COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES,
DE L'ENVIRONNEMENT ET DU TERRITOIRE

COMPTE RENDU N° 8

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 27 octobre 2004
(Séance de 16 heures 30)

Présidence de M. Patrick Ollier, Président

SOMMAIRE

 

pages

- Audition de M. Serge LEPELTIER, ministre de l'écologie et du développement durable

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- Examen pour avis des crédits pour 2005 :

 

- Ecologie et développement durable (M. Christophe PRIOU, rapporteur)

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- Informations relatives à la Commission

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La Commission a entendu M. Serge Lepeltier, ministre de l'écologie et du développement durable, sur les crédits de son département pour 2005.

Le président Patrick Ollier a noté que, si le budget était en baisse dans le projet de loi de finances pour 2005, la loi de finances rectificative pour 2004 devrait, conformément à l'engagement du ministre, l'abonder à hauteur de 140 millions d'euros. Il a donc demandé au Ministre quelle serait l'affectation de ces crédits supplémentaires.

Il a ensuite interrogé le Ministre sur les modalités de mise en œuvre du « plan climat », soulignant par ailleurs la nécessité d'établir un dialogue constructif dans le domaine de la fiscalité environnementale.

Enfin, compte tenu de l'inquiétude grandissante des élus locaux, il a désiré savoir quelles mesures le Ministre comptait prendre afin de maîtriser l'augmentation du coût de traitement des déchets.

M. Serge Lepeltier, ministre de l'écologie et du développement durable, a indiqué que la présentation, nécessairement détaillée et chiffrée, des crédits de son ministère, ne devait pas conduire à occulter le fait que ce budget vise à mettre en œuvre une vraie politique. Il a ensuite rappelé que l'action de son ministère et de l'Etat était prépondérante dans le domaine de l'écologie, même si d'autres organismes mènent également une action remarquable dans ce domaine.

Il a indiqué que son ministère devait prioritairement agir pour la sécurité des citoyens, par exemple en matière de prévention des risques naturels ou industriels, pour préserver la nature, les espèces et les milieux naturels remarquables, et pour inciter les autres ministères, les collectivités territoriales, les entreprises et les citoyens à s'impliquer davantage dans les questions écologiques.

Le Ministre a ensuite rappelé que, depuis son arrivée à la tête de son ministère, il avait constamment cherché à ouvrir un débat sur les questions d'écologie, à impulser des idées nouvelles, à construire des partenariats avec les collectivités territoriales. Il a insisté sur sa volonté de concilier et de réconcilier l'écologie et l'économie.

A cet effet, il a annoncé la création des « Rendez-vous de l'écologie », destinés à être un lieu d'échanges et de réflexions, dont la première conférence le 9 novembre 2004, serait l'occasion d'entendre M. Vincent Bolloré au sujet du développement d'accumulateurs électriques à longue autonomie susceptibles d'équiper les voitures électriques.

Rappelant que ce projet de budget s'inscrivait dans un contexte général d'assainissement des finances publiques, il a indiqué que les crédits de l'écologie s'établiraient en 2005 à 825 millions d'euros en moyens de paiement contre 856 millions d'euros en 2004, ce qui représente une baisse de 3,6 %. Toutefois, il a indiqué que le Premier ministre lui avait confirmé que ces crédits seraient abondés à hauteur de 141 millions d'euros par la loi de finances rectificative pour 2004, destinés à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) pour 130 millions d'euros, au Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres pour 8 millions d'euros et à l'Office national de la chasse et de la faune sauvage pour 3 millions d'euros.

Notant que ces nouveaux crédits concerneraient essentiellement l'ADEME, qui se trouve dans une situation difficile du fait d'engagements non financés pris entre 2000 et 2002, il a indiqué que sa dotation passerait à 162 millions d'euros de crédits de paiement en loi de finances rectificative pour 2004 contre 71 millions d'euros en loi de finance initiale pour 2004, et à 200 millions d'euros en autorisations de programme.

Au total, le ministère de l'écologie et du développement durable serait donc doté de 966 millions d'euros de crédits de paiement en 2005.

Soulignant l'effort de gestion de son ministère, il a indiqué que le taux de consommation de ses crédits devrait être proche de 99 % en 2004, alors que ce taux n'atteignait pas 50 % en 2001.

Il s'est félicité que le ministère de l'écologie, comptant désormais 3 650 emplois, ait bénéficié d'une création de 20 emplois, résultant de 60 créations - dont 50 pour le contrôle des installations industrielles et 10 pour la prévision des crues - et de 40 suppressions réalisées en application du principe de non-renouvellement d'un agent public sur deux partant à la retraite.

Estimant que la conduite d'une politique en matière d'écologie et de développement durable ne devait pas uniquement reposer sur des moyens budgétaires, le Ministre a appelé de ses vœux une importante réflexion sur l'incitation des acteurs économiques privés et des citoyens à adopter un comportement plus écologique.

En outre, il a souhaité que le Parlement et le Gouvernement prennent davantage en compte ces questions, en soutenant le développement d'instruments de régulation, fiscaux ou non, comme par exemple les marchés de quotas d'émission de gaz à effet de serre.

Le Ministre a ensuite indiqué que la première priorité de son ministère serait la lutte contre le changement climatique qui constitue un enjeu majeur pour le XXIème siècle.

Il a rappelé que le Gouvernement avait présenté un « plan climat » le 22 juillet 2004 en Conseil des ministres, dont l'objectif est de dépasser les normes découlant du protocole de Kyoto, en économisant 72 millions de tonnes de gaz à effet de serre chaque année, soit 13 % des émissions nationales. A cet effet, il a salué la ratification par la Russie du protocole de Kyoto.

Il a indiqué qu'une action particulière avait été entreprise pour développer les biocarburants dans le secteur des transports par un triplement des agréments avant 2007 et une concertation sur la fiscalité écologique.

Dans le domaine de l'habitat, il a ensuite indiqué qu'un crédit d'impôt serait destiné aux ménages à partir du 1er janvier 2005, s'élevant à 25 % pour les chaudières à condensation et les matériaux d'isolation et à 40 % pour les équipements utilisant des énergies renouvelables.

Il a enfin indiqué qu'un système innovant d'échanges de quotas d'émission de gaz à effet de serre allait permettre de plafonner les émissions dans les secteurs de l'industrie, conduisant les entreprises à prendre en compte leurs émissions de gaz carbonique. Le Ministre a souligné que l'action du ministère dans ce domaine mobiliserait 40 millions d'euros en 2005 contre 26 millions d'euros en 2004.

Il a en outre précisé, que 40 millions d'euros supplémentaires seraient destinés à la recherche sur les véhicules propres dans le cadre du plan « Véhicule Propre » en 2004 et 2005.

Le Ministre a ensuite indiqué que la préservation de la biodiversité constituait la seconde action prioritaire du ministère, visant à stopper, à terme, la dégradation des milieux les plus riches écologiquement.

Il a ainsi indiqué que, dans le cadre de la stratégie nationale pour la biodiversité, les plans d'action du Gouvernement seraient présentés au comité interministériel du développement durable, afin d'être validés avant la fin de l'année.

Le Ministre a ensuite rappelé que plus de 70 millions d'euros seraient consacrés en 2005 au soutien d'actions partenariales et contractuelles pour la gestion des espaces naturels contre 61 millions d'euros en 2004, l'achèvement du réseau Natura 2000 avant 2006 en constituant l'un des objectifs clés.

Au-delà des moyens budgétaires, il a indiqué qu'il comptait beaucoup sur les avancées que le Gouvernement pourrait réaliser sur le plan des incitations économiques. A cet égard, il a rappelé le vote, dans le cadre du projet de loi de développement des territoires ruraux, d'une exonération de la taxe sur le foncier non bâti dans les zones humides et les sites Natura 2000 en contrepartie de règles de bonne gestion.

Il a en outre rappelé que la mesure consistant à rendre éligibles au fonds de compensation de la TVA les dépenses des collectivités territoriales concernant les travaux qu'elles réalisent sur les terrains du Conservatoire du littoral ferait l'objet d'un amendement gouvernemental au projet de loi de finances pour 2005, à la suite des décisions du comité interministériel à l'aménagement et au développement du territoire (CIADT) du 14 septembre dernier.

Il a ensuite annoncé que la troisième priorité de son action consisterait dans la rénovation de la politique de l'eau, un sujet majeur pour notre société. S'agissant du mode de financement de cette politique, le Ministre a indiqué qu'il serait simplifié et clarifié par le projet de loi sur l'eau qu'il présentera au Conseil des ministres avant la fin de l'année 2004.

Ce projet de loi aura notamment pour objectif, a-t-il annoncé, de mettre fin à des financements croisés et complexes entre l'Etat et les agences de l'eau, ce qui explique que les crédits consacrés à la protection de l'eau passent de 112,7 millions d'euros en 2004 à 100,4 millions d'euros dans le présent projet de budget. Le Ministre a souligné qu'il ne s'agissait pas d'un désengagement de son ministère mais d'un recentrage sur sa mission de garant de la qualité de l'eau vis-à-vis de l'ensemble des citoyens permettant également de prévenir les risques liés aux inondations.

Il a indiqué que les moyens consacrés à la prévention des dommages liés aux inondations seraient portés à 48 millions d'euros, ce qui représente une augmentation de 20 %. En outre, il a indiqué que 10 postes seraient créés dans les services de prévention des crues, instruments indispensables à une politique de prévention efficace.

Le Ministre a ensuite annoncé que sa quatrième priorité serait la prévention des risques technologiques et naturels et la lutte contre les pollutions. Il a estimé qu'il fallait prioritairement mettre en œuvre les dispositions de la loi n° 2003-699 du 30 juillet 2003 relatives aux risques technologiques et naturels, en adoptant les plans de prévention des risques technologiques autour des 626 établissements classés « SEVESO ». Il a rappelé que 50 postes avaient été créés pour renforcer le contrôle des installations classées, dans le cadre d'un programme de modernisation portant sur la période 2004-2007.

De même, le Ministre a indiqué que l'accent serait mis en 2005 sur la prévention des risques naturels, notamment grâce à l'élaboration des plans de prévention des risques naturels destinés à réduire les effets désastreux de phénomènes naturels violents, les crédits destinés à cette politique passant de 9,2 millions d'euros en 2004 à 12,3 millions d'euros en 2005. Il a indiqué aussi qu'une place croissante serait en outre accordée à l'information du public sur les risques encourus.

Il a ensuite indiqué que le présent projet permettrait de poursuivre la mise en œuvre du plan national de lutte contre la pollution de l'air, décidé le 5 novembre 2003 après l'épisode exceptionnel de pollution à l'ozone de l'été 2003.

Rappelant le lancement du « plan national santé environnement », il a précisé que les moyens, hors recherche, de l'agence française de la sécurité sanitaire environnementale (AFSSE) seraient doublés pour atteindre 3,2 millions d'euros, tandis que ceux de l'institut national de l'environnement naturel et des risques (INERIS) seraient portés à 27 millions d'euros, ce qui représente une augmentation de 4,5 millions d'euros. L'ensemble des actions de cette quatrième priorité, a-t-il indiqué, bénéficiera d'une augmentation importante de ses moyens, en passant de 74 à 85 millions d'euros en crédits de paiement.

Le Ministre a ensuite annoncé que sa cinquième priorité concernait la promotion du développement durable, notant que les actions menées au titre des quatre autres priorités y contribuaient naturellement. Il a estimé que le projet de loi constitutionnelle relatif à la Charte de l'environnement mettait en évidence l'importance croissante des enjeux liés au développement durable dans la mise en œuvre des politiques publiques.

Il a ensuite estimé qu'un renforcement des actions de l'ensemble des services de l'Etat et de leur coordination était nécessaire en matière de développement durable. Il a rappelé à ce propos qu'un délégué interministériel au développement durable avait été nommé et placé auprès de lui par délégation du Premier ministre.

Il a indiqué que les crédits consacrés à cette action représenteraient 15 millions d'euros en 2005, afin d'impulser, d'animer et de coordonner des actions au niveau interministériel.

Le Ministre a ensuite expliqué qu'il serait nécessaire, dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 2005, de diminuer les crédits consacrés à la protection de la nature au profit de ceux consacrés à la protection de l'eau, compte tenu des besoins dans ce domaine. Cette adaptation devrait permettre de ne pas réitérer le prélèvement sur les agences de l'eau réalisé en 2004 au profit du budget du ministère.

Il a donc indiqué qu'il déposerait un amendement augmentant de 5 millions d'euros les moyens consacrés à la politique de l'eau, dont 3 millions d'euros pour les risques d'inondations et 2 millions d'euros pour la connaissance et la surveillance de l'eau. Il a précisé que ce redéploiement ne se ferait pas au détriment des priorités en matière de biodiversité, puisque les moyens consacrés à celle-ci connaîtront une augmentation globale de plus de 7 %.

Le Ministre a ensuite annoncé un important chantier de réforme de son ministère, portant sur la réorganisation de l'administration centrale autour de la nouvelle délégation interministérielle au développement durable et d'un secrétariat général, s'accompagnant d'un recul des effectifs de l'administration centrale.

Il a précisé que cette réforme viserait à rapprocher les directions régionales de l'environnement des directions régionales de l'industrie, de la recherche et de l'environnement dans le cadre de pôles régionaux et tirerait les leçons des expérimentations de direction commune des deux services menées dans quatre régions en 2005.

Il a indiqué que des partenariats au niveau départemental seraient réalisés entre les ministères chargés de l'équipement et de l'agriculture : ainsi une circulaire mettra prochainement en place dans chaque département un service unique de police de l'eau, à la place des 4 à 8 services en charge aujourd'hui de cette politique.

Il a en outre indiqué que la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finance conduirait à revoir la gestion de son ministère. Dans ce cadre, il s'est interrogé sur l'opportunité de créer un programme destiné à la protection de l'eau, estimant nécessaire d'avoir l'accord du Parlement sur cette question.

Le Ministre a enfin insisté sur sa volonté de valoriser et d'évaluer systématiquement les actions de son ministère et de rattraper le retard pris dans le domaine de la transposition des directives communautaires.

Avant de passer la parole au rapporteur pour avis, le président Patrick Ollier a estimé que l'annonce faite par le Ministre, dans le cadre du « plan climat », de la création d'un crédit d'impôt renforcé dont bénéficieront les ménages à partir du 1er janvier 2005, de 25 % sur les chaudières à condensation et les matériaux d'isolation, et de 40 % pour les équipements utilisant des énergies renouvelables constituait un recul par rapport aux dispositions du projet de loi d'orientation sur l'énergie, qui prévoit un crédit d'impôt de 40 % sur tous les équipements. Soulignant l'attachement des députés de la Commission à cette disposition, il a souhaité une clarification de la position du Gouvernement sur ce point.

M. Christophe Priou, rapporteur pour avis, a tenu à rappeler à titre liminaire qu'un bon budget n'était pas forcément un budget en augmentation. Notant que ce budget permettrait d'honorer certains engagements pris par la précédente ministre de l'Ecologie, il a indiqué que celui-ci était présenté sous le signe de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances, saluant les efforts du ministère pour préparer l'entrée en vigueur de la loi organique en clarifiant la présentation des crédits du ministère.

Il s'est en outre félicité de l'annonce par le Ministre de l'augmentation des crédits du ministère de 140 millions d'euros en loi de finances rectificative pour 2004, tout en regrettant l'atteinte au principe de sincérité budgétaire qui résulte de ce type de pratique.

Il a estimé que la baisse de 3,6 % des crédits du ministère de l'Ecologie pour 2005 ne devrait pas affecter les politiques prioritaires du ministère, les moyens destinés à la protection de la nature, des sites et des paysages ayant été préservés. Il a cependant regretté que les moyens destinés au Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres soient réduits, alors que le projet de loi de développement des territoires ruraux tend à accroître ses compétences dans les zones humides.

Il a ensuite regretté la baisse des crédits consacrés à la politique de l'eau, à la veille de l'examen de projet de loi sur l'eau, ce qui pourrait conduire à penser que les crédits mobilisés dans le cadre de ce projet de loi ne feront que compenser le recul des moyens voté en loi de finances initiale.

Enfin, le rapporteur a regretté un certain repli des crédits dans des domaines aussi sensibles que la prévention des inondations, des pollutions industrielles et des risques naturels, dans lesquels la stabilité des moyens est gage d'efficacité de l'action.

En conclusion, le rapporteur a demandé des explications au sujet de la baisse des crédits de certains gestionnaires d'espaces protégés tels que le Conservatoire du littoral ou les parcs nationaux. Il a tenu à interroger le Ministre sur l'efficacité des moyens qui seront consacrés à la prévention des risques naturels et technologiques. Il lui a enfin demandé d'expliciter ses ambitions dans le cadre du « plan climat » et du « plan national santé environnement ».

Intervenant au nom du groupe socialiste, Mme Geneviève Perrin-Gaillard a déploré la baisse de 3,6 % du budget du ministère de l'écologie. Rappelant les nombreuses prises de position du Président de la République en faveur de l'écologie, notamment à Johannesburg, mais aussi en faveur de la fiscalité dédiée, elle a néanmoins souligné le fait que ces bonnes intentions se traduisaient paradoxalement par une diminution des crédits du ministère de l'écologie au moment des arbitrages budgétaires. Relevant que certains secteurs du ministère voyaient leurs crédits augmenter, elle a néanmoins indiqué qu'ils avaient fortement baissé en 2004, à l'instar des crédits de l'ADEME.

Elle a regretté que le « plan climat », bien que constituant une priorité gouvernementale, ait été reporté, et ne contienne à ce stade aucune disposition relative au bonus-malus sur l'achat de véhicules neufs, ni au redéploiement entre la route et le rail, ni aux mesures d'économies d'énergie dans le secteur du logement. Elle a regretté que ce plan ne contienne aucune mesure véritablement efficace, de même que le plan relatif aux quotas d'émission des gaz à effet de serre.

Elle a jugé le « plan national santé-environnement » insuffisant, alors même que la santé doit être protégée des risques liés à l'utilisation de matériaux de construction. Elle a noté que seule l'amiante était prise en compte par ce plan, alors que d'autres matériaux étaient tout aussi dangereux pour la santé.

Evoquant les associations de protection de l'environnement, elle a souligné qu'elles étaient, comme l'association France Nature Environnement, contraintes de licencier du personnel, alors qu'elles pourraient être d'une aide précieuse pour le ministère de l'écologie.

S'agissant de la mission d'information sur les organismes génétiquement modifiés (OGM), qui a commencé ses travaux depuis deux semaines, elle a indiqué avoir appris qu'un texte de loi sur la question était à l'étude ; elle a donc demandé au Ministre s'il le défendrait et s'est également interrogée sur la raison d'être de cette mission d'information, dès lors qu'un projet était déjà en cours d'élaboration. Enfin, elle s'est demandée si les positions du ministre de l'agriculture et du ministre de l'écologie étaient réellement convergentes.

En ce qui concerne les déchets, elle a interrogé le Ministre sur l'état d'avancement des travaux du groupe de travail mis en place par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

Mme Marcelle Ramonet, s'exprimant au nom du groupe UMP, a affirmé qu'il existait deux lectures possibles du budget de l'écologie : l'une pessimiste, se limitant à constater une baisse de 3,6 % des crédits du ministère en 2005, l'autre, offensive, reposant sur une analyse globale et prenant en compte les actions prioritaires du gouvernement ainsi que le périmètre du ministère de l'écologie et du développement durable. Relevant la volonté du ministre d'opérer des choix forts dans le prolongement de l'action menée depuis 2002, elle a souligné l'effort mis en œuvre pour mettre un terme aux financements croisés entre l'Etat et les agences de l'eau.

Puis, elle a relevé cinq priorités dans le budget 2005 :

- tout d'abord, la lutte contre le changement climatique, nécessaire au respect du protocole de Kyoto, avec, notamment, des mesures fiscales en faveur des biocarburants ;

- ensuite, les mesures relatives au patrimoine naturel et à la préservation de la biodiversité ; à cet égard, elle a interrogé le Ministre au sujet des équilibres mondiaux et sur les menaces qui pèsent sur lui ;

- en outre, les mesures de lutte contre les inondations et la prévention des dommages, avec une hausse des crédits de l'ordre de 19 % ;

- la prévention des risques technologiques et naturels, et la lutte contre les pollutions, avec le renforcement significatif des moyens de contrôle dévolus à l'inspection des installations classées ;

- enfin, la lutte contre le bruit.

Après avoir demandé au Ministre de préciser la politique qu'il comptait mener en matière de déchets, elle l'a interrogé sur le plan de maîtrise des pollutions d'origine agricole, soulignant les difficultés engendrées par l'application de la directive nitrates pour les petites exploitations, et sur le plan national d'allocation de quotas d'émission de gaz à effet de serre.

Rejoignant les précédentes interventions, M. Jean Lassalle a appelé à poursuivre sans faiblir l'action engagée pour lutter contre le changement climatique et améliorer la politique de prévention des risques naturels, politique pour laquelle il a salué la création de dix nouveaux emplois dans les services du ministère. Il a par ailleurs noté que les efforts menés pour lutter contre l'effet de serre ne pourraient être efficaces que s'ils l'étaient de manière durable et équilibrée, tant en France que dans le reste du monde, la notion de développement durable et équitable devant être privilégiée.

Il a ensuite considéré que, depuis 30 ans, la politique de développement durable conduite par les ministres successifs n'avait pas toujours été bien comprise des Français et qu'il convenait d'éviter les initiatives prises par le seul ministère chargé de l'environnement contre l'avis de tous les autres ministères.

Puis, il a suggéré de mener une réflexion sur les conditions de mise en œuvre des directives, soulignant l'absence de débat démocratique et l'influence des groupes d'intérêts au Parlement européen lors de l'adoption, dans les années 1980, d'une série de directives ayant trait à l'environnement.

Il a également appelé à poursuivre le travail destiné à accroître la transparence du financement des directions régionales de l'environnement et de leurs relations avec les associations de protection de la nature, notant qu'un rapport d'enquête très important avait été réalisé sur la question, et que Mme Roselyne Bachelot, alors ministre, avait demandé l'ouverture d'une enquête.

Il a enfin jugé impossible de mener une action d'envergure en faveur de l'environnement dès lors que le quart du territoire national est « emprisonné » sans le consentement de la population, dans le cadre du dispositif Natura 2000. Il a ajouté que l'application de ces directives était, avec la disparition des services publics et l'exode rural, l'un des trois principaux fléaux affectant le développement des zones rurales aujourd'hui. Rappelant avoir lui-même présidé un parc naturel régional, il a donc souhaité que les pouvoirs publics engagent, au niveau local, des discussions avec la population et les élus à ce sujet.

M. André Chassaigne s'est d'abord étonné des propos visant à présenter la baisse du budget de l'environnement comme une illusion d'optique alors que celle-ci est bien réelle. Il a jugé plus grave encore l'accentuation du décalage entre les effets d'annonce en matière environnementale d'une part, et l'évolution défavorable des crédits disponibles d'autre part. Il a estimé que cette situation était d'autant plus difficile à comprendre qu'auraient lieu dès le début de l'année 2005 l'examen du projet de loi sur l'eau encore en préparation, ainsi que la poursuite de la procédure d'adoption du projet de loi constitutionnelle relative à la Charte de l'environnement, dont les exigences sont très élevées.

Puis, il a considéré que la baisse des moyens disponibles pour financer la politique de l'eau pourrait avoir des conséquences très négatives pour le monde rural, compte tenu de l'ampleur des travaux à effectuer, dans les communes rurales, en matière d'adduction d'eau, de traitement de l'arsenic, très coûteux, ou de service public de l'assainissement non collectif. Il a également souhaité savoir si le délai pour mener ces travaux, actuellement fixé à la fin de l'année 2005, pourrait éventuellement être prolongé.

S'agissant de la collecte et du traitement des déchets ménagers, il a demandé quand viendrait en discussion le projet de loi annoncé sur cette question.

Il a ensuite indiqué que la baisse des crédits européens consacrés aux parcs naturels régionaux (PNR) provoquait de très fortes inquiétudes chez les personnels concernés, compte tenu du financement communautaire de nombreux projets exécutés dans le cadre des PNR et du rôle important de ces structures en termes d'animation du territoire et de leur implication dans l'élaboration de chartes de territoire.

Puis, il a regretté la diminution des crédits consacrés à la prévention des pollutions et des risques qui, couplée à l'évolution réductrice de la médecine du travail, pourraient conduire à sous-estimer l'importance des problèmes sanitaires posés, au sein des entreprises, notamment dans l'industrie, par certaines productions ou certains matériaux tels que l'amiante.

Il a enfin vivement déploré la politique d'abandon du fret ferroviaire, estimant qu'elle aurait des conséquences terribles sur l'environnement au cours des prochaines décennies.

En réponse aux intervenants, M. Serge Lepeltier, ministre de l'écologie et du développement durable, a apporté les précisions suivantes :

- le coût du service public de traitement des déchets augmente d'environ 7 % par an, ce qui représente un doublement en dix ans. Cette évolution s'explique d'abord par l'échec de la prévention, pourtant érigée en objectif par la loi n° 92-646 du 13 juillet 1992 relative à l'élimination des déchets. Le futur projet de loi sur les déchets aura notamment pour objet de chercher les causes de cet échec et de trouver des solutions à l'augmentation actuelle du volume des déchets. Toutefois, le renchérissement du coût du traitement des déchets est la conséquence de l'amélioration des conditions environnementales de ce traitement. Il convient par exemple de rappeler que le durcissement des normes et la modification des techniques de traitement ont permis de diminuer très fortement les rejets de dioxine engendrés par les incinérations. De même, la fermeture de décharges illégales constitue une avancée écologique, même si le coût de gestion des nouveaux centres d'enfouissement techniques est plus élevé que celui des anciennes décharges. Enfin, le renforcement des opérations de collecte collective et de recyclage des déchets a également un coût financier mais il est utile sur le plan environnemental ;

- il serait souhaitable que la Commission engage une réflexion sur la fiscalité écologique, en partant du principe fondamental selon lequel l'outil fiscal doit d'abord avoir une finalité incitative. La France accuse un retard important dans ce domaine par rapport à d'autres pays, dans lesquels une forte diversification des instruments concourant à la protection de l'environnement a eu lieu depuis une dizaine d'années. La mise en place, très positive, à partir du 1er janvier 2005, de quotas d'émissions de gaz à effet de serre s'inscrit d'ailleurs dans une logique économique et non d'interdiction. D'une manière générale, il convient de réconcilier, par les incitations fiscales, la liberté économique et la protection de l'environnement, en respectant le principe fondamental selon lequel la fiscalité écologique ne doit pas conduire à un alourdissement des charges destiné à alimenter le budget, mais a vocation à orienter les comportements pour, à terme, disparaître. Le Premier ministre a retenu le principe de la création d'un comité de réflexion pour travailler sur cette question, mais une réflexion parallèle des parlementaires est souhaitable ;

- les moyens consacrés à la gestion des espaces protégés progressent. Ainsi, le Conservatoire du littoral verra ses crédits abondés de 8 millions d'euros en loi de finances rectificative pour 2004, ce qui portera ses moyens d'investissement pour 2005 au niveau de 2004 soit 19,2 millions d'euros. Les parcs naturels, et notamment les parcs régionaux, bénéficieront également de la forte progression des moyens consacrés à la protection de la nature, des sites et des paysages. La préservation de la biodiversité sera également assurée par la poursuite de la constitution du réseau Natura 2000, les moyens lui étant consacrés progressant de 25 % pour accompagner la montée en puissance du dispositif ;

- les moyens consacrés à la prévention de la pollution et des risques progressent très fortement. Les crédits finançant les actions de prévention des risques et de lutte contre les pollutions passent ainsi, en 2005, à 84,5 millions d'euros contre 74,2 millions d'euros en 2004. Les moyens consacrés à la prévention des inondations seront, en outre, accrus de 3 millions d'euros par un amendement gouvernemental. D'une manière générale, il est clair qu'il convient de privilégier la prévention des dommages que leur réparation, y compris d'un strict point de vue financier. Même sans prendre en considération les drames humains créés par l'exposition à cette substance, l'exemple de l'amiante l'illustre puisque le coût sanitaire atteint environ un milliard d'euros par an, somme qui va croître au cours des années à venir et qui dépasse déjà le budget tout entier du ministère de l'écologie et du développement durable.

Des résultats significatifs ont été atteints en matière de contrôle. Le nombre d'inspections réalisées dans des installations classées est ainsi passé de 25 000 en 2003 à 27 000 en 2004 et devrait être porté à 29 000 en 2005. Néanmoins, beaucoup reste à faire puisqu'il convient de comparer ce chiffre au nombre d'installations classées en activité, soit 450 000 dont 63 000 sont soumises à autorisation. Il est préférable de garantir ainsi l'application des dispositions souvent très pertinentes en vigueur plutôt que de les faire évoluer sans veiller à leur application. Outre l'augmentation du nombre d'inspecteurs des installations classées, les moyens nécessaires sont dégagés grâce aux gains de productivité rendus possibles par le rapprochement entre les directions régionales de l'environnement et les directions régionales de l'industrie, de la recherche et de l'environnement, dans les régions où ce rapprochement est expérimenté, et par la création de 400 postes dont 200 par redéploiement de personnel ;

- les derniers arbitrages sont en cours sur l'avant-projet de loi sur l'eau et les milieux aquatiques qui devrait être prochainement transmis au Conseil d'Etat. Des échanges nombreux, notamment avec les parlementaires, ont contribué à la préparation de ce texte qui pourrait être présenté en conseil des ministres fin décembre 2004 ou début janvier 2005.

L'objectif général du projet de loi sera de garantir un bon état écologique des eaux en 2015 conformément à nos engagements internationaux. Il s'agit évidemment d'un objectif très ambitieux servi par une stratégie reposant sur un rôle accru des intervenants locaux. Le projet de loi prévoit le renforcement du rôle des agences de l'eau et confortera les schémas d'aménagement et de gestion des eaux, qu'il proposera de rendre directement opposables aux tiers.

La lutte contre les pollutions diffuses sera renforcée par des programmes d'actions concernant les captages d'eau potable prévus dans le plan national santé-environnement. Le chantier est très vaste puisque la protection de captages d'eau potable alimentant la ville de Bourges, par exemple, implique une action sur environ 15 000 hectares.

Le projet de loi répondra également aux interrogations relatives au service public de l'eau et de l'assainissement et notamment aux problèmes de gestion relatifs aux assainissements non collectifs. La possibilité de constituer des provisions pour investissements sera ouverte aux services publics de distribution d'eau et d'assainissement. Les collectivités locales le souhaitant pourront abonder le budget des services publics d'assainissement non collectif. Enfin, les compétences du maire en matière d'entretien et de réhabilitation, notamment des assainissements non collectifs, seront précisées.

Le Gouvernement abordera la discussion parlementaire de ce projet de loi avec un grand esprit d'ouverture ;

- une présentation caricaturale a parfois été faite du « plan climat », l'attention se focalisant exclusivement sur le dispositif de bonus-malus pour l'achat de véhicules neufs selon leurs performances en matière de protection de l'environnement. Il s'agit, en réalité, d'un plan très ambitieux puisqu'il vise à réduire de 72 millions de tonnes équivalent CO2 les émissions françaises de gaz à effet de serre à l'horizon 2010 alors que le respect des engagements découlant du protocole de Kyoto ne nécessite qu'une réduction de 55 millions de tonnes équivalent CO2. La principale mesure du plan est la promotion des biocarburants mais celui-ci comprend également un dispositif d'allocation de quotas d'émission de gaz à effet de serre et le renforcement du crédit d'impôt pour les dépenses de maîtrise de l'énergie ou l'équipement en installations de production d'énergie d'origine renouvelable. Il importe également d'impliquer le grand public dans la lutte contre le changement climatique, ce qui a donné lieu à la campagne de communication conduite par l'ADEME sous le slogan « faisons vite, ça chauffe ». La mise en œuvre du plan sera assurée par des moyens suffisants et un tableau de bord adapté, contrairement au plan national de lutte contre le changement climatique adopté en janvier 2000, qui n'a jamais été suivi d'effet en raison de l'inconstitutionnalité de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) ;

- les crédits du ministère de l'écologie doivent être analysés à la lumière de leur taux de consommation : ainsi, les crédits non consommés se sont élevés à 55 % en 2001, à 39,8 % en 2002, contre 1 % en 2004, ce qui mérite d'être salué. Ces faibles taux de consommation enregistrés à la fin de la législature précédente sont certes dus à de fortes augmentations budgétaires mais il faut noter que certaines actions engagées par le biais d'autorisations de programme de cette période doivent être exécutées avec les crédits de paiement de 2004 et 2005 ;

- le présent projet de budget tend à éviter un décalage trop important entre autorisations de programme et crédits de paiement. A cet effet, les 141 millions d'euros qui devaient être votés en loi de finances rectificative pour 2004 viseront à conforter les moyens du ministère aussi bien en autorisations de programme qu'en crédits de paiement ;

- les associations de protection de l'environnement participent au service public de l'environnement aux côtés du ministère, ce qui justifie que leurs subventions soient, pour l'année 2005, globalement en légère augmentation ;

- le projet de loi sur les OGM qui a été annoncé porte essentiellement sur la recherche et vise simplement à transposer une directive communautaire votée au Conseil des ministres de l'Union européenne en 2001. Les principales recommandations de cette directive ont été anticipées par le Gouvernement, dans la mesure où celui-ci a mis en place une Commission de génie biomoléculaire, fait intervenir l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) dans les travaux d'expertise et prend en compte leurs recommandations ;

- la politique du Gouvernement dans la gestion du loup tend à concilier le pastoralisme et la sauvegarde du loup. Cet objectif a conduit le Gouvernement à autoriser le prélèvement de quatre animaux à ce jour ; deux ont été effectivement prélevés ;

- la politique du Gouvernement dans le domaine des énergies renouvelables est ambitieuse, et vise à changer d'échelle dans l'utilisation des biocarburants, de la biomasse, de la géothermie ou encore de l'énergie éolienne. A cet effet, un Comité national éolien a été mis en place pour améliorer les pratiques en matière d'implantation d'éoliennes ;

- les moyens consacrés à la politique de prévention des inondations seront fortement augmentés en 2005. Le ministère a lancé un programme d'action pour la prévention des inondations dans 42 bassins prioritaires tandis que deux programmes spécifiques visent plus particulièrement la vallée de la Loire et du Rhône. Les moyens destinés à la prévision des crues ont été rationalisés grâce à la mise en place du Service central d'hydrométéorologie et d'appui à la prévision des inondations (SCHAPI) ;

- la mise en œuvre des programmes de maîtrise des pollutions d'origine agricole (PMPOA) découle de la directive 91/676/CE du 12 décembre 1991, dite directive « Nitrates », auquel les agences de l'eau contribuent à hauteur de 50 %. Si les éleveurs qui souhaitent bénéficier des subventions accordées à ce titre ont jusqu'à fin 2006 pour déposer leur dossier, on peut se féliciter de l'accélération actuelle du rythme de dépôt de dossiers, due en partie à l'effort de simplification des procédures administratives réalisé par le ministère ;

- le Plan national d'allocation des quotas de gaz à effet de serre a été modifié à la demande de la Commission européenne, afin d'élargir de 643 à 1 319 le nombre de sites concernés, et à supprimer le dispositif initial de « réserve de croissance » destiné à prendre en compte le besoin des entreprises dont la croissance est supérieure à la moyenne nationale. Le marché des droits à polluer devrait néanmoins fonctionner efficacement dès le début de l'année 2005 ;

- la baisse des crédits consacrés à la protection de l'eau est uniquement liée à la clarification du financement des agences de l'eau par le ministère de l'écologie ;

- il est souhaitable de ne pas repousser le délai, actuellement fixé à 2005, avant lequel les communes rurales doivent effectuer leurs travaux en matière d'assainissement non collectif ;

- la première phase de concertation sur le projet de loi sur les déchets ménagers sera lancée à la fin de 2004 et au début de 2005, avec notamment l'appui du Conseil national des déchets, dans l'attente des recommandations du groupe de travail relatif au financement de la politique de gestion des déchets ;

- les élus s'approprient de plus en plus le concept de développement durable, et les citoyens ne peuvent à terme que les suivre sur cette voie ;

- la mise en œuvre des directives européennes, qui sont le résultat d'une négociation à laquelle la France a été, par définition, partie prenante, est un devoir du Gouvernement.

Puis, d'autres commissaires sont intervenus.

M. Yves Cochet a d'abord rappelé que c'était M. Michel d'Ornano, appartenant à l'époque à l'une des formations politiques ayant contribué à la naissance de l'UDF, qui avait signé la directive n° 79/409 CE du 2 août 1979 à l'origine du dispositif « Natura 2000 ». Il a ensuite regretté que le budget du ministère de l'écologie fût en régression sur le plan des crédits comme sur celui de l'action en faveur de l'environnement, estimant qu'un domaine de cette importance ne méritait pas ce traitement, d'autant qu'avec son enveloppe d'environ un milliard d'euros, il s'agissait d'un ministère déjà faiblement doté en comparaison des autres.

Il a déploré l'apport d'une dotation complémentaire de 140 millions d'euros à l'occasion de la loi de finances rectificative, dans la mesure où cet apport risquait de faire l'objet d'un gel dès janvier 2005, comme cela avait déjà été le cas en janvier 2004. Il a jugé qu'une diminution de l'effectif du ministère de 40 emplois se ressentirait lorsqu'il s'agirait de participer à des réunions d'arbitrage interministérielles, les grands ministères bien représentés numériquement pouvant dès lors plus facilement faire prévaloir leur point de vue.

Il a constaté qu'avec une perte d'un tiers de ses crédits, l'ADEME se trouvait au bord du démantèlement, et privée de tous moyens de mener de réelles politiques, ce qui serait préjudiciable à terme, notamment dans le domaine de la gestion des déchets. S'agissant des organismes en charge de la santé publique, il a qualifié de « nain budgétaire » l'Agence française de sécurité sanitaire environnementale (AFSSE) en comparaison de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN). Il a noté qu'en dépit de ses efforts, le Ministre n'avait pu obtenir des crédits pour la mise en œuvre de l'idée intéressante des bonus-malus à l'achat de véhicules propres dans le cadre du « plan climat ».

Il a enfin posé deux questions, la première concernant la position du Gouvernement à l'égard de l'inscription, dans le projet de loi sur l'eau, de mesures relatives à la fiscalité sur les excédents d'azote et la seconde sur l'incohérence qu'il y aurait à examiner le projet de loi annoncé sur les OGM avant que la mission commune d'information sur les OGM n'ait terminé ses travaux.

M. Léonce Deprez s'est réjoui du souci du ministre de concilier et réconcilier l'écologie et l'économie, en s'appuyant sur un partenariat entre l'Etat et les collectivités locales, puisqu'il s'agissait là d'axes d'analyse convergents avec ceux dégagés par la mission d'information sur l'application de la loi littoral qui a rendu ses conclusions en juillet dernier. Il s'est réjoui de la possibilité, ouverte dans le cadre du projet de loi relatif au développement des territoires ruraux, d'élaborer des schémas de cohérence territoriale ayant valeur de schéma de mise en valeur de la mer, ce qui devrait permettre d'appliquer les dispositions de la loi littoral en fonction des spécificités locales, ainsi que des moyens mobilisés à cet effet par le comité interministériel à l'aménagement et au développement du territoire (CIADT) du 14 septembre dernier. Il a souhaité savoir si le ministère de l'écologie prêterait son concours à leur mise au point. Il a enfin sollicité l'avis du ministre à l'égard de la prolifération des éoliennes sur les côtes de la Manche.

M. Philippe Tourtelier a interrogé le Ministre sur la possibilité d'appliquer le crédit d'impôt de 40 % aux installations photovoltaïques, et sur un éventuel gel des crédits de l'ADEME mobilisés en loi de finances rectificative pour 2004. Il a estimé que la mise en place de tableaux de bord était une bonne idée, et qu'il faudrait l'appliquer au suivi des crédits de la recherche sur l'énergie pour comparer la part consacrée à l'énergie nucléaire et aux énergies renouvelables, ainsi qu'au suivi des coûts réels de l'énergie.

M. Jean-Marc Nudant a souhaité savoir quel concours budgétaire était prévu pour la recherche sur les véhicules propres.

M. François Dosé a expliqué qu'un budget ne devait pas s'apprécier seulement en termes de moyens, mais aussi en termes d'objectifs et de méthodes. S'agissant de l'eau, il a dénoncé la situation de certaines agences de bassin, telle que celle du bassin Rhin-Meuse, qui ne leur permet pas d'honorer les contrats pluriannuels qu'elles ont passés. Il a estimé que la question du changement climatique ne devait pas relever exclusivement du ministère de l'écologie, mais être prise en charge aussi par les autres ministères concernés, comme celui du logement. Il a regretté que l'action de prévention des risques ne bénéficie pas de crédits dédiés notamment pour le démantèlement des centrales et les décrets radioactifs, et a estimé que le stockage des déchets radioactifs devait faire l'objet d'investigation de nature « sociétale ». Il a enfin déploré que l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (ANDRA) n'ait plus de conseil d'administration depuis un an.

Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont a dénoncé la disparition du Fond national d'adduction d'eau potable (FNDAE), obligeant les collectivités locales à prendre en charge directement les opérations d'assainissement des eaux, au risque d'une dégradation de la qualité de l'eau et de l'environnement.

Mme Josiane Boyce a demandé si l'exonération de taxe foncière sur les propriétés non bâties pour les terrains situés dans un site Natura 2000, votée dans le cadre du projet de loi de développement des territoires ruraux, ferait l'objet d'une compensation de l'Etat au profit des collectivités locales.

M. André Flajolet a jugé positive la très forte consommation des crédits du ministère de l'écologie et du développement durable et a salué la volonté du ministre de réaliser enfin l'unification de la police de l'eau. Il a également félicité le Ministre pour la mise en place d'une politique vertueuse de prévention des émissions de dioxyde de carbone même si quelques ajustements restent nécessaires.

Il a ensuite souhaité que le Ministre précise s'il est favorable, s'agissant de la politique de l'eau, à la mise en place d'une fiscalité discriminante à l'égard des comportements contraires à l'objectif de bon état écologique des eaux à atteindre en 2015. Il a également souhaité savoir s'il était envisageable de traiter de manière différente la consommation ponctuelle des clients, d'une part, et les activités structurantes notamment d'aménagement, d'autre part. Il a souligné, d'une manière générale, la nécessité de privilégier une approche préventive plutôt qu'une approche corrective.

Prenant acte des propos du ministre concernant l'éolien, il a souhaité savoir pourquoi la filière photovoltaïque, qui respecte les paysages, n'était pas davantage soutenue.

M. Michel Roumegoux a estimé que trois priorités apparaissaient en matière de protection de l'environnement : la lutte contre l'effet de serre, la politique de l'eau et le recyclage des déchets.

En ce qui concerne la lutte contre l'effet de serre, il a salué les mesures prises en faveur des biocarburants mais a regretté vivement la modestie des investissements réalisés pour développer le fret ferroviaire que la SNCF soutient trop peu. Il a également regretté que l'éolien, filière présentant des faiblesses importantes, soit privilégié par rapport l'énergie solaire.

Il a ensuite estimé que, puisque des économies doivent être réalisées, il conviendrait de redéployer dans des actions plus utiles, par exemple dans le soutien à l'énergie solaire, les moyens excessifs consacrés à gérer la présence des loups dans les Alpes.

Enfin, il a estimé que l'organisation des filières de retraitement des déchets restait insuffisante et qu'il convenait de mettre en place une véritable économie du traitement des déchets au lieu de considérer celui-ci comme un mal nécessaire.

M. François Sauvadet a souligné la nécessité d'utiliser toutes les solutions techniques pour contribuer à la diversification du bouquet énergétique dans le contexte du renchérissement du prix du pétrole. Il a toutefois jugé que le développement de la filière éolienne posait des problèmes spécifiques. Soulignant la nécessité d'éviter un développement anarchique de ces installations, favorisé par l'incitation financière dont bénéficient les communes d'implantation, et de mieux prendre en compte la protection des paysages, il a souhaité la mise en place d'une approche coordonnée mais respectueuse de l'autonomie communale.

Il a ensuite souligné l'attachement de son groupe au principe selon lequel l'argent des usagers de l'eau doit être consacré à la politique de l'eau, principe enfreint, dans le passé, lorsque des prélèvements ont été réalisés sur la trésorerie des agences de l'eau afin de financer d'autres actions y compris l'administration centrale du ministère de l'environnement.

S'agissant des déchets, il a rappelé le rôle central de l'ADEME en matière notamment de promotion du tri sélectif et a souhaité savoir quelles étaient les perspectives de développement dans ce domaine. Il a également souhaité savoir si une action préventive était envisagée pour réduire à la source la production de déchets en réduisant le volume des emballages.

En conclusion, il a estimé que, si les moyens restaient sans doute insuffisants au regard des enjeux, le groupe UDF, appréciant le pragmatisme de l'approche du ministre et sa capacité d'écoute vis-à-vis des parlementaires et de l'ensemble de la population, voterait les crédits de l'écologie et du développement durable pour 2005, M. Jean Lassalle s'abstenant à titre personnel.

En réponse aux différents intervenants, M. Serge Lepeltier, ministre de l'écologie et du développement durable, a apporté les précisions suivantes :

- s'agissant des moyens de l'ADEME, 71 millions d'euros de crédits de paiement étaient prévus par la loi de finances pour 2004. Le projet de loi de finances pour 2005 lui consacre 32 millions d'euros de crédits de paiement, somme à laquelle le projet de loi de finances rectificative pour 2004 ajoutera 130 millions d'euros, les autorisations de programme pour 2005 étant de 200 millions d'euros. Le Premier ministre s'est engagé à ce que les crédits alloués par la loi de finances rectificative pour 2004 ne subissent pas de gels ;

- la réflexion se poursuit sur un dispositif de bonus-malus pour l'achat de véhicules neufs selon leurs performances en matière de protection de l'environnement. Il conviendrait de l'intégrer dans une analyse plus large de la prise en compte de la préoccupation environnementale dans la fiscalité. L'objectif pourrait être d'associer des incitations à l'acquisition des produits les plus vertueux et des taxes pesant sur les produits les plus polluants, dépenses et produits se compensant sans effet macroéconomique ;

- il a été décidé de ne pas créer de taxe sur l'azote dans le projet de loi sur l'eau. Un travail est en cours avec le ministère de l'agriculture pour utiliser l'éco-conditionnalité des aides versées au titre de la politique agricole commune afin de mieux prendre en compte les processus de production et favoriser ainsi notamment les productions et les exploitations employant le moins d'azote ;

- la discussion du projet de loi relatif aux organismes génétiquement modifiés ne fait pas obstacle à la conduite d'une réflexion globale sur ce thème par la mission parlementaire ;

- le Gouvernement soutient la disposition votée dans le cadre du projet de loi relatif au développement des territoires ruraux permettant aux schémas de cohérence territoriale (SCOT) de comprendre un volet constituant schéma de mise en valeur de la mer (SMVM) ce qui favorisera leur mise en place ;

- l'installation d'éoliennes sur la Manche peut être une solution dans certains cas, mais une réflexion globale est nécessaire dans ce domaine afin de ne pas détruire le paysage français, tout en permettant l'installation d'éoliennes lorsqu'elle représente une solution optimale pour tous.

Le président Patrick Ollier est intervenu pour souligner que la politique énergétique européenne devait prendre en compte la spécificité française que constitue la production d'énergie électrique à 90 % sans émission de gaz à effet de serre ; il a estimé nécessaire d'encadrer l'implantation des éoliennes par des permis de construire, des enquêtes publiques et l'élaboration d'un schéma, par exemple régional, pour définir et organiser les lieux d'implantation.

Le Ministre de l'écologie s'est déclaré d'accord avec ces principes qui peuvent être conciliés avec le respect de l'engagement communautaire pris par la France de développer la production d'électricité d'origine renouvelable, puis a apporté les précisions suivantes :

- le crédit d'impôt de 40 % s'appliquera à l'ensemble des installations fonctionnant avec des énergies renouvelables, y compris l'énergie photovoltaïque ;

- la rentabilité de l'énergie renouvelable serait atteinte dans l'hypothèse où le prix du baril de pétrole atteindrait 70 dollars, plutôt que 50 dollars ;

- les crédits de recherche en faveur des véhicules propres seront doublés en 2005 passant de 20 millions d'euros à 40 millions d'euros ;

- le prélèvement effectué sur les agences de l'eau en 2004 a été important et déresponsabilisant pour ces agences. Mais cette pratique restera exceptionnelle, et les crédits des agences de l'eau ont, dans l'ensemble, été préservés ;

- sur les économies d'énergie dans le secteur du logement, l'effort ne doit pas porter seulement sur la construction de logements neufs, mais aussi sur la rénovation des logements anciens, d'autant que notre consommation moyenne d'énergie est très supérieure à celle d'autres pays situés plus au nord que le nôtre ;

- le conseil d'administration de l'ANDRA est en cours de renouvellement ;

- le Commissariat à l'énergie atomique (CEA) va intégrer au rang de ses priorités la gestion des déchets nucléaires et y consacrer une partie des moyens importants dont il dispose ;

- la suppression du FNDAE par la loi de finances pour 2004 a conduit à transférer ses ressources aux agences de l'eau, qui les distribueront aux départements dans des conditions identiques aux années précédentes ;

- les exonérations de taxe foncière sur les propriétés non bâties applicables aux terrains inclus dans un site Natura 2000 ainsi qu'à certaines zones humides seront compensées par l'Etat ;

- les dispositifs de fiscalité environnementale sont intéressants dès lors que leur produit est affecté à la protection de l'environnement, ce qui n'a pas été le cas de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) dont le produit, d'un montant de 400 à 500 millions d'euros, a été intégré au budget général de l'Etat. La taxe sur le carbone, qui a été envisagée dans le cadre du plan national de lutte contre le changement climatique a été déclarée inconstitutionnelle, mais cet échec ne doit pas conduire à écarter toute fiscalité écologique ;

- la nécessité de développer sur le long terme l'énergie solaire fait l'objet d'un consensus, en dépit du fait qu'elle est pour l'heure relativement coûteuse ;

- le ministère travaille activement à la gestion des produits en fin de vie. Il existe actuellement plusieurs filières parallèles de traitement, qui se contredisent parfois et posent des problèmes de rentabilité économique ;

- le principe d'une utilisation des produits fiscaux qui peuvent être générés par le secteur de l'eau en faveur de la politique de protection de l'eau ne peut qu'être soutenu ;

- les problèmes liés aux services d'assainissement non collectifs mériteront d'être abordés dans le cadre de l'examen du prochain projet de loi sur l'eau, afin de déterminer, notamment les responsabilités des communes et les moyens qu'elles ont de les remplir.

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La Commission a ensuite examiné, pour avis, les crédits de l'écologie et du développement durable pour 2005.

Conformément aux conclusions de M. Christophe Priou, rapporteur pour avis, la Commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de l'écologie et du développement durable pour 2005.

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Informations relatives à la Commission

La Commission a procédé à la nomination de rapporteurs :

- M. Jean Gaubert a été nommé rapporteur pour la proposition de résolution de M. Henri Emmanuelli et plusieurs de ses collègues (n° 1871) tendant à la création d'une commission d'enquête visant à analyser le niveau et le mode de formation des marges et des prix dans le secteur de la grande distribution, et les conséquences de l'évolution des prix sur le pouvoir d'achat des ménages ;

- M. Georges Mothron a été nommé rapporteur pour avis sur le projet de loi de programmation pour la cohésion sociale, sous réserve de son dépôt.


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