COMMISSION DES FINANCES,

DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN

COMPTE RENDU N° 17

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 2 novembre 2005
(Séance de 16 h 15)

Présidence de M. Pierre Hériaud, doyen d'âge,
de M. Jean-Jacques Descamps, Vice-Président,
de M. Pierre Méhaignerie, Président,
puis de M. Michel Bouvard, Vice-Président.

SOMMAIRE

 

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- - Examen de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2006 (n° 2540) :

 

Vote sur les crédits des missions :

 

- Santé (M. Gérard Bapt, Rapporteur spécial)

2

- Défense : Environnement et prospective de la politique de défense (M. Bernard Carayon, Rapporteur spécial)

6

- Justice (M. Pierre Albertini, Rapporteur spécial)

8

- Défense : Préparation et emploi des forces (M. François Cornut-Gentille, Rapporteur spécial)

12

- Sport, jeunesse et vie associative (M. Denis Merville, Rapporteur spécial)

17

La Commission des finances a tout d'abord procédé, sur le rapport de M. Gérard Bapt, Rapporteur spécial, à l'examen des crédits de la mission « santé ».

M. Gérard Bapt, Rapporteur spécial, a rappelé que ce budget était pour la première fois présenté en format LOLF, et donc amputé, par rapport à celui qu'il a présenté l'an dernier, des crédits relatifs aux handicapés et aux personnes âgées.

En ce qui concerne l'exécution du budget 2005, si les crédits destinés au plan cancer ont été sanctuarisés, force est de constater que les annulations ont été importantes, en particulier pour le programme santé publique et prévention, avec 22,1 millions d'euros d'annulations, soit 10,57 % du total, et pour la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (MILDT), avec 3,57 millions d'euros d'annulation, soit 9,39 % du total.

En 2006, le budget de la mission « Santé » s'élèvera à 409,21 millions d'euros en autorisations d'engagement, soit une progression de près de 16 %, et à 399,33 millions d'euros en crédits de paiement, soit une hausse de 10,06 %.

Plusieurs mesures ont modifié le périmètre du budget de la santé entre 2005 et 2006 :

- en vertu de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et aux responsabilités locales, plusieurs actions sanitaires exercées par les départements seront recentralisées au niveau national, à compter du 1er janvier 2006. À titre conservatoire, 41,6 millions d'euros ont été inscrits au programme ;

- au titre des centres d'accueil et d'accompagnement à la réduction des risques pour usagers de drogues, 14,9 millions d'euros ont été transférés à l'assurance maladie ;

- 670 000 euros de crédits des injonctions thérapeutiques ont été transférés au programme « Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales »

- la décentralisation de la formation paramédicale entraîne un transfert de 12,78 millions d'euros ;

- 4,5 millions d'euros en autorisations d'engagement ont été transférés à la mission « Politique des territoires » pour financer une action du programme « Intervention territoriale de l'État » ;

- le financement des investissements en faveur des services de santé outre-mer est, en partie, transféré sur le budget de la mission « Outre-mer » ;

- en revanche, ont été intégrés dans le budget de la mission « Santé », les crédits de la mission interministérielle pour la lutte contre le cancer, soit une dotation de 2 millions d'euros, et le financement des épreuves classantes de l'Éducation nationale, soit 1 million d'euros

À périmètre constant, l'évolution du budget de la mission « santé » est donc de 12,24 % pour les autorisations d'engagement et de 6,61 % pour les crédits de paiement. Cette hausse tient essentiellement à la montée en puissance du plan Cancer qui bénéficie de 26 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 23,37 millions d'euros en crédits de paiement supplémentaires. Mais, hors plan Cancer, les moyens de la mission « Santé », sont en quasi-stagnation, puisque les autorisations d'engagement progressent de 6,39 % et les crédits de paiement de 0,46 % seulement.

Cette mission se décompose en trois programmes :

- « Santé publique et prévention », doté de 271,07 millions d'euros en autorisations d'engagement ;

- « Offre de soins et qualité du système de soins », qui bénéficiera de 100,81 millions d'euros ;

- « Drogues et toxicomanie » qui sera doté de 37,33 millions d'euros.

La mission « Santé » ne comprend aucune dépense de personnel, l'ensemble des crédits de personnels intervenant dans le champ sanitaire et social étant inscrit dans le budget de la mission « Solidarité ». Cela a conduit le Rapporteur spécial, de même que M. Richard Mallié pour la mission « Sécurité sanitaire », à formuler un certain nombre de remarques sur l'application de la LOLF en la matière. La mission ne comprend pas non plus de dépenses d'investissement, l'ensemble des investissements dans le secteur hospitalier ayant été transféré sur le budget de l'assurance-maladie. Le budget de la mission est donc essentiellement constitué de dépenses d'interventions, qui représentent 73 % des autorisations d'engagement et 72,4 % des crédits de paiement.

Le programme le plus important, « Santé publique et prévention » a pour finalité de concevoir et de piloter la politique de santé publique. Il amorce un certain nombre d'actions mais, budgétairement, le plan Biotox et la prévention des pandémies incombent désormais à l'assurance-maladie.

Ce programme est doté de 271 millions d'euros en autorisations d'engagement, l'augmentation de 23,4 % étant essentiellement due à la mise en œuvre du plan Cancer et à la recentralisation de certaines compétences en matière sanitaire.

L'action « Pilotage de la politique de santé publique » est dotée de 29,01 millions d'euros, soit une hausse de 24,5 %, essentiellement en raison de l'augmentation des crédits consacrés à l'Institut national de la prévention et de l'éducation en santé (INPES), dans un objectif de renforcement des actions territoriales. Il s'agira surtout de financer la mise en place des organismes relevant de la mise en oeuvre de la loi de santé publique.

Outre la subvention à l'INPES, l'action comprend :

- les crédits relatifs au fonctionnement des dispositifs prévus par la loi relative à la politique de santé publique (Haut conseil de santé publique, Comité national de santé publique, Conférence nationale de la santé, préparation des plans régionaux de santé publique), soit 2,3 millions d'euros. Sont également menées des actions portant sur l'observation et l'analyse des évolutions de l'état de santé de la population ainsi que la programmation des actions de santé publique ;

- les crédits d'indemnisation, désormais déclinés par missions, sont dotés de 1,4 million d'euros ;

le financement des structures associées au pilotage de la politique de santé publiquec'est-à-dire l'Union internationale de promotion et d'éducation pour la santé, la Société française de santé publique, les associations d'épidémiologistes, les actions de recherche en santé publique - est budgété à hauteur de 8,4 millions d'euros ;

- les 26 programmes régionaux d'accès à la prévention et aux soins, bénéficient de 10 millions d'euros.

Les crédits de l'action « Déterminants de santé » baissent de 2,34 % en autorisations d'engagement et de 6 % en crédits de paiement. Il s'agit de dépenses d'intervention, destinées à la lutte contre les risques de l'alcool et du tabac, à la lutte contre les autres pratiques à risques comme la toxicomanie, à des actions de prévention des risques sanitaires environnementaux dans le cadre du plan national Santé-environnement, au plan Nutrition-santé ou au programme d'action contre les maladies cardio-vasculaires. Le rapport de l'Office parlementaire d'évaluation des politiques de santé met en évidence l'insuffisance des moyens consacrés à la lutte contre l'obésité.

Une subvention de 7,42 millions d'euros est prévue pour l'INPES.

L'action « Pathologie à forte mortalité » doit bénéficier d'une augmentation de 36 %, essentiellement en raison de la montée en puissance du plan Cancer et de la recentralisation de certaines actions sanitaires. Hors changement de périmètre, la hausse n'est que de 20 % pour les autorisations d'engagement et de 13 % pour les crédits de paiement. Cette action finance principalement le plan Cancer, dont le budget de 95 millions d'euros se répartit entre une subvention de 45 millions d'euros à l'Institut national du Cancer et 49 millions d'euros de dépenses d'interventions, en particulier au profit du dépistage de certains cancers.

Cette action comprend aussi le financement de la lutte contre le VIH, de la lutte contre les hépatites, des actions destinées à la santé mentale et à la prévention du suicide et de l'ensemble des plans de santé publique, ainsi que le plan national stratégique « maladies rares. »

L'action « qualité de vie et handicaps », dotée de 6,3 millions d'euros, concerne, outre une subvention à l'INPES, le plan « santé périnatale », le plan « maladie Alzheimer et maladies apparentées », le plan pour l'amélioration de la qualité de vie des personnes atteintes de maladies chroniques, les maladies liées au vieillissement et aux soins palliatifs, les actions concernant la santé de l'enfant et les troubles de l'apprentissage. Il s'agit essentiellement de crédits d'amorçage, mais il est très difficile d'évaluer le budget effectivement attribué à ces programmes, dans la mesure où c'est ensuite l'assurance-maladie qui prend le relais.

A périmètre constant, le programme « Offre de soins » est en hausse de 10,3 % pour les autorisations d'engagement et de 1 % pour les crédits de paiement.

L'action « Niveau et qualité de l'offre de soins » concerne l'organisation des concours de la fonction publique hospitalière, la formation initiale des internes et la subvention de la Haute Autorité de Santé. L'action « accessibilité de l'offre de soins » sera dotée de 1,22 million d'euros, soit une diminution de 5,8 %. Elle comprend le financement d'une partie du dispositif de télémédecine et le soutien au développement des réseaux de santé.

Outre les crédits de fonctionnement destinés à financer les frais de justice, l'action « Soutien » comprend essentiellement les subventions pour charge de service public des différents opérateurs du programme : Agence technique de l'information sur l'hospitalisation, groupement d'intérêt public « Carte professionnelle de santé », ainsi que les 26 Agences régionales de l'hospitalisation, dont les crédits devraient augmenter de 2,2 %. Aucun crédit ne semble inscrit pour l'expérimentation des agences régionales de santé, pourtant prévue par la réforme de l'assurance-maladie.

Bien que le programme « Drogue et toxicomanie » ait déjà fait l'objet d'annulations budgétaires, ses crédits diminuent encore de 1,85 %. Ses actions seront développées grâce à un certain nombre d'opérateurs : Centre interministériel de formation anti-drogue, Association Toxibase, etc. ...

M. Bernard Carayon a interrogé le Rapporteur spécial sur la nature des missions financées dans le domaine des soins palliatifs et sur la forme que prenaient les concours de l'État en la matière.

Le Rapporteur spécial a répondu que, dans ce domaine comme dans beaucoup d'autres, les actions ont été surtout amorcées par les crédits de la mission, le relais étant ensuite pris par l'assurance-maladie.

M. Pierre Hériaud, Président, a observé que la présentation détaillée du Rapporteur spécial avait bien montré certains défauts de la LOLF. On se demande en effet comment le rapporteur peut avoir une vision synthétique si des pistes sont simplement tracées, si le relais d'actions est ensuite pris par d'autres budgets et s'il ne peut ainsi apprécier l'ensemble des engagements, en particulier en crédits de personnels.

M. Michel Bouvard a dit retrouver ici une des difficultés qu'un amendement de M. Gérard Bapt aux crédits de la mission « Solidarité » avait mise en évidence la semaine précédente, dans la mesure où les crédits de personnel auraient davantage trouvé leur place dans la mission que la Commission examine en ce moment. Sans doute conviendrait-il que l'ensemble des rapporteurs spéciaux concernés aient une discussion avec les ministres et avec le directeur de la réforme budgétaire, afin de mieux imputer, en particulier en termes de personnels, les crédits des politiques engagées dans les programmes pertinents. Il convient que le Parlement ne se fasse pas rouler.

M. Richard Mallié a souligné qu'il était confronté au même problème en tant que Rapporteur spécial des crédits de la mission « Sécurité sanitaire ». Pourtant, alors qu'il a été avancé qu'il était impossible de distinguer les personnels dépendant de telle ou telle mission, le bleu budgétaire permet de faire cette distinction.

Après que le Rapporteur spécial a indiqué qu'il s'abstiendrait, à titre personnel, la Commission a adopté les crédits de la mission « Santé ».

*

* *

La Commission des finances a ensuite procédé, sur le rapport de M. Bernard Carayon, Rapporteur spécial, à l'examen des crédits du programme « Environnement et prospective de la politique de défense » de la mission « Défense ».

M. Bernard Carayon, Rapporteur spécial, a observé que, cette année, avec l'entrée en vigueur de la LOLF, les crédits de la mission « Défense » sont présentés en programmes, et malgré une présentation indicative des crédits votés en 2005, les comparaisons globales sont hasardeuses. Ainsi, alors que l'action « Diplomatie de défense » semble dotée de seulement 115,8 millions en 2006 contre 313,4 millions en 2005, cette baisse n'est qu'apparente. En effet, les crédits ont été analysés plus finement et placés dans les actions - ou les programmes - les plus adaptés.

La mutualisation des ressources publiques destinées à soutenir l'innovation technologique, notamment au moyen d'un fonds d'investissement à capitaux mixtes public-privé destiné aux PME évoluant sur les marchés à haute densité technologique, s'impose. Cette action a, certes, été engagée sur la base des recommandations faites il y a déjà deux ans, mais les possibilités d'accès à ce fonds demeurent largement inconnues.

La question des technologies de l'information, de la communication et de la sécurité ne bénéficie pas en France du traitement qu'elle mérite et que lui accordent nombre de grandes nations, qu'elles soient ou non de tradition libérale. Il faut donc souhaiter que soit créé un « CEA » des technologies de l'information, de la communication et de la sécurité, non pas pour créer un organisme de plus, mais pour parvenir à cette mutualisation des capacités d'expertise et des stratégies. Cette démarche serait encore plus positive si elle s'adossait à des expertises privées, françaises et européennes, d'autant que cela serait utile non seulement à la défense, mais aussi à l'ensemble des entreprises du « périmètre stratégique » de l'économie. Le soutien aux PME innovantes, sur le modèle de la Small Business Administration américaine, s'il ne peut s'inscrire dans un cadre strictement national, devrait au moins pouvoir prendre une dimension européenne. Il convient de soutenir l'initiative en ce sens lancée il y a quelques mois par le Comité Richelieu, afin que les administrations publiques soient tenues de réserver 40 % de leurs commandes aux PME. Il conviendrait également de moderniser les procédures des ventes d'État. Le nouvel échec de la vente d'avions Rafale à Singapour devrait inciter à s'inspirer des modèles qui réussissent. Une initiative européenne devrait aussi être prise en faveur d'une harmonisation des procédures européennes relatives aux exportations d'armement.

Pour le programme « Environnement et prospective de la politique de défense », les autorisations d'engagement atteignent 1,794 milliard d'euros, dont 1,155 milliard d'euros au titre des dépenses d'investissement et 219 millions d'euros au titre des dépenses d'intervention.

Première priorité de ce programme, la préparation de l'avenir passe d'abord par l'action « Analyse stratégique » qui incombe à la délégation aux affaires stratégiques. Cette action ne mobilise que 0,32 % des crédits de paiement du programme, soit 4,57 millions d'euros.

Les 18,2 millions d'euros destinés à l'action « Prospective des systèmes de forces » sont essentiellement consacrés aux études opérationnelles et technico-opérationnelles et aux déplacements des personnels. Cette action est animée par le service des systèmes de force et par celui du centre d'analyse de défense de la délégation générale pour l'armement ainsi que par les officiers de cohérence opérationnelle de l'état-major des armées. Au total, 242 équivalents temps plein sont concernés.

La stratégie de l'action « Maintien des capacités technologiques et industrielles » consiste à assurer le développement des capacités technologiques et industrielles nécessaires aux systèmes d'équipement futurs. Cela semble aussi devoir passer par un soutien aux PME innovantes et il serait utile qu'on demande aux préfets de région d'identifier les PME qui doivent être non seulement protégées mais aussi accompagnées dans leurs démarches administratives, voire dans la conquête des marchés.

L'action relative au renseignement regroupe deux services : la direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) et la direction de la protection et de la sécurité de la défense (DPSD), la direction du renseignement militaire (DRM) figurant au programme « Préparation et emploi des forces ».

Les crédits de la DGSE s'élèvent à 449 millions d'euros. Vingt emplois de catégorie A sont créés, ce qui représente 10 équivalents temps plein. Après avoir stagné entre 1999 et 2002, les moyens de fonctionnement de la DGSE sont restés stables en 2005. En apparence, ils progresseront légèrement en 2006, de 33,2  à 33,6 millions d'euros, mais il s'agit d'un changement de périmètre. Les crédits d'infrastructure représenteront près de 20 % des crédits d'investissement, les dotations en crédits de paiement des dépenses d'investissement progressant globalement de 16 %.

Le budget de la DPSD est plus modeste : les dépenses de fonctionnement s'élèveront à un peu moins de 7,7 millions d'euros et les dépenses d'investissement à moins de 4,2 millions d'euros.

Le soutien aux exportations d'armement, qui s'appuie sur les attachés d'armement, est l'une des branches des relations politiques et diplomatiques que la France entretient depuis longtemps, grâce aux actions de la direction du développement international de la DGA. Le coût de cette action est de 13,8 millions d'euros, et elle emploie 127 équivalents temps plein.

La diplomatie de défense s'exerce, par l'intermédiaire des attachés de défense, soit en amont des crises, soit en accompagnement de l'emploi des forces armées déployées. Elle occupe 389 équivalents temps plein, particulièrement mobiles.

Le Rapporteur spécial a émis un avis favorable à l'adoption des crédits correspondant au programme « Environnement et prospective de la politique de défense ».

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La Commission des finances a procédé, sur le rapport de M. Pierre Albertini, Rapporteur spécial, à l'examen des crédits de la mission « Justice ».

M. Pierre Albertini, Rapporteur spécial, a indiqué que la mission « Justice » se compose de cinq programmes : « Services judiciaires », « Administration pénitentiaire » - ces deux programmes représentant ensemble plus des trois quarts du budget -, « Protection judiciaire de la jeunesse », « Accès au droit » et « Conduite et pilotage de la politique de la justice ». Ce découpage a le mérite de la clarté et facilite les comparaisons d'une année sur l'autre, à cette réserve près que le rattachement du programme « Justice administrative », à la mission « Conseil et contrôle de l'Etat » est plus que contestable, le Conseil d'Etat exerçant - et pour partie seulement - une fonction de conseil du seul Gouvernement.

Le total des crédits demandés pour 2006 s'élève à 6,9 milliards d'euros en autorisations d'engagement et à 5,9 milliards d'euros en crédits de paiement, soit une hausse de 4,6 %, sensiblement supérieure à celle du budget de l'Etat. Il est à noter que 2006 sera la quatrième et avant-dernière année d'exécution de la loi d'orientation et de programmation pour la justice (LOPJ). Pour la première fois, la présentation budgétaire inclut la totalité des pensions, allocations familiales et allocations logement servies aux personnels, à hauteur de 957 millions d'euros, au lieu de 405 millions d'euros en 2005.

Les priorités du ministère pour 2006, pour autant que le Rapporteur spécial ait pu en juger malgré la qualité plutôt médiocre des réponses faites à son questionnaire par les services du ministère, semblent être la maîtrise des frais de justice, qui constituent quelque 15 % des dépenses des services judiciaires, l'amélioration des délais de jugement et, tâche sans doute la plus difficile, l'amélioration de la capacité d'accueil des prisons, grâce à la création de 7 000 places supplémentaires et à la rénovation de 4 000 autres places.

L'un des principaux enjeux de l'application de la LOLF est le passage de crédits évaluatifs à des crédits limitatifs. Pour les frais de justice, le montant provisionné est de 370 millions d'euros, ce qui est notoirement insuffisant, puisque la dépense réelle de l'année 2005 est évaluée à 500 millions d'euros. Pour l'aide juridictionnelle, la prévision est délicate par essence, puisque le montant de la dépense est fonction de la nature des affaires et de la situation financière des justiciables. Quant au secteur habilité de la Protection judiciaire de la jeunesse (PJJ), qui emploie quelque 30 000 personnes, il est par nature très dépensier, et connaît depuis 2003 des reports de charges chroniques.

Les économies espérées en matière de frais de justice - écoutes téléphoniques, analyses biologiques ou médicales - sont environ de 60 millions d'euros, encore qu'il convienne de se montrer prudent, car les prescripteurs principaux ne sont pas les magistrats, mais la police judiciaire et la gendarmerie nationale. Une ligne de « dépenses accidentelles et imprévisibles » d'un montant de 50 millions d'euros environ, gérée par Bercy, est certes prévue, mais, outre que le procédé n'est pas vraiment conforme à l'esprit de la LOLF, son montant risque fort de ne pas suffire, puisqu'en additionnant cette réserve de précaution, les économies escomptées et les crédits inscrits au budget, on reste nettement au-dessous des 500 millions d'euros qui seront dépensés en 2005.

S'agissant de la gestion des effectifs, le déficit le plus préoccupant est celui des greffiers : il est peu utile, en effet, de recruter des magistrats supplémentaires si les greffes ne sont pas suffisamment pourvus. Or, le retard accumulé dans le recrutement de greffiers ne sera jamais rattrapé si l'on ne programme pas les concours à venir en fonction de la pyramide des âges de ce corps. Sur l'ensemble du ministère, le plafond des autorisations d'emploi, soit 71 475 équivalents temps plein travaillés (ETPT) est loin d'être atteint : l'effectif total réel était seulement de 66 435 ETPT en 2004.

La carte des emplois judiciaires est inadaptée, qui plus est, à la répartition réelle du travail entre juridictions. La France judiciaire est en effet « à deux vitesses » : on compte beaucoup de juridictions surchargées sur un axe nord-sud qui va du Nord-Pas-de-Calais à Marseille et Perpignan en passant par l'Ile-de-France et le couloir rhodanien, tandis qu'ailleurs le travail des magistrats et des greffes est, dans l'ensemble, plus facile à programmer et à organiser. Il ne sera pas éternellement possible de laisser cette carte inchangée.

Le montant total des crédits consacrés au suivi socio-judiciaire est quasiment impossible à reconstituer, car la dépense est disséminée dans plusieurs actions, au sein de trois programmes. La mise en œuvre de ce suivi se heurte en outre à une difficulté majeure : la pénurie de médecins coordonnateurs, du fait du faible nombre de praticiens spécialisés en délinquance sexuelle et de la réticence de nombreux psychiatres. La solution passe par l'établissement de listes communes à plusieurs tribunaux et par la rédaction d'un guide méthodologique à l'usage des professionnels concernés.

Un nouveau problème est à signaler, qui ne se posait pas, lorsque la solennité de la justice n'était que peu contestée par les justiciables et leurs proches : il s'agit de la sécurité des juridictions, notamment pénales.

Il faut saluer, enfin, les progrès accomplis par la gestion de la PJJ, souvent dénoncée jusqu'alors comme désordonnée. Les observations de la Cour des comptes et de la Commission des finances semblent avoir porté leurs fruits. La déconcentration est gage de recrutements plus rapides et plus efficaces, car plus adaptés à la réalité contemporaine de la délinquance, le recours à des contractuels - quelque 250 actuellement - permettant à ceux-ci de vérifier eux-mêmes leur motivation et leurs qualités avant de s'engager plus durablement. La complémentarité entre le secteur habilité et le secteur géré directement par le ministère a également été améliorée. Deux points noirs, cependant, existent. La PJJ est d'ailleurs la première à les dénoncer : la lenteur avec laquelle la direction des Domaines procède à l'évaluation de son patrimoine immobilier et l'administration des Finances à sa vente, et l'absence d'un outil performant de gestion des ressources humaines, dont l'acquisition n'est prévue que pour 2008 !

En conclusion, le Rapporteur spécial a souhaité que le nombre des indicateurs de performance retenus soit réduit, car tous ne sont pas pertinents, et certains ne pourront d'ailleurs être « renseignés » qu'en 2008 ou 2009. Mieux vaudrait des indicateurs moins nombreux, mais disponibles dès l'an prochain, afin qu'il soit possible de faire des comparaisons.

M. Jean-Jacques Descamps, Président, a partagé le sentiment du Rapporteur spécial sur le rattachement du programme « Justice administrative » à la mission « Conseil et contrôle de l'État ».

M. Denis Merville a rejoint le Rapporteur spécial pour déplorer l'insuffisance du nombre des greffiers, qui lui paraît être le signe que trop de lois sont votées sans que le législateur en ait mesuré l'impact sur l'activité des tribunaux : les nouvelles dispositions relatives au surendettement, par exemple, sont-elles de nature à la réduire ou à l'augmenter ? Quant aux travaux d'intérêt généraux et autres alternatives à l'incarcération, leur organisation n'est-elle pas trop complexe pour les collectivités, notamment les communes, censées en être les bénéficiaires ? Enfin, le déménagement du centre de détention du Havre en périphérie de la ville est entouré d'une certaine imprécision quant au nombre de places du nouvel établissement : il devait être de 400 à l'origine, on parle maintenant de 600, voire de 690. La différence n'est pas mince en ce qui concerne l'insertion du centre dans son environnement, semi-rural. S'agissant d'autre part d'un partenariat public-privé, les élus des collectivités concernées se demandent si l'établissement sera assujetti ou non aux taxes foncières, et qui percevra la DGF.

M. Philippe Rouault a demandé quel était l'avancement du programme de centres éducatifs fermés.

M. Pierre Hériaud a constaté, s'agissant de la PJJ, l'existence d'une réserve de précaution pour le fonctionnement, dont les crédits ne sont que de 3 millions d'euros quand il en faudrait, de notoriété publique, environ le double, et s'est interrogé sur la consommation des crédits d'investissement.

Le Rapporteur spécial a apporté, en réponse, les précisions suivantes :

- il est vrai que la loi sur le surendettement a été votée sans que l'impact sur l'activité des juridictions en ait été mesuré, et que celles chargées de traiter ces affaires sont proches de la saturation. Toutefois, la question qu'il convient de se poser est de savoir si ces matières relèvent bien de la justice, ou si celle-ci ne devrait pas se borner, dans la plupart des cas, à vérifier périodiquement la bonne exécution des accords et la bonne foi des parties ;

- le recours aux peines alternatives progresse de façon continue, mais leur effet pédagogique suppose un accueil et un suivi rigoureux, qui excède souvent, force est d'en convenir, les possibilités des communes. Aussi d'autres collectivités, comme les départements, pourraient-elles valablement prendre le relais ;

- les variations constatées, en cours de projet, dans la capacité d'accueil d'un établissement traduisent sans doute des hésitations bien naturelles, mais un moment vient où il faut se tenir à la décision annoncée. Quant aux conséquences fiscales du partenariat public-privé, elles seront mieux connues à mesure que cette formule se développera ;

- quinze centres éducatifs fermés sont en état de fonctionner, gérés pour la plupart par des associations. Sur les treize qui seront créés en 2006, un plus grand nombre sera géré par le ministère. Ainsi pourra-t-on comparer les vertus respectives des deux formules et rechercher des complémentarités entre elles. Sans doute l'objectif de 60 centres, figurant dans la LOPJ, ne sera-t-il pas tenu, mais le nombre de jeunes par centre sera plus élevé qu'il n'était prévu à l'origine, de sorte que l'on approchera de la capacité d'accueil globale optimale, soit environ 600 places. Le fait que le nombre de mineurs détenus baisse prouve que ces centres remplissent leur fonction, ce dont le Rapporteur spécial, qui avait exprimé ses réticences à l'encontre de leur création, ne saurait que se réjouir ;

- la réserve de précaution constituée en faveur de la PJJ sera d'autant plus insuffisante qu'elle est également censée couvrir les très probables dépassements dans les domaines de l'aide juridictionnelle et des frais de justice. Des arbitrages seront donc nécessaires en cours d'année, étant entendu que les dépenses du secteur habilité sont en grande partie des dépenses de personnel, et qu'il faudra bien payer ses quelque 30 000 salariés. Cela dit, il n'est pas illégitime d'avoir voulu, pour la première année d'application de la LOLF, calibrer en baisse les dépenses plutôt que de les reconduire à l'identique ;

- la création de l'agence de maîtrise d'ouvrage, qui emploie une soixantaine de personnes, a permis d'accélérer le rythme des investissements immobiliers, même s'il n'est pas garanti que ses 15 millions d'euros seront consommés en totalité dans l'année. Le partenariat public-privé est une réponse possible aux difficultés rencontrées, mais il n'est pas la panacée, même pour les établissements gérés par la PJJ.

M. Pierre Hériaud a demandé quelle utilisation serait faite de ces 15 millions d'euros en 2006.

M. Jean-Jacques Descamps, Président, a demandé à quel montant était estimé le portefeuille immobilier de la PJJ susceptible d'être vendu.

Le Rapporteur spécial a dit que les réponses à ces questions n'étaient pas actuellement connues, mais qu'un audit général des établissements a conclu à la nécessité d'en rénover certains et de céder ceux dont la réhabilitation coûterait trop cher. Si les bâtiments en question n'ont pas forcément une grande valeur, il en va souvent autrement du terrain qui les entoure. Les lenteurs du service des Domaines font que la PJJ se trouve dans cette situation absurde de devoir dépenser en pure perte des sommes importantes pour l'entretien, même sommaire, de bâtiments qu'elle ne peut ni utiliser ni vendre, à seule fin d'éviter qu'ils soient vandalisés ou illégalement habités.

Après que le Rapporteur spécial a émis un avis favorable, la Commission a adopté les crédits de la mission « Justice ».

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Puis la commission des Finances a procédé à l'examen des crédits des programmes « Préparation et emploi des forces », « Équipement des forces » et « Soutien de la politique de défense », de la mission « Défense ».

M. François Cornut-Gentille, Rapporteur spécial, a indiqué que le programme « Préparation et emploi des forces », doté de 20,9 milliards d'euros, était placé sous la responsabilité du chef d'état-major des armées (CEMA). Il finance les activités militaires, le recrutement, la formation et le soutien des forces. Le programme « Équipement des forces », doté de 10,6 milliards d'euros, est placé sous la responsabilité du CEMA et du Délégué général pour l'armement (DGA), et gère notamment les 40 grands programmes d'armement. Enfin, le programme « Soutien de la politique de défense », doté de 2,9 milliards d'euros, recouvre les grandes fonctions transversales : contrôle, personnels, immobilier, archives.

Les outils de mesure de la performance ont été améliorés par rapport aux projets initiaux, le ministère ayant largement suivi les recommandations de la mission d'information de la Commission des finances. Le niveau d'information, fourni dans la documentation budgétaire, a progressé pour le programme « Équipement des forces », mais en revanche pour le programme « Préparation et emploi des forces », il est nettement moins satisfaisant, s'agissant des rémunérations et charges sociales et du fonctionnement. On peut regretter aussi, pour ces deux programmes, l'absence d'indicateurs permettant des comparaisons avec les autres grands pays industrialisés, souhaités par la mission d'information sur l'application de la LOLF, mais complexes à définir. Il est à noter que le récent décret donnant autorité au CEMA sur les autres chefs d'états-majors est de nature à modifier profondément le mode de fonctionnement des armées.

La stratégie ministérielle de réforme (SMR) se poursuit, avec la mise en place d'un économat unique, d'un service d'infrastructure unique, d'un commissariat unique, le groupement des archives, la montée en puissance de la direction des réseaux interarmées et des systèmes d'information, la réorganisation de la fonction achat et l'externalisation de la gestion du parc automobile. Les gains escomptés en 2006 sont d'environ 23 millions d'euros.

Le programme « Préparation et emploi des forces » est soumis à une forte contrainte budgétaire. On constate, pour l'ensemble du ministère, une adaptation des crédits de personnel aux sous-effectifs constatés l'année précédente : en 2005, l'effectif budgétaire, de 436 910 postes, était en régression de 879 postes par rapport à 2004, et inférieur de 3 809 postes à la programmation ; en 2006, il sera inférieur de 2 913 postes aux 443 242 postes prévus par la programmation, même si la présentation en ETP rend la comparaison difficile. S'agissant du recrutement des militaires du rang, le taux de sélection est satisfaisant : 1 pour 2,1 dans l'armée de terre, 1,3 dans l'armée de l'air, 3,1 dans la marine.

Les moyens de fonctionnement courant demandés pour 2006 par le ministère, hors carburant, sont en baisse de 3,5 % pour l'armée de l'air, soit 9 millions d'euros, soit encore l'équivalent du fonctionnement de trois bases aériennes ; de 3,5 % pour l'armée de terre, soit 8 millions d'euros, soit encore l'équivalent de huit jours d'activités ; et d'environ 2 à 2,5 % pour la marine.

Quant au renchérissement du cours du pétrole, il n'est toujours pas correctement pris en compte dans le budget. Au 31 août 2005, l'armée de l'air avait consommé 160 millions d'euros sur les 163 millions accordés pour l'année, et la marine a dû réduire ses réserves de 35 000 tonnes. Alors que le besoin constaté en 2005 aura été de 500 millions d'euros, seuls 358 millions d'euros sont inscrits au budget 2006 ; pour que cette dotation, calculée de façon fort optimiste, suffise, il faudrait, à niveau d'activité équivalent, que le prix du baril chute de 28 %.

Les besoins pour l'entretien programmé du matériel sont en très forte croissance. Cela s'explique notamment par le fait que certains prestataires sont en situation de monopole, et par le coût élevé de la maintenance des matériels neufs de haute technicité. Le coût moyen d'une heure de vol d'un Rafale est de 13 800 euros, celui d'un Super Étendard de 6 000 euros ; celui d'un hélicoptère Tigre de 7 500 euros, celui d'une Gazelle de 700 euros seulement.

On constate en outre une baisse constante de l'activité, qui atteint en 2005, dans l'armée de l'air, 3,3 % par rapport à 2004 et 13,3 % par rapport à 2003, tandis que l'armée de terre peine à atteindre l'objectif de cent jours de sorties des unités sur le terrain. Les domaines phares, comme par exemple l'aviation de chasse, conservent toutefois leur niveau d'excellence, et les opérations extérieures montrent que les forces françaises font plus que soutenir la comparaison au niveau international.

Le coût des opérations extérieures a atteint 600 millions d'euros en 2005, et sa budgétisation progresse. Seuls 24 millions d'euros avaient été inscrits en 2004 et 100 millions d'euros en 2005  alors que 250 millions d'euros le sont en 2006. Les OPEX sont cependant source de contraintes supplémentaires, puisque le ministère les préfinance et que l'ouverture de crédits complémentaires entraîne des reports qui déstabilisent l'exécution budgétaire.

S'agissant du programme « Équipement des forces », le respect de la loi de programmation est conditionné par l'apurement des reports de crédits. La dotation pour 2006 est conforme à la dotation théorique de 15,242 milliards d'euros, prévue par la loi de programmation, et correspond à d'importants besoins : Rafale, A400M, FREMM, Barracuda, Tigre, NH90, porte-avions - projets dont beaucoup sont en développement ou en production, et dont certains, le Rafale par exemple, sont destinés à équiper l'armée française jusqu'en 2050.

Le montant des reports de crédits, qui atteignait 1,5 milliard d'euros de 2003 sur 2004, s'est élevé à 2,77 milliards d'euros de 2004 sur 2005, soit une hausse de 83 %. Ce phénomène n'est pas dû à l'incapacité de consommer les crédits : le taux de consommation des crédits du titre V était de 47,81 % au 30 juin 2005 : le rythme de consommation est donc normal. Les reports de charges sont passés de 2,12 milliards d'euros en 2003 à 3,05 milliards d'euros en 2004, et la hausse des impayés - de 220 % en deux ans - a entraîné le paiement d'intérêts moratoires de 14,1 millions d'euros en 2003, 16,6 millions d'euros en 2004, et pourrait atteindre, selon la Cour des comptes, 45 millions d'euros en 2005. L'explication principale réside en vérité dans l'imposition par le ministère des finances d'une « norme de dépense » qui aboutit à bloquer globalement la dépense en cours d'exécution.

Or l'article 15 de la LOLF limite - ce qui, en soi, est une règle de bonne gestion - les reports de crédits à 3%, soit environ 445 millions d'euros en 2006, sauf disposition contraire de la loi de finances. Il est donc indispensable que soit résolue la lancinante question des reports, et des discussions sont d'ailleurs en cours entre les ministères des finances et de la défense, car la situation actuelle n'est satisfaisante pour personne. La réalisation même de la loi de programmation militaire est conditionnée par l'existence d'un plan de résorption des reports de crédits.

Il y avait certainement des gisements d'économies supplémentaires à trouver dans les prochaines années. Le rôle nouveau dévolu au CEMA permettra sans doute de renforcer la mutualisation des moyens des armées. Au total, les moyens consentis à la défense, qu'il s'agisse de son fonctionnement général, de son équipement, - à cause des reports - ou des opérations extérieures, ne sont pas excessifs, eu égard à l'ambition de la France de maintenir ses armées au niveau international d'excellence qui est le leur.

M. Gilles Carrez, Rapporteur général, après avoir salué la clarté et la franchise de l'exposé du Rapporteur spécial, s'est demandé si, compte tenu de l'inexorable progression des reports, la poursuite de l'exécution de la loi de programmation militaire était compatible avec la norme du « zéro volume », a fortiori avec celle du « zéro valeur ». Il convient de s'interroger sur les perspectives d'apurement des reports. L'ouverture de crédits pour la défense en loi de finances rectificative conduit à demander un effort de réduction de crédits aux autres ministères. Il n'est pas certain que l'on puisse traiter un problème de cette ampleur par un dispositif technique tel que l'article 57 de la présente loi de finances, constituant, qui plus est, une dérogation de taille à l'article 15 de la LOLF.

M. Michel Bouvard a félicité le Rapporteur spécial pour son discours de vérité et formulé trois observations.

Il serait bon, en premier lieu, que le Parlement sache quelle part du coût des opérations extérieures est réellement prise en charge par le budget de l'État, et quelle part lui est remboursée par des organisations internationales, telles que l'ONU, l'OTAN, voire l'Union européenne. Considérant que les possibilités inédites de fongibilité des crédits des programmes de la mission « Défense » nuit tant à la lisibilité du budget qu'à l'exercice par le Parlement de son droit d'amendement, il déposera un amendement tendant à scinder le programme « Préparation et emploi des forces ».

En second lieu, l'article 57 du projet de loi de finances pose un réel problème, par le volume des reports en jeu. Il est temps de s'interroger sur la capacité de l'État à mener à bien la loi de programmation militaire dans un contexte budgétaire différent de celui dans lequel elle a été votée, car ce qui vaut pour le ministère de la défense peut valoir demain pour d'autres ministères, successivement « sanctuarisés » au fil des lois de programmation.

S'agissant, enfin, des programmes d'armement, peut-être faut-il remettre en cause l'idée selon laquelle la France doit produire elle-même tous les matériels dont elle a besoin. Il y a, certes, des enjeux de politique industrielle et de transferts de technologie, mais ce n'est pas vrai dans tous les cas, et l'on doit se demander si le ministère de la défense est bien dans son rôle lorsqu'il subventionne les activités les moins rentables de GIAT Industries, à seule fin de maintenir le niveau d'activités.

M. François Cornut-Gentille, Rapporteur spécial, a fait aux différents intervenants les réponses suivantes :

- les questions militaires ne peuvent trouver réponse à l'aide d'arguments purement budgétaires ou financiers, car il s'agit aussi, et surtout, de savoir si la France veut continuer à avoir l'une des toutes meilleures armées au monde. On peut, certes, s'interroger sur le coût de certains programmes, mais, à l'inverse, les coupes dans les programmes d'aujourd'hui peuvent engendrer des surcoûts demain ou après-demain. Il faut donc sortir du jeu de rôles traditionnel du débat budgétaire afin de dégager des évolutions rationnelles à long terme.

- la France perdrait en crédibilité si elle se privait de certains équipements de pointe. Beaucoup de ses partenaires européens, notamment parmi les nouveaux États membres, sont tentés de penser que le monde est devenu moins dangereux et que les Américains, de toute façon, voleront à leur secours en cas de crise, mais rien n'est moins sûr, et seuls, en Europe, la France et le Royaume-Uni continuent de porter leur part du fardeau et de garder leur capacité militaire complète et autonome ;

- la gestion des reports de crédits s'est faite jusqu'à présent sans débat. Désormais, toutes les parties devront trouver ensemble une façon de parvenir à résorber ces reports ;

- s'agissant des programmes d'armement, on constate de vrais progrès. La DGA s'est réorganisée en s'inspirant de méthodes plus proches de celles de l'industrie. Le renforcement du CEMA est également très important, car il permettra d'avoir une approche interarmées, et non plus armée par armée. Mais le ministère de la défense est lourd à manœuvrer, et ne saurait évoluer au même rythme qu'une PME ;

- pour apprécier le coût des opérations extérieures à sa juste valeur, il convient de mesurer les conséquences qu'auraient, y compris pour la vie quotidienne des Français, une déstabilisation, au-delà de la Côte-d'Ivoire, de l'ensemble du continent africain.

Le Président Pierre Méhaignerie a estimé que les gains de productivité potentiels étaient néanmoins énormes, tant pour le fonctionnement que pour l'équipement : les conditions, par exemple, dans lesquelles sont réalisés certains appels d'offres ont pour effet d'amener les coûts bien au-dessus des prix internationaux... Sur le plan des principes, en outre, la Commission des finances ne serait pas dans son rôle si, demandant 80 millions d'euros d'économies à l'Éducation nationale, elle exemptait les armées de tout effort.

La Commission a examiné deux amendements de M. Michel Bouvard relatifs à la nomenclature en programmes. M. Michel Bouvard a rappelé qu'il s'agit, pour l'essentiel, de reprendre les propositions qu'avait formulées la mission d'information relative à la mise en œuvre de la LOLF, lors de son travail sur la maquette budgétaire. Ces propositions avaient été approuvées par la commission des Finances, dans son ensemble. On aboutit en effet à une massification du volume des crédits des programmes « Équipement des forces » et « Préparation et emploi des forces ». Ceci conduit à une fongibilité excessive des crédits, à une moindre information du Parlement et à une limitation du droit d'amendement. C'est pourquoi il est proposé par le premier amendement, de scinder le programme « Préparation et emploi des forces » afin de créer un programme « Recrutement et formation des forces » doté de 2,3 milliards d'euros. Le second amendement propose de créer un programme « Dissuasion nucléaire » qui regrouperait l'ensemble des moyens consacrés à cette politique, moyens aujourd'hui dispersés entre les quatre programmes de la mission.

M. François Cornut-Gentille, Rapporteur spécial a indiqué qu'il était partagé sur ces amendements. En effet, la nomenclature actuelle n'est pas totalement satisfaisante pour le Parlement, en particulier car elle ne permet pas une vision claire des moyens consacrés à la dissuasion nucléaire. Néanmoins, à l'heure où la LOLF, et la nouvelle nomenclature qu'elle entraîne, commencent juste à s'appliquer il est probablement prématuré de remettre en cause la maquette. Il serait plus sage d'attendre un ou deux ans pour en évaluer la pertinence. En outre, l'organisation optimale de la maquette se fera probablement par système de forces, ce qui n'est pas nécessairement le cas avec les amendements proposés.

M. Gilles Carrez, Rapporteur général, s'est déclaré en accord avec l'argumentation du Rapporteur spécial. Certes, on ne peut que partager le souci de bonne organisation des programmes et d'une nomenclature conforme avec la LOLF. Il est néanmoins inutile de multiplier les sources de conflits avec le ministère de la Défense, alors que celui-ci a accepté un transfert important de crédits relatifs à la gendarmerie vers la mission « Sécurité ».

Le Président Pierre Méhaignerie s'est déclaré favorable au retrait de ces amendements.

M. Michel Bouvard a retiré ses amendements en précisant qu'il les redéposerait en séance, afin de montrer l'attachement de la Commission à ce problème et la nécessité de poursuivre une discussion voulue par l'ensemble des groupes politiques.

La Commission a ensuite adopté un amendement (n° 140) du Gouvernement, réduisant les crédits de la mission « Défense » de 602,3 millions d'euros afin de regrouper au sein de la mission « Sécurité » les crédits d'informatique et d'immobilier de la gendarmerie. Un amendement présenté par MM. Michel Bouvard et Marc Le Fur ayant pour objet de créer un programme spécifique au sein de la mission « Défense » pour accueillir ces crédits, devenu sans objet, a donc été retiré.

La Commission a ensuite examiné un amendement du Président Pierre Méhaignerie, visant à réduire de 30 millions d'euros les crédits du programme « Soutien de la politique de la Défense ». Le Rapporteur spécial s'est déclaré défavorable à cet amendement. Une solution faisant l'objet d'un consensus avec le ministère et la commission de la Défense de l'Assemblée eut été préférable. Il serait souhaitable qu'un tel amendement soit préparé pendant le délai qui sépare cette réunion de la séance publique.

M. Gilles Carrez, Rapporteur général, a reconnu que le consensus est effectivement toujours souhaitable, mais qu'il était, aujourd'hui, difficile à atteindre. Le ministère de la Défense devant participer comme tout autre, à l'effort général de limitation des dépenses de fonctionnement, cet amendement est tout à fait légitime.

Le Président Pierre Méhaignerie a ajouté qu'il n'était pas possible que le ministère de la Défense soit exonéré de tout effort de maîtrise des dépenses, ce dont M. Denis Merville a également convenu.

La Commission a adopté cet amendement.

La Commission a ensuite adopté, suivant l'avis des Rapporteurs spéciaux, les crédits de la mission « Défense », ainsi modifiés.

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La commission a enfin procédé, sur le rapport de M. Denis Merville, Rapporteur spécial, à l'examen des crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».

M. Denis Merville, Rapporteur spécial, a indiqué que, compte tenu de la nouvelle présentation liée à la LOLF et de la transformation du FNDS en CNDS, le budget global de la mission atteint cette année 989 millions d'euros en autorisations d'engagement. Ce ministère souffre de la régulation budgétaire, notamment dans sa partie vie associative. Cela entraîne, en dépit du vote du Parlement, des difficultés de trésorerie pour les associations concernées.

La nouvelle présentation fait apparaître une augmentation de 39 % des crédits de paiement, mais, à périmètre constant, le budget est en hausse de 4,85 %, principalement en raison de l'augmentation, heureuse pour le sport, des crédits de l'ancien FNDS.

Les capacités d'intervention du programme « Sport » s'élèveront, CNDS compris à 372 millions d'euros (+ 9 %). Il y a en fait plusieurs années que le FNDS est en progression,or il aide considérablement le mouvement sportif, qui en a bien besoin, que ce soit au niveau national ou régional.

Outre 110 millions d'euros provenant de l'ancien FNDS et désormais budgétisés, on trouve 180 millions d'euros de crédits affectés au CNDS. Le total est ainsi en augmentation de 30 millions d'euros. Le fonctionnement du CNDS restera lié au mouvement sportif mais, désormais, c'est l'État qui décidera pour ce qui concerne les équipements d'État, ce qui paraît logique. Le CNDS pourra s'appuyer sur le recensement des équipements sportifs, qui devrait être disponible en début d'année. Il pourra donc, sans doute, être utilisé après la première répartition, qui intervient généralement fin janvier ou début février.

En réponse à une question du Président Pierre Méhaignerie sur l'utilité de ce recensement, le Rapporteur spécial a rappelé qu'il y avait actuellement une liste d'attente d'environ 300 dossiers et indiqué que ce recensement permettrait au CNDS de faire des choix en fonction non plus uniquement des indications du mouvement sportif mais de critères objectifs, en particulier quant à la répartition territoriale des équipements. Une analyse rigoureuse des besoins lui évitera également de devoir répondre à une demande davantage tournée vers le ludique et le commercial que vers le sport, comme celle qu'on observe depuis quelques années en faveur du financement de piscines. Il disposera au total de 260 millions d'euros, et son engagement restera donc modeste par rapport à celui des collectivités locales.

L'Action n° 1, « Promotion du sport pour le plus grand nombre », est un objectif prioritaire du ministre depuis plusieurs années. L'action en faveur des handicapés est dotée de 9 millions d'euros. Elle se traduit en particulier par des travaux d'accessibilité des équipements et par l'augmentation des primes versées aux athlètes médaillés aux jeux paralympiques.

Plus de 4 millions d'euros seront consacrés à la promotion du sport féminin et le réseau des pôles ressources nationaux sera consolidé.

Avec l'action n° 2, « Développement du sport de haut niveau », l'État exerce son rôle de soutien à l'organisation en France de grandes manifestations sportives : coupe du monde de rugby et championnat du monde de handball féminin en 2007, championnats du monde de ski alpin à Val d'Isère en 2009, Jeux du Pacifique Sud en Nouvelle-Calédonie en 2011. Plus de 3 millions d'euros seront en outre destinés aux grands événements sportifs, en particulier à la participation des délégations françaises aux Jeux olympiques et paralympiques d'hiver de Turin.

S'agissant de la construction des grands équipements, il conviendrait de réaliser ce qui l'aurait été si la France avait obtenu l'organisation des Jeux olympiques. Les pouvoirs publics se sont engagés à participer au financement d'un certain nombre de ces équipements en Île-de-France. Il faudra pour cela trouver des crédits en dehors du CNDS, afin que les autres régions ne soient pas lésées. En effet, il ne faut pas oublier, dans le cadre de la politique d'aménagement du territoire, de consacrer des moyens suffisants à des équipements de petite et moyenne taille dans des zones qui en sont dépourvues. Le soutien au financement des filières de haut niveau sera confirmé au travers des conventions d'objectifs passées avec les fédérations.

On trouve aussi, dans cette action, les conventions d'objectifs avec les fédérations pour les sportifs de haut niveau. Après des années au cours desquelles les gouvernements successifs n'ont rien fait, les travaux de rénovation de l'Institut national du sport et de l'éducation physique (INSEP) sont enfin engagés, grâce notamment à un partenariat public-privé pour les fonctions logistiques.

L'action n° 3, « Prévention par le sport et promotion des sportifs » permettra de mettre en valeur les bienfaits du sport pour la santé. Cela semble particulièrement utile dans le cadre de la prévention des risques sanitaires et de la lutte contre l'obésité. Peut-être pourrait-on aller plus loin dans ce domaine, en se souvenant que quand il n'y avait pas de ramassage scolaire, se rendre au collège ou au lycée à pied ou à bicyclette était bon pour la santé.

L'année 2006 verra aussi la création de l'Agence française de lutte contre le dopage, qui sera dotée de crédits importants. C'est une priorité du ministre.

L'action n° 4 concerne la « Promotion des métiers du sport ».

Dans le programme « Jeunesse et vie associative », la vie associative est dotée de 67 millions d'euros, la jeunesse de 58 millions d'euros. La première Conférence nationale de la vie associative a été organisée en 2005. L'Assemblée nationale examinera prochainement le projet relatif au volontariat. Le gouvernement a pour objectif de développer l'emploi associatif : l'action n° 1 vise au « Développement de la vie associative ». Les moyens permettent de financer les délégués départementaux à la vie associative et les correspondants régionaux.

S'agissant de l'action n° 3, « Promotion des actions en faveur de l'éducation populaire », le président du FONJEP se réjouit du rétablissement de 80 postes précédemment gelés. L'action permet aussi d'apporter une aide plus directe au secteur associatif à travers des subventions aux associations agréées de jeunesse et d'éducation populaire, au sein desquelles on observe des réactions défavorables lorsque des gels de crédits interviennent.

Si l'on comprend la difficulté qu'il y aurait eu à pérenniser les emplois jeunes, l'utilisation des contrats d'avenir et des contrats d'accompagnement à l'emploi par le monde sportif et même par les élus locaux et par les PME paraît cependant délicate. L'engagement pris, au niveau national, par les fédérations sera sans doute difficile à tenir au niveau local, et l'on peut se demander s'il ne conviendrait pas de trouver, pour le mouvement sportif, des formules plus simples.

Dans le cadre de l'action n° 2, « Promotion des actions en faveur de la jeunesse », un certain nombre d'opérations, comme « Jobs d'été », ont été amplifiées en 2005, mais sans doute peut-on aller encore plus loin. Pourquoi, par exemple, ne pas étendre l'expérience menée pour les vendanges par certaines permanences d'accueil, d'information et d'orientation (PAIO) et utiliser les jeunes à la récolte des fruits et légumes, afin non seulement de les occuper, de leur procurer un revenu, mais aussi d'éviter que les arboriculteurs ne soient obligés de faire appel à de la main d'oeuvre étrangère ? Ils pourraient aussi être employés à d'autres tâches comme le nettoyage des chemins ou des ruisseaux. Le ministère va également reconduire le programme « Envie d'agir », en l'étendant aux créateurs d'entreprises. Même s'il ne s'agit pas de sommes très importantes, il y a eu près de 19 000 projets en 2004, parmi lesquels 3 544 ont été primés. Sans doute les jurys pourraient-ils se montrer moins sévères.

L'opération « Solidar'été » a permis à 8000 jeunes ne partant pas en vacances de bénéficier dans les établissements du ministère, d'activités ludiques et éducatives. Il est bon de mobiliser ainsi des équipements qui ne sont pas utilisés en été.

Dans l'action n° 4, « Protection des jeunes », on trouve en particulier des crédits destinés à la rénovation des centres de vacances et de loisirs.

Avec le programme « Conduite et pilotage de la politique du sport, de la jeunesse et de la vie associative », le ministère compte poursuivre la modernisation et la rationalisation de la gestion de ses établissements, en passant avec eux des contrats de performance et en externalisant des fonctions logistiques. Un effort justifié est également fait en faveur de la formation des personnels du ministère. La restructuration de l'administration centrale se poursuit avec la suppression de 14 équivalents temps plein dans les fonctions logistiques, et de 4 autres par la cessation de mises à disposition.

À la suite de l'important travail réalisé par la Mission d'évaluation et de contrôle (MEC), un avant-projet de décret sur les normes a été diffusé. Il a déjà suscité d'importantes réactions, en particulier de la part de certains responsables que la MEC avait auditionnés et qui avaient remis en cause l'avis du Conseil d'État. Si la concertation est certes indispensable, il faut aussi que le ministre avance, car il est absolument nécessaire de distinguer ce qui relève véritablement de la sécurité et des obligations de ce qui est destiné au spectacle et au commerce. On peut ainsi douter qu'il appartienne au contribuable local de payer pour la mise aux normes d'installations en vue de retransmissions télévisées très lucratives pour la Ligue nationale de football, et qu'il soit normal de demander aux municipalités de financer l'agrandissement d'un mètre d'un terrain de football quand un club passe en promotion d'honneur. Face aux réactions suscitées par l'avant-projet de décret, la Commission des finances a publié un communiqué de presse, et M. Jacques Pélissard est également intervenu, en qualité de président de l'Association des maires de France, pour soutenir la demande des collectivités locales.

Le Rapporteur spécial a indiqué que son rapport traite également du problème de ces jeunes pour lesquels un gros effort de formation est fait, en particulier dans les clubs de football et de basket-ball, et qu'un agent recruteur envoie, pour 100 000 euros, à l'étranger dès l'âge de quatorze ou de quinze ans. Il a par ailleurs souhaité insister sur le volontariat et le bénévolat, dont les communes comme les associations ont un grand besoin, et qui doivent être encouragés. S'agissant, enfin, du mécanisme du « coupon sport », il est vraiment indispensable de se tourner vers le conseil général ou vers l'État pour obtenir une subvention de 10 ou 20 euros ; ne conviendrait-il pas plutôt que les clubs trouvent eux-mêmes une solution, par exemple en ne faisant payer que la moitié du montant de l'adhésion ?

M. Jérôme Chartier s'est demandé si, dans le cadre de l'objectif de 300 millions d'euros d'économies budgétaires, l'on pourrait envisager la suppression de l'Institut national de jeunesse et d'éducation populaire (INJEP), dont l'utilité reste à démontrer et dont le train de vie du président l'a surpris. Il faut ouvrir davantage de formations de maîtres nageurs sauveteurs, sans lesquels il n'est pas possible d'assurer l'encadrement du public scolaire. Enfin, quel est l'engagement du gouvernement pour la préparation des Jeux olympiques d'hiver à Turin ?

M. Michel Bouvard, Président, a fait observer à ce dernier propos qu'il serait judicieux d'adopter, sans doute en loi de finances rectificative, l'amendement qui exonère habituellement d'impôt sur le revenu les primes perçues par les sportifs à l'occasion des Jeux.

S'agissant des normes, le droit de suite des travaux de la MEC est indispensable. Certes, le ministre prépare le décret, mais le Président Pierre Méhaignerie s'est étonné avoir reçu très récemment une note du ministère expliquant la position du Conseil d'État. Il est nécessaire d'améliorer les formations bi qualifiantes aux métiers du sport. Le ministère des sports a heureusement pris le relais de celui de l'Éducation nationale, mais il faut encore travailler. Les flux d'entrée dans les UFR de Sciences et techniques des activités physiques et sportives (STAPS) doivent être adaptés aux débouchés réels : laisser des jeunes se lancer dans ces formations sans possibilité d'emploi à la sortie est un gâchis humain et financier honteux. Enfin, il faut exercer une véritable pression sur les chaînes de service public, afin qu'elles remplissent les obligations de leurs cahiers des charges en matière de retransmissions des épreuves sportives. Il n'est pas normal qu'elles se contentent de diffuser des matchs de football, lucratifs en termes de recettes publicitaires, et qu'elles laissent, une fois les Jeux olympiques terminés, des sports, comme l'escrime, retomber dans l'anonymat. Il y a quelques années, la non-retransmission des épreuves de ski alpin avait même conduit la Fédération internationale à menacer la France de ne plus organiser de compétitions sur son sol.

M. Denis Merville, Rapporteur spécial, a apporté les éléments de réponse suivants :

- il ne s'est pas rendu à l'INJEP mais il était prêt à le faire l'an prochain. Est-il opportun de proposer la suppression de cet Institut à un moment où il convient surtout d'encourager l'éducation populaire ? L'INSEP, que fréquentent 600 à 700 sportifs de haut niveau, est en très mauvais état d'entretien ;

- la préparation des Jeux olympiques de Turin, qui seront la grande manifestation de l'année, représentera une large part des 3 millions d'euros destinés aux grands événements dans l'action « Développement du sport de haut niveau » ;

- les maires sont avisés par une lettre du ministre de l'attribution de crédits sur l'enveloppe nationale, du CNDS, mais ils sont moins bien informés lorsque les associations locales perçoivent de petites sommes au niveau régional. Sans doute conviendrait-il de demander un effort aux délégués régionaux ;

- s'agissant des normes, le ministre a décidé d'avancer et on peut donc espérer que le décret paraisse, vingt et un ans après l'adoption de la loi de 1984 ! Cela paraît d'autant plus indispensable que les élus locaux doivent acquitter des sommes considérables pour des motifs qui ne paraissent pas toujours relever de l'intérêt général. Est-il ainsi normal de devoir dépenser 33 000 euros parce que les impératifs du calendrier de la Ligue ont obligé à jouer un match sur un terrain gorgé d'eau ?

- s'agissant de l'entrée en STAPS, orienter les jeunes vers une filière sans débouché est anormal et peut entraîner des désillusions. Sans doute devrait-on demander à la Cour des Comptes de se pencher sur le sujet ;

- il convient d'améliorer la diffusion de tous les sports sur les chaînes du service public. En dehors des Jeux olympiques, même le basket-ball et le handball sont peu retransmis.

Après que le Rapporteur spécial a émis un avis favorable, la Commission a ensuite adopté les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».

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