COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES, DE L'ENVIRONNEMENT ET DU TERRITOIRE

COMPTE RENDU N° 7

(Application de l'article 46 du Règlement)

Jeudi 16 octobre 2003
(Séance de 10 heures)

Présidence de M. Patrick Ollier, Président

SOMMAIRE

 

pages

- Audition de M. Hervé GAYMARD, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales


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- Examen pour avis des crédits pour 2004 :

 

- Pêche (M. Aimé KERGUERIS, rapporteur)

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- Agriculture (M. Antoine HERTH, rapporteur)

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La Commission a entendu M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales, sur les crédits de son département pour 2004.

Après avoir remercié le ministre de sa présence, le Président Patrick Ollier a salué le respect, dans un contexte budgétaire difficile, des engagements pris devant la Commission s'agissant des aides à l'installation des jeunes agriculteurs et de la revalorisation des indemnités compensatoires de handicaps naturels (ICHN). Il a souligné l'attachement des commissaires à ces soutiens, compte tenu de leurs racines agricoles et dans la perspective de la prochaine discussion du projet de loi relatif au développement des territoires ruraux.

Il a par ailleurs félicité le ministre pour son implication continue au mois d'août dans la gestion de la crise provoquée par la sécheresse. Il a jugé infondées les critiques de la presse sur cette question, compte tenu de l'importance des aides mises en place, en liaison avec la Société nationale des chemins de fer français (SNCF) et le ministère de la défense, pour faciliter le transport de fourrage.

Il a enfin estimé nécessaire d'analyser les conséquences agricoles de l'échec, le 14 septembre dernier, des négociations de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) à Cancún.

M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales, a remercié la Commission de l'accueillir pour évoquer le budget de son ministère pour 2004, ainsi que l'ensemble des sujets liés à l'actualité agricole, au premier rang desquels la crise provoquée par la sécheresse et la suite de l'échec des négociations de l'OMC à Cancùn.

Il a d'abord souhaité effectuer une présentation globale des crédits consacrés à l'agriculture. Il a ainsi indiqué que, s'agissant du niveau européen, la France était structurellement le premier contributeur de la politique agricole commune (PAC), à hauteur de 14,2 milliards d'euros, les sommes qui lui sont reversées par l'Union européenne s'élevant à 11,8 milliards d'euros. Il a par ailleurs rappelé que l'Union européenne consacrait près de la moitié de son budget aux dépenses agricoles, mais que celles-ci ne représentaient qu'entre 1 et 2 % de l'ensemble des dépenses budgétaires consolidées effectuées au sein de l'Union européenne.

Il a précisé que la somme de tous les crédits engagés en France en faveur de l'agriculture s'élevait plus de 30 milliards d'euros, dont 10 millions d'euros provenant de l'Union européenne, 15 milliards d'euros du budget annexe des prestations sociales agricoles (BAPSA), 5 milliards d'euros du budget du ministère lui-même, 600 millions d'euros des budgets d'autres ministères et 900 millions d'euros des collectivités locales. Il a souligné qu'en conséquence, en excluant les dépenses de protection sociale, le budget du ministère chargé de l'agriculture ne représentait que le tiers environ des crédits publics accordés à l'agriculture, ces derniers s'élevant à 15 milliards d'euros, dont 11,7 milliards d'euros réellement versés aux exploitations agricoles. Il a enfin remarqué que le budget domestique consacré à l'agriculture ne dépassait guère 20 % de l'ensemble des dépenses publiques en faveur de l'agriculture, en incluant les prestations sociales agricoles à ce total.

S'agissant de la répartition des crédits du ministère, il a indiqué que 8,2 % de ce budget était consacré au fonctionnement du ministère, à la rémunération et à la retraite de ses fonctionnaires, 12,3 % à la recherche et à l'enseignement agricole, dépenses de personnel incluses, et 79 % aux diverses interventions et aides publiques à l'agriculture. Il a reconnu que le budget prévu pour 2004 n'atteignait plus que 4,97 milliards d'euros contre 5,18 milliards d'euros en 2003, mais a jugé plus honnête, si des comparaisons devaient être établies, de raisonner à périmètre constant, ce qui conduit à mettre en évidence la stabilité des dépenses en faveur de l'agriculture. Il a ainsi souligné que le service public de l'équarrissage, qui avait reçu en 2003 un budget de 198 millions d'euros, ne figurait plus en 2004 dans le périmètre budgétaire du ministère, ses ressources provenant dorénavant d'une taxe spécifique, dont le produit prévisible de 176 millions d'euros serait affecté au Centre national pour l'aménagement des structures des exploitations agricoles (CNASEA). De même, il a indiqué que le développement agricole, qui avait reçu en 2003 un budget de 27,5 millions d'euros au sein du ministère, était financé, à compter de 2004, par une taxe fiscale dont le produit devait être affecté à la nouvelle Agence pour le développement agricole et rural (ADAR). Il a donc estimé que le budget de l'agriculture était globalement reconduit en 2004 et que l'annonce par une dépêche de l'Agence France Presse d'une diminution de 4 % de ce budget ne reposait pas sur des comparaisons rigoureuses, le budget du ministère incluant en 2003 les crédits du développement agricole et du service public de l'équarrissage, ce qui n'est pas le cas en 2004.

Il a par ailleurs estimé que le budget de l'agriculture serait maîtrisé grâce à plusieurs sources d'économies.

Il a d'abord évoqué la réduction des dépenses engagées au titre de la prime au maintien du troupeau de vaches allaitantes (PMTVA), qui passent de 178 à 165 millions d'euros. Il a précisé que cette économie ne provenait pas d'une réduction du barème des aides mais uniquement du constat d'une diminution du nombre de demandes de primes.

Il a ensuite considéré que la baisse de moitié des crédits de paiement du fonds national de développement des adductions d'eau (FNDAE) s'expliquait uniquement par le rattachement de ce compte d'affectation spécial au budget du ministère à compter de 2004, les importants reports constatés les années précédentes devant à présent être consommés pour assurer la stabilité des crédits en termes de gestion.

Il a également expliqué que la réduction du montant inscrit pour les prêts bonifiés à la forêt provenait de la prise en compte de l'arrivée à échéance des prêts accordés en 2000 pour faciliter le nettoyage des parcelles touchées par les tempêtes de décembre 1999.

Il a enfin précisé que la baisse des crédits prévus pour le fonds d'allègement des charges financières (FAC) s'opérait à législation constante et résultait de l'application de normes européennes. Il a rappelé que le budget pour 2004 avait été élaboré avant que tous les effets de la sécheresse ne soient connus et a annoncé que le FAC pourrait être abondé dans la loi de finances rectificative pour 2003.

Puis, il a indiqué que 65 mesures de simplification des procédures administratives avaient déjà été mises en œuvre depuis le début de l'année 2003.

Il a précisé que des économies avaient également été réalisées s'agissant du fonctionnement du ministère et des établissements publics, grâce à une optimisation des moyens alloués aux services. Il a ainsi rappelé qu'au niveau de l'administration centrale du ministère, la création de la direction générale de la forêt et des affaires rurales (DGFAR) avait permis de fusionner deux directions et qu'au niveau déconcentré, les directions régionales de l'agriculture et de la forêt (DRAF) étaient en cours de regroupement avec les directions départementales de l'agriculture et de la forêt (DDAF) situées dans le chef-lieu de la région. Il a également souligné la maîtrise des dépenses de personnel du ministère, 323 des 767 emplois libérés par les départs à la retraite n'étant pas remplacés. Il a enfin annoncé la transmission depuis quelques jours du rapport demandé au ministère par le président de l'Assemblée nationale concernant la réforme des offices agricoles, qui vise, là encore, à adapter les moyens engagés aux besoins constatés.

Il a ensuite procédé à une présentation sectorielle du budget du ministère de l'agriculture pour 2004.

Il a indiqué que le premier grand objectif guidant l'action des services était le développement d'une agriculture écologiquement responsable et économiquement forte. Il a remarqué que la très forte revalorisation de la prime herbagère agri-environnementale (PHAE) décidée dans le précédent budget serait complétée en 2004 par de nouvelles actions, notamment par le versement en une seule fois de la dotation aux jeunes agriculteurs (DJA), qui représente 7 millions d'euros, ou encore par le maintien des crédits du fonds d'incitation et de communication pour l'installation en agriculture (FICIA) à hauteur de 10 millions d'euros.

Il a également souligné la nouvelle revalorisation de 5 % du montant des indemnités compensatoires de handicaps naturels (ICHN), cette hausse constituant la première étape d'une augmentation quinquennale de la fraction de ces primes correspondant aux 25 premiers hectares des exploitations concernées. Il a ajouté que les services de remplacement, permettant aux agriculteurs en difficulté de mener une vie presque normale, étaient financés, de même que les contrats d'agriculture durable (CAD), dont l'enveloppe budgétaire - confondue avec celle des contrats territoriaux d'exploitation (CTE) - croît de 54 millions d'euros, c'est-à-dire de 27 %. Il a enfin précisé que l'augmentation de la dotation des mesures agri-environnementales est pérennisée du fait d'une stabilisation à 133 millions d'euros de l'enveloppe qui les concerne.

Abordant le second axe de la politique menée par le ministère en charge de l'agriculture, qui concerne la sécurité sanitaire et la qualité des aliments, il a rappelé l'augmentation de 15 % des crédits destinés au financement du programme d'analyse et de contrôle renforcé des produits phytosanitaires, indiquant que cet effort permettrait de prendre en charge les traitements de la sharka, de la chrysomèle du maïs ainsi que des viroses des cultures maraîchères. Il a précisé que la subvention du ministère à l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) était accrue de 2,5 % en 2004.

Puis, il est revenu sur la réforme complexe du financement du service public de l'équarrissage, qui résulte de l'application de la réglementation communautaire. Il a ainsi indiqué que ces dernières imposaient une limitation des aides nationales au ramassage et à l'abattage des animaux, ainsi que le respect du principe pollueur-payeur, le ministère souhaitant pour sa part conserver un système de mutualisation des coûts. Il a rappelé que cette situation avait conduit le Gouvernement à créer une taxe, dont le produit prévisible de 176 millions d'euros serait affecté au financement du CNASEA, une telle taxe garantissant l'égalité entre producteurs et la sécurité du dispositif d'équarrissage. Il a ajouté qu'en contrepartie de la création de cette taxe, la taxe sur les achats de viande, dont le produit s'était élevé à environ 550 millions d'euros en 2002 et n'était pas été entièrement consacré au service public de l'équarrissage, était supprimée en 2004.

Il a ensuite indiqué que le troisième axe de la politique financée sur les crédits du ministère concernait la gestion durable du monde rural et de la forêt.

S'agissant de l'organisation de la filière bois, il a annoncé l'affectation de crédits supplémentaires en 2004, permettant de créer une première tranche de 30 emplois supplémentaires dans les centres régionaux de propriété forestière, 100 emplois au total devant être créés sur une période de trois ans. Il a également rappelé qu'un plan d'encouragement à la filière cheval avait été annoncé à la fin du mois de juillet dernier par le Gouvernement, comprenant des mesures fiscales inscrites en première partie de loi de finances, ainsi que des engagements budgétaires du ministère chargé de l'agriculture, conformément au contrat d'objectif conclu entre l'Etat et les haras nationaux.

Puis, le ministre a évoqué la modernisation de la flotte de pêche française et le soutien aux entreprises de pêche, quatrième axe de l'action financée pour 2004.

Il a rappelé que les négociations ayant abouti, en décembre 2002 à Bruxelles, à une réforme de la politique commune de la pêche, permettaient de maintenir provisoirement les aides à la modernisation de la flotte de pêche. Il a donc annoncé que le ministère en charge de la pêche mènerait une action intensive en faveur de cet effort de modernisation, s'agissant tant des aides aux sorties de flottes que des crédits d'investissement destinés aux opérations de modernisation. Il a précisé que les crédits du ministère seraient, à cet effet, abondés dans la loi de finances rectificative pour 2003 à hauteur de 5,6 millions d'euros en crédits de paiement et 11,2 millions d'euros en autorisations de programme. Il a enfin ajouté que l'enveloppe destinée aux prêts bonifiés à la pêche s'élevait désormais à 10,5 millions d'euros.

Il a ensuite évoqué les crédits relatifs à la recherche et à l'enseignement agricole. Il a indiqué que l'enseignement agricole public serait soutenu de façon prioritaire, grâce au maintien des crédits consacrés aux dépenses pédagogiques des établissements publics et à la mise en place de crédits supplémentaires permettant de remplacer les surveillants d'externats et les maîtres d'internats, ainsi que de substituer aux emplois-jeunes des assistants d'éducation dans les mêmes proportions qu'au sein du ministère chargé de l'éducation nationale. S'agissant de l'enseignement supérieur, les crédits seront consolidés de façon à poursuivre la politique de contractualisation et à favoriser l'adaptation au modèle européen de formation, reposant sur une progression licence-mastère-doctorat. Il a ajouté que le budget réservé aux bourses, dans l'enseignement public comme privé, était augmenté de 2,3 %, de façon à assurer dans ce domaine une parité avec l'enseignement général et à accompagner un plus grand nombre de familles. S'agissant de l'enseignement agricole privé, le Gouvernement appliquera la loi n° 84-52 du 26 janvier 1984 sur l'enseignement supérieur, dite « loi Rocard », et a aujourd'hui surmonté, grâce à un accord transactionnel, les difficultés posées par le recours introduit devant le Conseil d'Etat par l'enseignement privé. Il a enfin rappelé que le secteur de la recherche et de la formation avait été retenu par le ministère en charge de l'agriculture pour expérimenter la mise en place de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), avant que l'application de cette dernière ne soit généralisée, ce qui conduisait à une fongibilité des crédits destinée à accroître la responsabilité de gestion des établissements publics et à limiter ainsi une centralisation et une bureaucratie excessives.

S'agissant enfin de la protection sociale agricole, qui représente un important budget de 15 milliards d'euros, il a indiqué qu'un régime de retraites complémentaires obligatoires avait été mis en place depuis le 1er avril 2003 et que le budget annexe des prestations sociales agricoles (BAPSA) bénéficiait désormais d'un renflouement budgétaire. Il a ajouté que la mensualisation des retraites, attendue depuis longtemps, serait effective dès le 1er janvier 2004, tandis que la réforme du BAPSA serait poursuivie, aboutissant à le transformer au 1er janvier 2004 en établissement public, du fait de la LOLF, alors qu'il s'agissait d'un budget annexe depuis le début des années 1960. Il a précisé que cette action avait fait l'objet d'un important travail de concertation avec la mutualité sociale agricole et les organisations professionnelles. Il a également annoncé que le nouvel établissement public porterait l'emprunt requis pour la mensualisation des retraites, et deviendrait dès le 1er janvier 2005 le « réceptacle » de la protection sociale agricole, sans que le caractère mutualiste ou le système électoral propres au BAPSA soient remis en cause par ce changement juridique.

M. Antoine Herth, rapporteur pour avis des crédits de l'agriculture, a rappelé que l'examen du budget de l'agriculture pour 2004 intervenait au terme d'une campagne agricole particulièrement mouvementée, qu'il s'agisse des phénomènes climatiques exceptionnels, de la réforme de la politique agricole commune (PAC), ou encore de l'ajournement des négociations de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) à Cancún.

Tout en constatant que l'agriculture ne représente plus que 2 % du produit intérieur brut (PIB) et n'occupe plus que 4 % de la population active, il a estimé que ce secteur d'activité avait été au cœur de l'actualité et avait démontré son importance à l'occasion des incendies estivaux ayant ravagé les forêts et les friches.

Il a jugé que le budget présenté, à hauteur de 5 milliards d'euros pour l'Etat, montrait que le Gouvernement avait choisi de reconduire l'effort budgétaire en faveur de l'agriculture, tout en exigeant une optimisation des crédits ainsi qu'une modernisation des services. Il a rappelé que l'effort de l'Etat représentait, en excluant le budget annexe des prestations sociales agricoles (BAPSA), environ un tiers des concours publics à l'agriculture, les contributions de l'Union européenne et des collectivités territoriales représentant respectivement 10 milliards d'euros et 900 millions d'euros.

Il a souhaité que la cohérence et la répartition des ressources soit contrôlées de façon permanente, ajoutant que cette démarche faisait l'objet de négociations régulières à Bruxelles, était confirmée au niveau national par la mise en œuvre progressive de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances, et serait bientôt renforcée au niveau local grâce au projet de loi relatif à la décentralisation.

Il a estimé que cet impératif de cohérence expliquait les modifications de périmètre dont le budget de l'agriculture faisait l'objet. Il a ainsi évoqué la suppression, du fait d'exigences communautaires, de la taxe sur les achats de viande, remplacée par une taxe affectée au service public de l'équarrissage, la non-reconduction de la subvention exceptionnelle précédemment accordée à l'Agence pour le développement agricole et rural (ADAR), qui sera désormais alimentée par une taxe spécifique, ainsi que la budgétisation du fonds national de développement des adductions d'eau (FNDAE).

Il a remarqué que le budget de l'agriculture pour 2004 masquait, derrière une apparente stabilité, un réel effort destiné à améliorer la productivité de la dépense publique. Il a ainsi précisé que les dépenses étaient ajustées aux besoins prévisibles, tandis qu'était réaffirmée l'importance des actions en faveur de la sécurité sanitaire des produits ou de la gestion durable des forêts. Il s'est également félicité des efforts de modernisation des services du ministère qui étaient entrepris, comme en attestent la fusion de deux directions, la maîtrise des effectifs ou la réduction des emplois précaires.

Il a approuvé l'octroi de moyens supplémentaires pour la formation agricole, jugeant qu'il s'agissait là d'un pari sur l'avenir. Il a par ailleurs jugé légitime de maîtriser le budget de la recherche en concentrant les efforts sur les sujets stratégiques et en veillant à développer les synergies avec l'enseignement agricole ainsi qu'avec d'autres ministères.

Il a salué l'augmentation de près de 10 % des crédits consacrés à l'installation des jeunes agriculteurs, ainsi que la hausse de 12,7 % des crédits alloués aux indemnités compensatoires de handicaps naturels (ICHN). Il a également précisé que les pratiques agricoles durables seraient fortement soutenues, grâce à un accroissement de 70 % du montant de la prime herbagère agri-environnementale (PHAE) et à une hausse de 27,4 % des sommes consacrées aux politiques contractuelles. Il a estimé que cette dernière dotation faciliterait le respect des engagements pris s'agissant des contrats territoriaux d'exploitation (CTE) et de la mise en place des contrats d'agriculture durable (CAD). Il a jugé que de tels efforts permettraient aux pouvoirs publics d'accompagner la transformation progressive des pratiques, l'éco-conditionnalité devenant un critère d'accès aux aides publiques mais aussi, probablement, d'accès au marché.

Il a indiqué que, parallèlement à la mise en place progressive des actions volontaires menées dans le cadre de l'« agriculture raisonnée », les professionnels s'interrogeaient sur les contours du nouveau programme de mise aux normes des bâtiments d'élevage. Il a ajouté que l'inventaire des besoins mettait en évidence l'insuffisance des capacités d'autofinancement des agriculteurs et en a conclu qu'il serait préférable de reconsidérer ce programme pour pouvoir respecter le calendrier communautaire, qui prévoit son achèvement dans un délai très court.

Par ailleurs, il a constaté que le projet de loi de finances pour 2004 annonçait la création de 15 emplois à l'ADAR mais ne précisait pas les critères d'attribution des crédits collectés par le biais de la taxe qui lui serait affectée, cette incertitude nourrissant l'inquiétude des instituts techniques.

Il a enfin observé que les crédits affectés au fonds d'allègement des charges financières (FAC) et aux agriculteurs en difficulté étaient plutôt en réduction dans le projet de loi de finances pour 2004, apparemment établi pour un contexte ordinaire. Il a souhaité savoir s'il était pertinent d'en déduire que les sommes nécessaires pour faire face à la crise de l'été figureraient dans le projet de loi de finances rectificatives pour 2003.

En conclusion, il a estimé que le budget devrait être adopté en raison de sa double ambition, contribuant à la fois à la maîtrise des dépenses publiques et au redéploiement des efforts de l'Etat sur ses missions régaliennes. Il a considéré que cette démarche permettrait également en 2004 de promouvoir un aménagement équilibré du territoire, de garantir une production de qualité et de former une nouvelle génération d'agriculteurs.

M. Aimé Kerguéris, rapporteur pour avis des crédits de la pêche, a rappelé que tout en bénéficiant d'atouts géographiques considérables pour faire prospérer les activités de pêche et d'aquaculture sur ses côtes, la France était pourtant confrontée à la persistance d'un important déficit commercial dans ce secteur. Il a considéré que la politique de la pêche devait s'assigner comme objectif le comblement de ce déficit et le maintien de la puissance de la flotte de pêche française.

Il a noté que le projet de loi de finances pour 2004 s'inscrivait précisément dans cette démarche, les crédits de paiement du ministère consacrés à la pêche et à l'aquaculture bénéficiant d'une progression de 23,5 % par rapport à l'année précédente et atteignant 34,3 millions d'euros en 2004, tandis que les autorisations de programme fléchissent légèrement.

Il a salué la mise en place de plusieurs mesures favorables à l'investissement des jeunes pêcheurs et a félicité le ministre pour son habilité lors des difficiles négociations relatives à la réforme de la politique commune de la pêche. Il a rappelé à ce propos que les propositions initiales présentées par le commissaire européen chargé de la pêche, M. Franz Fischler, étaient catastrophiques, dangereuses et inacceptables en l'état pour la France. Il a souligné que la France était alors placée dans une position délicate, dans la mesure où elle n'avait pas respecté ses engagements de réduction de la flotte.

Il a estimé que la possibilité, offerte à la France, de maintenir ses aides à la construction de bateaux neufs jusqu'au 31 décembre 2004 devrait lui permettre de poursuivre la modernisation de sa flotte de pêche, de façon à améliorer les conditions de sécurité des marins et à rendre espoir aux jeunes pêcheurs à la recherche d'outils de travail performants.

Il a ajouté qu'il était impossible d'assurer la pérennité des activités de pêche sans disposer d'une bonne connaissance de l'état de la ressource. Il a jugé que l'effort effectué pour contrôler la pêche était significatif mais a souligné la persistance de controverses entre les professionnels et les scientifiques s'agissant de l'état de la ressource, en dépit de progrès indéniables. Il a précisé que la classification des stocks de pêche en quatre catégories donnait une première idée de l'état de la biomasse des différentes espèces. Il a souhaité savoir si le Gouvernement envisageait, afin d'éviter l'effondrement total de certains stocks, d'instituer un repos biologique en faveur de certaines espèces, et, dans l'affirmative, quelles formes d'indemnisation des pêcheurs étaient envisagées.

S'agissant des dispositions fiscales, il a signalé que deux mesures étaient particulièrement attendues par les professionnels : le maintien du système des Sofipêches d'une part, la création d'une dotation pour aléas, comme il en existe en agriculture, d'autre part. Il a indiqué qu'une augmentation de 0,15 euro du prix du litre de gazole entraînait en moyenne, mécaniquement, une diminution de 4 à 16 % du revenu partagé entre les pêcheurs, et a rappelé que la hausse des cours des carburants en 2000 avait causé de grandes difficultés aux entreprises de pêche. Il a donc souhaité savoir s'il était possible de convaincre le ministère des finances de la nécessité de mettre en place cette dotation pour aléas, essentielle pour l'activité des pêcheurs.

Il a enfin signalé que la réduction de la dotation budgétaire de l'Office national interprofessionnel des produits de la mer et de l'aquaculture (OFIMER) risquait d'être mal comprise par les professionnels, au moment où est recherchée une augmentation de la valeur ajoutée dans la commercialisation des produits de la mer.

M. Michel Raison, s'exprimant au nom du groupe UMP, a rappelé la nécessité d'apprécier les budgets en fonction de leurs qualités intrinsèques et non de leur seule masse, une telle démarche répondant à une exigence d'honnêteté intellectuelle. Il a par ailleurs souligné l'importance de replacer le budget du ministère de l'agriculture dans le contexte plus large de l'ensemble des interventions effectuées dans le domaine agricole, ce qui suppose de prendre en compte non seulement les apports complémentaires de l'Union européenne, des collectivités locales et du budget annexe des prestations sociales agricoles (BAPSA), mais aussi l'impact du fonctionnement des mécanismes de marché.

Il a félicité le ministre pour la poursuite de l'effort d'économie déjà engagé en 2002, en s'interrogeant néanmoins sur le fait que le nombre des agents du ministère était passé de 28 000 au début des années soixante-dix à 37 000 aujourd'hui, alors que la population agricole n'avait cessé de diminuer depuis lors. Il a approuvé la mise en place du versement en une seule fois de la dotation aux jeunes agriculteurs (DJA), le maintien du fonds d'incitation et de communication pour l'installation en agriculture (FICIA), le relèvement des indemnités compensatoires de handicaps naturels (ICHN) au profit des exploitants installés dans les zones désavantagées, le supplément de crédits de 54 millions d'euros dégagé en faveur des CTE et des contrats d'agriculture durable (CAD), le maintien à haut niveau de la prime herbagère agri-environnementale (PHAE), favorable aux régions où la terre est difficile à labourer, ainsi que la poursuite du soutien aux structures en charge de la surveillance sanitaire. Il a noté que la mensualisation du versement des retraites aux agriculteurs correspondait à la réalisation d'une promesse.

Il a souhaité savoir dans quelle mesure il serait possible, tout en respectant l'obligation d'une concertation avec la Commission européenne, de déconcentrer la mise en œuvre du PMPOA pour en améliorer l'efficacité. Il s'est ensuite inquiété du risque que la taxe d'abattage remplaçant la taxe sur les achats de viande ne soit répercutée par les abattoirs vers l'amont des filières, au détriment des éleveurs, pénalisant en particulier la filière porcine. Il a enfin regretté le montant globalement trop réduit des crédits dégagés en direction des agriculteurs en difficulté.

Il a enfin souligné la pertinence de l'approche des dossiers par le ministre, ainsi que son attitude d'ouverture et de respect vis-à-vis de la population des agriculteurs, qui constitue déjà pour eux une forme de soutien, face aux difficultés qu'ils ont à affronter.

Mme Marilyse Lebranchu, s'exprimant au nom du groupe socialiste, a d'abord souligné la faible lisibilité des dispositions budgétaires relatives à l'agriculture, une certaine imprécision entourant par exemple le devenir des crédits de l'Institut national de la recherche agronomique (INRA). Elle a souhaité obtenir des précisions concernant la répartition des 323 emplois supprimés du fait du non-remplacement de certains départs en retraite, indiquant sa crainte que des missions essentielles, comme celles relatives aux contrôles, ne s'en trouvent pénalisées. Elle a constaté que les crédits affectés à la gestion des crises, au travers du fonds national de garantie des calamités agricoles (FNGCA), semblaient peu élevés compte tenu des besoins créés par la sécheresse de l'été. Elle a donc souhaité qu'un effort budgétaire particulier soit effectué pour abonder ce fonds, malgré la règle constitutive imposant une contribution à parts égales des professionnels concernés et de l'Etat, pour éviter les opérations de déstockage, qui viendraient peser sur les cours, et créer ainsi une nouvelle situation de crise. Elle a observé que le relèvement du montant des ICHN les laissait néanmoins à un niveau très inférieur à celui attendu par les agriculteurs.

Elle a par ailleurs réclamé la mise en place d'un instrument de suivi prévisionnel de la mise en œuvre des contrats d'agriculture durable (CAD). Elle a enfin regretté que l'évolution de statut du BAPSA lui permette d'échapper au contrôle du Parlement, ainsi que l'absence de mise en place du dispositif de transfert de la retraite au profit du conjoint survivant. Elle a ajouté que les progrès effectués en matière de soutien à l'installation des jeunes ne permettaient absolument pas d'atteindre les objectifs fixés en 1994, que le soutien accordé aux sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER) traduisait une préférence discutable pour une extension des exploitations plutôt que pour une augmentation de leur nombre, et que les offices agricoles disposaient de crédits insuffisants pour encourager comme il le faudrait le développement de productions à plus forte valeur ajoutée.

Félicitant le ministre pour sa présence sur le terrain pendant la canicule, M. François Sauvadet, s'exprimant au nom du groupe UDF, a néanmoins estimé que les problèmes agricoles liés à la sécheresse étaient encore importants, et interrogé le ministre sur les mesures qui pouvaient être prises, conjointement avec le ministre chargé des transports, afin d'améliorer l'acheminement par la SNCF du fourrage disponible dans le nord de la France.

Il a également demandé si les conséquences très importantes de la canicule sur les forêts avaient fait l'objet d'une évaluation par les services du ministre, compte tenu des enjeux économiques liés à leur exploitation dans les territoires ruraux.

Notant que ce projet de budget succédait à la révision de la PAC, il a désiré savoir si cette réforme avait conduit à une amélioration des marges de manœuvre financières à l'échelon national, notamment dans la perspective du projet de loi relatif au développement des territoires ruraux. Il s'est en outre interrogé sur les mesures prises pour améliorer la consommation des crédits communautaires, soulignant que l'objectif principal était une consommation efficace des crédits.

Rappelant que les CTE étaient dans une phase de mise en œuvre, il s'est en outre interrogé sur l'importance de leur financement dans le projet de loi de finances pour 2004 et sur les objectifs retenus dans la perspective des CAD.

Il s'est en outre félicité de la fongibilité et de l'augmentation du montant des crédits destinés à la formation professionnelle et à l'apprentissage, mais a souhaité savoir si ces crédits permettraient de couvrir les besoins de financement des établissements d'enseignement tant publics que privés.

Il s'est en outre interrogé sur les conséquences financières pour les éleveurs des nouvelles mesures prises dans le domaine de l'équarrissage.

Il s'est ensuite alarmé de la baisse des crédits destinés aux offices et à la promotion des produits agricoles français à l'étranger, notamment ceux de la Société pour l'expansion des ventes des produits agricoles et alimentaires (SOPEXA), estimant que ce recul risquait de porter atteinte à la reconnaissance de la qualité des produits des petits exploitants français à l'étranger, au moment précis où la France doit engager une réflexion sur sa politique de promotion agricole.

Il a par ailleurs exprimé les mêmes inquiétudes que Mme Marylise Lebranchu au sujet de la transformation du budget annexe des prestations sociales agricoles (BAPSA) en établissement public, estimant que cette transformation risquait de réduire le contrôle du Parlement sur son financement. Il a en outre souligné le paradoxe selon lequel le produit de la taxe sur le tabac permettait à la fois d'assurer un financement pérenne et d'accroître la lutte contre le tabagisme, une baisse de la consommation risquant d'amoindrir les recettes.

S'exprimant au nom du groupe des Député-e-s communistes et républicains, M. André Chassaigne a qualifié de surréaliste le projet de budget en raison du contexte dans lequel il s'insérait.

Rappelant qu'il avait envoyé au ministre des questions écrites au sujet de la canicule, il a estimé que la gestion de cette crise majeure devait être examinée avec la plus grande circonspection. Il a par ailleurs souhaité connaître les mesures prises pour faire face aux conséquences de la sécheresse au cours des prochains mois, notamment s'agissant des difficultés d'acheminement du fourrage par voie ferroviaire. Il a en outre déploré que les prix agricoles n'aient pas été plafonnés pendant cette crise, ouvrant ainsi la voie à une spéculation très préjudiciable aux petits exploitants.

Abordant des problèmes plus structurels, il a demandé si le projet de loi de finances pour 2004 avait pris en compte les conséquences du désengagement européen en matière d'agriculture, sanctionné par l'accord de Luxembourg réformant la PAC, et avait augmenté en conséquence les crédits destinés à ce secteur au niveau national. Il s'est en outre demandé si l'échec des négociations de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) au sommet de Cancún ne rendait pas nécessaire une révision de l'accord de Luxembourg, faute de quoi les agriculteurs subiraient à la fois les mesures prises au niveau communautaire et celles résultant des négociations commerciales internationales.

S'agissant des mesures budgétaires du projet de loi de finances pour 2004, il s'est interrogé sur l'opportunité de réduire les crédits destinés aux offices, dont les missions consistent à anticiper les crises et, le cas échéant, à en réparer les conséquences dans le domaine agricole. Il a en outre souligné l'hostilité des principaux syndicats agricoles à la baisse des crédits consacrés aux CTE, aucun crédit n'ayant par ailleurs été prévu au profit des CAD. Il a ensuite déploré la réduction des crédits destinés à la promotion des produits agricoles français, alors que le marché mondial est désormais entièrement libéralisé.

Il s'est en outre alarmé de l'évolution des crédits destinés à la dotation aux jeunes agriculteurs (DJA), dont l'installation est désormais effectuée dans la moitié des cas sans cette dotation mais avec l'aide plus limitée des collectivités locales. Il a donc souhaité une réforme des critères d'éligibilité à cette aide.

M. André Chassaigne s'est ensuite inquiété de la réduction probable du contrôle parlementaire sur les comptes du BAPSA, du fait de la transformation de ce budget annexe en établissement public. Il a en outre déploré que la modification de ses ressources ait essentiellement pénalisé les petits agriculteurs, dont les cotisations d'asurrance vieillesse ont parfois augmenté de près de 50 %. Il a enfin estimé nécessaire une réforme des retraites agricoles, le dispositif de surcompensation conduisant à ne pas prendre en compte, pour le calcul des droits à la retraite, les années travaillées avant l'installation de l'agriculteur.

En réponse aux premiers intervenants, M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales, a apporté les précisions suivantes :

- la réforme du programme de maîtrise des pollutions d'origine agricole (PMPOA) met en place, en raison des exigences de la Commission européenne, un dispositif excessivement complexe aboutissant parfois à des règles contradictoires, en particulier dans les zones vulnérables. Un effort de simplification est donc conduit en concertation avec Mme Roselyne Bachelot, ministre de l'écologie et du développement durable. Le fait que la réglementation communautaire impose que 80 % des crédits affectés à ce programme soient alloués aux actions conduites dans les zones vulnérables pose, en outre, un problème particulier, car il a pour effet d'entraver la conduite d'actions hors de ces zones bien que des financements soient disponibles. Un assouplissement de cette règle est donc nécessaire. D'une manière générale, la réglementation tendant à la maîtrise des pollutions d'origine agricole se révèle difficile à gérer et constitue le premier sujet de préoccupation des exploitants sur le terrain, notamment dans les filières avicole, bovine et laitière. La mobilisation du Gouvernement est donc totale pour l'améliorer ;

- sur le plan budgétaire, la modification des règles d'utilisation du fonds national de développement des adductions d'eau (FNDAE), dont les moyens seront, à compter de 2004, consacrés exclusivement à la politique de l'eau, rend nécessaire l'augmentation des crédits du ministère de l'agriculture destinés à la maîtrise des pollutions d'origine agricole. Le projet de loi de finances pour 2004 prévoit donc d'allouer 68 millions d'euros d'autorisations de programme à l'article budgétaire correspondant (l'article 30 du chapitre 61-40) qui était doté de 34 millions d'euros en 2003. Cet article budgétaire finance également des subventions spécifiques aux zones de montagne pour compenser les surcoûts de construction des bâtiments d'élevage. La ventilation des crédits de cet article entre les deux types d'actions qu'il finance sera déterminée en concertation avec les organisations professionnelles agricoles dans les prochaines semaines ;

- l'Agence de développement agricole et rural (ADAR), établissement public qui succède à l'Agence nationale pour le développement agricole (ANDA), sera mise en place dès le début du mois de novembre. Le produit de la taxe unique sur le chiffre d'affaires des agriculteurs qui lui sera affecté devrait être supérieur d'environ 10 millions d'euros aux prévisions et permettra donc un financement conforme à ce qui a été envisagé avec les professionnels. Les craintes portant sur l'action territoriale de cette agence, c'est-à-dire sur les subventions aux chambres d'agriculture, ne sont pas justifiées car les subventions correspondantes seront, globalement, conformes à ce qui était prévu. Les agriculteurs et les représentants des filières seront majoritaires au conseil d'administration de l'ADAR et il est souhaitable - et probable - que chaque filière, et notamment la filière viticole, qui est celle pour laquelle les interrogations sont les plus fortes, bénéficie d'un « droit de retour » légitime. La continuité du financement des instituts techniques, auparavant effectué par l'ANDA, sera assurée. En la matière, il conviendra de passer d'une logique d'abonnement à une logique d'appel à projets, ce à quoi les instituts techniques sont prêts. Enfin, la spécificité de l'action en faveur de la filière viticole, qui a été soulignée à juste titre, conduira à mettre en place des mécanismes adaptés ;

- la sécheresse qui a frappé l'agriculture française est apparue fin juin, s'est confirmée en juillet puis s'est aggravée en août. Le Gouvernement s'est efforcé d'être aussi réactif que possible, même si un problème conjoncturel, le transport des fourrages, a créé une grande émotion. L'exaspération des agriculteurs qui n'ont pas constaté l'enlèvement de la paille et du foin disponibles, ou de ceux qui n'ont pas reçu les fourrages attendus, est compréhensible. Il convient pourtant de constater qu'il était impossible de transporter en un mois tout le fourrage nécessaire pour faire face à une sécheresse centennale, malgré les efforts importants accomplis tant par la SNCF que par l'armée et les transporteurs privés. Sur le plan financier, la volonté du Gouvernement de faire jouer la solidarité nationale a été annoncée dès le début du mois de juillet, aucun chiffre n'étant alors donné car il était trop tôt pour le faire. Les professionnels s'en étant émus, une enveloppe financière de 37 millions d'euros et une aide au transport du fourrage avoisinant 45 euros par tonne ont été annoncées à leur demande. Ce dernier montant a été donné, peut-être maladroitement, comme ordre de grandeur de l'aide au transport, mais la situation est évidemment très différente selon les départements en fonction, d'une part, du coût de transport des fourrages - qui dépend de la distance - et, d'autre part, du montant des aides décidées, le cas échéant, par les conseils généraux et régionaux. L'équité ne suppose donc pas, en l'espèce, un traitement identique dans tous les départements. La première distribution d'aides a d'ailleurs conduit trois départements qui en ont bénéficié à restituer à l'Etat des moyens inutilisés, démarche qui est exemplaire. Les phénomènes de spéculation ne doivent pas être exagérés d'autant que la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) s'est fortement mobilisée pour éviter tout dérapage ;

- s'agissant du fonds national de garantie des calamités agricoles (FNGCA), certaines productions spécifiques, comme les volailles, n'y sont pas éligibles. Le ministère a néanmoins voulu que ces productions puissent être dédommagées des effets de la canicule grâce à un dispositif « cousu-main » et, à cet effet, il a été fait appel au fonds d'allègement des charges (FAC) et au fonds destiné aux agriculteurs en difficulté, dit « Agridif ». Ainsi, un système d'aides d'un montant de 500 millions d'euros a pu être mis en place et une bonne part de cette somme a déjà été versée aux agriculteurs concernés. On doit néanmoins souligner la nécessité, en loi de finances rectificative, d'abonder les crédits du FNGCA, le budget du ministère chargé de l'agriculture ne pouvant à lui seul supporter la charge due à une sécheresse centennale. On doit noter, sans esprit de polémique, que le FNGCA a manqué de crédits ces derniers temps : sous le précédent Gouvernement, il avait été insuffisamment doté et le présent Gouvernement a décidé, en 2003, de le ponctionner en faveur du budget annexe des prestations sociales agricoles (BAPSA). Une telle situation n'est pas choquante, dès lors que la solidarité nationale intervient lorsque des difficultés, telle la sécheresse, surviennent ;

- s'agissant de la pêche, un travail tripartite, mené conjointement par l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer (IFREMER), les professionnels de la mer et le ministère chargé de la pêche, doit permettre de dépasser les débats stériles concernant l'appréciation de l'état de la ressource halieutique. Dans ce domaine, il convient d'éviter l'angélisme mais aussi le catastrophisme, comme cela avait été le cas lorsque la disparition de l'anchois du Golfe de Gascogne avait été prédite - alors que l'on constate aujourd'hui une tendance inverse.

Le projet de loi de finances pour 2004 prévoit des dotations en faveur de la modernisation de la flotte de navires à la pêche, ainsi que des crédits pour permettre aux marins-pêcheurs de s'équiper en vêtements de sécurité ;

- l'analyse de M. Aimé Kerguéris concernant les Sofipêches est tout à fait pertinente. Il sera nécessaire, dans ce domaine, de convaincre le ministère de l'économie et des finances ;

- le gazole est aujourd'hui détaxé pour les marins-pêcheurs. Toute augmentation, même légère, du prix de ce carburant aurait un impact économique significatif pour le monde de la pêche. C'est pourquoi une réflexion est aujourd'hui conduite au sein du Comité national des pêches, récemment renouvelé, sur la possibilité de mettre en place une « déduction pour aléa ». Notons que jusqu'en 2000, il était possible à l'Etat d'aider les marins-pêcheurs en cas de fluctuation des prix du carburant ; cette pratique a néanmoins été condamnée par la Commission européenne. Il est donc aujourd'hui nécessaire de trouver une autre solution ;

- l'Office national interprofessionnel des produits de la mer et de l'aquaculture (OFIMER) est aujourd'hui confronté au même problème que l'Agence de développement agricole et rural (ADAR) concernant son financement. Il est en effet financé par une taxe parafiscale, qui doit disparaître en vertu de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances. A compter de 2004, l'OFIMER devrait bénéficier d'une taxe fiscale affectée, dont l'assiette et le taux seront identiques à ceux de l'ancienne taxe parafiscale. Les moyens de l'OFIMER seront donc maintenus, ce qui lui permettra de mener sa mission essentielle de promotion des produits de la mer ;

- les crédits consacrés aux fonds FAC et Agridif ont été revus à la baisse dans le projet de budget pour 2004, en application d'une récente directive européenne qui restreint le champ d'intervention de ces fonds. Toutefois, cette diminution des crédits a été décidée à une époque où les conséquences de la sécheresse n'avaient pas été pleinement mesurées. Ces fonds seront donc eux aussi abondés en loi de finances rectificative pour 2003 ;

- la question de l'équarrissage est un sujet complexe et sensible. On doit tout d'abord rendre hommage à l'action du précédent Gouvernement, qui a eu à faire face à une situation très difficile du fait de la crise de l'encéphalopathie spongiforme bovine (ESB). Un dispositif d'urgence était indispensable et il a été effectivement mis en place. La situation actuelle est différente : la France doit se conformer aux règles communautaires relatives à la prise en charge du service public de l'équarrissage. Le système actuel repose sur une taxe parafiscale sur les achats des viandes, dont le produit, d'un montant de 550 millions d'euros, n'est affecté que pour un tiers à l'équarrissage, les deux tiers restants étant affectés au budget général et donc en quelque sorte détournés de leur objet initial. Cette taxe sera supprimée en 2004 et remplacée par une nouvelle taxe d'équarrissage, dont le produit attendu s'élève à 176 millions d'euros. Cette nouvelle taxe sera perçue au niveau des abattoirs, qui bénéficieront par ailleurs d'un plan d'accompagnement. Il sera néanmoins nécessaire d'étudier de manière distincte le secteur porcin, en concertation avec les professionnels de la filière. Certes, le nouveau dispositif suscite des interrogations, voire des oppositions ; il était néanmoins indispensable ;

- s'agissant des moyens en personnel du ministère chargé de l'agriculture, 767 départs en retraite sont prévus en 2004 et donneront lieu à la suppression de 323 emplois, soit un taux de non-remplacement de 42,11 %. Ces suppressions sont réparties comme suit : en administration centrale, 23 emplois seront supprimés pour 39 départs à la retraite prévus, soit un taux de non-remplacement de 59 % ; dans les directions régionales et départementales de l'agriculture et de la forêt, 219 départs à la retraite sont prévus et 111 emplois sont supprimés, soit un taux de non-remplacement de 50,68 % ; dans les directions départementales des services vétérinaires, 105 départs à la retraite sont prévus et 50 emplois sont supprimés, soit un taux de non-remplacement de 47,62 %. Pour l'ensemble des services déconcentrés, le taux de non-remplacement se situe donc à 49,69 %. S'agissant de l'enseignement technique, 350 départs à la retraite sont prévus et 125 emplois sont supprimés (taux de 35,71 %) ; pour l'enseignement supérieur, 51 départs sont prévus et 14 emplois sont supprimés (taux de 27,45 %), enfin dans la recherche 3 départs sont prévus et aucun emploi n'est supprimé. Au total, le taux de non-remplacement dans l'enseignement , inférieur à celui des services administratifs, s'élève à 34,4 % et un effort a été consenti pour faire porter les suppressions davantage sur l'administration centrale que sur les services déconcentrés ;

- le dispositif CTE a été suspendu en 2003, non parce que le Gouvernement était opposé à sa philosophie contractuelle, qui était pertinente, mais parce qu'il n'était pas maîtrisé budgétairement. En effet, lors de la mise en place des tout premiers CTE, le coût du dispositif était estimé à 22 000 euros par exploitant. En 2003, il s'élevait en réalité à 44 000 euros par exploitant, soit le double. A raison de 500 000 exploitants, le coût des CTE se serait donc élevé à 20 milliards d'euros sur cinq ans, alors que le budget du ministère chargé de l'agriculture s'élève à 5 milliards d'euros. Il était donc impossible de poursuivre dans la même voie. En outre, on a constaté, lors des derniers mois d'existence des CTE, un véritable engorgement dans le traitement des dossiers, ces contrats étant finalement perçus comme une aubaine en raison du non-plafonnement du dispositif. Le CAD sera quant à lui plafonné à 27 000 euros, un sous-plafond d'un montant de 15 000 euros étant prévu pour les investissements ; le dispositif a été élaboré dans un souci de déconcentration permettant de l'adapter aux situations départementales. L'objectif initial consistait à lancer les premiers CAD en 2003. Cela n'a pas été possible, car leur mise en œuvre supposait préalablement de déclasser du domaine législatif les dispositions relatives aux CTE, qui sont en réalité du domaine réglementaire. Cette longue procédure, ainsi que les négociations avec la Commission européenne, expliquent le retard pris dans le lancement des CAD. Aujourd'hui, la circulaire relative aux CAD a enfin été publiée et le dispositif est applicable.

Il convient de souligner que le ministère ne s'est pas fixé d'objectif en termes de nombre de CAD souscrits. En effet, il n'y a pas de « droit au CAD » et il faut éviter de retomber dans le travers des CTE, qui étaient initialement une mesure agri-environnementale puis ont évolué pour devenir une sorte d'aide au revenu des agriculteurs, voire un « RMA » (« revenu minimum agricole »). Le CAD n'a pas vocation à devenir un substitut au revenu : il s'agit d'une mesure agri-environnementale, assortie d'un cahier des charges précis.

Les moyens affectés aux CTE en 2001 ont été de 61 millions d'euros en loi de finances initiale (LFI), auxquels s'ajoutaient 88 millions d'euros de reports disponibles pour des paiements de l'ordre de 80 millions d'euros. En 2002, la LFI les a dotés de 76 millions d'euros, les reports ont été de 106 millions d'euros ; le collectif a permis d'ajouter 119 millions d'euros, pour 203 millions d'euros de paiements. En 2003, la LFI y a consacré 200 millions d'euros, les reports ont été de 100 millions et les paiements seront donc de 300 millions d'euros. Les crédits disponibles pour les paiements sont donc passés, en deux ans, de 80 à 300 millions d'euros.

Pour 2004, la loi de finances prévoit, sans reports, une dotation de 254,7 millions d'euros, en baisse certes, mais l'ensemble des CTE et CAD seront honorés, une grande partie des investissements réalisés dans le cadre des CTE ayant déjà été financée et donc payée. Plusieurs milliers de CAD seront d'ailleurs signés d'ici la fin de l'année, puis en 2004 ;

- s'agissant du BAPSA, la nouvelle procédure est le résultat de l'application de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF). Il convient de se souvenir que cette loi a été adoptée à l'unanimité, aussi bien au Sénat qu'à l'Assemblée. Il conviendrait de trouver une solution, avec les présidents des deux assemblées, pour que la question, importante, de la protection sociale agricole soit malgré tout débattue au Parlement ;

- les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER) ne sont remises en cause ni dans leurs structures, ni dans leur philosophie. Effectivement, dans le cadre de la préparation du projet de loi relatif au développement des territoires ruraux, la fédération nationale des SAFER a proposé un élargissement de leurs missions à l'aménagement foncier, proposition qui n'a pas été retenue. Plus largement pourtant, dans le cadre de la préparation de la future loi de modernisation agricole prévue en 2004, une vraie question de fond devra être abordée, celle de l'adaptation des structures agricoles, compte tenu de la réforme de la PAC, mais également de l'évolution de la société et du cadre de vie. Il convient d'analyser les causes de la diminution des installations, qui sont au nombre de trois : en premier lieu, l'absence de perspectives économiques stables pour l'agriculture, même si le maintien du budget communautaire pour les 10 prochaines années et des quotas laitiers jusqu'en 2013 devrait améliorer les choses ; ensuite, les blocages techniques importants à l'installation, qui sont en cours de résolution s'agissant de la dotation d'installation des jeunes agriculteurs (DJA) ; enfin, la faible attractivité du monde agricole, notamment de l'élevage, au regard des nouveaux modes de vie, même si l'augmentation des crédits pour services de remplacement est un élément favorable. Il s'agit là d'un véritable sujet de société ;

- on n'a effectivement pas encore mesuré toutes les conséquences de la sécheresse et des incendies estivaux sur la forêt française. Lorsque cette évaluation sera finalisée, des mesures d'urgence seront financées en loi de finances rectificative ;

- s'agissant des marges de manœuvre pour la mise en œuvre de la PAC, plusieurs questions se posent : celle du calendrier en premier lieu, l'application devant être effective au plus tard en 2007, et la position des syndicats agricoles connue avant toute prise de décision ; la question ensuite des formules de découplage possibles, la décision devant être prise avant la fin de l'année. La position du monde agricole est, là encore, attendue mais un découplage horizontal pour la filière végétale, et vertical pour la filière animale, pourrait être intéressant ;

- la hausse des crédits « deuxième pilier » de la PAC devrait être utilisée pour renforcer les mesures agri-environnementales, pour développer des fonds de gestion de crise, notamment pour le porc et la volaille, filières qui ne disposent pas d'organisations communes de marché (OCM), et pour améliorer le financement des mises aux normes en matière environnementale ou de bien-être animal ;

- la promotion de la production agro-alimentaire française est importante. Le ministère de l'agriculture, en lien avec celui du commerce extérieur, tient à définir une vraie stratégie en ce domaine. Le rôle de la Société pour l'expansion des ventes des produits agricoles et alimentaires (SOPEXA) et celui de l'association Ubifrance doivent être mieux articulés ;

- la fongibilité ne signifie pas un regroupement de tous les crédits mais seulement que les chefs d'établissements disposeront de davantage de moyens pour gérer librement leur budget ;

- la question des offices a fait l'objet d'un amendement en loi de finances initiale pour 2003. Le ministère a demandé deux rapports à des missions d'inspection : le premier sur les marges existant en matière de promotion et de soutien, les règles européennes de marché obligeant à un recalage ; le second sur une meilleure organisation de ces offices au moindre coût.

Ces rapports ont été rendus, transmis au Président de l'Assemblée nationale et devraient être distribués à l'ensemble des parlementaires afin qu'un débat éclairé s'engage entre le Gouvernement, le Parlement, les offices et les professionnels ;

- on ne doit pas remettre en cause l'accord conclu en juin dernier au Luxembourg pour réformer la PAC du seul fait de l'échec du sommet de l'OMC à Cancún, d'autant plus que les débats de fond sur l'agriculture n'ont jamais vraiment eu lieu. L'Union européenne a abouti à un texte consensuel qu'il convient de préserver, car elle était ainsi psychologiquement en position de force pour les négociations commerciales internationales.

Plusieurs orateurs ont alors interrogé le ministre.

M. François Brottes, après avoir manifesté son soutien aux mesures décidées lors du Comité interministériel d'aménagement et de développement du territoire (CIADT) de décembre 2002, a rappelé que les incendies de forêt de cet été avaient touché 52 000 hectares, soit 2,5 fois plus que les autres années, les dégâts affectant essentiellement les forêts privées. Il a donc demandé au ministre pourquoi aucune disposition spécifique n'avait été prévue pour réparer les dommages causés par les incendies et s'est inquiété que les dotations budgétaires pour les massifs forestiers fassent au contraire l'objet de restrictions sans précédent telles que la baisse des emplois dans les forêts publiques, alors que seuls 30 des 100 emplois annoncés ont été créés pour les forêts privées, ou encore la baisse des crédits du Conservatoire national de la forêt méditerranéenne. Il a également souligné que la baisse de 20 millions d'euros des crédits versés à l'Office national des forêts (ONF) au titre du versement compensatoire aux communes forestières constituait une rupture des engagements de l'Etat envers les élus locaux.

M. Jacques Le Guen s'est interrogé sur les modifications intervenues en 2003 s'agissant du fonds national de développement des adductions d'eau (FNDAE), celles-ci ayant conduit à une baisse des crédits versés aux collectivités locales, et a souhaité savoir si les conventions antérieures pourraient être respectées.

Il a par ailleurs noté que l'accord conclu en juin 2003 à Luxembourg avait été suivi de l'adoption d'un compromis avec l'Allemagne, prévoyant une reconversion de certaines zones céréalières dans la production de fruits et légumes. Il a donc souhaité savoir comment ce compromis pourrait être respecté sans remettre en cause certains principes de la réforme de la PAC.

Il a ensuite évoqué l'enseignement agricole et a regretté la modestie des crédits prévus pour la formation en alternance dans les zones rurales.

Concernant la pisciculture, il a souhaité savoir si des mesures de soutien seraient mises au point après la sécheresse estivale, cette dernière ayant entamé le potentiel de production pour les prochaines années.

Il a enfin remercié le ministre pour son implication dans le dossier de l'échalote.

M.  Pierre Micaux a suggéré que les dispositions de l'article 21 du chapitre 61-40 du projet de loi de finances pour 2004 soient reconsidérées dans la future loi de décentralisation afin de tenir compte de la distinction établie depuis un an entre les crédits du FNDAE et ceux du programme de maîtrise des pollutions d'origine agricole (PMPOA). Il a indiqué que, comme d'autres élus, il s'inquiétait de la modicité des crédits affectés à l'économie forestière et a souhaité obtenir des précisions sur le versement compensatoire à l'ONF. Il a par ailleurs rappelé son attachement à la mise en œuvre du plan d'épargne forestière.

Il a enfin signalé l'inquiétude grandissante des vignerons de Champagne au sujet de la baisse des crédits de l'Institut national des appellations d'origine (INAO).

M. Jean-Pierre Grand s'est interrogé sur la reconduction du dispositif établi en faveur de 5 000 hectares de vignobles dans le département de l'Hérault.

M. Alain Gouriou s'est inquiété d'une éventuelle remise en cause, après l'échec du sommet de Cancún, du principe annoncé en juillet 2002 par le ministre, selon lequel la production de fruits et légumes sur les zones soumises au découplage des aides ne souffrirait pas d'une concurrence accrue. Il s'est ainsi élevé contre la dérogation accordée aux céréaliers, leur permettant de percevoir leurs anciennes primes tout en convertissant leurs terres à la production de fruits et légumes, soulignant les risques de distorsion de concurrence qui en résulteraient. Rappelant l'importance des enjeux financiers en cause, qui atteignent 320 euros par hectare, soit à peu près un milliard d'euros de fonds communautaires, il a souhaité une évolution de ce projet.

M. Serge Poignant a tout d'abord indiqué que les commissions de l'agriculture des parlements nationaux de l'Union européenne, rencontrées à Rome les 2 et 3 octobre derniers, c'est-à-dire après l'échec des négociations de Cancún, partageaient pleinement la position du Gouvernement français en faveur d'une agriculture axée prioritairement sur une production de qualité, la défense des terroirs et l'aménagement du territoire.

Concernant l'INAO, il a appelé à débloquer au plus vite les crédits gelés en 2003, qui s'élèvent à 500 000 euros.

S'agissant de la nouvelle taxe d'équarrissage, il a suggéré que des dispositions spécifiques soient prises pour éviter de pénaliser les éleveurs de porcs.

Il a enfin souhaité savoir si des CAD pouvaient être signés avant la fin de l'année 2003, ce qui supposerait la publication très rapide d'arrêtés et de circulaires, et s'ils pourraient être conclus en dehors des zones couvertes par le programme « Natura 2000 ».

M. Philippe Martin (Marne) a souhaité obtenir des précisions sur le financement par une taxe de l'Agence pour le développement agricole et rural (ADAR), qui succède à l'Association nationale pour le développement agricole (ANDA), et s'est interrogé sur la part qui reviendrait dans ce cadre à l'Institut technique du vin (ITV).

Abordant le problème de la situation de l'INAO, il a déploré que les dotations de l'Etat soient aujourd'hui réduites alors même que les missions de cet organisme ont été accrues. Il s'est aussi inquiété de l'augmentation des importations d'acide tartrique de synthèse en provenance de Chine, l'innocuité de ce produit n'ayant pas été prouvée.

M. Edouard Leveau s'est inquiété des nouvelles règles de calcul concernant le déchirage et a souhaité savoir si la période retenue serait celle de l'intention de déchirer ou du déchirage réel. Il a ajouté que la réduction programmée de la flotte, en conduisant à réduire la largeur des navires, allait à l'encontre de la sécurité des marins, et que les conditions de calcul de la puissance de la flotte, par référence aux moteurs des navires, étaient défavorables à la France.

En réponse aux intervenants, M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales, a apporté les précisions suivantes :

- les crédits en faveur de la forêt inscrits dans le projet de loi de finances pour 2003 ne prennent pas en compte les dommages créés par la sécheresse et les incendies estivaux, les crédits nécessaires pouvant être réajustés en cours d'année. Le Conservatoire national de la forêt méditerranéenne est loin d'être sacrifié même si ses crédits baissent légèrement, passant de 9,8 à 9,5 millions d'euros. Par ailleurs les efforts de reconstitution des forêts ravagées par les tempêtes de décembre 1999 seront poursuivis, tandis que la réforme de l'ONF sera menée à son terme conformément au contrat signé avec l'Etat, valable jusqu'en 2006.

- s'agissant du FNDAE, dont les ressources destinées au PMPOA ont été supprimées l'an dernier à la suite d'un amendement parlementaire, il convient d'observer qu'il a accumulé un très important retard dans la consommation de ses crédits. Ainsi, au 31 décembre 2002, le montant des autorisations de programme non affectées atteignait 1,15 million d'euros dans le département de l'Aube, et 305 000 euros dans celui du Finistère. Cette situation témoigne d'une lourdeur globale des procédures de gestion, même si des différences peuvent exister à ce niveau d'un département à l'autre. En tout état de cause, la politique d'intervention en faveur de la protection des ressources en eau fera prochainement l'objet d'un projet de loi, qui sera présenté par le ministère chargé de l'écologie. Pour ce qui concerne le ministère de l'agriculture, la capacité d'intervention dans le domaine de l'assainissement se limite aux crédits récupérés sur ceux du FNDAE et dorénavant mobilisés de façon indépendante dans le cadre du PMPOA ;

- en ce qui concerne le découplage des aides aux cultivateurs de légumes, il convient de rappeler qu'aux termes de l'accord de Bruxelles, qui avait ouvert aux Etats la possibilité d'accorder ces aides, deux règles avaient été fixées en même temps pour faire barrage aux risques de pratiques anti-concurrentielles : d'une part, il était interdit de cultiver les légumes sur des surfaces antérieurement affectées à d'autres productions agricoles ; d'autre part, le dispositif des aides devait faire l'objet d'un réexamen annuel pour repérer d'éventuelles distorsions de concurrence. La refonte des aides intervenue en Allemagne, selon une logique non plus sectorielle mais territoriale, s'est traduite par une baisse moyenne des aides, de plus petits montants étant accordés à un nombre plus élevé de producteurs. Les cultivateurs de légumes ont globalement été bénéficiaires de cette réforme. Toutefois, la réforme de la PAC décidée au Luxembourg a conduit à geler les quantités produites à leur niveau actuel. Dans ces conditions, la modification du dispositif des aides en Allemagne ne peut conduire à aucune hausse de production, puisque les surfaces cultivées ne peuvent toujours pas s'étendre par reconversion des exploitations. Dans tous les cas de figure, la France conserve le droit d'enjoindre à la Commission européenne de prendre des mesures de sauvegarde si elle constate qu'une mauvaise mise en œuvre de la réforme de la PAC conduit à des distorsions de concurrences ;

- les difficultés budgétaires de l'INAO sont le résultat de vingt années de gestion trop laxiste, ayant eu pour résultat un gonflement exagéré des dépenses de fonctionnement par rapport aux crédits d'intervention. Cette dérive a été masquée pendant plusieurs années, tant que le budget de l'Etat pouvait augmenter ses dotations grâce au gonflement des recettes résultant mécaniquement de la croissance. L'Etat doit désormais faire face à un déficit de 360 milliards d'euros, et à un service de la dette qui est devenu sa première dépense, ce qui lui interdit de continuer à accorder des subventions sans exiger une rigueur accrue. La cohérence politique impose en effet que les attentes exprimées par les Français conduisent les services financés par leurs impôts à tenter de maîtriser leurs dépenses. S'agissant de l'INAO, une solution va être recherchée à court terme en utilisant les ressources que peut procurer le dégel de certains crédits, mais un assainissement des conditions de gestion de cet établissement est indispensable.

- la mesure de reconversion qualitative différée, dont l'acceptation par la Commission européenne avait été difficile, a heureusement reçu un bon accueil. Il est néanmoins nécessaire de continuer à évaluer son efficacité en concertation avec les professionnels ;

- s'agissant du service public de l'équarrissage, il convient effectivement de prendre en compte la filière porcine ;

- les CAD ne concernent pas spécifiquement le réseau Natura 2000, même si les deux dispositifs se chevauchent ponctuellement ;

- s'agissant de l'ITV, un retour à la filière viticole doit être encouragé ; par ailleurs les agriculteurs sont majoritaires au conseil d'administration de l'ADAR, et la filière viticole sera désormais représentée dans ce cadre ;

- s'agissant de l'utilisation de l'acide tartrique dans les pratiques œnologiques, ce dossier est suivi de près sans permettre à ce stade de prendre une décision ;

- s'agissant de la pêche, les chiffres relatifs aux déchirages secs ont fait l'objet d'annonces contradictoires, mais une clarification devrait intervenir dans les prochains jours. Les questions liées à la sécurité méritent une approche globale prenant en considération les effets des mesures communautaires dans ce domaine. Il y a effectivement un problème s'agissant de la puissance hélice-moteur, une harmonisation rapide étant souhaitable en la matière ;

La Commission a ensuite examiné les crédits de l'agriculture pour 2004.

Conformément aux conclusions de M. Antoine Herth, rapporteur pour avis, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de l'agriculture et de la pêche : agriculture pour 2004.

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Puis la Commission a examiné les crédits de la pêche pour 2004.

Conformément aux conclusions de M. Aimé Kergueris, rapporteur pour avis, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de l'agriculture et de la pêche : pêche pour 2004.

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