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COMMISSION DES FINANCES,

DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN

COMPTE RENDU N° 79

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 30 août 2006
(Séance de 14 h 30)

Présidence de M. Pierre Méhaignerie, Président

SOMMAIRE

 

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- Examen pour avis des articles 4, 10, 11 et 12 du projet de loi relatif au secteur de l'énergie (n° 3201) (M. Hervé Novelli, Rapporteur pour avis)

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- Information relative à la Commission

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La Commission des finances a procédé à l'examen pour avis des articles 4, 10, 11 et 12 du projet de loi relatif au secteur de l'énergie (n° 3201), (M. Hervé Novelli, Rapporteur pour avis).

Le Président Pierre Méhaignerie a tout d'abord indiqué que s'agissant de l'application de l'article 40 de la Constitution, le seul problème original que pose ce texte est celui du seuil de détention du capital d'EDF et de GDF par l'État. Augmenter cette participation au-delà de la situation existante est évidemment irrecevable puisqu'il s'agit d'une charge. En revanche, augmenter le seuil plancher de cette participation au-delà de ce que prévoit le texte, tout en restant en deçà de la situation existante, est possible, sous réserve de gager pour l'État la perte des recettes qu'il aurait pu tirer de la cession d'une plus grande part du capital. Enfin, abaisser le seuil plancher de participation de l'État est toujours possible, sans gage, car il en résulte potentiellement un surcroît du produit de cession de participations.

Il convient donc de se fonder sur les seuils de détention actuels du capital par l'État pour prévoir que tout dispositif qui hisserait jusqu'à ce niveau la participation publique minimale devrait être gagé. C'est la formule la plus simple et chacun des groupes en a été avisé.

M. Hervé Novelli, Rapporteur pour avis, a indiqué que la Commission s'est saisie pour avis de quatre articles du texte : les articles 4, 10, 11 et 12. L'article 4 précise les conditions dans lesquelles les consommateurs industriels d'une part, et domestiques d'autre part, bénéficient des tarifs de vente réglementés d'électricité ou de gaz. Ce projet de loi prévoit l'ouverture complète des marchés de l'électricité et du gaz au 1er juillet 2007, tous les consommateurs finals, y compris les ménages, devenant éligibles. Les articles 10, 11 et 12 constituent le titre III, qui a trait à la privatisation de Gaz de France.

Un des objectifs du texte est d'accompagner la libéralisation des marchés du gaz et de l'électricité, afin qu'elle profite à tous. Un bref rappel du calendrier de l'ouverture de ces marchés montre que le législateur français a fait le choix d'une libéralisation progressive ; commencée en 2000 pour une partie des entreprises avec l'électricité, la libéralisation a été étendue à tous les professionnels pour l'électricité et le gaz en 2004. Le projet de loi prévoit l'ouverture complète des marchés en incluant les clients domestiques au 1er juillet 2007, date butoir fixée par la directive du 26 juin 2003.

Toutefois, en pratique, le marché français n'est pas très ouvert : environ 10 % des sites éligibles, représentant 35 % de la consommation française, ont exercé leur éligibilité. Mais parmi ceux-là, seul un tiers a changé de fournisseur, soit 10 % de la consommation française.

L'augmentation des prix de l'électricité observée actuellement n'est pas due à l'ouverture des marchés. Un certain nombre de marchés ont été ouverts à la concurrence sans que les prix n'aient augmenté. Un graphique, fourni par la Commission de régulation de l'énergie (CRE), prouve qu'il n'y a pas de corrélation entre les différentes étapes de l'ouverture du marché de l'électricité et l'augmentation des prix.

En ce qui concerne le marché du gaz, l'explication de la hausse des prix est relativement simple : les coûts d'approvisionnement issus des contrats à long terme liant Gaz de France à ses principaux fournisseurs sont indexés sur les produits pétroliers.

S'agissant de l'électricité, les prix d'une consommation de base sont passés de 23 euros par Mégawatheure en 2001, soit moins que le tarif réglementé, à environ 50 euros aujourd'hui. C'est en 2004 que les prix du marché ont dépassé les tarifs réglementés. Il y a donc eu une période pendant laquelle les entreprises qui ont exercé leur éligibilité ont profité du marché. La hausse des prix s'explique principalement par deux facteurs : l'amenuisement progressif de la surcapacité du parc de production français et le fait que le prix du marché de gros détermine le prix du marché aux clients finaux ; or, la principale destination des marchés de gros est l'exportation : dans les pays voisins, l'outil de production d'électricité est plus coûteux, ce qui pousse les prix français à la hausse.

Afin de remédier à ces dysfonctionnements, il faut accroître la transparence du marché. Pour cela, il est nécessaire de renforcer les pouvoirs de surveillance et de sanction de la CRE. M. Jean Syrota, ancien président de la CRE, avait même parlé de dysfonctionnements évidents lors de son audition par la commission des Finances, le 28 février 2006. Cinq amendements concernant les missions et les pouvoirs de la CRE, sur les marchés de l'électricité et du gaz, sont présentés à la commission des Finances.

Parallèlement, il faut permettre aux entreprises ayant exercé leur éligibilité de payer une facture d'électricité qui corresponde à une moyenne entre prix de marché et tarifs réglementés. Les entreprises qui ont opté pour le marché en exerçant leur éligibilité sont confrontées aujourd'hui à des prix élevés, au moment où leur fournisseur propose le renouvellement du contrat. Dans certains secteurs, le coût de l'énergie est un facteur qui pousse à la délocalisation. Un amendement prévoit de permettre aux clients pour lesquels le prix proposé est supérieur à 1,5 fois le tarif réglementé de leur catégorie, de revenir au tarif réglementé, pour la moitié de leur consommation. Ce retour partiel au tarif doit être compensé pour les fournisseurs qui ne bénéficient par de la production nucléaire ou de la production hydraulique, car la revente au tarif réglementé n'est pas rentable pour eux. Afin d'éviter la « fermeture » du marché, il est proposé un amendement prévoyant un mécanisme de cession d'une partie de la production nucléaire et hydraulique française aux fournisseurs des clients en France, à des conditions tarifaires privilégiées.

La privatisation de Gaz de France est juridiquement possible. L'avis rendu par le Conseil d'État retient que l'activité de Gaz de France ne constitue ni un monopole de fait ni un service public national au sens du neuvième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946. Il en résulte que rien ne fait juridiquement obstacle à la privatisation de Gaz de France.

La deuxième question consiste à savoir si cette privatisation est dans l'intérêt des Français. Le secteur de l'énergie est un secteur très capitalistique. Gaz de France doit grandir pour faire face à la concurrence. Les producteurs de gaz ambitionnent de devenir des fournisseurs de gaz. Or, le moindre investissement dans ce secteur coûte plusieurs centaines de millions d'euros. Gaz de France a donc besoin de capitaux importants pour se développer. Pour cela, il est nécessaire de supprimer le principe de la détention de 70 % du capital de Gaz de France par l'État, qui figure à l'article 24 de la loi du 9 août 2004. Cette limite ne figurait pas dans le projet de loi initial, lequel prévoyait que l'État détienne 50 % du capital d'EDF et de Gaz de France : c'est un amendement parlementaire qui a relevé ce seuil à 70 %.

Le mouvement de concentration du secteur gazier s'accélère en Europe. Tous les opérateurs cherchent à grandir. Les fournisseurs d'énergie doivent se préparer à l'ouverture complète des marchés européens de l'électricité et du gaz. Ils doivent pouvoir proposer aux consommateurs des offres combinées électricité-gaz. C'est pourquoi les activités de Suez et Gaz de France sont complémentaires, et le projet de fusion-absorption de Suez par Gaz de France doit être permis.

La troisième question importante est celle du niveau de la participation de l'État dans Gaz de France. Existe-t-il un niveau idéal ? Si oui, est-ce le tiers du capital ? La détention du tiers du capital permet de bloquer les décisions qui sont prises en assemblée générale extraordinaire, mais cette minorité de blocage ne permet pas de s'opposer à une offre publique d'achat (OPA). Au contraire, la fixation a priori de la part de l'État à 33% risque d'entraver la réaction à une éventuelle OPA hostile, en empêchant une augmentation de capital. La loi du 31 mars 2006 sur les OPA a même facilité les augmentations de capital en cas d'OPA hostile, en permettant à l'assemblée générale extraordinaire d'émettre des bons de souscription d'actions, et de les attribuer gratuitement à tous les actionnaires de la société avant l'expiration de la période d'offre publique.

La fixation a priori, dans la loi, de la part de l'État n'est donc pas souhaitable. De surcroît, elle bloquerait le développement de l'actionnariat salarié, ce que personne ne souhaite. À l'issue de la fusion, si l'État détient 34 % de l'ensemble, une seule augmentation de capital à destination des salariés sera possible. Ensuite, toute évolution sera bloquée car la limite de 33,33 % sera atteinte.

Il faut se souvenir du cas de France Télécom, dont le capital était bloqué par la fixation de la participation de l'État. La société s'étant ainsi lourdement endettée pour financer son développement, elle a frôlé la faillite.

Un amendement supprimant la fixation de la participation de l'État à un tiers est donc proposé. L'action spécifique prévue à l'article 10 du projet de loi suffit à garantir la sécurité d'approvisionnement du pays. Elle permettra de s'opposer aux décisions de cession d'actifs de la société qui seraient de nature à porter atteinte aux intérêts nationaux.

En conclusion, le Rapporteur a recommandé à la Commission d'émettre un avis favorable à l'adoption du projet de loi.

M. Philippe Auberger a souhaité revenir sur le problème du prix de l'électricité. Il est difficile d'accepter l'idée défendue par le Rapporteur selon laquelle la dérégulation n'a eu aucune conséquence sur les prix. Une étude de Nus Consulting Group, datée de mars 2006, a montré qu'entre 2001 et 2006, si le prix régulé a augmenté de 10,6 %, le prix dérégulé a, lui, augmenté de 75,6 %. Or les explications que l'on donne parfois à cette augmentation ne tiennent pas la route : la hausse du prix du pétrole ne saurait expliquer une hausse du prix de l'électricité française, majoritairement produite grâce à l'énergie nucléaire ; de même l'idée avancée par le professeur Jean-Marie Chevallier selon laquelle le coût de construction des nouvelles centrales nucléaires serait plus élevé que celui de la génération précédente ne doit pas être exagérée : ce coût n'explique pas un tel niveau de prix. Le coût de production de l'EPR était situé à 35 euros par Mgw. On le chiffre aujourd'hui à 50 euros.

Le Président Pierre Méhaignerie a qualifié ces chiffres de supercherie.

M. Philippe Auberger a estimé que si l'insuffisance des capacités de production pouvait en partie expliquer la hausse des prix, il n'est pas forcément légitime que ce soit le consommateur qui finance l'intégralité des investissements nécessaires. Aujourd'hui on a un peu le sentiment que l'on raconte tout et n'importe quoi pour expliquer cette hausse. Ainsi, quelle est l'incidence de la baisse des cours des émissions de CO2 sur les prix ? Il est indispensable que le Parlement dispose d'informations claires et objectives afin d'avoir une juste idée sur la formation des prix. On ne voit pas l'intérêt de donner plus de pouvoirs à la CRE, laquelle n'est pas infaillible, et dont le point de vue peut et doit être discuté.

M. Henri Emmanuelli a indiqué que son groupe s'interrogeait sur l'utilité de convoquer une session extraordinaire afin de traiter un sujet dont le caractère d'urgence ne va pas de soi, loin de là. Sur le fond, le groupe socialiste entend rétablir le calendrier réel et précis de l'ouverture du marché de l'énergie, calendrier avec lequel certains prennent aujourd'hui trop de libertés. En particulier, il est fréquemment oublié que le compromis de Barcelone de mars 2002 accepté par le gouvernement Jospin comprenait un certain nombre d'engagements quant aux obligations de service public, à l'organisation d'une régulation et à la sécurité des approvisionnements devant équilibrer l'ouverture du marché. Ce sont ces contreparties qui ont été abandonnées par le gouvernement Raffarin par la voix de sa ministre de l'industrie de l'époque, Mme Nicole Fontaine. En outre, ce compromis ne concernait nullement les ménages.

Il est inutile de mettre en avant les bienfaits théoriques de la privatisation que la réalité vient régulièrement démentir. On ne peut que constater un certain angélisme chez les défenseurs forcenés de la privatisation. Le fait est que l'on traverse une crise énergétique importante et que la situation ne va très certainement pas s'améliorer. Cette crise a des conséquences graves et immédiates, tant sur le pouvoir d'achat des ménages que sur la compétitivité des entreprises. On ne peut donc que s'étonner que le Gouvernement choisisse ce moment pour se dessaisir de sa responsabilité en matière de politique énergétique et préfère confier cette dernière à des actionnaires privés, dont l'intérêt sera évidemment de prélever le maximum de profits tant sur les ménages que sur les entreprises, comme le prouvent les hausses du prix de l'électricité décidées par EDF. Il ne s'agit pas d'un problème juridique, mais d'une question politique majeure. Nous avons en France aujourd'hui des entreprises publiques qui ont la responsabilité de l'approvisionnement, de la sécurité des installations et du prix de l'énergie. Et rien ne prouve que là où le secteur de l'énergie est privé cela se passe mieux, bien au contraire. On voit ainsi de nombreuses entreprises qui avaient, peut-être avec une certaine naïveté, fait le choix du prix dérégulé, venir aujourd'hui crier au secours, car la hausse du prix de l'énergie ponctionne l'intégralité de leur marge.

Il n'est pas trop tard pour que la majorité revienne à la raison. Si cela n'était malheureusement pas le cas, et si la majorité devait changer en 2007, la nouvelle majorité ne manquerait pas de revenir sur cette décision : un contrôle public est nécessaire sur ce secteur stratégique, sans que cela passe nécessairement par une nationalisation.

M. Charles de Courson a indiqué que le groupe UDF s'interroge sur la présence du titre III dans ce projet de loi. S'agissant de la transposition de la directive, celle-ci est nécessaire et l'on ne peut que regretter qu'elle intervienne si tardivement, puisque la France figure parmi les trois derniers pays à la transposer. Sur le problème du prix de l'électricité, si la libéralisation n'est pas, en tant que telle, en cause, on ne peut nier que la hausse est due à des tensions importantes sur le marché. Une approche raisonnable serait donc une réversibilité assortie d'un seuil : quand le prix du marché s'écarterait trop fortement, par exemple de 25 %, du prix régulé, il serait possible de revenir au prix régulé ; mais un engagement minimal de deux ans serait nécessaire. Cela pourrait répondre, en partie, aux importantes difficultés rencontrées par certaines entreprises.

L'amendement gouvernemental adopté par la commission des Affaires économiques sur cette question du tarif de retour, avec une remise qui représenterait la moitié du différentiel entre prix de marché et tarif régulé, ne résout pas le problème, tant que les prix du gaz et de l'électricité sur le marché libre continueront à dépendre d'un prix du pétrole trop élevé. La solution réside donc dans l'amendement du groupe UDF, qui instaure un mécanisme de réversibilité avec seuil ; le niveau de ce seuil, comme la durée de blocage des consommateurs dans un type de tarif donné, sont ouverts à la discussion.

S'agissant du marché gazier, il faut, là aussi, se féliciter de la transposition de la directive mais plaider, sur le plan tarifaire, pour une réversibilité avec seuil, pour les mêmes raisons et dans les mêmes conditions que sur le marché de l'électricité. La philosophie libérale du groupe UDF n'exclut pas d'encadrer le fonctionnement du marché libre.

Concernant la fusion entre Suez et GDF, le groupe UDF se montre beaucoup plus critique. Alors qu'une version, d'ailleurs expurgée, de la lettre de griefs de la Commission européenne devrait être prochainement disponible pour les parlementaires, la position définitive de Bruxelles ne sera connue que le 28 octobre prochain. Se pose donc un véritable problème de méthode : comment le Parlement peut-il raisonnablement se prononcer sur une fusion qui devra être assortie de contreparties, en particulier sous forme de cessions d'actifs, dont on ne connaît pas la teneur ? Peut-être se trouvera-t-on même dans l'impossibilité de respecter le seuil de 34 % de détention par l'État du capital de GDF ! La valeur de l'entreprise dépend d'éventuelles cessions.

Il existe également un problème de fond : ni l'intérêt de la France, ni celui de l'Union européenne ne sont respectés en l'espèce. Annoncée en catastrophe par le Premier ministre français, sans concertation avec le gouvernement belge, ni avec la partie italienne, qui a été poignardée, cette fusion est éminemment anti-européenne. Un autre problème est celui de la cohérence de la démarche de l'actuelle majorité, qui revient sur la position qu'elle avait adoptée il y a 18 mois, à la fois sur la question de la fusion multi-énergies et sur la question du seuil de détention publique d'EDF et de GDF. La détention de 34 % du capital de GDF n'a d'ailleurs pas grand sens, lorsque l'on connaît l'importance toute relative d'une minorité de blocage. En outre, légiférer aujourd'hui sur ce sujet, alors que l'avenir du marché de l'énergie est particulièrement incertain, paraît pour le moins inopportun. Il convient d'écarter les faux problèmes, comme celui du statut du personnel de GDF, qui ne sera pas touché, pour se concentrer sur de vraies questions. Par exemple, la pratique de l'action privilégiée est-elle « euro-compatible » ? Le Rapporteur s'est appuyé sur l'exemple belge de Distrigaz, mais il existe aussi des cas d'annulation de telles actions préférentielles par la Cour de justice des Communautés européennes, en l'absence d'intérêt national vital. Par ailleurs, il est ridicule de faire croire que le nouvel ensemble fusionné sera doté d'un poids accru dans les négociations gazières internationales. Chacun sait que les négociations avec les producteurs d'Algérie, de Russie ou de Norvège ne sont pas des négociations commerciales libres, mais impliquent les États. Quant à la synergie entre GDF et les activités environnementales de Suez, elle n'est pas évidente. Enfin, vanter un « partage de valeurs communes » entre les deux entreprises est tout simplement risible, voire insultant pour les députés.

Le Président Pierre Méhaignerie s'est dit perplexe sur ce projet de loi et a déclaré partager beaucoup des remarques émises par les différents intervenants. En premier lieu, il est patent que la CRE n'a pas jusqu'ici fait preuve d'une réelle autonomie, restant par exemple muette lorsque EDF a augmenté ses prix de 60 % sur le marché dérégulé. Des baisses de prix ont au contraire été demandées en Allemagne, quand il est apparu évident que la concurrence ne jouait pas. Deuxièmement, les informations communiquées aux parlementaires sur le prix de revient de l'EPR manquent sérieusement de fiabilité, laissant planer des doutes sur les intérêts poursuivis par EDF dans ce domaine. Troisièmement, il est nécessaire de rechercher aujourd'hui de nouvelles bases pour les tarifs dérégulés de l'électricité. Mais ce faisant, il faut se méfier à la fois d'un alignement trop marqué des prix sur le marché du CO2 et des conditions dans lesquelles sont actuellement signés certains contrats. Quatrièmement, le modèle intégré n'est plus viable pour les entreprises du secteur de l'énergie. Dès lors, il est regrettable que l'option proposée par MM. Jean-Claude Lenoir et Patrick Devedjian, prévoyant une séparation des infrastructures de réseaux de GDF, n'ait pas été retenue. Cinquièmement, le Rapporteur est réaliste lorsqu'il s'interroge sur la pertinence du seuil de détention publique de GDF, mais il faut se garder de trop compliquer le dossier sur ce point. Enfin, l'intérêt industriel de la fusion entre GDF et Suez n'est pas discutable s'agissant des investissements, de la production et de la distribution, mais il ne faut pas se cacher le problème qui se pose concernant les infrastructures de transport.

M. Michel Bouvard a souligné que ce débat est la dernière occasion d'aborder la question du prix de l'électricité sous la présente législature. Or, ce prix n'est pas sans incidence sur le pouvoir d'achat des ménages, ni sur la pérennité de certaines industries de base dans notre pays, qui représentent plus de 130.000 emplois. En la matière, ce que contient le projet de loi ne change rien au prix de l'électricité payé par les industriels : il n'apporte pas les garanties nécessaires à l'heure des choix. Alors qu'au prix d'importants efforts, il a été possible de créer un consortium dans le but d'offrir des tarifs privilégiés aux industries électro-intensives, les prix proposés dans ce cadre sont finalement les mêmes que ceux qu'avaient annoncés le président d'EDF lors de son audition devant la commission des Finances. Pourtant, de tels tarifs sont en décalage complet avec la réalité des coûts de production, comme en témoignent une étude de la direction générale de l'énergie et des matières premières réalisée en 2003 - qui aboutissait à un coût de 30 euros par MWh -, un rapport de l'inspection générale des finances et du conseil général des mines de 2004, ainsi que les déclarations de l'ancien président d'EDF - retenant des coûts de l'ordre de 35 à 37 euros par MWh. Un tel décalage, de même d'ailleurs que le décalage observable entre l'électricité produite par l'EPR en Finlande et celle qui sera produite par l'EPR en France, mérite la constitution d'une mission d'information pour connaître la vérité des coûts. En toute hypothèse, le projet de loi ne répond pas aux attentes des industriels. Ce projet mérite par ailleurs d'être amendé pour que soit créée, sur le modèle allemand, une possibilité de tarif spécifique au profit de sites situés à proximité d'une unité de production. Enfin, l'État doit jouer dans le secteur énergétique son rôle d'actionnaire majoritaire plutôt que de laisser le champ libre à la CRE, qui n'a pas jusqu'à présent démontré toutes les qualités dont elle se pare : tout ce qu'elle demande, c'est la création d'une taxe qui lui soit affectée.

M. Jean-Jacques Descamps a précisé que l'on ne doit pas perdre de temps car les marchés européens et mondiaux sont en train de se réorganiser rapidement et que les industriels qui ont exercé leur éligibilité et qui veulent revenir au tarif régulé sont dans une situation difficile.

Il y a contradiction à raisonner de façon exclusivement française - et vouloir conserver l'avantage du nucléaire en termes de prix - alors que le marché est libéralisé en Europe. L'Union européenne doit rapidement se remettre en situation d'équilibre du marché entre l'offre et la demande, grâce notamment à l'émergence de grands groupes industriels. La nécessité d'investir est évidente. Ainsi le président d'EDF déclarait récemment qu'il devait investir plus de 24 milliards d'euros en 5 ans pour équilibrer l'offre et la demande. Mais la culture populaire et salariale en France n'est pas habituée à des évolutions aussi rapides.

La solution qui a été choisie de maintenir le choix entre le tarif règlementé et le secteur libre est difficile à tenir. Dans l'amendement de la Commission des affaires économiques, on ne comprend pas bien dans quelles conditions EDF et Suez prendraient en charge les compensations dues aux autres producteurs, ce qui constituerait d'ailleurs une renationalisation du marché sur la base de deux producteurs. La proposition avancée par M. Charles de Courson, sur la réversibilité à seuil du retour au tarif, est préférable. Par ailleurs EDF se trouve dans une situation dominante, et ses pratiques tarifaires risquent de poser des problèmes juridiques au regard des règles européennes de la concurrence. La CRE devrait être plus directive et ses pouvoirs de régulation sur les prix devraient être renforcés. Une CRE puissante qui régule le marché est préférable au maintien d'une participation prédéfinie de l'État dans les entreprises énergétiques françaises.

Il est erroné de dire que l'intérêt des consommateurs dépend du niveau du pourcentage de l'État dans GDF. C'est le management de cette entreprise qui génère des bénéfices, pas l'État. En outre, le niveau de participation de l'État est condamné à baisser, comme l'a fait remarquer le Rapporteur pour avis. De plus comment justifier une participation dans GDF à hauteur de 34 %, alors qu'elle est de 70 % dans EDF ? La solution semble donc dans la formulation proposée par le Rapporteur pour avis, qui prévoit que l'État « doit conserver une participation » dans le capital de GDF, avec une action spécifique. Contrairement à ce qu'avancent les présidents d'EDF et de GDF, il faut séparer clairement la production, le transport et la distribution, que tous les consommateurs utilisent. La production doit être totalement libéralisée et privatisée ; par contre l'État pourrait garder une certaine participation dans le transport et la distribution d'énergie, qui gagneraient à être mutualisés entre les différentes sources.

En réponse aux intervenant, M. Hervé Novelli, Rapporteur pour avis, a cité les statistiques de la CRE, qui montrent qu'il n'existe pas de corrélation entre l'ouverture des marchés et la hausse des prix de gros.

Dans notre pays, la rente du nucléaire a été liée à l'investissement de la puissance publique ; ce qui a bénéficié aux consommateurs a, en fait, été financé par les contribuables. On a ensuite remplacé le contribuable par le consommateur, mais c'est toujours le Français qui paye... D'une certaine manière, l'émergence du marché européen de l'énergie se traduit maintenant par une captation de la rente nucléaire française au profit des consommateurs européens. Ce n'est que la conséquence de l'acceptation de l'ouverture des marchés de l'énergie, lors du Conseil européen de Barcelone en 2002, par le gouvernement français de l'époque.

La lettre de griefs de la Commission européenne sur la fusion GDF - Suez n'inquiète pas outre mesure les présidents de ces deux entreprises, dans la mesure où elle n'a pas conclu à la nécessité de se séparer des réseaux de transport.

M. Henri Emmanuelli a indiqué qu'il est étonnant que personne ne demande à M. Gérard Mestrallet pourquoi aucun pôle énergétique n'a, pour l'instant, été créé.

M. Didier Migaud a demandé que le texte intégral non expurgé de cette lettre de grief soit communiqué à la Commission des finances, dans le cadre des pouvoirs de son Président et de ses rapporteurs spéciaux. Il est essentiel que le point de la cession d'actifs soit transmis, car il pourrait remettre en cause encore davantage la pertinence du projet de loi. A défaut, le Parlement serait amené à s'exprimer sur un texte de loi sans disposer de tous les éléments.

M. Charles de Courson a indiqué que la Commission européenne avait accepté de transmettre le document à la Commission des affaires économiques, expurgé de certains éléments confidentiels portant sur les marchés.

M. Philippe Auberger a rappelé que la loi sur les privatisations de 1986 ne permet pas au Parlement d'exercer un contrôle a priori sur les actifs à céder.

M. Henri Emmanuelli a alors estimé que dans ces conditions il fallait accepter de « se faire voler sans rechigner ».

M. Philippe Auberger a souligné que la loi sur la sécurité financière a précisé la notion d'initié, dont la liste précise est arrêtée, et qui ne peuvent divulguer d'informations auxquelles ils ont accès. Les autres personnes n'ont donc pas accès aux informations qui peuvent avoir des conséquences sur les marchés financiers.

M. Hervé Novelli, Rapporteur pour avis, a rappelé que la lettre de grief devrait être transmise expurgée des informations commerciales confidentielles, et qu'il serait normal qu'elle soit mise à la disposition des membres de la commission des Finances. Mais il ne faut pas se tromper de texte, le présent projet de loi ne concerne que le niveau de la participation de l'État dans le capital de GDF, pas le projet de fusion avec Suez.

M. Henri Emmanuelli a déclaré que les deux sujets sont indissociables et que les députés français ont le droit de vérifier que le patrimoine national n'est pas bradé.

M. Hervé Novelli, Rapporteur pour avis, a estimé que l'on ne pouvait en même temps reprocher à la CRE d'être impuissante et refuser de renforcer ses pouvoirs. C'est la raison pour laquelle il faut élargir ses pouvoirs de régulation des marchés.

M. Henri Emmanuelli a demandé qui contrôle la CRE.

M. Hervé Novelli, Rapporteur pour avis, a rappelé que les membres de la CRE sont désignés au niveau politique. Ce système d'agence fonctionne correctement, ici comme ailleurs.

Il n'y a aucune logique à ce que, dans un univers concurrentiel, un fournisseur d'électricité ou de gaz possède les réseaux de transport et de distribution, alors que tous les fournisseurs doivent emprunter les mêmes réseaux. Il ne serait pas choquant qu'une entité chargée de ces réseaux, qui constituent une sorte de monopole naturel, continue à être détenue par des capitaux publics.

M. Charles de Courson a stigmatisé la contradiction qu'il y aurait à individualiser le réseau de distribution de gaz et obliger légalement à une participation de l'État d'au moins 34 %, puisqu'on retire une très grosse partie de la valeur de l'entreprise si on enlève les réseaux. Il faut rappeler l'article 31 de la loi de finances rectificative de 2001 où le gouvernement de l'époque a supprimé les concessions gazières et vendu le réseau du Sud-Ouest à Total et GDF, tout en recapitalisant GDF, qui n'était que concessionnaire d'un réseau détenu par l'État. On a alors fait une énorme erreur, car avec des concessions on aurait pu beaucoup plus facilement appliquer une maîtrise unique, sous le contrôle de l'État, des réseaux de transport et de distribution.

Puis la Commission a procédé à l'examen des articles dont elle est saisie.

TITRE IER

OUVERTURE DES MARCHÉS ET LIBRE CHOIX DES CONSOMMATEURS

Articles additionnels avant l'article 4 :

La Commission a examiné, en discussion commune, trois amendements :

- le premier présenté par le Rapporteur prévoyant que lorsque le prix de l'électricité dépasse 150 % du tarif réglementé, le client peut demander à bénéficier de ce tarif pour la moitié de la consommation du site ;

- le deuxième de M. Charles de Courson prévoyant que le consommateur qui a exercé son éligibilité depuis plus de deux ans peut bénéficier d'un retour au tarif réglementé lorsque le prix de l'énergie dépasse de plus de 20 % ce tarif ;

- le troisième de M. Didier Migaud renvoyant à une loi le soin de fixer le retour au tarif réglementé dans les quatre mois suivant l'autorisation de la Commission européenne de mettre en place une telle loi.

M Hervé Novelli, Rapporteur pour avis, a jugé indispensable la mise en place d'un mécanisme de retour aux tarifs réglementés. Le dispositif de l'amendement qu'il propose présente l'avantage de laisser perdurer un lien avec le marché. En revanche, la question du seuil de déclenchement du retour au tarif peut largement être débattue et faire l'objet d'une synthèse.

M. Charles de Courson a souligné que l'amendement de M. Hervé Novelli ne porte que sur l'électricité. En outre, le dispositif est conçu pour ne s'appliquer que pendant une durée de deux ans.

Le Président Pierre Méhaignerie s'est déclaré perplexe sur le seuil de 20 % préconisé par M. Charles de Courson.

M. Hervé Novelli, Rapporteur pour avis, a jugé que le défaut majeur de l'amendement de M. de Courson est qu'il prévoit un retour pur et simple au tarif.

M. Henri Emmanuelli a rappelé que lors de leur audition les représentants des industries ont demandé un retour au prix réglementé.

M. Didier Migaud a indiqué que dans la mesure où des milliers d'emplois étaient en jeu, le retour à un tarif réglementé devait s'exercer sans condition.

Le Président Pierre Méhaignerie tout en rappelant son attachement à un mécanisme de modulation tarifaire, a rappelé que certains industriels ont profité au début de l'ouverture d'un tarif sur le marché inférieur au tarif régulé. Il convient donc de prévoir un mécanisme intermédiaire entre les deux amendements.

M. Didier Migaud, en défendant son amendement, a rappelé que la discussion de ce texte ne se déroule pas dans des conditions satisfaisantes. L'abaissement de la participation de l'État au capital de GDF se fait alors même qu'on ne dispose pas d'éléments d'information sur la position de la Commission européenne. Il convient de souligner que si la majorité précédente a admis le principe de l'ouverture du capital, celui-ci était alors assorti de conditions protectrices du consommateur et ne s'appliquait pas aux ménages. Ces conditions ont disparu du fait de la position prise par le gouvernement Raffarin. S'agissant du retour au tarif, celui-ci doit pouvoir s'exercer de façon simple.

M. Charles de Courson a estimé que le mécanisme proposé par son amendement permet de plafonner l'écart entre le tarif de marché et le tarif régulé, puisque le consommateur aura la possibilité, tous les deux ans, d'arbitrer entre ces deux tarifs.

Le Président Pierre Méhaignerie s'est déclaré favorable à la proposition formulée par M. Charles de Courson sous réserve d'une augmentation du seuil autorisant le retour au prix réglementé, afin de donner à EDF les moyens d'assurer les investissements lourds auxquelles elle doit faire face dans les prochaines années.

M. Hervé Novelli, Rapporteur pour avis, a estimé que le dispositif ainsi proposé consiste à revenir au tarif réglementé, tandis que son amendement permet de conserver un lien avec le prix du marché, ce qui est souhaitable.

M. Philippe Auberger en a souligné la facilité de mise en œuvre du mécanisme proposé par M. Charles de Courson et a proposé que le retour au tarif réglementé soit assorti d'une majoration dans la mesure où les clients éligibles ont bénéficié jusqu'en 2004 de tarifs inférieurs à ceux réglementés. Il a suggéré que cette majoration soit fixée entre 20 % et 30 % du tarif réglementé.

La Commission a alors examiné un sous-amendement de M. Nicolas Perruchot à l'amendement de M. Charles de Courson tendant d'une part à relever à 25% l'écart entre le prix de vente de l'énergie et le tarif régulé qui autorise le consommateur éligible à retourner au tarif réglementé, d'autre part à assortir ce tarif d'une majoration de 20%.

La Commission a adopté l'amendement de M. Charles de Courson, ainsi modifié. De ce fait, les deux autres amendements sont devenus sans objet.

Puis la Commission a examiné un amendement du Rapporteur pour avis prévoyant que les fournisseurs qui disposent de moins de 10 % de la capacité de production ont accès à un volume d'électricité à un tarif privilégié.

Le Rapporteur pour avis a précisé que cet amendement consiste à mettre à disposition des producteurs alternatifs un volume d'électricité au prix auquel EDF le cède aux distributeurs non nationalisés.

Évoquant le cas de petites centrales hydrauliques, M. Henri Emmanuelli a regretté que l'on donne ainsi une rente de situation, artificielle, à des intérêts privés.

M. Michel Bouvard s'est étonné qu'un producteur d'électricité à partir de l'éolien ou du gaz, donc produisant moins de 10% de l'électricité sur le territoire, puisse avoir accès à l'électricité nucléaire au tarif EDF, alors qu'EDF est obligée d'investir de manière importante et sur le long terme.

M. Philippe Auberger s'est interrogé sur l'opportunité de subventionner de la sorte des projets comme celui d'une centrale au charbon dans la Nièvre. Le Rapporteur pour avis a précisé qu'il s'agissait d'aider les petits producteurs d'énergie à conserver leurs clients éligibles.

Le Président Pierre Méhaignerie s'est déclaré favorable à l'amendement du Rapporteur. Il a estimé qu'il est normal que les producteurs alternatifs bénéficient d'une part de l'électricité au tarif EDF, sans quoi la faculté pour le consommateur de revenir au tarif régulé les fera disparaître. Ces petites entreprises apportent des services aux entreprises et favorisent la concurrence entre les grands groupes d'énergie.

Le Rapporteur pour avis a précisé que seule la production d'origine nucléaire ou hydraulique est visée.

La Commission a adopté cet amendement.

Article 4 : Conditions d'accès aux tarifs réglementés

La Commission a tout d'abord examiné un amendement de M. Michel Bouvard visant à permettre aux nouveaux sites de consommation de bénéficier de tarifs réglementés. Le Rapporteur pour avis s'étant déclaré favorable à cet amendement, la Commission l'a adopté. De ce fait, un amendement de M.  Michel Bouvard sur le maintien des tarifs réglementés pour des clients professionnels, faibles consommateurs, est devenu sans objet.

Puis la Commission a rejeté quatre amendements de M. Didier Migaud, soutenus par M. Henri Emmanuelli.

- le premier pour fixer les tarifs réglementés de l'électricité en fonction des coûts de revient des installations existantes et des investissements futurs ;

- le second procédant de la même manière pour le gaz ;

- le troisième maintenant la possibilité d'un tarif réglementé d'électricité en cas d'adhésion à une offre multi-énergie ;

- le quatrième prévoyant le même dispositif pour le gaz naturel.

Puis la Commission a adopté l'article 4, ainsi modifié.

Après l'article 4 :

La Commission a examiné un amendement de M. Michel Bouvard prévoyant un tarif de transport spécifique en cas de ligne directe entre un site de consommation et une installation de production électrique.

Le Rapporteur pour avis a indiqué qu'il est défavorable à cet amendement en raison des risques de distorsion de concurrence ainsi créés.

M. Michel Bouvard a indiqué qu'il assumait cette distorsion, souhaitable en la matière, car pour les entreprises concernées, le prix de revient de l'énergie représente entre 20 et 40 % du coût des produits finis. Une prime pour les consommateurs électro-intensifs situés à proximité des sites de production se justifie au regard des enjeux industriels et des économies d'énergie qui en découlent.

M. Philippe Auberger a souligné qu'il n'y avait pas de définition précise d'une « ligne directe ». Que se passe-t-il en cas de circuits dérivés ?

M. Jean-Jacques Descamps a observé qu'aucun autre fournisseur d'électricité ne serait en mesure de fournir le client bénéficiant du tarif de « ligne directe » en raison du coût du transport de l'électricité, et a souligné qu'il s'agissait là d'une vraie distorsion de concurrence.

M. Henri Emmanuelli s'est interrogé sur la pertinence de la tarification de « ligne directe » pour les entreprises installées près d'une centrale nucléaire, qui génère déjà un avantage de taxe professionnelle et qui ne produit pas d'électricité « blanche », même si on comprend la justification de l'amendement pour certaines vallées en zone de montagne.

La Commission a rejeté cet amendement.

Articles additionnels après l'article 4 :

La Commission a examiné un amendement de M. Hervé Novelli, Rapporteur, prévoyant que la CRÉ surveille la formation des prix et les transactions sur les marchés de l'électricité.

Après que M. Jean-Louis Dumont ait insisté sur l'application de ce dispositif aux bourses d'électricité, la Commission a adopté cet amendement.

Puis la Commission a adopté :

- un amendement du Rapporteur pour avis conférant à la CRÉ un pouvoir réglementaire supplétif pour le secteur de l'électricité ;

- un amendement du même auteur étendant le pouvoir de sanction de la CRÉ aux manquements aux règles de stockages de gaz naturel, après que M. Henri Emmanuelli a souligné que ce dispositif ne vise pas la sécurité mais les règles de concurrence, ce qui est totalement paradoxal ;

- un amendement du Rapporteur pour avis prévoyant que la CRÉ surveille la formation des prix et des transactions sur les marchés du gaz naturel.

La Commission a ensuite examiné un amendement du Rapporteur pour avis prévoyant que le programme d'investissement relatif au transport de gaz est soumis à l'approbation préalable de la CRÉ.

M. Philippe Auberger a rappelé qu'il n'y avait que des capitaux publics dans la filiale de transport de gaz naturel et que l'État devait de toute façon être majoritaire. Dans ces conditions, le programme d'investissement est naturellement arrêté par l'État.

Le Président Pierre Méhaignerie a souhaité ne pas rendre les procédures plus complexes.

La Commission a rejeté cet amendement.

TITRE III

DISPOSITIONS RELATIVES AU CAPITAL DE GAZ DE FRANCE ET AU CONTRÔLE DE L'ÉTAT

Article 10 : Part du capital d'EDF et de Gaz de France détenue par l'État, modalités de contrôle public sur Gaz de France et ses filiales et autorisation de privatisation de Gaz de France

La Commission a tout d'abord rejeté un amendement de M. Didier Migaud, défendu par M. Henri Emmanuelli supprimant l'abaissement à 70 % du capital d'EDF et au tiers du capital de Gaz de France de la participation de l'État dans ces entreprises.

Elle a ensuite rejeté un amendement du même auteur, soutenu par M. Henri Emmanuelli prévoyant que l'État détient plus de 87,2 % du capital d'EDF et plus de 80,1 % du capital de GDF.

M. Henri Emmanuelli a rappelé que si les réseaux restent publics, il n'est pas possible de dire que 34 % du capital de l'entreprise restent publics.

Elle a ensuite examiné un amendement du Rapporteur substituant à la mention du tiers du capital de GDF le principe selon lequel l'État conserve une participation à ce capital.

Le Rapporteur pour avis a précisé que cet amendement permet de conserver une cohérence en évitant d'avoir à fixer a priori le niveau de participation de l'État alors que les modalités de fusion ne sont pas connues.

M. Philippe Auberger a souligné que si le niveau de participation de l'État est fixé à 33 1/3 % comme prévu par le gouvernement, GDF ne pourrait distribuer de stock options, puisque l'augmentation de capital qui en résulterait diminuera mécaniquement la part de l'État dans le capital. Mais il a considéré que le seuil de 33 1/3 % est un palier important, s'agissant de la minorité de blocage, qui permet à l'État, outre l' « action spécifique », de faire valoir ses intérêts.

M.  Henri Emmanuelli a souligné le lien ainsi établi entre les stock options et la diminution de la part de l'État dans le capital de GDF, qui se traduit par une augmentation du prix du gaz payé par les consommateurs.

M. Jean-Jacques Descamps a indiqué que si l'État devait conserver ce niveau de participation et si l'on veut que l'infrastructure de transport soit publique, cela impliquera que l'État rachète des titres pour faire remonter sa part dans le capital. De ce fait, il est nécessaire de voter l'amendement, si on veut que le réseau de transport soit public.

Tout en déclarant comprendre la logique de cet amendement, le Président Pierre Méhaignerie a souhaité son rejet, afin de ne pas ouvrir un champ de polémique quant au rôle de l'État.

La Commission a rejeté cet amendement.

La Commission a ensuite rejeté trois amendements de M. Didier Migaud, soutenus par M. Henri Emmanuelli.

- le premier permettant à l'État de faire opposition en cas de cession d'actifs stratégiques de l'entreprise, en soumettant celle-ci à une autorisation préalable du ministre ;

- le deuxième ouvrant la même faculté en cas de mise en garantie d'actifs ;

- le troisième prévoyant l'autorisation préalable du ministre en cas de cession de 5 % du capital de l'entreprise.

La Commission a adopté l'article 10 sans modification.

Article 11 : Propriété du capital et règles applicables à la société gestionnaire du réseau de transport de gaz issue de la séparation juridique de Gaz de France

La Commission a adopté l'article 11, sans modification.

Article 12 : Autorisation de privatisation de la production, du transport et de la distribution du gaz naturel

La Commission a adopté l'article 12, sans modification.

Puis la Commission a adopté l'ensemble du projet de loi ainsi modifié.

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Information relative à la Commission

La commission des Finances, de l'économie générale et du plan a reçu, en application de l'article 58-2 de la LOLF, un rapport d'enquête de la Cour des comptes sur les exonérations des cotisations sociales.

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