DÉLÉGATION AUX DROITS DES FEMMES
ET À L'ÉGALITÉ DES CHANCES
ENTRE LES HOMMES ET LES FEMMES

COMPTE RENDU N° 2

Mardi 24 octobre 2006
(Séance de 17 heures)

Présidence de Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente

SOMMAIRE

 

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- Audition de Mme Naïma Charaï, conseillère régionale d'Aquitaine, présidente de la commission discrimination-égalité de l'Association des régions de France (ARF), sur le thème de la parité

- Audition conjointe de Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont, députée, présidente du conseil général de la Haute-Vienne, et de M. Gérard Dériot, sénateur, président du conseil général de l'Allier, membres de l'Assemblée des départements de France (ADF), sur le thème de la parité Michelle BIAGGI, secrétaire confédérale de la Confédération générale du travail - Force ouvrière (CGT-FO) sur le thème « femmes et précarité »

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Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente, a souhaité la bienvenue à Mmes Naïma Charaï, conseillère régionale d'Aquitaine, présidente de la commission discrimination-égalité de l'Association des régions de France (ARF), et Claire Bernard, directrice des études à l'ARF, ancienne secrétaire générale de l'Observatoire de la parité.

Un projet de loi sur la parité est actuellement en préparation. Aiguillonné par le Président de la République et par l'Observatoire de la parité, le Gouvernement promet qu'il sera examiné au Sénat courant décembre et à l'Assemblée début janvier. Dans cette attente, la Présidente a maintenu sa conférence de presse prévue demain matin à l'Observatoire de la parité, au cours de laquelle elle annoncera le dépôt d'une proposition de loi. Celle-ci offre, par rapport au texte du Gouvernement, l'avantage de ne pas nécessiter un avis du Conseil d'État et permet donc une procédure plus rapide.

Mme Marie-Jo Zimmermann a rappelé que l'Observatoire de la parité avait formulé un certain nombre de propositions en faveur de la parité au sein des exécutifs municipaux et régionaux. En effet, si l'on compte désormais, grâce à la loi sur la parité, 47 % de femmes dans les conseils régionaux et dans les conseils municipaux des communes de plus de 3 500 habitants, on est très loin de tels résultats au sein des exécutifs de ces organes. Ainsi, il n'y a pas plus de 30 à 35 % de femmes dans les exécutifs régionaux, alors qu'on aurait pu penser que la victoire de la gauche aux dernières élections régionales allait faire progresser la parité. Il faut faire en sorte que les femmes puissent accéder aux vice-présidences, non pas pour la raison qu'elles sont des femmes, mais en raison d'une volonté de leur faire co-gérer la collectivité avec leurs collègues hommes vice-présidents. Quel est le point de vue de l'ARF sur cette question ?

Mme Marie-Jo Zimmermann souhaiterait également connaître l'avis des représentantes de l'ARF sur la manière de faire progresser la parité dans les intercommunalités, qui sont aujourd'hui le véritable lieu du pouvoir et où les femmes sont très peu présentes. Elle a indiqué que les dispositions les concernant ne figureraient pas dans le projet de loi, mais qu'en revanche seraient institués des suppléants de sexe opposé pour les conseillers généraux. Même si cela ne constitue pas une révolution, cette proposition permettrait, tout en évitant des élections partielles toujours onéreuses, de faire entrer peu à peu les femmes dans le système, certes par la petite porte, mais l'essentiel n'est-il pas d'avancer ?

D'une manière générale, comment l'ARF juge-t-elle possible de faire encore progresser la parité, qui demeure manifestement difficile à faire accepter par les partis politiques alors qu'elle est voulue par l'opinion publique ?

Mme Naïma Charaï a rappelé que l'on était passé de 10 % de femmes conseillères régionales en 1990, à 27,5 % en 1998 et à 47,6 % en 2004, après que la loi de 2003 a obligé à une alternance dans les scrutins de liste. Cette progression est assez significative, même si l'on observe, en effet, que les femmes ne sont toujours que 35 % au plus dans les exécutifs et qu'elles sont donc exclues des lieux de pouvoir et de décision.

On retrouve d'ailleurs là une constante de la société française puisque, alors que les femmes sont majoritaires parmi les reçus au concours de l'École nationale de la magistrature, elles sont bien plus rares aux postes de décision dans la hiérarchie judiciaire.

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente, a souligné que c'est précisément pour cette raison que les politiques doivent donner l'exemple.

Mme Naïma Charaï a répondu que si elle était persuadée de la valeur de l'exemplarité, force est de constater que les progrès ne sont réellement obtenus que quand la loi y contraint. À défaut, parvenir à la parité dans les exécutifs régionaux risque de prendre des décennies, dans la mesure où ils sont constitués en fonction de la hiérarchie au sein des partis politiques, dont les responsables fédéraux accèdent en général aux vice-présidences. Les hommes sont donc promus parce qu'ils sont déjà aux postes de décision, parce qu'ils ne laissent pas leur place, et on ne voit pas pourquoi les choses changeraient sans contrainte législative.

Mme Claire Bernard a fait observer qu'à l'occasion d'une enquête réalisée auprès des nouveaux élus en 2005, lors de la préparation du congrès de l'ARF, 60 % des conseillers régionaux s'étaient déclarés en faveur de l'imposition par la loi de la parité dans les exécutifs. Les femmes y étaient plus favorables que les hommes et la gauche davantage que la droite. Mais lorsque l'Assemblée des départements de France (ADF) a réalisé la même enquête à l'occasion de son congrès, les résultats ont été inverses : seules les femmes conseillères générales étaient favorables à cette mesure, qui demeurait minoritaire (40 % de conseillers favorables) dans la mesure où elles ne sont que 10 % dans ces assemblées.

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente, a souligné que si l'on semble s'orienter dans le projet de loi vers l'institution de suppléants aux conseillers généraux, pour sa part elle préconisait une solution mixte : un scrutin uninominal pour les cantons ruraux, où le conseiller général a une véritable implantation, et un scrutin de liste pour les cantons urbains, où les électeurs ne les identifient pas clairement. Cela permettrait aussi de faire figurer les conseillers généraux au sein des communautés d'agglomération, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui : à Metz, sur quatre conseillers généraux, un seul est présent dans la communauté d'agglomération, parce qu'il est conseiller municipal de la ville.

Mme Naïma Charaï a considéré que l'élection au suffrage direct des exécutifs des intercommunalités permettrait de régler les problèmes.

Après que Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente, s'est dite opposée à cette solution, Mme Claire Bernard a suggéré qu'on identifie clairement, au sein des listes municipales, les représentants de la commune à l'intercommunalité, en appliquant la règle « un homme, une femme ». Mais peut-être les représentants des associations des intercommunalités auraient-ils d'autres idées.

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente, a observé que le problème se pose moins pour les communautés d'agglomération et les communautés urbaines que pour les communautés de communes.

Mme Danielle Bousquet a déploré que les intercommunalités, où se situent désormais les principaux enjeux, soient essentiellement masculines. Bien sûr, on peut se dire qu'une future majorité fera évoluer la loi électorale pour aller vers le scrutin de liste, mais il faut aussi chercher comment progresser dans le cadre actuel. Dans la mesure où leur désignation ne fait pas l'objet de l'élection d'une liste contre une autre, ne pourrait-on exiger que les bureaux des intercommunalité soient paritaires, sans indiquer explicitement les moyens d'y parvenir ?

Mme Naïma Charaï a manifesté son attachement au scrutin de liste, considérant qu'il y avait peu d'intérêt à ce que les femmes soient suppléantes dans la mesure où seuls les titulaires siègent effectivement.

Mme Claire Bernard a indiqué que M. Adrien Zeller, président du conseil régional d'Alsace, s'apprêtait à adresser aux candidats à l'élection présidentielle un certain nombre de propositions, en particulier celle du maintien des conseillers généraux en milieu rural et, en milieu urbain, du transfert de leurs compétences aux intercommunalités.

Par ailleurs, on peut penser que dès lors que la parité aura progressé dans les exécutifs municipaux, on trouvera plus de femmes au sein des intercommunalités.

Mme Naïma Charaï s'est demandé si les maires ne seraient pas réticents à l'idée que la parité les oblige à confier à un adjoint le choix de prendre les décisions importantes au sein de l'intercommunalité.

Quoi qu'il en soit, si le nouveau texte permet d'obtenir des progrès pour les exécutifs régionaux et municipaux, il marquera une avancée.

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente, a souligné qu'en cas de victoire de la gauche, l'imposition du non-cumul des mandats dégagerait des places pour les suppléants.

Mme Naïma Charaï a fait observer qu'il y avait aussi un problème de cumul des mandats dans le temps.

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente, a répondu qu'il s'agissait aussi d'un sujet de réflexion.

Elle a rappelé que le Président de la République était d'accord avec la proposition d'instituer des suppléants, car elle permettrait d'éviter des élections partielles et aussi d'aller vers une autre façon de faire de la politique.

Mme Danielle Bousquet a noté que l'organisation de la France rurale du XIXe siècle, avec un conseiller général par canton, ne semblait plus d'actualité dans un pays à 80 % urbain et « rurbain », et qu'il fallait sans doute procéder à des regroupements. S'il est souhaitable aujourd'hui de prévoir un suppléant d'un autre sexe pour chaque conseiller général, il faut insister sur le fait qu'il ne s'agit que d'une mesure transitoire, d'un premier pas dans l'affirmation de la nécessité de la parité, mais que cela ne permet pas encore réellement de faire avancer les choses.

Mme Naïma Charaï a rappelé sa position en faveur d'une proportionnelle départementale.

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente, et Mme Danielle Bousquet ont souligné que la représentativité des conseillers généraux n'était effective qu'en territoire rural.

Mme Naïma Charaï a fait part de son désaccord : à Bordeaux, ville de 200 000 habitants, les conseillers généraux, dont certains ne sont pas élus municipaux, sont tout à fait identifiés, car un véritable travail de maillage est effectué, comme dans les territoires ruraux. Ils ont une compétence en matière sociale d'autant plus importante que Bordeaux est une ville où le nombre des allocataires du RMI est très important ; ils tiennent des permanences où ils sont sollicités par les citoyens ; ils ont donc une vraie visibilité, une fonction sociale, un ancrage territorial fort. Mais peut-être est-ce une spécificité bordelaise.

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente, a souligné qu'il était par ailleurs préoccupant que les collectivités soient amenées à augmenter les impôts alors que les citoyens entendent le discours du gouvernement sur leur diminution.

Mme Danielle Bousquet en a attribué la responsabilité au désengagement de l'État, Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont rappelant que les impôts locaux ne représentent que 0,6 % du PIB.

Mme Claire Bernard a insisté sur la nécessité de supprimer les doublons administratifs, l'État laissant subsister un échelon déconcentré à chaque fois qu'il décentralise. Le président Adrien Zeller, qui est un des plus zélé décentralisateur qui soit, propose qu'on supprime un échelon déconcentré à chaque fois qu'une compétence est dévolue aux collectivités locales.

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente, a remercié Mme Naïma Charaï et Mme Claire Bernard.

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Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente, a ensuite souhaité la bienvenue à Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont, députée, présidente du conseil général de la Haute-Vienne, et à M. Gérard Dériot, sénateur, président du conseil général de l'Allier, membres de l'Assemblée des départements de France (ADF).

Elle a rappelé que, lors de ses vœux, en janvier 2006, le Président de la République avait mis l'accent sur la progression nécessaire de la parité, d'une part dans les exécutifs régionaux et municipaux, d'autre part dans les intercommunalités, qui sont aujourd'hui de véritables lieux de pouvoir, mais qui comptent très peu de femmes. Il s'était également prononcé pour un renforcement des pénalités financières pour les partis qui ne respectent pas la parité de candidatures aux législatives. Aujourd'hui, il semble possible que le Sénat examine le texte avant la fin de l'année et l'Assemblée avant la fin de janvier 2007. C'est pourquoi la Délégation a jugé particulièrement intéressant d'entendre la position des représentants de l'ADF sur ces questions.

Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont, après s'être réjouie de pouvoir s'exprimer devant la Délégation de l'Assemblée nationale après l'avoir fait devant celle du Sénat, a rappelé qu'elle était une départementaliste convaincue. Lorsqu'elle a été élue députée, c'est d'ailleurs le mandat de conseillère générale d'un canton plutôt difficile pour sa famille politique, et qu'elle exerçait depuis 1988, qu'elle a choisi de conserver, car il est propice à la politique de proximité, en ce qu'il touche à tous les aspects de la vie des citoyens. C'est d'ailleurs ce qui a été confirmé à la faveur des lois de décentralisation, même si les moyens nécessaires n'ont pas été engagés. On peut se réjouir que plus aucun parti ne remette aujourd'hui en cause cet échelon essentiel qu'est le département.

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente, l'interrogeant sur l'éventualité d'un changement de mode de scrutin des conseillers généraux, Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont a répondu qu'elle l'avait elle-même proposé à son parti.

Elle est convaincue que la loi sur la parité a joué un rôle désinhibant, y compris pour les scrutins auxquels elle ne s'applique pas. Ainsi, même si on est encore loin de l'objectif poursuivi, on est passé au sein des conseils généraux de 8,5 à 11 % de femmes. Lorsqu'elle a été élue conseillère générale pour la première fois en 1988, elle était la seule femme sur 42 conseillers généraux ; elles sont aujourd'hui cinq, ce qui est quand même un progrès permis, entre autres, par cette loi qui a joué un rôle de catalyseur.

Pour autant, il faut aujourd'hui aller plus loin.

Pour le conseiller général en zone rurale, le scrutin uninominal direct demeure pertinent, et le supprimer serait un coup porté à la démocratie, car les gens connaissent personnellement leur élu, qui est comptable de son action devant eux. En revanche, en zone urbaine, le lien est plus artificiel, et l'on pourrait donc recourir, sans que cela paraisse anticonstitutionnel, à un scrutin de liste qui permettrait une meilleure représentation des femmes. Cette idée semble préférable à celle d'un suppléant qui, prenant la place du titulaire (décédé, élu à une autre fonction, nommé ministre...), devrait encore faire la preuve de sa légitimité. Introduire une part de proportionnelle aurait la vertu de montrer que les femmes ont toute leur place à l'échelon départemental, qu'elles exercent une égalité de droits et de devoirs avec les hommes.

Mais les femmes doivent aussi cesser de considérer que la parité ne passe que par la proportionnelle : pourquoi auraient-elles peur du scrutin uninominal direct ?

La question de la place des femmes dans les exécutifs est également très importante. Au sein du conseil général de la Haute-Vienne, que préside Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont, sur les cinq femmes conseillères générales, trois sur les quatre qui appartiennent à la majorité départementale exercent une vice-présidence ou une délégation (la quatrième y ayant renoncé pour raisons personnelles).

M. Gérard Dériot a souligné à son tour l'importance des départements et des conseillers généraux, qui sont chaque jour à l'écoute de toutes les familles. D'ailleurs, alors qu'à l'origine la loi de décentralisation du gouvernement de M. Jean-Pierre Raffarin avait prévu de donner certains pouvoirs aux régions, on s'est rapidement aperçu que cela ne marchait pas et que les conseils généraux étaient la seule collectivité de proximité de taille adaptée pour assumer ces missions, même si des divergences existent sur les moyens financiers nécessaires.

Mais il est vrai que le mode de scrutin rend difficile la parité au sein de ces assemblées. Alors que l'on comptait jusqu'alors, au sein du conseil général de l'Allier, une seule femme, appartenant plutôt à l'opposition départementale, quatre femmes ont été élues en 2001, deux de l'opposition et deux de la majorité, ces dernières se voyant aussitôt confier des vice-présidences - non pas dans le domaine social ou culturel, mais dans celui des routes et des bâtiments pour celle qui est devenue la première vice-présidente, et dans celui de l'agriculture et de l'environnement pour la seconde. Telle a été la volonté non seulement du président, mais de l'ensemble du conseil général, afin de bien montrer que tous les champs de compétences de l'institution sont naturellement ouvert aux élus. Par ailleurs, il est difficile pour une femme de mener de front un emploi et une vie familiale et conjugale. Pour leur part, les hommes n'ont pas à assumer deux journées comme le font les femmes.

Or, dans les conseils municipaux comme dans les conseils généraux, la présence de femmes fait changer l'état d'esprit général : elles apportent une autre manière de voir les choses, elles modifient l'ambiance, elles sont plus travailleuses que les hommes et les missions qui leur sont confiées sont souvent remplies plus à fond.

On peut aussi espérer que, grâce à leur exemple, davantage de femmes acceptent de se présenter car l'une des principales difficultés pour faire progresser la parité est le refus des femmes de s'engager dans une campagne, en particulier face au scrutin uninominal.

La proposition de Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont d'appliquer un scrutin proportionnel de liste paritaire dans les zones urbaines - car il n'y a que là qu'on puisse le faire - a été reprise par l'ADF. C'est en effet le seul moyen d'augmenter le nombre des femmes dans les conseils généraux. Le risque - qu'on ne retrouve pas au Sénat car le nombre des élus y est bien plus important - étant toutefois de faire apparaître au sein des assemblées plusieurs légitimités, un clivage entre élus de liste et élus individuels.

Au sein des exécutifs, imposer une plus forte présence des femmes relève surtout de la volonté des élus, en particulier du président, de donner une orientation nouvelle.

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente, a souligné qu'il était facile d'identifier les cantons ruraux et urbains et que l'on pourrait diriger les élus à la proportionnelle vers les intercommunalités. À Metz, le fait que, sur les quatre conseillers généraux, un seul siège à la communauté d'agglomération, parce qu'il est aussi conseiller municipal, peut poser problème.

Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont a jugé qu'il pouvait aussi y avoir des difficultés dans le cas où le conseiller général d'une ville n'était pas de la même couleur politique que la municipalité, car le conseiller général urbain est le plus souvent interpellé sur des questions qui relèvent de la gestion communale.

Elle a considéré que l'application des pénalités aux partis politiques pour non-respect de la parité pourrait être étendue aux conseils généraux.

M. Gérard Dériot a répondu que le fait que les conseillers généraux soient très souvent élus sans étiquette politique y faisait obstacle. Ainsi, au sein du conseil général de l'Allier, trois élus seulement sur les dix-huit de la majorité départementale appartiennent à un parti.

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente, a observé qu'il en était de même en Moselle et que l'application du scrutin de liste en ville pourrait politiser les conseils généraux.

Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont a estimé que, dans la mesure où chaque élu a sa propre légitimité, et où il n'a jamais été en concurrence avec un autre conseiller général, il fallait s'efforcer de faire naître une conscience départementale au sein de cette assemblée.

M. Gérard Dériot a relevé qu'il était difficile d'en exercer la présidence, chaque conseiller ayant été élu sur son propre nom et pouvant demander à tout moment au président qui l'avait fait roi : on est donc obligé de négocier sans cesse. Mais, peut-être justement pour cette raison, on peut mieux, lorsqu'on parvient à rassembler les gens, faire passer l'esprit départemental.

À Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente, qui l'interrogeait sur le nombre de femmes présidentes de conseils généraux, Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont a répondu qu'il y en avait trois : Anne d'Ornano dans le Calvados, Nassimah Dindar à la Réunion et elle-même en Haute-Vienne. À l'opposé, trois conseils généraux ne comptent encore aucune femme : l'Ardèche, les Hautes-Alpes et Mayotte.

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente, a insisté sur le fait qu'il n'était pas facile de féminiser les conseils généraux et que, si l'application d'un scrutin proportionnel pour les villes paraît une bonne solution, on pouvait en effet craindre qu'elle n'aboutisse à une politisation que craignent les présidents des conseils généraux.

Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont a répondu qu'il y avait déjà une opposition au sein de ces assemblées, mais qu'elle était souvent moins politique que territoriale, entre la logique des élus ruraux et celle des élus urbains, qui sont des sortes de super-conseillers municipaux.

M. Gérard Dériot a souligné, au-delà de la solution du scrutin de liste, la nécessité de vaincre l'appréhension des femmes à affronter le scrutin uninominal.

Mme Danielle Bousquet a jugé que l'on gagnerait beaucoup en efficacité en appliquant le principe de non-cumul des mandats.

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente, a observé que cela figurait dans le programme du parti socialiste, mais pas dans celui de l'UMP.

M. Gérard Dériot a fait état des difficultés qu'il avait rencontrées pour faire entrer des femmes au sein du conseil municipal de sa commune de 1 600 habitants : quand il a été élu, en 1977, pas une seule n'avait accepté. En 1995, sur les quatre qui figuraient sur la liste, deux seulement avaient été élues, mais elles ont exercé leur mandat et fait ainsi évoluer les mentalités : aujourd'hui on compte 8 femmes sur 19 conseillers municipaux. Dans le département aussi, il y a une évolution assez rapide : en 1977, quatre communes seulement sur 320 avaient une femme comme maire ; il y en a aujourd'hui 46. La valeur de l'exemple est ici très importante.

Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont a estimé que la loi sur la parité avait fait sauter des verrous.

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente, a souligné que les conseillères municipales constituaient un bon vivier pour les conseils généraux.

Mme Danielle Bousquet a regretté qu'un grand nombre de femmes, en particulier dans les petites communes, annoncent aujourd'hui qu'« on ne les y reprendra plus » à l'occasion du renouvellement des équipes en 2008.

M. Gérard Dériot a répondu qu'il en allait toujours ainsi à un an des municipales, pour les femmes comme pour les hommes, mais qu'au dernier moment presque tout le monde décidait de rester.

Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont a rappelé combien l'exercice des mandats locaux était lourd, en particulier pour les femmes qui, très exigeantes avec elles-mêmes, avaient à cœur de les assumer pleinement.

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente, a souligné que, sur le plan financier tout au moins, les conseillères ne rencontraient plus de difficultés particulières, grâce aux indemnités des conseils généraux, des conseils régionaux et des assemblées parlementaires.

M. Gérard Dériot a objecté que cela ne répondait pas aux questions d'organisation matérielle.

Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont a ajouté qu'elle avait dû faire le choix de travailler à mi-temps quand elle avait été élue conseillère générale et que, si elle n'était pas devenue parlementaire, cela aurait été susceptible de lui poser de véritables difficultés au moment de la retraite.

M. Gérard Dériot a indiqué que, lorsqu'il était devenu président du conseil général il avait dû continuer à travailler tôt le matin dans son laboratoire d'analyses médicales, avant de se rendre au conseil général.

On parle beaucoup du statut de l'élu : s'il peut en effet régler les problèmes des fonctionnaires et d'un certain nombre de salariés, il ne répondra jamais aux difficultés des professionnels libéraux, qui, à l'issue de leur mandat, se retrouvent sans rien s'ils ont cédé leur activité après leur élection. On voit bien aujourd'hui qu'il est de plus en plus difficile de trouver des candidats dans ces professions.

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente, a remercié Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont et M. Gérard Dériot.

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