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COMMISSION de la DÉFENSE NATIONALE et des FORCES ARMÉES

COMPTE RENDU N° 33

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 3 mai 2006
(Séance de 10 heures)

Présidence de M. Guy Teissier, président

SOMMAIRE

 

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- Audition de M. Jean-Marie Poimbœuf, président-directeur général de DCN

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Audition de M. Jean-Marie Poimbœuf, président-directeur général de DCN.

La commission de la défense nationale et des forces armées a entendu M. Jean-Marie Poimbœuf, président-directeur général de DCN.

Le président Guy Teissier a observé que l'entreprise, en 2005, avait obtenu des résultats très satisfaisants, soulignant le niveau record des prises de commandes grâce notamment aux frégates européennes multimissions - les FREMM -, aux sous-marins Scorpene et à la tranche conditionnelle du SNLE - sous-marin nucléaire lanceur d'engins - le Terrible.

Il a souhaité obtenir des précisions sur les résultats définitifs de 2005 et leur répartition, sur les performances opérationnelles de l'entreprise, en amélioration constante, sur l'état d'avancement des programmes en coopération, particulièrement du deuxième porte-avions, le PA2, sur les perspectives en matière d'exportations, sur les étapes finales de l'accord entre DCN et Thales Naval France, qui a fait couler beaucoup d'encre, ainsi que sur les difficultés rencontrées concernant la mise au point du système de combat du Mistral.

M. Jean-Marie Poimbœuf a rappelé que DCN, il y a moins de trois ans, appartenait encore à l'administration du ministère de la défense, avant d'être transformée, le 1er juin 2003, en société nationale de droit privé. L'évolution a été initiée au début des années 2000 et la première étape réalisée en 2003, avec deux objectifs : améliorer l'efficacité, la réactivité, la productivité de l'entreprise ; lui donner la capacité de participer à la nécessaire structuration du secteur naval de défense français et européen.

Il a confirmé que 2005 avait été une année record en termes de prises de commandes : plus de 4 milliards d'euros pour 2,8 milliards de chiffre d'affaires, avec trois grands contrats. Premièrement, le contrat sur les FREMM, signé en novembre 2005, qui comporte une tranche ferme de huit bâtiments, est le meilleur obtenu par DCN depuis cinquante ans : il structurera pendant les dix prochaines années sa présence sur le segment des navires armés, qui représente un peu plus de 60 % de son activité. Deuxièmement, le contrat à l'exportation de six Scorpene vers l'Inde, signé et entré en vigueur fin 2005, est le troisième enregistré en cinq ans, ce qui fait de ce sous-marin une référence mondiale. Troisièmement, dans le domaine du maintien en condition opérationnelle, c'est-à-dire des services, qui représente 30 % de l'activité de DCN, la plupart des contrats passés au profit de la marine nationale arrivaient à leur terme en 2005 et il s'agissait de les renouveler : l'entreprise a gagné 70 % de ceux qui étaient ouverts à la concurrence - mieux que son objectif de 50 % -, sans compter les contrats soustraits à la compétition compte tenu de leur spécificité, concernant essentiellement l'entretien des bâtiments nucléaires. C'est ainsi que DCN a vu le total de son carnet de commandes passer de 6 milliards à plus de 8 milliards d'euros entre début et fin 2005.

S'agissant de l'activité, 2005 a également été une année importante puisque DCN a livré en décembre son premier Scorpene à la marine chilienne ainsi que la première frégate sur un contrat de six à la marine singapourienne et la dernière à l'Arabie saoudite. Les autres programmes ont continué à se dérouler de manière active. Le premier bâtiment du programme Horizon, la frégate Forbin, a été mis à l'eau. La construction du quatrième SNLE de nouvelle génération, le Terrible, s'est poursuivie, sa livraison et sa mise en service étant toujours planifiées pour 2010. Le premier bâtiment de projection et de commandement, le Mistral, a été livré le 27 février 2006, certes en retard et avec des réserves, mais celles-ci sont progressivement levées - elles portaient essentiellement sur l'intégration du système de combat - et la confiance est de mise quant à son entrée complète en condition opérationnelle. Le deuxième bâtiment de ce type, le Tonnerre, encore en essai à Brest, devrait rejoindre Toulon cet été. La disponibilité des navires, encore déficiente il y a trois ans et priorité de la ministre de la défense, est en amélioration significative puisqu'elle est passée de 58 à 71 %. Pour les sous-marins nucléaires d'attaque, les SNA, à Toulon, le record de 1997 a été battu de plus de cent jours, malgré le vieillissement du parc. C'est le fruit de la motivation des personnels de DCN, le changement de statut ayant permis de mettre en place des outils pour reconnaître leur implication dans le respect des objectifs de l'entreprise, en particulier des primes de participation au résultat, en vertu d'un décret paru le 27 décembre 2005. DCN est donc sur la bonne voie, même si des progrès restent à accomplir, en particulier dans la maîtrise des délais.

Sur le plan des résultats économiques, 2005, comme 2004, a été également une année positive : le chiffre d'affaires a augmenté de 8,6 %, le résultat d'exploitation de 18,6 % et le résultat net de 30 % - avec certes près de 100 millions d'euros de résultat exceptionnel.

L'année dernière a été marquée par une décision extrêmement importante du Gouvernement et des entreprises Thales et DCN, prise le 15 décembre, tendant à structurer le secteur naval. Sera regroupé autour de DCN l'ensemble du secteur naval français de défense hors équipements, c'est-à-dire la co-entreprise Armaris, créée en 2002, qui porte toute l'activité navale internationale, ainsi que les filiales de cette dernière et Thales Naval France hors équipements, soit un transfert d'environ 350 personnes. Parallèlement, le Gouvernement ouvrira le capital de DCN à hauteur de 25 % puis éventuellement de 35 % au bout de deux ans.

M. Jean-Marie Poimbœuf a estimé que 2006 sera une année charnière pour l'activité de DCN, avec deux contrats cruciaux. Premièrement, en ce qui concerne les SNA de type Barracuda, une offre conjointe avec Technicatome, la troisième, a été remise le 28 avril en vue de la signature d'un contrat à la fin de l'été ou à l'automne. Il s'agit d'un projet structurant sur dix voire quinze années pour l'activité sous-marine de DCN, plus particulièrement pour les sites de Cherbourg et d'Indret ; s'il venait à être reporté ou décalé, cela entraînerait des décisions industrielles et sociales délicates. Deuxièmement, en ce qui concerne le PA2, une équipe intégrée DCN-Thales travaille actuellement à Bristol, animée par deux objectifs : confirmer l'étude générale de l'an dernier concluant à la compatibilité entre les besoins spécifiques de la marine française et le projet britannique, et détailler les modifications de design à prévoir pour répondre aux besoins nationaux ; s'appuyer sur l'expérience acquise avec le Charles-de-Gaulle pour convaincre les équipes britanniques de l'opportunité de réduire le coût du bâtiment, notamment en utilisant davantage de solutions techniques civiles pour la conception comme pour la construction.

Il a annoncé que toutes les actions de progrès engagées depuis le changement de statut seront poursuivies. Après le plan « En avant 2005 », qui a fédéré le personnel de l'entreprise de 2003 à fin 2005, en particulier sur les sujets des achats, des processus industriels et des systèmes d'information, un nouveau plan de trois ans, « Challenge 2008 », a été engagé début 2006 avec l'objectif de réduire les coûts de 500 millions d'euros : plus de la moitié au niveau de la filière d'achat au sens large, la supply chain, le reste à travers la modernisation du processus industriel.

Le rapprochement entre DCN et Thales est à mi-chemin, les due diligence arrivant à leur terme : DCN achète une partie de l'activité de Thales dans le domaine naval et Thales achète 25 % de DCN. Parallèlement au chantier d'organisation se déploie un chantier interculturel ; pour gagner ce projet humain, il convient en effet marier deux cultures - celles du privé et de l'administration -, les faire évoluer, prendre le meilleur de l'une et de l'autre pour créer un industriel français qui sera le fer de lance du rapprochement européen.

Le projet « Convergence » est en effet conduit dans une perspective européenne, comme ceux qu'ont connus, ces dernières années, les secteurs de l'aéronautique, de l'électronique et des missiles. La restructuration de l'industrie navale est bien engagée en Allemagne, avec la création, l'an dernier, de TKMS, regroupement de six chantiers - trois en Allemagne, deux en Suède et un en Grèce. L'Espagnol Izar, né de la séparation, au printemps 2005, entre la construction navale militaire et la construction navale civile, devrait atteindre l'équilibre dès cette année. En Grande-Bretagne, BAE réfléchit au rachat de Babcock et d'une partie de Vosper. Le rapprochement entre DCN et Thales procède de la même logique. L'étape suivante sera une consolidation au niveau européen, incontournable avec l'essor de l'Europe de la défense et de l'armement, même s'il est encore impossible de prévoir ses modalités.

M. Jean-Marie Poimbœuf a ajouté qu'une telle structuration dépendait de l'existence de projets européens et que, en matière de bâtiments de surface, seules la France et l'Italie avaient œuvré en commun, avec les frégates Horizon et FREMM. Il n'en demeure pas moins qu'une coopération européenne serait utile, en particulier dans le domaine des sous-marins conventionnels, où de nouveaux concurrents - la Corée, la Russie, la Chine et peut-être, demain, l'Inde - s'immiscent dans la compétition mondiale à côté de l'Allemagne et de la France. Si l'Europe veut continuer à exister dans ce secteur d'excellence, elle n'a d'autre solution que de procéder à des rapprochements, et ce sont des projets avec l'Allemagne et/ou l'Espagne qui feraient le plus sens.

Le président Guy Teissier a demandé si les prix des six SNA de type Barracuda pourraient être révisés sans que les résultats de DCN s'en trouvent altérés et si la concurrence russe ne risquait pas de troubler le jeu.

M. Jean-Marie Poimbœuf a précisé que la première offre relative au projet Barracuda, remise le 25 juin 2005, n'entrait pas dans l'épure budgétaire. Au terme de discussions techniques menées pendant l'été et l'automne avec la délégation générale pour l'armement, la marine nationale, le Commissariat à l'énergie atomique, le CEA et Technicatome, une deuxième offre, soumise en novembre 2005, a été perçue comme une amélioration nette, permettant de poursuivre les discussions techniques et de déboucher sur une troisième offre, présentée le 28 avril 2006. Les industriels ont adapté leur offre à la contrainte budgétaire en suivant trois axes : ajustement du contenu technique ; simplification de l'organisation industrielle ; allégement des risques pris par les industriels pour qu'ils ne s'exposent pas à des aléas de manière inconsidérée. Le contrat courra jusqu'en 2030.

L'exportation de tels bâtiments est exclue. Seuls les Etats-Unis et la Grande-Bretagne sont en jeu. Et encore, l'industrie britannique, faute de continuité, a perdu la compétence ; son projet Astute a pris quatre ans de retard et dépend des Américains. Au regard des prix américains et britanniques, l'offre française est largement compétitive et son produit est beaucoup plus petit. Après la gamme des Rubis, qui faisaient 2 500 tonnes, les Barracuda atteignent 4 800 tonnes, pour atteindre les objectifs en terme de sécurité nucléaire et de discrétion acoustique, contre 7 000 à 8 000 tonnes pour les bâtiments concurrents.

Faisant référence à des annonces parues dans la presse, Le président Guy Teissier s'est interrogé sur la proposition faite par DCN de démanteler le Clemenceau alors que la France avait dans un premier temps choisi de faire effectuer ce travail en Inde précisément pour des raisons de coût.

M. Jean-Marie Poimbœuf a requis la prudence sur ce dossier, les journalistes s'aventurant parfois au-delà de sa pensée et même de ses mots. Une telle opération, étrangère au cœur d'activité de DCN, est complexe et nécessite des compétences spécifiques que ne possède pas l'entreprise, notamment en matière de dépollution et de recyclage. Mais DCN est prête, si nécessaire, sous une forme restant à déterminer, à mettre ses connaissances des navires militaires et du Clemenceau à disposition de ceux qui prendront la responsabilité du démantèlement : elle n'a pas vocation à en être le maître d'œuvre mais est disposée à l'accompagner. Pour évaluer les moyens de viabiliser économiquement l'opération, il faudra toutefois attendre de savoir ce que le ministère de la défense demandera aux industriels.

M. Philippe Vitel a félicité DCN pour son rôle décisif dans la conception, l'obtention et l'animation du pôle de compétitivité mer à dimension mondiale regroupant les régions Provence-Alpes-Côte d'Azur et Bretagne, qui a préfiguré l'entente cordiale et fraternelle avec Thales, et il a rendu hommage à Bernard Planchais pour son action à Toulon. Puis il a demandé des informations précises sur les effectifs et les embauches dans l'entreprise, alors que les communications de la direction et des syndicats sont contradictoires.

M. Jean-Marie Poimbœuf a souligné que l'activité était soutenue dans tous les établissements DCN et que, si le projet Barracuda était effectivement signé courant 2006, la visibilité à moyen et long terme serait bonne. Les partenaires sociaux souhaitent évidemment toujours que les effectifs augmentent. Du point de vue quantitatif, les effectifs, en quinze ans, ont chuté de façon drastique - de 28 000 au début des années 1990 à 12 000 en 2006 - mais ils se stabiliseront si le niveau d'activité actuel est maintenu. Le chiffre d'affaires de DCN
- qui s'élève à 2,8 milliards d'euros - est en effet, ramené au nombre de salariés, comparable à celui des meilleures entreprises européennes : pour les navires armés, très riches en équipements, il est de 300 000 euros contre 240 000 chez TKMS ; pour les services, qui incorporent beaucoup plus de main-d'œuvre, le ratio donne 130 000 euros contre 100 000 chez Vosper, qui constitue la référence. Du point de vue qualitatif, DCN a amélioré l'architecture des emplois afin d'adapter les compétences aux besoins : depuis le changement de statut, plus de 5 000 mouvements de personnel ont été opérés - 3 000 sorties pour 2 500 entrées -, ce qui est considérable, et le taux d'encadrement a crû de 20 % à 26 ou 27 %. La filière achat, par exemple, employait plus de 500 personnes dont 80 cadres et 250 personnels d'exécution ; aujourd'hui, ses effectifs sont tombés à 380 personnes dont 140 cadres et moins de 100 personnels d'exécution ; l'évolution est analogue dans la filière gestion financière. Il est compréhensible que cela suscite de l'inquiétude chez les partenaires sociaux mais le plus gros des mouvements est passé et DCN continuera à remplacer les départs et maintiendra les effectifs à peu près au niveau actuel.

M. Gilbert Meyer a estimé que le taux de disponibilité des navires dépendait non seulement du régime juridique du personnel mais aussi du degré de fongibilité des pièces de rechange fournies par les différents prestataires, comme l'avait souligné son rapport de 2002. Le rapprochement avec Thales est-il de nature à améliorer le taux de disponibilité, étant entendu qu'il concerne uniquement la maintenance, à l'exclusion des équipements ?

Puis il s'est enquis de la part des commandes étrangères dans les 2 milliards d'euros supplémentaires enregistrés sur le carnet de DCN en 2005.

M. Jean-Marie Poimbœuf a expliqué que le service de soutien de la flotte avait fait radicalement évoluer la philosophie des contrats, avec une répercussion importante sur la fongibilité : la marine nationale est passée de contrats de courte durée, enjoignant aux industriels de procéder à des opérations d'entretien précises, à des contrats de trois à cinq ans, plus globaux, leur donnant pour tâche de garantir un niveau de disponibilité des navires. Les industriels ont donc désormais la responsabilité de s'organiser et d'engager des achats dès la signature des contrats, de manière à procéder aux échanges nécessaires, avec une flexibilité en matière d'achat qui n'existait pas lorsque DCN était soumise au code des marchés publics. Mais la réflexion avec le service de soutien de la flotte et les grands équipementiers doit encore être approfondie. Le rapprochement avec Thales excluant les équipements, il conviendrait de décliner les contrats d'engagement global de disponibilité avec les coopérants équipementiers - Thales, Sagem, EADS-MBDA, etc. Du chemin reste à parcourir pour croiser la responsabilité de l'industriel maître d'œuvre du navire et la responsabilité des équipementiers sur leurs installations, communes à plusieurs navires : cette organisation reste perfectible.

Il a ajouté que les commandes étaient constituées à 30 % environ de futures exportations.

M. Jean-Claude Viollet a insisté sur l'importance des sommes en jeu dans le projet « Convergence », une ponction sur le bénéfice de DCN destinée à des réinvestissements sur de grands programmes étant même évoquée. Il reste à négocier un accord de coopération. Le maintien des filiales navales étrangères de Thales ne risque-t-il pas d'entrer en concurrence avec le nouvel ensemble ?

Où en est l'alliance entre BAE, Fincantieri, Navantia, Shipbuilding Limited et DCN sur les équipements ?

Quelle est la butée de la signature du contrat Barracuda, compte tenu du plan de charge et des perspectives ouvertes par cette nouvelle commande ?

M. Jean-Marie Poimbœuf a indiqué que les travaux relatifs à la valorisation des sociétés étaient en cours mais que les équipes raisonnaient sur la base des éléments annoncés le 15 décembre : une soulte de 100 à 150 millions d'euros compensera l'écart entre les sommes payées en cash par DCN à Thales et par Thales à l'Etat. La trésorerie de DCN est tout à fait satisfaisante, ce qui a conduit l'Etat à porter les dividendes à 450 millions d'euros, et le projet « Convergence » n'y est pour rien. L'Etat doit encore verser une partie du capital - deux fois 150 millions d'euros, en 2006 et 2007 - mais la trésorerie de DCN reste et restera saine, même après l'achat de l'activité navale de Thales. Il faut encore signer un accord d'actionnaires entre l'Etat et Thales ainsi qu'un accord industriel et commercial entre DCN et Thales, poursuivant trois objectifs. Premièrement, il s'agit de créer des synergies afin que les deux industriels optimisent leurs efforts d'investissement dans la recherche et le développement de technologies nouvelles en évitant de payer deux fois et en profitant des compétences de l'autre. Deuxièmement, chacun doit rester sur son positionnement stratégique international : maître d'œuvre des navires armés pour DCN, systémier équipementier pour Thales. Troisièmement, il importe de tenir compte de l'existence de filiales étrangères de Thales dans le domaine naval - le projet « Convergence » s'inscrivant au demeurant dans une démarche d'intégration de ces structures - afin de régler convenablement les conflits d'intérêt : un mécanisme est en particulier prévu pour préparer les offres dans la plus totale indépendance lorsque Thales sera concerné compte tenu de son positionnement international, ce qui ne changera pas fondamentalement par rapport à aujourd'hui car il arrive déjà à Armaris de se trouver en concurrence avec des filiales de Thales.

L'alliance internationale en gestation est un accord purement industriel de coordination entre sociétés : il s'agit de peser sur les équipementiers européens et mondiaux pour bénéficier des meilleurs prix possibles.

Si le contrat Barracuda venait à être décalé après 2006, les répercussions industrielles et sociales seraient lourdes, à Cherbourg comme à Indret. Une notification courant 2006 provoquera déjà une légère sous-activité dans ces deux établissements mais celle-ci sera compensée par une solidarité entre sites sur les autres projets, en particulier celui des FREMM, avec un système de sous-traitances. La fixation des modalités de répartition dans leurs détails n'est pas urgente puisque la construction de la deuxième frégate doit commencer dans le courant du deuxième semestre 2008 - les données du problème dépendent en outre du contenu des programmes Barracuda et PA2.

M. Charles Cova a dit apprécier le redressement de DCN, qui dégage des bénéfices alors que, lors du changement de statut, d'aucuns prédisaient qu'elle suivrait la voie de GIAT Industries.

Dans le cadre de la restructuration de l'industrie navale européenne et compte tenu du plan de charge de DCN, ne faudra-t-il pas acheter un chantier naval européen pour accroître la compétitivité du pôle naval français, notamment pour la construction de corvettes de 1 000 et 1 200 tonnes et dans la perspective des corvettes Gowind ?

Est-il exact que les Britanniques traînent les pieds pour fournir les plans concernant le PA2 en temps et en heure et qu'un retard de deux mois a déjà été enregistré ? N'attendent-ils pas le résultat des futures élections françaises pour accélérer leurs travaux ?

M. Jérôme Rivière a complimenté à son tour DCN pour son bilan satisfaisant et ses résultats, qui dépassent les espérances : les décisions du Gouvernement, appuyé par le Parlement, ont été les bonnes. Il a également salué son président-directeur général, symbole d'un changement réussi de statut.

Dans un contexte de risque d'attrition ou en tout cas de stagnation des crédits de la défense, il pourrait être envisagé, même s'il s'agit d'une proposition iconoclaste, que la France et la Grande-Bretagne ne possèdent que trois porte-avions à elles deux et non quatre. De même, à en croire certains experts britanniques, les Anglais n'ont peut-être pas besoin de se lancer dans la production de SNLE alors que la dissuasion et la présence à la mer de sous-marins français pourraient suffire. La France et la Grande-Bretagne étant les deux leaders européens en matière de crédits de défense, y compris dans le domaine naval, de grands projets ne sont-ils pas envisageables entre les deux pays plutôt qu'avec l'Allemagne, l'Italie ou l'Espagne ou en tout cas autant qu'avec ces trois Etats ?

M. Jean-Marie Poimbœuf a alors apporté les précisions suivantes :

- L'achat d'un chantier pour réaliser des bâtiments à faible tonnage n'est pas dans les intentions de DCN, qui préfère profiter des capacités disponibles en Europe, organiser la concurrence et jouer avec les opportunités de contrats, par exemple en Bulgarie ou en Croatie, pour favoriser ses projets à l'export, ce qui n'empêche pas d'envisager, à terme, des participations croisées entre Navantia, TKMS et DCN.

- S'agissant du PA2, il y a eu du retard au début du projet mais, depuis la signature du « memorandum of understanding », l'équipe intégrée française ne rencontre pas de restrictions : les contacts sont bons et les livres lui sont ouverts.

- Ce sont bien la Grande-Bretagne et la France qui ont les activités navales les plus intenses d'Europe. La logique devrait donc effectivement conduire à organiser des coopérations industrielles avec les Anglais mais elles se heurtent à deux obstacles : l'industrie britannique est très tournée vers le transatlantique pour les SNA, les SNLE, les systèmes et les équipements ; DCN a encore du chemin à parcourir, la Grande-Bretagne et à moindre titre l'Allemagne la jugeant encore trop étatique pour envisager un rapprochement industriel intégré. Le projet « Convergence » aidera DCN mais, pour espérer une telle issue, il faudra persévérer.

M. Jean-Marie Poimbœuf enfin a remercié les députés pour leurs encouragements, qui doivent s'adresser à l'ensemble du personnel, à l'origine des résultats de DCN.

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