DÉLÉGATION AUX DROITS DES FEMMES
ET À L'ÉGALITÉ DES CHANCES
ENTRE LES HOMMES ET LES FEMMES

COMPTE RENDU N° 9

Mardi 17 décembre 2002
(Séance de 17 heures)

SOMMAIRE

 

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- Compte rendu de la conférence parlementaire internationale sur le suivi de la conférence du Caire, qui s'est tenue à Ottawa les 21 et 22 novembre 2002, et de la conférence du réseau des commissions parlementaires des droits des femmes des pays de l'Union européenne et du Parlement européen, qui s'est tenue à Copenhague les 22 et 23 novembre 2002

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La Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes a entendu un compte rendu de la conférence parlementaire internationale sur le suivi de la conférence du Caire qui s'est tenue à Ottawa les 21 et 22 novembre 2002, et de la conférence du réseau des commissions parlementaires des droits des femmes des pays de l'Union européenne et parlementaires des droits des femmes des pays de l'Union européenne et du Parlement européen, qui s'est tenue à Copenhague les 22 et 23 novembre 2002.

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente : La Délégation aux droits des femmes s'attache à suivre désormais les conférences internationales concernant les femmes. Plusieurs de nos collègues ont participé récemment à d'importantes réunions : Mmes Claude Greff et Danielle Bousquet se sont rendues à Ottawa, Mmes Béatrice Pavy et Muguette Jacquaint à Copenhague.

Mme Claude Greff : Nous faisions partie, Mmes Danielle Bousquet, Marie-Claude Beaudeau, sénatrice, et moi-même, des 130 parlementaires présents à Ottawa, venus identifier les actions qu'il semble nécessaire de conduire pour promouvoir les services de santé de la procréation et pour poursuivre le travail accompli depuis la conférence du Caire de 1994 sur la population et le développement.

Le programme d'actions du Caire, approuvé en 1994 par 179 pays, demande aux Etats de rendre la santé de la procréation accessible à tous d'ici 2015. Il est important de réduire la mortalité maternelle et le sida, d'étendre l'accès à l'éducation primaire, pour les filles comme pour les garçons.

Ce programme a fait l'objet d'un consensus, mais aujourd'hui la situation a changé : les Etats-Unis ont menacé, lors de la dernière réunion préparatoire à la conférence régionale de l'ONU relative à la population de l'Asie et du Pacifique - je vous parle de la réunion qui s'est tenue avant celle de Bankgok - de retirer leur soutien au texte du Caire, au motif que des termes tels que "droits à la procréation" et "services de santé de la procréation" encourageaient l'avortement. En résumé, les Etats-Unis préconisent davantage l'abstinence comme méthode contraceptive.

Si le gouvernement Bush maintient cette position et parvient à l'imposer au reste du monde, cela risque d'entraîner la mort de milliers de femmes, en les privant de l'accès à la santé et à la procréation. 80 000 femmes décèdent déjà chaque année d'avortements pratiqués de façon clandestine ; or, les services de santé de la procréation sont la meilleure prévention à l'avortement.

Cette attitude entraînerait un retour en arrière, un retour sur les progrès réalisés depuis 1994 sur les droits et le statut des femmes des pays en voie de développement. Il est important de rappeler qu'en mai 2002, lors de la session spéciale de l'ONU relative aux droits des enfants, et en septembre dernier, lors du sommet de Johannesburg relatif au développement durable, l'administration Bush avait déjà tenté de revenir sur certains acquis établis en 1990 et que le président avait annulés au mois de juillet.

Les 34 millions de dollars de contribution versés par les Etats-Unis au Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) risquent d'être supprimés, ce qui aurait une incidence importante sur le développement de la santé.

La conférence d'Ottawa a réuni environ 130 parlementaires de 68 pays. La discussion a été de grande importance. Elle a porté sur la précarité, la violence, la santé, le développement, le sida, l'éducation à la santé des jeunes, la contraception, etc. Des engagements ont été pris : les engagements d'Ottawa. Les parlementaires présents se sont notamment engagés à réaffirmer trois grands piliers dans le cadre du développement durable : la croissance économique, le progrès social et la protection de l'environnement.

Les parlementaires ont défini le problème de la population comme un problème transversal qui a un impact fort sur tous les autres problèmes du développement, et qui occupe une place centrale dans la réalisation des objectifs du développement pour le millénaire à venir. Les deux points essentiels sont les suivants : l'élimination de la pauvreté et de la faim et l'amélioration de la santé maternelle. Sans oublier les efforts menés pour lutter contre l'avortement pratiqué dans des conditions dangereuses et pour promouvoir la santé et les droits en matière de reproduction et de sexualité. Autres thèmes importants : combattre le sida, assurer l'enseignement primaire universel, promouvoir l'égalité entre les sexes et affranchir les femmes.

La situation est dramatique : la moitié de la population mondiale, aujourd'hui, vit avec moins de 2 dollars par jour et 1,2 milliard de personnes avec moins d'1 dollar par jour - et plus de la moitié sont des femmes.

L'instabilité politique fait obstacle à l'élimination de la pauvreté et au développement durable. Quelque 840 millions de personnes souffrent de malnutrition, des millions d'entre elles, dont 6 millions d'enfants de moins de 5 ans, meurent chaque année des effets de la faim et de la malnutrition chronique. Environ 40 millions de réfugiés et de personnes déplacées dans leur propre pays n'ont pas accès aux services de santé en matière de reproduction. En 2000, 508 millions de personnes vivaient dans des pays en situation de stress hydrique - tout ce qui contribue à un stress supplémentaire : faim, soif... -, et, en 2025, elles seront 3 milliards.

On compte 1 milliard d'adolescents qui ont atteint ou sont sur le point d'atteindre la période procréatrice de leur vie ; or, beaucoup d'entre eux n'ont pas accès à l'éducation et aux services de santé en matière de reproduction.

Chaque année, plus de 500 000 femmes meurent durant leur grossesse ou pendant l'accouchement et 7 millions souffrent d'infections et de lésions dues à l'accouchement. 350 millions de femmes n'ont pas encore obtenu accès à un moyen de contraception non dangereux et efficace ; près de 175 millions de grossesses, chaque année, ne sont pas désirées ou arrivent à un moment inopportun.

Dans le monde entier, les besoins de millions de femmes sur le plan de la planification familiale et de la santé en matière de reproduction ont été ignorés, notamment dans des pays tels que l'Afghanistan. Une femme médecin nous a présenté un exposé sur l'Afghanistan : si les choses s'améliorent, la situation est loin d'être satisfaisante.

Près de 40 millions d'avortements sont pratiqués chaque année. Environ 78 000 femmes par an, soit 227 par jour, meurent à la suite d'une interruption de grossesse pratiquée dans des conditions dangereuses.

En 2001, 5 millions de personnes sont devenues séropositives, dont 800 000 enfants, et 3 millions de personnes sont mortes du sida. On compte 13,4 millions d'orphelins du sida, et beaucoup d'entre eux ont la charge d'un foyer. Près de la moitié de tous les nouveaux cas d'affection frappe des jeunes âgés de 15 à 24 ans, et bien entendu les jeunes filles sont les plus exposées. On compte aujourd'hui 40 millions de personnes atteintes du sida et 28 millions d'entre elles vivent en Afrique. Le nombre de préservatifs nécessaires pour éviter la transmission du virus n'est évidemment pas suffisant : il en manquerait 8 milliards.

En 2050, le nombre de personnes de plus de 60 ans va augmenter, passant de 600 millions à près de 2 milliards, soit 21 % de la population contre 10 % actuellement. Beaucoup d'entre elles vivront dans la pauvreté et auront besoin de l'aide des pouvoirs publics pour obtenir des services sociaux et des services de santé.

Il a été demandé à tous les parlementaires présents d'agir au niveau de leur Gouvernement, pour faire en sorte que 5 à 10 % des budgets nationaux soient attribués au développement et au programme de santé en matière de reproduction. De faire leur possible pour atteindre l'objectif convenu d'affecter à l'aide publique au développement 0,7 % du PNB, et de n'épargner aucun effort pour mobiliser le montant estimatif convenu aux ressources financières indispensables à la mise en œuvre du programme d'action de la Conférence internationale sur la population et le développement.

Il est souhaitable que les parlementaires agissent pour promouvoir la réduction de la mortalité et de la morbidité maternelles, pour que le nombre d'avortements pratiqués dans des conditions dangereuses diminue et que cela devienne une priorité de santé publique.

Il nous a également été demandé de nous engager à susciter la volonté politique pour élaborer des politiques de prévention du sida et pour les intégrer dans les politiques nationales de santé ; pour élaborer les politiques de respect des droits fondamentaux et de dignité pour les personnes séropositives, ainsi que pour les orphelins et les femmes qui sont souvent confrontés à la maladie.

Les pays d'Afrique ont expliqué que la plus grande difficulté qu'ils rencontraient était le fait que les jeunes n'avaient plus de parents et qu'ils devaient assumer les charges de famille.

Il nous appartient aussi de veiller à ce que les adolescents, scolarisés ou non, reçoivent l'information nécessaire, dans des langues appropriées, pour avoir un suivi d'éducation à la santé, à la planification et à la prévention. Tous ces programmes doivent être préparés et bien appliqués afin que les Etats puissent prendre des décisions responsables et informer tous les jeunes en ce qui concerne leurs besoins sur le plan de la santé, en matière de reproduction et de sexualité.

Il convient de n'épargner aucun de nos efforts pour assurer d'ici à 2015 l'accès universel aux services et aux produits de santé en matière de reproduction à tous les jeunes, les femmes et l'ensemble de nos concitoyens qui en ont besoin. Il est indispensable que tous les Gouvernements atteignent cet objectif.

L'essentiel est d'assurer, à toute la population, notamment aux personnes âgées, la pleine jouissance de tous leurs droits - sociaux, économiques, culturels, civils et politiques -, et il convient également de faire en sorte que toutes les formes de violence et de discrimination à leur encontre soient punies. Il faut donner aux personnes âgées les moyens de participer à la vie de la société afin qu'elles aient une part active dans le domaine économique, politique et social.

Telles sont les promesses que les 130 parlementaires ont faites.

Malgré tout, des inquiétudes ont été soulevées par rapport à la position des Etats-Unis concernant les fonds alloués au FNUAP pour aider au développement de la population. C'est le mot avortement qui leur font peur : ils craignent que l'on parle de l'avortement de façon négative - et non pas dans une optique de prévention.

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente : Cette communication doit non seulement être publiée, mais remise au Gouvernement. Nous devons intervenir officiellement auprès du Gouvernement.

Mme Martine Lignières-Cassou : Oui, auprès du ministre des affaires étrangères. Mais nous devons également nous demander où nous en sommes, en France, sur toutes ces questions. Avons-nous avancé au cours des dernières années ? Où en sommes-nous quant à l'éducation sexuelle au sein de l'Education nationale ?

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente : Lorsque vous étiez présidente de cette Délégation, Madame Lignières-Cassou, vous aviez demandé que des bilans soient établis régulièrement. Nous devons absolument, en 2003, établir ces bilans, en auditionnant les personnes concernées.

Mme Claude Greff : En 1994, la France n'était pas représentée par des parlementaires à la conférence internationale sur la population et le développement du Caire. J'ai donc proposé à la présidente de la conférence d'Ottawa de faire partie du comité directeur, afin que la France prenne part activement à ces problèmes.

Mme Muguette Jacquaint : Je suis tout à fait d'accord avec vous, madame la présidente. Les déclarations adoptées à l'issue de ces conférences doivent être publiées et transmises au Gouvernement. Par ailleurs, si nous devons effectivement faire un bilan de la situation actuelle en France, nous devrons également déterminer les actions à mener.

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente : Le Président George W. Bush impose sa politique dans tous les domaines. Nous devons en avertir le Gouvernement.

Mme Danielle Bousquet : J'approuve le compte le compte rendu de Mme Claude Greff et je voudrais insister sur l'importance de la conférence d'Ottawa.

La conférence du Caire de 1994 a, pour la première fois, posé la question de la surpopulation autrement qu'en termes de surpopulation et de maîtrise de la fécondité imposée par les pays développés aux pays en voie de développement ; elle a été posée en termes de population et de droits des femmes : c'est lorsqu'on éduquera les petites filles, lorsqu'on aidera les femmes à trouver une indépendance dans le travail et dans leur fécondité, qu'un développement pourra être envisagé dans les pays pauvres.

Cette approche - le respect des droits de femmes, le fait de ne pas les inféoder aux coutumes et aux pratiques religieuses est une condition sine qua non pour pouvoir assurer le développement d'un pays -, qui a fait l'objet d'un consensus de l'ensemble de la communauté internationale, a été une avancée spectaculaire. Penser aujourd'hui que l'idéologie et le point de vue de George W. Bush conduisent à remettre en cause tous ces programmes est inacceptable. En agissant de la sorte, il met en péril la vie de dizaines de millions de femmes dans les pays pauvres.

355 millions de femmes se voient à l'heure actuelle refuser l'accès à toute méthode de planification familiale. On compte un milliard de jeunes, dont 85 % dans les pays en voie de développement : si on ne les aide pas à prendre leur vie en main, l'évolution démographique risque de devenir inquiétante. Ces mesures ont donc été adoptées dans l'intérêt général du développement de notre planète. L'attitude de George W. Bush, qui remet en cause des équilibres déjà extrêmement fragiles, est criminelle. Les Etats-Unis sont les plus gros contributeurs de fonds pour le développement. En ne versant plus leur contribution aux Nations Unies, ils remettent en cause de nombreux programmes.

Mme Claude Greff : La politique actuellement menée par le Gouvernement américain, qui a pour but de réduire les financements, est, me semble-t-il, influencée par certains intégristes. Elle a pour conséquence d'entraîner un fléchissement de la part d'autres pays donateurs, tels que la Suède, les Pays-Bas, la Belgique.

Mme Danielle Bousquet : Tout à fait, des informations parallèles sont délivrées aux pays donateurs. J'ai reçu, il y a trois jours, une documentation de "Laissez-les vivre", dans laquelle ils réclament des droits pour le fœtus !

Mme Claude Greff : Nous devons être très vigilants, car ces informations sont délivrées de façon sournoise. Et si l'abstinence peut-être un moyen de contraception, ce n'est pas le seul.

Mme Danielle Bousquet : Il convient de protéger les populations qui ont besoin de l'être - les filles sont mariées très jeunes. 40 millions de personnes sont aujourd'hui porteuses du sida, dont un quart de jeunes entre 15 et 24 ans. Parler d'abstinence pour ces populations est un non-sens ! S'ils ne sont pas éduqués, ces jeunes transmettront à leur tour le virus : une personne sur deux nouvellement atteinte est un jeune.

J'en viens maintenant à la conférence de Bangkok, la conférence Asie-Pacifique sur la population, qui avait pour objectif de faire le point sur l'action menée depuis la conférence du Caire. Elle est la première d'une longue série de conférences sur ce thème.

Elle avait pour objectif de refonder les politiques et les programmes en fonction de la mise en œuvre des programmes d'action depuis la Déclaration du Caire. Toutes les réunions préparatoires avaient révélé la volonté des Américains de revenir sur les avancées concernant les droits des femmes dans le monde - la maîtrise par les femmes de leur vie et de leur avenir. Cette volonté s'est donc concrétisée à Bangkok.

Des parlementaires de la région Asie-Pacifique, plus quelques parlementaires des pays d'Europe ayant des territoires dans cette région du monde, se sont donc réunis à Bangkok. Au même moment, se tenait le comité de rédaction des engagements, dans lequel siégeaient les Américains, bien qu'ils ne soient pas partie prenante de la régions Asie-Pacifique.

Pendant trois jours, sur un texte de base qui avait été élaboré et qui ne nous donnait déjà pas satisfaction parce qu'il n'était pas clair sur un certain nombre de points, les Américains ont bataillé pour faire supprimer le mot "avortement", trouvant que ce texte allait trop loin.

Alors que dans le texte de base, il était inscrit "le droit aux femmes d'avoir recours à des avortements sécurisés", les Etats-Unis tenaient à faire supprimer les mots "droit à l'avortement". Ils ont également bataillé pour supprimer "le droit à l'éducation pour les jeunes" et pour laisser "l'abstinence est le meilleur moyen pour les jeunes...". Il ne faut pas être dupe. Il y a, derrière tout cela, la mainmise idéologique des Etats-Unis sur le monde.

Je suis partie samedi midi, alors que le comité de rédaction était toujours dans l'impasse. Les Américains n'étaient plus seuls à émettre ces réserves, car ils avaient réussi à rallier quelques pays à leur cause en les menaçant de supprimer les fonds qu'ils leur versent sur tel ou tel programme ! Ils ont même menacé physiquement le président pakistanais de la conférence !

Mme Claude Greff : L'évolution entre la conférence d'Ottawa et celle de Bangkok est incroyable ! A Ottawa, les Etats-Unis souhaitaient seulement modifier l'expression "services de soins à la procréation" et la transformer en "soins à la procréation", parce qu'ils assimilaient le mot "services" à "une aide à l'avortement".

Mme Danielle Bousquet : L'ambassadeur français en Thaïlande a reçu de la part du ministère des Affaires étrangères des directives précises, selon lesquelles il était hors de question de revenir sur les acquis internationaux. La conférence est terminée, les ministres ont tranché sur un texte dont je n'ai pas encore le contenu. Mais, au-delà de tous ces problèmes, je voudrais dénoncer le fait qu'aucune action de sensibilisation n'est menée en France sur ces questions. Le monde entier en parle, sauf la France ! Nous devons absolument faire une déclaration publique sur ce thème.

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente : Et faire remonter ces informations au ministère des affaires étrangères et à celui des droits des femmes.

Mme Danielle Bousquet : Il serait intéressant de réunir dans un premier temps les représentants du FNUAP, pour qu'ils nous expliquent bien leurs missions, puis dans un second temps d'organiser une réunion avec l'ensemble de nos collègues qui souhaitent avancer, en toute connaissance de cause, sur ces thèmes.

Mme Martine Lignières-Cassou : Il se trouve que je préside la section française de la commission coopération et développement de l'Assemblée parlementaire de la francophonie ; j'ai été nommée la semaine dernière, je ne sais donc pas encore comment je vais la faire vivre, mais peut-être que certains thèmes, certaines problématiques pourront servir de passerelles avec notre Délégation. Car nous devons faire sortir cette information.

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente : Tout à fait ! Cette réunion doit aboutir à une communication officielle au ministère des affaires étrangères et à une sensibilisation de l'ensemble des parlementaires.

Mme Danielle Bousquet : Je voudrais ajouter que s'agissant de la contribution à l'aide internationale, la France est loin de contribuer à hauteur de 0,7 % du PNB. Par ailleurs, les ONG estiment que pour que les programmes d'aide au développement soient efficaces, il faudrait que 9 % des 0,7 % y soient affectés. Or nous en sommes très loin !

Mme Martine Lignières-Cassou : Etant donné qu'une bonne partie de l'aide française passe par l'Europe, il conviendrait de contacter la ministre des affaires européennes ou des parlementaires européens. Nous devons compter sur le poids de l'Europe pour ce type de questions.

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente : Nous sommes dans le domaine de la politique étrangère. Nous devons donc alerter Dominique de Villepin sur la réalité de la position des Etats-Unis, car il s'agit d'ingérence par le biais humanitaire. Je suis vraiment inquiète.

Mme Danielle Bousquet : Le Parlement européen a compensé les 34 millions de dollars que renoncent à verser les Etats-Unis. L'Europe est donc très sensibilisée à ces problèmes.

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente : Mme Béatrice Pavy, je vous donne maintenant la parole pour que vous nous présentiez le compte rendu de la conférence de Copenhague.

Mme Béatrice Pavy : Mme Muguette Jacquaint, trois sénatrices françaises - dont la présidente de la Délégation aux droits des femmes - et moi-même avons assisté à la conférence annuelle du réseau des commissions parlementaires à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes des pays de l'Union européenne et du Parlement européen. Cette conférence, qui se réunit depuis 1997, offre la possibilité de construire une véritable coopération européenne pour des politiques d'égalité entre les hommes et les femmes et de créer des réseaux qui permettent le renforcement de la démocratie tant au niveau national qu'européen.

Il s'agit d'une conférence où chaque pays fait part de ses expériences et des leçons qu'il en a tiré ; ces expériences permettant ensuite d'élaborer un plan d'actions européen efficace.

Trois thèmes ont été abordés : la marginalisation des femmes des minorités ethniques, la violence envers les femmes et la traite des êtres humains. Nous avons conclu cette conférence par l'adoption d'une déclaration sur la construction d'une Europe démocratique pour les femmes et les hommes, qui sera transmise à chaque pays membre de la conférence et aux membres de la Convention pour l'avenir de l'Europe.

Tout d'abord, je vous ferai part de l'expérience danoise, fort intéressante, relatée par la ministre danoise aux droits des femmes, relative aux femmes issues de minorités ethniques. Si ces femmes ne parviennent pas à s'intégrer au monde du travail et à la vie sociale, elles auront des modes de vie particulièrement différents du fait de leur culture d'origine. Elles sont peu représentées au Parlement et dans les associations, elles sont même exclues des réunions de parents d'élèves au motif de leur mauvaise maîtrise de la langue. Même les femmes qui parlent le danois sont exclues si elles ont un accent ! Ces femmes sont les plus exposées au chômage du fait de l'hostilité à la fois des entreprises et de leur milieu culturel d'origine. Elles risquent donc, plus que toutes autres, une exclusion totale.

Selon les observations d'un professeur d'université danois, le taux d'activité des femmes immigrées est sensiblement équivalent à celui des hommes et à celui de leur pays d'origine - bien qu'il varie d'un groupe d'immigrés à l'autre. Les variations de taux d'emploi s'expliquent moins en fonction du rapport homme-femme que de la population d'immigrés.

Un syndicat danois composé uniquement de femmes a mené un projet intéressant, entre 1996 et 2000. Intitulé "projet ETNIK", il est né de deux constatations : d'une part, les difficultés des Danois à accepter les femmes immigrées dans les entreprises, et, d'autre part, le refus des chefs d'entreprise de les embaucher.

Cinquante femmes et cinq entreprises ont participé à ce projet visant à développer de nouvelles méthodes pour améliorer l'intégration des femmes faisant partie d'une minorité ethnique. Les candidates motivées ont été obligées d'acquérir une bonne maîtrise de la langue et de subir un concours final. Sur ces cinquante femmes, seules neuf sont restées au chômage. Ces femmes ont appris le danois utilisé sur le lieu de travail, certains éléments de culture danoise et elles ont effectué des stages techniques pour apprendre le fonctionnement des machines.

Il en découle que pour une bonne intégration, la femme doit être encouragée dans l'apprentissage de la langue et aidée dans son accès à la vie professionnelle.

Un projet de loi est actuellement très contesté au Danemark - et va à l'encontre de la Convention européenne des droits de l'homme -, car il vise à ne consentir la nationalité danoise au conjoint immigré qu'après 7 ans de mariage et s'il justifie d'un revenu relativement élevé.

Le deuxième thème à l'ordre du jour était celui de la violence. Les deux plans d'action élaboré par le Gouvernement espagnol ont été exposés ainsi qu'une étude sur la violence domestique menée dans les 15 Etats membres de l'Union européenne. La clé de la lutte contre la violence repose sur l'information et l'éducation, ce qui permet d'y associer toute la société. Trois types de violence ont été relevés : la violence à domicile, la violence sexuelle et le harcèlement sur le lieu de travail - qui a fait l'objet d'une large campagne d'information.

Afin de déterminer les causes de la violence, des enquêtes ont été menées à la fois sur les auteurs et les victimes. On s'est alors aperçu que l'on savait très peu de choses de ces dernières. Il faudrait parvenir à une typologie de la victime féminine et de l'agresseur masculin, afin de cibler les informations en direction des victimes potentielles - de toutes les formes de violence, y compris les violences psychologiques et psychiques - et d'adapter la législation. Il conviendrait de protéger les victimes et de sanctionner les agresseurs, notamment par une sanction plus lourde - c'est ce que propose le Gouvernement espagnol - dans le cas de violence conjugale.

Il nous a été rappelé qu'il était également nécessaire de séparer les agresseurs des victimes. Lorsque les femmes maltraitées veulent échapper à la violence conjugale, elles trouvent généralement refuge dans des centres d'accueil, tandis que l'agresseur reste au foyer. Il serait donc important de leur offrir des structures d'accueil efficaces, à la fois aptes à prendre en charge les enfants et à leur apporter un soutien moral.

Malheureusement, il est noté qu'après un séjour moyen de trente jours, ces femmes retournent systématiquement au foyer, leur agresseur étant leur mari et le père de leurs enfants. Il faudrait se renseigner sur les attentes de ces femmes et leur attribuer un logement plutôt que de les inciter à rester au domicile conjugal, généralement pour le bien des enfants. Ces femmes doivent prendre conscience qu'elles ont des droits et en Catalogne les forces de police sont là pour les faire respecter : en cas d'incarcération du mari, elles ont pour mission d'expliquer à la femme qu'elle n'est pas responsable de cette incarcération, mais qu'il s'agit d'une mesure de sécurité publique car la société ne veut pas de mari violent. C'est la raison pour laquelle, en Catalogne, lorsque le mari quitte le foyer, il porte un bracelet électronique qui permet de s'assurer qu'il ne s'approche pas de sa femme.

L'accent a également été mis sur la volonté de favoriser le dialogue familial, dans la mesure où les femmes retournent toujours au domicile conjugal pour des raisons affectives, familiales ou financières, puisque c'est le mari qui généralement assume le revenu du foyer. Il a été par ailleurs constaté que ces femmes, lorsqu'elles quittent leur mari, se remettent en ménage avec un homme également violent. Il semble donc urgent de traiter les hommes violents et de favoriser des modes de résolution des conflits internes à la cellule familiale. Cela devrait permettre de prévenir la reproduction, par les enfants, de comportements conjugaux violents observés chez les parents.

Enfin, le troisième thème à l'ordre du jour a porté sur la traite des êtres humains et la prostitution. Le constat, au niveau des pays européens a été le suivant : il n'existe aucune volonté de lutter contre ce fléau et ce n'est pas une priorité politique. La France étant même montrée du doigt, car elle a la plus mauvaise législation en ce domaine.

Les Pays-Bas distinguent la prostitution volontaire et la prostitution organisée - la traite des êtres humains - qui concerne aussi bien les femmes que les hommes ; c'est cette prostitution qu'ils entendent combattre. La victime de la traite a des droits spéciaux, notamment un permis de séjour pour la durée du procès, ainsi qu'une assistance médicale, juridique et psychologique. Le principal problème est financier, puisque la victime, qui ne peut pas travailler, est dans l'incapacité de rembourser ses dettes, de préparer son rapatriement et d'aider sa famille. Le risque est donc grand de la voir retomber dans la prostitution, à moins de mener une coopération étroite avec les responsables du pays d'origine pour assurer sa réinsertion. Mais les victimes ont tendance à se méfier des autorités à qui il revient de gagner leur confiance et leur coopération. La question des visas est particulièrement délicate et demande une adaptation de la législation en accord avec les pays d'origine.

Mme Muguette Jacquaint : Je m'associe au compte rendu de Mme Béatrice Pavy, qui a fort bien présenté les trois thèmes qui ont été développés au cours de cette conférence.

En ce qui concerne la question des minorités ethniques, j'ai trouvé le Danemark très protectionniste...

Mme Béatrice Pavy : N'ayons pas peur des mots, le Danemark a une politique extrémiste !

Mme Muguette Jacquaint : Tout à fait. Les chiffres ont été donnés : 7 ans de mariage avant d'accorder la nationalité danoise à un conjoint non danois, etc. J'avais une autre idée du Danemark !

En ce qui concerne les violences domestiques et le trafic des êtres humains, il me semble que nous ne sommes qu'au début de la prise en compte de ces fléaux. Les pays cherchent une législation efficace pour lutter contre ces situations. Nous avons assisté à des interventions très fortes, condamnant sans s'en étonner, notamment les sociétés patriarcales.

Un film sur la prostitution, réalisé par l'association polonaise la Strada, nous a été projeté. Diffusé sur internet, il cherchait à mettre en garde les jeunes filles et il rejoignait les propos des personnes que nous avons déjà auditionnées sur ce sujet. Quelques propositions ont été présentées après ce film, concernant notamment la prévention à l'égard des jeunes filles en difficulté - économiquement, culturellement, socialement - provenant notamment des pays de l'Est.

Nous avons également eu un débat sur la légalisation de la prostitution, et nous avons entendu des choses assez étonnantes, notamment sur la politique réglementariste menée aux Pays-Bas et en Allemagne. D'autres pays, en revanche, prônent l'abolition pure et simple de la prostitution.

Enfin, je souhaiterais que ces conférences soient mieux préparées, de manière à ce que les représentantes de la Délégation qui partent y assister puissent se positionner en fonction des souhaits de l'ensemble des membres de la Délégation.

Mme Béatrice Pavy : Quand nous avons, par exemple, parlé de la prostitution, il aurait été intéressant que les trois sénatrices présentes exposent le rapport du Sénat. Mais comme elles étaient de deux sensibilités différentes, elles ne l'ont pas fait.

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente : Il est vrai que nous n'avions donné aucune consigne, ni fait aucune recommandation. Vous avez tout à fait raison et, l'année prochaine, nous prendrons le temps de mieux préparer cette conférence.

Les thèmes abordés par cette conférence sont les mêmes que ceux qui ont été traités la semaine dernière dans l'hebdomadaire Marianne.

Mme Béatrice Pavy : Il s'agit de thèmes préoccupants ! L'Europe a beaucoup à faire, notamment sur la question de la traite des êtres humains. Les clubs de football, par exemple, font venir en Europe des jeunes espoirs - africains le plus souvent -, et quand ils ne rendent pas le service attendu, ils sont livrés à eux-mêmes et nous les retrouvons sur le trottoir.

Le souhait de l'Espagne de procéder à une analyse fine du portrait des hommes violents et des femmes qui risquent de subir ces violences est intéressant.

En ce qui concerne la traite des jeunes filles, le film polonais - ou plutôt le Cdrom diffusé dans les écoles - propose trois parcours possibles pour le personnage, Monica. Cette expérience marche bien.

Tous les pays membres doivent pouvoir profiter des expériences menées chez les uns et les autres. Nous devons installer une certaine cohérence au sein de l'Europe.

Mme Muguette Jacquaint : S'agissant de la violence domestique, c'est le plus souvent la femme et les enfants qui sont obligés de quitter le domicile. Certaines propositions d'associations françaises visent à faire en sorte que ce soit le mari qui parte.

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente : Nous allons joindre la déclaration de Copenhague au dossier que nous allons envoyer à tous nos collègues députés.

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ANNEXES

2002 - Conférence internationale parlementaire

sur la mise en œuvre du programme d'action de la Conférence internationale
sur la population et le développement (CIPD)

Engagement d'Ottawa

Nous, Parlementaires du monde entier, venons à Ottawa pour réaffirmer notre
engagement envers le Programme d'action de la Conférence internationale sur la
population et le développement et pour nous engager à agir afin de faire
progresser la mise en oeuvre du Programme d'action et des principales mesures
identifiées dans l'examen mené cinq ans après.

Nous réaffirmons en outre notre engagement envers le développement durable et
ses trois piliers : croissance économique, progrès social et protection de
l'environnement.

Nous reconnaissons et acceptons notre rôle crucial, sur les plans tant individuel
que collectif, en tant que pont entre le peuple et le gouvernement - comme
avocats pour les droits et les besoins du peuple, comme législateurs chargés de
faire des lois pour protéger ces droits, et comme responsables chargés de
mobiliser les ressources et de créer l'environnement propice nécessaire pour
répondre à ces besoins.

Nous reconnaissons et acceptons en outre le fait que la population est un
problème transversal qui a un impact sur tous les autres problèmes de
développement et qui occupe donc une place centrale dans la réalisation des
objectifs de développement pour le Millénaire, en particulier ceux qui visent à
éliminer la pauvreté et la faim; à améliorer la santé maternelle, y compris les
efforts menés pour lutter contre l'avortement pratiqué dans des conditions
dangereuses et pour promouvoir la santé et les droits en matière de reproduction
et de sexualité; combattre le VIH/sida; assurer l'enseignement primaire
universel; et promouvoir l'égalité entre les sexes et l'affranchissement des
femmes.

Nous reconnaissons en outre les faits suivants :

II manque 34 % des fonds nécessaires pour atteindre le chiffre mondial convenu
de ressources pour 2000, qui est de 17 milliards de dollars pour les programmes
de population et de santé en matière de reproduction - 24 % sur le plan des
ressources intérieures et environ 55 % sur celui des ressources extérieures.

La moitié de la population mondiale vit avec moins de 2 dollars par jour; 1,2
milliard de personnes vivent avec moins d'un dollar par jour. Plus de la moitié
sont des femmes.

L'instabilité politique fait obstacle à l'élimination de la pauvreté et au
développement durable.

Dans le monde entier, quelque 840 millions de personnes souffrent de
malnutrition; des millions d'entre elles, dont 6 millions d'enfants âgés de moins
de 5 ans, meurent chaque année des effets de la faim et de la malnutrition
chroniques.

On compte actuellement environ 40 millions de réfugiés et de personnes
déplacées dans leur propre pays, dont beaucoup n'ont pas accès aux services de
santé en matière de reproduction.

- 14 -

En 2000, 508 millions de personnes vivaient dans des pays en situation de stress
hydrique; en 2025, ce sera le cas de 3 milliards.

On compte un milliard d'adolescents qui ont atteint ou sont sur le point
d'atteindre la période procréatrice de leur vie et dont beaucoup n'ont pas accès à
l'éducation et aux services de santé en matière de reproduction.

Chaque année, plus de 500 000 femmes meurent durant la grossesse et
l'accouchement; 7 millions de plus souffrent d'infections ou de lésions.

Dans le monde entier, 350 millions de femmes n'ont pas encore obtenu accès à
un éventail de moyens de contraception sans danger et efficaces; chaque année,
près de 175 millions de grossesses ne sont pas désirées ou se placent à un
moment inopportun.

Dans le monde entier, les besoins de millions de femmes sur le plan de la
planification familiale et de la santé en matière de reproduction ont été ignorés,
notamment dans des pays comme l'Afghanistan, où les femmes ont été
contraintes durant des décennies de pâtir de la non-satisfaction de ces besoins.

Près de 40 millions d'avortements sont pratiqués chaque année, souvent dans des
conditions dangereuses. Environ 78 000 femmes, soit 227 par jour, meurent
chaque année à la suite d'interruptions de grossesse pratiquées dans des
conditions dangereuses.

En 2001, 5 millions de personnes sont devenues séropositives, dont 800 000
étaient des enfants; 3 millions de personnes sont mortes du sida la même année.

On compte 13,4 millions d'orphelins du sida, dont beaucoup ont la charge d'un
foyer.

Près de la moitié de tous les nouveaux cas d'infection frappent des jeunes âgés
de 15 à 24 ans et les jeunes filles sont particulièrement exposées.

On compte 40 millions de personnes atteintes du VIH/sida; 28,5 millions d'entre
elles vivent en Afrique.

Le nombre des préservatifs nécessaires pour offrir une protection contre le
VIH/sida est inférieur chaque année de 8 milliards aux besoins.

En 2050, le nombre de personnes âgées de 60 ans au moins passera de 600
millions à près de 2 milliards et leur proportion dans la population doublera,
passant de 10 % à 21 %; beaucoup d'entre elles vivront dans la pauvreté et
auront besoin de l'aide des pouvoirs publics pour obtenir des services sociaux et
de santé.

Appel à l'action

Nous, Parlementaires réunis à Ottawa, nous engageons à prendre les mesures
suivantes et lançons un appel aux Parlementaires, partout dans le monde, pour
qu'ils s'y engagent aussi :

· Faire tout le possible pour affecter Jusqu'à 5 à 10 % des budgets

nationaux de développement aux programmes de population et de santé
en matière de reproduction.

· Faire tout le possible pour atteindre l'objectif convenu d'affecter à l'aide
publique au développement (APD) 0,7 % du PNB et n'épargner aucun
effort pour mobiliser le montant estimatif convenu de ressources

- 15 -

financières indispensables à la mise en oeuvre du Programme d'action de
la CIPD.

· Donner un rang élevé de priorité à l'accès universel aux services et

produits de santé en matière de reproduction dans le cadre des politiques
nationales de santé et de réduction de la pauvreté, sur le plan tant des
allocations budgétaires que des activités de programme.

· Formuler et mettre en oeuvre les politiques et fournir les moyens de
financement nécessaires pour offrir aux réfugiés et aux personnes
déplacées les soins voulus sur le plan de la santé en matière de
reproduction et de sexualité.

· Promulguer, faire connaître et imposer des lois et politiques de nature à
promouvoir et protéger les droits fondamentaux des fillettes et des jeunes
femmes, à assurer l'accès égal et la pleine participation des femmes à la
prise de décisions à tous les niveaux, et à éliminer toutes les formes de
violence, de coercition et de discrimination contre les femmes, y compris
diverses formes de pratiques traditionnelles, culturelles et religieuses qui
leur sont nuisibles.

· Faire disparaître tous les écarts et inégalités entre les sexes dans
l'éducation, l'emploi et les moyens d'existence, adopter et imposer des
mesures propres à assurer l'éducation des filles, développer leurs
compétences techniques et professionnelles et leur enseigner à lire et à
écrire. .

· Promouvoir la réduction de la mortalité et de la morbidité maternelles ainsi
que du nombre d'avortements pratiqués dans des conditions dangereuses,
à la fois en tant que priorité de la santé publique et que préoccupation
relative aux droits en matière de reproduction.

· Soutenir l'éducation sanitaire afin de faire prendre conscience des risques
liés à la grossesse, au travail et à l'accouchement, et d'approfondir la
compréhension des rôles et responsabilités respectifs des membres de la
famille, notamment des hommes, s'agissant de promouvoir et de protéger
la santé maternelle.

· Donner une priorité élevée à l'approvisionnement en eau, surtout dans les
zones rurales, et à l'assainissement dans les stratégies nationales de
développement et de réduction de la pauvreté, et en particulier à un
meilleur rendement des ressources hydriques, à la stabilisation de la
population et à la stabilisation du climat.

· Améliorer l'accès de tous ceux qui vivent dans la pauvreté, en particulier
des femmes, aux ressources agricoles, y compris la terre, et promouvoir
des systèmes de distribution équitables et efficaces, ainsi que le
développement durable.

· Susciter la volonté politique nécessaire pour élaborer des politiques du
VIH/sida et les intégrer aux politiques nationales de santé en matière de
reproduction, et mettre en oeuvre les plans d'action nationaux;
promulguer une législation propre à garantir le respect des droits
fondamentaux et la dignité des personnes atteintes du VIH/sida et des
orphelins du sida; et dispenser l'éducation et les services nécessaires pour
prévenir la transmission de toutes les formes d'infections sexuellement
transmissibles, dont le VIH/sida, et pour offrir le traitement de ces
infections.

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· Veiller à ce que les adolescents, tant scolarisés que non scolarisés,

reçoivent l'information nécessaire dans les langues appropriées, aussi bien
que des services et des occasions de participer à la planification des
politiques et programmes qui leur sont destinés et de faire des choix et
prendre des décisions responsables et informées concernant leurs besoins
sur le plan de la santé en matière de reproduction et de sexualité.

· N'épargner aucun effort pour assurer d'ici l'an 2015 l'accès universel aux
services et produits de santé en matière de reproduction, en encourageant
les gouvernements, les donateurs, la société civile et le secteur privé à
travailler ensemble, avec l'appui des gouvernements, à atteindre cet
objectif.

· Créer et/ou renforcer une capacité nationale de collecter, analyser et
diffuser des données statistiques, ventilées par sexe, au service de la
planification nationale du développement, et dégager les ressources
nécessaires à cette fin.

· Promouvoir et protéger la pleine jouissance par les personnes âgées de
leurs droits économiques, sociaux, culturels, civils et politiques et éliminer
toutes les formes de violence et de discrimination contre elles; et donner
aux personnes âgées les moyens de participer pleinement et efficacement
à la vie de leurs sociétés respectives dans les domaines économique,
politique et social.

Promesse

Nous, Parlementaires, promettons, en tant qu'avocats de la collectivité publique,
législateurs et responsables, de mettre en oeuvre ces mesures et de suivre de
manière active et systématique les progrès que nous faisons à cet égard. Nous
promettons en outre de faire régulièrement rapport sur ces progrès par
l'intermédiaire des groupes parlementaires et de nous rencontrer de nouveau
dans deux ans pour évaluer les résultats obtenus, sur le plan tant individuel que
collectif.

- 17 -

Déclaration

Conférence annuelle du Réseau des commissions des parlements nationaux de l'Union
européenne et du Parlement européen chargées de l'égalité des chances des femmes et des
hommes (CCEC), Copenhague, 22 - 23 novembre 2002.

Construire une Europe démocratique pour les femmes et les hommes

Nous, délégués du Réseau des CCEC des parlements nationaux des États membres de l'Union
européenne et le Parlement européen, et délégués des pays candidats à l'adhésion, et de
l'Assemblée Parlementaire du Conseil de l'Europe

accueillant avec satisfaction le travail effectué par la Convention en vue de définir le profil
d'une future Europe démocratique, objectif de la plus grande importance pour les citoyennes et
les citoyens de l'Europe ;

prenant acte de l'avant-projet de traité constitutionnel publié le 28 octobre ;

accueillant avec satisfaction la proposition visant à intégrer la Charte européenne des Droits
fondamentaux dans le projet de traité constitutionnel,
entre autres parce que l'égalité des
sexes est une question qui concerne au plus haut point les droits fondamentaux ;

observant toutefois avec une profonde inquiétude le manque d'intérêt que suscitent jusqu'à
présent les questions ayant trait à l'égalité des sexes dans l'avant-projet de traité constitutionnel
qui :

- N'inclut pas l'égalité des sexes dans les valeurs de l'Union européennes,

- N'inclut pas dans ses objectifs l'élimination des inégalités et la promotion de l'égalité
entre les femmes et les hommes ;

demandons que l'"acquis communautaire" de l'Union européenne en matière d'égalité des
sexes soit maintenu et renforcé ;

présentons les exigences minimales suivantes en ce qui concerne un futur traité constitutionnel
européen :

Première partie : Structure constitutionnelle

- La Charte des Droits fondamentaux doit être incorporée au traité constitutionnel ;

- L'égalité des sexes doit être mise au rang des valeurs fondamentales de l'Union ;

- L'élimination des inégalités et la promotion de l'égalité des femmes et des hommes
devront figurer parmi les objectifs et les tâches de l'Union ;

- 18 -

Deuxième partie : Les politiques de l'Union et leur application

L'égalité des sexes et la situation particulière de chaque sexe devront être intégrées
dans tous les domaines de politique, à tous les niveaux, à tous les stades et par tous les
participants à l'activité politique (en d'autres termes l'« intégration des considérations
liées aux sexospécificités ») ;

- La compétence de l'Union et des États membres en matière pénale devra s'étendre à
toutes les formes de violence envers les femmes, y compris la traite des femmes ;

- Conformément au principe de la démocratie, l'équilibre de la représentation des femmes
et des femmes dans les organismes décideurs devra faire partie des principes
fondamentaux de l'union européenne et être soutenu par des actions positives visant à
l'amélioration de la situation de la Femme, qui est le sexe sous-représenté ;

- Un titre spécifique « Égalité des sexes » sera inséré dans le traité et constituera une base
claire pour toutes les questions relatives à l'égalité des femmes et des hommes ;

- Les questions se rapportant à l'égalité des sexes relèvent du mandat donné au groupe de
travail chargé par la Convention d'examiner les politiques sociales ;

- Le traité sera rédigé dans une langue dénué de tout présupposé sexiste ;

Demandons au président de la conférence de transmettre la présente déclaration à tous les
membres de la Convention.


© Assemblée nationale