COMMISSION de la DÉFENSE NATIONALE et des FORCES ARMÉES

COMPTE RENDU N° 40

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mardi 7 juin 2005
(Séance de 16 heures 30)

Présidence de M. Guy Teissier, président,

puis de M. Yves Fromion, vice-président,

puis de M. Guy Teissier, président

SOMMAIRE

 

pages

- Audition des associations de retraités militaires  ;

- Informations relatives à la commission

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Audition des associations de retraités militaires.

La commission de la défense nationale et des forces armées a entendu les représentants des associations de retraités militaires.

M. André Dosset, vice-président de la fédération nationale des retraités de la gendarmerie (FNRG), a fait remarquer que le tableau des points de majoration de grade pour le calcul des pensions militaires d'invalidité laisse apparaître des disparités importantes, notamment entre les sous-officiers de la marine et ceux des autres armées. Quelles sont les mesures envisagées pour que le calcul de pensions militaires d'invalidité des sous-officiers et des veuves des armées de terre, de l'air et de la gendarmerie soit aligné sur celui de la marine ?

Il a ensuite abordé la situation des cercles, mess et foyers, pour lesquels l'arrêt de la conscription a entraîné d'importantes difficultés de fonctionnement. Ces lieux facilitent les rencontres et jouent un rôle social et matériel important pour les militaires et leurs familles. Il est nécessaire que tout soit mis en œuvre pour qu'ils puissent continuer à fonctionner comme par le passé, sans modification d'accueil et du service.

M. Jean-Michel Bernard, commissaire en chef de la marine, représentant l'association nationale des officiers de carrière en retraite (ANOCR), a fait part de la reconnaissance de cette dernière pour les amendements qui ont pu être adoptés lors de la discussion du statut général des militaires, tout particulièrement en ce qui concerne la réaffirmation des droits des retraités et des facilités qui peuvent leur être offertes par les services médicaux et sociaux de la défense. En revanche, la suppression dans le nouveau statut de la position « en retraite », accordée depuis 1834 par la loi Soult, ne peut être compensée par la simple assurance donnée aux retraités du « maintien d'un lien avec l'institution ». Les raisons avancées pour cette suppression ne sont pas convaincantes et l'ANOCR s'oppose de façon générale à la banalisation de la fonction militaire.

La création du Haut comité d'évaluation de la condition militaire répond à l'une des attentes exprimée par l'ANOCR depuis trois ans. Il serait cependant souhaitable que davantage de militaires y soient représentés et il est important qu'une relation régulière et constructive soit institutionnalisée entre, d'une part, le haut comité, et d'autre part, le conseil supérieur de la fonction militaire (CSFM), les associations de retraités militaires et les parlementaires.

Enfin, il convient d'accorder la plus grande attention à la condition des épouses de militaires. En raison de la mobilité de leurs maris, elles rencontrent des difficultés à exercer une profession et donc à se constituer une retraite. Ce handicap sérieux risque à terme de peser sur le recrutement des cadres dans les armées. Les dispositions réglementaires actuelles, liées au salaire unique concernant l'assurance vieillesse des parents au foyer, sont insuffisantes et mal adaptées au milieu militaire, mais elles constituent une base de réflexion.

Le décret du 18 mai 2005 portant réorganisation du ministère de la défense a parachevé l'évolution vers l'interarmisation ainsi que le passage progressif des responsabilités en matière de ressources humaines des armées vers le secrétariat général pour l'administration.

M. Pierre Ingouf, président de la confédération nationale des retraités militaires et des veuves de militaires de carrière (CNRM), a rappelé l'inégalité de traitement entre le secteur privé, qui finance jusqu'à hauteur de 60 % les mutuelles complémentaires de ses personnels et la fonction publique, qui bénéficie de moins de 4 % des contributions de la part de l'Etat. Face à l'annonce par certains ministères de la suppression de leur participation, il est nécessaire que soit maintenu à son niveau actuel le soutien apporté par le ministère de la défense aux mutuelles militaires, notamment par le biais de l'allocation et du détachement de personnels.

La décristallisation des pensions des anciens combattants étrangers, décidée en 2001, s'est effectuée en prenant en compte la valeur du point d'indice applicable à cette date. Or, pour les anciens combattants indochinois, cette valeur n'avait pas été revalorisée depuis 1958 alors que celle applicable aux autres anciens combattants de l'ex-communauté a été revalorisée par décrets annuels dérogatoires. De ce fait, la décristallisation s'est appliquée sur une base plus faible et il en résulte une inégalité de traitement dont sont victimes les anciens combattants indochinois. La CNRM demande un alignement des points d'indice servant au calcul de leurs pensions sur l'indice moyen appliqué à l'ensemble des anciens combattants de l'ex-Union française.

En ce qui concerne l'attribution de la carte du combattant en Afrique du nord, les modalités de délivrance ne sont pas uniformes entre les policiers et les militaires. La durée de service doit être d'au moins quatre mois de présence pour les militaires, alors qu'elle est de 120 jours pour les policiers. Il serait souhaitable d'appliquer une règle commune à l'ensemble des postulants pour le calcul du temps de présence.

L'amélioration, à partir de 1998, du sort de nombreuses veuves d'anciens militaires, dites « allocataires », devrait leur permettre d'accéder au niveau du minimum vieillesse, soit un peu moins de 600 euros par mois. Il serait souhaitable de porter cette allocation à 750 euros, mais compte tenu du nombre de veuves concernées, 1 million au total, cette mesure serait coûteuse. Or, l'allocation supplémentaire versée à la veuve pour atteindre le montant du minimum vieillesse est remboursable sur le patrimoine successoral si ce dernier atteint 43 734 euros. Ce seuil est de nature à amener des bénéficiaires potentiels à renoncer à ce complément de ressources, afin de protéger le modeste héritage qu'elles souhaitent léguer à leurs descendants. A défaut de réviser à la hausse le minimum vieillesse, il serait donc possible de s'orienter vers une augmentation du seuil de remboursement, en le fixant à un patrimoine successoral égal ou supérieur à 76 225 euros.

M. Henri Lacaille, président de l'union nationale de coordination des anciens militaires (UNCAM), a indiqué que les anciens militaires avaient été déçus, à l'occasion de l'examen par le Parlement du projet de loi portant statut général des militaires, de voir à nouveau confirmée la limitation de leur droit au travail au cours des deuxièmes carrières que la professionnalisation rend indispensable. La possibilité, pour les anciens militaires de plus de 60 ans, de percevoir une allocation chômage en cas de perte d'emploi n'a pas été retenue pour des raisons d'équité par rapport aux autres bénéficiaires. Mais, c'est précisément la spécificité de l'état militaire qui justifie cette mesure. La situation financière difficile de l'UNEDIC est avancée. Mais, dans cette affaire, c'est avant tout le chômeur qui perd de l'argent. Alors que la question aurait pu être circonscrite à quelques centaines de militaires, les procédures contentieuses que l'UNCAM s'est vu contrainte d'engager vont potentiellement concerner des dizaines de milliers de pensionnés civils.

M. André Arrouet, président de l'union nationale des sous-officiers en retraite (UNSOR), a évoqué la question de l'alignement des taux de pension militaire d'invalidité des sous-officiers des armes et services sur celui des officiers-mariniers. Depuis plusieurs années, il est répondu à cette demande d'alignement que la mesure de révision ne peut faire l'objet que d'une application progressive dans le temps compte tenu de son coût budgétaire. Les associations comprennent cette argumentation ; encore faudrait-il que la mesure connaisse un commencement d'exécution.

La prise en compte par l'IRCANTEC des bonifications des militaires ayant quitté l'armée avant quinze ans de service sans droit à pension militaire se fait également attendre. Le ministre de la défense a proposé d'attribuer une indemnité particulière aux intéressés afin de valoriser les temps de services ouvrant accès aux bénéfices de campagne ou aux bonifications pour service aérien ou subaquatique. Qu'en est-il aujourd'hui de cette proposition ?

M. Bernard Lefevre, président du syndicat professionnel des anciens médecins
des armées (SAMA), a rappelé qu'à la suite de la réforme des retraites, le SAMA avait exprimé ses inquiétudes relatives aux modifications des conditions de départ à la retraite des médecins militaires, lesquelles pénalisent ceux qui souhaitent aborder une seconde carrière. Le SAMA a, depuis, mis en place, avec le concours de la direction centrale du service de santé, un observatoire à la reconversion, lequel a engagé un vaste programme d'enquêtes. Parallèlement, a été installé, en partenariat avec d'autres syndicats médicaux, un Observatoire aux retraites, chargé de suivre avec précision l'évolution de celles-ci et d'apporter des éléments chiffrés.

Les anciens médecins des armées souhaitant engager une seconde carrière se trouvent confrontés à deux difficultés. D'une part, l'instauration du médecin traitant et de la filière des spécialistes qui en découle favorise de facto une circulation des patients entre un généraliste et ses correspondants habituels, souvent issus d'une camaraderie de faculté. Dans ce contexte, l'ancien médecin militaire peut se trouver pénalisé : ayant été généralement très mobile durant sa carrière, il est bien souvent un inconnu lorsqu'il s'installe et il risque d'être victime d'un certain ostracisme. D'autre part, la reconnaissance des titres des anciens médecins des armées, par une équivalence entre le titre de chef de clinique et celui d'assistant des hôpitaux des armées, fait encore parfois l'objet de contestations. Il serait souhaitable qu'une clarification législative intervienne sur ce point.

De plus, les assureurs ont très fortement augmenté le montant des primes que doivent verser les spécialistes, notamment ceux exerçant dans des spécialités dites à risque, telles que la chirurgie, l'anesthésie et l'obstétrique ; cette situation, qui ne repose sur aucune étude de sinistralité sérieuse, apparaît intolérable. Plusieurs syndicats médicaux, dont le SAMA, se sont regroupés pour mettre en place leur propre groupe d'assurance, avec des partenaires européens, mais ils attendent pour agir l'aval du ministère des finances, et ce depuis le mois de décembre 2003.

Enfin, il est aujourd'hui difficile de féliciter des médecins militants bénévoles, en l'absence de toute gratification adaptée à leur situation de retraité. Il serait souhaitable d'avoir la possibilité de les remercier en leur remettant, par exemple, des décorations pour leurs états de service et leur dévouement.

Le président Guy Teissier a apporté les éléments de réponse suivants aux questions abordées par les intervenants. En réponse à M. Bernard Lefevre, il a souligné que, s'agissant de la création des observatoires à la reconversion et aux retraites, la commission de la défense partage pleinement les préoccupations du SAMA puisqu'elle a nommé deux députés rapporteurs d'information sur la reconversion des militaires. Ces parlementaires, qui poursuivent actuellement leurs travaux, ne manqueront pas de s'intéresser à la reconversion des militaires du service de santé des armées et contacteront prochainement l'observatoire à la reconversion des médecins militaires. Pour la reconnaissance des titres, il est vrai que le titre de chef de clinique et celui d'assistant des hôpitaux des armées ne font pas l'objet d'une équivalence systématique, ce qui n'empêche nullement un médecin militaire de s'inscrire au Conseil de l'Ordre et de se reconvertir dans le secteur civil. Un médecin qui se reconvertit dans le secteur libéral ne subira aucun préjudice par rapport à ses collègues issus du civil.

M. Bernard Lefevre a observé que, sans le titre de chef de clinique, un médecin ne pouvait être inscrit dans le secteur 2.

Le président Guy Teissier a ajouté que ceux qui se reconvertissent dans le secteur hospitalier public peuvent connaître une légère pénalité en matière indiciaire. Toutefois, les médecins militaires qui font le choix de la fonction publique hospitalière sont relativement rares dans la mesure où une telle reconversion leur fait perdre le bénéfice du cumul de leur retraite et de leur revenu d'activité. Lorsque surgissent des difficultés particulières en matière de reconnaissance de titre ou de spécialisation, le Conseil de l'Ordre des médecins est saisi et rend, en conscience, une décision.

Enfin, on ne peut que partager les préoccupations du SAMA devant l'augmentation très forte, et parfois injustifiée, des primes d'assurance. Cependant, ce problème concerne l'ensemble de la profession, et non pas seulement les médecins issus du monde militaire. La solution devra donc être globale.

En réponse aux questions soulevées par M. Henri Lacaille, il a ensuite souligné qu'il serait abusif de prétendre que les travaux du parlement confirment la limitation du droit au travail au cours de la deuxième carrière des militaires. Au contraire, le droit à la deuxième carrière des militaires, cumulable dans une certaine limite avec une pension militaire, a été reconnu à deux reprises au cours de ces dernières années : d'abord en 2003 lors de la réforme des retraites, ensuite en 2005 à l'occasion de l'adoption du nouveau statut des militaires. Il a été reconnu comme la juste compensation des contraintes liées à l'état militaire. Il est vrai que certains litiges peuvent subsister, d'une part sur le montant du plafond du cumul entre la retraite des militaires et le salaire civil, d'autre part sur l'absence d'indemnisation des militaires retraités âgés de plus de 60 ans qui se retrouvent au chômage. Les tribunaux ayant été saisis de ces difficultés, on ne peut que s'en remettre aux décisions de la justice.

Le choix, qui remonte à l'immédiat après-guerre, de confier la gestion de l'assurance chômage à un organisme paritaire concerne l'ensemble de la société française et non la seule communauté militaire. Il a été fait dans le but de responsabiliser patronat et syndicats et de permettre aux représentants des intéressés de négocier de façon directe. Une éventuelle modification de cette architecture institutionnelle que d'aucuns déplorent dépasse très largement le cadre de la commission de la défense.

Evoquant les éléments abordés par M. Jean-Michel Bernard, le président Guy Teissier a souligné que la position « en retraite » a été supprimée du fait de la disparition de son fondement historique. Elle n'a pas de réalité statutaire, n'apporte aucune garantie et n'existe dans aucune autre fonction publique. Or, un des objets de la réforme était de clarifier ce qui relève du statut et ce qui relève de la retraite. Pour bien marquer le fait que les retraités continuent à appartenir à la communauté militaire, l'Assemblée nationale a voté trois articles fondamentaux : l'article premier prévoit désormais explicitement que « le présent statut (...) assure aux retraités militaires le maintien d'un lien avec l'institution ». L'article 11 précise que les retraités militaires et leurs familles relèvent du même régime de sécurité sociale que celui dont ils relevaient avant la radiation des cadres. Il consacre également le principe de l'accès des retraités militaires aux soins du service de santé des armées et à l'action sociale. Enfin, l'article 18 dispose que les retraités militaires sont représentés au sein du Conseil supérieur de la fonction militaire. Si la position « en retraite » avait été maintenue, elle aurait entraîné la soumission de tous les retraités aux restrictions des droits civiques et politiques, sauf à dresser une liste exhaustive et fastidieuse des articles ne concernant pas les retraités militaires. La disparition de la position « en retraite » n'a donc aucune conséquence sur la situation matérielle des retraités et ne constitue qu'une clarification juridique.

Les veuves de retraités militaires sont soumises au droit commun de la pension de réversion fixé par le code des pensions civiles et militaires de retraite (CPCMR). Ce code prévoit un taux de réversion légèrement inférieur à celui qui s'applique dans le secteur privé mais est le même que celui des agents civils de l'Etat. Il n'y a donc pas de désavantage particulier pour les veuves ou veufs de militaires par rapport aux veuves ou veufs de fonctionnaires civils.

Le nouveau statut général des militaires qui instaure le comité d'évaluation de la condition militaire prévoit que la composition de cet organisme sera fixée par décret. Il est, selon les précisions du cabinet de la ministre, en cours de préparation. Les députés, au cours du débat, avaient souhaité que des parlementaires puissent en être membres. Le gouvernement s'est montré réticent à cette proposition, arguant de son souhait d'éviter toute politisation de ce domaine crucial pour le bon fonctionnement de nos armées.

En réponse à M. André Arrouet, le président Guy Teissier a rappelé que le ministère des finances restait farouchement opposé à la prise en compte, pour le calcul de la retraite des militaires qui ont servi moins de quinze ans, des bonifications obtenues pendant leur service. Deux solutions sont envisagées pour résoudre ce problème, d'une part, une réforme de l'IRCANTEC a été lancée et va aboutir à la prise en charge par l'Etat de la part que les militaires qui quittent les armées avant quinze années de service doivent aujourd'hui racheter ; d'autre part, le ministère des finances aurait accepté que les bonifications donnent droit au versement d'un pécule, charge étant laissée aux intéressés d'en faire le meilleur usage pour améliorer leur retraite : versement à un fond d'épargne, achat de points retraite... Au final, le résultat pourra se révéler aussi avantageux que la prise en compte des bonifications.

Les barèmes des pensions militaires d'invalidité ont été fixés à une époque où coexistaient des ministères différents pour chacune des armées (ministère de l'air, de la marine...), ce qui explique qu'ils ne soient pas identiques pour toutes les armées.

Depuis longtemps, les associations d'anciens militaires réclament un alignement sur le régime le plus favorable, celui de la marine. Cette mesure, évidemment coûteuse, se heurte aux réticences du ministère des finances.

Toutefois, le ministre de la défense a demandé au ministre délégué aux anciens combattants, le 2 juin, en séance plénière du CSFM, que soit élaboré un plan de rattrapage du calcul des pensions militaires d'invalidité pour que toutes soient alignées sur celles de la Marine. Ce plan, qui s'étalera inévitablement sur plusieurs années mettra donc fin à une inégalité vieille de plusieurs décennies.

M. Yves Fromion, président, a ensuite apporté les précisions suivantes.

En réponse à M. André Dosset, il a rappelé le bouleversement majeur dans l'organisation et la gestion des cercles, mess et foyers induit par la professionnalisation des armées. La réduction du format des armées a tout d'abord eu pour conséquence de fermer les cercles et mess là où ne subsistait plus aucun militaire d'active. Lorsqu'ils ont été maintenus, de nouvelles modalités de gestion ont dû être trouvées puisqu'ils ne pouvaient plus fonctionner avec des appelés.

Pour conserver le plus grand nombre de cercles, une prise en charge par l'Institut de Gestion Sociale des Armées (IGeSA) a été envisagée dès 1999. Il est très vite apparu qu'il ne disposait ni des structures, ni des moyens nécessaires pour assurer la gestion de ces établissements. Il a donc été décidé de déléguer cette gestion à des entreprises spécialisées dans ce domaine. Cette démarche a déjà abouti dans de nombreux cas, comme au Cercle National des Armées de Paris ; elle est en cours de réalisation pour le Cercle Mixte de Marseille.

Dès lors que toutes les précautions sont prises dans le contrat d'externalisation de la gestion, cette procédure permet de préserver une bonne qualité des prestations, assurées à des tarifs toujours attractifs, le ministère de la défense apportant sa contribution. Les efforts consentis pour assurer la pérennité des cercles et mess sont conséquents. Ils sont nécessaires et doivent être connus de tous afin de lever toute incertitude quant à l'importance accordée à la situation matérielle des militaires et de leurs familles.

En réponse aux préoccupations exprimées par M. Pierre Ingouf, M. Yves Fromion a rappelé qu'une hausse de la valeur du patrimoine successoral à partir de laquelle l'allocation supplémentaire de vieillesse est remboursable sur le patrimoine serait dérogatoire du droit commun si elle ne concernait que les veuves de militaires.

En effet, le calcul des pensions des militaires, régi par le Code des pensions civiles et militaires de retraites (CPCMR), concerne l'ensemble des agents publics. On voit mal, dans ces conditions, comment les fonctionnaires civils pourraient ne pas être concernés, ce qui rendrait la mesure particulièrement coûteuse. Compte tenu du contexte économique actuel, une telle demande semble difficile à satisfaire même si elle peut paraître humainement justifiée dans certains cas.

M. Yves Fromion a ensuite indiqué que la décristallisation des pensions des anciens combattants étrangers, décidée en 2001, constituait une grande avancée sociale et un geste significatif d'équité à l'égard du monde des anciens combattants. Cette décristallisation ne s'est pas faite de manière uniforme, mais a été modulée en fonction du coût de la vie des différents pays concernés.

Le ministère des anciens combattants s'est livré à une enquête approfondie qui a abouti à la mise en place d'un barème différencié selon les pays dans lesquels vivent les intéressés. Dans les trois pays indochinois, la retraite du combattant, qui a été revalorisée de 130 %, demeure, il est vrai, à un niveau relativement modeste, mais qui reflète un coût de la vie relativement faible. Modifier le barème pour certains pays reviendrait à remettre en cause le résultat de l'étude comparative menée par l'administration ainsi que la totalité de la réforme. Il convient toutefois de rester vigilant, le niveau de vie évoluant sensiblement dans le sud-est asiatique.

L'attribution de la carte du combattant en Afrique du nord est conditionnée par une durée de présence d'au moins quatre mois. Comme les mois n'ont pas tous le même nombre de jours, la durée de présence sur le terrain peut être variable selon que l'on compte en termes de mois ou que l'on prend en compte une période de 120 jours, voire même l'addition de plusieurs périodes. Dans ces conditions, il peut paraître d'autant plus injuste que le mode de calcul ne soit pas le même entre militaires et policiers. Le souhait que soit appliquée une règle commune à l'ensemble des administrations est donc plein de bon sens. La CNRM aura toutefois noté qu'il s'agit d'une mesure d'ordre réglementaire sur laquelle l'Assemblée nationale n'a que peu de pouvoir. La demande sera donc transmise au ministre de la défense et la réponse qui ne manquera pas d'être faite et sera communiquée aux intéressés.

M. Michel Lachaud, président de la fédération nationale des officiers-mariniers, quartiers-maîtres en retraite et veuves (FNOM), a attiré l'attention de la commission de la défense sur la situation des anciens marins victimes de l'amiante. Se déclarant très satisfait par la création de la mission d'information parlementaire sur ce sujet, il a regretté que les anciens marins ne soient pas traités de la même manière que les ouvriers d'Etat. Ces derniers, lorsqu'ils ont été reconnus victimes de l'amiante, perçoivent une allocation de départ anticipée calculée sur l'ensemble de leur carrière alors que celle versée aux officiers-mariniers n'est calculée que sur leur seule carrière civile. Il serait souhaitable qu'ils bénéficient d'un départ anticipé prenant en compte leur durée d'embarquement sur des bâtiments militaires amiantés.

Par ailleurs, les problèmes rencontrés pour prouver l'imputabilité au service de la maladie de la polypose de la vessie afin de pouvoir obtenir une pension doivent également être examinés. De façon générale, beaucoup de maladies professionnelles ne sont pas suffisamment reconnues.

M. Jacques Porcheron, président de l'association nationale et fédérale d'anciens sous-officiers de carrière de l'armée française (ANFASOCAF), a cité l'article II-72, du projet de constitution européenne selon lequel : « Toute personne a droit à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d'association à tous les niveaux, notamment dans les domaines politique, syndical et civique, ce qui implique le droit de toute personne de fonder avec d'autres des syndicats et de s'y affilier pour la défense de ses intérêts ».

Les articles 3, 5 et 6 du nouveau statut général des militaires sont donc contraires à l'article II-72 du projet de constitution européenne, dans la mesure où ils interdisent le droit syndical et le droit d'adhérer aux partis politiques. De plus, il s'agit d'une mesure discriminatoire à l'égard des militaires, puisqu'ils sont les seuls fonctionnaires visés par ces mesures.

En outre, comment concilier l'article 72 du statut général des militaires qui dispose que l'état militaire cesse à la radiation des cadres et l'article 73 qui prévoit le maintien des retraités militaires à la disposition des armées pendant cinq ans ? Il y a manifestement une incompatibilité. Si un retraité n'est plus militaire, il est redevenu civil. Pour servir dans la réserve, il devrait comme tout civil, faire acte de volontariat.

Prenant acte des difficultés évoquées par M. Michel Lachaud, président de la fédération nationale des officiers-mariniers en retraite (FNOM), le président Guy Teissier a fait valoir que les solutions à leur apporter relevaient essentiellement de l'exécutif.

S'agissant de la question de l'ANFASOCAF sur le droit syndical et le projet de traité constitutionnel, le président Guy Teissier a tout d'abord observé qu'elle ne semblait plus être d'actualité puisque ce projet a été rejeté par les français le 29 mai dernier.

L'article II-72 du projet de traité établissant une constitution pour l'Europe, affirme la liberté de réunion et d'association comme principe général reconnu à toute personne. Certains observateurs ont pu voir dans cet article la main de Bruxelles qui allait imposer le syndicalisme dans les armées françaises, mais il n'en est rien.

L'article II-112 du même texte précise que « dans la mesure où la présente Charte contient des droits correspondants à des droits garantis par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales (CEDH), leur sens et leur portée sont les mêmes que ceux que ceux que leur confère ladite convention. »

Or, si le premier paragraphe de l'article 11 de la CEDH affirme bien la liberté d'association, la dernière phrase du paragraphe 2, reconnaît la possibilité d'exceptions : « ... Le présent article n'interdit pas que des restrictions légitimes soient imposées à l'exercice de ces droits par les membres des forces armées, de la police ou de l'administration de l'Etat ».

Le président Guy Teissier a ensuite exposé l'articulation des articles 72 et 73 du statut général des militaires. Ainsi que le précise l'article 72, l'état militaire cesse à la radiation des cadres. Cette disposition n'est pas incompatible avec l'obligation de disponibilité à laquelle sont soumis les militaires ayant quitté le service depuis moins de cinq ans prévue par l'article 73. Ces derniers sont susceptibles d'être rappelés sous les drapeaux en cas de situation internationale particulièrement grave. Depuis la suspension du service militaire, qui a rendu quasiment impossible toute mobilisation générale, les anciens militaires sont les seuls personnels susceptibles d'être mobilisés, le cas échéant.

Cette possibilité, qui ne figurait pas dans l'ancien statut, a été introduite par la loi du 22 octobre 1999 relative aux réserves. Depuis cette date, cette procédure lourde, qui nécessite la signature d'un décret par le premier ministre, n'a jamais été mise en œuvre et reste réservée aux situations extrêmes. Ce n'est que dans le cas d'un rappel que les intéressés retrouveraient leur statut militaire. En dehors de cette hypothèse, conformément à l'article 72 du statut, ils restent civils.

M. Gilbert Le Bris, député du Finistère, a souhaité mettre en exergue les limites de l'exercice auquel la commission vient de se livrer : les questions des associations ayant été déposées par avance, les réponses ont pu paraître techniques et formelles, restreignant par là même les possibilités d'un véritable dialogue. Si cette méthode permet de répondre de manière précise à des interrogations techniques, il serait souhaitable qu'un équilibre puisse s'établir pour que, lors des auditions ultérieures, de réels échanges puissent avoir lieu, même s'ils ont pu être vifs dans le passé.

Tout en soulignant l'importance de fournir des réponses les plus complètes possibles aux participants, le président Guy Teissier a proposé qu'elles n'interviennent désormais qu'après les échanges avec les membres de la commission. Il a remercié les représentants des différentes associations pour leur participation et les a assurés que les parlementaires seront attentifs au suivi des dossiers évoqués.

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Informations relatives à la commission

· La commission a procédé à la nomination de ses rapporteurs pour avis pour le projet de loi de finances pour 2006.

Ont été nommés :

- Défense

· Environnement et prospective de la politique de défense : M. Yves Fromion

· Préparation et exécution des actions des forces armées : M. Antoine Carré

· Forces terrestres : M. Joël Hart

· Marine : M. Philippe Vitel

· Air : M. Jean-Louis Bernard

· Soutien de la politique de défense : M. Jean-Claude Beaulieu

· Espace, communication, dissuasion : M. Jean Michel

· Equipement des forces : M. Jérôme Rivière

- Sécurité

· Gendarmerie nationale : M. Philippe Folliot

- Mémoire et lien entre la Nation et son armée

· Lien entre la Nation et son armée : M. Jean-Claude Viollet

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