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Session extraordinaire de 2001-2002 - 2ème jour de séance, 2ème séance

SÉANCE DU MERCREDI 3 JUILLET 2002

PRÉSIDENCE de M. Jean-Louis DEBRÉ

Sommaire

        DÉCLARATION DE POLITIQUE GÉNÉRALE
        DU GOUVERNEMENT 2

        REQUÊTES EN CONTESTATION
        D'OPÉRATIONS ÉLECTORALES 35

        DÉCLARATION D'URGENCE 36

        ORDRE DU JOUR DU MARDI 9 JUILLET 2002 36

La séance est ouverte à quinze heures.

DÉCLARATION DE POLITIQUE GÉNÉRALE DU GOUVERNEMENT

L'ordre du jour appelle la déclaration de politique générale du Gouvernement.

M. le Président - La parole est à M. le Premier ministre (Mmes et MM. les députés des groupes UMP et UDF se lèvent et applaudissent longuement).

M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre - Cher monsieur le Président, chers mesdames et messieurs les députés, à chacune et chacun d'entre vous, personnellement, j'adresse mes sincères félicitations pour la mission d'honneur et de service qui vous a été confiée par les Françaises et les Français, lors des toutes récentes élections législatives.

Les conditions sont maintenant réunies pour que le temps de l'action relaie le temps des élections. Cette action doit être caractérisée par la lucidité, le courage et l'espoir.

La France est forte de ses projets, mais fragile dans son organisation ; confiante dans son avenir, méfiante quant à la politique.

L'élection présidentielle a été un rendez-vous de vérité (« 19 % ! » sur les bancs du groupe socialiste).

Le 21 avril, les Françaises et les Français ont exprimé leur mécontentement. L'impuissance politique a généré l'exaspération populaire. L'abstention, à ce niveau, n'est plus de l'indifférence mais de la défiance. Un grand nombre de Français ont reproché à la République de ne plus tenir ses promesses de liberté, d'égalité et de fraternité (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

Le 5 mai a témoigné aussi d'une vérité : la colère portait sur le fonctionnement de la République et non contre ses valeurs.

Le projet de Jacques Chirac a été le rempart contre l'extrémisme et le centre de gravité du rassemblement de tous les républicains (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe C. et R. ; applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

Le Gouvernement que j'ai l'honneur de diriger, nommé par le Président de la République, est originellement marqué par les deux grands messages de l'élection présidentielle : l'urgence d'une réponse aux attentes des citoyens et l'exigence du partage des valeurs républicaines (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

Dans cette situation, la route est droite, mais la pente est forte (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe C. et R.). Je souhaiterais que s'instaurent des relations républicaines de bon dialogue... (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF). Les institutions prévoient cette déclaration ; chacun pourra y répondre. Je ne suis pas ici pour polémiquer, mais pour exposer la politique générale du Gouvernement (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

Une phrase du rapport de l'audit de la situation des finances publiques, que m'ont remis MM. Bonnet et Nasse, trace la ligne du courage : « des réformes de fond sont nécessaires, la simple recherche d'économies sans modifications de l'organisation et des structures n'est plus à la dimension du problème » (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

Pour la France du XXIe siècle, l'audace réformatrice est une question de destinée. La demande de France est forte partout dans le monde, mais le monde ne nous attendra pas.

Nous avons l'ambition de redonner l'espoir aux Français. La source de cet espoir est dans l'unité nationale. Je ne souhaite pas faire de la division un principe gouvernemental, je ne souhaite pas opposer les Français les uns aux autres, on ne gouverne pas pour les villes contre les villages, pour les consommateurs contre les éleveurs, pour les salariés contre les entreprises, pour les intérêts des uns contre les intérêts des autres... Nous voulons gouverner dans l'intérêt de tous (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

M. Henri Emmanuelli - Vous ne gouvernez pas pour les smicards, c'est sûr !

M. le Premier ministre - Seule l'unité nationale et le partage de la République nous permettront de surmonter individualisme et communautarisme, de dépasser les égoïsmes et féodalités.

La France a besoin aujourd'hui que chacun lui donne un peu de lui-même.

Cet appel à la cohésion nationale ne nie pas l'exigence du débat, au contraire. Et, si je me réjouis de la qualité et de l'ampleur de la représentation de la majorité présidentielle, je souhaite aussi que nous progressions dans la pratique des relations républicaines avec l'opposition (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

La politique est une affaire de vérité, mais celle-ci n'est pas à sens unique. Il n'y a pas un camp qui a toujours raison et un autre toujours tort. Nous avons chacun à défendre notre conception de l'intérêt général.

« Le principe d'humanité » qui m'anime laisse toujours une place à l'autre, à l'avis contraire. Cette démarche s'oppose à celle des certitudes faciles qui conduisent à des décisions fragiles. Notre pays attend des décisions éclairées mais aussi des décisions fermes. C'est ensemble que nous les élaborerons. Le Parlement est en effet le c_ur de notre démocratie, le lieu où tous les Français se sentent représentés, le lieu où est pensé et défendu l'intérêt général.

Avec cette conviction, mon gouvernement rendra compte de son action au Parlement, proposera les initiatives nécessaires pour que les objectifs soient tenus et s'engagera chaque année sur la réalisation de ses objectifs.

Je sais aussi que le Parlement aspire à se moderniser pour tenir plus efficacement son rôle et que les présidents des deux assemblées ont des idées précises et innovantes. Je suis disponible pour discuter d'une telle réforme.

C'est donc avec vous que nous conduirons la France dans la direction tracée par le chef de l'Etat.

Mon gouvernement s'est mis au travail sans attendre. Je souhaite qu'ensemble nous puissions dès aujourd'hui, avec le début de cette session extraordinaire, commencer à répondre aux attentes les plus pressantes des Français.

Attentes légitimes, attentes importantes, car la vie des Français a changé.

Nos concitoyens assistent et participent à la mondialisation de l'économie. Ils sont inquiets du terrorisme qui a frappé les Etats-Unis le 11 septembre 2001, et la France à Karachi. Tandis que les problèmes se pensent à l'échelle mondiale, les changements s'accompagnent de la multiplication des insécurités.

Insécurité physique d'abord. La violence est de plus en plus présente dans notre société. Mais l'insécurité est aussi sociale, nombre de nos concitoyens étant confrontés au chômage et à la précarité.

Plusieurs membres du groupe R. et C. - Jean-Marie Messier !

M. le Premier ministre - Vous ne me trouverez pas sur le terrain de la polémique. Vous perdez votre temps (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

Je disais donc que l'insécurité est aussi économique : l'ancrage de notre pays dans la prospérité et la croissance demande une vigilance constante. Au-delà des difficultés de tous les jours, c'est aussi de leur identité que les Français ne sont plus sûrs : où va la France aujourd'hui ? Quelle place auront les valeurs fondamentales de la République dans la France de demain ?

La vie des Français est devenue compliquée, et l'Etat n'a pas contribué à la simplifier : avec des lois trop nombreuses, une intervention trop fréquente, des procédures complexes qui nuisent aux énergies individuelles et collectives (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

La première mission de mon gouvernement sera donc de simplifier la vie des Français (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

Notre projet est celui d'une France porteuse d'un nouvel humanisme.

Quand la France doute de sa place dans le monde, elle doit revenir à sa source d'excellence : la pensée. Le poids de la France sur le monde a toujours été lié à la force de ses idées.

A l'époque de la « grande déclaration » la France a proposé au monde une certaine idée de l'humanisme. Aujourd'hui dans le contexte inédit de la mondialisation, nous ne sommes pas condamnés au silence ou à l'impuissance, la France a le devoir de dire son espérance. Celle d'un monde qui sait associer le respect de la diversité des cultures et néanmoins le souci de l'universel, le culte de l'intelligence, de l'excellence et de la performance, mais aussi le respect des traditions et le souci des plus faibles, ceux que la société a blessés. C'est ça, le projet de la France, c'est ça le projet d'un nouvel humanisme.

La politique a trop dérivé vers son aval, la technique, en mésestimant son amont, la pensée (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF), pour rassurer les citoyens exposés aux angoisses de l'avenir. Dans la mondialisation que nous vivons, les réponses de la France ne sont pas celles du gigantisme ou de la concentration, de la standardisation ou de la banalisation. Notre réponse est celle de la création, celle de l'intelligence et du talent, celle de la solidarité et de la générosité, celle de l'innovation et de la qualité (Mêmes mouvements). Le label pour l'agriculteur, la qualité pour l'artisan, le brevet pour l'industriel, l'émotion pour l'association, la solidarité pour le militant, la singularité pour l'artiste... voilà les signes de notre avenir (Mêmes mouvements).

En fait, il s'agit de placer l'homme au centre de notre projet. Il doit rester l'origine de notre pensée plutôt que l'objet de notre société (Mêmes mouvements).

Ce nouvel humanisme peut être une maison aux quatre colonnes, un projet à quatre piliers.

Le premier pilier, c'est l'Etat, un Etat attentif, pas trop dispersé, qui doit se recentrer sur ses missions régaliennes et restaurer ce qu'on attend de lui : l'autorité républicaine (Mêmes mouvements).

Deuxième pilier : la République en partage. La République n'a pas su assez partager ses responsabilités. Le renouveau de la démocratie sociale et la relance de la démocratie locale nous permettront de donner plus de vie à nos valeurs républicaines. Il faut oxygéner et partager la République pour que chacun y trouve sa place. La République des proximités rapprochera les Français des décisions qui les concernent.

Troisième pilier : la France créative. La valeur de création que la France doit promouvoir est tout autant économique que sociale et culturelle. Il s'agit de libérer toutes les forces vives de notre pays, de privilégier toutes les valeurs ajoutées.

Quatrième pilier : la mondialisation humanisée. L'insécurité du monde est évidemment liée à la question du développement. L'aide au développement, mais aussi l'exigence de la protection de la planète, sont des messages que porte avec force notre Président. La construction européenne nous aidera, tel un multiplicateur d'influence, à humaniser la mondialisation. La France doit pour cela porter un message fort et clair en Europe.

C'est dans cette perspective d'un nouvel humanisme français que nous tiendrons les engagements pris devant le peuple par le Président de la République. C'est le contrat qui nous lie. En cinq ans, nous pouvons rendre la France plus humaine. Je compte sur votre soutien comme vous pouvez compter sur mon engagement.

M. Christian Bataille - C'est Joseph Prudhomme !

M. le Président - Prenons dès maintenant de bonnes habitudes (Sourires).

M. le Premier Ministre - Le premier pilier sur lequel notre politique doit reposer : c'est un Etat dont il faut restaurer l'autorité pour construire une France sûre et une France sûre d'elle-même. Je suis résolu à donner à l'Etat les moyens d'assurer avec efficacité la sécurité, la justice et la défense de nos concitoyens.

La première liberté, c'est la sécurité. L'insécurité mine le moral de nos concitoyens, obère leur confiance dans les institutions de la République, affaiblit notre pacte républicain et va, dans certains lieux de la République, jusqu'à menacer la cohésion de notre nation (« L'Elysée ! » sur les bancs du groupe socialiste). L'insécurité est la première des inégalités : ce sont toujours les plus faibles qui sont les premiers atteints.

Nous avons entendu l'appel des Français.

Avec le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, nous voulons faire reculer l'insécurité en mobilisant tous les moyens de l'Etat.

Nous vous proposons un effort sans précédent pour organiser la synergie des moyens de l'Etat. Le conseil de sécurité intérieure, le rapprochement sous une autorité fonctionnelle unique des policiers et des gendarmes, les groupements d'intervention régionaux procèdent de cette logique.

Dans le prolongement des mesures déjà prises, vous serez saisis dans les tout prochains jours d'un projet de loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure. Il donnera à nos forces de sécurité, auxquelles je tiens à rendre hommage, les moyens d'assumer pleinement leurs missions, avec notamment 13 500 nouveaux emplois sur cinq ans pour la police et la gendarmerie (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF ; exclamations sur quelques bancs du groupe socialiste et du groupe C. et R.).

Elle s'accompagnera d'une volonté affirmée de faciliter le travail des policiers et des gendarmes, sans porter atteinte aux droits de la défense, ni au principe de la présomption d'innocence. Elle organisera une déconcentration réelle des responsabilités, accompagnée de la fixation d'objectifs et de procédures d'évaluation précises - car les progrès viendront de l'évaluation. Elle reposera enfin sur un effort budgétaire de grande ampleur.

L'autorité de l'Etat, c'est aussi une justice sereine, efficace, simple et rapide. Notre système judiciaire ne répond pas suffisamment à la demande de droit. Sa lenteur irrite nos concitoyens. Sa complexité les décourage.

La justice doit être à la fois plus effective et plus proche du citoyen.

Tel est l'objet du projet de loi d'orientation et de programmation que j'ai demandé au Garde des Sceaux, ministre de la justice, de vous présenter sans attendre.

Il se traduira par un renforcement très significatif des moyens des juridictions en crédits, en équipements et en emplois - plus de dix mille emplois en cinq ans.

Les juridictions judiciaires et administratives bénéficieront de moyens sans précédent afin que les délais de traitement des dossiers soient fortement réduits.

La création de centres éducatifs fermés donnera davantage d'efficacité à la lutte contre la délinquance des mineurs.

Je souhaite que la réponse apportée à cette délinquance soit ferme mais humaine (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF). Je suis attaché à ce que le Gouvernement traite les problèmes avec le souci de toujours s'en tenir à une approche respectueuse de la personne. Il ne s'agit pas de rentrer dans une logique du « tout répressif » : on proposera en effet aux jeunes placés dans ces centres fermés une réponse éducative spécifique. Si nous disons non à l'impunité, nous voulons un système qui donne aux jeunes ayant perdu leurs repères une chance de se réconcilier avec la société (Mêmes mouvements).

L'ordonnance de 1945 sera adaptée à cette fin (Mêmes mouvements).

Je vous proposerai également d'améliorer et de simplifier la procédure pénale. Une véritable justice de proximité sera mise en place à cette occasion. Le Garde des Sceaux est particulièrement attentif à ce que soient affirmés les droits de la victime, et le projet de loi de programmation comprendra des dispositions en ce sens (Mêmes mouvements).

Pour reconstruire une France sûre, la défense de ses citoyens et de ses intérêts doit être assurée partout où ils pourraient être menacés. Avec la professionnalisation de nos armées, le Président de la République a décidé une réforme essentielle de notre défense.

Il faut lui donner les moyens, car la France a le devoir d'adapter sa défense à un monde qui change. Elle ne peut plus la concevoir en référence à un monde figé, mais doit la déployer dans un monde multipolaire, mouvant et instable. Un monde où le terrorisme, dans ses nouvelles dimensions, s'ajoute aux facteurs de risques déjà connus, tels que la prolifération d'armes de destruction massive ou les tensions régionales, pour dessiner un paysage stratégique encore plus incertain.

Notre défense doit être en phase avec ces évolutions tout en restant fidèle aux grands principes qui ont présidé à sa conception. Comme le veut le chef de l'Etat, elle doit être une défense autonome, non une défense solitaire. La référence de nos choix militaires aussi bien que politiques est l'Europe. Ils seront cohérents avec la défense européenne qui se construit. Mais la France doit conserver la capacité d'agir seule si ses intérêts propres et ses engagements bilatéraux l'exigent (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et sur de nombreux bancs du groupe UDF).

Consciente de cet impératif, la ministre de la défense vous proposera une nouvelle loi de programmation militaire avant la fin de l'année. Son objectif sera de restaurer la disponibilité de nos matériels - ce qui signifie avoir des pièces de rechange pour nos avions, afin qu'ils puissent fonctionner... (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF) -, de moderniser les équipements tout en consolidant la professionnalisation de nos armées notamment par l'amélioration de la condition militaire.

Cet objectif suppose enfin de maintenir les capacités industrielles clés pour la défense, de développer avec ambition les coopérations européennes et de poursuivre activement les restructurations nécessaires, notamment dans les domaines des constructions navales et des armements terrestres.

Il suppose enfin que l'engagement des hommes et des femmes de notre défense, comme celui du monde combattant, soit respecté par la nation. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF)

Deuxième pilier de notre action : la République en partage. L'autorité de l'Etat restaurée, la République doit s'ouvrir à la démocratie sociale. Elle doit aussi faire confiance à l'initiative locale, et établir la République des proximités.

S'ouvrir à la démocratie sociale, c'est mettre fin à un système qui met trop souvent l'Etat et le citoyen directement face à face. Le dialogue social sera au c_ur de l'action du Gouvernement et les partenaires sociaux consultés avant toute initiative majeure de l'Etat. Ils se verront reconnaître une autonomie pour définir par voie d'accord, et dans le respect des principes fondamentaux de notre droit, les règles qui déterminent les relations du travail.

Le Gouvernement souhaite conforter la légitimité des partenaires sociaux à agir. C'est pourquoi je regarde avec beaucoup d'intérêt les initiatives prises par ces derniers pour vivifier et améliorer la démocratie sociale.

Des partenaires sociaux forts et engagés sont en effet indispensables pour que puisse se développer dans de bonnes conditions un dialogue social qui est, a mon sens, le préalable nécessaire au règlement de nos dossiers majeurs.

Je serai amené à revenir sur l'importance du dialogue social, mais je souhaite d'abord vous parler de la formation professionnelle parce qu'elle détermine largement l'emploi de demain (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

Elle est la condition indispensable à l'accès d'un grand nombre de jeunes à la vie active. Elle est aussi la seconde chance donnée à ceux qui veulent compléter leur formation initiale. Elle est enfin nécessaire à chacun pour s'adapter tout au long de la vie aux transformations des métiers.

Les conditions de l'activité changent. Si nous voulons ou si nous devons travailler plus longtemps nous devrons nous former plus souvent. Les partenaires sociaux en ont déjà pris conscience, en s'engageant dans une vaste négociation sur ce sujet. La réforme de notre système de formation est nécessaire pour une meilleure efficacité et plus de simplicité. Les régions en seront le pivot (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

Notre ambition est de créer une véritable « assurance emploi » fondée sur un compte personnel de formation et une validation des acquis professionnels (« Nous l'avons fait ! » sur les bancs du groupe socialiste). Dans ce domaine, il reste beaucoup à faire, notamment pour donner à tous les salariés, y compris ceux des petites entreprises, la même garantie face à l'emploi en matière de formation, de reconversion et de reclassement (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF). Ce chantier sera ouvert dès cet été, en visant un aboutissement rapide.

J'en viens aux retraites, (« Ah ! » sur divers bancs). J'entends ce « Ah ! » comme un « Enfin ! ». La sauvegarde de notre système, en effet, a été trop longtemps repoussée. Le système actuel est menacé par le vieillissement de notre population. Le principe de solidarité entre les générations exige la sauvegarde du régime par répartition pour assurer un bon revenu à tous les retraités.

Le temps n'est plus à la création de nouvelles commissions ou à la rédaction de nouveaux rapports (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP). Le temps est aujourd'hui à la prise de décisions après concertation (Murmures sur les bancs du groupe socialiste).

Cette réforme, qui ne concernera pas les Français actuellement à la retraite, reposera sur les principes suivants : elle doit aboutir à une plus grande équité entre les Français (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'UMP) tout en tenant compte des spécificités des différents statuts et de la diversité des situations, notamment démographiques.

La liberté de choix sera assurée : la retraite à 60 ans, qui est un acquis social, ne sera pas remise en cause (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF), mais ceux qui souhaitent prolonger leur activité au-delà doivent pouvoir le faire et augmenter ainsi leurs droits (Vifs applaudissements sur les mêmes bancs). Chacun doit avoir la possibilité de compléter sa pension grâce à une incitation fiscale par un revenu d'épargne (Mêmes mouvements, et « Nous y voilà ! » sur les bancs du groupe socialiste). Les efforts nécessaires, car il y en aura, seront équitablement répartis, et l'Etat y prendra sa part.

Le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité ouvrira ce chantier dès l'automne. Chaque régime privé ou public fera l'objet d'un traitement spécifique selon un calendrier approprié et des modalités à négocier au cas par cas (Protestations sur les bancs du groupe socialiste).

Notre système de retraite est notre bien commun. Nous devons nous organiser pour que les conditions de sa préservation soient réunies avant la fin du premier semestre 2003 (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

Quant à notre système de santé, il fait notre fierté mais il est aujourd'hui dans une situation difficile, très difficile. (« Merci, Mme Aubry ! » sur les bancs du groupe de l'UMP). Notre population demande de plus en plus de soins. Les progrès de la science et de la médecine ne font que s'accélérer et, de ce côté, les espoirs - heureusement ! - sont grands. Mais l'augmentation trop rapide des dépenses de santé fait planer une sourde inquiétude sur l'avenir du système : les professionnels de santé nous disent fortement qu'ils traversent une grave crise de confiance.

C'est un grand défi collectif qui nous est lancé. Je vous propose de travailler ensemble à le relever : professionnels, gestionnaires et patients.

Fixer les priorités de notre action de santé publique est notre premier objectif. Un cadre plus clair est nécessaire. Il doit viser à rééquilibrer les soins, la prévention et l'éducation à la santé. Il doit être publiquement débattu et je souhaite solliciter le Parlement pour qu'un débat approfondi oriente l'action publique en matière de santé.

Sans attendre, avec les professionnels, nous nous sommes attachés à renouer les fils d'un dialogue distendu. C'est avec eux, que nous voulons rechercher des comportements responsables et que nous voulons élaborer une gestion conjuguant qualité des soins et optimisation des dépenses de l'assurance maladie.

Quant à l'hôpital, dont la situation suscite notre vive inquiétude, nous devons lui redonner des perspectives et créer la souplesse nécessaire pour assurer à la fois la proximité, la disponibilité permanente, le sens de l'accueil, la performance et la sécurité. Cette action appelle des réponses nouvelles aux questions posées par la démographie des professions de santé.

Nous mettrons en place une nouvelle gouvernance (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste) du système de santé et d'assurance maladie (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'UMP). Elle reposera sur trois principes. D'abord, une plus grande clarté dans les rôles et dans les financements de l'Etat et de l'assurance maladie. Ensuite la responsabilisation de tous. Enfin, la volonté d'une plus grande proximité avec les citoyens : par une régionalisation accrue, nous favoriserons une prise en charge plus cohérente et plus adaptée. Dans ce cadre, je souhaite que puisse être lancé un plan « Hôpital 2007 » comme, en d'autres temps, a été lancé un plan « Universités 2000 ».

L'égal accès des Français aux soins sera conforté par une aide permettant à ceux de nos compatriotes qui n'en ont pas, de bénéficier d'une mutuelle (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste).

Notre objectif est d'éviter à la fois le rationnement des soins et la dérive incontrôlée et inquiétante des dépenses. Par la responsabilité de chacun, nous devons éviter les dépenses inutiles qui minent l'édifice auquel nous tenons tous, et, nous ferons en sorte que les ressources que nous consacrons à notre santé et qui ne sont pas infinies, soient mieux utilisées.

Avec le ministre de la santé, de la famille et des handicapés, je souhaite bâtir une politique de santé moderne. C'est un champ prioritaire pour le nouvel humanisme que nous défendons, et qui exige la préservation de nos solidarités. Il doit s'exprimer par la lutte contre la précarité sociale.

Nous ne pouvons nous résoudre à laisser subsister dans notre pays des situations de précarité extrême et d'exclusion. Elles ne sont pas acceptables surtout après plusieurs années de croissance (« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'UMP). La secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion présentera, avant la fin de 2002, un programme d'action dans ce domaine.

Un débat parlementaire sur l'insertion sera organisé dans les prochains mois à l'occasion des quinze ans de l'instauration du revenu minimum d'insertion. Nous devons collectivement nous assurer que chaque bénéficiaire du RMI se voit proposer un véritable contrat d'insertion (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

Pour faire reculer l'exclusion qui mine notre société, nous comptons sur l'Etat mais aussi et surtout sur les structures à taille humaine, les réseaux de proximité et la famille, la famille qui est par essence le lieu de la fraternité et le creuset de la société. C'est pourquoi notre politique de la famille sera ambitieuse (Mêmes mouvements).

Nous repenserons les dispositifs d'accueil de l'enfant pour créer l'allocation unique d'accueil du jeune enfant. Elle sera accordée, que la mère travaille ou non, pour garantir son libre choix (Mêmes mouvements).

Nous devons collectivement travailler à la prise en charge des personnes âgées et étudier avec précision les difficultés liées à l'allocation personnalisée d'autonomie, dont l'application pose de graves difficultés à de nombreux départements (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

Enfin la loi de 1975 sur les personnes handicapées sera réformée pour répondre à une légitime attente, celle du droit à la compensation du handicap (Applaudissements prolongés sur les mêmes bancs).

Je souhaite aussi un effort particulier pour lutter contre toutes les formes de discrimination, et nous trouverons un moyen juridique pour cela. Cet effort s'accompagnera d'une politique d'immigration qui devra lutter avec la plus grande fermeté contre les trafics de main d'_uvre et l'immigration illégale tout en favorisant l'insertion des migrants légaux (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF). Le dispositif du droit d'asile qui est à l'origine de nombreuses situations illégales sera revu et les procédures seront accélérées (Vifs applaudissements sur les mêmes bancs).

Si j'entends renouveler la démocratie sociale, j'entends aussi donner une nouvelle place à la démocratie locale. La démocratie locale, c'est plus de décentralisation, c'est une décentralisation plus vivante, c'est une implication plus grande des citoyens par un transfert de responsabilités au plus près du terrain, pour de meilleures décisions.

Mais la décentralisation c'est aussi un formidable levier pour la réforme de l'Etat. C'est l'occasion et le moyen de faire les indispensables réformes de structure. C'est la possibilité de retrouver une liberté d'action. C'est la faculté de répondre aux besoins des Français.

Je vous propose donc une étape innovante de la décentralisation, fondée sur l'exigence de cohérence et l'exigence de proximité. La cohérence, cela veut dire s'assurer que l'ensemble national composé de l'Etat et des collectivités locales fonctionne de façon harmonieuse en préservant l'égalité de tous devant la loi. Les disparités territoriales sont trop fortes dans notre pays (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'UMP).

La cohérence doit assurer un aménagement du territoire équilibré et être l'instrument de la solidarité entre les Français. C'est dans le dialogue entre l'Etat et la région que s'exprime le mieux ce souci de cohérence. La proximité, c'est le champ d'action des départements, des communes et de leurs groupements. Ce sont eux qui ont vocation à assurer les services et à être maîtres d'ouvrage des équipements de proximité et du développement local.

Cet ample mouvement de décentralisation permettra un nouveau transfert de compétences au profit des collectivités, qui sera accompagné de transfert de ressources correspondantes (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF). Il permettra aussi une nouvelle distribution des rôles en repensant de manière innovante la relation Etat-région pour plus de cohérence et plus d'efficacité. Davantage de clarté dans la relation de proximité entre le département, les communes et leurs groupements est nécessaire.

Nous encouragerons enfin les initiatives et la démocratie locale par l'ouverture d'un droit à l'expérimentation (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

Pour y parvenir, je vous propose une méthode et un calendrier. La méthode, c'est la concertation, le pragmatisme et l'expérimentation. Il ne s'agit pas d'appliquer un schéma idéologique ni de refaire des rapports, car beaucoup a déjà été écrit.

Je souhaite que cette réforme essentielle soit le fruit d'un débat national et que les collectivités locales formulent elles-mêmes leurs propositions. C'est du terrain que doivent jaillir les idées. L'expérimentation, c'est la pédagogie de la réforme et la clé de son succès.

Dès maintenant, j'invite les régions à être audacieuses et à se porter candidates pour expérimenter certains transferts de compétence dont j'ai l'intention de discuter la nature et la portée avec les acteurs concernés. Je propose que les conseils régionaux délibèrent sur le sujet et fassent part de leurs initiatives. Nous répondrons au cas par cas aux expérimentations proposées (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

Pour ce qui est du calendrier, en accord avec le Président de la République, un projet de loi constitutionnelle sera présenté au Parlement dès l'automne. Il visera à inscrire la Région dans la Constitution, à autoriser l'expérimentation locale, à favoriser la coopération entre collectivités et à autoriser la mise en _uvre de référendums locaux. Les questions spécifiques à l'outre-mer seront traitées à cette occasion.

A l'automne, sera aussi préparé un projet de loi qui comprendra un volet de transfert de compétences immédiat et un autre traçant le cadre des expérimentations. Il s'agit d'initier une nouvelle donne des responsabilités dans notre pays. Il s'agit de donner du corps et une valeur juridique au principe de subsidiarité, de rapprocher le pouvoir de la vie.

Enfin, je présenterai devant le Parlement un projet de refonte des textes liés à l'intercommunalité, aux pays, aux agglomérations et à la démocratie de proximité (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF). Je suis comme vous un praticien des SCOT et autres objets administratifs mal identifiés (Mêmes mouvements). Il y a de bonnes idées dans certains de ces textes (« Non ! » sur les bancs du groupe de l'UMP). Mais si ! Il faut simplement responsabiliser les acteurs locaux et leur simplifier la tâche (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

Ces nouveaux textes et l'application complète de la loi de janvier 2002 donneront à nos compatriotes de Corse des chances nouvelles de développer les atouts spécifiques de leur île. Le plan d'investissement fera l'objet de procédures efficaces et unifiées.

La relance de la décentralisation s'accompagnera d'une réforme de nos administrations pour aller vers une vraie administration de services.

Les Français sont profondément attachés à leurs services publics (« Oui ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe C. et R.) Ils ont raison. Ils en reconnaissent le dévouement et la grande qualité. Et c'est précisément parce que nous croyons à notre service public que nous devons nous poser les questions qui conditionnent son avenir.

Comment assurer aux Français le service public qu'ils attendent ? (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe C. et R.) Comment impliquer les fonctionnaires dans la réussite des réformes qu'ils souhaitent eux-mêmes ? Comment aboutir à un juste partage des ressources entre le service public et le secteur privé ?

Dans nos services publics, le service est une valeur. L'administration de demain doit être une administration de services. Elle doit concentrer ses efforts sur l'accueil, notamment des plus démunis, des plus fragiles. Elle doit être présente là où les Français l'attendent. Elle doit mettre en place des indicateurs d'efficacité qui permettront d'améliorer sa gestion (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

Cette administration de services, c'est d'abord une administration plus simple. Je vous demanderai l'autorisation de légiférer par ordonnance pour simplifier nos législations dans un certain nombre de domaines (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe C. et R. ; applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF). Il ne s'agit bien sûr pas de toucher aux équilibres fondamentaux des pouvoirs mais simplement de supprimer toutes les paperasseries, toutes les tracasseries qui ont transformé l'ensemble des acteurs économiques et sociaux en bureaucrates alors que l'on attend d'eux tout autre chose. Il faut que les fonctionnaires puissent se consacrer vraiment au service public, à leur tâche qui les passionne. Ils doivent pouvoir être les premiers militants de la République (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

M. Jean-Pierre Brard - Pour les ordonnances, demandez conseil à M. Juppé.

M. le Premier ministre - Cette administration de services, c'est aussi un service garanti. Dans certains secteurs, les voies d'un dialogue social plus suivi ont été ouvertes pour prévenir les conflits et faire en sorte qu'ils ne conduisent qu'exceptionnellement à l'interruption de service dont les usagers sont les victimes (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF). Je demande aux responsables de nos grands services publics qui n'y sont pas déjà parvenus, d'engager la discussion sur la garantie du service avec tous les partenaires.

Une administration de services, c'est enfin une administration qui mobilise ses moyens là où sont ses besoins. La fonction publique va connaître des évolutions importantes au cours des prochaines années. L'évolution des territoires, le développement des nouvelles technologies, les départs en retraite massifs de fonctionnaires, les attentes nouvelles de nos concitoyens changent complètement la donne. Nous devons relever ces défis en concentrant nos forces là où il y en a besoin.

L'évolution des effectifs de la fonction publique devra correspondre à ces besoins. Tous les emplois ne seront pas systématiquement remplacés au fur et à mesure des départs ; selon les secteurs, les effectifs seront accrus, stabilisés ou réduits (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

Les réformes seront menées sous la responsabilité des ministres. Ils seront comptables de leurs résultats, devant moi bien sûr, mais également devant vous.

Il convient enfin de renforcer la capacité de réflexion et de prospective de l'Etat, lequel doit aussi être stratège : il lui incombe en effet d'évaluer sur le long terme les défis de demain. Ses outils de prospective seront adaptés.

Le renforcement de la démocratie locale, c'est aussi l'aménagement des territoires, des communes paisibles aux quartiers difficiles.

La démocratie locale repose aussi sur les solidarités qui s'organisent autour du logement. L'Etat doit déployer une stratégie en la matière, mais c'est à l'échelon local, avec les populations et les élus locaux que l'appréciation des besoins est la plus pertinente. La politique du logement sera revue dans ce sens. Elle doit être résolument décloisonnée, qu'il s'agisse de ses instruments de financement ou des solutions de logement qu'elle peut proposer (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

Ces actions en faveur du logement sont indissociables de la politique de la ville et j'ai demandé au ministre délégué à la ville de donner davantage de cohérence à cette politique. Reposant autant sur la gestion du bâti que sur les mesures de cohésion sociale, elle doit définir un cadre contractuel négocié avec les élus locaux et les bailleurs sociaux. Ce cadre sera la clé du renouveau des quartiers difficiles.

La politique de destruction des grands ensembles sera accélérée et nous étendrons les zones franches urbaines : elles ont montré leur efficacité (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

Faire vivre la démocratie locale, c'est aussi assurer la protection de l'environnement.

Pour être à la hauteur de l'enjeu, l'ambition de mon gouvernement sera de réconcilier, protéger, informer et transmettre.

Réconcilier, c'est répondre aux nécessités du présent en ne compromettant pas les ressources des générations à venir. Une gestion décentralisée et contractualisée de notre patrimoine naturel sera mise en _uvre. Je souhaite fonder la gestion de la faune sauvage et des espaces sur des données scientifiques établies et partagées et non sur des invectives.

Protéger, c'est informer et prévenir. Dans l'esprit des Français, la crainte des catastrophes technologiques et industrielles est à la mesure de leur caractère subit et dévastateur, dont Toulouse porte encore les stigmates et les cicatrices. Une réponse doit y être apportée. C'est le sens du projet de loi sur les risques technologiques qui vous sera proposé dés l'automne prochain.

Pour transmettre cette exigence aux générations futures, dans la perspective tracée par le Président de la République, une Charte de l'environnement sera élaborée d'ici juin 2003. Elle portera au niveau constitutionnel les principes fondamentaux du développement durable.

Les préoccupations environnementales doivent être une dimension essentielle de toutes les politiques publiques.

Dans le domaine de l'énergie, un grand débat public sera ouvert et suivi d'un projet de loi d'orientation qui consacrera un rôle accru pour les énergies renouvelables, mais aussi une place reconnue pour l'énergie nucléaire (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

Les spécificités du nucléaire et les attentes des Français me conduisent à vous demander de délibérer prochainement sur la transparence et la sûreté du nucléaire. Trop longtemps promises, des mesures allant dans ce sens doivent être arrêtées dans les meilleurs délais.

Notre politique des transports privilégiera elle aussi un développement soucieux de l'environnement et de limitation des nuisances. Je pense aux grands projets d'infrastructures dont les effets sur l'environnement et les hommes - à l'instar des nuisances sonores à proximité des aéroports - devront faire l'objet d'une attention accrue. Le cabotage et le ferroutage seront bien sûr prioritaires.

Favoriser les territoires, c'est mener une politique efficace et coordonnée dans les secteurs qui les structurent, en particulier l'agriculture et la pêche.

Notre agriculture est aujourd'hui profondément inquiète de son manque de perspectives alors qu'elle dispose de solides atouts pour faire valoir la qualité de ses productions. Par ailleurs, la politique agricole commune est à la veille de grandes échéances avec l'entrée de nouveaux Etats membres et le rendez-vous à mi-parcours de sa réforme. Le Gouvernement veillera à ce que les décisions arrêtées par les chefs d'Etat et de gouvernement à Berlin en 1999 soient respectées et fera preuve de la plus grande fermeté face aux tentatives de modifier, dès à présent, la politique agricole commune (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

Le Gouvernement souhaite une agriculture française performante, écologiquement responsable et économiquement forte (Mêmes mouvements).

Quant à la politique commune de la pêche, elle fait l'objet d'une proposition de réforme de la part de la Commission européenne, que je juge inacceptable (Mêmes mouvements). La France n'acceptera pas la destruction de sa flotte de pêche, principalement dans sa composante artisanale, avec le cortège de drames humains et de difficultés sociales qui l'accompagnerait fatalement.

Favoriser nos territoires, c'est enfin développer une politique ambitieuse pour notre outre-mer. L'outre-mer est un atout pour la France. Nous combattrons l'inégalité économique dont sont victimes ses collectivités en mettant en valeur une logique d'activité et non plus d'assistance (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

Une loi de programme pour l'outre-mer sera soumise au Parlement avant la fin de l'année. La Constitution sera révisée pour permettre de mieux prendre en compte la diversité de l'outre-mer dans le cadre du strict respect des principes d'indivisibilité de la République.

Troisième pilier de l'action que je vous propose : rendre la France plus créative.

Nous avons de grandes ambitions. La créativité de nos concitoyens, à l'université comme en entreprise, doit pouvoir se concrétiser pleinement sur notre territoire. La matière fiscale et réglementaire ne doit plus être cause de découragement.

Je ne me résigne pas aux délocalisations d'activité. Nos atouts scientifiques, technologiques, culturels et humains sont considérables. Nous devons les valoriser, comme nous devons valoriser le travail. Or le travail est une valeur. Nous devons tout mettre en _uvre pour le favoriser. Il n'est pas admissible que le chômage touche autant de nos concitoyens, en particulier tous ces jeunes à qui notre société ne propose aucun avenir.

Notre objectif reste le plein emploi.

Il faut éviter que les impôts et les charges ne découragent le travail.

C'est le sens de la baisse d'impôt (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF). C'est le sens de la baisse des charges que nous engageons de façon résolue. Ces baisses de charges constituent la clé de voûte de notre stratégie. Ce n'est pas de l'idéologie, simplement, ça marche et ça crée des emplois (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

Nous n'avons pas trouvé cela dans un petit livre rouge, ni dans un petit livre bleu, mais dans les statistiques de l'INSEE (Exclamations sur les bancs du groupe C. et R.).

Mon gouvernement va renouer avec cette politique, en en faisant bénéficier dans un premier temps les jeunes peu qualifiés, dont le taux de chômage, qui a beaucoup progressé depuis un an, est deux fois plus élevé que la moyenne nationale.

Vous serez saisis au cours de cette session extraordinaire d'un projet de loi favorisant l'emploi des jeunes peu qualifiés. Il prévoira une exonération complète des charges applicable au 1er juillet 2002. Nous développerons ainsi de vrais contrats jeunes dans de vraies entreprises (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

Pour les jeunes prêts à s'investir, nous instaurerons un contrat d'insertion dans la vie sociale. Il offrira une garantie de revenus aux jeunes sans diplôme et sans emploi qui accepteront de s'engager. Ce contrat sera mis en place dans les prochains mois.

Mais au-delà de mesures spécifiques pour les jeunes, c'est un abaissement global de charges sociales que nous visons. Il viendra simplifier les multiples mesures qui existent et qui compliquent la vie des entreprises.

La simplification est un objectif d'ensemble.

Parallèlement, je souhaite traiter rapidement un sujet qui entrave la liberté de ceux qui voudraient travailler davantage et le développement des entreprises. Je veux parler des 35 heures (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

La durée légale du travail ne sera pas remise en question, mais des assouplissements sont nécessaires. Nous y procéderons.

La méthode autoritaire suivie pour réformer le temps de travail a conduit à freiner la progression du pouvoir d'achat des salariés (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF) et à ignorer nombre de réalités économiques. Elle a entraîné des incohérences et des injustices notamment en ce qui concerne le SMIC. Nous allons y remédier (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste et du groupe C. et R.).

De même, la loi dite de modernisation sociale a été justement critiquée pour n'avoir pas fait l'objet de concertation. Elle sera réformée et simplifiée (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF). L'assurance emploi que j'évoquais tout à l'heure y aidera.

Qu'il s'agisse des 35 heures, de l'harmonisation du SMIC, des charges sociales ou la simplification de la loi dite de modernisation sociale, j'invite les partenaires sociaux à engager dès maintenant entre eux et avec le ministre des affaires sociales, les discussions nécessaires.

Je suis disposé à en tirer le plus vite possible les conséquences législatives ou réglementaires (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'UMP).

Nous devons créer les conditions d'une croissance forte et durable. Nous allons nous y employer en menant de front baisse des prélèvements, réduction des déficits et réformes économiques.

La baisse des impôts permet de soutenir l'activité et l'initiative ; la baisse des charges, de soutenir l'emploi.

Nous nous engagerons parallèlement dans la réduction des déficits. Il ne servirait à rien de baisser les prélèvements si les Français n'avaient pas la garantie que cette baisse est durable. C'est dans la capacité que nous aurons à conduire les réformes structurelles dont le pays a besoin que nous trouverons des marges de man_uvre.

Au delà, nous devons favoriser l'activité, parce que la France est en retard, et relever le défi de l'emploi des salariés de plus de 50 ans. C'est une véritable révolution culturelle que nous devons engager (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

Dans le même esprit, la prime pour l'emploi sera adaptée, en faveur notamment des travailleurs à temps partiel, pour qu'elle devienne un véritable instrument de justice sociale et de valorisation du travail.

Mieux équilibrer le partage des fruits de la croissance, tel est l'un de nos objectifs, que nous poursuivons en baissant de 5 % l'impôt sur le revenu (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe C. et R.). Elle sera effective à l'automne prochain. Il s'agira d'une réduction de 5 % pour tous les contribuables (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste et du groupe C. et R.).

M. Alain Néri - Pour les riches !

M. le Premier ministre - Faut-il se réjouir quand, s'agissant des grands investissements industriels, les sites français ne sont même plus envisagés ? Faut-il se réjouir de voir nos chercheurs, nos ingénieurs quitter le pays et nos entreprises chercher ailleurs, comme les footballeurs ? (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF ; exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe C. et R.).

Il faut faire confiance aux créateurs de la richesse. Ce qui est bon pour l'emploi est bon pour le pays. Telle est la politique pour laquelle nous nous battrons. Les engagements pris seront tenus.

Je suis déterminé à convaincre nos partenaires européens de la nécessité de baisser à 5,5 % le taux de TVA sur la restauration (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF), car il s'agit d'un secteur créateur d'emplois.

Plusieurs membres du groupe C. et R. - Chiche !

M. le Premier ministre - Des discussions sont engagées (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste et du groupe C. et R.) et, pour atteindre cet objectif, je pense que l'ensemble des forces nationales doit se mobiliser (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

Recentrer l'Etat sur ses missions essentielles, c'est également redéfinir son intervention dans le champ économique.

Notre approche sera pragmatique. Elle nous conduira à analyser les projets d'ouverture de capital ou de privatisation au cas par cas, en tenant compte d'abord de l'intérêt des entreprises et de leurs perspectives d'alliance et de développement.

Une telle politique ne peut se concevoir que sur la durée de la législature.

D'une manière générale, l'Etat a vocation à se retirer du secteur concurrentiel, sauf lorsque des intérêts stratégiques sont en jeu (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'UMP).

Dans le domaine de l'énergie, notre pays dispose de deux grandes entreprises de réputation mondiale.

Elles doivent assurer les missions de service public de façon équitable et solidaire sur l'ensemble du territoire national. C'est un impératif. Mais elles doivent aussi être dotées des mêmes armes que leurs concurrents européens pour tirer pleinement profit du marché européen de l'énergie et promouvoir leur projet industriel et social.

Leurs savoir-faire techniques et la qualité de leur personnel constituent des atouts reconnus et enviés. Ils sont le garant le plus précieux de leur avenir.

Pour qu'elles puissent nouer des alliances et développer leur stratégie en Europe et dans le monde tout en respectant toutes les exigences du service public (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe C. et R.), leur forme juridique sera modifiée (Même mouvement) pour permettre une ouverture progressive de leur capital (Même mouvement), même si elles demeureront dans le secteur public (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

Ces évolutions feront bien sûr l'objet d'une consultation préalable avec, en particulier, les agents de ces entreprises et leurs représentants. Le statut du personnel actuel sera maintenu et le système spécifique de retraite recevra les garanties nécessaires.

Une France créative, c'est une France qui mise sur l'innovation. Nous ferons le nécessaire pour porter notre effort de recherche à 3 % du PIB à l'horizon 2010.

Il faut aussi ancrer notre pays dans la société de l'information. Je compte encore encourager la création d'entreprises, au rythme de 200 000 entreprises nouvelles par an. C'est possible et c'est une telle dynamique qui nous redonnera une capacité d'initiative. La création d'entreprise est une des façons les plus efficaces de créer de l'emploi.

Une France créative doit aussi rendre sa force à notre école.

L'école de l'égalité des chances est le plus ancien fondement de notre cohésion républicaine. Notre système de formation doit faire en sorte que cette égalité des chances reste une réalité à tous les stades de la vie professionnelle (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'UMP).

Malgré le dévouement des enseignants et de tous les acteurs de la communauté éducative, l'école a du mal à remplir cette mission : 60 000 jeunes sortent de notre système éducatif sans qualification, 90 000 le quittent avec une faible qualification. C'est inacceptable pour la nation.

J'ai demandé au ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche de s'attaquer en priorité aux grandes causes de la fracture scolaire.

La première de ces causes, c'est l'illettrisme contre lequel j'entends vigoureusement lutter. Dès la prochaine rentrée scolaire, un plan pour améliorer les apprentissages de base à l'école primaire sera engagé (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

La valorisation de l'enseignement professionnel est une nécessité. Permettons à chacun d'exprimer ses talents dans la voie qui lui est propre. Les expériences existantes seront étendues et des passerelles entre les voies technologique, professionnelle et générale seront mises en place (« Elles existent déjà ! » sur les bancs du groupe socialiste).

Notre troisième priorité sera de lutter contre l'échec en premier cycle universitaire.

Enfin, les vocations scientifiques seront encouragées afin de revaloriser la science, car notre université ne forme plus assez de jeunes capables de soutenir notre effort d'innovation.

L'Etat continuera à soutenir la création et à défendre les droits des créateurs. Un projet de loi relatif au droit de prêt et au renforcement de la protection sociale des auteurs vous sera présenté.

Evidemment, l'Etat ne sera pas le seul acteur dans ces domaines et je souhaite que soient levées les ambiguïtés actuelles, soigneusement entretenues d'ailleurs, et qui font obstacle aux partenariats avec les collectivités locales.

Dans le domaine du patrimoine, une loi de programme sera lancée. Il s'agira de renforcer le rôle des collectivités locales, l'Etat conservant ses fonctions de garant de la cohérence. Il en ira de même pour les bibliothèques, équipements culturels de proximité les plus fréquentés par nos concitoyens.

Le Gouvernement relancera la politique du mécénat par un renforcement du dispositif d'incitations fiscales ainsi que par une simplification des procédures de création des fondations.

Nous nous battrons pour la baisse de la TVA sur le prix du disque.

Dans le domaine de l'audiovisuel, le Gouvernement se montrera attaché à la liberté des initiatives, mais aussi à la défense de la qualité d'un service public qui doit constituer une référence.

Cet effort de cohésion concernera aussi le sport, grand oublié de la décentralisation. Des états généraux seront lancés à l'automne, à l'initiative du ministre des sports. Ils fourniront l'occasion de réfléchir à l'ensemble des enjeux.

J'en viens à l'Europe.

Il faut un projet européen fort. Nous voulons une Europe des hommes, c'est-à-dire respectant notre patrimoine humaniste. Mais il faut aussi une Europe économique forte, bâtie sur le succès de l'euro, qui doit approfondir le marché unique, qui doit faire progresser l'harmonisation des fiscalités, qui doit enfin renforcer l'Europe sociale.

Nous attendons beaucoup de la Convention présidée par le Président Valéry Giscard d'Estaing (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste). Elle dessinera les contours de notre nouvelle Europe.

Elle simplifiera le texte des traités et précisera qui fait quoi dans l'Union. Elle exprimera l'identité européenne.

Je souhaite, avec le Président de la République, que la vision de l'Europe qui s'exprimera soit celle d'une fédération d'Etats nations. La nation est plus que jamais vivante et restera le moteur de l'histoire.

Dans la construction politique de l'Europe, nous devrons mieux associer les Parlements nationaux et le Parlement européen et élire les députés européens sur une base de liste régionale, pour les rendre davantage acteur de notre démocratie (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

Nous sommes favorables à l'élargissement, nous n'entendons pas le subir.

Nous voulons aussi renforcer le couple franco-allemand, à l'occasion du quarantième anniversaire du traité de l'Elysée.

Enfin, je m'engage à accélérer la transposition des directives européennes dans notre législation, nous ne devons pas être les derniers de la classe.

Nous entendons promouvoir la gouvernance mondiale, qui fera prévaloir le droit sur le fait accompli. Sans un système multilatéral fort, seuls les rapports de force comptent. Sans règles internationales, ce sont les plus vulnérables, les pays en développement, qui souffriront le plus.

La France doit faire entendre sa voix, sur le plan économique, mais aussi sur le plan du développement durable, et nous nous emploierons donc à la réussite du sommet de Johannesburg.

La francophonie fait partie intégrante de notre action internationale.

La Marseillaise, le drapeau, la langue, font partie de ce patrimoine auquel nous sommes si attachés (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

La politique ne peut plus promettre des lendemains qui chantent et repousser toujours la résolution des problèmes quotidiens. Je vous propose un calendrier précis, des décisions concrètes, des engagements qui permettent d'améliorer le quotidien et mieux vivre l'avenir. Je vous propose un projet qui réconcilie actions et convictions.

Ce projet sans arrogance appelle votre confiance. Il est né au sein de la majorité présidentielle devenue majorité parlementaire : majorité d'union, majorité d'action.

Vous pourrez compter sur notre courage, nous voulons compter sur votre confiance. La confiance est la valeur démocratique la plus précieuse. Confiance du peuple, confiance du Parlement, confiance du Président. La confiance est la clef du mouvement.

Confiance pour la croissance, confiance pour l'espérance, confiance pour la France ! (Mmes et MM. les députés du groupe de l'UMP et du groupe de l'UDF se lèvent et applaudissent longuement le Premier ministre).

Conformément au premier alinéa de l'article 49 de la Constitution, et après y avoir été autorisé par le conseil des ministres, j'engage la responsabilité de mon gouvernement sur cette déclaration de politique générale (Applaudissement sur les mêmes bancs).

M. Jacques Barrot - Merci, Monsieur le Premier ministre, pour votre détermination. Vous avez écouté les Français, et vous leur avez ouvert de nouveaux horizons.

Vous savez combien les parlementaires peuvent être des traits d'union entre les Français et leur gouvernement, et nous ferons tout pour répondre à l'attente vigilante de nos compatriotes.

Les défis sont sérieux. Nous avons mesuré l'ampleur des crises qui secouent notre pays : crise de la démocratie, exprimée à travers un vote extrémiste, et traduisant la peur de ne pas être écouté, d'être tenu à l'écart du débat démocratique ; crise de la politique : l'impuissance d'un Etat qui n'a pas été modernisé a jeté le doute sur l'efficacité des responsables politiques (Protestations sur les bancs du groupe socialiste).

Crise enfin du sens collectif : faute d'un projet collectif clairement expliqué, les Français sont tentés de se replier sur leurs préoccupations personnelles ou catégorielles.

Il était temps de proposer aux Français de grands projets collectifs, qui leur permettront de retrouver confiance et de croire en l'avenir.

Les Français ont besoin d'un véritable volontarisme politique. Nous adhérons pleinement aux objectifs majeurs que vous avez fixés pour mettre en _uvre la grande ambition proposée aux Français par le Président de la République. Mais je veux les reprendre : il faut à la fois retrouver le dynamisme français, sauver une cohésion sociale menacée et adapter notre modèle social.

Pour gagner contre le chômage, il faut encourager le travail, et non lui appliquer une stratégie malthusienne de partage. Quant à la croissance, on ne doit pas l'attendre passivement de la conjoncture mondiale, il faut la voir comme  le fruit d'un effort national de productivité, conditionné par une confiance retrouvée, conduisant les Français à investir, à échanger des services et à consommer.

Trop de Français qui se lèvent tôt le matin pour aller travailler n'ont pas compris un certain discours qui semblait dénier tout sens positif au travail, qui semblait tourner uniquement autour des dispositifs d'assistance, qui semblait oublier enfin la reconnaissance de l'effort et de la compétence acquise. Que deviendrions-nous si nous perdions collectivement le goût d'entreprendre !

M. Jean-Pierre Brard - Comme M. Messier !

M. Jacques Barrot - Il sera plus judicieux de laisser les Français choisir le rythme et la durée de leur vie professionnelle. Il sera plus efficace de revaloriser la rémunération du travail, et d'offrir à chacune et à chacun, à commencer par ceux qui sont au bas de l'échelle, les chances d'une véritable promotion professionnelle. Il sera plus utile pour l'avenir d'inciter les entreprises à ouvrir plus largement leurs portes à nos jeunes, qui commencent leur vie active trop tard : 20 % des 16-25 ans sont en effet inactifs. C'est l'un des plus forts taux des pays d'Europe.

Vous avez heureusement inscrit dans vos priorités le contrat emploi-jeune, qui permettra d'accueillir un plus grand nombre d'entre eux en entreprise. C'est l'une des chances les plus sérieuses de dynamiser notre pays. Vous avez aussi annoncé un effort soutenu, pour stimuler la création d'entreprise. Elle doit cesser d'être un parcours du combattant aux conséquences douloureuses si, par malheur, la tentative ne réussit pas. Il faudra aussi faciliter la transmission de nos entreprises pour combattre les délocalisations (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

Tout cela exige de réconcilier l'Etat et l'entreprise. Il faut proposer un pacte : à charge pour l'Etat de garantir la stabilité des règles fiscales et sociales, d'alléger les prélèvements qui pèsent sur elles, au détriment de leur compétitivité ; à charge pour les entreprises de mener une politique active de bonne gestion de leurs ressources humaines, une politique d'intéressement, de formation continue et de validation des acquis professionnels.

Bien sûr, il faut parler, comme vous l'avez fait, des réformes de l'Etat et des services publics. Je dis bien réformes au pluriel. Il ne s'agit pas d'amputer à l'aveugle l'Etat de ses ressources humaines, mais de les optimiser, par le redéploiement des moyens. Les administrations de service public, indispensables à nos compatriotes, doivent être confortées ; celles qui assurent des tâches d'administration proprement dite doivent être mieux organisées. A force de refuser de moderniser notre Etat, nous le tuons à petit feu, nous le rendons insupportable aux citoyens. Les fonctionnaires ne trouveraient-ils pas davantage de satisfaction et de reconnaissance dans une administration plus moderne et plus efficace ? Nous devons réfléchir à une forme d'intéressement et de promotion appropriés au secteur public (« Enfin ! » sur les bancs du groupe de l'UMP).

Evidemment, la décentralisation va de pair avec la réforme de l'Etat. Vous en avez fait une grande ambition, avec la réforme constitutionnelle et la refonte des textes liés à l'intercommunalité - dont vous avez pu mesurer à l'instant, Monsieur le Premier ministre, la popularité, dans votre majorité, et aussi chez tous les élus locaux de France (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF). Ce « pari des territoires » est une nécessité pour le renouveau de la citoyenneté, trop souvent étouffée par nos réflexes jacobins.

Nous éviterons ainsi de nous retrouver devant une impasse, avec la combinaison d'un taux de chômage élevé et d'une pénurie d'emplois dans certaines branches professionnelles. Ce risque s'aggravera en 2005, avec le départ massif de certains professionnels à la retraite. Nous devons le conjurer par une refonte de nos dispositifs d'orientation et une revalorisation de la formation. Les contrats en alternance, la formation permanente devront être nos outils privilégiés. Vous avez raison, Monsieur le Premier ministre, de demander aux partenaires sociaux de remettre en chantier un ouvrage déjà très avancé, pour permettre l'accouchement de cette indispensable réforme.

La baisse des prélèvements, et d'abord celle de l'impôt sur le revenu, participe à cet effort de stimulation des énergies.

Nous ne laisserons pas caricaturer cette démarche. Monsieur Brard, il s'agit d'adresser un signal à nos compatriotes pour leur montrer qu'ils peuvent davantage profiter des fruits de leur travail. Il s'agit d'encourager nos créateurs, nos chercheurs, nos cadres et nos salariés qualifiés, qui ne sont pas des privilégiés ! (Approbations sur plusieurs bancs du groupe de l'UMP)

Nos entreprises doivent investir sur le plan matériel comme sur le plan humain ; et l'administration devra les accompagner en réduisant les entraves qu'elles rencontrent au jour le jour. Même si les adaptations du dispositif des 35 heures doivent passer par la concertation et la loi, il est urgent qu'elles soient mises en _uvre, pour rassurer nombre de PME, mais aussi pour permettre aux salariés d'améliorer leurs revenus par le travail (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

Il est également urgent d'avancer en matière de formation permanente et d'assurance-emploi, pour offrir de nouvelles chances aux salariés français face aux grandes évolutions de l'activité et de l'emploi. Enfin, on ne pourra pas esquiver le problème posé par certaines dispositions de la loi de « modernisation sociale » : la reprise des entreprises en difficulté est compromise par la lenteur de certaines procédures, illusoires pour la protection des salariés, et dramatiques pour la survie de l'entreprise (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

C'est ainsi qu'un nouveau cycle vertueux s'engagera. Nous pourrons alors répondre aux exigences européennes, qui sont celles du bon sens. Comment une nation peut-elle aller de l'avant si elle doit traîner indéfiniment une dette trop lourde, si elle supporte des frais généraux excessifs pour son administration ? A l'inverse, le retour de la confiance et de l'investissement peut se révéler décisif : un accroissement de 5 % de l'investissement ajoute un demi-point de croissance ! Ainsi, la rénovation de la maison France pourra-t-elle réussir au cours des cinq ans à venir grâce à cette nouvelle dynamique.

S'il faut redynamiser notre pays, il faut aussi consolider notre cohésion sociale, gravement menacée par le sentiment d'insécurité qui s'empare des plus faibles. L'engrenage qui conduit de la peur à la méfiance et au repli sur soi est dangereux pour la société tout entière. Les Français en ont assez des a priori idéologiques, et vous avez raison de rompre avec les discours incantatoires. Ces femmes et ces hommes qui nous ont interpellés attendent une action volontaire soucieuse d'efficacité.

Nous saluons la volonté du Gouvernement de nous soumettre d'emblée deux lois de programmation pour renforcer les moyens de la justice et des forces de sécurité. Mais il faudra aussi définir les priorités de ceux qui ont choisi de veiller sur notre sécurité. On a parfois le sentiment que les forces de sécurité sont mobilisées sur des tâches secondaires au détriment de l'absolue priorité que doit constituer la mise hors d'état de nuire des vrais délinquants (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

Rien ne sera possible sans la volonté d'associer les élus du terrain à cette lutte contre toutes les formes de violence, dans un souci de prévention. Nous, Parlementaires, serons à vos côtés pour reconquérir cette paix civile.

Mais il ne faut pas oublier la partie immergée de l'iceberg : notre société a mal, elle souffre de la perte de repères. Le refus de toute autorité, le manque de respect pour l'autre, la recherche exclusive de l'avantage individuel, se développent au détriment de l'harmonie collective. Nous avons besoin d'un véritable renouveau civique et moral, d'un retour de la responsabilité personnelle au sein de la famille, de l'école et de la cité (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

Mais nous n'y parviendrons pas sans mettre un terme à l'injustice. Le sentiment s'est répandu qu'en aggravant la lenteur et la complexité de nos procédures, le législateur avait facilité la tâche aux délinquants. Ainsi, le contraste avec le sort des victimes est devenu d'autant plus insupportable, elles qui sont les grandes oubliées des dernières années.

La cohésion sociale est aussi affaire de solidarités, que nous devons actualiser afin de les fortifier. Il faut sortir d'une approche superficielle des politiques sociales. La conservation des acquis sociaux a trop souvent constitué la seule et unique ambition.

L'opacité est propice au développement du sentiment d'injustice. Notre modèle social doit être régénéré, afin d'éviter la tentation de sa remise en cause.

Vous avez décidé de relancer le dialogue social ; il faut que les partenaires sociaux acceptent de l'approfondir : à eux d'imaginer les réponses appropriées et de préparer des choix courageux, dans le respect du calendrier. Il est temps de tourner la page du jacobinisme social qui a donné le sentiment d'une classe politique autiste ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF)

Je ne reviendrai pas sur les chantiers qui nous attendent, les retraites, l'égal accès au savoir, l'aménagement du territoire qu'il convient de rendre moins bureaucratique et de recentrer sur l'essentiel : la péréquation des ressources et les grandes infrastructures de communication - y compris l'accès au téléphone mobile et au haut débit sur tout notre territoire (Approbations sur les bancs du groupe de l'UMP).

J'aurais voulu évoquer encore les problèmes de la sécurité sociale, si j'en avais eu le temps. La possibilité que vous venez d'offrir à tous, Monsieur le Premier ministre, de disposer d'une assurance complémentaire, sera un point d'appui précieux pour l'effort de responsabilisation. Merci aussi de rendre courage à nos hospitaliers à travers le plan Hôpital 2007.

Par-delà ces chantiers difficiles, de nouveaux horizons pour l'Union européenne doivent se dégager. L'Europe s'impose quand elle permet de faire mieux à plusieurs que chaque nation isolément ; elle doit être un levier d'action pour peser sur la mondialisation en lui donnant un sens et des règles éthiques. L'Union pour la Majorité Présidentielle, construite à l'image d'autres grands rassemblements politiques de nos pays voisins, a pour mission de soutenir un grand projet d'alternance et de permettre un exercice clair du pouvoir. Elle constitue un tournant majeur dans l'histoire politique française. Jusqu'ici, les forces politiques se sont surtout préoccupées de cultiver les différences, mais cela a nourri une certaine forme d'impuissance. Aujourd'hui, les Français veulent avant tout de la cohérence, de l'action et de l'efficacité. Le succès de l'UMP a montré qu'elle était en phase avec ces attentes.

Notre soutien se veut efficace : la vaste implantation géographique et sociologique de l'UMP sera précieuse pour orienter le Gouvernement. Puis-je insister, à cet égard, sur la nécessité d'adjoindre à la compétence de notre haute administration l'expertise concrète des parlementaires, dès le stade de l'élaboration des projets de loi ?

Notre soutien se veut éclairé, c'est-à-dire qu'il sera vigilant, attentif et exigeant, parce qu'il s'appuie sur le partage des mêmes convictions. Notre soutien puisera sa solidité dans le sentiment partagé que ce qui doit l'emporter, par-delà les préoccupations catégorielles, c'est la réussite de la France tout entière, sa capacité à retrouver les premiers rôles en Europe et donc à maîtriser la mondialisation.

En effet, seule l'action commune des nations courageuses et solidaires permettra d'humaniser celle-ci, comme l'a souvent rappelé le Président de la République. Seul un sursaut de volonté politique nous permettra d'apporter une contribution efficace à ce grand dessein.

Monsieur le Premier ministre, nos concitoyens nous ont apporté leur confiance pour agir avec détermination au service de la France. Nous devons être garants de leurs espoirs. Dans cet esprit, notre groupe UMP vous assure aujourd'hui de sa confiance, de son aide et de son soutien (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

M. François Hollande - Au terme d'un processus électoral de trois mois, les Français ont fait leur choix ; il s'impose à tous. Après le second tour de l'élection présidentielle - marqué par le rassemblement autour des valeurs de la République - vous avez fait campagne, principalement, sur le refus de la cohabitation. Vous avez été entendu, au-delà peut-être de ce que vous espériez. Vous disposez désormais de tous les moyens pour agir : vous avez la confiance du Président de la République, vous bénéficiez d'une large majorité dans cette Assemblée, d'une assise confortable au Sénat ; vous avez des positions fortes dans les régions et les départements. Et vous vous appuyez sur un parti créé pour l'occasion et dont le seul but, si j'en ai bien compris la philosophie, est de vous soutenir. Rarement, depuis vingt ans, une majorité avait connu une telle configuration politique, et cela pour cinq ans (Exclamations et rires sur les bancs du groupe UDF et du groupe de l'UMP). C'est un atout majeur, mais aussi une grande responsabilité. Si vous réussissez, Monsieur le Premier ministre, nul en dehors de vous ne pourra s'en arroger le mérite. Mais dans le cas contraire, il ne sera pas aisé pour votre famille politique de se trouver des excuses...

N'ayons garde pourtant d'oublier les messages que les Français nous ont adressés : le doute envers la capacité du politique à les protéger ; le besoin d'une Europe plus sociale ; l'exigence du respect des règles dans notre société ; la nécessité d'une meilleure représentation politique de tous les citoyens, quelle que soit leur position ou leur origine.

Ces messages, nous-mêmes en avons été les premiers destinataires ; mais l'avertissement vaut pour tous. Le niveau d'abstention au premier tour de l'élection présidentielle, le résultat obtenu alors par le candidat qui est ensuite devenu président, la faible participation aux deux tours des élections législatives ont manifesté l'ampleur du désenchantement civique, processus continu depuis dix ans. L'importance du vote en faveur de l'extrême-droite, le 21 avril, ne saurait être relativisée par le tassement intervenu ensuite. Il ne s'agit plus d'une contestation à la marge, d'une irritation ponctuelle : c'est notre démocratie, ses valeurs et ses fondements, mais aussi ses pratiques, qui serait en cause si des réponses n'étaient pas données.

Par conséquent, majorité et opposition, chacune à sa place, sans confondre les rôles ni gommer les clivages, doivent toutes deux relever le défi politique majeur qui nous est lancé, refonder le lien social (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste). Cette obligation pèse également sur vous et sur nous. En ce qui nous concerne, comme principale force de l'opposition, notre attitude sera claire : nous nous déterminerons en fonction de ce que nous pensons être l'intérêt de la France. Nous n'oublierons rien de ce que nous avons fait quand nous soutenions loyalement Lionel Jospin. Nous défendrons les acquis de la précédente législature (Exclamations sur les bancs du groupe de l'UMP), non seulement par cohérence envers nous-mêmes, mais par solidarité envers les Français. Nous veillerons à ce que des avancées comme les emplois-jeunes, la couverture maladie universelle, l'allocation personnalisée autonomie et les trente-cinq heures ne soient pas remises en cause (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe C. et R.).

M. Jean-Luc Reitzer - Elles ne sont pas financées !

M. François Hollande - Vous avez renvoyé leur éventuelle révision à la négociation collective : nous serons attentifs à ce qui en sortira.

Il en va de même pour la loi de modernisation sociale, qui entendait renforcer la protection des salariés contre les licenciements, notamment boursiers. Elle prévoyait le doublement des indemnités de licenciement pour les salariés victimes de semblables plans sociaux. Alors qu'on connaît aujourd'hui le montant - près de cent millions de francs - des indemnités perçues par un dirigeant d'une entreprise privée, il faut rappeler que cette loi est faite pour protéger les plus petits salariés de France (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe C. et R. ; protestations sur les bancs du groupe de l'UMP). Et alors qu'il se passe ce qu'on sait dans cette entreprise et sur le marché boursier, votre seule préoccupation est de réduire les protections offertes aux salariés, au lieu d'infliger des sanctions aux dirigeants qui ont failli...(Mêmes mouvements). Nous marquerons aussi notre attachement au service public (Interruptions sur les bancs du groupe de l'UMP).

M. Henri Emmanuelli - Présidez, Monsieur le Président !

M. le Président - N'en rajoutez pas trop (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste).

M. François Hollande - Nous marquerons, disais-je, notre attachement au service public, à la protection sociale, à la retraite par répartition. Nous nous opposerons à la fois à la remise en cause des services publics et à la décision, que vous avez annoncée, de changer le statut d'EDF-GDF, qui remettrait en cause les principes fondateurs du service public de l'énergie. De même, nous nous opposerons à tout mécanisme fiscal permettant aux plus favorisés de se constituer par le biais de fonds de pension, fussent-ils « à la française », un complément de retraite (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe C. et R.).

Nous défendrons enfin l'impartialité de l'Etat, les droits du citoyen et l'indépendance de la justice, fondements du pacte républicain (Exclamations sur les bancs du groupe de l'UMP). A cet égard nous sommes déjà inquiets du retour des instructions particulières du Garde des Sceaux. Et nous serons vigilants envers toute tentation de revenir sur les règles de prescription de l'abus de bien social ou sur la durée de l'instruction qui, au détour d'un texte ou d'un autre, aurait le même effet.

Vous avez pris à ce sujet un certain nombre d'engagements : nous verrons ce qu'il en adviendra.

Vous venez de présenter, Monsieur le Premier Ministre, les grandes lignes de votre action pour les mois à venir, autour des idées de « nouvel humanisme » et de « nouvelle gouvernance » - je ne sais si ces formules sont heureuses, mais ce sont les vôtres. Vous avez souhaité simplifier l'action de l'Etat, et, à vous entendre, chaque paragraphe annonçait un nouveau texte : il s'agit de simplifier, mais aussi, déjà, de remplacer... Ce n'est pas moins d'une vingtaine de lois qui nous sont promises - lois constitutionnelles, lois d'orientation de programmation, lois ordinaires, et même des ordonnances, qui n'avaient pas eu cours durant la précédente législature (Vives protestations sur les bancs du groupe de l'UMP).

M. Michel Bouvard - Menteur !

M. le Président - Je vous en prie !

M. François Hollande - Au nom de cette nouvelle gouvernance, vous affirmez la nécessité d'un grand nombre de réformes dans l'Etat, et notamment d'une nouvelle étape de la décentralisation. Les socialistes qui, en 1982, avec Gaston Defferre et Pierre Mauroy, ont élaboré et voté les grandes lois de décentralisation (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste) contre une droite qui y voyait une menace contre l'unité de la République et un affaiblissement de l'Etat, ne peuvent que partager cette perspective. Sur ce socle, vous proposez d'organiser notre administration selon un nouveau schéma. Pour une part, il s'agit de constitutionnaliser une institution comme la région - qui pourrait sérieusement s'y opposer ? - de reconnaître le principe de l'autonomie financière des collectivités locales, et d'introduire les référendums locaux : autant de thèmes sur lesquels nous pouvons converger (Exclamations sur les bancs du groupe de l'UMP).

Enfin vous voulez faire droit au principe d'expérimentation. Nous y avons nous-mêmes recouru.

Plusieurs députés UMP - La Corse !

M. François Hollande - Au-delà de la Corse, nous avons adopté un texte en ce sens, issu d'ailleurs d'une proposition de loi. Mais s'en tenir là serait ne s'attacher qu'à la seule architecture des pouvoirs, en oubliant le contenu de la politique territoriale. La « proximité » n'est pas seulement l'affaire des élus locaux, mais celle des citoyens. La décentralisation, c'est bien plus qu'une réorganisation des compétences entre les niveaux d'administration. C'est avant tout une répartition différente des moyens et des ressources entre collectivités. Le grand enjeu, c'est l'égalité des chances entre les territoires. C'est de permettre aux villes les plus pauvres d'assurer le développement de leurs quartiers, de briser les ghettos, sans alourdir une fiscalité déjà insupportable. C'est de permettre aux départements ruraux de préserver les services publics essentiels (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste). C'est de permettre à toutes nos régions d'affronter la compétition spatiale en matière de formation et d'action économique.

Il ne suffira donc pas de changer la Constitution pour changer la donne. Rien ne sera possible sans une péréquation des recettes entre les collectivités locales, sans une réforme profonde de la fiscalité et une distribution plus équitable des dotations de l'Etat. Là est la vraie mutation, et aussi le vrai clivage entre nous. A défaut, c'est l'aggravation des inégalités et l'éclatement de la solidarité qui risquent de résulter de la nouvelle configuration que vous voulez introduire.

De même, vous entendez inscrire dans notre droit la priorité au dialogue social, en souhaitant que les grandes réformes intéressant les relations du travail soient négociées avant toute initiative législative. Cette méthode, pour être fructueuse, suppose des partenaires sociaux, notamment du côté patronal, prêts au compromis et à l'équilibre. La refondation sociale du MEDEF ne présentait pas, c'est le moins que l'on puisse dire, ces caractéristiques. Mais ce sont les règles mêmes de la démocratie sociale qu'il faut faire évoluer en privilégiant l'exigence d'un accord majoritaire pour valider les contrats.

Le système actuel, dans lequel la signature d'une seule des cinq centrales syndicales suffit à engager l'avenir de tous les salariés, est obsolète. Cette situation affaiblit le syndicalisme lui-même, et donc la négociation collective.

Votre appel au dialogue social ne peut donc trouver de réalité que dans une démocratie sociale repensée à partir de nouveaux critères de représentation et du respect du droit syndical dans toutes les entreprises. Nous sommes prêts, pour notre part, après un large débat avec les partenaires sociaux, à prendre sur ce sujet toutes nos responsabilités.

Enfin, pour renouer le lien civique, vous soulignez l'urgence de rétablir l'autorité de l'Etat. Sans doute s'agit-il d'insister sur la nécessité de lutter, avec de plus amples moyens, contre l'insécurité : nous vous en donnons acte. Encore faudra-t-il ne pas s'en tenir au vote de grandes lois-programmes. Beaucoup d'entre nous se souviennent de la loi d'orientation pour la police et la sécurité votée en 1994, et qui n'a jamais été appliquée. Les augmentations d'effectifs prévues n'avaient pas vu le jour trois ans plus tard... De plus, des moyens supplémentaires et des sanctions plus rapides ne suffiront pas à régler les problèmes de la violence. Le mal est plus profond. Il exige une nouvelle forme de prévention pour éduquer et transmettre les règles de vie en société.

Il faut tout faire pour éviter le basculement précoce dans la délinquance. Mais croire qu'il suffirait, pour cela, de faire voter des lois sur la sécurité et la justice est une illusion dangereuse qui se retournera contre vous.

L'autorité de l'Etat doit aussi se manifester dans la lutte contre l'insécurité sociale et l'insécurité financière. L'exemple de la société Vivendi montre assez que l'épargne publique peut être victime de comptes spéculatifs, sinon irréguliers (« Et Moulinex ? » sur les bancs du groupe de l'UMP). L'autorité de l'Etat, c'est aussi d'enrayer les dommages induits par un capitalisme qui a changé de forme mais pas de nature (Exclamations sur les mêmes bancs).

Monsieur le Premier ministre, les déclarations d'intention ne suffisent plus, et c'est sur vos actes que vous serez jugé par les Français (Interruptions sur les mêmes bancs). Votre gouvernement existe depuis deux mois, et il serait prématuré de prétendre dresser déjà un premier bilan de son action. Toutefois, les décisions déjà prises éclairent d'un certain jour les annonces que vous venez de faire. Ainsi de votre conception singulière du dialogue social, révélée par la manière dont vous avez fait savoir au pays, avant même que ne se soit réunie la commission de la négociation collective, que l'augmentation du SMIC serait calculée au plus juste. Non seulement vous avez piétiné ainsi l'un des principes sur lesquels vous affirmez vouloir fonder votre démarche mais, sur le fond, la décision est révélatrice de la philosophie qui inspire votre gouvernement. Elle indique une grande sensibilité aux thèses patronales, qui voudraient que l'intérêt des salariés se confonde avec ceux de l'entreprise - ce qui ne laisse guère de place au compromis !

Ce choix fut d'autant plus malencontreux que vous confirmiez dans le même temps votre détermination de baisser de 5 % l'impôt sur le revenu, mesure qui n'aura guère de conséquences pour les salariés payés au SMIC, et n'en aura aucune pour la moitié des ménages. Cette mesure, réaffirmée aujourd'hui est-elle vraiment le moyen le plus efficace de relancer la consommation, de rendre confiance à la France qui travaille dur et gagne peu, et d'assurer la justice fiscale ? On note, au passage, qu'il n'est pas question d'augmenter la prime pour l'emploi, ni de réduire les autres impôts...

Vous avez défini devant nous votre politique pour les mois à venir, et votre bonne foi n'est pas en cause. Ce qui peut l'être, c'est la mise en _uvre de vos mesures, tant sont grandes les incertitudes. Ainsi bâtissez-vous votre stratégie sur une hypothèse de croissance de 3 %. L'objectif est louable, mais vous ne vous donnez guère les moyens de l'atteindre. Or, les difficultés qui vous attendent tiennent à l'ampleur des promesses dont vous êtes le dépositaire, et à l'étroitesse de vos marges de man_uvre.

En quelques semaines, au cours de deux campagnes électorales, vous avez accumulé les annonces, sans oublier aucune catégorie sociale, ni aucun secteur : on a promis 30 milliards d'euros de baisses de prélèvements, une baisse des charges et une diminution des cotisations salariales. Mais on annonce des dépenses supplémentaires pour la police, la justice, la défense... Avant-hier encore, le Président de la République réclamait un milliard par an de plus pour l'équipement des armées, et suggérait même la construction d'un deuxième porte-avions. Quant à la maîtrise des dépenses de santé, elle a été abandonnée en chemin... Tout cela n'a pas empêché le chef de l'Etat de confirmer que la France respecterait les termes du pacte de stabilité...

Il ne vous reste donc que deux expédients commodes. Le premier, c'est l'audit, qui consiste à publier des chiffres connus de tous, puisque depuis deux ans la situation budgétaire est communiquée, chaque semaine, au Président de la République, au Premier ministre et aux présidents des commissions des finances de l'Assemblée nationale et du Sénat. M. Lambert, aujourd'hui ministre du budget, en était donc parfaitement informé, et vous ne pouvez faire semblant de découvrir cela aujourd'hui (Interruptions sur les bancs du groupe de l'UMP).

M. le Président - Je vous invite à conclure.

M. François Hollande - Votre second expédient, c'est l'Europe. En lançant des propositions dont vous saviez qu'elles ne pourraient être acceptées par les autorités communautaires, vous avez pris le risque de faire de l'Union européenne le bouc émissaire de nos débats publics, qu'il s'agisse de la baisse de la TVA sur la restauration, les disques et les CD, ou des dates d'ouverture de la chasse (Exclamations sur les mêmes bancs).

Depuis votre nomination, Monsieur le Premier ministre, vous avez fait l'objet de nombreux compliments (« Mérités ! » sur les bancs du groupe de l'UMP). On vous a dit habile, doté d'une expérience locale et bon communicant. De cette dextérité, de cette expérience de la proximité et de cette agilité, il vous en faudra beaucoup pour répondre aux nombreuses attentes que vous avez fait naître par vos promesses et pour convaincre le pays de revenir sur les acquis sociaux. D'ailleurs, vous êtes déjà sous la pression : celle de votre majorité, impatiente, celle des catégories sociales auxquelles vous avez tant promis, celle du MEDEF qui espère tant de vous (Interruptions sur les mêmes bancs).

Certes, vous disposez de cinq années. Mais le bon usage de cette durée dépendra de la relation que vous établirez avec les Français (Interruptions sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF). Quel manque de courtoisie, quel exemple !

C'est parce que nous constatons à la fois votre méthode et votre politique que nous ne pouvons vous accorder notre confiance. Mais nous servirons la démocratie en formulant, lors de chaque débat, des propositions définissant une politique alternative (Mmes et MM. les membres du groupe socialiste se lèvent et applaudissent).

M. François Bayrou - Monsieur le Premier ministre, vous engagez la responsabilité de votre gouvernement devant l'Assemblée nationale, au sein de laquelle vous n'aurez aucun mal à trouver une majorité. Le groupe UDF sera une part active de cette majorité (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP).

M. Jean-Pierre Brard - On commence par une génuflexion (Rires).

M. François Bayrou - Mais le véritable engagement de responsabilité, c'est devant notre pays qu'il est déposé.

Vous êtes le dixième chef du gouvernement en vingt ans à venir à cette tribune pour engager la responsabilité d'un nouveau gouvernement.

Et toujours, les mêmes mots et les mêmes espoirs. « La France vit aujourd'hui un moment d'espérance », déclara Jacques Chirac à cette tribune le 9 avril 1986. On sait ce qu'il advint deux ans plus tard, en 1988. «  A temps nouveaux, pratiques résolument nouvelles », proclamait Michel Rocard, le 29 juin 1988, parlant - déjà - de proximité. Trois ans avant d'être renvoyé de Matignon, et cinq ans avant la déroute électorale socialiste de 1993 ! « Voilà que commence une nouvelle période de notre histoire, les Français ont voulu changer de cap, apporter un élan nouveau à notre nation et à notre société les réformes qui lui assureront le progrès, l'équilibre et la justice » : vous avez reconnu Edouard Balladur, le 8 avril 1993.

M. Jean-Pierre Brard - C'est une distribution générale des prix !

M. François Bayrou - Alain Juppé le 23 mai 1995, et Lionel Jospin le 19 juin 1997 ont usé encore des mêmes mots, souhaitant conclure un nouveau pacte républicain avec les Français.

Chaque fois, les vainqueurs ont la certitude qu'ils ont durablement gagné. Chaque fois, en peu de temps, le corps électoral les détrompe. Chaque fois, ils découvrent qu'ils avaient construit sur du sable.

En réalité, le mal est plus profond. Le navire ne répond plus à la barre. C'est qu'on l'a surchargé sans jamais rénover ses structures, sans même en avoir l'idée ou le pouvoir. Mais aujourd'hui, les structures craquent. Vous ne pouvez pourtant pas vous permettre de mettre le navire en cale sèche. Au milieu de l'océan, avec des femmes et des enfants à bord, et une cargaison précieuse, il vous faut être à la fois architecte et charpentier, bon marin et capitaine.

Monsieur le Premier ministre, la clé de la démocratie, c'est la confiance, c'est elle qu'il faut retrouver. Confiance du citoyen dans les pouvoirs, mais surtout en lui-même, en son pouvoir de citoyen, en sa souveraineté. Il faut apporter la preuve que la décision des citoyens peut changer réellement le monde, proche ou lointain. Même en temps de mondialisation, de démesure, de flambée ou d'écroulement des marchés financiers, de nations géantes, de toute-puissance américaine, il faut qu'un citoyen français puisse croire à nouveau qu'il peut changer sa vie.

C'est pourquoi vous avez raison de commencer par la décentralisation. Il faut en effet bâtir le pouvoir local et l'établir dans sa légitimité.

Il faut d'abord le simplifier. Dans l'architecture labyrinthique des SCOT ou de la loi SRU, les élus eux-mêmes ne peuvent se retrouver ! Je crois depuis longtemps que nous avons besoin de deux niveaux, et de deux niveaux seulement, de pouvoir local. Un pouvoir de proximité : la commune et les fédérations de communes que sont les structures intercommunales. Un pouvoir d'aménagement qui ne pourra être que la région, fédérant les unités départementales. Afin de garantir la cohérence de ces deux niveaux, il conviendra que ce soient les mêmes élus qui administrent les communes et les structures intercommunales, les mêmes élus qui administrent les départements et la région (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF). Et pour affirmer la légitimité des deux niveaux et pour que les citoyens puissent débattre des décisions puis les contrôler, il conviendra que le président de la structure intercommunale et celui de la région soient élus au suffrage universel (« Mais non ! » sur les bancs du groupe de l'UMP ; applaudissements sur les bancs du groupe UDF). Nous en débattrons le moment venu.

Le nouveau pouvoir local n'est pas une mode, c'est un besoin. Le pouvoir local multiplie les responsables, si bien que le citoyen peut plus facilement trouver un interlocuteur. Plus de responsables, c'est aussi plus d'innovation. La Constitution devra être modifiée, afin que l'innovation et l'expérimentation deviennent en France une réalité accessible à tous.

Il faudra aussi rénover le pouvoir national. Nous avons besoin de la nation, tout simplement parce que celle-ci est le truchement naturel entre l'individuel et l'universel. Son histoire, sa langue, sa représentation dans la figure de l'Etat rendent la nation indispensable aux Français. Mais la nation n'est rien sans les institutions qui lui permettent de s'exprimer et d'agir. Or, nos institutions ont grand besoin d'une refondation.

Après le choix, fait il y a quarante ans, de l'élection du Président au suffrage universel, nous vivons de fait en régime présidentiel. Mais celui-ci doit être équilibré. En lieu et place de cette aberration que fut la Ve République de ces dernières années, avec un Président faible et un Parlement faible, nous suggérons au contraire un Président fort et un Parlement fort. Un Parlement fort, c'est un Parlement qui s'exprime, qui a le pouvoir réel de proposer des lois, qui contrôle aussi, qui puisse par exemple saisir la Cour des comptes ou missionner des audits indépendants. Pour proposer des lois, il doit avoir une maîtrise accrue de son ordre du jour (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UDF ; M. Brard applaudit également).

Enfin, pour que le Parlement soit fort, il importe que tous les grands courants politiques du pays soient représentés en son sein. Il faudra donc un jour ou l'autre réformer notre mode de scrutin (Protestations sur les bancs du groupe de l'UMP). Le mode de scrutin futur devra donner trois assurances : celle de disposer d'une majorité pour gouverner ; celle d'une représentation de tous les grands courants, de façon que le débat ait lieu ici et non ailleurs ; celle d'une représentation équitable des territoires qui composent la France (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UDF, et sur quelques bancs du groupe socialiste et du groupe C. et R.). Déjà, la commission Vedel avait proposé d'introduire une dose de proportionnelle aux élections législatives.

Monsieur le Premier ministre, nos institutions nationales ont besoin d'être refondées dans les cinq années à venir. Il vous faudra l'entreprendre et nous sommes prêts à vous y aider. Mais les cinq années à venir seront aussi cruciales pour le pouvoir européen avec le nouveau Traité et, nous l'espérons, une Constitution.

Le rêve européen est aujourd'hui menacé. Avant nous, des générations de visionnaires ont construit l'Europe pour la paix. Il nous faut aujourd'hui construire l'Europe pour retrouver l'accès à la puissance. Une seule question se pose : serons-nous capables ou non de bâtir une puissance au service de nos identités et de tout ce qui est précieux pour nous, nos modes de vie, nos traditions, notre culture et nos cultures, nos langues, la défense d'un idéal humaniste ? Si nous n'en sommes pas capables, nos protestations morales et culturelles seront vaines. La force des armes, la force diplomatique, la force commerciale, la force économique, la force de la recherche publique, la force des normes balaieront notre réalité. Et nos différences comme nos identités ne seront plus que nostalgie.

Séparées, nos monnaies étaient ballottées. Fédérée, notre monnaie fait aujourd'hui jeu égal avec la plus puissante monnaie de la planète.

Notre effort doit donc tendre dans une seule direction : faire adhérer tous les citoyens à l'idée et à l'idéal européens.

Pour cela il faut sans cesse expliquer le projet. Fédérer, c'est poser en article premier le respect des différences. Les différences ne sont pas en voie d'effacement ! Elles sont les bienvenues et seront protégées ! Il ne s'agit ni de parler une langue unique ni d'obéir à un pouvoir unique ! Au contraire ! Il s'agit de faire ensemble ce que nous ne pouvons pas faire tout seuls. Il ne s'agit pas d'effacer les identités mais de fédérer les identités différentes pour que chacune soit protégée.

Il faut sans cesse simplifier : les principes de la Constitution européenne que nous allons écrire devraient tenir en une page et être enseignés à tous les citoyens et futurs citoyens de l'Europe.

Enfin, il faut légitimer. Partout où il y a pouvoir, il doit y avoir légitimité et contrôle. A toute fédération, il faut un fédérateur légitime. Pour que l'homme ou la femme qui représentera l'Europe puisse parler au nom des citoyens, il faut qu'il tire sa légitimité de la volonté souveraine des citoyens de l'Europe et donc, directement ou indirectement, du suffrage universel.

Les enjeux immédiats sont au nombre de quatre : l'harmonisation des politiques économiques et budgétaires, et les rendez-vous que nous avons pris ; la Convention présidée par Valéry Giscard d'Estaing pour que la réforme des institutions et l'élargissement aillent réellement de pair ; le vote à la majorité qualifiée au Conseil, proposé même par le Royaume-Uni ; des initiatives assez fortes en matière de défense pour que l'Europe soit présente et respectée sur la scène internationale. Voilà pour la charpente du bateau.

Mais il faut compter aussi avec l'équipage, et pour que celui-ci ait envie de servir le bateau, il faut apporter une solution à ses problèmes. Cela exigera un long et rude effort.

Il y a d'abord la place du travail dans la société française. Depuis des décennies, en dépit d'avertissements nombreux, nous n'avons pas fait du travail ce qu'il doit être, le plus efficace des instruments d'intégration et la première ressource collective.

Monsieur le Premier ministre, il nous faut payer le travail à son juste prix et il nous faut multiplier le travail. Ce n'est pas incompatible. « La feuille de paye n'est pas l'ennemie de l'emploi » (« Bravo ! » sur quelques bancs du groupe socialiste), elle doit en être l'alliée et vous connaissez la clé de cette politique. La clé, c'est la baisse des charges (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et sur quelques bancs du groupe de l'UMP). Pour multiplier les emplois, et mieux payer le travail, pour que les entreprises n'aient pas à supporter des contributions supplémentaires, il faut que toutes les marges de man_uvre de la nation soient dirigées en priorité vers la baisse des charges.

Il y a ensuite une question urgente qui touche à la santé. Ce que nous avons fait, les uns et les autres, ces dernières années, dans le secteur de la santé, est à pleurer. Une gestion à courte vue de la démographie médicale fait qu'aujourd'hui les médecins ne trouvent pas de succession, les infirmières ne trouvent pas de remplaçantes. Les médecins s'en vont, les infirmières s'en vont. Dans le département de la Mayenne où j'étais il y a quelques semaines, il n'y a plus que 200 médecins généralistes au lieu de 350 naguère.

Et combien de personnes dépendantes se trouvent sans infirmière. Le monde de la santé est dans une inquiétude profonde qui ne se limite pas au prix de la consultation (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et sur quelques bancs du groupe de l'UMP). Médecine publique, médecine libérale, professions de santé, il faut reconstruire la maison.

Il y a encore une urgente question de l'agriculture. Les agriculteurs français s'inquiètent plus qu'ils ne l'ont jamais fait depuis cinquante ans. La politique fondée sur les aides directes, qui fait payer le contribuable pour le consommateur et baisse artificiellement le prix des produits agricoles, a profondément démoralisé ce milieu professionnel (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et sur quelques bancs du groupe de l'UMP) et tous savent que l'élargissement européen arrive. C'est la France entière qui souffrirait de devenir un pays sans paysans. Et ceux qui sont attachés à l'équilibre de la planète, au développement durable, regardent avec désespoir cette évolution. Si les paysans français, qui sont parmi les plus productifs du monde, ne peuvent pas vivre de leur travail, alors, que peut-il en être des paysans du Mali, de la Côte-d'Ivoire ou du Burkina-Faso ? Retrouver un marché équilibré et rémunérateur, ce n'est pas seulement un enjeu pour l'agriculture française et européenne, c'est un enjeu pour la planète.

La France et l'Europe ont un problème urgent en matière de soutien et d'assistance au tiers-monde. Nous avons lu hier que les pires scénarios sont dépassés s'agissant du sida. Comment lire sans trembler que 45 % des femmes enceintes du Bostwana sont aujourd'hui atteintes par le virus ? Notre indifférence et notre inaction devraient nous faire honte.

Notre pays a un problème urgent avec la dépense publique. Faute de courage politique, nous n'avons jamais traité la question au fond. La dépense publique est légitime. Elle est un facteur d'équilibre, mais elle ne peut pas être une fuite en avant. Quand les choses vont bien, on dépense plus puisqu'on trouve des « cagnottes » ; et, quand les choses vont mal, on dépense plus puisqu'il y a davantage de besoins. Si nous sommes responsables et courageux, nous devons traiter cette question. Et je souhaiterais que nous le fassions de manière trans-partisane, puisque c'est un problème qui se pose et se posera à nous tous.

Il y a une question urgente de la réforme de l'Etat : il faut raccourcir les circuits de décision, clarifier les missions, distinguer entre les missions de terrain, qui demandent un investissement humain dans le long terme, et les missions plus administratives, sur lesquelles des gains de productivité peuvent et doivent être obtenus.

Monsieur le Premier ministre, cette énumération, qui a laissé de côté bien des sujets que vous avez traités et que nous traiterons ensemble, à commencer par les retraites, la sécurité ou l'éducation, donne la dimension du défi.

En réalité, vous avez devant vous la tâche la plus lourde qu'aucun pouvoir, aucun gouvernement, aucune majorité ait eu à conduire depuis quarante années, depuis le drame algérien.

Pour répondre à ces défis, vous avez aujourd'hui plus de pouvoir qu'aucun gouvernement depuis que la République existe : l'ensemble du pouvoir exécutif, l'ensemble du pouvoir législatif, une grande proximité avec la majorité des membres des grandes institutions de contrôle (Rumeur sur les bancs du groupe socialiste). Tout cela pour un seul parti. Vous avez fait l'analyse que c'est ainsi que vous pourriez agir.

Il y a sans doute dans cette situation de grandes facilités. Je veux vous dire qu'il y a de grands risques. Le risque d'un pouvoir absolu, quand il a raison, c'est qu'il oublie de convaincre. Mais le risque pour le pouvoir absolu, quand il se trompe, c'est qu'il se trompe absolument (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste ; murmures sur les bancs du groupe de l'UMP). Car il ne reçoit plus les signaux d'alerte qui l'inviteraient à changer de chemin.

Monsieur le Premier ministre, je souhaite pour vous et pour notre pays que vous conjuriez tous ces risques. Nous sommes là pour vous y aider. C'est pour cela que nous avons choisi l'indépendance, qui fait la liberté de parole. Lorsque vous choisirez de bonnes orientations et que vous ferez des choix justes et courageux, notre appui ne vous sera pas ménagé. Et s'il arrive que vous preniez un chemin dangereux, nous serons là pour vous parler librement. Nous savons que votre tâche est difficile, nous ne l'oublierons pas chemin faisant. Nous savons que votre équipe comporte des femmes et des hommes estimables et de valeur. C'est parce que nous sommes libres que nous pourrons vous aider. L'alliance de femmes et d'hommes libres, c'est le meilleur des soutiens (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et sur quelques bancs du groupe de l'UMP).

M. Alain Bocquet - Aujourd'hui en France, tous les leviers de commande sont aux mains de la droite (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe de l'UMP), à l'Assemblée nationale, c'est une majorité écrasante, aux ordres, caporalisée, qui domine (Protestations sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

Pour autant, il serait dangereux pour la démocratie d'oublier les messages forts adressés par les Françaises et les Français le 21 avril dernier. Jacques Chirac et son programme n'ont obtenu, au premier tout, qu'à peine 20 % des suffrages exprimés.

Plusieurs députés UMP - Et Robert Hue ? 3 % !

M. le Président - Laissez M. Bocquet parler.

M. Alain Bocquet - Le Président de la République sortant n'a convaincu que 13,75 % des inscrits.

M. Yves Nicolin - Et le Premier ministre sortant ?

M. Alain Bocquet - Au second tour, la majorité des électeurs et des électrices ont exprimé un vote par défaut, avec la ferme volonté de faire barrage à l'extrême droite. C'est dire la profondeur de la fracture politique, corollaire de la fracture sociale.

Nos institutions sont à bout de souffle. Cela appelle, à l'évidence, la construction d'une nouvelle République.

Notre peuple aspire à changer d'époque politique.

Plusieurs députés UMP - C'est fait !

M. Alain Bocquet - Il n'en peut plus de n'être jamais écouté ; il n'en peut plus des promesses non tenues.

M. Patrick Ollier - D'ailleurs, il a voté.

M. Alain Bocquet - Le système que vous mettez à l'_uvre, produit de la mondialisation capitaliste et financière et de l'Europe de Maastricht, est incapable de répondre aux aspirations de nos concitoyens.

Le vent de panique qui a saisi Wall Street et les bourses européennes n'augure rien de bon.

D'ailleurs, nous ne sommes pas seuls à crier casse-cou, à propos de ce système pervers et impitoyable. Ecoutez ces phrases d'un expert : « Ces intermédiaires, fonds de pension ou SICAV, qui gèrent de l'argent pour le compte de tiers se livrent une concurrence féroce. Pour eux, l'alternative est simple : soit l'affaire dont ils sont actionnaires a une rentabilité de 15 % par an, soit ils demandent que l'entreprise soit liquidée. Le raisonnement paraît simpliste, mais c'est vraiment le leur : regardez donc ce qui se passe avec Vivendi ! Quand on vous demande l'impossible, comment faire ? Exiger une rentabilité de 15 % des fonds propres quand l'économie croît de 3 %, cela n'a aucun sens... ».

Celui qui s'exprime ainsi n'est pas un économiste marxiste, c'est M. Michel David Weill, président de la Banque Lazard, et fin connaisseur du système en cause (Interruptions sur les bancs du groupe UDF).

Or, dans ce système, avec les mesures que vous vous proposez de prendre, Monsieur le Premier ministre, la charrette des licenciements continuera de faire la bonne santé de l'actionnariat.

M. Lucien Degauchy - Mais le PC lui-même licencie à tour de bras !

M. Alain Bocquet - Ce n'est pas avec la baisse uniforme et démagogique de l'impôt sur le revenu que vous remédierez à ces logiques destructrices. Avec votre cadeau royal, 1 % des Français vont empocher 30 % des 2 milliards 700 millions d'euros que coûtera cette mesure à l'Etat. Et cette somme importante manquera pour la santé, l'école, la sécurité, la culture ou la justice.

Vous venez de dire « non » à un coup de pouce sur le SMIC, comme vous vous apprêtez à dire « non » à l'augmentation de l'allocation logement. De fait, les inégalités sociales gangrènent notre société et, par vos premières mesures, vous allez les aggraver.

Or, comment vivre aujourd'hui avec moins de 900 € par mois ?

Un député UMP - Il fallait y penser il y a quelques mois.

M. Alain Bocquet - C'est pourtant le lot de plus de 2 millions 600 000 de nos compatriotes ou des quatre millions qui vivent sous le seuil de pauvreté. Comment faire face, quand on sait que les loyers représentent, à eux seuls, 30 % des dépenses incompressibles ? Que reste-t-il des belles déclarations, la main sur le c_ur, du Président Chirac qui déclarait le 14 juillet 2000 : « La feuille de paie n'est pas ennemie de l'emploi » ?

Une augmentation du SMIC de 5 %, tout de suite, et une augmentation généralisée des salaires, permettraient de relancer la consommation et l'économie.

Un député UMP - Et la précarité ?

M. Alain Bocquet - Elle serait une réponse de justice sociale face à la hausse indécente de 36 % des rémunérations des PDG de sociétés cotées au CAC 40 qui perçoivent en moyenne 140 fois le SMIC (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe C. et R.) et quand ils sont remerciés, comme Jean-Marie Messier, c'est une prime de départ de 12 millions d'euros qu'ils perçoivent (Protestations sur les bancs du groupe de l'UMP).

Votre politique encourage cette dérive, insultante pour tous ceux qui souffrent dans notre pays, et elle va au devant des exigences du MEDEF et de la finance (Applaudissements sur les bancs du groupe C. et R. et du groupe socialiste).

C'est vrai en matière de réforme de la fiscalité, ou de remodelage du droit du travail, avec notamment le dossier des 35 heures. C'est vrai encore en matière de contestation du service public et d'atteinte au droit de grève, sous couvert d'instauration d'un service minimum. C'est vrai, enfin, en matière de retraites, où l'irruption généralisée des fonds de pension à l'américaine n'attend plus que votre feu vert pour se réaliser.

Tout entier tourné vers les classes les plus favorisées de notre société, c'est bien un nouvel « Enrichissez-vous ! » que votre Gouvernement s'apprête à lancer aux tenants du libéralisme. Vous reprenez au fond la formule d'un ministre des finances du XIXe siècle : « Faisons payer les pauvres, ils sont plus nombreux ». C'est votre choix de société inspiré du modèle américain. Il conduit à des reculs sévères de civilisation. Nous ferons tout pour résister avec le mouvement social et progressiste de notre pays (Vives protestations sur les bancs du groupe de l'UMP).

Les cibles que vous désignez sont également bien connues, et vos premières mesures sont les signes avant-coureurs d'une France sécuritaire dans le droit fil du sommet de Séville sur l'immigration. C'est pourquoi nous vous mettons fermement en garde contre les surenchères auxquelles menace de conduire le populisme électoral d'avril et de juin.

La sécurité et la tranquillité de vie auxquelles aspirent légitimement nos compatriotes ne méritent d'être traitées ni par l'exaspération des peurs ni par l'aggravation des divisions. En réclamant le doublement, en cinq ans, des budgets de la justice et de la police, les parlementaires communistes, avec d'autres, vous rappellent au devoir d'aller jusqu'au bout des actions de prévention, de protection, de lutte sans merci contre la délinquance ou le banditisme, contre la drogue, les fraudes et le blanchiment de l'argent. Et n'oublions pas que la première insécurité, c'est l'insécurité sociale.

De même, sur le plan international, vous trouverez des députés communistes et républicains déterminés à agir dans le sens de coopérations approfondies et équitables pour le rapprochement et l'amitié des peuples, pour le désarmement et pour la paix.

Notre pays doit contribuer à imposer l'arrêt des violences d'Etat et des actes de terrorisme dont sont victimes les peuples palestinien ou israélien, pour les aider à trouver une issue politique dans le respect de l'intégrité de chacun. Qu'attend-on pour agir, mettre en place une force d'interposition au Moyen-Orient ? La France a aussi son rôle à jouer au sein de l'Europe, pour empêcher les Etats-Unis de faire la guerre là où sont leurs intérêts particuliers, dans le mépris le plus absolu de populations déjà affaiblies.

Ces derniers jours, l'Union européenne a rappelé à la rigueur budgétaire et sociale. Votre gouvernement et votre majorité, chacun le sent bien, ne demandent qu'à obtempérer. Nous soutiendrons une autre orientation de la construction européenne, une Europe sociale, démocratique et citoyenne, _uvrant pour une alternative de développement solidaire.

Ces exigences nécessitent la remise en cause du pacte de stabilité, la réforme de la politique agricole commune, la renégociation des traités européens, dont celui de Maastricht, et la revalorisation du rôle du Parlement en laissant toute leur place aux parlements nationaux.

Cette nouvelle orientation est indispensable à la mise en place, en France, de véritables réformes de fond dans tous les secteurs de la vie économique, sociale et citoyenne.

Cela concerne d'abord l'emploi, l'éradication du chômage, une nouvelle répartition et utilisation des richesses au service d'une politique audacieuse ; une politique de croissance adossée à une relance de la consommation, qui prendrait appui sur une nouvelle politique industrielle de la France, une politique de soutien actif aux dépenses de formation, de qualification et d'éducation, de santé et de logement ; une politique de justice sociale, avec la revalorisation du travail et des salaires et une révision à la hausse des prestations familiales, des minima sociaux, des retraites et des pensions de réversion, des allocations spécifiques.

Un député UMP - Pourquoi ne pas l'avoir fait vous-mêmes ?

M. Alain Bocquet - Ainsi, l'interdiction des licenciements boursiers : la résorption de la précarité, la parité salariale et professionnelle entre les femmes et les hommes, l'affirmation de droits nouveaux pour les salariés dans l'entreprise, le contrôle des fonds publics, la mise en place tout au long de la vie d'un système d'emploi et de formation garantie, l'abandon du PARE, la réforme du crédit bancaire en faveur des PME-PMI, du commerce et de l'artisanat, constituent les piliers d'une telle politique générale.

Alors que les pressions s'affirment, à tous les niveaux, pour accélérer et amplifier les privatisations, nous nous opposerons résolument à toute privatisation et nous nous prononcerons pour le développement du secteur public de l'énergie, des transports, des télécommunications, de la santé, de l'éducation, de la sécurité.

Nous proposerons également d'étendre la responsabilité publique à de nouveaux domaines, comme l'eau, le crédit ou l'environnement (Applaudissements sur les bancs du groupe C. et R. et sur quelques bancs du groupe socialiste).

Nous _uvrerons pour une véritable politique en faveur des jeunes, afin d'en finir avec les discriminations, le racisme et le mépris, la précarité et la mal-vie. Nous avons fait adopter, sous la précédente législature, le principe d'une allocation mensuelle d'autonomie aux 18-25 ans. Nous aurons à c_ur de faire aboutir cette proposition.

Nous serons également très présents, aux côtés du mouvement social, pour la défense de notre système de retraite par répartition, pour le droit à la retraite à 60 ans, pour la généralisation des 37,5 annuités et contre les fonds de pension, ce qui suppose l'abrogation des décrets Balladur.

Enfin, nous re-déposons, aujourd'hui même, la proposition défendue à l'automne dernier, pour ouvrir droit à la retraite avant 60 ans aux centaines de milliers de nos concitoyens ayant atteint ou dépassé les 40 annuités, après avoir travaillé souvent très dur dès leur plus jeune âge, ce qui laisserait plusieurs centaines de milliers d'emplois pour des jeunes (Applaudissements sur les bancs du groupe C. et R.).

Le droit à la santé, la réforme du financement de la protection sociale par la mise à contribution des capitaux boursiers, le développement des moyens et de l'emploi de l'hôpital public ; l'instauration d'un cinquième risque géré par la Sécurité sociale pour faire face aux différentes situations de dépendance ; le relèvement du seuil d'accession à la couverture maladie universelle ; la réforme de la loi de 1975 sur les personnes handicapées ; et le retour à l'élection, par les assurés sociaux, des administrateurs des caisses de sécurité sociale, - autant d'axes de travail à privilégier.

Un député UMP - Pourquoi ne l'avez-vous pas fait ?

M. Alain Bocquet - Parce que nous étions la minorité de la majorité ! (Vives exclamations sur les bancs du groupe de l'UMP) Nos concitoyens seront déterminés comme nous-mêmes à empêcher tout retour en arrière, nous soutiendrons une protection sociale de haut niveau, ce qui implique l'abandon du plan Juppé.

Ces enjeux s'étendent à l'ensemble des aspects de la vie quotidienne, de la culture aux loisirs, du sport aux transports. Ils concernent prioritairement le logement social, victime des errances de plus de 20 ans de politique de la ville.

A cet égard, il faut moins de réunions, moins de procédure, moins d'administration tatillonne, moins de visites, moins de discours, plus de crédits mis plus rapidement à la disposition des collectivités territoriales, plus de moyens en faveur des bailleurs sociaux. La décentralisation doit franchir une nouvelle étape, avec de vrais moyens et une plus grande confiance dans les élus et les acteurs de terrain.

Il faut mettre fin à la bureaucratie française. Les citoyens étouffent sous la paperasserie, les renvois de guichet en guichet. Cela n'autorise pas pour autant, Monsieur le Premier ministre, le recours aux ordonnances de sinistre mémoire.

La politique que vous annoncez ne permettra pas de faire face aux vrais enjeux. Vous n'avez rien dit sur la spéculation boursière, ni sur les licenciements boursiers. Ne vous attaquant pas à la racine du mal, vous ne pourrez apporter les réponses attendues.

Nous aurons, par conséquent, à intervenir dans la législature qui s'ouvre, comme une force d'opposition et de résistance à des choix annoncés qui porteront atteinte aux intérêts de nos concitoyens.

Mais nous agirons également comme une force de proposition et de progrès, pour construire une alternative authentique, propice à l'essor de notre pays.

Malgré nos revers électoraux, l'existence, dans cette Assemblée, d'un groupe de députés communistes et républicains sera un point d'appui solide pour le monde du travail et de la création. Les combats de demain seront nourris par l'aspiration à plus de justice sociale, de liberté, de solidarité, de fraternité, dans un monde plus humain. « On n'arrête pas une idée dont le temps est venu » a écrit Victor Hugo. Non, « la commune n'est pas morte ! » (Applaudissements sur les bancs du groupe C. et R. et du groupe socialiste).

M. Roger-Gérard Schwartzenberg - La démocratie a ses règles et l'alternance a ses devoirs ; le 16 juin, le suffrage universel a tranché ; il vous a accordé une large victoire, nous ne pouvons que le reconnaître et vous souhaiter bonne chance dans cette nouvelle fonction - puisqu'il s'agit du destin de la France (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

Votre déclaration de politique générale se veut tranquillisante, sinon sédative (Protestations sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF). Quand vous dites « proximité, forces vives, humanisation », chacun est d'accord sur ces paroles _cuméniques. Mais est-ce là l'essentiel d'une politique ? Nous sortons d'une campagne électorale un peu cotonneuse, où certains ont semblé esquiver le débat sur des problèmes de fond - emploi, pouvoir d'achat, service public, environnement. Vous avez fait patte de velours, un peu dans le style patelin de Raminagrobis, déjà expert en communication (Protestations sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF) ; vous vous êtes limités à des propos généraux destinés à rassurer chacun et à n'effaroucher personne. Désireux de ratisser large, vous avez mené une campagne du non-dit, comme si vous recherchiez le consensus par le silence, comme si vous appliquiez la maxime du Cardinal de Bernis : « On ne sort de l'ambiguïté qu'à son détriment ».

Cette phase est terminée ; voici le temps du débat. Il est encore trop tôt pour vous juger sur vos actes, mais il est déjà possible de vous juger sur vos intentions telles qu'elles apparaissent à travers cette déclaration de politique générale.

Ce jugement se fonde sur deux critères : le respect de la justice sociale, le respect des droits du Parlement.

La législation précédente a adopté plusieurs lois qui ont renforcé la solidarité : emplois-jeunes, prime pour l'emploi, baisse équitable de l'impôt sur le revenu, CMU, allocation personnalisée d'autonomie.

Les députés RPR, UDF, DL n'ont pas adopté ces lois.

Un député UMP - Elles n'étaient pas financées !

M. Roger-Gérard Schwartzenberg - Que vont devenir ces acquis sociaux, et d'abord le financement de l'assurance-maladie, quand votre secrétaire d'Etat aux professions libérales déclare : « Il n'y a pas d'autre solution que la hausse des cotisations ; celui qui dirait autre chose serait un charlatan » ? Que va devenir le droit à la retraite à soixante ans quand votre ministre des affaires sociales déclare : « Le couperet des soixante ans est inadapté ; on n'évitera pas un allongement des durées de cotisation » ? Que vont devenir les avancées réalisées pour le développement durable, quand votre ministre de l'écologie fait d'entrée de jeu l'éloge du tout nucléaire ? Que va devenir la justice fiscale quand votre ministre du budget envisage une baisse uniforme de 5 % de l'impôt sur le revenu - qui rapportera beaucoup aux hauts revenus, très peu aux autres, et rien du tout aux 50 % de Français qui n'y sont pas assujettis ? En outre, la pérennité de la prime pour l'emploi est très incertaine puisque vous déclarez, Monsieur le Premier ministre : « Nous verrons dans l'avenir ce qu'il faudra en faire ».

Espérons donc que vous ne serez pas un Premier ministre Pénélope défaisant aujourd'hui les réformes sociales faites hier.

En ce qui concerne le respect des droits du Parlement, l'UMP contrôle tous les pouvoirs - l'Elysée, Matignon, l'Assemblée, le Sénat, le Conseil constitutionnel, le CSA. On peut se demander si le signe UMP ne veut pas dire « Un Maximum de Pouvoirs » ou « Une Monarchie Partisane » (Protestations sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

Ce monopole est sans précédent : de 1981 à 1986 et de 1988 à 1993, le Sénat faisait contrepoids. Ces pleins pouvoirs seront en outre exercés par un seul parti (Protestations sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF). Les candidats de l'UMP ont signé un acte d'allégeance ; ils ont renoncé à toute liberté de vote (Vives protestations sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF) en s'engageant à l'avance à soutenir tous les projets du Gouvernement - ce qui est analogue au mandat impératif, pourtant déclaré nul par l'article 27 de la Constitution (Vives protestations sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF ; applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe C. et R.). Vous disposerez donc d'une majorité massive, compacte et docile. Cette situation exceptionnelle rend plus que jamais nécessaire le respect des droits de l'opposition parlementaire.

Je rappelle le message du Président de la République, hier : « Une démocratie apaisée doit faire toute sa place à l'opposition ; je serai attentif au respect de cet impératif qui est au c_ur du dialogue républicain. Le pluralisme politique fait partie des principes fondateurs de notre démocratie parlementaire. La France compte plusieurs familles politiques dont chacune a son identité particulière ; de même, elle est forte de la diversité de ses départements et de ses territoires, qui enrichit le patrimoine commun de la République ». Pour que soit garantie la crédibilité du Parlement, celui-ci doit pouvoir, dans son fonctionnement, refléter véritablement ce pluralisme. Les députés des divers partis représentés à l'Assemblée doivent donc avoir les moyens de s'exprimer réellement, en particulier au travers des groupes parlementaires. Comme vous le savez, les Radicaux de gauche, les Verts, des élus démocrates et d'outre-mer veulent former un Groupe. Ils sont 17. Le Règlement fixant à 20 le nombre d'élus nécessaire, ces 17 députés siègent actuellement comme non-inscrits. Ils ont un temps de parole un peu analogue à celui des Trappistes, et sont condamnés au silence parlementaire. Cette situation n'est pas équitable ; elle empêche le PRG et les Verts de s'exprimer réellement, alors qu'ils ont totalisé 7,57 % des voix à l'élection présidentielle, soit, environ les deux cinquièmes du score du candidat de l'UMP au premier tour.

J'ai donc déposé avec MM. Ayrault, Bocquet et Cochet une proposition de résolution tendant à abaisser le seuil de 20 à 15 parlementaires pour la création d'un groupe, comme c'est le cas au Sénat. La Conférence des Présidents a repoussé son examen à octobre au motif que, de toute façon, ce groupe ne pourrait se constituer pendant la session extraordinaire de juillet, le Conseil constitutionnel disposant d'un délai de 30 jours pour examiner cette modification du Règlement après son adoption éventuelle par notre Assemblée. Cet argument est doublement erroné : il s'agit d'un délai maximum qui, en pratique, peut être beaucoup plus bref et l'article 61-3 de la Constitution dispose : «Toutefois, à la demande du Gouvernement, s'il y a urgence, ce délai est ramené à 8 jours ».

Si, comme je le pense, Monsieur le Premier ministre, vous êtes attaché au respect des droits de l'opposition parlementaire, usez de cette faculté pour que ce nouveau groupe puisse exister dès le début de cette législature.

Vous avez dit vouloir gouverner pour tous. Vous portez à coup sûr les espoirs du MEDEF (Vives protestations sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF) qui se félicite de votre programme ; vous avez la faveur des Français les plus favorisés, mais allez-vous gouverner aussi pour les classes moyennes et populaires, pour les habitants des banlieues, pour les salariés rémunérés au SMIC ? (Vives protestations sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF)

Votre personne n'est nullement en cause ; elle inspire plutôt estime et sympathie. Mais on peut douter que vous gouverniez pour tous et non pas seulement pour les classes sociales d'en-haut, même si vous parlez de la « France d'en-bas ».

Nous souhaitons une politique fondée sur les valeurs de progrès, de justice, de solidarité, de partage, de parité, d'égalité des chances. Nos électeurs nous ont mandatés pour les défendre ; ce sont aussi les valeurs de la République (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe C. et R. et sur les bancs des députés non-inscrits).

M. le Premier ministre - La campagne électorale est finie ; je suis à votre disposition pour répondre à toutes les questions qui concernent l'action gouvernementale (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

Je remercie le président Barrot d'avoir posé l'exigence de l'équilibre entre le dynamisme et la cohésion : c'est toute la difficulté de la politique moderne. Nous sommes dans une compétition mondiale, dans le cadre du marché, de l'euro - qui permet de comparer entre eux les prix des produits. Il faut faire en sorte que les énergies soient à la hauteur des défis de la compétitivité. Nous devons jouer la carte du dynamisme.

Or évidemment, l'initiative, le dynamisme laissent sur la route un certain nombre de Français qui ont besoin de la cohésion sociale comme première valeur de notre équilibre républicain.

N'opposons pas toujours l'énergie économique à l'énergie sociale : il faut avancer sur les deux plans ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF) La meilleure façon de développer la cohésion sociale, c'est encore de fortifier l'activité économique ! Nous devons être attentifs, voire très sévères à l'égard de ceux qui ne respectent pas les salariés et qui les mettent dans des situations inhumaines ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF) Tout le monde nous trouvera déterminés à faire respecter les salariés.

Je remercie le président Barrot de sa formule sur le « jacobinisme social ». En effet, nous devons faire en sorte que le dialogue social, sur le terrain, soit plus intense, plus fertile en contrats - qui nous permettraient d'éviter de nombreuses difficultés. Cela ne signifie pas que l'Etat n'assumera pas ses responsabilités, dès lors que le dialogue social sera sans issue. Mais nous voulons faire en sorte que ce dialogue précède toute décision de l'Etat.

Je veux dire à M. Bayrou que j'ai noté avec beaucoup d'intérêt ses remarques sur la réflexion institutionnelle. Je crois en effet que nous arrivons au bout d'une certaine route, et que nous sommes souvent confrontés à une situation d'impuissance publique. Il faut trouver de nouvelles formes d'exercice de la puissance publique, et cette réflexion concerne toutes les responsabilités, nationales, mais aussi locales. Nous avons souvent le sentiment aujourd'hui que les mécanismes ne répondent plus, que la barre ne donne plus sa direction au navire. Il faut inventer de nouvelles formes de prise de responsabilité, pour redonner des marges d'efficacité à toutes nos structures, notamment aux plus lourdes, qui parfois oublient leur mission.

Cette tâche est lourde, car la situation actuelle est difficile et l'attente de l'opinion est forte. Si j'assume ces responsabilités avec tout le c_ur et toute l'énergie que je peux y mettre, c'est parce que cette attente est à mes yeux le meilleur moteur de l'action publique. Puisque vous avez parlé de navires, permettez-moi de rappeler une rencontre avec la navigatrice Isabelle Autissier. Evoquant les grandes difficultés qu'elle avait connues sous les quarantièmes rugissants, quand son bateau avait explosé et qu'elle avait dû attendre des jours entiers les secours, je lui ai demandé comment elle avait fait pour tenir, pour résister à la peur. Elle m'a répondu : « je savais que ceux qui m'aiment avaient confiance ». Je sais qu'il y a des Françaises et des Français qui ont confiance (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF). Et c'est cette confiance qui peut faire de notre Gouvernement « une force qui va », et qui sait où elle va !

Je le dis à M. Hollande, je tiens vraiment à ce que les relations entre le Gouvernement et l'opposition soient apaisées. Travaillons tous à établir cette sérénité. Les Français ont exprimé leur choix ; mais je ne suis pas à la tête d'un Gouvernement qui sait tout et qui veut tout faire ! Je souhaite qu'à cinq cent soixante-dix-sept nous soyons plus forts qu'à quarante, et que nous réfléchissions ensemble. D'autant que nous avons souvent des objectifs communs. Ainsi vous évoquez la politique sociale. Nous sommes tous attentifs aux difficultés sociales que rencontrent de nombreux Français. Mais la réponse à ces difficultés appelle une action horizontale du Gouvernement. L'injustice sociale a en effet de nombreuses causes : elle trouve parfois sa source dans l'insécurité, parfois dans le revenu, ou dans la formation. Notre détermination à obtenir des résultats en matière de politique sociale est très forte. Or je constate que, depuis des années, bien des mécanismes ne donnent pas les résultats attendus. Il faut donc en trouver d'autres. Dans la formation professionnelle, par exemple, beaucoup d'argent circule, sans que les gens trouvent toujours les outils de formation qui leur permettraient de s'adapter à l'emploi. Il y a donc beaucoup de travail à faire, et ce travail nous concerne tous.

Vous demandez, Monsieur Hollande, comment nous nous y prendrons sur le plan budgétaire. Et il est vrai qu'à cet égard la situation est difficile. La France, qui annonçait au sommet de Barcelone un déficit de 1,85 %, sera en fait plus près de 2,6 %.

Devant nos partenaires européens nous devons dire la vérité sur notre situation. Mais ils savent bien ce qu'il en est de notre déficit. La question est de savoir si nous sommes capables de mener les réformes qui rendront possibles d'autres équilibres financiers. Et à cet égard, je suis aujourd'hui optimiste : si nous convainquons nos partenaires que nous sommes résolus à traiter des questions aussi importantes que la décentralisation ou les retraites, nous obtiendrons leur confiance (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

Je veux enfin rassurer M. Schwartzenberg sur l'action du Gouvernement. Nous sommes engagés dans une politique de décentralisation qui se veut active, mais aussi attentive, envers les élus ainsi que les citoyens. Si nous voulons en effet réaliser des progrès dans l'exercice de la puissance publique, il faut que deux valeurs soient renforcées : la responsabilité et l'évaluation. Et si nous défendons la décentralisation, c'est moins pour organiser autrement les pouvoirs que pour mettre au c_ur du système les femmes et les hommes qui assument des responsabilités, et doivent être évalués pour progresser.

M. Bocquet a formulé des propositions que nous connaissons, mais que j'ai écoutées avec attention. S'il n'a pu les faire avancer quand il représentait la minorité de la majorité, peut-être pourra-t-il les faire progresser maintenant qu'il constitue la minorité de la minorité... (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF). Pour notre part nous serons attentifs aux petits groupes comme aux grands, et à chacun de vous, car vous êtes tous, à égalité, les représentants des Français. Le Gouvernement sera attentif à toutes les propositions qui émaneront du Parlement (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

M. le Président - Le Premier ministre ayant engagé la responsabilité du Gouvernement en application de l'article 49, alinéa premier, de la Constitution, je vais mettre aux voix l'approbation de sa déclaration de politique générale. En application des quatrième et cinquième alinéas de l'article 65 du Règlement, il doit être procédé par scrutin public à la tribune.

Le scrutin, ouvert à 18 heures 25, est clos à 19 heures 35.

A la majorité de 374 voix contre 173 sur 549 votants et 547 suffrages exprimés, la déclaration de politique générale du Gouvernement est approuvée (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'UMP et du groupe UDF).

REQUÊTES EN CONTESTATION D'OPÉRATIONS ÉLECTORALES

M. le Président - En application de l'article L.O. 181 du code électoral, j'ai reçu du Conseil constitutionnel communication de quatorze requêtes en contestation d'opérations électorales.

Conformément à l'article 3 du Règlement, cette communication est affichée et sera publiée à la suite du compte rendu intégral de la présente séance.

DÉCLARATION D'URGENCE

M. le Président - J'ai reçu de M. le Premier ministre une lettre m'informant que le Gouvernement déclare l'urgence du projet de loi portant amnistie.

Acte est donné de cette communication.

Prochaine séance mardi 9 juillet, à 15 heures.

La séance est levée à 19 heures 40.

                  Le Directeur du service
                  des comptes rendus analytiques,

                  François GEORGE

ORDRE DU JOUR
DU MARDI 9 JUILLET 2002

A QUINZE HEURES : SÉANCE PUBLIQUE

1. Fixation de l'ordre du jour.

2. Discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi portant amnistie (n° 19).


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