COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES,
DE L'ENVIRONNEMENT ET DU TERRITOIRE

COMPTE RENDU N° 14

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 10 novembre 2004
(Séance de 17 heures)

Présidence de M. Yves Coussain, vice-président

SOMMAIRE

 

pages

- Audition de M. Marc-Philippe DAUBRESSE, ministre délégué au logement et à la ville

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- Examen pour avis des crédits pour 2005 :

 

- Logement (M. Jean-Pierre ABELIN, rapporteur)

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- Information relative à la Commission

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La Commission a entendu M. Marc-Philippe Daubresse, ministre délégué au logement et à la ville, sur les crédits de son département pour 2005.

S'adressant au ministre et à l'ensemble de ses collègues, M. Yves Coussain, président, les a priés de bien vouloir excuser le président Patrick Ollier qui rendait hommage, aux Invalides, aux soldats français tombés en Côte d'Ivoire le week-end dernier.

Puis, s'adressant au ministre et évoquant brièvement le budget du logement, il s'est félicité de l'augmentation du budget du logement de 8,3 %. Soulignant le fait qu'un budget efficace n'est pas obligatoirement un budget en accroissement, mais un budget permettant d'engager des actions efficaces, il a rappelé que ce budget était présenté dans le cadre du ministère de la cohésion sociale. Puis il a cédé la parole au ministre délégué au logement et à la ville, M. Marc-Philippe Daubresse.

M. Marc-Philippe Daubresse a tout d'abord rappelé que le budget du logement avait cette année une résonance particulière, et ce, à double titre : d'une part, parce qu'il s'inscrivait dans le cadre de la politique de cohésion sociale, et d'autre part, parce que la politique de la ville et celle du logement s'inscrivaient désormais dans une certaine cohérence ministérielle. Néanmoins, il a souligné que le ministère du logement était aussi celui de la construction, du bâtiment, et de l'ensemble des questions de logement.

A cet égard, il a rappelé le contexte de boom immobilier dans lequel nous nous trouvons actuellement, mentionnant notamment le record historique enregistré depuis vingt ans en matière de constructions de logements neufs et d'autorisations de mises en chantier de logements neufs. Il a cependant souligné le paradoxe que constitue la coïncidence entre ce boom immobilier et la crise de logement social que connaît notre pays. Il a précisé que le budget du logement se fondait sur ce diagnostic pour tenter de résoudre, dans le cadre de l'examen à l'Assemblée nationale du projet de loi de programmation pour la cohésion sociale, la crise du logement social en utilisant à cette fin tous les leviers disponibles. Il a ajouté que la crise du logement s'analysait comme une crise de l'offre, dans la mesure où l'offre est inadaptée, tant sur le plan quantitatif - en particulier en ce qui concerne les logements locatifs sociaux - qu'en ce qui concerne le niveau des prix.

Indiquant que le budget bénéficiait d'une hausse de 8,3 % pour s'élever à 6,53 milliards d'euros, il a ensuite souligné la nécessité d'aborder ce budget en tenant compte des changements de périmètre opérés. En effet, les crédits de l'urbanisme ont été transférés au ministère de l'équipement, pour des raisons d'efficacité, en dépit d'une co-tutelle du secteur de l'urbanisme exercée par le ministère du logement et le ministère de l'équipement ; les aides au logement temporaire des personnes défavorisées relèvent du ministère de la santé, et le Fonds de solidarité logement a été transféré au ministère de l'intérieur dans le cadre de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et aux responsabilités locales ; quant au prêt à taux zéro, qui a fait l'objet d'une amélioration très importante, il sera désormais financé par un crédit d'impôt, et non plus par une subvention budgétaire aux banques : cela représente 525 millions d'euros. Il a également indiqué qu'en période de croisière, ce crédit d'impôt représenterait environ un coût d'1,4 milliard d'euros. Puis, il a rappelé qu'en 2004, le budget avait baissé de 7 % environ, cette baisse ayant été justifiée par le ministre en charge du logement à l'époque, M. Gilles de Robien, par l'existence d'une baisse des taux.

Revenant sur la hausse, à périmètre constant, de 8,3 % du budget pour 2005, qui représente 487 millions d'euros, il a souligné le fait qu'elle était due d'une part à l'augmentation des aides personnalisées au logement de 333 millions d'euros, et d'autre part, au plan de cohésion sociale, ce dernier prévoyant pour le logement une dotation de 150 millions d'euros, à raison de 80 millions affectés à la réalisation de l'objectif de doublement du nombre de logements sociaux, et de 70 millions d'euros en faveur du secteur locatif privé. S'agissant du prêt à taux zéro (PTZ), il a expliqué l'existence de crédits de paiement affectés à son financement dans le PLF 2005 par la nécessité de financer les prêts émis en 2004. Par conséquent, les financements budgétaires seront interrompus à compter de l'entrée en vigueur du prêt à taux zéro réformé, ou « PTZ plus ».

Puis, abordant les principales mesures du PLF 2005, il a rappelé qu'elles s'inscrivaient dans le cadre du projet de loi de programmation pour la cohésion sociale, qui prévoit notamment la construction sur cinq ans de 500 000 logements sociaux, ce qui représente un doublement de la moyenne annuelle du nombre de logements produits. Il a souligné que le plan de cohésion sociale visait notamment à répondre au retard accumulé depuis dix ans en matière de production de logements sociaux. Il a souligné l'objectif, fixé par le projet de loi, de financement de 90 000 logements en 2005, compte non tenu des logements mis à disposition dans le cadre du programme national de rénovation urbaine. Il a évoqué l'affectation, pour financer cet objectif, de 442 millions d'euros en autorisations de programme - ce qui constitue une augmentation de 22 % par rapport à 2004 - et de 465 millions d'euros en crédits de paiement - ce qui constitue une augmentation de 62 %. Ce plan de cohésion sociale prévoit de rattraper le retard accumulé grâce à une augmentation de 400 millions d'euros de crédits de paiement supplémentaires par rapport aux autorisations de programmes, affectés à la résorption de la dette contractée par l'Etat vis-à-vis des organismes HLM.

En ce qui concerne l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat, le ministre a précisé qu'elle se voyait dotée de 462 millions d'euros en autorisations de programme et 395 millions d'euros en crédits de paiement, afin de mettre en œuvre le premier aspect du volet logement du projet de loi de programmation pour la cohésion sociale. Les crédits de paiement correspondent aux besoins en trésorerie de l'ANAH pour atteindre l'objectif de doublement, de 20 000 à 40 000, du nombre de logements vacants remis sur le marché, et de doublement, de 20 000 à 40 000 également, du nombre de logements conventionnés du parc locatif privé de type HLM.

Puis, évoquant la réforme du prêt à taux zéro, qui figurera dans la seconde partie du PLF, il a rappelé que l'objectif était de le rendre plus social, en solvabilisant davantage les ménages les plus modestes dont le revenu est inférieur à 2 SMIC, et en leur accordant un différé d'amortissement plus long ; plus familial, en tenant compte, dans la fixation des barèmes du prêt, de la composition du ménage concerné, et de l'ouvrir aux logements anciens, sans quotité de travaux, mais en prévoyant une décote. Il a souligné sa volonté d'étendre le bénéfice du prêt, de 100 000 à 230 000 personnes par an, précisant que 300 000 demandes par an étaient déposées.

S'agissant de la rénovation urbaine, qui relève tant du budget de la ville que de celui du logement, il a affirmé sa volonté de s'en tenir aux objectifs fixés en 2003 par la loi « Borloo ». C'est pourquoi l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) est dotée de 465 millions d'euros en autorisations de programme, dont 223 millions proviennent du budget du logement, et 192 millions d'euros du budget de la ville. Enfin, cinquante millions d'euros proviennent du fonds de rénovation urbaine.

Enfin, il a indiqué que, s'agissant du parc locatif public, qui s'inscrit dans le cadre de la décentralisation, une convention serait signée le mois prochain entre l'Etat et les bailleurs sociaux afin de fixer des objectifs quantitatifs et qualitatifs en termes de production de logements HLM. Il a, en outre, précisé qu'une convention avait été signée le mois dernier avec les partenaires sociaux, prévoyant un apport de 200 millions d'euros pour financer le programme, et qu'il était prévu que l'Etat conclue un accord avec la Caisse des dépôts et consignations afin qu'elle puisse déconcentrer ses financements au profit des collectivités délégataires des aides à la pierre dans le cadre de la loi relative aux libertés et aux responsabilités locales, ainsi que des accords au cas par cas avec les établissements publics de coopération intercommunale et les départements délégataires de cette aide.

S'adressant au ministre délégué au logement, M. Jean-Pierre Abelin, rapporteur pour avis sur le budget du logement, a souligné le fait que ce budget s'inscrivait dans le cadre du projet de loi de programmation pour la cohésion sociale, qui, après avoir été discuté au Sénat, allait l'être prochainement à l'Assemblée nationale. Il a précisé qu'il tendait à répondre à la crise du logement que nous connaissons en France, et qui a pour cause un déséquilibre entre l'offre et la demande, dû à la faiblesse de la production de logements sociaux depuis la fin des années 1990 et à la rareté des terrains disponibles.

Il a indiqué que malgré une baisse apparente des crédits par rapport à 2004, le budget augmentait à structure constante de 8,3 %, et s'élevait à 6,53 milliards d'euros. Rappelant le contexte contraint dans lequel se trouvent aujourd'hui nos finances publiques, il a souligné à quel point le logement constituait une priorité forte du PLF 2005.

Puis il a évoqué les trois axes de ce budget :

- la relance du parc de logements locatifs sociaux,

- la mobilisation du parc privé,

- et la relance des dispositifs d'accession sociale à la propriété.

S'agissant de la relance du parc de logements locatifs sociaux, il a rappelé l'objectif de 90 000 logements produits en 2005, alors que depuis 1997, 50 000 logements en moyenne sont construits chaque année. Il a indiqué que les crédits destinés au financement de logements sociaux, à l'exclusion des crédits affectés à la rénovation urbaine, s'élevaient, dans le projet de loi de finances pour 2005, à 442 millions d'euros en autorisations de programme, soit une hausse de 22 %, par rapport au PLF 2004, et à 465 millions d'euros en crédits de paiement, soit une hausse de 62 % par rapport à 2004.

S'agissant de la mobilisation du parc privé, et de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat, il a indiqué que les autorisations de programme s'élevaient pour 2005 à 462 millions d'euros, soit une hausse de 17 % par rapport à l'année précédente. Quant aux crédits de paiements, ils s'élèvent à 395 millions d'euros, soit une augmentation de 5 %.

En ce qui concerne l'amélioration du dispositif d'accession sociale, il a rappelé la volonté du ministre de permettre à 240 000 foyers, au lieu de 100 000 au cours des dernières années, d'en bénéficier.

M. Jean-Pierre Abelin s'est félicité de ces priorités ainsi que des crédits annoncés. Il a cependant adressé un certain nombre de questions au ministre délégué au logement.

S'agissant des objectifs de production de logements sociaux qui sont fixés par le PLF, le rapporteur a souligné qu'ils correspondaient aux besoins réels de la population. Il s'est néanmoins interrogé sur leur mise en œuvre, dans un contexte d'augmentation du coût et de rareté du foncier et d'augmentation du coût des bâtiments. Il a également rappelé la mise en œuvre de la décentralisation en cours, la mobilisation entraînée par la réalisation du programme national de rénovation urbaine, ainsi que la baisse des aides par opération justifiée pour l'instant par la baisse du taux du livret A et la baisse du coût des emprunts qui peuvent cependant évoluer. Il s'est par conséquent interrogé sur les modalités d'intervention du ministère du logement, notamment à l'égard des services déconcentrés de l'Etat.

Eu égard au prêt à taux zéro, il a indiqué que la première annonce de réforme, qui avait eu lieu au mois de septembre, s'était concentrée sur le passage d'un dispositif budgétaire à un dispositif fiscal, et qu'elle avait suscité des craintes de la part des ménages. Celles-ci ayant été dissipées par le ministre du logement, il a demandé au ministre si cette réforme n'infléchirait pas les conditions de prêt des banques, notamment en ce qui concerne l'apport personnel.

Il a également demandé des précisions quant au projet de décret définissant les majorations des bonifications pour les familles et les revenus les plus modestes. Il a également interrogé le ministre sur la suppression de la quotité de travaux exigée pour l'obtention du prêt pour l'acquisition de logements anciens. Il a souligné le fait qu'à l'instar de la CAPEB, il était favorable à la suppression de la quotité des travaux préconisée par le ministre.

En ce qui concerne le taux réduit de TVA à 5,5 % pour les travaux d'entretien et d'amélioration, dont le maintien a été obtenu jusqu'en 2005, il a demandé au ministre quelles démarches le Gouvernement comptait entreprendre pour obtenir des instances communautaires le maintien de ce taux après 2005.

Enfin, s'agissant du foncier, il a rappelé qu'il constituait un obstacle à la construction de logements. Il a rappelé que 400 millions étaient escomptés de la vente de biens immobiliers de l'Etat. Il a indiqué qu'un décret avait été publié récemment pour modifier le code du domaine de l'Etat. Il a par conséquent interrogé le ministre sur les objectifs et le calendrier que le Gouvernement avait fixés pour libérer des terrains, des logements et des biens immobiliers, afin de favoriser la mise en œuvre de projets de construction.

M. Serge Poignant s'est félicité, au nom du groupe UMP, de l'accent que le Gouvernement mettait sur la question du logement en dépit des contraintes budgétaires, puisqu'à périmètre constant, les moyens du ministère du logement augmentaient de 8,3 % dans le budget pour 2005, les aides à la personne progressant en particulier de 2,6 %, tandis que les aides à la pierre bénéficieraient à 100 000 logements locatifs sociaux après un effort de 80 000 logements en 2004. Il a observé la convergence des efforts accomplis au niveau du budget dans ce domaine avec les dispositions du projet de loi de programmation pour la cohésion sociale. Il a salué la mise en place d'un nouveau dispositif de prêt à taux zéro qui permettra d'aider 230 000 ménages en 2005 contre 100 000 en 2004, en suggérant néanmoins qu'une autre dénomination que « PTZ plus » fût trouvée pour cette version nouvelle du dispositif. Il a rappelé que l'élargissement de l'accès au dispositif tenait à ce qu'il serait ouvert aux accédants à des logements anciens, et que le plafond de ressources en permettant l'obtention était relevé. Il a souligné également le relèvement du montant des aides, ainsi que les conditions plus favorables accordées pour l'amortissement des prêts. Il s'est félicité de l'augmentation prévue de 5 000 du nombre des prêts sociaux de location-accession qui constituent des prêts conventionnés, ainsi que des moyens supplémentaires accordés à l'ANAH, qui jouait un rôle important en milieu rural.

Il a conclu en observant que le Gouvernement menait une politique dynamique dans le domaine du logement, d'autant plus nécessaire que ce domaine avait été laissé en déshérence par le Gouvernement précédent, et en indiquant que le groupe UMP voterait les crédits du budget du ministère du logement.

Mme Janine Jambu, prenant la parole au nom du groupe communiste et républicain, a dénoncé un budget du logement construit en « trompe l'œil », notamment par le biais d'une modification des périmètres des dépenses. Elle a estimé qu'en euros constants, son montant global n'atteignait même pas le niveau de celui de 2003. Elle a rappelé que M. de Robien, expliquant qu'on pouvait faire mieux avec moins de crédits, avait pris un engagement de construire 80 000 logements sociaux supplémentaires en 2004. Elle a souligné que cet engagement n'avait pas été tenu. Elle a dénoncé un désengagement de l'Etat allant de pair avec un engagement financier des employeurs, le 1 % du logement, des bailleurs, et des collectivités locales, ces moyens ne pouvant à son avis, de toute façon, pas atteindre les objectifs affichés ni réduire les inégalités territoriales en matière de logements sociaux. Elle a souligné la confusion entretenue selon elle autour des prêts aux logements sociaux, qui de fait, ne bénéficieraient pas d'un soutien de l'Etat, et n'étaient pas directement accessibles aux candidats au logement.

Elle a constaté que le report de nombre de financements sur les collectivités locales ne conduirait qu'à une augmentation difficilement supportable de la pression fiscale locale, sans permettre d'atteindre les objectifs souhaitables en matière de soutien social, ni de financer les fonds de solidarité logement.

Elle a jugé les perspectives sombres en matière de logement social. S'agissant du secteur locatif privé conventionné qui relève de l'ANAH, elle s'est interrogée sur le caractère pérenne des conventions évoquées par le ministre.

Elle a estimé que la politique gouvernementale marquait ouvertement une préférence pour le développement du logement en secteur privé, puisque c'était dans cette direction qu'elle concentrait les avantages et les exonérations fiscales.

S'agissant du nouveau dispositif de prêt à taux zéro, elle a fait part de ses craintes qu'il ne conduisît in fine qu'à une réduction du nombre des bénéficiaires, dans la mesure où il reposait sur un crédit d'impôt accordé aux banques.

Jugeant que les aides à la personne étaient de moins en moins solvabilisatrices, elle a interrogé le ministre sur leur réforme et leur revalorisation.

Elle a conclu en signalant la forte inquiétude que ressentaient les associations de locataires face aux conséquences que pourrait avoir sur les charges la montée du prix de l'énergie, et a souhaité avoir des éclaircissements sur ce qu'avait prévu le décret de 1987 relatif à la répartition des charges entre locataires et bailleurs dans ce cas de figure.

M Jean-Yves Le Bouillonnec a déclaré que le groupe socialiste formulerait ses critiques de fond à l'encontre du budget au logement pour 2005 lors du débat en séance publique, estimant que ce budget ne pouvait pas être considéré comme loyal, et qu'il y avait lieu d'en contester les chiffres. Il s'est dit en accord sur de nombreux points avec les analyses de Mme Janine Jambu et a insisté sur le fait que, tout en étant en accord avec les objectifs poursuivis, il ne l'était pas sur les moyens avancés pour les atteindre.

Il a observé que l'appréciation sur ce budget était d'autant plus complexe que celui-ci s'inscrivait dans une triple évolution législative : la loi d'orientation et de programmation pour la rénovation urbaine, la loi relative aux libertés et aux responsabilités locales, et le projet de loi de programmation pour la cohésion sociale.

Il a conclu en s'interrogeant sur trois points : d'abord, sur la manière dont les banques seraient amenées à mettre en œuvre le nouveau dispositif de prêt à taux zéro, notamment en termes de concurrence et de contrôle de la représentation nationale et de l'Etat, sachant que les demandeurs se trouveraient en situation de libre négociation avec elles, comme pour des prestations bancaires courantes ; ensuite, sur l'effort financier effectif de l'Etat dans le cadre de l'aide personnalisée au logement, une fois déduite la composante tendancielle liée au renouvellement de la population des bénéficiaires ; enfin, sur les objectifs poursuivis par le Gouvernement en ce qui concerne la répartition des logements intermédiaires, les PLUS et les logements d'intégration.

Après avoir fait part de sa consternation face au nombre de logements vacants et, plus généralement, à la gestion du potentiel immobilier de la France, M. Léonce Deprez a souhaité savoir si le ministre était conscient de la nécessité de « mettre un tigre dans le moteur » de l'action politique dans ce domaine.

Soulignant la nécessité d'une manifestation forte de volonté politique, il s'est déclaré rassuré par la vigueur des convictions sociales-libérales du ministre attestée par son action personnelle passée, notamment sur le plan local.

M. Léonce Deprez a ensuite souligné que la priorité en matière de logement lui semblait être de mettre fin au formidable gâchis économique et humain que représentent les logements vacants. Après avoir rappelé l'utilité de la politique de rénovation urbaine, il a estimé que la solution du problème ne dépendait pas seulement des moyens engagés mais qu'elle passait également par une action de communication visant, d'une part, à rappeler aux propriétaires que des devoirs sont également attachés au droit de propriété et, d'autre part, à assurer la lisibilité des mesures décidées.

Puis, il a souhaité savoir si le ministre était prêt à rendre aux élus locaux le pouvoir qui leur a été pris par des administrations qui décident entre elles.

Il a conclu en faisant part de sa révolte quant à la situation actuelle du secteur du logement dont il a estimé qu'elle ne pouvait plus durer.

Usant de la faculté offerte par le premier alinéa de l'article 38 du Règlement de l'Assemblée nationale, M. Philippe Folliot a souligné que le logement étant au cœur des préoccupations des Français, le budget consacré à l'action publique dans ce secteur revêtait une importance particulière.

Après avoir noté que le projet de loi de finances pour 2005 traduisait un effort budgétaire louable, il a estimé que des incertitudes et des interrogations demeuraient et expliquaient le fait que le groupe UDF présenterait des amendements à l'occasion de la séance publique.

Puis, il a rappelé que le montant de l'apport personnel de l'emprunteur était souvent déterminant pour la réalisation d'un projet immobilier et que la somme empruntée dans le cadre d'un prêt à taux zéro pouvait aujourd'hui être considérée comme constitutive de cet apport par un établissement de crédit. Il a donc souhaité que le ministre précise s'il en serait même pour les sommes empruntées dans le cadre du prêt à taux zéro réformé ou « PTZ plus ».

M. Philippe Folliot a ensuite estimé que, depuis une trentaine années, les aides à la personne avaient été privilégiées par rapport aux aides à la pierre. Il a demandé au ministre si celui-ci souhaitait inverser cette tendance et, le cas échéant, quels seraient les objectifs poursuivis et les moyens mobilisés.

Après avoir souligné que le logement et l'emploi étaient les deux secteurs prioritaires en matière de cohésion sociale, M. Robert Lecou a indiqué que les objectifs du Gouvernement en matière de logement étaient largement partagés.

Puis, il a indiqué que son expérience locale lui avait permis de constater la capacité des acteurs de terrain et des élus locaux à obtenir des résultats significatifs en matière de rénovation urbaine lorsqu'une forte volonté existe.

Après avoir souligné le grand nombre de logements privés situés dans les villes petites et moyennes et dans les zones rurales laissés à l'abandon et pouvant être réhabilités ou rénovés, il a appelé de ses vœux une action publique permettant de tirer parti de ce potentiel.

Il a ensuite salué l'efficacité des opérations programmées d'amélioration de l'habitat et l'intérêt de la création de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine ainsi que la progression de 17 % des moyens alloués à l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat.

Puis, il a déclaré partager l'analyse du rapporteur quant à la nécessité de permettre aux acteurs de terrain de faire preuve d'imagination en préservant de la souplesse.

M. Philippe Pemezec s'est interrogé sur l'opportunité de centrer la politique du ministère sur la construction de logement social, soulignant sa préférence pour les dispositifs de l'accession sociale à la propriété, notamment pour les locataires habitant depuis longtemps dans un logement social.

Regrettant l'attitude parfois réticente des offices publics d'habitations à loyer modéré (OPHLM) à vendre ces logements sociaux, il a demandé au ministre si le projet de loi sur la cohésion sociale contenait une mesure dans ce sens, permettant, dans les villes bénéficiant d'un parc de logement social important, de faire passer par exemple à 5 ou 10 % le taux de logement devant faire l'objet d'une accession sociale à la propriété.

En réponse aux différents intervenants, M. Marc-Philippe Daubresse, ministre délégué au logement, a apporté les précisions suivantes :

- les données budgétaires avancées par le ministère dans le cadre du présent projet de budget seront explicitées autant que de besoin, sans qu'il y ait de doute à avoir sur leur justesse. En revanche, la capacité de l'Etat et des collectivités locales à mobiliser les terrains nécessaires à la construction de logements sociaux est moins évidente, comme par exemple dans le Nord-Pas-de-Calais, alors que les moyens nécessaires au financement des PLS, les PLU ou les PLAI ont été prévus. L'Etat devrait être amené à renforcer sa mobilisation dans le cadre du projet de loi relatif à l'habitat pour tous, faisant actuellement l'objet de concertations intenses, notamment avec les élus locaux, et qui devrait être examiné au Parlement avant l'été 2005.

Dans la perspective de ce projet de loi, deux idées sont actuellement à l'étude : la première viserait à autoriser l'Etat à confier la gestion d'un terrain à une collectivité locale par le biais d'un bail emphytéotique ; la seconde viserait à ce que le service des domaines fixe un prix d'usage adapté pour les terrains faisant l'objet d'un projet de construction de logement social ;

- une convention a été signée la semaine dernière entre l'Etat et les principaux propriétaires fonciers, tels que la SNCF, Réseau ferré de France, ou la RATP, recensant en Ile-de-France 9,3 millions de mètres carrés de terrains publics disponibles à moyen terme pour le logement social, dont 1,3 million de mètres carrés durant les trois prochaines années, l'accord portant sur 8 millions de mètres carrés. Il est néanmoins nécessaire aujourd'hui d'aller plus loin, notamment en mobilisant d'autres ministères ;

- le taux de la TVA pour les travaux à domicile, actuellement fixé à 5,5 % jusqu'en 2005, ne pourra être maintenu à ce niveau que par une décision à l'unanimité des Etats membres de l'Union européenne. Compte tenu du fait que 4 pays sont actuellement en désaccord avec ce maintien, la France ne peut que tenter de sensibiliser la Commission européenne sur les effets désastreux d'une augmentation de ce taux. A cet effet, un mémoire a été rédigé en début d'année par les services du ministère, mais le point de vue de la France ne sera pris en compte qu'au prix d'une mobilisation de tous les acteurs publics ;

- quel que soit le nom qu'on lui donne, le dispositif renforcé en faveur de l'accession sociale à la propriété doit être mis en place rapidement, notamment par une négociation constructive avec les banques.

Le problème de l'accession sociale à la propriété fait en effet l'objet d'un consensus qui rend nécessaire des mesures législatives, d'autant plus que la part des primo-accédants à la propriété est passée de 60 % du total des accédants à la propriété en 1995 à 45 % en 2002, ce chiffre devant être encore moins élevé actuellement. Contrairement à ce qui a été annoncé dans la presse, la suppression du prêt à taux zéro (PTZ) en vigueur n'a jamais été envisagée, même si le ministère des finances a travaillé sur la possibilité d'instituer un crédit d'impôt aux particuliers. Le ministère du logement est intervenu afin de garantir l'apport personnel subventionné par l'Etat aux banques et le différé d'amortissement, afin que les ménages les moins aisés puissent accéder à la propriété avec des mensualités acceptables. Les banques ont néanmoins estimé que le dispositif du crédit d'impôt aux particuliers était fort compliqué.

Un amendement portant article additionnel à la loi de finances initiale pour 2005 sera donc examiné par le Parlement accompagné du décret comportant les barèmes, afin de renforcer le dispositif du PTZ en vigueur sans en changer les modalités, notamment budgétaires, sachant que l'objectif est de doubler le nombre des primo-accédants à la propriété dans les logements neufs et anciens.

En outre, un crédit d'impôt sur les sociétés de 7 ans est prévu dans le projet de loi de finances initiale pour 2005, qui devraient être ramenés à 5 ans au cours de la discussion à la suite de la concertation menée avec les banques, contre deux ans dans le dispositif budgétaire actuellement en vigueur. Contrairement à ce qui a été dit, ce crédit d'impôt n'est pas un don incontrôlé aux banques, dans la mesure où ce nouveau dispositif de PTZ repose sur les mêmes mécanismes de contrôle que celui actuellement en vigueur.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec a estimé que la transformation du dispositif du PTZ en crédit d'impôt risquait de modifier la relation entre la banque et le bénéficiaire du prêt, et risquait de réduire les possibilités de contrôle de l'Etat sur les modalités du prêt global réalisé par la banque.

Poursuivant ses réponses, M. Marc-Philippe Daubresse a assuré que le nouveau dispositif fonctionnerait selon les mêmes modalités que celui en vigueur et ne modifierait pas les relations entre l'emprunteur et la banque. Le particulier fera donc sa demande de PTZ dans les mêmes conditions, sachant que seuls les barèmes ont été revalorisés, ce qui n'avait pas été le cas depuis 1995.

Dans la perspective de l'examen du projet de loi de finances initiale pour 2005, la mise en place de ce crédit d'impôt sur les sociétés a été envisagée pour un montant total de 1,2 milliard d'euros contre 550 millions d'euros aujourd'hui, sachant en outre qu'il sera porté à 1,4 milliard d'euros grâce aux nouveaux barèmes négociés par le ministère du logement auprès du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

Pour le ministère du logement, l'essentiel est que le dispositif du PTZ soit renforcé, ce qui implique qu'il ne soit pas conditionné par la réalisation d'une quotité de travaux, condition qui a déjà montré son inefficacité en 1995, parce que les jeunes foyers modestes accédant à la propriété ne peuvent financer de surcroît la réfection de leur logement, ce qui n'empêche pas d'éventuelles initiatives parlementaires visant à éviter que le PTZ ne conduise à des effets d'aubaine ou à favoriser le logement indécent.

Le nouveau dispositif du PTZ a donc un caractère social renforcé, dans la mesure où la durée d'amortissement est allongée pour les bénéficiaires ayant des revenus inférieurs à 2,3 SMIC ; prend également mieux en compte la situation familiale du bénéficiaire ; il tend à augmenter la solvabilité du bénéficiaire de 12 %, et sera étendu au logement ancien.

- s'agissant du scandale que constitue au regard de la crise actuelle du logement, l'existence de nombreux logements vacants (60 000 logements dans un département tel que celui des Alpes-Maritimes), les crédits alloués à l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat (ANAH) et un dispositif fiscal adapté permettront, en sécurisant le risque locatif, de rendre confiance aux propriétaires privés et ainsi de mobiliser les logements vacants. La même démarche a conduit récemment à l'adoption au Sénat d'une disposition visant à accorder aux créances locatives le statut de créances privilégiées ; elle explique également l'élaboration actuelle avec les partenaires sociaux d'un dispositif de mutualisation du risque locatif pour la partie conventionnée du parc locatif privé ;

- les critiques selon lesquelles le budget du logement pour 2005 serait « en trompe l'œil » ne doivent pas dissimuler l'accord fondamental de chacun avec des objectifs tels que le doublement du nombre de logements locatifs sociaux publics produits chaque année, ou encore la remise sur le marché et le conventionnement de logements locatifs privés vacants. Le débat qui aura lieu en séance publique lors de l'examen de ce budget permettra de juger de la vérité des chiffres ;

Mme Janine Jambu est alors intervenue pour rappeler qu'elle avait constaté lors de nombreux débats, en particulier au cours des Assises nationales du logement, que les chiffres avancés pour financer le plan de cohésion sociale n'étaient pas cohérents avec ceux du budget du logement pour 2005. Elle a considéré qu'il n'était pas acceptable de mettre en doute sa connaissance du dossier et a ajouté qu'elle demanderait au ministre, par écrit, des réponses plus précises à ce sujet.

M. Marc-Philippe Daubresse, ministre délégué au logement, a alors poursuivi son intervention en apportant, en réponse aux différents intervenants, les précisions suivantes :

- le débat en séance publique permettra de montrer que les moyens budgétaires disponibles pour 2005 sont en adéquation avec les objectifs énoncés. Un avis de l'Union sociale pour l'habitat (USH), pourtant dirigée par de nombreux élus dont certains sont socialistes ou communistes, a d'ailleurs estimé que les chiffres annoncés dans le projet de loi de cohésion sociale étaient cohérents au regard des objectifs fixés. 22 000 prêts locatifs sociaux (PLS), dont le financement avait été annoncé, pourront effectivement l'être grâce aux crédits inscrits dans le projet de loi de finances pour 2005 - crédits qui seront entièrement consommés. Il convient par ailleurs de rappeler que le Gouvernement s'est rapproché des producteurs de logements sociaux (bailleurs sociaux publics et privés) pour déterminer l'ampleur des besoins et le rythme auquel ils pourraient être satisfaits.

- pour résoudre la crise actuelle du logement, le Gouvernement mène actuellement une politique volontariste qui s'appuie prioritairement sur le renforcement des aides à la pierre. Il est utile de rappeler que le rapport établi en 2001 par le député Alain Cacheux sur la politique du logement avait estimé que ces aides étaient le premier moyen auquel il fallait recourir pour « structurer une politique de relance du logement », le délégué général de l'USH ayant récemment tenu des propos de même nature. Cela ne doit pas pour autant conduire à réaliser des économies drastiques sur les aides à la personne. La solvabilité des ménages doit au contraire être préservée, ce qui suppose le maintien des aides à la personne. Les barèmes de ces dernières seront revalorisés en 2005 grâce à une progression de 100 millions d'euros des crédits correspondants par rapport au précédent budget ;

M. Jean-Yves Le Bouillonnec a noté que la hausse des crédits par rapport à 2004 ne s'élevait en réalité qu'à 50 millions d'euros et non 100 millions d'euros, puisque 50 millions d'euros supplémentaires avaient déjà été consacrés à cette politique à partir du 1er juillet 2004 pour donner suite à des annonces effectuées au mois de mars 2004. Il a ajouté que le Gouvernement n'avait alors procédé à aucune autre revalorisation de ces aides depuis le 1er juillet 2003 et a souhaité que l'on dispose à cet égard d'une vision d'ensemble.

M. Marc-Philippe Daubresse, ministre délégué au logement, a alors poursuivi son intervention pour préciser que :

- l'effort massif effectué en faveur des aides à la pierre, qui contraste avec « l'erreur historique » commise sous la précédente législature en matière d'aides à la personne s'accompagnera d'une réforme des aides à la personne qui sera engagée dès le mois de janvier 2005, en tenant constamment compte du taux d'effort des locataires ;

- la vente de logements sociaux à des particuliers sera bien prévue dans le projet de loi habitat pour tous ;

- le Gouvernement a mené, dans le cadre de la relance du processus de décentralisation, une politique de territorialisation des compétences en matière de politique du logement, par exemple dans le domaine des Plans locaux de l'habitat (PLH), politique dont les incidences financières et foncières ont d'ailleurs été soulignées ;

Pour conclure ses propos, M. Marc-Philippe Daubresse, ministre délégué au logement, s'est dit ouvert à tout débat sur l'interprétation du chiffrage du budget de son département pour 2005. Il a enfin estimé que ce budget donnait à la politique du logement des moyens sans précédent pour atteindre des objectifs ambitieux.

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Puis, la Commission a examiné les crédits du logement pour 2005.

Conformément aux conclusions de M. Jean-Pierre Abelin, rapporteur pour avis, la Commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits du logement pour 2005.

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Information relative à la Commission

La Commission a décidé, sur proposition de son bureau, de créer une mission d'information parlementaire sur l'utilisation du chlordécone et des autres pesticides dans l'agriculture martiniquaise et guadeloupéenne et ses conséquences sur les sols, la ressource en eau ainsi que les productions animales et végétales en Martinique et en Guadeloupe.

La mission d'information est ainsi composée : MM. Joël Beaugendre, Jacques Le Guen, Jean-Sébastien Vialatte, Louis-Joseph Manscour et Philippe Edmond-Mariette.


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