COMMISSION DES FINANCES,

DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN

COMPTE RENDU N° 2

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mardi 8 octobre 2002
(Séance de 12 heures)

Présidence de M. Pierre Méhaignerie, Président

SOMMAIRE

 

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- Audition conjointe avec la Commission des affaires culturelles, familiales et sociales, de M. Jean-François MATTEI, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées et de M. Alain LAMBERT, ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire, sur les prélèvements obligatoires.

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La Commission des finances, de l'économie générale et du plan a procédé à l'audition conjointe avec la Commission des affaires culturelles, familiales et sociales, de M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, et de M. Alain Lambert, ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire, sur les prélèvements obligatoires.

Introduisant cette audition de la Commission des finances, de l'économie générale et du plan et de la Commission des affaires culturelles, familiales et sociales, le Président Jean-Michel Dubernard a souligné la difficulté d'avoir une vision claire du système des prélèvements obligatoires en France et tout l'intérêt qui s'attache à la mise en œuvre des dispositions de la loi organique du 1er août 2001 en ce qui concerne le rapport annuel et le débat sur les prélèvements obligatoires. Le Président Pierre Méhaignerie a lui aussi souligné la complexité du circuit des prélèvements obligatoires faisant intervenir l'État, les collectivités locales et la sécurité sociale. Il a insisté sur la nécessité de procéder à un débat global à cet égard.

M. Alain Lambert, ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire, a présenté le premier rapport sur les prélèvements obligatoires et leur évolution. Il a rappelé qu'aux termes de l'article 52 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances, le rapport sur les prélèvements obligatoires est présenté « en vue de l'examen et du vote du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale », permettant ainsi d'offrir au Parlement une vision consolidée des prélèvements des administrations publiques. Ce rapport comporte également l'évaluation financière pour 2002 et pour les deux années suivantes, 2003 et 2004, de chacune des dispositions législatives ou réglementaires envisagées par le Gouvernement.

M. Alain Lambert a rappelé que la notion de prélèvements obligatoires n'était pas une notion juridique mais une notion économique. Tels que définis par l'INSEE en application du Règlement de 1995 sur le système européen de comptabilité, les prélèvements obligatoires regroupent « les impôts et les cotisations sociales versés de manière non volontaire au profit des administrations publiques. » Ce champ est à la fois plus vaste et plus restreint que celui couvert par le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Ainsi les taxes parafiscales ne sont pas classées parmi les prélèvements obligatoires. Elles devront toutes avoir disparu au 1er janvier 2004, en application de la nouvelle loi organique relative aux lois de finances. Il conviendra donc d'être vigilant dans les comparaisons effectuées entre la situation actuelle et la situation future.

Les prélèvements obligatoires représentaient 660 milliards d'euros en 2001, c'est-à-dire 45% de la richesse nationale. Les organismes sociaux sont les premiers bénéficiaires avec 48% de l'ensemble des prélèvements obligatoires. Le champ des administrations sociales dépasse celui du PLFSS car il inclut les régimes d'assurance chômage, les régimes de retraite complémentaire, le fonds de couverture maladie universelle (CMU) et le fonds pour l'allocation personnelle d'autonomie. Les prélèvements obligatoires de l'État et des organismes centraux occupent moins de 40% de l'ensemble. Les prélèvements obligatoires des collectivités locales représentent quant à eux 11% du total et ceux de l'Union européenne 1,4%. Comparé aux principaux pays de l'OCDE, le taux des prélèvements en France apparaît parmi les plus élevés, ce qui confirme le bien fondé de la baisse des impôts et des charges que le Gouvernement veut mener à bien. Pour autant, les comparaisons internationales doivent être relativisées car les écarts reflètent souvent des choix différents en matière de protection sociale. De plus, le taux de prélèvement ne donne pas d'indication sur la structure de prélèvement. Or, celle-ci est un élément essentiel de la compétitivité et de l'attractivité d'un pays. En France, la tendance des deux dernières décennies aura été de taxer toujours davantage le travail, ce qui n'a pas été sans conséquences sur l'évolution du taux de chômage et sur la compétitivité de notre économie.

Au cours de la législature précédente, le taux des PO a eu tendance à augmenter du fait du dynamisme exceptionnel des recettes fiscales. De 1998 à 2001, ces plus-values conjoncturelles ont été utilisées pour financer les 35 heures et les baisses d'impôts. Le taux de prélèvements obligatoires était de 44,8% en 1997, avant les hausses d'impôts décidées par le précédent Gouvernement ; il s'établissait à 44,8% en 2002, avant la baisse d'impôts sur le revenu votée dans le collectif de juillet dernier. A l'inverse, le taux de prélèvements obligatoires devrait diminuer de 0,7 point de PIB sur la période 2002-2003, et passer ainsi de 45% en 2001 à 44,3% en 2003.

Cette évolution résulterait de trois facteurs. En premier lieu, le taux de prélèvements obligatoires diminuerait spontanément en 2003, de 0,2 point de PIB, du fait du peu de dynamisme du produit de l'impôt sur les sociétés. En deuxième lieu, les mesures prévues par le précédent Gouvernement (plan Fabius et montée en charge des aides aux 35 heures) contribueront à baisser le taux des prélèvements obligatoires de 0,2 point de PIB sur 2002-2003. Enfin, les mesures nouvelles du Gouvernement contribueront à baisser ce taux de 0,4 point de PIB sur 2002-2003, près de la moitié de cette diminution étant liée à la baisse de l'impôt sur le revenu votée en collectif d'été, l'autre moitié résultant des baisses d'impôts et de charges prévues pour 2003, qui s'élèvent à 3 milliards d'euros, les allégements de charges liés au contrat jeunes n'étant pas comptabilisés par l'INSEE parmi les baisses de prélèvements obligatoires.

L'intégralité des baisses d'impôts et de charges prévues en PLF et en PLFSS pour 2003 seront financées ou compensées par le budget de l'État, pour un coût global de 3,9 milliards d'euros. Sur ce total, un milliard d'euros correspond à la baisse de 1% de l'impôt sur le revenu, à l'amélioration de la prime pour l'emploi, à la majoration de la réduction d'impôt pour l'emploi d'un salarié à domicile, aux mesures concernant les donations de grands-parents à petits-enfants et, dans le sens inverse, à la première étape de la réforme du régime des distributions entre sociétés. 1,9 milliard d'euros correspond à la compensation aux collectivités locales de la suppression de la part salaires de la taxe professionnelle, ainsi qu'à la réduction de la taxe professionnelle sur les bénéfices non commerciaux. 0,7 milliard d'euros de taxe sur les conventions d'assurance est transféré au FOREC afin de compenser l'allégement de charges décidé dans le cadre de la convergence des SMIC. Les allégements de charges en faveur des jeunes sont eux aussi compensés par l'État à hauteur de 250 millions d'euros. L'impact net des baisses d'impôts et des charges sur les prélèvements obligatoires représente 2,9 milliards d'euros, ce chiffre intégrant l'augmentation des droits de consommation sur les tabacs pour 0,7 milliard d'euros.

En conclusion, M. Alain Lambert a souligné que les baisses d'impôts et de charges en 2003 sont ciblées en faveur de l'emploi et du dynamisme des entreprises.

M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées a rappelé que les prélèvements des administrations de sécurité sociale représentent la moitié des prélèvements obligatoires, soit plus d'un cinquième du PIB, dont une partie importante relève de la loi de financement de la sécurité sociale (plus de 300 milliards d'euros en 2003). Cette prépondérance de la sécurité sociale se retrouve dans tous les pays développés qui ont choisi de socialiser les dépenses de santé et de vieillesse à l'instar de l'Allemagne, où le niveau des prélèvements obligatoires affectés à la sécurité sociale est le même qu'en France, et de la Suède où ce taux est supérieur.

S'agissant du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003, deux mesures nouvelles relatives aux recettes de la sécurité sociale doivent être soulignées, au premier rang desquelles l'augmentation des droits de consommation sur les tabacs. A propos de ces droits, l'appellation de « prélèvements obligatoires » apparaît en fait erronée. S'agissant d'une consommation volontaire, il s'agit de prélèvements obligatoires dont les usagers pourraient se dispenser. L'augmentation de ces droits, proposée par le projet de loi, obéit d'abord à des considérations de santé publique. Il faut donner la priorité à la prévention et à la réduction des risques afin, d'une part, d'améliorer la santé de nos concitoyens, et, d'autre part, de permettre à la sécurité sociale de réaliser des économies.

La consommation du tabac est la principale cause de mortalité prématurée, c'est-à-dire avant 65 ans. Elle est à l'origine de 60.000 décès par an, soit 10% du total des décès, dont 3.000 décès de non-consommateurs du fait du tabagisme passif. Le tabagisme est aussi le principal responsable des cancers, ce qui justifie de redoubler d'efforts dans la lutte contre ce fléau. Le Gouvernement a donc souhaité une réduction de la consommation, une des mesures possibles pour l'obtenir étant une hausse des droits indirects qui induit une hausse des prix. Cette hausse, qui prendrait notamment la forme d'un fort relèvement des minima de perception, devrait permettre d'augmenter de 1 milliard d'euros le produit des droits de consommation sur le tabac.

La seconde priorité du Gouvernement concerne la nécessaire clarification du financement de la sécurité sociale. Les circuits de financement actuels, excessivement complexes, ont été utilisés, dans les dernières années, pour financer des dépenses qui n'entrent pas dans le champ de compétence de la sécurité sociale, telles que le financement de la réduction du temps de travail (RTT) au travers du Fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale (FOREC). Il devient nécessaire de « démonter » ces mécanismes de financement complexes et peu cohérents, afin de mettre en place un système clair, simple et transparent.

Dès 2003, une première étape sera franchie avec la compensation intégrale, vis-à-vis de la sécurité sociale, pour un montant d'environ 1 milliard d'euros, des allégements de charges prévus par le projet de loi relatif aux salaires, au temps de travail et au développement de l'emploi, qui doit être prochainement adopté en première lecture à l'Assemblée nationale. Par ailleurs, il est prévu d'attribuer au FOREC un supplément de recettes de 700 millions d'euros au titre de la fraction du produit de la taxe sur les conventions d'assurance qui lui est attribuée. 300 millions d'euros provenant de la hausse des droits de consommation sur les tabacs lui seront également attribués. A la suite de cette double opération, les prélèvements obligatoires de la sécurité sociale resteront inchangés.

Par ailleurs, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 prévoit de réaffecter à la sécurité sociale une partie des recettes qui avaient été utilisées pour le financement du FOREC, en modifiant la clé de répartition des droits de consommation sur les tabacs entre le Fonds et la Caisse nationale d'assurance maladie (CNAMTS), permettant de revenir à peu près à la clé de répartition qui prévalait avant la création du Fonds. Cette modification conduira à attribuer à la CNAMTS une recette supplémentaire de 700 millions d'euros. La part des droits de consommation sur les tabacs affectée à l'assurance maladie passera ainsi de 8,84% en 2002 à 15,2% en 2003.

Le Gouvernement a, par ailleurs, décidé de procéder au remboursement d'une première moitié de la dette du FOREC au titre de 2000 pour un montant de 1,2 milliard d'euros.

A la suite de ces opérations, la situation se sera améliorée. En 2003, la sécurité sociale devrait « retrouver » 2 milliards d'euros de recettes de son effort de financement de la RTT.

Ces mesures ne constituent cependant qu'une étape vers la réforme du financement de la sécurité sociale souhaitée par le Gouvernement pour clarifier les circuits et responsabiliser les différents acteurs, en concertation avec l'ensemble des partenaires.

M. Gilles Carrez, Rapporteur général, a considéré que la tenue du débat sur les prélèvements obligatoires, dont la faculté est offerte par l'article 52 de la loi organique relative aux lois de finances du 1er août 2001, donnera un utile éclairage à l'examen des projets de loi de finances et de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003.

Si la tendance à la baisse des prélèvements obligatoires de l'État est claire, on peut craindre que la fiscalité locale n'en vienne à constituer, elle, un « foyer de risque » à la hausse. On observe, en 2001, une augmentation des dépenses dans les départements de 3,5%. S'agissant des dépenses de personnel de l'ensemble des collectivités locales, les effectifs sont passés, en six ans, de 1.533.000 à 1.688.000. Des interrogations peuvent surgir liées, par exemple, à la nécessité d'augmenter les cotisations de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) ou à la relance prochaine de la décentralisation, qui pourrait se traduire par de nouveaux transferts de compétence et de fiscalité.

S'agissant de la contribution française au budget des Communautés européennes, l'élargissement prochain de l'Union européenne pourrait se traduire par l'augmentation de cette contribution.

Sur la rebudgétisation nécessaire du FOREC, il conviendra de rechercher l'affectation des recettes la plus cohérente possible afin de clarifier la responsabilité de chacun, notamment en matière de politique de l'emploi et de politique de la santé publique, sans que cette clarification ne conduise à une perte de recettes pour la sécurité sociale.

Enfin, on peut se demander si l'évolution des prélèvements obligatoires de l'État par rapport au PIB n'obéit pas à un phénomène cyclique lorsque l'on observe que ces prélèvements sont passés de 16,6% en 1995 à 17,7% en 1999, puis à 16,6% en 2002, à l'instar de ce qui s'était produit sur la période comprise entre 1988 et 1992.

M. Yves Bur, Rapporteur pour les recettes et l'équilibre du projet de loi de financement de la sécurité sociale, a indiqué qu'il fallait retenir une approche globale permettant d'analyser aussi bien les impôts d'État que les prélèvements sociaux. La complexité des flux financiers a été soulignée par le rapport d'audit de MM. Bonnet et Nasse. Il convient de simplifier et de stabiliser les périmètres de financement, particulièrement pour l'assurance maladie qui doit disposer de recettes pérennes et dynamiques. Le FOREC doit voir ses ressources augmentées et leur cohérence améliorée alors que les régimes sociaux contribuent à son financement au-delà de la dette de la sécurité sociale. Il n'est pas cohérent d'affecter les taxes sur les tabacs et les alcools au financement de la réduction du temps de travail et il convient de les employer au financement de l'assurance maladie. S'agissant de la fiscalité sur les tabacs, l'objectif de diminution de la consommation s'accorde mal avec l'intérêt qui s'attache à voir augmenter le rendement des recettes fiscales. Les impôts sur les tabacs pourraient être d'un moindre rendement qu'attendu cette année, comme cela a été le cas en 2000.

Un certain nombre de recettes devraient être affectées à la sécurité sociale dans un souci de clarification alors que, dans le rapport présenté par le Gouvernement, elles sont rattachées à des organismes divers d'administration centrale.

Enfin, l'évolution globale des prélèvements obligatoires est conditionnée par la capacité de maîtriser les dépenses d'assurance maladie en précisant ce qui dans leur financement doit relever de la prise en charge collective, de l'assurance et de la démarche privée.

M. Alain Lambert a indiqué que, pour l'année 2002, la prévision du Gouvernement intégrait l'augmentation de 2% des taux des impôts locaux inscrite en moyenne dans les budgets primitifs. La stabilité optique des prélèvements s'explique par l'allégement de la taxe professionnelle. Il importe que la plus grande liberté reconnue dans le projet de loi de finances pour 2003 en matière de fixation des taux soit utilisée par les élus locaux de façon responsable.

Le Président Pierre Méhaignerie a considéré que le système de financement des collectivités locales n'était pas vertueux car l'augmentation des dépenses entraînait mécaniquement une majoration de la dotation globale de fonctionnement.

M. Augustin Bonrepaux s'est élevé contre cette affirmation.

M. Alain Lambert a indiqué que la discussion sur le coefficient d'intégration fiscale aurait lieu. Il a dit comprendre la crainte exprimée par le Rapporteur général d'un accroissement des prélèvements des collectivités locales. En effet, ces prélèvements et les dépenses de collectivités locales ont augmenté ces dix dernières années. Le bilan de la première décentralisation a montré que les collectivités locales avaient dû assumer les conséquences des carences de l'État investisseur. La deuxième étape de la décentralisation doit être neutre en termes de coûts et de dépenses publiques, toute délégation de compétences aux collectivités locales devant être accompagnée du transfert de tous les moyens, humains autant que financiers, liés à l'exercice de la compétence transférée. Le législateur devrait faire preuve de prudence dans ses choix, qui ont un impact sur les comptes des collectivités locales. Le ministre a pris l'exemple du financement de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) et de ses conséquences sur les budgets des départements qui conduisent à penser qu'il faudra s'interroger sur une nécessaire reconfiguration des conditions d'attribution de cette prestation.

S'agissant de la fraction de prélèvements obligatoires qui correspond au financement du budget communautaire, la croissance du prélèvement communautaire, entre les prévisions d'exécution pour 2002 et le projet de loi de finances pour 2003, apparaît peu significative, compte tenu de la sous-exécution constatée en 2002. Mais il est vrai que le problème du coût de l'élargissement se posera pour les pays contributeurs nets, dont la France.

Quant à l'existence de cycles pendant lesquels les prélèvements obligatoires croîtraient fortement, le ministre a observé qu'en période de croissance soutenue, l'élasticité du rendement des recettes fiscales à la croissance du PIB était marquée. Elle s'élevait ainsi à 2 en 1999 et 2000. Le Gouvernement a retenu une élasticité de 0,8 pour le cadrage du projet de loi de finances pour 2003.

M. Jean-François Mattei a expliqué que l'augmentation de la fiscalité sur les tabacs, qui porte notamment sur les minima de perception, devrait entraîner une augmentation de 15% des prix, avec un rendement d'environ un milliard d'euros, l'objectif étant la diminution de la consommation. Il est clair qu'une moindre plus-value des recettes fiscales consécutive à la baisse de la consommation serait une bonne nouvelle, à la condition, naturellement, qu'existe un contrôle efficace des approvisionnements détournés. L'augmentation des prix, qui porte aussi bien sur la marge commerciale que sur les taxes, a été fixée après concertation avec les professionnels.

La clarification du financement est une préoccupation constante du Gouvernement : il s'agit tout particulièrement de remettre en ordre les différents secteurs de l'assurance maladie qu'il s'agisse des outils de gestion, de l'hôpital ou de la médecine ambulatoire. On dépense beaucoup, il faut dépenser mieux et faire la chasse au gaspillage. Toutefois, les dépenses de santé croissent de 7% à 10% chaque année dans les pays industrialisés, ce qui pose le problème de l'écart de cette progression avec celle de l'économie. Il convient de s'interroger sur le mode de financement de la santé et de la place des dépenses de santé dans l'économie nationale.

M. Philippe Auberger s'est réjoui de la présentation d'un rapport sur le poids des prélèvements obligatoires en France : le débat mené à cette occasion apporte l'assurance d'une cohérence entre le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale, qui n'existait pas auparavant. Il a estimé indispensable de simplifier les circuits de financements et s'est, à cet égard, interrogé sur le calendrier de démembrement du FOREC, qui n'a désormais plus de justification compte tenu de la volonté du Gouvernement d'adapter la législation relative aux trente-cinq heures.

S'agissant du projet de loi concernant les allégements de charges sociales, il s'est interrogé sur l'adéquation du montant des compensations envisagé et s'est demandé s'il serait possible de le réajuster ex-post en fonction des réalisations.

M. Marc Laffineur a jugé indispensable de réduire le poids des prélèvements obligatoires, afin de lutter efficacement contre le chômage et favoriser le redémarrage de l'économie. Pour cela, le Gouvernement peut compter sur une volonté politique forte de sa majorité. Compte tenu du dynamisme des dépenses de santé et de retraite, on ne pourra vraisemblablement pas réduire ce type de dépenses publiques. Il importe donc de les réduire dans les collectivités locales et aussi au sein de l'État.

Il a souligné que la relance de la décentralisation actuellement en préparation doit permettre de dépenser mieux et de dépenser moins. La décentralisation ne doit pas être une décentralisation des charges. Si l'on veut trouver des pistes d'économies, il faut remettre en cause certaines lois qui font peser des charges excessives sur les collectivités locales comme la loi sur la solidarité et le renouvellement urbains (loi SRU).

Mme Christine Boutin a souligné que le Gouvernement devait mener des réformes indispensables. Pour que la décentralisation puisse réussir, il est indispensable que les transferts de compétences soient accompagnés de transferts de financements garantis.

Après avoir souligné la nécessité de réduire le poids des prélèvements obligatoires, Mme Christine Boutin a souhaité connaître les raisons pour lesquelles le remboursement de l'interruption volontaire de grossesse avait été transféré du budget général de l'État au budget de la sécurité sociale.

M. Denis Merville a appelé l'attention du Gouvernement sur les lois qui aggravent des dépenses des collectivités locales. Il a pris l'exemple de l'APA, dont les dépenses peuvent atteindre aujourd'hui le niveau prévu pour la fin de l'année 2003 et celui de la mise en œuvre des dispositions relatives aux services départementaux d'incendie et de secours.

Il a souligné l'importance des questions de personnels. Celles-ci ont été oubliées dans la décentralisation menée au début des années 80, si bien que certaines administrations centrales représentent encore 25% des effectifs des ministères.

Il a insisté sur le besoin de simplifier l'administration en France, et notamment de supprimer bien des organismes dont l'utilité n'apparaît pas clairement. Il a, enfin, relevé les risques inhérents à la seconde étape de la décentralisation. Prenant l'exemple du transfert éventuel des infrastructures routières aux collectivités locales, il a relevé que les crédits budgétaires de l'État s'inscrivaient en baisse depuis plusieurs années, et qu'il y avait donc un risque que l'État transfère des charges, appelées à croître fortement pour les collectivités locales, mais assorties de financements en baisse à la date du transfert.

M. Daniel Garrigue a rappelé qu'en amont de la question des prélèvements obligatoires, il convenait de s'inquiéter de l'impact des mesures de normalisation, tant nationales que communautaires. Il faudrait évaluer l'impact de cette réglementation, dont le coût s'avère élevé tant pour l'administration centrale que pour les collectivités locales. Cette réglementation est en particulier source de primes d'assurance obligatoires, qui s'ajoutent au montant des prélèvements obligatoires.

Il a enfin souhaité qu'on cesse de confier l'exercice de compétences à des syndicats intercommunaux à vocation unique. Par leur nature même, ces organismes sont source d'une croissance exponentielle de la dépense publique, puisqu'ils n'ont aucun arbitrage à rendre entre les différentes catégories de dépenses. C'est la raison pour laquelle on devrait assister, sauf modification législative en la matière, à une explosion de la dépense publique en matière de SDIS et de traitement des ordures ménagères.

Le Président Pierre Méhaignerie a insisté sur la nécessité d'éviter les faux débats en matière de décentralisation consistant à considérer la question des transferts sans financement, sans considérer la prise en charge par l'État des compensations de la suppression d'impôts locaux comme la taxe professionnelle ou la taxe d'habitation. S'agissant des services de défense contre l'incendie et de secours (SDIS), on en arriverait presque à penser que tout est fait pour remplacer les pompiers volontaires par des pompiers professionnels afin de multiplier les services de direction. Enfin, la nouvelle circulaire d'application de la loi sur l'archéologie pose problème par ses conséquences qui ne peuvent qu'augmenter le coût des investissements.

En réponse aux différents intervenants, M. Alain Lambert a indiqué :

- qu'il souhaitait pouvoir procéder au démembrement du FOREC dans le projet de loi de finances pour 2004, des garanties devant être apportées quant au financement des allégements de charges sociales. En effet, les recettes transférées par l'État en direction de la sphère sociale sont passées de 3,3 milliards d'euros en 1997 à 15,5 milliards d'euros aujourd'hui ;

- qu'il faisait sienne la volonté d'une décentralisation permettant de dépenser mieux en dépensant moins. La simplification est au cœur de l'enjeu de la baisse des coûts en France, enjeu qui doit devenir l'objectif majeur des administrations. Il faudra être attentif aux conditions dans lesquelles s'effectueront les transferts de compétences pour éviter une augmentation des dépenses des collectivités locales ;

- qu'il convenait, s'agissant des dépenses induites par certaines législations, et pour éviter tout dérapage de la dépense, que le prescripteur soit aussi le payeur. En ce qui concerne la question des transferts de personnels liés à la décentralisation, la notion de délégation présente un intérêt certain car impliquant de confier les responsabilités avec l'ensemble des moyens financiers et humains nécessaires pour les exercer, et donc, de procéder à des transferts de personnels afin de limiter les dépenses ;

- que les compensations versées au titre d'allègements d'impôts locaux ont effectivement un coût élevé pour l'État, et qu'il faudra procéder à un examen de la fiscalité locale.

M. Daniel Garrigue a indiqué qu'il venait de déposer un amendement sur l'archéologie préventive visant à diminuer de 20% le montant des redevances d'archéologie dont le coût est tel qu'il en arrive à obérer la capacité d'investissement.

M. Jean-François Mattei a confirmé que l'objectif était bien de parvenir à la suppression du FOREC. Il faut néanmoins demeurer attentif à ce que les allégements de charges soient compensés en totalité. Il est également souhaitable d'aller vers une clarification des comptes et la mise en place d'un groupe de travail sur les relations entre l'État et la sécurité sociale répond à cet objectif. La décision a été prise de transférer à l'assurance maladie la prise en charge des centres communautaires thérapeutiques (CCT), de la toxicomanie et de l'interruption volontaire de grossesse, afin de simplifier les circuits financiers complexes qui sont à l'origine d'une perte d'énergie et d'argent. En effet, l'IVG est un acte médical payé in fine par l'assurance maladie. Il était donc logique de procéder à un tel transfert. De plus, le transfert du financement des cotisations salariales vers la CSG a supprimé l'aspect proprement symbolique du débat qui pouvait exister sur un tel financement à partir de la cotisation sociale.


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