COMMISSION de la DÉFENSE NATIONALE et des FORCES ARMÉES

COMPTE RENDU N° 16

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mardi 6 décembre 2005
(Séance de 16 heures 30)

Présidence de M. Guy Teissier, Président

SOMMAIRE

 

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- Audition des représentants des syndicats des personnels civils de la défense

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Audition des représentants des syndicats des personnels civils de la défense

La commission de la défense nationale et des forces armées a entendu des représentants des syndicats des personnels civils de la défense.

M. Jean-Jacques Manach, secrétaire général de la fédération établissements et arsenaux de l'Etat - CFDT, a souligné que l'impact du respect de la loi de programmation militaire en matière d'emploi civil ainsi que l'évolution des effectifs des entreprises publiques de l'armement sont indissociables. En l'espèce, la CFDT ne conçoit pas que l'ouverture du capital de DCN au groupe Thales soit industriellement et économiquement justifiée. Cette opération conduirait à regrouper deux entités très inégales, tant sur le plan de leur dotation en capital que sur le volume de leurs effectifs. En outre, les conditions consenties à Thales sont pour le moins indécentes du point de vue du contribuable puisqu'elles consistent à autoriser ce groupe à verser à l'Etat une soulte répartie dans le temps et sous condition de confirmation des résultats de DCN. Par ailleurs, il est regrettable que les contrats inscrits dans la loi de programmation militaire au profit de la société nationale tardent à se concrétiser : le programme des frégates multimissions (FREMM) a ainsi pris deux ans de retard et celui des sous-marins Barracuda est devenu urgent pour le bassin d'emploi de Cherbourg.

M. Jean-Jacques Manach a souligné la dérive en matière d'externalisation des activités, au seul motif d'une rationalisation des moyens du ministère. La stratégie ministérielle de réforme va trop loin. A confondre modernisation et baisse des coûts, le ministère se prive de ses compétences et de la réactivité indispensable à la bonne marche des forces armées. Les effets collatéraux de cette frénésie externalisatrice se font sentir au-delà de nos frontières, puisque la confection des uniformes, par exemple, a été confiée à une entreprise sri-lankaise qui foule au pied les droits humains et les conventions fondamentales du droit du travail.

Il a, par ailleurs, souligné que la CFDT appuyait totalement le dispositif d'accompagnement des jeunes en difficulté dans l'emploi, mis en place par le ministère de la défense. Ce syndicat a proposé que des débouchés soient offerts en interne, notamment sur les métiers de l'hôtellerie, de la restauration ou dans l'entretien du parc automobile. Les personnels civils du ministère pourraient également apporter leur contribution à la formation de ces jeunes.

M. Jean-Jacques Manach a regretté que le projet de loi de finances pour 2006 ne prévoie aucune mesure de revalorisation de la condition du personnel civil. Pour autant, en matière de déroulement de carrière, la CFDT a favorablement accueilli la proposition de la ministre de rénover la promotion sociale au sein du ministère. La négociation doit donc se poursuivre, mais dans un cadre plus large qui inclut la gestion prévisionnelle des emplois et qui y associe des objectifs de moyen et long terme. Tant que l'Etat ne raisonnera qu'en termes de réduction des coûts au lieu de définir préalablement ses objectifs, les budgets se suivront et se ressembleront sans qu'aucune modernisation véritable ne se concrétise.

M. André Golliard, délégué syndical central CFDT de Giat Industries, a regretté que son entreprise ait perdu de nombreuses compétences. De même, les salariés qui restent dans la société ont perdu confiance dans l'avenir. La direction qui tente de communiquer pour améliorer l'image de la société nationale n'est pas très convaincante : l'opération « Crysalide » est plutôt mal perçue et ne semble pas de nature à rétablir la sérénité des salariés. Pour la CFDT, le rétablissement de la confiance passe par le respect des engagements pris. L'Etat, seul actionnaire et principal client, se doit d'honorer les commandes prévues par le contrat d'entreprise d'ici la fin de cette année. Or, il manque encore près de 190 millions d'euros de commandes, au titre de l'exercice 2005, dans le domaine des munitions, des études, du maintien en condition opérationnelle et du programme Caesar. De la même manière, alors que la puissance publique s'était engagée à reclasser 2 041 personnels en sureffectif, M. André Golliard a noté que seulement 1 050 salariés ont trouvé un nouvel emploi. 500 ne disposent actuellement d'aucune solution sur leur bassin d'emploi, à Saint-Chamond et Tarbes notamment.

Tout en reconnaissant que le ministère de la défense était indéniablement le principal contributeur de ces reclassements, M. André Golliard a considéré qu'il fallait les étendre aux autres ministères à travers les emplois réservés. De même, il serait bienvenu d'accélérer l'implantation des centres « Défense deuxième chance » dans les bassins d'emploi les plus sinistrés. La question de fond, qui reste posée, est celle de la pérennisation d'un outil de défense terrestre en France. Les projets de rapprochements industriels avec les entreprises allemandes, tels qu'ils sont envisagés par la direction de l'entreprise, pourraient conduire à des redondances et, par voie de conséquence, à des restructurations supplémentaires. La prudence est donc de mise et les conséquences sociales de tels projets doivent être analysées au préalable.

M. André Golliard a indiqué qu'il revenait au ministère de la défense, pour conserver les compétences françaises dans le secteur de l'armement terrestre, de tirer les leçons de quinze ans de plans sociaux et de donner de nouvelles perspectives d'avenir aux salariés.

M. Charles Sistach, secrétaire général de la fédération syndicaliste FO de la défense, des industries de l'armement et des secteurs assimilés, a abordé la question du rapprochement entre DCN et Thales en se référant à la « déclaration commune d'intentions DCN/Etat/Thales », selon laquelle l'Etat a vocation à devenir minoritaire tandis que Thales jouera le rôle d'industriel de référence. Il a rappelé que, lors de la transformation du statut de DCN, le Gouvernement avait affirmé que Thales avait seulement vocation à devenir un actionnaire actif. Il apparaît désormais que le désengagement de l'Etat au bénéfice de Thales était programmé de longue date. Ces craintes sont amplifiées par les incertitudes pesant sur l'emploi, le plan de charge des établissements de DCN se trouvant au plus bas. Dans ce contexte, la commande des sous-marins Barracuda doit impérativement intervenir au début de l'année 2006. Quant aux frégates multimissions (FREMM), elles devraient apporter de l'activité à partir de 2007 sous réserve que les projets de sous-traitance de la direction de l'entreprise n'aboutissent pas.

Abordant la question de Giat Industries, M. Charles Sistach a déploré la poursuite d'un dépeçage aux conséquences lourdes pour les personnels, y compris en termes de santé. Le reclassement des salariés au sein des établissements de la défense devient chaque jour plus problématique, surtout pour ceux de Saint-Chamond confrontés à un bassin d'emploi particulièrement difficile. En outre, l'abandon de certaines fabrications, notamment des munitions de petit calibre, représente une hérésie industrielle quand, dans le même temps, des salariés sont sacrifiés. Pour FO, aucun plan social ne peut être acceptable lorsqu'il s'agit, au bout du compte, de supprimer des emplois.

Tout en soulignant que le ministère de la défense n'était pourtant pas le plus affecté par la rigueur budgétaire, M. Charles Sistach a craint qu'en dépit d'annonces de commandes supplémentaires, le report des programmes Barracuda et FREMM n'augure de nouvelles restructurations. Pour cette raison, la question de l'emploi doit être appréhendée de manière plus large. Deux chiffres suffisent à résumer la politique du ministère de la défense en la matière : il y a dix ans, les personnels civils avoisinaient le nombre de 145 000 alors que le projet de budget pour 2006 en prévoit 80 200. Si les coupes budgétaires ainsi que les interdictions d'embauche depuis dix ans ne sont pas étrangères à cet état de fait, le respect de la loi de programmation militaire et les recrutements homéopathiques d'ouvriers de l'Etat n'empêchent pas les effectifs civils de continuer à diminuer. De plus en plus de postes de personnels civils sont ainsi attribués à des militaires. Or, il n'a pas été donné suite au rapport qui avait identifié 2 500 emplois civils ainsi occupés par des militaires.

M. Charles Sistach a rappelé que la fonction première des personnels civils résidait dans le soutien aux armées. L'externalisation à l'aveugle et la militarisation d'emplois civils, qu'il s'agisse de la restauration ou de la gestion des véhicules commerciaux du ministère, sont délibérément mis en œuvre et vont à l'encontre d'une véritable politique ministérielle en faveur des personnels civils. Bien souvent, quels que soient les arguments avancés par les organisations syndicales, les projets sont malgré tout appliqués, rendant inefficace tout dialogue social.

M. Charles Sistach s'est demandé quelle serait la situation de l'emploi civil si la loi de programmation militaire n'était pas respectée. Malgré l'embauche de 280 ouvriers de l'Etat, 1 600 emplois civils, toutes catégories confondues, ont en effet été supprimés cette année. Ce n'est pas la logique de plafond d'emplois sous-jacente à la loi organique relative aux lois de finances qui va inverser cette tendance, d'autant que 94 % seulement de ce plafond devrait être réalisé, selon les estimations les plus optimistes. Il faut donc s'attendre à de nouvelles réductions d'effectifs assorties d'une militarisation croissante des emplois civils.

Le porte-parole de FO a expliqué que son syndicat ne pouvait accepter aujourd'hui ce qu'il refusait hier. Le projet de recruter des jeunes en difficulté afin de les réinsérer, s'il est médiatiquement parfait et socialement incontestable après les troubles sociaux récents, démontre que des besoins existent. Il convient, certes, de faciliter des embauches de jeunes en difficulté mais sur des postes à statut et non sur des emplois temporaires et sous rémunérés. Une bonne politique de ressources humaines anticipe l'événement, ce qui n'est pas le cas au sein du ministère de la défense. En atteste l'exemple de l'apprentissage, dont les écoles spécialisées du ministère vont être fermées alors même que chacun s'accorde à reconnaître l'utilité de leur mission.

M. Charles Sistach a ensuite indiqué que les mesures de revalorisation en faveur des personnels civils qui sont inscrites au projet de loi de finances pour 2006 ne couvrent en aucun cas le contentieux salarial existant du ministère. Dans le cadre de la LOLF, ce sont les suppressions d'emplois qui financeront les avancements indiciaires.

Il a conclu en évoquant la situation des mutuelles de la défense. Depuis soixante ans, ces dernières apportent des garanties solidaires pour l'ensemble des personnels, civils et militaires, du ministère. Ces garanties se trouvent gravement menacées par les actions de la mutuelle générale des services publics auprès du Conseil d'Etat et de la Commission européenne. Celle-ci, qui compte un millier d'adhérents, bénéficie d'une assise financière sans commune mesure avec le niveau de ses cotisations, ce qui ne peut que surprendre. Un statu quo apparaît aujourd'hui nécessaire pour permettre, en 2006, une nouvelle convention avec les mutuelles de la défense.

M. Jean-Jacques Le Gourrierec, secrétaire général de la fédération CFTC des personnels civils du ministère de la défense, a regretté que l'audition des syndicats intervienne tardivement, le jour même où des négociations difficiles sont engagées sur la rémunération des fonctionnaires, en baisse après sept années sans accord salarial dans la fonction publique. Il a stigmatisé la diminution continue des effectifs des personnels civils dont les conséquences sont profondes au sein du ministère de la défense : elle entraîne des pertes de compétences préjudiciables et favorise une externalisation dont le bilan apparaît de plus en plus négatif.

M. Jean-Jacques Le Gourrierec a considéré que le budget 2006 correspondait aux engagements figurant dans la loi de programmation militaire et comportait quelques mesures positives pour les personnels civils, même s'il ne met pas fin à l'érosion de leurs effectifs. L'impact de la LOLF, positif par certains aspects, contribue également au doute des personnels civils. En faisant de la gestion des ressources humaines le facteur clé de la performance des programmes et en raison du principe de fongibilité asymétrique, elle risque d'accélérer la diminution des effectifs de certaines catégories de personnels civils et de contribuer à l'augmentation de l'emploi précaire, au détriment des personnels sous statut. De plus, l'accent mis sur l'externalisation menace directement les personnels civils. Il est contradictoire avec la volonté d'embaucher des jeunes sans qualification. L'emploi de ces derniers ne doit pas se substituer aux embauches de personnels sous statut et il convient d'assurer à ces jeunes un emploi stable à l'issue de leur contrat.

Le représentant de la CFTC a considéré que le plan de revalorisation de la condition du personnel civil, globalement satisfaisant, devait être poursuivi et étendu. Évoquant le sort de Giat Industries, il a souligné que la reprise de l'emploi dépendrait de celle du plan de charge et qu'il restait nécessaire d'assurer le maintien des compétences indispensables au développement de nouveaux produits.

Il a ensuite dénoncé l'abandon progressif par l'Etat dont DCN fait l'objet au travers d'évolutions juridiques et statutaires qui convergent vers une privatisation de l'entreprise. L'hypothèse d'une ouverture prochaine du capital à hauteur de 25 % doit être dénoncée et il faut surseoir aux rapprochements industriels envisagés. Le plan de charge de l'entreprise doit être garanti et régulier et il convient de mettre fin à la perte régulière de compétences en recrutant et en formant des jeunes.

Satisfait de constater que le ministère de la défense paraissait désormais favorable à une relance de l'apprentissage, M. Jean-Jacques Le Gourrierec a déploré que cette nouvelle priorité succède à une période marquée par la fermeture de nombreux centres de formation technique. Il est nécessaire de relancer l'activité et l'emploi au sein du ministère de la défense, mais un doute demeure sur la réalité de la volonté de conserver une véritable place aux personnels civils.

M. Daniel Chauvat, président du syndicat du corps administratif supérieur, UNSA-Défense, a regretté que la loi de programmation militaire ne permette pas un suivi précis de l'évolution des différentes catégories de personnels civils. Cette loi est caractérisée par un net recul du rôle joué par ces derniers. Le développement de corps à statut militaire sans vocation opérationnelle se poursuit, méconnaissant la logique de la professionnalisation.

Il a pris acte des mesures de revalorisation de la condition du personnel civil prévues pour 2006 et a relevé avec satisfaction que ces évolutions traduisaient enfin un traitement équitable des civils et des militaires.

En raison de l'application de la LOLF, les comparaisons budgétaires et d'effectifs entre 2005 et 2006 sont extrêmement délicates, mais une impression de décroissance de ces derniers se dégage cependant. L'analyse des coûts est également rendue très difficile par l'absence de précisions sur les évolutions par corps et on peut s'étonner que les documents budgétaires tendent à minorer le coût des militaires au regard de celui des civils. De fait, il n'y a pas de véritable politique d'emploi du personnel civil au sein du ministère.

M. Daniel Chauvat a souhaité que la mise à la disposition du ministère de la défense de contrats d'accompagnement dans l'emploi ne débouche pas sur une précarisation croissante de la fonction publique. Par ailleurs, l'indemnisation du chômage des jeunes n'ayant pas trouvé d'emploi à l'issue de leur contrat pourrait peser sur le budget du ministère, et donc sur sa capacité d'investissement. La qualité des formations dispensées devra dès lors faire l'objet d'une attention toute particulière. Il apparaît nécessaire de mettre en place un comité de suivi de ce dispositif pour éviter toute dérive potentielle. On peut également s'interroger sur la pertinence d'un recrutement opéré par le biais d'un établissement public, source de lourdeurs administratives particulières. Les objectifs de signatures de contrats cette année risquent de ce fait de ne pas être atteints. Cette mesure est d'ailleurs révélatrice de la réduction des effectifs dans laquelle semble durablement engagé le ministère.

M. Dominique Duclos, expert budget de l'UNSA-Défense, a relevé qu'une fois encore, le sort de DCN risquait de se jouer pendant les fêtes de fin d'année. Après le changement de statut et la loi permettant l'ouverture du capital, la fin de l'année 2005 sera-t-elle marquée par la prise de contrôle de DCN par Thales ? Il s'est étonné des contradictions existant entre, d'une part, les rapports du Sénat et de la Cour des comptes, favorables à un retrait progressif de l'Etat et, d'autre part, les prises de position les plus récentes du ministère de la défense et du Premier ministre. Au vu de la situation financière du groupe Thales, le coût de l'entrée au capital de DCN imposera un retour sur investissement rapide et donc de fortes exigences de reversement de dividendes, probablement au détriment des personnels et des investissements nécessaires à l'avenir.

Il a rappelé que l'UNSA-Défense s'était opposée au changement de statut et à l'ouverture du capital de DCN et qu'elle s'opposait également au rapprochement proposé avec Thales, du fait de l'absence d'intérêt économique et industriel de l'opération et de ses conséquences pour les salariés. Par-delà ce rapprochement, les sources d'inquiétude sont nombreuses en raison d'un plan de charge mal assuré et des incertitudes entourant certaines opérations, comme le deuxième porte-avions ou le contrat de développement et de réalisation du premier sous-marin nucléaire d'attaque Barracuda. La crainte d'une évolution comparable à celle de Giat Industries est bien présente. Il serait temps de dresser un bilan sérieux des résultats de la transformation en entreprises des deux grandes directions industrielles du ministère de la défense.

M. Edmond Scetbon, secrétaire général des non titulaires de la Défense CGC -Fédération de l'encadrement civil de la défense, a souligné qu'il était nécessaire d'améliorer l'attractivité du ministère de la défense pour les personnels civils en matière salariale. La professionnalisation des armées a induit d'importantes conséquences sur le rôle et la place du personnel civil du ministère. De fait, la loi de programmation fixe des objectifs à atteindre pour les programmes d'armement et le dimensionnement des forces sur une période de six années, mais c'est la loi de finances annuelle qui définit véritablement sa mise en œuvre et ses limites, notamment en termes de plafonds d'emplois. Le rapport entre les personnels civils et militaires du ministère de la défense a fortement baissé depuis 2000, passant de 25 % à moins de 20 %. Le prochain départ à la retraite des personnels civils issus du baby boom va aggraver cette distorsion entre la proportion de civils et de militaires.

La volonté de s'appuyer sur des personnels « projetables » conduit à réduire la place des personnels civils au profit des militaires. La carrière d'un militaire coûtant à l'Etat environ trois fois plus que celle d'un civil, il conviendrait d'être vigilant sur l'utilisation des fonds publics.

Le représentant de la CGC a regretté que les mesures de revalorisation salariale destinées aux personnels civils soient présentées de façon trompeuse, car leur montant atteint 12 millions d'euros, et non 15,5 millions d'euros, ainsi que cela est affiché. En effet, ces revalorisations incluent 2,5 millions d'euros destinés aux 2 300 contractuels ingénieurs, cadres et techniciens de la délégation générale pour l'armement, en application du relèvement annuel prévu de la masse salariale - lequel s'avère d'ailleurs inférieur à la hausse du coût de la vie et égal à seulement la moitié de l'augmentation annuelle des fonctionnaires. Elles incluent également un million d'euros alloués à certains personnels contractuels, en application d'un avancement règlementaire qui avait été bloqué en 2002 et 2003, sans rattrapage depuis. Ce budget apparaît donc discriminatoire pour les personnels contractuels et prévoit des mesures de revalorisation d'un niveau légèrement inférieur à celui de 2005.

M. Edmond Scetbon a ensuite déploré que les mesures de revalorisation indemnitaire des fonctionnaires techniques soient inférieures à celles des années précédentes, notamment pour l'encadrement. Au total, l'administration du ministère de la défense est celle qui offre le plus mauvais régime indemnitaire de la fonction publique d'Etat, avec le coefficient de dotation le plus faible. Ce sont les catégories intermédiaires, relevant du niveau B, qui sont les plus pénalisées. De plus, alors que la réforme LMD (licence-master-doctorat) est désormais mise en œuvre dans l'enseignement supérieur, la création d'un corps civil technique de catégorie A supérieur n'a toujours pas abouti, alors que nombreux sont ceux qui pourraient prétendre à y accéder.

Le représentant de la CGC a relevé que la contribution du ministère de la défense pour la formation des bénéficiaires de contrats d'accompagnement dans l'emploi pourrait avoir des répercussions budgétaires qui ne semblent pas avoir été prévues. Outre la question du financement de la formation dispensée dans les établissements publics d'insertion de la défense, se pose celle des débouchés : les jeunes formés dans ces établissements vont-ils entrer dans les corps de catégorie C et, dans ce cas, dans quelles proportions ? Trop de questions restent aujourd'hui sans réponse.

S'agissant de DCN, son plan de charge satisfaisant devrait favoriser l'emploi et, au fur et à mesure des départs en retraite des personnels, ce sont des contrats privés qui vont prendre la relève. Se pose alors le problème de la compensation de ces départs et du maintien des compétences techniques dans les métiers stratégiques. En effet, l'acquisition des compétences et du savoir-faire nécessite plusieurs années et doit être anticipée. Enfin, il convient de prendre garde aux velléités de rachat par appartement de l'entreprise DCN par des concurrents ou partenaires, qui pourraient avoir des conséquences sociales douloureuses.

M. Edmond Scetbon a enfin regretté que Giat Industries perde peu à peu l'essentiel de sa compétence technique, démontrant ainsi que son démantèlement était programmé alors que la diminution des effectifs, passés de 17 000 dans les années 1980 à 3 500 aujourd'hui, relève du traitement social. Le ministère de la défense devra intégrer, en surnombre si nécessaire, tous les personnels qui ne peuvent ou ne veulent plus poursuivre leur carrière dans Giat Industries ou DCN. Les personnels civils attendent de leur ministère qu'il leur accorde la place et la reconnaissance qu'ils méritent, alors que les mesures budgétaires pour 2006 sont insuffisantes pour assurer un déroulement de carrière satisfaisant.

Après avoir déploré que les organisations syndicales n'aient pas été entendues avant que l'Assemblée nationale ne vote en première lecture le projet de loi de finances pour 2006, M. Jean-Louis Naudet, secrétaire général de la Fédération nationale des travailleurs de l'Etat (CGT), a souligné le profond malaise des salariés face à la disparition des emplois et aux difficultés économiques. Alors qu'il avait été annoncé que la professionnalisation favoriserait l'emploi des personnels civils, il apparaît qu'en 2006, les effectifs budgétaires civils du ministère de la défense seront inférieurs de 2 913 postes à ceux prévus par la loi de programmation militaire. La mise en application des dispositions de la LOLF s'avère par ailleurs un marché de dupe : après un examen attentif, ce sont 5 307 emplois qui disparaîtront en 2006, chiffre similaire à celui des diminutions de postes de fonctionnaires décidés pour cette même année. Le ministère de la défense supporterait-il l'essentiel de ces restrictions ? De plus, si la ministre a annoncé le recrutement de 230 ouvriers d'Etat, ce sont 256 postes de ce type qui, parallèlement, sont supprimés.

M. Jean-Louis Naudet a considéré que les fonctionnaires étaient las d'être désignés comme les responsables du déficit public, alors que les personnes qui portent véritablement dommage à la France sont celles qui vivent des richesses créées par d'autres. De plus, les mesures de revalorisation de la condition du personnel civil apparaissent bien faibles, se limitant à 15,5 millions d'euros, sur un budget total de 47 milliards d'euros pour la défense. Les inégalités de traitement demeurent criantes. La volonté du ministre de recourir à 1 500 contrats d'avenir (CA) et contrats d'accompagnement dans l'emploi (CAE) conduit à installer des personnes dans une précarité permanente, en les mettant en concurrence avec les salariés disposant d'un statut. Il est nécessaire de mettre à la disposition de l'industrie de la défense des salariés qualifiés et bien rémunérés et l'emploi statutaire est signe d'efficacité et de cohésion sociale. Une concertation avec les organisations syndicales est plus que jamais nécessaire afin de proposer à ces contractuels des emplois statutaires, une fois leur formation achevée.

Le représentant de la CGT a exprimé ses inquiétudes en matière d'emploi dans les industries publiques d'armement. Après avoir subi une succession de plans sociaux, la SNPE pourrait perdre à nouveau des emplois, d'autant que la direction de cette entreprise ne propose aucun projet industriel. Giat Industries, fragilisée, se trouve au bord du gouffre et constitue une proie facile pour des entreprises étrangères. La filialisation de ses activités est annoncée pour le début de 2006 alors qu'à ce jour, 620 salariés n'ont pas trouvé de solution de reclassement. Giat va se trouver dans l'incapacité de répondre aux demandes de l'armée de terre, tant pour les programmes d'armement nouveaux que pour la rénovation de matériels. L'entreprise va sans doute rencontrer des difficultés dans la réalisation du véhicule blindé de combat d'infanterie (VBCI). Le canon du FAMAS qui équipe l'armée de terre est désormais acheté en Italie, les munitions étant elles aussi importées. Au total, les pouvoirs publics de tous bords ont dilapidé plus de quatre milliards d'euros, pour aboutir à la perte de 11 000 emplois et d'un atout national.

La même orientation est donnée à DCN, puisque la participation de l'Etat dans cette société a vocation à devenir minoritaire tandis que Thales doit devenir l'actionnaire industriel de référence. M. Jean-Louis Naudet a rappelé que la CGT s'opposait à ce mariage imposé entre les deux entreprises ; il apparaît de plus qu'aucun des programmes majeurs prévus pour la marine ne dispose de financement fiable sur leur durée de réalisation et qu'aucun n'est en mesure de fournir une charge de travail suffisante à l'entreprise DCN. L'érosion lente des effectifs salariés risque de rendre DCN incapable de répondre aux besoins de la marine. Il appartient à la représentation nationale de se montrer vigilante sur la situation industrielle et sociale de l'entreprise, notamment sur son carnet de commandes. Mieux qu'une union entre DCN et Thales, des coopérations mutuellement avantageuses entre les deux entreprises doivent être recherchées. Il est temps que l'Etat reprenne la maîtrise de son industrie de défense, en mettant en place un pôle public national militaire, adossé à une entité financière publique.

Le président Guy Teissier s'est étonné en préambule de la posture adoptée par tous les syndicats, à l'exception de la CFTC : si les représentants syndicaux présents ont vocation à défendre l'emploi du personnel civil de la défense et à présenter ses revendications, un emploi reste un emploi, qu'il soit civil ou militaire, et un peu plus de solidarité paraîtrait souhaitable.

D'aucuns ont imputé les problèmes rencontrés par certaines industries à des délocalisations de fabrication à l'étranger. Or, il appartient aux représentants syndicaux, comme aux parlementaires, de prendre en compte le contexte mondial de l'industrie de l'armement. L'Espagne, par exemple, a rationalisé ses chantiers navals pour dissocier les activités civiles et militaires ; Izard a ainsi été scindé en deux entités. En Allemagne, Thyssen et HDW se sont associés pour se renforcer. En France, faute de regroupements industriels, c'est la totalité de nos entreprises d'armement qui risque de se trouver hors jeu. Actuellement, la loi de programmation est respectée, ce qui constitue une première, et le budget de la défense, qui ne sert plus de variable d'ajustement, est en constante augmentation. Peut-on cependant être certain de la pérennité de cette situation ? Nos compatriotes accepteront-ils que la croissance du budget de la défense se poursuive ? Des voix s'élèvent déjà pour critiquer son importance, même si les crédits du ministère paraissent correctement employés, la commission en contrôlant trimestriellement l'usage.

S'agissant des critiques portant sur la conception parlementaire du dialogue social et des qualificatifs utilisés, ils paraissent bien exagérés, voire outranciers.

La situation de Giat Industries n'est pas aussi négative que cela a été dit. En dix-huit mois, 1 500 personnes ont trouvé un reclassement. Il reste six mois pour trouver une solution pour les 500 derniers salariés. Le ministère de la défense a réalisé des efforts majeurs en la matière ; il aurait été souhaitable que les collectivités locales agissent de même.

Les emplois aidés polarisent bien des critiques en raison de la précarité qui les caractérise. Mais les jeunes qui les occupent bénéficient de formations professionnelles pouvant déboucher sur un métier. En tout état de cause, la proposition d'une formation ne peut être assortie d'une garantie d'emploi.

Le président Guy Teissier a ensuite approuvé le souhait que les établissements « défense deuxième chance » soient prioritairement installés dans des bassins d'emploi où le tissu industriel de la défense est fragilisé.

Il a récusé les allégations selon lesquelles Giat perdrait ses compétences techniques. Les parlementaires ont toujours souligné l'excellence des compétences des personnels de Giat. Si la fin des chars lourds semble s'annoncer, l'entreprise participe aujourd'hui au développement de la numérisation du champ de bataille, à la mise au point du VBCI et à la production du canon Caesar.

Si les mesures salariales apparaissent insuffisantes, il n'en reste pas moins que les revalorisations prévues sont supérieures à celles pratiquées dans le passé.

Le président Guy Teissier a ensuite fait valoir que les documents budgétaires mettent en exergue qu'un emploi tenu par un militaire du rang coûte en moyenne moins cher qu'un emploi tenu par un fonctionnaire civil.

MM. Daniel Chauvat et Jean-Louis Naudet ont souligné que les chiffres varient selon les programmes et selon les catégories.

Abordant l'externalisation, le président Guy Teissier a estimé que confier l'entretien des espaces verts ou la gestion du parc automobile de la gamme commerciale était susceptible de générer des économies. A l'occasion d'un déplacement, il a constaté qu'un régiment pouvait être gardé, dans la journée, par une société privée.

La charge de travail des entreprises d'armement est un souci légitime des syndicats. Le programme des frégates multimissions constitue une charge de travail équilibrée et stable pour DCN. Si la fabrication des chars Leclerc arrive à son terme, il reste à Giat Industries les programmes VBCI et Caesar ainsi que l'entretien des matériels.

Il a souligné que certains postes vacants du ministère de la défense étaient réservés à des personnels issus de Giat Industries non pourvus pour l'instant, faute de mobilité géographique des personnes susceptibles d'occuper ces emplois. Dans cette entreprise, l'embauche de jeunes techniciens et ingénieurs a redémarré.

Le programme FREMM n'a été retardé que de 2 à 3 mois, ce qui est négligeable pour un programme international d'une telle envergure.

La possibilité de solliciter les personnels civils de la défense pour le fonctionnement des établissements consacrés au programme « défense deuxième chance » apparaît comme une bonne idée et pourrait se révéler très instructif.

S'agissant de la revalorisation des rémunérations des personnels civils, le président Guy Teissier a enfin souligné que 11 à 15 millions d'euros ont été inscrits à cet effet dans les lois de finances depuis 2002, soit un montant annuel supérieur à l'enveloppe globale accordée sur l'ensemble de la précédente législature.

M. Jean-Claude Viollet, a fait valoir que la LOLF, en dépit d'imperfections portant notamment sur les critères de performance, constitue un bon outil de gestion de la dépense publique et des crédits d'équipement en faveur de l'armement, car elle permet de s'assurer que les enveloppes budgétaires prévues sont dépensées conformément à leur objet.

Il a ensuite estimé que l'exécution de la loi de programmation militaire devrait s'apprécier à l'échéance du plan « armées 2015 », dont elle ne constitue qu'une étape. Par ailleurs, il convient de tenir de plus en plus compte de la dimension européenne de la défense nationale, qu'il s'agisse de ses aspects opérationnels ou de son volet industriel.

Dans le cas de DCN, les préoccupations des organisations syndicales méritent de recueillir une écoute attentive. Néanmoins, certains établissements, comme celui de Ruelle, sont déjà accoutumés à la concurrence. Il aurait sans doute été plus simple de s'en tenir au statu quo, mais cela aurait certainement conduit à la disparition d'une industrie stratégique. Le choix qui a été réalisé lors du changement de statut de DCN est celui de l'adaptation au contexte industriel et commercial. Cette option a été entourée d'un certain nombre de garanties, sur lesquelles il appartient aux membres de la commission, notamment, de rester vigilants. C'est ainsi qu'il faudra veiller au respect du contrat d'entreprise et aux conditions dans lesquelles les alliances industrielles, nationales ou européennes, sont nouées. Il n'empêche qu'il n'existe pas d'alternative si la France veut préserver l'indépendance de son industrie navale vis-à-vis des fonds de pension américains.

M. Jean-Claude Viollet a ensuite rappelé que la mission d'information sur le suivi du plan social de Giat Industries, dont il fait partie, a déjà présenté deux communications et doit en présenter une troisième avant de rendre son rapport définitif. Ce travail conduit les rapporteurs à se préoccuper de l'avenir de l'entreprise et des bassins d'emploi concernés. A cet effet, ils ont procédé à de nombreux déplacements sur le terrain et ils continueront à le faire, avec le souci de veiller au respect des engagements pris par l'Etat et par la direction de l'entreprise, ainsi qu'à la pérennisation d'une industrie de l'armement terrestre en France.

Il a assuré entendre les propositions des représentants des organisations syndicales des personnels civils de la défense. Certaines méritent certainement d'être approfondies, mais il ne faut pas pour autant donner le sentiment aux personnels que l'immobilisme est possible. Une profonde évolution du secteur public de l'armement s'esquisse et elle ne réussira qu'avec les personnels concernés, ce qui crée une exigence de dialogue mutuel.

M. André Golliard a relevé que la volonté politique d'orienter Giat Industries vers l'ingénierie n'avait pas été accompagnée par une politique cohérente en matière de contrats d'études amont depuis deux ans. L'entreprise aurait normalement dû bénéficier de 16 millions d'euros de commandes à ce titre et, en leur absence, les bureaux d'études sont sous-utilisés. Trois autres sujets affectent la crédibilité de la politique menée : les études sur l'après Leclerc, la deuxième tranche du canon Caesar et la commande pluriannuelle d'obus de gros calibre. Cette dernière joue malheureusement une fois de plus le rôle de variable d'ajustement, ce qui risque d'avoir des conséquences importantes pour le site de Tarbes.

En matière de reconversion, 40 reclassements doivent encore être effectués à Cusset. A Tarbes, le groupe Sagem ne respecte pas l'engagement de créer 200 emplois. A Saint-Chamond, ce sont 120 personnels qu'il convient de reclasser et l'ouverture d'un centre de l'établissement public d'insertion de la défense pourrait y contribuer.

Le président Guy Teissier a souligné que la situation du site de Tarbes pourrait être utilement évoquée lors de la prochaine rencontre entre les responsables du ministère de la défense et la mission d'information sur le contrôle de l'exécution des crédits de la défense.

M. Charles Sistach a souligné que les syndicats avaient, par nature, vocation à défendre les personnels civils. Lors de la professionnalisation des armées, il avait été annoncé un recours accru aux personnels civils, tout particulièrement en matière de soutien. Or, les emplois dans ce domaine sont de plus en plus souvent occupés par des militaires. Cette évolution est d'autant moins acceptable qu'elle a parfois lieu au sein de sites susceptibles de servir utilement à la reconversion des personnels de Giat Industries.

Face à une concurrence de plus en plus forte, tout particulièrement de la part des industries de défense américaines, donner aux industriels français la possibilité de sous-traiter à l'étranger la réalisation de programmes d'armement nationaux entraînerait des conséquences très dommageables pour l'emploi. La construction de l'Europe de l'armement semble être menée par les industriels, sans que les responsables politiques et syndicaux aient véritablement leur mot à dire.

Il a reconnu que la loi de programmation militaire consacre un effort financier important au profit de la défense, mais il s'agit là d'une des missions régaliennes de l'Etat et une défense crédible exige des moyens à la hauteur des objectifs. Les personnels de Giat Industries qui n'ont pas encore pu être reclassés constituent les cas les plus difficiles. Le ministère de la défense a proposé de réserver 50 postes d'ouvriers d'Etat à leur intention et ce geste, quoique insuffisant, n'est pas négligeable. Les difficultés rencontrées pour pourvoir ces emplois s'expliquent non seulement par les difficultés de mobilité géographique mais aussi par la perte de pouvoir d'achat qu'a entraîné le changement de statut. Des solutions alternatives doivent être proposées. La mise en place d'emplois aidés au sein du ministère est légitime à condition que les jeunes puissent être embauchés à l'issue de leur contrat, faute de quoi leurs espoirs seraient déçus.

Le président Guy Teissier a précisé qu'il n'estimait pas souhaitable que la construction de navires hors de l'Union européenne soit autorisée pour les commandes de la marine nationale. Si le recours à des emplois aidés est souvent nécessaire à titre d'aide transitoire pour des personnes en difficulté, ces dispositifs ne peuvent être confondus avec une véritable embauche. Dans le cas des contrats d'accompagnement dans l'emploi, les jeunes bénéficieront d'une véritable formation, qui les aidera à trouver un emploi sur le marché du travail, voire, en fonction de leurs compétences, au sein du ministère de la défense.

M. Daniel Chauvat a souligné que son organisation syndicale ne critiquait pas le statut des militaires opérationnels. En revanche, elle s'interroge sur l'efficience supplémentaire d'un greffier sous statut militaire par rapport à celle d'un greffier civil ou encore sur la pertinence de la création d'un corps militaire de soutien de gendarmerie. Ce dernier a été mis en place lors de la professionnalisation des armées et s'inscrivait dans la politique de reclassement des personnels de régiments dissous. Toutefois, il recrute désormais hors de ce vivier et s'acquitte de missions de nature civile, alors que son coût est plus élevé que s'il était composé de fonctionnaires civils.

M. Jean-Jacques Le Gourrierec, secrétaire général de la Fédération CFTC des personnels civils du ministère de la défense, a souligné que les organisations syndicales ne cultivaient pas d'antagonisme entre personnels civils et militaires, mais qu'elles souhaitaient seulement que le ministère de la défense soit plus respectueux des compétences des civils. Il convient par ailleurs d'être attentif à l'externalisation et aux pertes de compétences qui en découlent, par exemple dans des domaines comme l'ingénierie. Il a ainsi été demandé à la ministre que des points d'étape soient réalisés afin d'évaluer régulièrement les résultats de l'externalisation. S'agissant de la réorganisation de DCN, les modalités retenues par le ministère se sont traduites par une perte de confiance des salariés, tandis que des erreurs ont été commises en matière de gestion des ressources humaines. Quant aux contrats d'avenir et aux contrats d'accompagnement dans l'emploi, il s'agit d'emplois précaires, alors qu'il faut s'efforcer d'aider les personnes dans la durée.

M. Jean-Louis Naudet a relevé qu'aucune organisation syndicale n'avait contesté le sens social de ces emplois aidés, mais que les critiques portaient sur le format de ces contrats, d'environ 20 à 26 heures hebdomadaires payés au SMIC. Sans concertation, 1 000 à 1 500 personnes vont ainsi prochainement en bénéficier de ces contrats et seront placées dans des postes auparavant tenus par des fonctionnaires ou des ouvriers d'Etat. Or, le ministère avait affirmé que ces emplois, tels les métiers de bouche, de secrétariat ou de mécanique électrique, ne relèvaient plus du cœur du métier. Certes, il est nécessaire d'aider à former des personnels, mais si, à l'issue du cycle de formation, ces derniers ne sont pas recrutés, c'est un nouvel échec pour eux. C'est pourquoi la CGT a proposé au ministère de la défense de définir un volet d'embauches pour de véritables emplois, stables et statutaires. Dans le même temps, il apparaît indispensable que le ministère conserve les deux centres d'apprentissages situés à Brest et à Lorient, dont la fermeture est imminente, alors que ce sont les seuls qui peuvent fournir des personnels nécessaires à la marine.

Enfin, M. Jean-Louis Naudet a admis, ainsi que l'a fait remarquer le président Guy Teissier, que la situation particulièrement favorable du budget de défense ne serait peut-être pas éternelle et a regretté que n'ait jamais été remis en cause un programme aussi coûteux que le missile M 51.

Le président Guy Teissier a rappelé qu'il avait déjà eu l'occasion de s'exprimer, lors des deuxièmes universités d'été de la défense, sur l'évolution des dépenses consacrées aux programmes nucléaires, au-delà de l'achèvement du programme M 51.

M. Jean-Louis Naudet a déploré que les organisations syndicales n'aient pas à donner leur avis sur la gestion des programmes budgétaires institués par la LOLF.

Le président Guy Teissier a estimé que certaines revalorisations des rémunérations des personnels militaires et civils seraient certainement bienvenues. Il a néanmoins fait valoir qu'elles ne peuvent intervenir qu'en contrepartie d'économies réalisées par les armées. C'est ainsi que l'armée de l'air a engagé une réflexion sur le réseau de ses bases aériennes, baptisée « Air 2010 ». Pour préserver l'outil d'excellence que constitue la défense nationale, il est indispensable d'équiper correctement les forces mais aussi de les entraîner et de les rémunérer en conséquence. Il ne sera pas bien longtemps possible de faire l'économie de cet important débat.

M. Jean-Louis Naudet a regretté que les organisations syndicales aient pris connaissance du projet de restructuration des bases de l'armée de l'air par voie de presse.

Le président Guy Teissier a observé que les reprises par la presse de l'audition du chef d'état-major de l'armée de l'air par la commission, le 18 octobre dernier, démontrent, s'il en était besoin, l'utilité d'une commission spécifiquement compétente pour les questions de défense.

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