COMMISSION des LOIS CONSTITUTIONNELLES,
de la LÉGISLATION et de l'ADMINISTRATION GÉNÉRALE
de la RÉPUBLIQUE

COMPTE RENDU N° 1

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mardi 5 octobre 2004
(Séance de 10 heures 30)

Présidence de M. Robert Pandraud, président d'âge
puis de M. Pascal Clément, président
et de M. Jean-Luc Warsmann, vice-président

SOMMAIRE

 

Pages

- Élection du Bureau de la Commission

2

- Examen, en application de l'article 88 du Règlement, des amendements au projet de loi portant création de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité (n° 1732) (M. Pascal Clément, rapporteur) (amendements)



3

Présidence de M. Robert Pandraud, président d'âge.

La Commission s'est réunie en vue de procéder à la nomination de son Bureau.

· Élection du président

La Commission a été saisie de la candidature de M. Pascal Clément.

La Commission n'étant saisie que d'une seule candidature, M. Pascal Clément a été proclamé président de la Commission.

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Présidence de M. Pascal Clément, président.

· Élection des vice- présidents

La Commission a été saisie des candidatures de MM. Jean-Luc Warsmann, Xavier de Roux et Arnaud Montebourg.

Le nombre de candidats n'étant pas supérieur à celui des postes à pourvoir, MM. Jean-Luc Warsmann, Xavier de Roux et Arnaud Montebourg ont été proclamés vice-présidents de la Commission.

· Élection des secrétaires :

La Commission a été saisie des candidatures de MM. Jean-Christophe Lagarde, Victorin Lurel et Alain Marsaud.

Le nombre de candidats n'étant pas supérieur à celui des postes à pourvoir, MM. Jean-Christophe Lagarde, Victorin Lurel et Alain Marsaud ont été proclamés secrétaires de la Commission.

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En conséquence, le Bureau de la Commission est ainsi constitué :

-  Président M. Pascal Clément

-  Vice-présidents MM. Arnaud Montebourg

Xavier de Roux

Jean-Luc Warsmann

-  Secrétaires MM. Jean-Christophe Lagarde

Victorin Lurel

Alain Marsaud

Tout en soulignant que le groupe Député-e-s Communistes et Républicains n'avait pas présenté de candidatures au Bureau afin d'éviter les incidents de l'année précédente, M. Michel Vaxès a déploré que son groupe soit privé d'un poste au sein du Bureau de la commission des Lois. Il a jugé que cette exclusion de fait était en contradiction avec l'esprit du courrier adressé à chaque député par le Président de l'Assemblée nationale, M. Jean-Louis Debré, plaidant pour le respect du pluralisme et de la démocratie dans le fonctionnement des assemblées parlementaires. Il a souhaité que la commission des Lois respecte cet état d'esprit, à l'image de ce qui est pratiqué d'ailleurs dans d'autres commissions, telles que la commission des Finances.

Le Président Pascal Clément a rappelé les dispositions réglementaires qui attribuent un poste de vice-président et de secrétaire par fraction de trente membres de la Commission. Il a jugé qu'en vertu de ces dispositions, le nombre de membres de la commission des Lois ne permettait pas de confier un poste à chaque groupe ; s'agissant des groupes de la majorité, il a rappelé qu'un accord avait été passé permettant de garantir ce pluralisme. Il a considéré en conséquence qu'il appartenait aux groupes de l'opposition de s'entendre de la même manière pour assurer la présence de tous les groupes.

M. Bernard Derosier a déclaré souscrire à la demande de son collègue communiste. Il a néanmoins considéré qu'une telle décision dépendait d'un accord de l'ensemble des groupes, et non du groupe socialiste dont la représentation au Bureau est déjà très en deçà de ce que le premier groupe de l'opposition serait en droit d'attendre.

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Puis, statuant en application de l'article 88 du Règlement, sous la présidence de M. Jean-Luc Warsmann, vice-président, la Commission a examiné, sur le rapport de M. Pascal Clément, les amendements au projet de loi portant création de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité (n° 1732).

Articles additionnels avant l'article 1er :

La Commission a été saisie de l'amendement n° 16 de M. Patrick Bloche prévoyant que la loi définit tous les cinq ans les objectifs de la politique publique de lutte contre les discriminations et de promotion de l'égalité. Après avoir indiqué que le projet de loi constituait une première étape dans la lutte contre les discriminations dont il conviendrait d'observer les résultats avant d'envisager une extension de son champ d'application, le rapporteur a jugé que le dispositif proposé par cet amendement était excessif et prématuré et la Commission a repoussé cet amendement.

Elle a ensuite repoussé l'amendement n° 27 de Mme Martine Billard tendant à incriminer les propos homophobes, sexistes ou discriminatoires envers les personnes en raison de leur handicap ou de leur état de santé.

Article 1er : Statut et compétence :

Après avoir repoussé l'amendement n° 35 de Mme Martine Billard étendant le champ de compétence de la Haute autorité à toutes les catégories de discriminations, y compris celles qui ne sont pas prohibées par la loi, la Commission a repoussé l'amendement n° 5 de M. Frédéric Dutoit prévoyant que la Haute autorité a également pour mission de promouvoir l'égalité des chances, le rapporteur ayant fait observer que cette disposition était satisfaite par le texte du projet de loi.

Article 2 : Composition :

La Commission a été saisie des amendements n° 6 de M. Frédéric Dutoit et n° 17 de M. Patrick Bloche, modifiant la composition de la Haute autorité afin d'y faire siéger des représentants des syndicats et des associations qui agissent contre les discriminations. M. Michel Vaxès a observé qu'il était souhaitable que la Haute autorité comprenne en son sein des représentants des associations dont la vocation est, précisément, de lutter contre les discriminations. M. Patrick Bloche a indiqué que la composition de la Haute autorité prévue par le projet de loi accordait une part trop importante aux représentants désignés par les autorités de l'État, telles que le Président de la République ou les présidents des assemblées, au détriment des représentants de la « société civile », comme les syndicats ou les grandes associations de lutte contre les discriminations. Le rapporteur a tout d'abord indiqué que la Haute autorité, parce qu'elle devait être indépendante, ne saurait, au risque de ne plus être impartiale, être composée de militants associatifs dont la cause est la lutte contre les discriminations, étant précisé que rien n'empêcherait les autorités de nomination de désigner des responsables associatifs. Il a ensuite observé que l'article 2 prévoyait que la Haute autorité pouvait décider la création d'organismes consultatifs permettant d'associer à ses travaux des personnalités qualifiées et que les membres des syndicats et des associations de lutte contre les discriminations y auraient, dans ce cadre, toute leur place. Réagissant aux propos du rapporteur, M. Jérôme Lambert a considéré que les associations de lutte contre les discriminations devaient trouver leur place au sein de la Haute autorité, et non simplement être associées à ses travaux au travers d'un autre organisme, puisqu'elles détenaient une légitimité en cette matière qui ne saurait être contestée. Suivant son rapporteur, la Commission a repoussé ces amendements.

Elle a ensuite été saisie de l'amendement n° 29 de Mme Martine Billard, prévoyant que la composition de la Haute autorité devait respecter le principe de la parité entre les hommes et les femmes. Soutenant cet amendement, M. Philippe Vuilque a souligné que la Haute autorité devait être exemplaire dans sa représentation et, partant, être paritaire dans sa composition. Tout en jugeant souhaitable que les autorités de nomination des membres de la Haute autorité respectent la parité, M. Jean-Luc Warsmann, président, et le rapporteur ont fait observer que cette règle ne pouvait s'appliquer qu'aux autorités désignant deux membres, ce que ne prévoyait pas l'amendement qui était, en conséquence, inapplicable. Après que M. Guy Geoffroy eut souligné l'imprécision de la rédaction de cet amendement, la Commission l'a repoussé. Puis, par coordination avec ses précédents votes, la Commission a repoussé les amendements n° 30 de Mme Martine Billard et n° 18 de M. Patrick Bloche.

Elle a ensuite été saisie de l'amendement n° 31 de Mme Martine Billard précisant que l'organisme consultatif dont la Haute autorité peut décider de la création est composé des représentants des associations, des syndicats et des institutions régulièrement déclarées ayant une activité dans le domaine de la lutte contre les discriminations. Tout en se déclarant favorable à cet amendement, le rapporteur, en soulignant l'imprécision de la notion d'institutions régulièrement déclarées, a invité la Commission, qui l'a suivi, de l'accepter, sous réserve de modifier sa rédaction, afin de faire référence aux organisations professionnelles et à toute autre personne ayant une activité dans le domaine de la lutte contre les discriminations.

Article 3 : Saisine :

La Commission a été saisie de l'amendement n° 19 de M. Patrick Bloche tendant à permettre aux victimes de discriminations de saisir de la Haute autorité soit directement par écrit, soit par l'intermédiaire d'un syndicat ou d'une association de lutte contre les discriminations.

S'opposant à cet élargissement, le rapporteur a souligné l'exigence d'une procédure simple pour assurer la défense des plus faibles, objet de la Haute autorité, et rappelé qu'il appartenait au pouvoir réglementaire et non au législateur de déterminer les modalités précises de la saisine.

M. Philippe Vuilque, faisant le parallèle avec la loi du 16 novembre 2001 qui permet, en matière de discrimination devant l'emploi, aux syndicats de se porter partie civile en accord avec les victimes, a fait valoir qu'en pratique il était souvent plus facile aux syndicats et aux associations de se porter devant la justice, et que l'amendement répondait à une préoccupation d'efficacité.

M. Philippe Edmond-Mariette a estimé qu'il n'était pas envisageable de créer un nouvel instrument juridique en retrait sur les lois existantes et a insisté sur la nécessité d'un soutien à des personnes en situation de faiblesse, notamment psychologique.

M. Jean-Luc Warsmann, président, ayant observé que cette argumentation venait plutôt au soutien de l'amendement n° 33 de Mme Martine Billard, qui permet une saisine directe par les associations ou les parlementaires, le rapporteur a considéré que les amendements nos 19, 33 et 34 auraient pour conséquence d'établir des filtres procéduraux.

M. Robert Pandraud a relevé que si les parlementaires servaient de filtre pour les saisines aussi bien devant le Médiateur de la République que devant la Commission nationale de déontologie de la sécurité, la transposition de ce rôle devant la Haute autorité, étendu de surcroît à des associations, risquait de déboucher sur la multiplication des saisines et une situation d'agitation permanente.

M. Patrick Bloche a considéré que, faute d'adoption de l'amendement n° 19, les associations ou les syndicats seraient incités à se porter devant les juridictions, affaiblissant d'autant la fonction de médiation qui est le principal objet de la Haute autorité.

M. Guy Geoffroy a fait valoir que l'exigence d'une saisine par écrit alourdirait la procédure et risquait d'engendrer des contradictions avec d'autres dispositions de la loi. M. Christian Decocq, pour sa part, a mis en garde contre le risque de déshumanisation du fonctionnement de la Haute autorité lié à l'intervention d'intermédiaires.

M. Jean-Pierre Soisson a insisté pour que le législateur prenne soin de ne pas empiéter sur le pouvoir réglementaire. Craignant que des précisions excessives ne réduisent la portée du texte, il a jugé préférable de préserver la simplicité de la procédure.

M. Guy Geoffroy, jugeant la rédaction de l'article 3 équilibrée, a rappelé qu'elle autorisait la Haute autorité à se saisir d'office, éventuellement à la suite de saisines informelles, et que son alourdissement en réduirait la portée.

M. Xavier de Roux a approuvé ce point de vue en insistant sur la distinction entre la saisine par représentation admise par le projet de loi et la saisine par substitution proposée par l'amendement.

La Commission a alors repoussé l'amendement n° 19, puis les amendements nos  33 et 34 de Mme Martine Billard.

Article 4 : Recueil d'informations auprès des personnes privées :

La Commission a repoussé l'amendement n° 36 du même auteur.

Article 6 : Médiation :

La Commission a examiné l'amendement n° 20 de M. Patrick Bloche tendant à renforcer les missions de la Haute autorité dans le domaine de l'assistance aux victimes.

Après que le rapporteur eut souligné la complexité du dispositif proposé, M. Xavier de Roux a estimé l'amendement contraire à la neutralité de la Haute autorité, qui doit elle-même remplir une fonction médiatrice et non assister le demandeur dans un éventuel recours. M. Patrick Bloche a pris acte du désaccord sur les missions de la Haute autorité, traduisant la confrontation de deux philosophies différentes. Après que M. Philippe Edmond-Mariette eut partagé le souhait de renforcer la fonction de médiation, la Commission a repoussé l'amendement n° 20.

Puis elle a accepté l'amendement n° 15 rectifié de M. Julien Dray tendant à préciser la rédaction de l'article pour prévoir que la Haute autorité peut procéder ou faire procéder à la résolution amiable des différends, après que le rapporteur se fut déclaré favorable à cette disposition, de nature à éviter que la saisine de la Haute autorité ne dissuade de former les recours nécessaires devant les tribunaux et que M. Xavier de Roux se fut interrogé sur la faculté laissée par l'amendement à la Haute autorité.

Article 14 : Actions de promotion de l'égalité, études et proposition de modification de la législation ou de la réglementation :

Après avoir repoussé les amendements nos 7, 8 et 10 de M. Frédéric Dutoit, la Commission a accepté l'amendement n° 9 du même auteur tendant à préciser que la Haute autorité identifie et reconnaît toute bonne pratique en matière d'égalité des chances.

Article additionnel après l'article 16 :

La Commission a adopté un amendement du rapporteur transférant à la Haute autorité les personnels du Groupe d'étude et de lutte contre les discriminations. Elle a ensuite repoussé l'amendement n° 40 de M. Patrick Bloche, les amendements nos 41 à 46 de Mme Martine Billard élargissant la notion de discrimination aux distinctions fondées sur l'identité de genre, ainsi que l'amendement n° 28 du même auteur tendant à définir la discrimination indirecte à l'article 122-25 du code pénal.

Avant l'article 17 :

La Commission a repoussé les amendements n° 11 rectifié de M. Frédéric Dutoit et n° 24 de M. Victorin Lurel tendant à supprimer la référence à la notion de race.

Article 17 : Transposition de la directive n° 2000/43 du 29 juin 2000 :

La Commission a adopté un amendement du rapporteur visant à transposer le principe de non-discrimination en matière d'affiliation à une organisation syndicale ou professionnelle, explicitement visé par la directive du 29 juin 2000, puis elle a repoussé les amendements n° 21 rectifié de M. Patrick Bloche et n° 38 de Mme Martine Billard élargissant le principe de l'égalité de traitement à tous les motifs de discrimination énumérés à l'article 225-1 du code pénal, ainsi que les amendements n° 13 de M. Frédéric Dutoit et n° 25 de M. Victorin Lurel visant à supprimer la référence à la notion de race.

La Commission a ensuite été saisie de l'amendement n° 22 de M. Patrick Bloche tendant à aménager la charge de la preuve également devant les juridictions administratives, M. Philippe Edmond-Mariette ayant rappelé que les derniers rapports du Haut Conseil à l'intégration mentionnaient l'existence de pratiques discriminatoires au sein de l'administration. Le rapporteur ayant indiqué qu'une telle mesure était inappropriée en raison du caractère inquisitorial de la procédure devant les juridictions administratives, la Commission a repoussé cet amendement, ainsi que l'amendement identique n° 37 de Mme Martine Billard.

Après l'article 17 :

La Commission a repoussé l'amendement n° 39 de Mme Martine Billard visant à obliger les employeurs à informer les salariés des dispositions prohibant les discriminations au travail.

Article 19 : (article 9 de la loi n° 2001-1066 du 16 novembre 2001 relative à la lutte contre les discriminations) : Suppression du service d'accueil téléphonique des victimes de discriminations raciales :

La Commission a été saisie des amendements n° 4 de Mme Anne-Marie Comparini et n° 23 de M. Patrick Bloche tendant à supprimer cet article. Mme Anne-Marie Comparini a souhaité le maintien du service d'accueil téléphonique d'aide aux victimes, qui est connu du public, et exprimé sa crainte que la suppression de la disposition législative le prévoyant soit particulièrement mal perçue. M. Philippe Vuilque a estimé que si une réforme de ce service était envisageable, sa suppression n'était pas souhaitable. Le rapporteur ayant rappelé que l'abrogation de l'article 9 de la loi du 16 novembre 2001 s'expliquait par l'insuccès de l'accueil téléphonique actuellement en place, qui sera remplacé par un nouveau service dans des conditions fixées par la Haute autorité elle-même, la Commission a repoussé ces deux amendements.

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