COMMISSION de la DÉFENSE NATIONALE et des FORCES ARMÉES

COMPTE RENDU N° 38

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 11 mai 2005
(Séance de 11 heures)

Présidence de M. Edouard Balladur,
président de la commission des affaires étrangères,
et de M. Guy Teissier, président de la commission de la défense

SOMMAIRE

 

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- Audition conjointe avec la commission des affaires étrangères de M. Stanislas de Laboulaye, secrétaire général adjoint du ministère des affaires étrangères, directeur général des affaires politiques et de sécurité



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Audition de M. Stanislas de Laboulaye, secrétaire général adjoint du ministère des affaires étrangères, directeur général des affaires politiques et de sécurité.

M. Édouard Balladur, président de la commission des affaires étrangères, a prié M. Stanislas de Laboulaye, secrétaire général adjoint du ministère des affaires étrangères, directeur général des affaires politiques et de sécurité, d'éclairer les Commissions sur deux sujets : l'état de la négociation engagée conjointement par la France, la Grande-Bretagne et l'Allemagne avec l'Iran sur la question du nucléaire ; la coordination de cette initiative diplomatique avec les États-Unis et la Russie.

Après avoir souligné qu'il intervenait devant les Commissions en tant que participant aux négociations depuis leur déclenchement par la France, M. Stanislas de Laboulaye a précisé qu'il demanderait à son adjoint, M. François Richier, d'intervenir sur les questions relatives à la Conférence d'examen du Traité de non-prolifération et, plus généralement, sur les réflexions de la communauté internationale concernant l'amélioration du système de non-prolifération.

Il a tout d'abord indiqué que la France s'était purement et simplement fixé pour objectif d'empêcher les Iraniens de se doter des capacités nécessaires à la fabrication d'armes nucléaires.

En 2002, des révélations d'opposants ont conforté les soupçons existants depuis longtemps selon lesquels Téhéran développait des capacités d'enrichissement de l'uranium en utilisant des techniques et des biens fournis notamment par le réseau pakistanais du Dr. Khan, dont l'affaire libyenne a dévoilé toute la dimension. Ces activités étaient sans rapport avec la petite dimension du programme nucléaire civil de la centrale de Bushehr - encore en cours de construction -, développé avec les Allemands puis les Russes. Aucune utilisation civile de ces installations clandestines n'était ainsi envisageable : l'Iran n'avait aucun besoin de fabriquer du combustible puisque les Russes, constructeurs de la centrale de Bushehr, s'étaient engagés à leur fournir l'uranium enrichi nécessaire et à reprendre le combustible usagé.

En parallèle, avec l'aide de la Corée du Nord mais aussi d'autres réseaux, basés notamment en Ukraine, l'Iran s'attelait à un programme clandestin de mise au point de missiles à longue portée susceptibles de transporter des charges non conventionnelles.

En juin 2003, le conseil des gouverneurs de l'AIEA, mais également, quelques jours auparavant, au G8 d'Évian, les chefs d'État et de gouvernement dénoncèrent pour la première fois les agissements de l'Iran et de la Corée du Nord, et cette initiative eut un effet considérable sur le déclenchement de la négociation puis son déroulement.

Les autorités iraniennes, voyant la pression internationale s'intensifier, ont cherché à accélérer leur programme d'équipement pour créer un fait accompli, de peur que l'interdiction générale de toute activité d'enrichissement que prônait le Président George Bush pour les pays qui ne l'avaient pas déjà développée ne prenne forme.

La question nucléaire iranienne, concomitamment à l'annonce extrêmement préoccupante de la volonté de la Corée du Nord de se retirer du traité de non-prolifération (TNP), remettait en question l'efficacité même du régime de non-prolifération puisqu'un pays, depuis dix-huit ans, développait en partie clandestinement des activités nucléaires manifestement dangereuses sans que ce dispositif le freinât ; le TNP ne suffisait donc pas à contrôler de nouvelles formes de prolifération, surtout lorsqu'elles impliquaient des sources d'approvisionnement non étatiques ou paraétatiques. L'enjeu consistait donc à renforcer le régime de non-prolifération en imaginant des mécanismes tendant non à interdire mais à contrôler très étroitement les activités du cycle d'enrichissement dans les pays non dotés de l'arme nucléaire.

Aux termes d'accords intervenus avec les trois Européens en octobre 2003 à Téhéran et en novembre 2004 à Paris, les Iraniens acceptaient de suspendre la totalité de leurs activités d'enrichissement en échange d'engagements pris par les Européens en matière de coopération politique, technologique et dans le domaine du nucléaire civil ; il était prévu que cette suspension dure le temps que l'Iran donne des « garanties objectives » du caractère exclusivement pacifique du programme nucléaire iranien. Or, dans l'esprit des Européens comme dans celui de l'ensemble des experts internationaux, les seules garanties véritablement objectives consistaient en la suspension indéfinie voire la cessation et le démantèlement des activités d'enrichissement, aucune mesure technique ne permettant de les limiter à un usage strictement civil.

En octobre 2003, à Téhéran, les trois ministres européens des Affaires étrangères ont obtenu ce premier accord du docteur Hassan Rohani. Au lendemain de la guerre d'Irak et de la déclaration du G8 d'Évian, alors que les pressions internationales exercées à l'AIEA étaient de plus en plus fortes et que les Russes se ralliaient progressivement aux positions européennes, les Iraniens se sentaient plus vulnérables, et la menace de déférer la question devant le Conseil de sécurité de l'Organisation des Nations unies a été déterminante pour les contraindre à faire mouvement. Par la suite, ils ont peu ou prou accepté cette suspension de leurs activités et, chaque fois qu'une nouvelle rencontre a eu lieu, ce fut pour préciser le champ des activités d'enrichissement, jusqu'à parvenir, à Paris, le 15 novembre 2004, à la définition la plus large possible, couvrant l'opération de conversion, c'est-à-dire la fabrication, à partir de la matière brute, d'uranium gazeux propre à être injecté dans des centrifugeuses en vue de son enrichissement.

Mais actuellement, les Iraniens estiment que la pression internationale s'est relâchée. Leur extraordinaire rente pétrolière leur donne les coudées franches pour intervenir à l'étranger et, en s'impliquant dans les dossiers afghan, irakien et tout dernièrement dans l'affaire libanaise, ils pensent avoir démontré au monde, et surtout aux États-Unis, combien ils pouvaient être utiles. Ils jugent que les Européens sont maintenant en position de demandeurs et ont plus à gagner qu'eux dans un succès des négociations. Ils ont cru déceler un certain flottement dans la position du trio européen et considèrent certainement la Conférence d'examen du TNP qui se tient actuellement à New York comme une occasion de rompre le consensus international, qui a tellement pesé sur eux à Vienne, et de voir s'opposer les pays dotés de l'arme nucléaire à ceux qui n'en sont pas dotés, le Sud au Nord, les pays favorables au désarmement à ceux qui le sont moins.

C'est dans ce contexte que les autorités iraniennes estiment avoir repris la main, avec, pensent-elles, une certaine bienveillance française. Ainsi, lors d'une réunion du comité directeur de la négociation organisée à Paris le 23 mars dernier, le conseiller de M. Hassan Rohani a formulé, à titre personnel, des propositions tendant purement et simplement à une reprise des activités de conversion et d'enrichissement, mais avec un contrôle international plus serré, censé offrir à la communauté internationale les garanties nécessaires pour la rassurer. Les Iraniens commenceraient, dès juillet 2005, par relancer la production d'UF6, uranium sous forme gazeuse prêt à être enrichi, dans leur usine de conversion d'Ispahan. Dans un deuxième temps, ils assembleraient et testeraient les centrifugeuses actuellement placées sous scellés par l'AIEA afin d'en remettre en route 3 000 début 2006 - soit une capacité de production de combustible pour deux bombes par an - puis 54 000 fin 2006, en vue de produire de l'uranium enrichi à plein régime dès 2007 ou 2008. En échange, à titre d'assurance, ils fourniraient des engagements de nature politique : la limitation du taux d'enrichissement; la conversion immédiate de l'uranium enrichi en assemblage combustible ; un cycle ouvert, c'est-à-dire un engagement politique à ne pas séparer le plutonium du combustible usagé. Pour finir, le Parlement iranien - le Majlis - voterait une loi prévoyant l'usage exclusivement pacifique du nucléaire, texte qui, en vérité, n'apporterait aucune garantie supplémentaire par rapport aux obligations découlant du TNP. Au terme de ce calendrier, le Majlis, en guise de geste de bonne volonté, ratifierait officiellement le protocole additionnel permettant des inspections intrusives de l'AIEA, protocole déjà signé et mis en œuvre par l'Iran.

Ces engagements n'ont donc rien de significatif, puisqu'aucune mesure technique ne permet de s'assurer de la limitation du taux d'enrichissement de l'uranium. En revanche, une fois pourvus d'un programme complet, les Iraniens, à l'instar des Coréens du Nord, pourraient sortir du TNP et développer une technologie militaire en s'appuyant sur leur équipement et leur savoir-faire. Comme cela vient d'être dit, les Iraniens conduisent parallèlement un programme militaire balistique en vue de disposer de missiles d'une portée de 2 000 à 3 000 kilomètres.

Les émissaires iraniens affirment que leur pays est prêt à accepter une limitation de ses capacités et un meilleur contrôle international mais ne peut nullement renoncer à son programme d'enrichissement et de retraitement, aucun texte international ne l'y contraignant. Ils érigent la question au rang d'enjeu national équivalent à celui de la nationalisation du pétrole dans les années 1950 et se tournent vers les Français pour leur faire observer qu'une telle politique doit leur rappeler quelque chose...

M. Stanislas de Laboulaye a ensuite fait le point sur le dernier état des négociations. Les Iraniens, à l'issue d'une réunion informelle tenue à Londres le 29 avril dernier, ont présenté un document reprenant leurs propositions sous une forme légèrement amendée ; les négociateurs européens leur ont indiqué que celles-ci n'étaient pas de nature à rassurer la communauté internationale et ne correspondaient aucunement à la logique des discussions entamées en octobre 2003. En réaction les Iraniens ont fait savoir qu'ils allaient annoncer à l'AIEA la reprise du processus de conversion de l'uranium - et, d'ici à quelques mois, la reprise de la totalité des activités suspendues, c'est-à-dire la fabrication des centrifugeuses à Natanz, mais sous contrôle international. Une lettre des trois ministres européens et de M. Javier Solana doit être remise à Téhéran pour demander à l'Iran de ne pas agir de la sorte.

Les négociations des Européens avec l'Iran ouvraient une parenthèse, avec un contrat clair : en dépit de ses activités menées en violation de tous ses engagements internationaux, et, de ce fait, susceptibles d'être déférées automatiquement devant le Conseil de sécurité, si l'Iran se comportait convenablement et rassurait la communauté internationale en cessant ces activités dangereuses, la France, la Grande-Bretagne et l'Allemagne se chargeraient de défendre sa cause. Dès lors que l'Iran décide de reprendre ses activités d'enrichissement, la parenthèse se ferme et il redevient envisageable de saisir le Conseil de sécurité.

M. Stanislas de Laboulaye a rappelé que les Américains ont manifesté le plus grand scepticisme envers l'initiative européenne, considérant qu'il est impossible de négocier avec l'Iran, qui à l'évidence conduit un programme d'armement dangereux et que les négociations ne l'ont pas empêché de se procurer les équipements, les matériaux nécessaires et surtout d'assurer la formation de son personnel. En somme, l'Iran aurait grugé l'Europe. Toutefois, les services israéliens, qui connaissent extrêmement bien la situation iranienne et ont suivi de près ces négociations, ont, faute d'alternative, manifestement conseillé aux Américains de laisser faire les Européens, dont l'initiative a eu au moins pour effet de retarder ou de geler les activités de l'Iran. Bon gré mal gré, les Américains, derrière Mme Condoleezza Rice, ont donc accepté d'apporter leur soutien à la négociation européenne et, fin février, ont promis qu'ils ne s'opposeraient pas à l'entrée de l'Iran dans l'Organisation mondiale du commerce et lèveraient, pour des raisons liées à la sécurité des passagers, leur embargo sur l'approvisionnement en pièces détachées de la flotte aérienne iranienne. Les Américains ne veulent pas apparaître comme les responsables si les négociations venaient à échouer. Cependant, ils ne manqueront pas de demander la saisine du Conseil de sécurité à l'annonce par les Iraniens de la reprise officielle de leurs activités de conversion et d'enrichissement.

Les Russes, quant à eux, se sont de tout temps beaucoup intéressés à l'Iran, qu'ils considèrent de surcroît aujourd'hui comme un marché captif pour leurs équipements. C'est pourquoi ils ont tout d'abord observé l'initiative européenne avec une méfiance extrême, avant de considérer les négociations avec intérêt. Le monopole russe de l'approvisionnement au profit de la centrale de Bushehr sert les desseins européens, en rendant complètement inutile la production de son propre combustible par l'Iran. Toutefois, bien que M. Sergueï Lavrov, ministre des affaires étrangères de la Fédération de Russie, ait donné des assurances en ce sens, l'attitude de la Russie, si le dossier nucléaire de l'Iran est porté devant le Conseil de sécurité, reste la grande inconnue.

Restent les Chinois. Même s'ils éprouvent des difficultés à franchir le pas, ils commencent à prendre conscience de la réalité de la menace de la prolifération et examinent avec attention l'évolution des Russes sur le sujet. Ils sont d'autant plus attentifs aux négociations avec l'Iran qu'ils sont mêlés à celles avec la Corée du Nord, les deux dossiers présentant quelques analogies. Les négociations avec la Corée du Nord, contrairement à celles avec l'Iran, ne progressant guère, il n'est pas impossible que la Chine évolue.

M. Stanislas de Laboulaye a déclaré que cette négociation lui semblait passionnante à bien des égards : il s'agit de non-prolifération, le pays concerné est très important, elle a des effets politiques sur tout le Moyen-Orient, elle s'est imposée comme l'un des éléments centraux de la relation transatlantique et permet de dialoguer avec les Chinois et les Russes de manière beaucoup plus constructive que sur bien d'autres sujets. Mais elle constitue surtout l'occasion de placer l'Europe au centre d'un dispositif, d'inventer une certaine forme de diplomatie européenne et d'enrichir la relation transatlantique. Au début, nombre de pays européens se sont montrés très réservés, mais ils ont toujours été informés de l'évolution de la situation et M. Javier Solana a été associé à la démarche. Les trois pays moteurs ont finalement obtenu un blanc-seing de leurs partenaires, qui se sont rendu compte que c'était la seule façon efficace de négocier.

M. Édouard Balladur, président de la commission des affaires étrangères, a noté qu'un jugement ne pourra réellement être porté sur cette initiative qu'une fois la négociation parvenue à son terme.

M. Guy Teissier, président de la commission de la défense, a observé que la France avait proposé de renforcer le traitement multilatéral des questions de non-prolifération en améliorant notamment l'implication du Conseil de sécurité, et a demandé comment cette proposition pourrait se traduire concrètement.

Sur l'invitation de M. Stanislas de Laboulaye, M. François Richier a précisé que, à la suite des différentes crises de prolifération, concernant l'Irak, la Libye, l'Iran ou la Corée du Nord, une réflexion s'était engagée à propos du renforcement du régime de non-prolifération.

Pour ce qui concerne le rôle du Conseil de sécurité, il convient de déterminer le moment où un dossier doit être porté devant lui de manière à ce qu'il agisse. Sa saisine est bien prévue en cas de violation des garanties de l'AIEA mais, contrairement à celles relatives à l'interdiction des armes chimiques et biologiques, selon des modalités disparates et assez complexes. Cela présente certes l'avantage de ralentir l'escalade de la crise en évitant d'entrer immédiatement dans une logique coercitive mais le Conseil de sécurité peut ainsi se trouver mis à l'écart sur des questions le concernant directement.

En 1991, la prolifération a été considérée comme constituant une menace pour la paix et la sécurité internationale, dont le Conseil de sécurité a vocation à traiter. Outre l'application des mécanismes existants, c'est-à-dire, en cas de crise, la remise par l'AIEA d'un rapport au Conseil de sécurité, plusieurs hypothèses peuvent dès lors être envisagées et, comme souvent en diplomatie, peut-être le principe suivra-t-il la pratique. Premièrement, le Conseil de sécurité pourrait entretenir des relations plus étroites avec l'AIEA, prenant par exemple la forme d'un rapport périodique. Deuxièmement, le directeur général de l'AIEA pourrait faire des comptes rendus à intervalles réguliers afin que le Conseil de sécurité puisse entrer plus rapidement dans le jeu. Troisièmement, dans le cas où un État menace de se retirer du Traité de non-prolifération, le Conseil de sécurité pourrait être saisi immédiatement, ce simple fait constituant une menace pour la paix et la sécurité internationale.

M. Édouard Balladur, président de la commission des affaires étrangères, a demandé si les fournitures de combustible par la Russie donnaient les moyens à l'Iran de passer rapidement au nucléaire militaire ou si des étapes intermédiaires étaient nécessaires. Il s'est ensuite interrogé sur les raisons donnant à l'Iran le sentiment que l'Europe est « en position de demandeur » et que la France fait preuve de « bienveillance » à son égard. Le gouvernement français a-t-il donné aux Iraniens des motifs pour qu'il en vienne à de telles conclusions ?

Enfin, il a souhaité savoir quel intérêt aurait Israël à se montrer modérateur - ce qui serait au demeurant relativement original - et à laisser l'irréversible se produire.

M. Stanislas de Laboulaye a indiqué que le système fermé mis en place par les Russes semble sûr : le combustible, à sa sortie de la centrale, sera rapatrié en Russie.

M. François Richier a précisé que le combustible sera livré déjà transformé et que, une fois utilisé, son rapatriement empêchera le retraitement en vue de séparer le plutonium. Les deux voies d'accès à l'arme nucléaire sont donc bloquées.

M. Édouard Balladur, président de la commission des affaires étrangères, en a conclu que les fournitures russes ne contribueraient pas à faciliter le passage au nucléaire militaire.

M. Stanislas de Laboulaye a mis l'accent sur la vision très particulière des rapports internationaux dont font preuve les Iraniens. Ceux-ci ont toujours insisté sur le fait que l'Europe, contrairement aux États-Unis, comprend leurs objectifs et a pris le risque de s'exposer. Mais ils sont aussi persuadés que cette négociation a été engagée pour démontrer la crédibilité de la diplomatie européenne. En réalité, les Iraniens ont donné l'impression de chercher avant tout à en profiter pour établir une nouvelle relation avec les États-Unis : ils estiment que les Européens risquent de perdre la main et se croient en position de force. La France a effectivement pris l'initiative de lancer ces négociations au lendemain de la crise irakienne, à l'été 2003, dans deux buts : traiter de façon différente un problème d'armes de destruction massive ; jeter les bases d'une politique efficace pour l'Europe en cherchant à s'associer avec les Allemands et les Russes. Elle a constamment été l'élément moteur et les Iraniens ne s'y trompent pas, même s'ils ont toujours fait face à un front commun et ne sont pas véritablement parvenus à désunir leurs interlocuteurs. La France n'a jamais fait preuve de bienveillance envers les positions iraniennes ; elle a simplement considéré l'Iran comme un interlocuteur valable et a cherché à lui permettre de jouer le rôle qui doit être le sien dans cette partie du monde, et l'Iran n'a jamais cessé de lui en savoir gré.

Quant aux Israéliens, ils connaissent bien l'Iran, certains de leurs dirigeants étant persophones, à commencer par le Président de l'Etat d'Israël. Ils suivent cette négociation avec le plus grand intérêt, l'Iran constituant l'un des plus grands dangers de leur voisinage mais également un objet de fascination, suscitant une sorte de nostalgie pour des relations plus anciennes ou pour un triangle non arabe incluant la Turquie. Ils sont tout aussi sceptiques que les Américains mais reconnaissent que la démarche européenne, facteur de gêne dans la montée en puissance du programme nucléaire iranien, n'a pas été inutile. Il n'en reste pas moins qu'ils soutiendront les Américains si ces derniers décidaient des frappes militaires.

M. Édouard Balladur, président de la commission des affaires étrangères, a remercié M. Stanislas de Laboulaye pour cette intervention d'un grand intérêt, sur un sujet fondamental pour l'avenir de la politique européenne et la stabilité internationale.

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