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COMMISSION DES FINANCES,

DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN

COMPTE RENDU N° 56

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mardi 21 mars 2006
(Séance de 16 h 15)

Présidence de M. Charles de Courson, Secrétaire

SOMMAIRE

 

pages

- Audition de M. Jean Syrota, président de la Commission de régulation de l'énergie (CRE).

2

- Informations relatives à la Commission

9

La Commission a procédé à l'audition de M. Jean Syrota, Président de la Commission de régulation de l'énergie (CRE).

M. Jean Syrota, Président de la Commission de régulation de l'énergie (CRE) a rappelé que la Commission de régulation de l'énergie est une autorité administrative indépendante. Elle tire donc sa légitimité du contrôle que le Parlement exerce sur son action.

L'ouverture des marchés de l'électricité et du gaz à la concurrence a commencé en 2000. Elle met un terme à 55 ans de monopoles de commercialisation, d'importation et d'exportation. Ainsi, aujourd'hui, plus de 500.000 sites dans le secteur de l'électricité et plus de 70.000 dans celui du gaz ont déjà fait jouer leur éligibilité. Cela représente plus de 10 % des sites éligibles. Et le mouvement continue puisque, chaque mois, environ 30 à 50.000 sites pour l'électricité et 5.000 pour le gaz décident de se fournir en énergie sur le marché libre.

Aujourd'hui, les marchés de l'électricité et du gaz sont ouverts à 70 % environ. À peu près la moitié de la consommation des sites éligibles est pourvue par le secteur concurrentiel. Plus de 95 % des sites éligibles sont raccordés à un réseau sur lequel plusieurs fournisseurs sont présents.

Sur le fond, l'ouverture des marchés se passe sans problème particulier. Des groupes de travail ont été créés dès 2002 par la Commission. Cette initiative a permis de mettre autour de la même table, sous l'égide de la CRE, tous les acteurs concernés : représentants des producteurs, des fournisseurs, des clients et de l'administration. Il s'agissait de préparer le passage au 1er juillet 2004, de 3.100 à 4.500.000 sites éligibles pour l'électricité et de 1.200 à 640.000 pour le gaz.

L'objectif de ces groupes de travail était que tous ces acteurs se mettent d'accord sur les modalités pratiques de l'ouverture des marchés à la concurrence pour tous les professionnels, notamment en définissant les procédures du changement de fournisseur. La Commission est passée progressivement, à la demande des participants, du rôle de simple conciliateur à celui de décideur, tout le monde trouvant, finalement, son intérêt à ce que la CRE régule, même si la loi ne lui donne pas de pouvoir précis dans ce domaine. L'objectif posé par la Commission, à savoir que tout professionnel qui veut changer de fournisseur d'électricité ou de gaz ait la possibilité de le faire simplement et rapidement, semble avoir été atteint.

La CRE prépare de façon comparable, en intégrant des associations de consommateurs domestiques, l'ouverture des marchés à la concurrence à tous les consommateurs, le 1er juillet 2007. Tout porte à croire que l'ouverture des marchés aux ménages devrait se réaliser dans de bonnes conditions, comme cela a été le cas pour les professionnels.

Cette ouverture à la concurrence se passe, toutefois, dans un contexte défavorable à l'exercice de la concurrence, et, ce, pour quatre raisons.

Tout d'abord, expliquer l'intérêt de l'ouverture des marchés à la concurrence quand les prix des matières premières et de l'énergie flambent est une mission difficile, sinon impossible. Contrairement à ce que certains prétendent, l'augmentation des prix de l'énergie n'est absolument pas liée à l'ouverture des marchés à la concurrence. En effet, il n'y a pas de corrélation directe entre la concurrence et l'augmentation des prix de gros de l'électricité sur les marchés français, britanniques ou allemands, ouverts respectivement en 2000, 1990 et 1998. Il apparaît, par contre, une corrélation claire entre les prix de gros de l'électricité et ceux du gaz, eux-mêmes corrélés à ceux du pétrole.

Les tendances haussières des prix de l'électricité, depuis 2004 ; + 70 % en France, + 65 % en Allemagne, + 73 % en Grande Bretagne, sont dues à différents facteurs :

- des tensions progressives sur l'équilibre offre/demande en France, compte tenu de la quasi-stabilité de l'offre et de la hausse annuelle de la consommation, de l'ordre de 2 % ;

- le manque de transparence pour les fournisseurs alternatifs de la disponibilité du parc de production et, ainsi, des conditions de l'équilibre offre/demande ;

- la valorisation des émissions de C02, qui augmente les coûts de production des filières émettrices de C02 : fuel, gaz, charbon.

Ces tendances haussières se doublent d'une harmonisation des prix sur certains marchés régionaux (France/Allemagne notamment), qui résulte des possibilités d'importer et d'exporter de l'électricité en fonction des différences de prix avec les pays voisins.

Ensuite, deux logiques très différentes coexistent en matière de prix et de tarifs dans les secteurs de l'électricité et du gaz : les tarifs réglementés sont des tarifs de monopoles, fixés pour couvrir l'ensemble des coûts de l'entreprise intégrée, alors que les prix de marché de la fourniture sont fixés en fonction de l'offre et de la demande, présentes et à venir.

Le tarif réglementé de vente, ou tarif intégré, se compare à la somme du prix de la fourniture sur le marché et du prix d'utilisation des réseaux, qui a vocation à décroître - pour tenir compte du rendement croissant des activités de réseaux, ce qui constitue une des caractéristiques des monopoles naturels.

La CRE fixe les tarifs d'utilisation des réseaux et s'assure qu'ils permettent aux gestionnaires de couvrir leurs coûts. Dans le secteur de l'électricité, la CRE approuve, en outre, le programme d'investissements du gestionnaire de réseau de transport, ce qui lui permet de veiller efficacement au bon fonctionnement et au développement du réseau. Pour le gaz, la CRE n'a pas ce pouvoir d'approbation des investissements ; elle a donc choisi d'encourager le développement de nouvelles infrastructures, en octroyant un taux de rémunération plus élevé pour tous les nouveaux investissements : 9 % au lieu de 7,75 %, voire 12 % pour les investissements favorisant le développement de la concurrence et la sécurité d'approvisionnement.

Le décalage des tarifs réglementés avec les prix de marché s'accroît pour l'électricité. Pour le gaz, les tarifs réglementés ne couvrent plus la réalité de l'évolution des factures des fournisseurs depuis la fin de l'année 2005.

Les offres concurrentielles sur le marché ouvert ont, ainsi, trop peu de place pour être réellement attractives. La situation des fournisseurs alternatifs, qui achètent en gros pour revendre au détail, est de plus en plus difficile. Leur marge est limitée à quelques niches qui peuvent leur être accessibles dans les tarifs réglementés, et ils peuvent profiter des baisses des tarifs d'utilisation des réseaux. Les dernières sont intervenues à partir du 1er janvier 2006, pour le transport d'électricité, pour la distribution d'électricité et de gaz, ainsi que pour les terminaux méthaniers. La situation a été ainsi un peu améliorée, mais pas suffisamment pour compenser la hausse des prix sur les marchés.

De plus, les marchés de l'électricité et du gaz sont, aujourd'hui, fortement concentrés. Les opérateurs historiques y sont toujours très dominants, comme la Commissaire européenne à la concurrence vient de le rappeler à l'occasion de la publication du rapport préliminaire présentant les premiers résultats de l'enquête sectorielle sur les marchés de l'énergie. L'actualité récente montre que, non seulement les concentrations ne diminuent pas, mais qu'elles ont plutôt tendance à se développer.

Bien entendu, la situation des opérateurs historiques doit être mise en perspective. La sécurité d'approvisionnement en Europe ne sera assurée qu'au prix de lourds investissements à consentir dans les années à venir. Il faudra des acteurs industriels de grande taille pour les réaliser. Cette situation ne poserait pas de problème si les marchés pertinents de l'électricité et du gaz étaient d'envergure européenne. Mais, le marché unique de l'énergie n'est pas réalisé et les marchés pertinents sont, encore, largement nationaux. Dès lors, il existe d'importants risques d'ententes et de manipulations des prix, d'ailleurs souvent dénoncés.

Le bon fonctionnement de ces marchés implique de pouvoir s'assurer, à tout moment, de l'absence d'entrave à la concurrence : barrières à l'entrée, ententes, abus de position dominante, etc. Mais, en France, le fonctionnement des marchés de l'électricité et du gaz n'est pas surveillé systématiquement par une autorité indépendante. La CRE n'a pas ce pouvoir et le Conseil de la concurrence contrôle a posteriori, avec des délais d'instruction très longs et n'a pas développé une véritable expertise sectorielle.

Enfin, dans le cadre de l'ouverture des marchés à la concurrence, les directives communautaires ont prévu que les gestionnaires des réseaux, dans les groupes verticalement intégrés, doivent être gérés indépendamment des autres activités. Cette indépendance est fondamentale, car elle garantit aux fournisseurs alternatifs un accès non discriminatoire aux réseaux. Les réseaux sont au coeur du service public, en garantissant la continuité et la qualité de la fourniture d'énergie aux consommateurs.

La loi du 9 août 2004 a donné à la CRE la mission d'évaluer la réalité de cette indépendance, ce qu'elle a fait dans un premier rapport, qui a été publié le 5 décembre 2005. Des progrès doivent encore être réalisés, notamment afin de s'assurer que les opérateurs historiques n'entretiennent pas de confusion dans l'esprit des clients entre leurs activités concurrentielles et leurs activités régulées, par exemple, à l'aide de leurs logos.

Les comportements critiquables ne servent pas les intérêts des opérateurs. La séparation juridique n'est, en effet, qu'une étape des modèles de déréglementation mis en oeuvre par la Commission européenne, avant d'obtenir la séparation de propriété entre les activités des entreprises verticalement intégrées. Cette question est, d'ailleurs, régulièrement abordée par la Commission européenne. Il paraît certain que l'intégrité des groupes EDF et GDF ne pourra être maintenue que si l'indépendance des gestionnaires de réseaux est scrupuleusement respectée. Il faut se souvenir que la séparation de propriété des réseaux a déjà été réalisée, totalement ou partiellement, sans problème notable, dans bon nombre d'États membres de l'Union européenne.

La CRE, au cours de ses six premières années d'existence, s'est efforcée d'être reconnue comme un acteur crédible, indépendant et réactif. Elle a été active au plan européen, dans le cadre de la préparation du marché intérieur et a veillé à défendre l'image de la France, dont l'action des pouvoirs publics, jusqu'alors, avait plutôt été perçue comme cherchant à retarder, si ce n'est empêcher, l'ouverture des marchés.

La CRE a un budget de 17,3 millions d'euros et 120 emplois (ETPT). L'objectif de 150 emplois a été maintenu, chaque année, depuis 6 ans. C'est, en effet, le niveau de moyens que la Commission a constamment estimé nécessaire à l'accomplissement de ses missions. Le budget de la CRE est faible, comparé à ceux des autres autorités de régulation des secteurs de l'électricité et du gaz en Europe : 11 emplois pour 100 TWh en France, quand l'Espagne compte 31 emplois ou le Royaume-Uni 22.

Par ailleurs, l'indépendance budgétaire de la CRE, qui est un élément essentiel de son indépendance, n'est pas garantie. En effet, le budget de la CRE est proposé par le ministère de l'Économie, au Parlement, et une fois qu'il est voté, il fait l'objet des gels et annulations de crédits, appliqués comme dans le reste du ministère.

Une solution pour assurer cette indépendance budgétaire serait l'établissement d'une contribution des gestionnaires de réseaux ou d'une taxe affectée au financement de la CRE, à l'instar de ce que la quasi-totalité des États membres de l'Union européenne - Belgique, Espagne, Grèce, Irlande, Italie, Portugal, Royaume-Uni, ... - a prévu pour leurs autorités de régulation. Dans le cas de la CRE, cela représenterait une augmentation très minime (environ 0,2 euro/an et par consommateur), perçue sans bureaucratie supplémentaire, parce qu'elle pourrait avoir la même assiette que la CTA ou la CSPE.

M. Gilles Carrez, Rapporteur général, s'est interrogé sur l'articulation entre prix administré et prix du marché en ce qui concerne l'électricité. Si les prix français sont inférieurs aux prix européens, suite aux investissements publics effectués dans le secteur du nucléaire, l'avantage compétitif qui en résulte pour l'opérateur historique a vocation à être conservé. Dans ces conditions, la concurrence aura du mal à s'installer sur le marché national de l'électricité, car un acteur majeur bénéficiera d'une rente de situation. Si les prix du marché français sont alignés sur les prix du marché européen, il en résulterait une augmentation des moyens financiers de l'opérateur historique, et par conséquent, aussi, de l'État actionnaire.

M. Jean Syrota, Président de la Commission de régulation de l'énergie, a expliqué que la distinction entre prix du marché et prix réglementés résultait de deux logiques différentes : anticipation de l'offre et de la demande dans un cas, coût de production dans l'autre. Il faut ménager une phase de transition, limitée dans le temps, pour la convergence entre ces prix. On peut, par exemple, envisager une durée de six ans en ce qui concerne le marché de la consommation domestique de l'électricité.

Les prix du marché devraient être contrôlés, car il semble que les grands opérateurs ne soient pas en situation de concurrence réelle. En l'absence de régulation, les prix résulteraient de décisions conjointes. Par ailleurs, les fournisseurs historiques se donnent très peu de marge de négociation commerciale par rapport aux « prix spot » cotés. Les opérateurs indépendants ne peuvent pas non plus se fournir sur les marchés à terme, en raison de la trop faible liquidité de ces marchés.

La rente de situation dont bénéficie EDF, suite à ses investissements passés ne permet pas, pour autant, à l'opérateur historique de faire des bénéfices substantiels sur les tarifs réglementés.

M. Hervé Novelli a posé les questions suivantes :

- la CRE ne regrette-t-elle pas de ne pas pouvoir contrôler la régulation des prix du marché ? Il s'agirait d'un champ d'activité à développer d'une manière plus active, sans pour autant empiéter sur les compétences de la DGCCRF ;

- pour pouvoir asseoir un financement autonome de la CRE sur une taxe affectée, ne serait-il pas utile, au préalable, que la Commission puisse suivre la réalité du fonctionnement du marché, notamment par rapport au risque de cartellisation ;

- les moyens de la CRE ont-ils augmenté de manière parallèle à l'accroissement de ses missions ?

M. Alain Rodet a évoqué les points suivants :

- les modalités d'exercice de la tutelle budgétaire sur la CRE permettent-elles de garantir son indépendance ;

- des sanctions peuvent-elles être envisagées en cas d'entrave à la concurrence par les opérateurs ;

- la Commission encourage-t-elle des actions dans le domaine des économies d'énergie ?

M. Jean-Louis Dumont a posé les questions suivantes :

- n'y-a-t-il pas eu de régression dans la situation du gestionnaire du réseau de transport d'électricité par rapport aux exigences européennes, compte tenu de sa filialisation à EDF ;

- quelles réponses sont fournies par RTE aux difficultés d'accès au réseau qui sont constatées ;

- n'y-a-t-il pas, en France, de discrimination positive excessive en faveur de l'éolien, notamment par rapport à la valorisation de la biomasse ;

- la France est-elle vraiment en retard par rapport à l'Espagne ?

M. Michel Bouvard a demandé quelles garanties peuvent être accordées aux industriels, s'agissant de la durée de leur contrat de fourniture d'énergie. De trop fortes fluctuations de prix leur posent des problèmes de financement à long terme. La solution du consortium n'est pas nécessairement adaptée pour tous les acteurs concernés. Par ailleurs, quelle est la position de la CRE par rapport à la formule de revalorisation du tarif du gaz, qui semble devenue inadaptée aux réalités du marché ? Comme le montre l'exemple de la téléphonie mobile, la complexité des offres ne risque-t-elle pas d'entraver la liberté d'accès des consommateurs, compte tenu de la difficulté de disposer d'éléments de comparaison clairs ?

M. Charles de Courson, Président, a rappelé que, de l'avis de nombreux industriels, la concurrence sur le marché de l'énergie ne joue pas, tous les fournisseurs proposant les mêmes prix dans le cadre des appels d'offres.

M. Jean Syrota a souligné que, bien que la loi de 2000 ait confié ce pouvoir à la CRE, quand il a été demandé un certain nombre de renseignements à « EDF trading », celle-ci a profité d'une rédaction ambiguë de la loi pour limiter le nombre d'informations transmises. Voulant éviter de s'engager dans un contentieux long et coûteux, la CRE a proposé une modification de la loi qui lui permettait de saisir le conseil de la concurrence. Un amendement avait donc été voté en deuxième lecture au Sénat mais sa portée a été très sensiblement réduite en commission mixte paritaire. In fine, le pouvoir, essentiel, de surveillance des marchés échappe à la CRE. Le résultat est qu'aujourd'hui plus personne ne surveille en temps réel les prix sur le marché. Par ailleurs, s'agissant de la production normative dans le domaine de l'énergie, on constatera que quatre lois ont été votées depuis 2000 qui impliquaient 90 décrets qui n'ont pas encore tous été publiés. La situation est monstrueuse. Déjà en 2003, un recueil de 1.300 pages avait été nécessaire pour rassembler l'ensemble des textes relatifs à l'électricité et au gaz. S'agissant du financement et de l'autonomie de la CRE : le simple fait que la CRE fixe le tarif de l'accès au réseau justifierait un financement autonome. On constate que les moyens dont dispose la CRE aujourd'hui sont peu élevés par rapport aux autres pays européens. La CRE dispose aujourd'hui de 120 agents, il en faudrait à peu près 150.

Concernant la tutelle budgétaire, aujourd'hui le secrétaire général du ministère de l'économie est le responsable du programme au sein duquel figurent les crédits de la CRE. Une fois le budget voté par le Parlement, la CRE peut toujours être victime de gels ou d'annulations. En pratique, la responsabilité de la gestion est déléguée à la DPMA.

La CRE n'est pas compétente en matière d'économies d'énergie. Concernant les sanctions, celles-ci sont soit directes en raison d'une non-application d'une décision de la CRE, soit indirectes si un acteur ne respecte pas un règlement des différents. Aujourd'hui le nombre de saisines est peu élevé, d'une vingtaine par an, mais le passage à l'éligibilité pour tous pourrait augmenter ce nombre. En outre, la simple menace de sanctions (qui peuvent aller jusqu'à 5% du chiffre d'affaire en récidive) constitue une arme de dissuasion efficace.

L'indépendance du gestionnaire de réseau de transport est satisfaisante. Quand le processus de filialisation de RTE a été lancé, la nouvelle direction d'EDF a tenté d'en reprendre le contrôle, mais cette tentative a échoué.

M. Charles de Courson, Président, a indiqué qu'en page 21 du rapport il était pourtant écrit que « la nomination d'un membre du comité exécutif d'EDF en qualité de président du conseil de surveillance de RTE n'est pas conforme aux obligations communautaires relatives à l'indépendance. ».

M. Jean Syrota a reconnu ce point, mais il a indiqué que la situation était tout de même beaucoup plus satisfaisante que pour la distribution. Concernant le problème de l'énergie éolienne et de la biomasse, la CRE ne fait que donner un avis sur la conformité des tarifs aux dispositions de la loi. Pour l'instant, elle n'a eu l'occasion de se prononcer qu'une seule fois en donnant un avis négatif, car le prix de reprise prévu était très supérieur aux dispositions légales. Cet avis n'a pas été suivi.

La CRE approuve, par contre, l'ensemble des investissements de RTE, qui sont financés via le tarif d'accès au réseau, et elle incite à développer fortement les interconnexions avec les pays étrangers. C'est une priorité absolue. Mais il est parfois difficile d'obtenir les accords politiques indispensables pour certains projets. Tel fut le cas avec l'Espagne ou l'Italie. On notera néanmoins un doublement des capacités d'interconnexions avec la Belgique.

Concernant le problème des électro-intensifs, la Commission européenne a imposé, en échange du rachat, par EDF, d'ENW, la mise aux enchères d'un certain nombre de capacités de productions virtuelles. Cette vente doit permettre aux concurrents de l'opérateur historique de disposer de capacités de production en France. La multiplication du nombre de clients éligibles doit impliquer une augmentation parallèle des ventes de capacités virtuelles. En outre, ces ventes doivent se faire avec des échéances beaucoup plus longues qu'aujourd'hui, en lien avec le caractère nucléaire de la production, c'est-à-dire entre 15 et 20 ans. Aujourd'hui, lorsqu'EDF intervient massivement sur le marché, elle privilégie des prix SPOT et amène ainsi les autres opérateurs sur ces prix.

Lorsque Gaz de France achète du gaz, la revente est calculée sur la base de contrats d'achat à long terme. La CRE a procédé à la vérification de trois ans de factures d'achat de Gaz de France et a pu établir une relation claire entre le prix des produits pétroliers et le prix du gaz acheté. En somme, si la formule de calcul qui sert de référence aux contrats gaziers est la bonne, elle mérite d'être recalée de 80 millions d'euros environ. Un arrêté du 16 juin 2005 est inappliqué. Un retard cumulé de 750 millions d'euros est constaté par Gaz de France dans ses comptes, ce qui pourrait conduire à une augmentation du prix du gaz au 1er avril prochain, mais la CRE n'est pas encore saisie.

M. Charles de Courson, Président, a souhaité connaître les raisons de l'augmentation spectaculaire des profits de GDF.

M. Jean Syrota a indiqué que ces raisons sont à rechercher dans les marges de GDF sur ses participations dans des gisements. Ces bénéfices ne sont, en réalité, pas particulièrement spectaculaires au regard du chiffre d'affaires de GDF, par rapport à d'autres entreprises comparables.

S'agissant du prix de l'énergie pour les particuliers, on constate malheureusement que l'impact du développement technologique est beaucoup plus lent que dans un secteur comme celui de l'électronique... En Grande-Bretagne, le régulateur - aujourd'hui, « Energy Watch » - procède à des comparaisons périodiques de prix entre les différentes entreprises afin d'aider le consommateur à faire son choix : cette pratique pourrait, peut-être, inspirer le modèle français.

M. Charles de Courson, Président, a fait part de la préoccupation de nombreux industriels quant aux difficultés liées à l'application de la loi dite du « non-retour ». Est-il normal que les entreprises aient tant de difficultés à quitter la concurrence pour revenir chez EDF ?

M. Jean Syrota a estimé que la loi du non-retour est une pratique normale et que son assouplissement pourrait rendre le marché ingérable. Aujourd'hui, un choix est possible entre tarifs réglementés et concurrence : les entreprises doivent assumer les conséquences de ce choix, qu'elles ont souhaité.

M. Charles de Courson, Président, a précisé que l'absence de marchés d'approvisionnement à long terme implique que certaines entreprises ont du mal à s'approvisionner à 5, 8 ou 10 ans.

M. Jean Syrota a reconnu que si le marché ne fonctionne pas correctement aujourd'hui, il serait pire de revenir à la situation antérieure : il faut trouver les manières de mieux faire fonctionner ce marché et de régler les problèmes de long terme. La CRE a adopté une délibération en ce sens, dont la Commission européenne pourrait se saisir. Mais la CRE ne dispose pas du pouvoir d'imposer des règles.

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Informations relatives à la Commission

La commission des Finances, de l'Économie générale et du Plan a nommé :

- M. Patrice Martin-Lalande, Rapporteur pour information sur la LOLF et la société de l'information,

- M. Jean-Pierre Brard, Rapporteur pour information sur les tendances récentes du marché de l'immobilier en France.

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