance publique, en espérant que l’amendement pourra être examiné. Il serait en effet sérieux et raisonnable de revenir à la situation préexistante à l’adoption de l’article 89 de la loi de 2004, car aujourd’hui de nombreux maires de tous bords politiques se trouvent dans des situations financières difficiles, les écoles privées ayant en quelque sorte profité de cette brèche.

M. Pierre Morange, président, a souligné que, quoi qu’il en soit de la recevabilité financière de l’amendement, des interventions seront toujours possibles en séance publique sur cette question.

M. Christian Kert, revenant sur le thème de l’école des parents, a souligné que d’ores et déjà, des efforts importants ont permis une dédramatisation des rapports entre les parents et les enseignants, qui se regardent moins souvent aujourd’hui qu’autrefois en « chiens de faïence ». Les associations de parents d’élèves confirment ce rapprochement, mais elles font état également d’une forme de réticence des enseignants à aborder la question de la sécurité à l’école. Il serait intéressant de recueillir l’avis de la rapporteure sur ce sujet. Enfin, il y a quelques mois a été discuté au sein de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales un rapport d’information consacré à la question de l’éducation artistique. Il serait intéressant de savoir si les choses ont progressé dans ce domaine.

M. Yves Boisseau a tout d’abord souhaité avoir des précisions complémentaires sur les modalités de mise en œuvre de l’orientation des élèves, que la rapporteure a évoquées brièvement. Dans la pratique, on constate en effet des difficultés dans certains métiers, comme les électriciens ou les jardiniers, pour recruter des jeunes qualifiés. Les observations formulées par M. Bernard Perrut concernant le dispositif actuel des centres d’information et d’orientation (CIO) apparaissent tout à fait fondées. En outre, s’il est vrai que la loi d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école a constitué une avancée importante, la nécessité de mieux faire connaître aux élèves le monde professionnel ne doit cependant pas conduire à imposer aux entreprises des charges qu’elles n’auraient pas les moyens d’assumer : en particulier, il n’apparaît pas opportun de multiplier les stages de très courte durée, qui ne présentent qu’un intérêt limité pour certains jeunes.

M. Pierre Morange, président, a approuvé cette intervention, qui s’appuie sur une très bonne connaissance du monde de l’entreprise. Concernant la question de l’orientation des élèves, on ne peut que déplorer le véritable parcours du combattant auquel sont confrontés les jeunes à la recherche d’un stage en entreprise et qui sont lâchés dans la nature. Dans certains cas, il peut arriver que des élèves soient contraints de quitter leur formation, car ils n’ont pas réussi à trouver un tel stage. Cette situation risque dès lors de susciter en eux un sentiment d’amertume vis-à-vis du monde professionnel, dont les portes leur ont été fermées.

La rapporteure a remercié M. Bernard Perrut pour son intervention, et regretté à son tour que trop peu de parlementaires soient aujourd’hui présents pour l’examen de ce budget important. Puis elle a répondu aux intervenants en apportant les précisions suivantes :

– Le budget pour 2007 traduit notamment la volonté politique d’épauler les élèves les plus fragiles.

– La question de l’orientation est un sujet essentiel, sur lequel les mentalités sont en train d’évoluer, notamment sur le fait qu’il n’appartient pas aux enseignants d’imposer une orientation à un élève, mais que celle-ci doit être librement choisie en partenariat avec les parents, qui sont les mieux à même de déceler les talents de leur enfant.

– La diminution des moyens et des postes doit être mise en regard de la diminution des effectifs d’élèves. Les établissements publics et privés du second degré ont perdu 224 300 élèves depuis 1990.

– Concernant la médiatisation de l’accueil des élèves handicapés, il est vrai que certains freins demeurent, liés notamment au manque d’équipements des établissements scolaires. Néanmoins, il est incontestable que les efforts engagés pour répondre à la situation des élèves les plus fragiles, et à la demande de leurs parents, vont dans la bonne direction et doivent dès lors être poursuivis et amplifiés.

– La santé scolaire constitue une préoccupation réelle de la majorité parlementaire et du gouvernement, qui se traduit notamment par la création de postes d’infirmières scolaires, qui correspondent à une centaine d’emplois en équivalent temps-plein (ETP), ce qui peut apparaître insuffisant, mais constitue un point de départ.

– Il faut souligner le travail de très grande qualité effectué par certains membres du corps enseignant et directeurs d’école lorsque des familles sont confrontées à des difficultés, en particulier un divorce. Ils se révèlent souvent pleinement conscients de la nécessité de préserver un contact aussi proche que possible avec les deux parents.

– Il existe peut-être une certaine réticence de la part des enseignants des collèges à aborder les questions de sécurité à l’école, mais cela n’est pas général.

– L’enseignement artistique, avec le sport et les activités manuelles sont des atouts dans les collèges « ambition réussite ». De leur côté, les communes mettent souvent en œuvre des programmes d’éducation artistique, en particulier pour les jeunes en difficulté.

– Enfin, s’il est capital de ne pas remettre en cause le principe selon lequel les enseignants sont d’abord et surtout chargés de transmettre un savoir, ils doivent de plus en plus être en mesure de sensibiliser les élèves au monde de l’entreprise et à leur avenir professionnel. L’orientation est à une période charnière comme le montrent certaines actions locales, par exemple dans un lycée privé de Belfort où les parents ont été invités à venir parler de leur métier aux élèves, lesquels ont pu ensuite aller voir dans l’entreprise la réalité du travail.

M. Pierre Morange, président, a remercié la rapporteure pour la qualité et la précision de ses réponses, empreintes comme toujours d’un grand humanisme.

Article additionnel après l’article 48

La commission a ensuite examiné un amendement de M. Yves Durand visant à supprimer l’article 89 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et aux responsabilités locales ainsi que l’article 89 de la loi n° 2005-380 du 23 avril 2005 d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école, qui aggravent les charges des communes dans le financement des écoles privées.

Mme Martine David a jugé nécessaire de supprimer ces dispositions, qui ont ouvert la voie à une remise en cause des équilibres sur le financement des écoles publiques et des écoles privées. Il serait par ailleurs intéressant de connaître la position des différents commissaires sur cette question. En effet si le Conseil d’État ne se prononce pas dans le sens souhaité, les dispositions issues de la loi du 13 août 2004 risquent de conduire à un alourdissement inacceptable du budget des communes. Même si ces dispositions sont issues d’un amendement sénatorial présenté par un membre du groupe socialiste, elles ont été acceptées par le gouvernement et il existe dès lors une responsabilité collective sur ce problème. Or, ce n’est pas parce que les parlementaires ont un jour été aveugles, qu’il ne faut pas aujourd’hui combattre vigoureusement cette cécité !

M. Pierre Morange, président, a estimé qu’il existe probablement une position unanime au sein de la commission pour considérer que ce dispositif est au moins sujet à réflexion, voire à contestation, et que les observations formulées de façon raisonnable et non polémique par Mme Martine David apparaissent fondées : il semble en effet nécessaire de revenir à l’équilibre antérieur à la loi du 13 août 2004. En revanche, sur la forme, l’amendement présente un impact sur le budget des collectivités locales et peut dès lors sembler étranger à l’objet du présent projet de loi de finances, relatif au budget de l’État.

La rapporteure s’est déclarée défavorable à l’amendement, tout en partageant les inquiétudes exprimées par Mme Martine David, quant à l’aggravation de la situation financière des communes. En effet, si les dispositions prévues par l’article 89 de la loi du 13 août 2004 ont un impact incontestable sur le budget des communes, elles n’en ont pas sur les finances de l’État. Enfin, la circulaire d’application de cet article, en date du 2 décembre 2005, fait actuellement l’objet d’un recours devant le Conseil d’État et il convient dès lors d’attendre la position définitive de cette juridiction avant que de se prononcer sur le contenu des obligations incombant aux communes. En tout état de cause, on ne peut que souhaiter que cette question soit abordée de façon unanime par l’ensemble des parlementaires en séance publique.

La commission a rejeté l’amendement.

Puis, elle a donné un avis favorable à l’adoption des crédits pour 2007 de la mission « Enseignement scolaire ».