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COMMISSION DES FINANCES,

DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN

COMPTE RENDU N° 68

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mardi 13 juin 2006
(Séance de 16 heures 15)

Présidence de M. Pierre Méhaignerie, Président

SOMMAIRE

 

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- Audition de MM. Thierry Breton, ministre de l'Économie, des finances et de l'industrie et Jean-François Copé, ministre délégué au Budget et à la réforme de l'État, Porte-parole du Gouvernement, sur le débat d'orientation budgétaire

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La Commission a procédé à l'audition MM. Thierry Breton, ministre de l'Économie, des Finances et de l'industrie et Jean-François Copé, ministre délégué au Budget et à la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement, sur le débat d'orientation budgétaire.

Le Président Pierre Méhaignerie a demandé aux ministres de remettre les lettres plafonds à la Commission, afin que celle-ci puisse travailler le plus en amont possible.

M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, a indiqué que le débat d'orientation budgétaire (DOB) s'intégrait dans la stratégie de désendettement annoncée lors de la conférence budgétaire de janvier par le Premier ministre, dans la continuité des conclusions du rapport de M. Michel Pébereau sur la dette de la France. Le budget 2007 constitue la première étape d'un plan de désendettement significatif pour revenir au déficit zéro. En 2007, la dépense de l'État progressera de 1 % de moins que l'inflation, soit une progression « zéro volume » moins 1 %, ce qui ne s'était pas vu depuis plus d'une vingtaine d'années. À ce DOB est par ailleurs associé pour la première fois un débat d'orientation sur le budget de la sécurité sociale.

Avec 0,54 % au premier trimestre, la croissance est solidement installée entre 2 et 2,5 %, hypothèse retenue pour le budget 2006. La consommation des ménages, premier moteur de l'activité, a très vigoureusement progressé au premier trimestre ; l'exportation, deuxième moteur de l'activité, poursuit son net redressement depuis l'été 2005.

L'inflation est toujours très contenue, à 1,7 % en avril sur un an, malgré la hausse du pétrole, et, dans la zone euro, elle reste maîtrisée à 2 %, voire un peu moins. Il n'y a donc pas de risque d'inflation.

Les marchés ont plutôt bien réagi à l'annonce de l'augmentation des taux d'intérêt américains, qu'ils avaient anticipée, et l'euro s'est même légèrement déprécié par rapport au dollar. La tendance est donc à une évolution modérée des taux, comme le préconise le gouvernement français. L'Allemagne, partenaire commercial principal de la France, sort d'une période difficile.

L'amélioration de la situation sur le marché de l'emploi se poursuit, avec un taux de chômage de 9,3 %, qui devrait passer au-dessous de 9 % courant 2006 et à 8,7 % d'ici un an. De nombreux emplois sont créés dans le secteur marchand, avant même la prise en compte des effets du contrat nouvelle embauche (CNE). L'ensemble des prévisionnistes a rejoint la fourchette de prévision de croissance du Gouvernement : 2 % pour le Fonds monétaire international (FMI), 2,1 % pour l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). La croissance, en 2007, devrait suivre le même rythme de 2 à 2,5 %, la plupart des conjoncturistes le confirment, même si cela reste insuffisant pour la France, dont l'objectif devrait excéder 3 %. Pour gagner ce combat, le Gouvernement accroît ses efforts en faveur de la recherche, modifie progressivement le modèle industriel et investit dans l'innovation, et cette volonté d'atteindre les objectifs de Lisbonne commence à porter ses fruits.

Le Gouvernement, pour la première fois depuis longtemps, a tenu l'objectif de 3 %, avec un déficit limité à 2,88 %. Parmi les grands pays européens en déficit excessif en 2003, seule la France est repassée sous la barre des 3 %, ce qui lui a valu un satisfecit du commissaire Joaquín Almunia pour sa gestion des finances publiques. Pour 2006, l'objectif, en matière de déficit, est de 2,8 %.

Le Gouvernement a aussi pris l'engagement de réduire l'endettement de la France d'au moins deux points de produit intérieur brut (PIB) dès 2006. Cela passe par une meilleure maîtrise des finances publiques, mais aussi par une gestion plus dynamique, au niveau étatique, de l'endettement public dans son ensemble : de nouveaux instruments financiers ont été créés afin d'éviter l'endettement « de confort » ; les organismes contribuant à la dette ont été placés sous contrôle étroit ; chacun est désormais pourvu d'une feuille de route. Sur les 2 % de baisse de la dette visés, un bon tiers du chemin a déjà été parcouru. L'exécution du budget 2006 est plutôt en avance, notamment en ce qui concerne les recettes.

Le Gouvernement s'est engagé à revenir, dès 2007, en deçà du déficit stabilisant, soit 2,5 %. Après quatre années de « zéro volume », le budget 2007 a été construit sur la base de moins 1 % en volume, et le « zéro valeur » a été appliqué en ce qui concerne Bercy. La baisse de dépenses contenue dans le projet de loi de finances permettra de financer la réforme fiscale votée dans la loi de finances pour 2006. Au terme d'une vague d'audit sans précédent, dont les résultats sont disponibles sur Internet, sur les 74 000 départs en retraite de 2007, 15 000 postes ne seront pas remplacés, dont 3 000 à Bercy, où des gains de compétitivité massifs ont été enregistrés, notamment grâce aux nouvelles technologies de l'information.

Sur la base d'un scénario de croissance à 2,25 %, avec moins 1 % en volume pour l'État, plus 1 % en volume pour les dépenses sociales et zéro volume pour les collectivités territoriales, le déficit des finances publiques serait nul et l'endettement serait ramené à 57 ou 58 % du PIB en 2010, ce qui constitue donc un objectif soutenable.

M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement, a souligné le caractère novateur de ce budget à trois titres :

- il suit une feuille de route : le désendettement, qui suppose une réduction du déficit et de la dépense publique, de manière non traumatisante pour le service public ;

- la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) est en vigueur ;

- le ministère du budget et le ministère de la réforme de l'État sont groupés, ce qui permet d'accompagner les ministres dans leur tâche : jamais les lettres plafonds n'ont été envoyées aussi tôt, jamais le DOB n'avait été aussi étayé.

Pour la première fois, la dépense publique baissera en volume. Les effectifs de fonctionnaires diminueront de 15 000, et cela ne se traduira aucunement par une baisse de la qualité des services publics rendus aux Français.

Les grandes priorités tracées par les lois de programmation sont financées : sécurité, justice, défense nationale, aide au développement. Les engagements pour l'avenir sont assumés : enseignement supérieur et recherche, infrastructures. Il est cependant possible de comprimer la dépense publique en analysant systématiquement les politiques publiques à travers une politique d'audits et de contrats de modernisation. Les cent audits réalisés à l'été, portant sur un montant de 100 milliards d'euros parmi les 266 milliards du budget de l'État, fondent très concrètement les propositions du Gouvernement. Parallèlement, deux chantiers transversaux ont été ouverts, sur les achats publics et la politique immobilière. Le Gouvernement s'est inspiré d'exemples étrangers puisés au Canada, en Grande-Bretagne ou à Singapour. Quant aux contrats de performance, pour les ministres, ils consistent à prendre des engagements concrets de réduction des effectifs en échange d'une modernisation du service public. Dans le même esprit, toutes les directions de Bercy ont signé un contrat d'objectifs et de moyens.

Aucun passe-droit n'a été accordé, tous ont accompli des efforts ; il n'y a ni gagnants, ni perdants. L'objectif est que les baisses d'effectifs ne se traduisent pas par un repli de la qualité des services publics. Contrairement à ce qu'affirmait un syndicaliste à la radio, le personnel de nettoyage des écoles, par exemple, n'est pas concerné. Les ambiguïtés habituelles sont levées dans la mesure où chacune des décisions est documentée. Dans l'éducation nationale, deux référentiels ont été suivis : les conclusions des rapports d'audit et la démographie.

La méthode suivie marque un changement d'époque, grâce à la LOLF et aux rapprochements entre les ministères du budget et de la fonction publique. Toutes les techniques modernes de communication permettant de réaliser des gains de productivité ont été mobilisées, à commencer par Internet et le jeu virtuel permettant à chacun de devenir ministre du budget. En tout cas, les Français sont très demandeurs de telles mesures.

M. Gilles Carrez, Rapporteur général, a estimé que ces orientations budgétaires, présentées pour la première fois dans une perspective pluriannuelle, sont bonnes : après quatre exercices respectant le zéro volume, un cran supérieur est franchi en 2007 avec moins 1 % en volume.

Côté recettes, la loi de finances 2007 est bouclée. Les deux grandes réformes de l'impôt sur le revenu et de la taxe professionnelle, ainsi que diverses mesures comme celles contenues dans la loi « Dutreil », représentent une baisse d'impôts de quelque 6 milliards d'euros. Une croissance de 2 à 2,25 % rapportera 10 à 12 milliards d'euros de recettes fiscales, dont il faudra déduire les prélèvements sur recettes opérés au profit de l'Union européenne et des collectivités territoriales, et les baisses d'impôt, soit un solde de 2,5 milliards d'euros.

Par ailleurs, il est souhaitable que la dépense fiscale soit le propre des lois de finances, la dispersion des dispositifs conduisant à des incohérences.

La stratégie de la majorité consiste à émettre des hypothèses prudentes, à bloquer la dépense et à affecter les surplus de recettes à la baisse des déficits. Mais à quel horizon le Gouvernement escompte-t-il arriver à un déficit stabilisé, qui se situe autour de 35 milliards d'euros ?

Le changement de culture est évident : l'application de la LOLF et l'amélioration sensible des systèmes comptables, combinées avec la démarche d'audit, permettent de justifier un objectif de dépenses qui, en d'autres temps, aurait paru hors d'atteinte. Et il s'agit, certes, de supprimer 19 000 emplois, mais aussi d'en créer 4 000 par ailleurs, soit un solde de 15 000. Il n'en reste pas moins que, sur des sujets comme le fonds de financement des prestations sociales agricoles (FFIPSA), les opérations militaires extérieures (OPEX), les frais de justice, les prélèvements sur recettes ou les dépenses fiscales, l'incohérence budgétaire demeure forte.

La majorité est soucieuse d'accompagner la consolidation de comptes de la Nation ainsi que le renforcement, la clarification et la stabilisation des règles comptables. Elle souhaite ne pas laisser à ses successeurs, quels qu'ils soient, la situation qu'elle avait trouvée en 2002 : il avait alors fallu élaborer en toute hâte une loi de finances rectificative pour tenir compte de 2,5 milliards d'euros de dépenses sous-estimées. Mais la Commission n'est pas inquiète, car la maîtrise de la dépense publique est effective et non artificielle, dans la mesure où elle s'appuie sur quatre années d'exécution et sur un travail d'audit extrêmement précis.

M. Didier Migaud a souligné le contraste entre la présente audition et celle du premier Président de la Cour des comptes, entendu le matin même. Les deux ministres font preuve de leur habituel talent pour faire prendre les vessies pour des lanternes. La réalité n'est pas conforme à ce qu'ils décrivent, loin s'en faut. Il suffit par exemple de lire les têtes de chapitre du rapport de la Cour des comptes sur la situation et les perspectives de finances publiques : « une situation de déficit excessive depuis 2002 », « un endettement en augmentation rapide », « un déficit public toujours parmi les plus élevés de la zone euro et de l'Union européenne », « un déficit structurel persistant », « une dette publique excessive exposée à une hausse des taux d'intérêt », « l'inadéquation persistante des hypothèses de croissance », « le dépassement constant des objectifs de dépenses », etc. Quelle que soit la majorité issue des urnes, il sera nécessaire d'adopter un collectif budgétaire, tant le projet de budget pour 2007 s'éloignera de la réalité.

La LOLF a des conséquences positives sur l'appréciation de la réalité, même si la lecture faite du rapport Pébereau par le ministre de l'économie est particulièrement orientée. Il est paradoxal que le Gouvernement s'engage à désendetter le pays après avoir accru la dette de près de dix points de PIB. Pourquoi les comptes publics restent-ils aussi dégradés après quatre ans d'une politique prétendument merveilleuse ? Comment le Gouvernement a-t-il pu creuser la dette de près de dix points de PIB avant de se rendre compte qu'il convenait de faire marche arrière ? Comment le Gouvernement définit-il donc la sincérité budgétaire ?

M. Hervé Mariton s'est enquis des hypothèses d'évolution du solde budgétaire des collectivités territoriales et de celui des comptes sociaux en 2007, ainsi que, globalement, du rythme d'effort permettant de parvenir au déficit zéro d'ici à 2010.

M. Charles de Courson s'est inquiété de l'incidence que pourrait avoir la forte hausse des taux d'intérêt, notamment en Allemagne, sur la croissance française et européenne. Le déficit stabilisant se situe non pas à 2,5 % mais à 1,7 % environ, et il baisse à mesure que les taux d'intérêt s'élèvent, que la croissance recule et que la dette s'alourdit. Dans ces conditions, comment le Gouvernement espère-t-il atteindre un niveau de déficit stabilisant ? Comment s'y prendra-t-il pour obtenir une croissance zéro en volume des dépenses des administrations publiques locales (APUL) et une croissance limitée à l'inflation, plus 1 %, des dépenses des administrations de sécurité sociale (ASSO) ?

Le bon objectif de croissance des dépenses de l'État n'est donc pas 0,8 % mais 0 %. Or ce ne serait possible qu'en supprimant la moitié au moins des postes libérés par des départs en retraite, soit 40 000 en 2007.

M. Jean-Claude Sandrier a ironisé sur le jeu Internet, que le Gouvernement aurait développé dans le but de réduire un déficit qu'il a lui-même créé. Comment le Gouvernement entend-il agir dans le domaine des dépenses fiscales ? Quelle dynamique économique espère-t-il provoquer avec un tel budget, considérant que les dépenses de fonctionnement induisent de l'activité et de l'emploi ? Les ventes d'actifs, qui se traduisent davantage par un appauvrissement que par un enrichissement, vont-elles vraiment cesser ? Enfin, et sans que cette question soit polémique, dans les établissements scolaires, le Gouvernement envisage-t-il de remplacer des éducateurs par des policiers ?

Le Président Pierre Méhaignerie a estimé que, dans un pays habitué à la dépense publique comme la France, il n'est pas si mal de parvenir à un tel résultat, mais que les problèmes de prélèvements sur recettes, d'avances de trésorerie ou de retards de crédits de paiement devaient être regardés en face. Les collectivités territoriales qui dépensent sont aidées par l'État au lieu d'être incitées à l'économie. Enfin, la France est le pays européen qui a le plus accru ses dépenses sociales : une étude récente montre que l'augmentation, en euros constants, est d'environ + 24 % sur dix ans pour une moyenne européenne de + 19 %. Il est donc totalement inapproprié de parler de « casse sociale ». Toutes ces dépenses sociales ne concilient pas efficacité et justice.

M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, a confirmé les chiffres avancés par le Rapporteur général et a assuré qu'aucune réforme fiscale supplémentaire n'est prévue. Le déficit stabilisant, d'un montant de 35 à 38 milliards, devrait être atteint aux alentours de 2008. Le taux de 2,5 % sera obtenu avec moins 1 % en volume pour les dépenses de l'État, plus 1 % pour les ASSO et avec les dépenses des APUL à l'équilibre.

L'Office statistique des communautés européennes (EUROSTAT) a contrôlé et validé les comptes de la France sans que cela soit contesté par la Cour des comptes, et la France est le seul des grands pays en situation de déficit excessif à être repassé au-dessous de la barre des 3 %. Entre 1997 et 2002, le service de la dette a atteint 50 milliards d'euros par an, soit un total cumulé sur cinq ans de 250 milliards d'euros, et la dette s'était accrue de 177 milliards d'euros, alors que la croissance était élevée et que tous les autres pays européens, hormis l'Allemagne, avaient commencé à se préoccuper du problème. La retraite à soixante ans et les 35 heures ont coûté respectivement 200 milliards et 100 milliards d'euros, qui ont généré des intérêts, et, avant de s'attaquer au problème de la dette, il a fallu corriger ces erreurs économiques.

M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement, a ajouté que, sur les points spécifiques comme le FFIPSA, les OPEX, les frais de justice ou les prélèvements sur recettes, le Gouvernement propose de rechercher des solutions avec la Commission et d'entamer de vraies discussions avec le Parlement à l'occasion du débat budgétaire de l'automne. Le Gouvernement a soigneusement répondu au rapport de la Cour des comptes et celle-ci, au demeurant, a constaté la régularité des comptes de l'État. À propos de la sincérité, le meilleur baromètre est effectivement EUROSTAT, qui examine dans le détail les comptes de tous les pays membre de la zone euro et a validé officiellement ceux de la France.

Ce budget prend date, car il va droit sur le chemin du désendettement, de la réduction du déficit et de la capacité à baisser la dépense publique sans porter atteinte à la qualité du service public. Le projet socialiste intègre-t-il ces quelques principes simples intéressant l'avenir de tous les Français ? Sera-t-il financé en augmentant les impôts, la dette ou les deux ? Pris de remords, les socialistes ne reviendront-ils pas au bon sens, comme toutes les gauches modernes européennes ?

La croissance des dépenses de l'État est à zéro depuis 2002, mais pas celle des dépenses des collectivités territoriales. Il importe de créer une nouvelle donne en imaginant la manière de maîtriser la dépense locale moyennant des engagements précis de l'État sur un gel des transferts de compétences et une association des collectivités territoriales aux grandes décisions les concernant, y compris celles relatives à la fonction publique territoriale.

Le débat sur les effectifs de l'éducation nationale est d'un autre temps. Il est souhaitable d'adopter une approche plus courageuse, car chacun sait que les augmentations d'effectifs ne constituent pas la réponse aux problèmes de l'éducation nationale. Alors que, en quinze ans, le système a perdu 500 000 élèves et gagné 97 000 professeurs, la situation ne s'est pas pour autant améliorée. Les manques sont plutôt ressentis dans les familles que dans les écoles, pour payer les cours particuliers, les établissements d'enseignement privés ou les voyages à l'étranger. Ce n'est pas un problème de moyens mais d'organisation, et la communauté enseignante est ouverte à des réformes. La gestion doit être effectuée au plus près du terrain, en tenant compte des besoins, des populations et des demandes des chefs d'établissement.

Les mauvaises nouvelles des branches famille et retraite sont à peu près équilibrées par les bonnes nouvelles de la branche chômage. Mais certaines dépenses sont extrabudgétaires. Sur le budget de l'emploi, par exemple, l'augmentation mécanique des charges sociales et la mobilisation de ressources nouvelles pour abonder directement le fonds pour l'allocation spécifique de solidarité (ASS) s'ajouteront aux crédits dédiés au budget.

M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, a précisé que le budget avait anticipé la légère hausse des taux d'intérêt, notamment en Allemagne, qui pourrait avoir un petit impact.

M. Philippe Auberger a relevé que le rythme de progression de la dépense publique était contenu pour la première fois sous le niveau de l'inflation et que le nombre de fonctionnaires est réduit.

D'après le premier président de la Cour des comptes, le déficit stabilisant s'établit à 1,7 % du PIB, alors que le rapport du sénateur Paul Girod l'évalue pour sa part à 2,4 %. Par quel calcul le Gouvernement parvient-il à 2,5 % ? Serait-il possible de procéder à un exercice de simulation avec diverses hypothèses, pour que cet indicateur intéressant ne devienne pas l'objet de polémiques ? Dans le cadre de l'effort de désendettement de l'État, des trésoreries d'établissements ou d'organismes publics seraient rattachées au trésor. S'il s'agit de trésoreries dormantes, il convient de les traiter dans la loi de finances rectificative et de diminuer d'autant les crédits qui ont été mis à disposition ; si l'utilisation des fonds est simplement différée, le niveau d'endettement public ne s'en ressent pas.

M. Michel Bouvard s'est interrogé sur la participation des administrations centrales à la diminution des effectifs, les administrations déconcentrées étant bien souvent les seules mises à contribution. Les vagues d'audit permettent de procéder à des économies de fonctionnement mais n'aboutissent pas toujours à des réformes de structures. Le travail sur les stratégies ministérielles de réforme (SMR) a-t-il été réutilisé ou est-il définitivement perdu ? Quelle part la loi de finances pour 2007 réservera-t-elle aux investissements, dont la faiblesse est chronique ? Quels indicateurs seront proposés s'agissant de la dépense fiscale ? Les reports de crédits excéderont-ils les 3 % fixés par la LOLF ?

M. Hervé Novelli a observé que les audits portent généralement sur la gestion et non sur les thématiques elles-mêmes. S'agissant du ministère de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement, un coût budgétaire de 22 à 23 milliards d'euros est lié à la compensation des allégements de charges sociales. Il serait utile de réfléchir aux finalités de cette masse, qui représente 1 à 1,5 point de PIB.

M. Jean-Yves Chamard a déclaré ne pas comprendre la décision d'embaucher 40 000 contrats d'avenir pour mettre un terme à la grève administrative des directeurs d'école de moins de cinq classes, qui ne bénéficient d'aucune décharge. La solution proposée ne peut en effet être pérenne. Comment les nouvelles mesures en faveur des personnes âgées dépendantes seront-elles financées, alors que le déficit de la sécurité sociale, année après année, est si difficile à compenser ?

M. Augustin Bonrepaux a accusé les ministres d'être coupés de la réalité en prétendant que les mesures annoncées n'auraient pas d'effets sur les services publics. Que se passe-t-il à la Poste, à la SNCF et à France Télécom ? Quand des écoles maternelles sont fermées, ce sont les collectivités territoriales qui prennent le relais à travers les crèches.

Le premier Président de la Cour des comptes a reconnu que les collectivités territoriales n'étaient nullement responsables de l'endettement de l'État et que, contrairement à ce dernier, leur endettement servait à enrichir le patrimoine. Or le Gouvernement s'inspire du rapport Pébereau pour condamner les collectivités territoriales. Il devrait commencer par suivre ses recommandations : ne pas baisser les impôts ; compenser exactement les charges ; laisser aux collectivités territoriales la liberté en matière de dépenses.

Le Gouvernement envisage de créer 40 000 emplois dans les écoles et 20 000 dans les établissements de personnes âgées, sous forme de contrats d'avenir, financés par les départements. C'est en contradiction totale avec l'objectif des contrats d'avenir, car les emplois en question ne courront que de septembre à juin, qu'ils aient abouti ou non à une insertion. Les titulaires d'un contrat d'avenir sont-ils toujours compris dans les statistiques des allocataires du RMI ? En tout cas, au terme de leur contrat, ils retombent dans le RMI.

Le Président Pierre Méhaignerie a fait état de la conviction, largement partagée d'après lui, selon laquelle les politiques publiques françaises ne souffrent pas d'une insuffisance de moyens mais d'une confusion des objectifs, d'un empilement des structures et d'une complexité des procédures. Les pouvoirs publics en sont au début d'une longue marche pour gagner des marges de productivité fantastiques au profit du pouvoir d'achat des Français.

M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, a expliqué que le rapport Pébereau préconisait de ne plus baisser les impôts après intégration de la réforme fiscale votée en 2005. Par ailleurs, c'est par confort que nombre d'organismes de l'État gèrent leur trésorerie sans avoir en tête son impact potentiel sur la dette. Il importe d'adopter une vision plus commune, plus coordonnée et plus dynamique de la gestion de l'endettement, comme c'est déjà le cas pour le déficit.

M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement, a rappelé que les reports, après avoir atteint un record historique de 14 milliards d'euros en 2002, étaient descendus à 9,7 milliards d'euros en 2005 et 4,6 milliards d'euros en 2006. Le combat continuera en 2007, y compris pour le ministère de la défense, qui a déjà contribué à l'effort. Il n'est pas question que les audits aboutissent uniquement à des améliorations de fonctionnement. Les SMR ont naturellement été poursuivies mais le Gouvernement a été bien au-delà en industrialisant le processus et en passant tous les crédits au peigne fin.

Les dispositifs sociaux ont également fait l'objet de nombreux audits, relatifs aux charges sociales, mais aussi à l'allocation adulte handicapé (AAH), à l'hébergement d'urgence, aux bourses d'enseignement supérieur ou à l'aide au logement. Pour les allégements de charges, le Gouvernement sollicitera le conseil d'orientation pour l'emploi, dont ce sera le premier sujet d'étude, et il faudra en débattre à l'automne, dans le prolongement des discussions de 2005.

Les 40 000 contrats aidés dans l'éducation nationale correspondent à la mobilisation d'une partie des contrats du plan de cohésion sociale. Ce ne sont pas des contrats pérennes, mais il n'est pas forcément souhaitable de pérenniser tous les emplois publics, car personne ne sait de quoi demain sera fait. Quoi qu'il en soit, la grande différence avec les emplois jeunes et les autres dispositifs existants, c'est que les anciens titulaires du RMI, signataires d'un contrat d'avenir bénéficient d'une formation et sont, par conséquent, en situation de revenir sur le marché de l'emploi.

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