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COMMISSION de la DÉFENSE NATIONALE et des FORCES ARMÉES

COMPTE RENDU N° 20

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 18 janvier 2006
(Séance de 10 heures)

Présidence de M. Guy Teissier, président

SOMMAIRE

 

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- Audition de représentants d'associations œuvrant pour le contrôle du commerce mondial des armes légères.

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Audition de représentants d'associations œuvrant pour le contrôle du commerce mondial des armes légères.

La commission de la défense nationale et des forces armées a entendu des représentants d'associations œuvrant pour le contrôle du commerce mondial des armes légères.

Le président Guy Teissier a rappelé qu'environ 640 millions d'armes légères et de petit calibre circulent aujourd'hui dans le monde, en provenance pour l'essentiel de l'ex-bloc soviétique. Cette prolifération d'armes légères est préoccupante, notamment en Afrique, et le Président de la République s'est déclaré favorable à un traité international sur le contrôle du commerce des armes lors du sommet France-Afrique de Bamako le 3 décembre 2005. Une conférence sur le sujet doit se tenir à New York en juillet 2006, afin d'aborder la question des détournements et des trafics illicites, nombreux y compris dans nos banlieues.

Mme Caroline Maurel, chargée de campagne de l'association Agir ici, a présenté l'initiative commune des associations oeuvrant pour le contrôle des armes, laquelle s'inscrit dans le cadre international de la campagne Control Arms. Cette dernière a été lancée le 9 octobre 2003 dans plus de 70 pays par Amnesty International, Oxfam International et le réseau d'action international sur les armes légères (RAIAL). Dans le monde, plus de mille personnes meurent chaque jour du fait de la violence armée et au moins 80 % des armes légères en circulation proviennent du commerce légal. Il faut que les Etats décident de critères communs stricts pour leurs exportations d'armements. Cela passe par l'adoption d'un traité juridiquement contraignant, élaboré et adopté dans le cadre des Nations Unies, régissant le commerce de toutes les armes conventionnelles et basé sur les principes du droit international humanitaire et des droits de l'homme. La campagne vise également à sensibiliser les citoyens, notamment au travers de la pétition « un million de visages ».

La France étant le troisième exportateur d'armes au monde, une plate-forme d'associations travaille depuis des années sur la question du contrôle des transferts d'armes et avait été entendue, en 2000, dans le cadre de la mission d'information sur le contrôle des exportations d'armement. Il est regrettable que la collaboration entre les organisations non gouvernementales (ONG) et les parlementaires n'ait pas été poursuivie. A l'heure actuelle, une cinquantaine de gouvernements, dont ceux des 25 pays de l'Union européenne, se sont déclarés favorables à l'adoption d'un traité portant sur le commerce des armes. En 2006, la plate-forme française « contrôler les armes » a lancé une campagne « Armes : un commerce qui tue ! », soutenue par 37 associations et syndicats, dont les objectifs sont d'inciter le gouvernement français à agir en ouvrant au plus vite des négociations dans le cadre des Nations Unies, de renforcer la transparence et le contrôle démocratique d'exportation d'armes françaises et de sensibiliser les citoyens.

Une campagne internationale d'interpellation des parlementaires a été lancée. L'un de ses principaux outils est le projet de résolution élaboré par le Forum parlementaire, demandant aux gouvernements d'avoir une attitude plus ferme en matière de transferts d'armes et les exhortant à convenir d'un ensemble de principes globaux dans ce domaine. En France, les députés sont sollicités pour déclarer publiquement leur soutien au traité et contribuer à la pétition « un million de visages ». Il est nécessaire que le projet de constitution d'un groupe d'étude parlementaire sur le commerce des armes aboutisse, afin de demander un débat annuel sur le rapport sur les exportations d'armes et de faire voter une résolution de soutien au projet de traité. Sur le plan international, il s'agit de suivre la préparation de la conférence de révision des Nations Unies sur les armes légères et de veiller à ce que les délégués de l'Union interparlementaire (UIP) soient suffisamment informés du problème des armes. Il serait souhaitable que des parlementaires français participent au débat sur les armes légères qui se déroulera dans le cadre de l'Assemblée de l'UIP à Nairobi en mai 2006.

M. Didier Destremau, directeur du Secours catholique, a noté que même s'il ne s'agissait pas de la mission première du Secours catholique, celui-ci avait souhaité rejoindre le collectif français de contrôle du commerce des armes car il est devenu évident que les ventes excessives d'armes aux pays en développement les empêchent de progresser économiquement et socialement. Les ressources consacrées à l'achat d'armement font défaut dans des domaines qui devraient être prioritaires, comme la santé et l'éducation. Les objectifs du millénaire pour le développement, définis à l'ONU par 189 pays en septembre 2000, ne seront jamais atteints tant que les dépenses d'armement seront aussi importantes au regard des sommes consacrées à l'aide internationale. Aujourd'hui, 33 pays dépensent plus pour leur armement que pour la santé et l'éducation. Il ne s'agit pas d'interdire les transferts d'armes, la plupart des pays importateurs ayant des besoins légitimes de défense et de sécurité, mais d'empêcher la mauvaise utilisation de celles-ci. Face à l'ampleur du problème, le Secours catholique/Caritas France s'est pleinement investi dans le débat depuis deux ans et copréside le collectif français. Le réseau constitué de plus de 180 Caritas nationales s'est mis au service de cette cause et appuie de toutes ses forces les principes définis pour un traité international sur le commerce des armes.

M. Patrice Bouveret, président de l'Observatoire français des transferts d'armements, a estimé que le traité ne prendra toute sa signification que s'il permet de réduire la prolifération des armes tant du côté de la demande que de l'offre. La transparence est importante : elle constitue une première étape dans la connaissance du marché et est indispensable à l'ouverture d'un débat démocratique sur le sujet. Actuellement le seul outil international disponible sur les transferts d'armes est le registre de l'ONU, mis en place en 1992. Celui-ci présente cependant de nombreuses lacunes : il repose sur la base de déclarations volontaires des Etats et ne concerne pas les armes légères et de petit calibre. En France, les associations ont pu un temps s'inquiéter du retard dans la présentation du rapport au Parlement sur les exportations d'armement ; à cet égard, la publication de la sixième édition fin décembre 2005 est plutôt rassurante. Ce document pourrait toutefois être amélioré, en allant au-delà d'une simple présentation des volumes financiers et en présentant de manière détaillée les caractéristiques des matériels vendus, afin de mieux apprécier leur pouvoir destructeur. Un travail d'harmonisation doit également être réalisé à l'échelle de l'Union européenne, le rapport publié par le COARM étant plus qu'insuffisant et ne pouvant être considéré comme un outil permettant un débat démocratique sur les questions d'exportation. De nombreux efforts sont encore à réaliser afin que les données fournies par les Etats soient comparables. Il convient également de s'attacher au problème des transferts de technologies, notamment au travers des cessions de licences de production et de leur contrôle. De même, la question du contrôle des intermédiaires doit être abordée et il est regrettable que le projet de loi déposé au Sénat en 2002 n'ait pas encore été inscrit à l'ordre du jour. Enfin, alors que l'organisation d'un débat annuel au Parlement sur la politique d'exportation de la France, faisant suite au rapport annuel au Parlement en la matière, faisait partie des recommandations de la mission d'information, aucun débat n'est intervenu depuis 2000, alors qu'il s'agit d'une question intéressant également les commissions des affaires étrangères et des finances. L'ensemble des députés devrait pourtant prendre en considération les sondages indiquant que deux tiers des Français sont opposés aux ventes d'armes.

M. Benoît Muracciole, coordinateur de la campagne « Contrôlez les armes », a souligné que, chaque année, des millions de femmes, d'hommes et d'enfants subissent la violence des armes, se trouvant réfugiés, déplacés et victimes de violations de leurs droits. Au Soudan, plus de deux millions de personnes sont décédées depuis 1983, et un responsable de l'ONU déclarait en 2005 que, dans ce pays, il était plus facile de trouver une arme qu'un morceau de pain. En République démocratique du Congo, plus de trois millions et demi de personnes sont mortes entre 1998 et 2002 ; des centaines de milliers de femmes ont été violées durant la guerre, et, aujourd'hui encore, 30 000 personnes meurent tous les mois. Amnesty International a récemment recueilli des témoignages terribles sur les exactions commises dans ce pays, par exemple des viols de bébés ou d'enfants très jeunes. Un chef coutumier indiquait que, si, auparavant, la violence pouvait être régulée, l'arrivée des armes, notamment entre les mains des jeunes, réduisait aujourd'hui les autorités locales à l'impuissance.

Les rapports d'Amnesty International sur les deux pays précités ont montré comment les transferts irresponsables d'armes étaient liés aux violations des droits humains et du droit international humanitaire. Selon un rapport publié en octobre 2004, les registres Comtrade et Eurostat mentionnent la France comme exportatrice d'explosifs militaires « et autres » à destination du Soudan depuis 1994. En réponse à une question envoyée par Amnesty International sur ce point, le ministère des affaires étrangères n'a apporté aucune confirmation, infirmation ou précision, mais s'est contenté de détailler le processus d'autorisation des exportations d'armements de la France. Amnesty International est actuellement en contact avec la délégation générale pour l'armement (DGA) et l'administration des douanes afin de connaître la nature exacte de ces exportations et le contrôle portant sur leur utilisation finale.

S'agissant du travail effectué avec les gouvernements, le projet de traité sur le commerce des armes a été élaboré par un groupe d'organisations non gouvernementales (ONG), en reprenant des textes existants dans les différents forums internationaux, comme l'ONU et les tribunaux internationaux, ou au sein d'initiatives régionales, telles que le protocole de Nairobi ou le code de conduite de l'Union européenne. Deux dynamiques complémentaires  sont proposées : d'une part, un projet de traité international sur le commerce des armes qui s'inscrit dans un cadre « toutes armes » et qui sera présenté à l'Assemblée générale de l'ONU en octobre prochain, dans le but d'obtenir la création d'un groupe de travail sur cette question ; d'autre part, la définition de principes généraux pour le contrôle des armes, afin qu'ils soient intégrés dans le programme d'action de la conférence de l'ONU sur les armes légères et de petit calibre (ALPC) de juillet 2006.

Lors du comité de préparation de la conférence de l'ONU sur les ALPC, le Secours catholique et Amnesty international ont constaté le caractère constructif de la position de l'Union européenne et de la France, soutenue par la volonté, affichée à Bamako, du Président de la République, de promouvoir le contrôle des armes. Le positionnement de pays tels que la Chine, Israël et les Etats-Unis, qui représentaient les opposants les plus résolus au contrôle des armes, semble également évoluer favorablement.

Il est aujourd'hui nécessaire que le gouvernement français réalise un effort supplémentaire pour la promotion des principes et du traité, car nombre de pays du Sud ont besoin de ce soutien. La France a une grande expertise en matière de transferts d'armes et il semble important qu'elle s'investisse dans ce domaine en mettant à disposition des personnels, afin d'être l'un des pilotes de ce processus.

Le président Guy Teissier a indiqué avoir beaucoup apprécié le ton général des interventions des différentes associations, mais a relevé certains amalgames dans les propos tenus : ainsi, la France ne peut être assimilée à un pays délictueux, qui vendrait des armes sans contrôle. Certains dérapages ont pu se produire en ce domaine, au fil de notre histoire. Néanmoins, la France est une démocratie avancée, soucieuse de ces questions de contrôle, comme l'illustre la prise de position du Président de la République et le présent débat. Elle ne peut être comparée à des pays pauvres, émergents, surarmés, ne reconnaissant aucune règle et vendant des armes de tous calibres, parfois même en fournissant des mercenaires en sus pour en assurer le fonctionnement. De plus, il apparaît peu pertinent d'établir un lien entre les viols d'enfants, faits particulièrement horribles et hautement condamnables, et le commerce des armes. Comme cela a été rappelé à juste titre, la publication du rapport annuel sur les exportations d'armement de la France connaît parfois des retards ; la commission de la défense l'avait signalé à la ministre de la défense, qui a reconnu ces lenteurs et annoncé leur correction, ce qui a été fait. Il s'agit d'une évolution positive en faveur de l'information de la commission de la défense, qui montre la volonté de clarté du pouvoir exécutif en ce domaine.

S'agissant de la conclusion de ce traité portant sur le commerce des armes et leur utilisation, que chacun ne peut qu'approuver, comment inciter les pays à y adhérer ? Comment pourra-t-on contraindre les Etats signataires qui refusent de se conformer à certaines de ses obligations ? On ne peut d'ailleurs s'empêcher de faire le rapprochement avec la question de la prolifération nucléaire, certains pays n'adhérant pas au traité de non-prolifération et ne faisant pas partie de l'AIEA mais étant aujourd'hui dotés de l'arme atomique. Enfin, la participation des ONG n'est pas acceptée par tous les pays : dans ce contexte, comment les associations envisagent-elles leur rôle et les modalités de leur participation dans le processus actuel sur le contrôle des armes ?

M. Didier Destremau a indiqué que le traité ne serait certes pas effectif et efficace dans tous les pays, mais deux exemples, dans deux domaines différents, celui du protocole de Kyoto d'une part et du traité d'Ottawa sur les mines anti-personnel d'autre part, montrent l'effet d'entraînement que peuvent exercer les pays signataires sur les Etats non parties aux accords. A titre d'exemple, les Etats-Unis et la Chine, qui n'ont pas signé le traité d'Ottawa, produisent sans doute encore des mines anti-personnel, mais ne les utilisent plus ; ainsi, les Etats-Unis n'y ont pas recouru pour protéger leurs troupes ou leurs installations lors des conflits en Irak ou en Afghanistan.

Certains pays ne reconnaissent effectivement pas les ONG comme des participants au débat démocratique. Néanmoins, même les pays les plus virulents contre elles viennent leur demander des données, et s'appuient sur leur expertise juridique et pratique. Le récent débat ayant eu lieu à New York s'est largement fondé sur leurs idées et leurs informations, et il est reconnu qu'elles peuvent exercer, lorsqu'elles ne sont pas trop radicales ou extrémistes, une forte influence.

M. Benoît Muracciole a souligné que, s'agissant du lien entre commerce des armes et multiplication des viols, il est très important de souligner dans les principes et le corps du traité les limitations relatives à l'emploi des armes. En Ituri, des centaines de milliers de femmes ont été violées depuis le début de la guerre ; les violences sexuelles aussi intenses sont associées à des conflits, eux-mêmes liés à des transferts incontrôlés d'armes. Dans le rapport d'Amnesty International portant sur la République démocratique du Congo, il est indiqué qu'en 2001, à Kisangani, un obus de 104 millimètres fabriqué en 1975 par l'entreprise belge PRB a été utilisé en 2000 contre les populations civiles. Le traité n'entend nullement remettre en cause le droit à l'autodéfense des pays, mentionné par l'article 51 de la Charte des Nations Unies ; en revanche, il met l'accent sur la responsabilité de chaque pays sur l'utilisation des armes qu'il exporte. Le projet de traité n'introduit pas de nouvelles dispositions mais réunit des textes existants au niveau international. Portant sur le risque d'utilisation, il s'inscrit dans le cadre de l'article 26 de la Charte des Nations Unies engageant les Etats à contrôler leurs productions et exportations d'armes.

Au cours des dix dernières années, la France a vendu des armements pour une valeur d'un milliard d'euros tant au Pakistan qu'à l'Inde. Or, après le tremblement de terre survenu au Pakistan, il est apparu que ce dernier ne disposait pas des moyens suffisants pour apporter une aide humanitaire à ses propres citoyens, alors même qu'il consacre une part substantielle de son budget (60 %) aux dépenses militaires.

Il importe de souligner l'importance de la notion d'évaluation du risque, pour laquelle l'ONU apporte des indications. Il relève de la responsabilité des Etats d'évaluer ce risque. On doit également souligner le caractère historique de la conjonction politique actuelle : alors qu'en deux ans, plus de cinquante Etats se sont dits favorables à l'établissement d'un cadre juridiquement contraignant pour le commerce des armes ; un processus similaire portant sur les mines anti-personnel avait requis quinze ans.

Le président Guy Teissier a observé que l'importance du budget que consacrent le Pakistan et l'Inde à leurs dépenses militaires s'explique par la tension persistante entre ces deux pays. Il a ajouté que les secours apportés aux populations sinistrées lors du tremblement de terre de l'automne dernier avaient essentiellement été le fait de l'armée pakistanaise, notamment en raison de ses moyens aéroportés, seuls à même de distribuer l'aide dans les zones les plus difficiles d'accès.

M. Jean-Michel Boucheron a souhaité apporter quelques précisions liminaires. En premier lieu, le traité de non-prolifération nucléaire n'est pas appliqué car il n'est pas applicable, en raison d'un manque total de légitimité. Ce texte entérine en effet la possession de l'arme atomique par cinq Etats tout en interdisant aux autres signataires de l'acquérir, ce qui ne peut être efficace. Sa révision semble donc inéluctable.

Il convient en second lieu de distinguer deux types d'armes : les armes contribuant à la sécurité des Etats, c'est-à-dire les équipements tels que les sous-marins ou les systèmes de contrôle aérien, des armes qui peuvent permettre d'asservir des populations civiles, comme les mines anti-personnel ou les armes légères par exemple. Cette deuxième catégorie se trouve au cœur du sujet du contrôle international des transferts d'armements.

En troisième et dernier lieu, la démocratie n'est pas synonyme de transparence absolue. Entre cette dernière, souhaitée par les médias, et le secret le plus total et l'impunité, réclamés par les industriels de la défense, la démocratie trouve à s'exprimer à travers les représentants du peuple, qui doivent jouer un rôle de contrôle et d'information. C'est ainsi que le Gouvernement dépose chaque année, sur le Bureau de l'Assemblée nationale un rapport public sur les exportations d'armement. Quand tel n'est pas le cas, à l'instar du rapport portant sur l'année 2002, la commission intervient auprès du Gouvernement et, jusqu'à présent, elle a toujours obtenu gain de cause.

M. Jean-Michel Boucheron s'est ensuite prononcé en faveur d'une implication plus active de la France dans le processus d'élaboration du traité sur le commerce des armes. Si l'application de ce texte demandera certainement de nombreuses années, il est du devoir de la France de formuler des propositions concrètes au sein de toutes les instances internationales qui peuvent avoir à traiter du sujet et le Président de la République a énoncé des principes intéressants lors du sommet de Bamako. La conception britannique qui, à force de rechercher l'unanimité des Etats, confine à l'immobilisme, constitue un contre-exemple. L'unilatéralisme actif, français ou européen, semble une bien meilleure approche en la matière. En effet, dans un tel cas de figure, la France et l'Union européenne se placeraient dans un processus comparable à celui de l'interdiction de la peine de mort, avec un effet d'exemplarité très important à l'égard des opinions publiques.

M. Gérard Charasse a confirmé que le Gouvernement, le Parlement et la commission sont restés sensibilisés sur la question du commerce des armes. Il a notamment précisé que la commission l'avait désigné pour participer à la deuxième assemblée plénière du forum parlementaire sur les armes légères et de petit calibre à Helsinki et Stockholm, en septembre 2004. Beaucoup d'organisations non gouvernementales et de pays y étaient représentés et la question du traité en cours d'élaboration a bien évidemment figuré en bonne place des sujets évoqués.

M. Michel Voisin a confirmé que les parlementaires restent vigilants vis-à-vis du commerce des armes légères. Il a rappelé à cet égard avoir participé à Tbilissi, en 2000, à un séminaire de l'OSCE sur le sujet, ayant abouti à une recommandation adoptée par les 55 Etats membres de l'organisation. Il a néanmoins observé qu'en dépit de toutes les précautions légitimement envisagées, il est probable que le commerce des armes légères demeure longtemps prospère et meurtrier dans les pays en voie de développement, en raison de filières de fabrication locales, artisanales et clandestines. L'application du traité sur le commerce des armes sera nécessairement difficile, à l'instar de celle du traité d'Ottawa sur l'interdiction des mines anti-personnel. En outre, les références des armes utilisées contre les populations civiles sont bien souvent effacées par leurs utilisateurs, rendant d'autant plus délicat tout contrôle de leur origine.

M. Benoît Muracciole a souligné que le projet de traité sur le commerce des armes porte sur toutes les armes et envisage les risques afférant à leur utilisation, notamment à l'encontre des populations civiles. Le Conseil des ministres des affaires étrangères de l'Union européenne a rendu publique, en octobre 2005, une déclaration soutenant ce texte. Il existe indéniablement des difficultés sur le calendrier et l'application de ce dispositif. Il constituera néanmoins un progrès par rapport à la situation actuelle puisque les embargos décrétés par l'ONU ne sont jamais assortis de moyens de contrôle, excepté en Côte d'Ivoire et au Soudan. L'enjeu porte donc sur les sanctions qui seront assorties à la non-application du futur traité.

Pour ce qui concerne la production d'armes légères, la plupart d'entre elles, à l'instar des Kalachnikov, sont fabriquées par leur concepteur originel. Une initiative franco-suisse a été prise au sujet de la traçabilité des équipements militaires. Il s'agit d'un procédé techniquement réalisable sous réserve qu'il soit appuyé par une forte volonté politique. Il pourrait faire l'objet d'un protocole additionnel au traité, comme d'ailleurs l'intermédiation, afin de consolider la dynamique engagée depuis deux ans.

M. Didier Destremau a estimé qu'il n'existe pas de frontière nette entre armes légales et illicites. Il est en effet courant de constater, dans certains pays en voie de développement, que des dépôts d'armes légaux sont mal gardés ou que les armes utilisées le jour par la police et l'armée servent la nuit à des milices ou des truands. De même, il est fréquent que certains policiers ou militaires le jour pratiquent des activités illégales la nuit.

M. Jean-Michel Boucheron a tenu à préciser que, dans la distinction qu'il avait faite, les armes de sécurité d'Etat s'apparentaient à des matériels lourds, tels des avions de combat ou des sous-marins par exemple, c'est-à-dire à des équipements qui sont difficilement détournés pour asservir des populations civiles.

Le président Guy Teissier a corroboré les observations du directeur du Secours Catholique, soulignant qu'à l'occasion du déplacement qu'il avait effectué auprès des troupes françaises présentes au Tchad, au début de l'année 2005, les coopérants qu'il avait rencontrés s'étaient plaints de constater que des gendarmes locaux, faute de versement de salaires, se transforment la nuit en « coupeurs de route ». Il a conclu en soulignant que l'amélioration du contrôle des armes légères, dans le but de contribuer à la paix et à la sécurité des pays en voie de développement, procède d'une même volonté des organisations non gouvernementales et de la commission.

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