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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2002-2003 - 8ème jour de séance, 20ème séance

3ème SÉANCE DU MERCREDI 16 OCTOBRE 2002

PRÉSIDENCE de M. François BAROIN

vice-président

Sommaire

      LOI DE FINANCES POUR 2003 -première partie- 2

      ARTICLE PREMIER 2

      ART. 2 3

      APRÈS L'ART. 2 12

      ORDRE DU JOUR DU JEUDI 17 OCTOBRE 2002 20

La séance est ouverte à vingt et une heures trente.

LOI DE FINANCES POUR 2003 -première partie-

L'ordre du jour appelle la discussion de la première partie du projet de loi de finances pour 2003.

M. le Président - J'appelle maintenant, dans le texte du Gouvernement, les articles de la première partie du projet de loi.

ARTICLE PREMIER

M. Augustin Bonrepaux - Nous engageons l'examen des articles sans avoir obtenu beaucoup de réponses aux questions que nous avons posées au cours de la discussion générale.

M. Jean-Pierre Brard - C'est une litote !

M. Augustin Bonrepaux - J'observe que, sur les bancs de la majorité, tout le monde recommande de réduire les impôts mais que, dans le même temps, sur les mêmes bancs, certains s'inquiètent des conséquences de cette baisse pour les services publics. N'avons-nous pas entendu un collègue savoyard dire que la baisse des emplois à l'Education nationale risquait de provoquer la fermeture de classes en zones rurales, et que la réduction des effectifs de l'équipement aurait une incidence sur la sécurité routière ?

Vous obstinerez-vous donc à prétendre faire croire que l'on peut indéfiniment réduire les impôts sans que cela ait de conséquences ? Il faut rappeler ce qui est : la fiscalité assure la solidarité, et garantit les services publics.

Il convient de gérer rigoureusement les deniers publics, et nous y veillerons dans le cadre de la MEC. Mais il faut aussi préserver la solidarité nationale, notamment à l'égard des plus défavorisés.

Comment, donc, engager un débat sur un texte sans savoir ce qu'il contient ? Je vous le demande à nouveau : si 20 000 contrats emploi-solidarité sont effectivement prévus, par qui et comment seront-ils financés ? Comment remplacerez-vous les maîtres d'internat et les surveillants d'externat, et avec quels moyens ? S'agissant de l'APA, dont le Gouvernement a lui-même convenu que c'est une bonne mesure, quelle sera la part de l'Etat dans son financement ? L'absence de réponse signifie-t-elle que le Gouvernement entend laisser à la charge des collectivités locales l'intégralité d'un financement conçu pour être paritaire ? Il est exact que le succès de l'APA a dépassé les prévisions, ce qui démontre l'ampleur des besoins. J'ajoute que cette mesure est créatrice d'emplois. Une réponse précise est nécessaire, car les collectivités territoriales doivent préparer un budget sincère.

M. Alain Lambert, ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire - La discussion des articles a été précédée d'une discussion très nourrie...

M. Jean-Pierre Brard - Mais trop générale, justement !

M. le Ministre délégué - ...et le Gouvernement donnera les explications qui s'imposent au fil de l'examen des articles. Je vous rappelle toutefois que nous engageons l'examen de la première partie du projet, relative aux recettes ; s'agissant des dépenses auxquelles vous avez fait allusion, vous obtiendrez toutes les réponses que vous attendez de mes collègues Fillon, Ferry et Falco. Je ne refuse nullement de répondre aux questions des députés, mais nos travaux doivent se faire dans l'ordre. Commençons donc par traiter des recettes, comme il se doit.

M. Didier Migaud - Vous savez fort bien, Monsieur le ministre, que la partie « dépenses » du budget est contrainte par la partie « recettes ».

Pourtant, deux ministres, hier, ont annoncé des collectifs à venir, le premier portant sur des CES supplémentaires, le second visant à permettre de substituer aux surveillants, dans les établissements d'enseignement, d'autres personnels. Nous souhaitons donc savoir si le niveau des recettes votées à l'article premier sera bien le montant définitif. Serait-ce que les propositions de dépenses supplémentaires faites par les ministres s'expliquent par leur méconnaissance de la procédure budgétaire ? (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

M. François Grosdidier - Quel mépris !

M. Didier Migaud - Ou bien est-ce, comme nous avons tendance à le penser, que l'on nous cache quelque chose ?

Mme Christine Boutin - Pathétique !

M. Didier Migaud - ...Ou encore les ministres se sont-ils avancés sans avoir d'assurances de Bercy et de Matignon ?

M. le Ministre délégué - Je souhaite que ce débat s'engage dans un esprit de sérieux et de responsabilité. Je tiens donc à rappeler que le niveau de prélèvement en France est le deuxième plus haut en Europe. Si, avec une telle retenue sur les revenus des Français, l'Etat ne parvient pas à assurer ses missions, c'est que l'utilisation des ressources n'est pas à son meilleur. Le montant des recettes sera, bien sûr, définitif, lorsque la représentation nationale l'aura autorisé par son vote, auquel vous vous associerez, je n'en doute pas (Sourires). Et grâce à ce niveau autorisé, l'Etat assumera toutes ses responsabilités (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

L'article premier, mis aux voix, est adopté.

ART. 2

M. Didier Migaud - L'examen de cet article nous donne l'occasion de dénoncer une nouvelle fois l'injustice de vos propositions fiscales. Uniformes, les baisses d'impôt sur le revenu profiteront essentiellement aux tranches les plus hautes, lesquelles auront tendance à épargner le surcroît de pouvoir d'achat que vous leur offrez plutôt que de le consommer. Toutes les mesures nouvelles que comporte cet articles sont ciblés sur une partie seulement de nos concitoyens...

M. François Grosdidier - Elles sont ciblées sur les contribuables !

M. Didier Migaud - C'est faire offense à ceux de nos compatriotes qui ne paient pas l'impôt sur le revenu que de dire qu'ils ne contribuent pas à l'effort collectif. Pensez à la TVA ! Les quatre cinquièmes des baisses d'impôt profiteront à quelques dizaines de milliers de ménages (Protestations sur les bancs du groupe UMP). Vous auriez été mieux inspiré de soutenir la consommation par des mesures susceptibles d'accroître le pouvoir d'achat des plus modestes, plutôt que de stimuler l'épargne des plus favorisés par des dispositions partielles et catégorielles.

M. Jean-Pierre Brard - Partielles et partiales !

M. Jean-Claude Sandrier - Le nouveau barème de l'IR que décrit cet article d'inspiration purement idéologique (Protestations sur les bancs du groupe UMP), s'appuie sur un raisonnement biaisé. Au prétexte de revaloriser le pouvoir d'achat des classes moyennes et populaires - lequel a effectivement marqué le pas au cours de la décennie précédente -, le Gouvernement fixe un barème injuste et sans effet direct sur la consommation. M. Mer a du reste reconnu en juillet dernier devant notre commission que, dans l'hypothèse très improbable où l'intégralité des baisses d'impôt consenties aux ménages iraient alimenter la consommation, le surcroît de celle-ci se limiterait à 0,15 %, et le gain de PIB à 0,08 point en année pleine.

Mais chacun sait bien que l'argent libéré par les allégements d'impôt ira pour l'essentiel à l'épargne. Pour reprendre la formule d'un universitaire, « le véritable gaspillage des deniers publics, c'est de libérer l'argent vers une épargne qui peut partir en fumée » à la Bourse et dans les autres circuits de la spéculation financière.

Mme Christine Boutin - Il n'y a pas que les riches qui épargnent et investissent !

M. Jean-Claude Sandrier - Le taux d'épargne des ménages français culmine déjà à plus de 7 % et devrait encore s'apprécier cette année du fait de la baisse supplémentaire de 5 % de l'IR votée en juillet dernier dans la loi de finances rectificative pour 2002. Votre dogmatisme fiscal vous aveugle...

M. Marc Laffineur - Cinq minutes !

M. le Président - Il faudrait en effet songer à conclure.

M. Jean-Claude Sandrier - J'emprunte alors ma conclusion à Léo Ferré : « Pour que le malheur se vende, il ne reste plus qu'à en trouver la formule ». A l'évidence, le Gouvernement l'a trouvée : c'est la mondialisation libérale et la confusion entre « attractivité du territoire » et paradis fiscal !(Exclamations sur les bancs du groupe UMP) Parce qu'il s'attaque à l'impôt le plus juste qui soit, nous nous opposons à cet article.

M. Augustin Bonrepaux - On ne peut faire un dogme de la baisse de l'IR, ne serait-ce que parce qu'il s'agit de notre impôt le plus progressif et, partant, le plus juste. Et il a été assez difficile à mettre en _uvre pour qu'on ne le compromette pas au moindre retournement de conjoncture. Du reste, l'IR français est loin d'être le plus élevé en Europe (Interruptions sur les bancs du groupe UMP). Sachant que les premiers bénéficiaires de vos baisses d'impôt épargneront plutôt que de consommer, vos mesures seront aussi inefficaces qu'injustes. Profiter du collectif de juillet pour apprécier le montant de la PPE, voilà qui eût donné, en revanche, un coup de fonctionnement à la croissance et répondu à vos attentes en matière de rentrées de TVA. Las, à l'heure où se profile un plan de rigueur et où la conjoncture ne donne aucun signe d'amélioration, vous n'aidez pas les catégories qui en auraient vraiment besoin.

M. Marc Laffineur - Je n'avais pas prévu d'intervenir, mais je crois utile, compte tenu de ce que je viens d'entendre, de dire d'emblée que ce projet de budget est équilibré (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

M. Didier Migaud - Le déficit aurait-il disparu ?

M. Marc Laffineur - Il est vrai que des baisses d'impôt sur le revenu sont prévues, et il y a tout lieu de s'en féliciter car elles profitent tout de même aux 17 millions de foyers fiscaux assujettis ! Si l'on veut développer l'emploi, il faut renforcer le pouvoir d'attraction de notre pays et tout faire pour que ceux qui créent de la richesse ne s'expatrient plus.

Equilibré, ce budget l'est fondamentalement puisqu'à côté des baisses d'IR, nous harmonisons par le haut les six SMIC que vous nous avez légués ! En trois ans, le SMIC le plus bas s'appréciera ainsi de près de 15 % (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe UMP). Parallèlement, nous avons créé les contrats jeunes...

M. François Grosdidier - Et ce sont des CDI !

M. Marc Laffineur - ...et si vous alliez encore dans nos quartiers difficiles (Protestations sur les bancs du groupe socialiste), vous sauriez que ce dispositif y est très attendu.

Quant à la PPE, elle augmente dans ce projet de budget...

M. Augustin Bonrepaux - D'où sortez-vous cela ? Il faut parler sérieusement ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

M. Marc Laffineur - Enfin, vous oubliez de dire que, pour la première fois depuis bien longtemps, l'aide au développement des pays en difficulté ne va pas diminuer...

M. Didier Migaud - Aucun rapport !

M. François Grosdidier - Tartuffe !

M. Marc Laffineur - ...alors que vous l'aviez amputée de moitié en cinq ans ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Pierre Brard - Nous ne sommes pas venus pour rien, puisque M. Laffineur, dans un accès d'ingénuité attendrissant de la part d'un élu aussi expérimenté, nous a appris ce soir que le budget était « équilibré »... (Rires sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

Vous avez parlé de rupture, Monsieur le ministre, mais c'est surtout avec la démagogie pontificale qu'il faut rompre, en défendant l'impôt, fondement de notre Etat républicain, qui permet de financer la politique de solidarité.

M. François Grosdidier - Avec 90 % de prélèvements ?

M. Jean-Pierre Brard - A l'évidence, nous n'avons pas les mêmes mandants...

C'est grâce à l'impôt qu'en dépit de la fracture sociale, l'on peut encore se faire soigner quelle que soit sa fortune, envoyer ses enfants à l'école, emprunter les transports en commun. Il est donc essentiel de préserver ce lien entre le citoyen et l'Etat. Mais, pour que l'impôt soit reconnu comme légitime, il doit être juste, transparent et progressif. On en est hélas bien loin !

M. Laffineur parle de ceux qui paient l'impôt, mais s'est-il demandé pourquoi certains n'en paient pas ? Et, quand Mme Boutin évoque ceux qui spéculent, elle ne pense quand même pas aux érémistes...

Mme Christine Boutin - Je pensais aux petits porteurs.

M. Jean-Pierre Brard - Ils doivent être défendus, en effet, mais vous, vous les avez ruinés (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) avec Eurotunnel, France Télécom, Vivendi, Alcatel et bien d'autres...

M. François Grosdidier - Et les actionnaires de l'Humanité ?

M. Marc Laffineur - Et les salariés de la place du Colonel Fabien ?

M. Jean-Pierre Brard - Monsieur Laffineur, tout comme vous ignorez que ce budget n'est pas équilibré, vous ne paraissez pas savoir que je n'ai plus de liaison directe avec la place du Colonel Fabien... (Sourires)

M. François Grosdidier - Vous intervenez au nom des communistes !

M. Jean-Pierre Brard - Oui, car la défense de la justice sociale a bien une couleur politique, et elle vient plutôt de nos rangs (Protestations sur les bancs du groupe UMP). Dans certaines circonstances de notre histoire, on a vu que ceux qui partageaient les valeurs fondamentales de notre Etat savaient se retrouver...

Vous, vous vous faites les défenseurs de ceux qui trahissent l'intérêt du pays, de ceux qui s'expatrient parce qu'ils refusent de débourser le moindre sou au titre de la solidarité nationale ! Car de l'argent, il y en a : il suffit de regarder du bon côté. D'ailleurs, le directeur de la Caisse des dépôts ne vous y invitait-il pas en évoquant les centres offshore, qui détiennent 5 milliards d'actifs, soit cinq fois plus que tout l'argent de la drogue, et où maints fraudeurs du fisc placent le leur, y compris certaines multinationales françaises que vous connaissez, Monsieur le ministre, et dont nous aimerions que vous nous donniez les noms...

Mme Muriel Marland-Militello - Assez ! Retournez donc à vos chères économies de marché !

M. Daniel Garrigue - On oublie un peu la particularité de notre pays qui a exonéré un grand nombre de petits contribuables de l'impôt sur le revenu tout en alourdissant la charge de ceux qui continuaient à être assujettis. Il faut aujourd'hui sortir de cette lutte des classes artificielle, en allégeant quelque peu le fardeau de ces derniers (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

M. Maurice Leroy - L'amendement 165 est défendu.

M. Jean-Claude Sandrier - En rétablissant les tranches à 48 et à 54 %, l'amendement 95 vous procurerait des recettes supplémentaires, Monsieur le ministre. Notre démarche est pleinement conforme à la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, aux termes de laquelle « chacun contribue aux charges publiques à concurrence de ses facultés ». En renforçant la progressivité de l'impôt sur le revenu, cet amendement répond en outre à un objectif de justice sociale. Le taux d'imposition moyen serait de 30 %, soit l'équivalent de celui de nos partenaires européens. Cela compenserait également quelque peu la sous-imposition des revenus financiers, dont profitent souvent les contribuables situés dans ces deux tranches.

Cet amendement présenterait enfin l'avantage d'éviter des coupes dans les dépenses publiques, car les recettes de 1,7 milliard d'euros ainsi dégagées pourraient, par exemple, être utilisées pour couvrir le surcoût causé par le succès de l'allocation personnalisée à l'autonomie.

L'argument de la fuite des talents me paraît fallacieux, en même temps qu'immoral. J'ai du mal à admettre que nos citoyens les moins mal lotis puissent quitter le pays par simple opportunisme fiscal.

M. François Grosdidier - C'est pourtant une réalité !

M. Jean-Claude Sandrier - Les députés communistes et républicains estiment que ces dérives, qui renforcent l'injustice fiscale, doivent être stoppées.

M. Eric Besson - Nos amendements sont mis en discussion commune avec l'amendement 165 de M. Albertini, bien qu'ils soient de nature fort différente.

L'amendement 216 vise ainsi à rejeter les allégements fiscaux proposés par le Gouvernement, ce qui dégagerait les moyens nécessaires au financement des dépenses au profit des ménages les plus modestes.

M. Brard a raison : il faut défendre l'impôt républicain. Vos allégements ne répondent à aucun souci de justice fiscale puisqu'ils profiteront d'abord aux plus fortunés. De ce fait, ils n'auront aucune efficacité économique, la propension à l'épargne croissant avec le revenu. Il ne s'agit pas là d'un débat esthétique entre Vénus callipyges et Vénus efflanquées, mais d'actes lourds de conséquences dramatiques pour la croissance et l'emploi.

M. Didier Migaud - Très bien !

M. Augustin Bonrepaux - Je m'étonne que notre amendement 209, qui est de repli, soit également mis en discussion commune, puisqu'il tombera si d'aventure l'amendement 216 était adopté.

M. le Président - C'est bien pourquoi ils sont en discussion commune.

M. Augustin Bonrepaux - A droite, on nous dit, en substance : il est injuste de faire payer ceux qui en ont les moyens, il faut que l'impôt sur le revenu soit payé par tous. Or c'est précisément dans cette direction que s'engage le Gouvernement ! Il réduit aujourd'hui l'impôt sur les revenus les plus élevés, mais il laisse entrevoir l'adoption prochaine d'un plan de rigueur et, quand ces temps seront venus, nous ne doutons pas qu'il finira par faire payer cet impôt par tous (Exclamations sur les bancs du groupe UMP).

M. François Grosdidier - Mais non !

M. Augustin Bonrepaux - C'est ce que M. Garrigue appelle la justice fiscale ! Il regrette que tous ne paient pas l'impôt sur le revenu...

M. Daniel Garrigue - Ne dites pas cela ! Dois-je rappeler que c'est le gouvernement Balladur qui a exonéré les petits contribuables ?

M. Augustin Bonrepaux - Pour notre part, nous maintenons que l'impôt sur le revenu est le plus juste, parce que progressif. Et à ce propos, il faut s'élever contre l'emploi du terme « confiscatoire » : le taux de 50 % ne s'applique qu'à une tranche de revenus et c'est induire en erreur que d'en parler comme s'il s'appliquait à l'ensemble. La moyenne des prélèvements n'excède pas 25 % ! Par ailleurs, c'est une chance que de payer l'impôt : cela signifie qu'on perçoit des revenus suffisants (Exclamations sur les bancs du groupe UMP).

Vous prétendez que nos taux seraient les plus élevés d'Europe. Or il suffit de lire les rapports existants pour savoir qu'il n'en est rien. Si vous voulez réduire l'impôt acquitté par les plus aisés, c'est pour transférer la charge aux plus modestes sous prétexte de la mieux répartir. Le confirment par exemple la réduction des crédits des services d'équipement et le projet, annoncé par le ministre délégué, de transférer aux collectivités des ressources... en baisse et d'ores et déjà insuffisantes : par ce moyen, vous pourrez en effet réduire l'impôt sur le revenu, mais vous ferez augmenter les impôts locaux et la TVA, qui sont payés par tous les contribuables ! C'est pourquoi nous nous opposons à cette réduction de 1 %.

M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances - La commission a repoussé les quatre amendements. Nous avons pris devant les Français l'engagement de diminuer les impôts, et c'est ce que nous voulons faire, dans une proportion substantielle : 5 % en 2002, puis 6 % en 2003.

L'amendement de M. Albertini présente plusieurs inconvénients. En premier lieu, il vise à moins imposer les revenus les plus faibles ; or la réduction de 6 % fera que 500 000 foyers supplémentaires vont bénéficier de la décote, de sorte que 300 000 d'entre eux cesseront d'être imposables. Les bas revenus bénéficieront donc très notablement de la baisse du barème telle que le Gouvernement la propose.

En second lieu, cet amendement remet en cause la progressivité du barème, qui sera au contraire maintenue avec une réduction homogène de 6 %.

Enfin, l'amendement rétablit un taux supérieur à 50 %, que l'opposition, de son côté, veut relever. Or on sait que ces taux, confiscatoires, provoquent une véritable hémorragie de talents : jeunes cadres supérieurs, créateurs d'entreprises, sportifs, artistes, chercheurs et même ce que nous avons de meilleur, c'est-à-dire nos top-models ! (Sourires)

M. François Grosdidier - Même M. Brard finira par partir !

M. le Rapporteur général - Pendant cinq ans, nous avons demandé au ministère des finances des études sur le sujet. En vain, sauf en 1998 : mon prédécesseur a réussi a en obtenir une qui confirmait le rôle joué par le taux marginal dans ces départs.

La baisse générale de 6 % aura précisément pour effet de faire passer pour la première fois ce taux marginal sous la barre des 50 % et nous devons maintenir cette mesure symbolique en faveur des talents.

M. le Ministre délégué - Je suis convaincu, moi aussi, des vertus citoyennes de l'impôt sur le revenu, mais ces vertus ont été cultivées à un tel point qu'on en arrive à décourager les redevables - y compris, en effet, parmi les plus charmants -, qui se sauvent. Voulons-nous retenir en France ceux qui inventent et créent, y compris des emplois ? Telle est la question, éminemment politique. Le précédent gouvernement, qui en a d'ailleurs subi les conséquences, a clairement opté pour une accentuation de la progressivité. Ceux qui le soutenaient nous reprochent de ne pas faire de même aujourd'hui, mais comment le ferions-nous ? Cette accentuation a des effets connus et mesurables.

On peut faire siennes les motivations de M. Albertini mais, si l'on soumet tous les Français à l'impôt, il faudra recouvrer des montants très faibles, ce qui aura un coût très élevé. D'autre part, certains avantages sociaux sont reconnus aux non-redevables : si ceux-ci sont soumis à l'impôt, il faudra « reconfigurer » l'ensemble de ces avantages. L'amendement présente donc des mérites du point de vue de la citoyenneté, mais il ne paraît guère opératoire et je suggère donc à M. Albertini de le retirer - d'autant que chaque Français acquitte déjà un impôt sur le revenu au titre de la CSG et de la CRDS.

Monsieur Sandrier, vous ne serez pas surpris que je m'oppose à votre logique, contraire de celle du Gouvernement. Mais je vous précise que la baisse des taux du barème s'appliquera aux revenus du travail et aux retraites, qui représentent 93 % des revenus imposables au barème, mais non aux plus-values et aux revenus de placements financiers.

Monsieur Besson, il faut que le groupe socialiste assume ses responsabilités lorsqu'il propose d'augmenter l'impôt de 5 % pour tous ! C'est en effet à quoi revient, selon moi, votre amendement. Les Français seront sans doute heureux de savoir à quoi ils ont échappé, grâce à leur vote !

L'amendement de repli défendu par M. Bonrepaux n'a sans doute pas le même inconvénient, mais il est également incompatible avec notre projet, dont nous sommes fiers. Les Français ont clairement tranché, ils attendent ce texte : je vous prie donc de l'adopter en l'état.

M. Marc Laffineur - Ce budget rompt clairement avec le passé. Si l'on veut rendre à la France sa compétitivité, il faut baisser l'impôt, d'autant que, compte tenu de la CSG et de la RDS, les Français les plus aisés sont en réalité imposés à 60 %, d'où l'expatriation massive de ceux qui créent richesses et emplois. Par conséquent, nous voterons contre ces amendements.

M. Jean-Pierre Brard - Nous avons voté pour Jacques Chirac au second tour, mais, ce faisant, nous ne vous avons pas donné mandat pour faire ce que vous faites !

M. le Rapporteur général - Et les législatives ?

M. Jean-Pierre Brard - Leur résultat est l'effet de la vague du 5 mai : il ne traduit pas un mandat véritable, surtout si l'on tient compte du taux d'abstention (Exclamations sur les bancs du groupe UMP). Si vous continuez de la sorte, nous avons les moyens que nous offre le Règlement pour faire durer le débat ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

M. François Grosdidier - Pas de chantage !

M. Jean-Pierre Brard - Lorsque la question d'un « coup de pouce » au SMIC s'est posée, la réponse a été « niet », mais lorsqu'il s'agit de défendre les privilégiés, vous ne manquez jamais d'énergie ! Et quant aux « talents » sans morale qui quittent le pays parce qu'ils refusent d'accomplir leur devoir de solidarité, ils sont indignes de la nation française ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP)

M. Marc Laffineur - Et Georges Marchais ?

M. Jean-Pierre Brard - Oui, il faut avoir le courage de le dire : il y a dans notre pays, hélas, une certaine tradition. Coblence, ce n'était pas à la suite de la Terreur, mais immédiatement après l'abolition des droits féodaux ! Et cela continue...

Le ministre n'est même pas en mesure de nous dire de combien de personnes il s'agit, et le fait même que le rapporteur général lui demande des informations sur ce sujet prouve bien qu'il ne les a pas ! Il y a quelques années, notre ambassadeur à Londres estimait leur nombre à 200 tout au plus, et précisait qu'ils ne se plaignaient pas tant de l'impôt sur le revenu que de l'impôt sur la fortune, pourtant revu et corrigé par M. Juppé...

L'ISF est légitime, et pourrait rapporter davantage si son assiette était élargie, intégrant les biens professionnels et les _uvres d'art, quitte à réduire son taux pour la tranche la plus faible. La vérité, c'est que vous êtes du côté des privilégiés et que vous vous battez becs et ongles pour eux ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

M. Didier Migaud - M. Laffineur a raison : c'est bien un budget de rupture, mais avec la justice sociale et fiscale, d'où une aggravation inévitable de cette fracture sociale, dont il me semblait pourtant que la réduction était la priorité d'un ancien candidat à l'élection présidentielle...

M. François Grosdidier - Elle figurait dans sa profession de foi du second tour !

M. Didier Migaud - Le rapport du Gouvernement sur les prélèvements obligatoires montre clairement que, contrairement à ce qu'il affirme par ailleurs, les socialistes ont baissé ces prélèvements.

M. Marc Laffineur - Ils ont atteint un taux record en 2001 !

M. Philippe Auberger - Même M. Fabius affirmait que vous seriez battus à cause de votre excès de fiscalité !

M. Didier Migaud - Ce qui nous distingue de vous, c'est que nous avons baissé l'impôt sur le revenu de façon différenciée, en veillant à ce que tout le monde soit concerné, et que nous avons instauré la prime pour l'emploi pour toucher aussi les personnes non imposables, alors que vous réservez l'essentiel du bénéfice de vos allégements à quelques milliers de familles ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

Autre différence entre nous : tout en baissant l'impôt, nous supprimions des niches fiscales, et vous, vous les creusez de nouveau, par exemple en augmentant la réduction d'impôt liée à l'emploi de salariés à domicile - et je suis heureux, à ce propos, que la commission des finances ait fini par entendre partiellement notre argumentation sur l'injustice de cette mesure.

En ce qui concerne l'expatriation de certains « gros » contribuables, j'avais demandé un rapport au ministère de l'économie et des finances. Il ressort de ce rapport que la France reste attractive, ainsi que le confirme par ailleurs une étude d'Eurostat.

Je me réjouis, à ce propos, en tant que député de l'Isère, de l'implantation de Motorola près de Grenoble, où seront même transférés un certain nombre de salariés venus des Etats-Unis ! Nous attendons donc toujours que le Gouvernement nous fournisse une évaluation précise du nombre de ces contribuables qui, censément, auraient quitté notre pays...

M. Alain Joyandet - De grâce ne refaisons pas les élections ! Vous nous expliquez que les Français, au fond, ne voulaient pas de nous, mais ce qui est sûr, c'est qu'ils ne voulaient plus de vous ! Ils vous l'ont dit dès le premier tour de l'élection présidentielle, ils l'ont redit lors des législatives, et ils comprendraient mal que nous poursuivions la même politique qui vous a conduits là où vous êtes, c'est-à-dire dans l'opposition !

Laissez-nous au moins le temps d'essayer une nouvelle politique, qui permette à notre pays d'offrir plus d'emplois à nos concitoyens, et pour laquelle nous avons été élus ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

L'amendement 165 est retiré.

L'amendement 95, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que les amendements 216 et 209.

M. le Rapporteur général - L'amendement 27, rédactionnel, tend à réparer l'oubli des mots « ou égale ».

M. Jean-Pierre Brard - Tout un symbole ! (Sourires)

L'amendement 27, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Augustin Bonrepaux - Alors qu'il prétend vouloir abaisser le poids de l'impôt pesant sur l'ensemble des Français, le Gouvernement ne prend pas en compte la situation particulière des quelque huit millions de personnes vivant seules. Celles-ci sont en effet exclues du bénéfice du quotient familial, alors que de nombreux coûts de la vie quotidienne se révèlent proportionnellement plus élevés pour une personne seule que pour une famille. C'est pourquoi, par notre amendement 212, nous proposons de corriger le mécanisme du quotient familial.

M. le Rapporteur général - La commission a repoussé cet amendement qui introduirait une extrême complexité. Comme le terme lui-même l'indique, le quotient familial vise à prendre en compte les charges de famille. Par ailleurs, la situation financière des célibataires est extrêmement diverse. Il en est de très aisés, il en est d'autres aussi qui, cohabitant, prennent en charge à deux les dépenses communes.

M. le Ministre délégué - Cet amendement créerait une distorsion entre les couples mariés et les autres. En outre, comment distinguer entre toutes les personnes pouvant cohabiter - ascendants et descendants, frères et s_urs, étudiants en colocation -, celles qui pourraient bénéficier du régime proposé et celles qui en seraient exclues ? Pour toutes ces raisons, j'invite les auteurs de l'amendement à le retirer. A défaut, j'y serai défavorable.

L'amendement 212, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Claude Viollet - La plupart des pays occidentaux tiennent compte de la situation familiale dans le calcul de l'impôt sur le revenu, le plus souvent sous la forme d'un abattement forfaitaire. Tel était d'ailleurs le dispositif en vigueur en France jusqu'à la Libération et l'institution du quotient familial. Celui-ci, conjugué à la progressivité de l'impôt, visait à faire que l'impôt acquitté soit proportionné à la capacité contributive de chaque foyer fiscal. Les fortes disparités constatées dans les situations personnelles ont toutefois conduit le législateur de 1981 à limiter les effets du quotient familial en le plafonnant.

Des difficultés subsistent néanmoins dans l'application du dispositif en cas de divorce ou de séparation des parents. Le législateur a bien envisagé diverses hypothèses mais il n'a pas prévu par exemple le cas de la garde alternée des enfants, pourtant de plus en plus courante grâce à la loi du 4 mars 2002, et qui concernerait aujourd'hui plusieurs milliers de contribuables. Auparavant, le parent qui avait la charge des enfants percevait de l'autre parent une pension alimentaire que celui-ci déduisait de ses revenus tandis que celui-là l'ajoutait aux siens et bénéficiait de la majoration intégrale du quotient familial. En cas de résidence alternée des enfants, le parent qui autrefois versait une pension n'en verse plus et ne peut donc la déduire de ses revenus, bien qu'il assume une partie de la charge effective des enfants. Pour autant, il ne peut pas bénéficier de la majoration du quotient familial. En revanche, l'autre parent, qui certes ne perçoit plus de pension, en conserve, lui, le bénéfice intégral.

Dans son arrêt du 14 juin dernier, le Conseil d'Etat envisage plusieurs solutions pour faire cesser ce que le commissaire du gouvernement a lui-même qualifié de « traquenard fiscal. » Première solution : n'attribuer le quotient familial à aucun des deux parents, la condition de charge effective de l'enfant tout au long de l'année n'étant remplie pour aucun. Mais cela porterait à l'évidence atteinte au principe d'égalité devant l'impôt. Deuxième solution : à l'inverse, attribuer intégralement le quotient à chacun des deux parents, en se fondant notamment sur l'article 196 bis-1 du code général des impôts, puisque l'un des parents a nécessairement la charge de l'enfant au 1er janvier et que l'autre parent pourrait revendiquer le bénéfice de cet article au motif que ses charges de famille ont augmenté en cours d'année. Mais, d'une part, ce mécanisme ne pourrait au mieux jouer que la première année, et d'autre part, ce serait détourner le sens d'un article qui vise la naissance, l'adoption ou le recueil d'un enfant. Enfin, cela porterait aussi atteinte au principe d'égalité devant l'impôt puisque les couples divorcés, notamment ceux ayant choisi la garde alternée, seraient avantagés par rapport aux couples mariés. Une troisième solution serait de permettre à l'un des parents de bénéficier de l'intégralité du quotient familial tandis que l'autre pourrait déduire de ses revenus les frais qu'il a exposés pour l'entretien de l'enfant. Mais il faudrait, toujours au nom du principe d'égalité devant l'impôt, que tous les contribuables divorcés puissent déduire les frais engagés lors de l'exercice du droit de visite, quel que soit le mode de résidence de l'enfant.

M. le Président - Veuillez conclure, je vous prie.

M. Jean-Claude Viollet - Une quatrième solution serait d'attribuer la majoration du quotient en alternance un an sur deux à chacun des deux parents. Le Conseil d'Etat en a retenu une cinquième, relativement simple ; si la convention conclue entre les parents et homologuée par le juge précise quel est le parent réputé avoir la charge de l'enfant, c'est celui-ci qui bénéficiera de la majoration du quotient ; si la convention est muette sur ce point ou à défaut de convention, la majoration sera divisée en deux. C'est cette solution que nous défendons par notre amendement 236, de façon à ce que notre droit fiscal rattrape notre droit civil.

M. le Rapporteur général - La commission a repoussé cet amendement, mais je remercie et félicite notre collègue pour son travail approfondi. Il faut en effet légiférer sur ce sujet, extrêmement important, auquel le Conseil d'Etat vient de consacrer un premier arrêt. Malheureusement, l'amendement n'apporte pas de réponses à toutes les questions. Lequel des deux parents pourrait bénéficier, par exemple, de la réduction d'impôt pour l'emploi d'un salarié à domicile ? Auquel des deux serait attribuée la majoration pour enfant de la prime pour l'emploi ? Il serait donc prématuré de le voter, mais nous serons très attentifs à la réponse du Gouvernement.

M. le Ministre délégué - L'évolution de notre droit de la famille exige en effet que nous adaptions notre droit fiscal et que nous le fassions de manière simple et juste. Le partage du quotient familial que suggèrent les auteurs de l'amendement n'est qu'un des aspects du problème, d'autres restant sans réponse. Le plus raisonnable est que mes services étudient la question de façon approfondie, en liaison avec votre commission des finances, avant de proposer au Parlement une solution. Au bénéfice de cet engagement de ma part, j'invite en attendant les auteurs de l'amendement à le retirer.

M. Jérôme Lambert - Ne rien décider aujourd'hui présente au moins autant d'inconvénients qu'adopter cet amendement dont le seul défaut est d'être incomplet. Nous pourrions parfaitement le voter en l'état, quitte à ce que le ministre apporte les compléments nécessaires dans les prochaines semaines. Cela marquerait une étape, et contraindrait ses services à faire diligence...

M. Jean-Claude Viollet - Si le ministre s'engage à ce qu'une solution soit trouvée d'ici l'examen du collectif, je suis disposé à retirer l'amendement.

M. le Ministre délégué - J'en prends l'engagement.

L'amendement 236 est retiré.

M. Eric Besson - Je souhaite expliquer notre vote sur l'article 2.

Personne, Monsieur Joyandet, ne conteste que vous avez gagné les élections, mais votre candidat a tant promis - d'augmenter toutes les dépenses, de réduire tous les impôts ! - que nous vous suggérions simplement de choisir, entre toutes ses promesses, celles auxquelles il convient de renoncer.

Je note d'ailleurs que le ministre de l'économie se montre déjà beaucoup plus prudent, et le geste de dénégation du ministre délégué ne m'empêchera pas de rappeler son propos selon lequel la promesse de baisse des impôts sera tenue « dès lors que la croissance sera de 3 % »...

M. François Grosdidier - Mais c'est ce que nous avons toujours dit !

M. Eric Besson - Reste que je regrette, Monsieur le ministre, que vous ayez renoncé à toute pédagogie sur le rôle de l'impôt. Certes, vous en avez reconnu les vertus citoyennes, mais pour expliquer ensuite que ces vertus faisaient fuir les contribuables, tandis que notre rapporteur général s'égarait jusqu'à dire que les top-models sont ce que nous avons de meilleur... (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

M. François Grosdidier - C'est caricatural ! Ce n'est pas une explication de vote !

M. Eric Besson - Le Gouvernement nous a aussi exposé sa vision de l'attractivité du territoire ou, plus exactement, de « la maison France », selon les termes de M. Bédier. Et cette vision se traduit par la recherche systématique du moins-disant social et fiscal...

M. François Grosdidier - Relisez donc le rapport Charzat ! Vous auriez été bien inspirés de l'appliquer avant les élections !

M. Eric Besson - ...mais l'attractivité d'un territoire se mesure aussi à la qualité de son système éducatif, de ses infrastructures, de son système de santé ! S'il en allait différemment, la Russie et l'Afrique seraient des territoires hautement attractifs. Or, est-ce le cas ? Ne renoncez pas, Monsieur le ministre, à l'impôt républicain !

M. François Grosdidier - Nous ne renonçons à rien ! Finissez-en !

M. le Ministre délégué - Le Gouvernement mènera à son terme le programme fiscal qu'il s'est fixé, et qui est du même niveau que celui que vous prétendez avoir appliqué. Notre honneur sera de le mener à bien sans aggraver le déficit, contrairement à ce que vous avez fait : réduire l'impôt et laisser tous les problèmes en suspens au terme de la législature ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste ; applaudissements sur les bancs du groupe UMP) Notre programme, c'est de réduire les dépenses et de revenir à l'équilibre budgétaire (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

L'article 2, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 2

M. Jean-Louis Dumont - Je propose une nouvelle fois, par l'amendement 250, de faciliter l'installation des jeunes agriculteurs et de favoriser le développement des exploitations agricoles en augmentant les seuils de déduction forfaitaire, ce qui aura un effet incitatif.

M. le Rapporteur général - La commission a repoussé l'amendement, considérant qu'il n'y a pas lieu de remettre en cause l'équilibre existant en majorant les taux de déduction forfaitaire.

M. le Ministre délégué - La disposition aurait pour effet de créer une discrimination entre les jeunes agriculteurs qui s'installent et ceux qui, déjà installés, souhaiteraient agrandir leur exploitation. La sagesse commande de retirer l'amendement, faute de quoi le Gouvernement exprimerait un avis défavorable.

L'amendement 250, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Charles de Courson - Il est proposé, par l'amendement 263, d'étendre le bénéficie du régime du micro-foncier aux associés des groupements fonciers agricoles. La commission s'est émue du risque de double déduction. Pour l'éviter, il suffirait, si le Gouvernement en est d'accord, de substituer au terme « la part de bénéfice » le terme « la part de recettes ».

M. le Rapporteur général - La commission a repoussé l'amendement pour la raison même que son auteur a dite : il n'y a aucune raison d'accorder une déduction au titre du GFA et une autre au titre du micro-foncier.

M. le Ministre délégué - Les associés des GFA déclarent des revenus nets. Il ne serait donc ni logique ni équitable de permettre la déduction des charges dont il a déjà été tenu compte. Je vous demande donc de retirer l'amendement.

L'amendement 263 est retiré.

M. Philippe Auberger - Il s'agit, par l'amendement 50 rectifié, de porter à 533 000 € le plafond des recettes ouvrant aux exploitants agricoles l'accès au régime simplifié d'imposition. Ce seuil reste largement inférieur à celui de 763 000 € fixé pour les BIC, alors même que les exploitations agricoles sont, elles aussi, contraintes à de nombreux achats, qu'il s'agisse de semences ou d'équipements.

M. le Rapporteur général - Défavorable. 70% des agriculteurs se situent déjà en deçà du seuil de 274 000 €. Partant, le relever à 533 000 € condamnerait à brève échéance le régime réel normal.

M. le Ministre délégué - Toute démarche allant dans le sens d'une simplification doit être soutenue. Cependant, la proposition de M. Auberger semble quelque peu prématurée : si elle était appliquée, 1% à 2 % des exploitations seulement resteraient soumises au régime réel normal. Je suggère donc à M. Auberger de retirer l'amendement au bénéfice de mon engagement à approfondir la réflexion sur ce sujet.

M. Philippe Auberger - Compte tenu, Monsieur le ministre, de vos ouvertures, je le retire, bien que certains arguments de notre rapporteur général ne m'aient pas convaincu - il est vrai qu'il a l'excuse d'avoir peu d'agriculteurs dans sa circonscription ! Je reconnais cependant que peu d'exploitations dépasseraient le seuil de 533 000 €, du fait notamment de l'effondrement du prix d'intervention, y compris dans le secteur céréalier.

L'amendement 50 rectifié est retiré.

M. Charles de Courson - L'amendement 142 vise à permettre aux exploitations de pratiquer des déductions pour investissements indépendamment de toute référence à la dotation pour aléas. Instituée par le gouvernement précédent, la DPA présente tous les caractères d'un dispositif sans intérêt. Il n'est donc que temps de la déconnecter de la DPI.

M. le Rapporteur général - Je vous concède, Monsieur Auberger, qu'il y a peu d'agriculteurs dans ma circonscription (Sourires), mais je n'ignore pas que la DPA est plus contraignante que la DPI en ce qu'elle oblige son bénéficiaire à immobiliser des fonds sur un compte bloqué et à souscrire une assurance. Cependant, si l'on souscrivait à votre proposition en autorisant le cumul des deux déductions, la DPA sera cannibalisée par la DPI et disparaîtrait rapidement. La commission a donc jugé inopportun que soit ouverte la possibilité de les séparer pour, en fait, les cumuler !

M. le Ministre délégué - J'ai examiné dans le détail la proposition de M. de Courson et je crains en effet qu'elle ne vide de son sens le dispositif de la DPA, lequel, il faut le rappeler, ne se limite pas à un simple mécanisme fiscal. Autoriser le cumul des deux déductions constituerait une forme d'aide à la production, soumise à l'accord préalable des institutions communautaires. Je suggère donc à M. de Courson de retirer son amendement car il me semble opportun de se donner le temps de revoir l'ensemble du dispositif.

M. Charles de Courson - Soit, mais il serait intéressant de savoir ce que pensent le Gouvernement et notre rapporteur général du dispositif voté par le gouvernement précédent !

M. Philippe Auberger - Il est nul !

M. Charles de Courson - Combien d'agriculteurs ont bénéficié de la DPA ? Quels montants ont été mobilisés à cet effet ? Ce mécanisme, comme beaucoup de ceux que bâtit la gauche, n'a-t-il pas été inventé pour ne pas fonctionner ? J'observe que nos collègues de l'opposition protestent bien mollement. Tenons donc un langage de vérité : si la DPA est une usine à gaz qui ne fonctionne pas, il faut la supprimer !

M. le Ministre délégué - Monsieur le député, si vous représentez votre amendement dans un an, nous aurons plus de recul pour vous répondre avec précision ! (Sourires) Je rappelle que la DPA est un mécanisme de création récente.

M. Charles de Courson - Puisque vous vous engagez à réfléchir à sa disparition (Murmures sur les bancs du groupe socialiste) ou à son amélioration, je retire mon amendement.

M. Hervé Mariton - Je retire également le 184 qui était identique. J'observe cependant, Monsieur le ministre, que la DPI a été instituée sans recueillir l'accord préalable de Bruxelles. Est-il bien légitime de s'en remettre aux instances communautaires pour définir nos propres mécanismes d'intervention fiscale ?

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances - Je demande une brève suspension de séance.

La séance, suspendue à 23 heures 25 est reprise à 23 heures 35.

M. Hervé Mariton - L'amendement 183 est un de ceux que j'ai déposés afin de moderniser la fiscalité agricole. En effet, la loi d'orientation adoptée lors de la précédente législature est passée complètement à côté des enjeux fiscaux et il est essentiel que ce gouvernement prenne position sur cet aspect et s'engage à l'intégrer dans les textes relatifs à la compétitivité des entreprises qui nous seront soumis l'an prochain.

M. le Rapporteur général - Cet amendement ne manque pas d'ambition puisque son adoption coûterait 2 milliards d'euros. C'est la raison pour laquelle la commission l'a rejeté d'autant qu'il s'agirait d'une aide qui devrait, à ce titre, être notifiée à Bruxelles.

M. le Ministre délégué - Il s'agit d'une importante défiscalisation qui n'apparaît pas particulièrement fondée. Je souhaite donc que son auteur retire cet amendement.

M. Hervé Mariton - J'y suis prêt mais pouvez-vous confirmer que la fiscalité agricole sera traitée dans le texte relatif à la compétitivité et à l'attractivité de notre économie ?

M. le Ministre délégué - On peut imaginer que la fiscalité agricole soit un des éléments traités lorsque sera évoquée la compétitivité de l'ensemble des activités... Puisque votre intention est aussi de simplifier cette fiscalité, je crois que vous ne prenez aucun risque à retirer cet amendement... (Sourires)

L'amendement 183 est retiré.

M. Hervé Mariton - Le ministre ne me semblant guère enclin à la charité (Sourires), je retire également l'amendement 186.

M. Philippe Auberger - Grâce au plan en faveur de l'installation des jeunes agriculteurs lancé par Philippe Vasseur en 1995, le nombre des installations avait doublé en deux ans dans mon département, avant de décliner inexorablement à partir de 1997. Un des obstacles à la cession des entreprises, donc à l'installation des jeunes, est l'imposition des plus-values réalisées lors de ces sessions, avec un seuil d'exonération de 152 600 euros, bien trop bas.

Par l'amendement 51, je propose par conséquent l'instauration d'une taxation progressive au-delà de ce seuil et jusqu'à 305 200 euros.

On m'objectera sans doute que le problème est le même pour les entreprises individuelles, est-ce une raison pour ne rien faire quand la survie de notre agriculture est en jeu ?

M. le Rapporteur général - Cet amendement est pertinent. La commission l'a pourtant rejeté car, comme l'a dit M. Auberger, le problème du seuil, qui n'a pas été modifié depuis 1988, se pose également pour les commerçants et pour les artisans. La forte imposition des plus-values de cession confisque en partie l'épargne que ces catégories se sont constituées en vue de la retraite et freine la reprise des fonds de commerce comme des exploitations agricoles.

Cependant, en commission, on nous a dit que le problème serait traité dans le cadre du projet « Agir pour l'initiative économique », dont nous serons saisis en janvier. Pouvez-vous nous confirmer qu'il en sera bien ainsi, Monsieur le ministre délégué, et que le seuil d'imposition, inchangé depuis 1988, sera relevé sensiblement, et ce aussi bien pour les exploitations agricoles que pour les entreprises industrielles et commerciales ? Accessoirement, pouvez-vous donner un ordre de grandeur pour ce relèvement ?

M. le Ministre délégué - Le texte vous sera effectivement soumis au début de l'année prochaine et il devrait porter la limite de l'exonération à quelque 250 000 euros. Bien entendu, la disposition s'appliquera également aux exploitations agricoles.

En contrepartie de ces engagements, ne pourriez-vous retirer votre amendement, pour le représenter quand ce projet viendra en discussion ?

M. Philippe Auberger - Je le retire volontiers, mais j'insiste pour que les exploitations agricoles soient traitées de la même façon que les entreprises assujetties à l'imposition sur les BIC. D'autre part, le système actuel a l'inconvénient de provoquer un important ressaut : on passe sans transition de l'exonération totale à l'imposition totale. Je préférerais une entrée plus progressive dans le champ de l'imposition, quitte à ne prévoir que deux tranches.

M. le Rapporteur général - M. Auberger a raison de demander que, de même que l'est le seuil, le régime devra être commun aux exploitations agricoles et aux entreprises imposées à raison de leurs bénéfices industriels et commerciaux. De même, c'est à juste titre qu'il souligne la brutalité de l'effet de seuil actuel : ne pourrait-on prévoir une entrée progressive dans le dispositif, « en biseau » par exemple ?

L'amendement 51 est retiré.

M . Charles de Courson - Mon amendement 144 traite d'une question qui remonte à la loi de modernisation agricole, de 1994. A l'époque, on avait autorisé à déduire la rente foncière de l'assiette des cotisations sociales, pour parvenir à une neutralité parfaite, que l'exploitant soit propriétaire ou locataire de ses terres, ou en partie propriétaire et en partie locataire. Cependant, on avait choisi de se fonder pour cela sur les bases locatives cadastrales en espérant que la révision de celles-ci permettrait une évaluation correcte de la rente. Or, comme on le sait, on a dépensé des milliards pour cette révision, mais les résultats sont demeurés enfermés dans les bases de données de la DGI. Je propose donc qu'on se fonde plutôt sur les arrêtés préfectoraux définissant les plafonds des baux ruraux.

Faute de cette mesure, les exploitants propriétaires commencent déjà à mettre leurs terres dans une SCI pour les louer à une SCEA, ce qui leur permet de bénéficier d'une déduction. Evitons la prolifération de telles usines à gaz !

M. le Rapporteur général - La commission a repoussé l'amendement, non qu'elle ignore ce problème lancinant qui se pose du fait que ces valeurs cadastrales n'ont pas été réévaluées depuis 1972, mais parce que le coût de la mesure se monterait à 76 millions d'euros et que la compensation suggérée par M. de Courson n'a aucun caractère pérenne. Or on ne peut ajouter aux difficultés du BAPSA.

En outre, les arrêtés préfectoraux ne constituent peut-être pas la base la plus adéquate dans la mesure où ils prennent également en compte les bâtiments.

M. le Ministre délégué - La référence à ces arrêtés n'est pas satisfaisante, en effet. De plus, le dispositif se solderait par de grandes variations entre départements et entraînerait une rupture d'égalité entre exploitants - de même d'ailleurs qu'entre ceux-ci et les propriétaires de biens non affectés à des activités agricoles. Enfin, comme l'a relevé le rapporteur général, la minoration de l'assiette des cotisations ne pourrait que rendre plus aléatoire le financement du BAPSA.

M. Charles de Courson - Mais le problème se pose depuis huit ou neuf ans ! Présidant la commission de réforme, j'ai pu constater dans mon département des écarts entre valeurs locatives et valeurs réelles de l'ordre de 1 à 6, voire de 1 à 10. Les loyers ont en effet considérablement évolué en trente ans !

Quant à l'argument relatif aux arrêtés préfectoraux, il ne tient guère, Monsieur le rapporteur général : dans la plupart des départements, on y fait la distinction maintenant entre location des terres et location des bâtiments.

Il est profondément regrettable qu'on vote des réformes justifiées, puis qu'on ne mène pas celles-ci à leur terme. Si on m'assurait que la réévaluation va avoir lieu dans deux ans, je serais disposé à attendre. Mais si tel n'est pas le cas alors que nous étions unanimes au départ, à une seule voix près, au sein du Comité des finances locales, je préfère qu'on tranche clairement, quitte à être battu.

L'amendement 144, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Michel Vaxès - La création du Pacs a constitué une avancée sociale pour des dizaines de milliers de personnes. Toutefois, celles-ci restent soumises à un régime fiscal distinct, l'imposition commune ne pouvant intervenir qu'au terme de trois ans de vie commune. L'expérience montre pourtant que la précaution était superflue, que le Pacs n'a pas été utilisé à des fins d'« optimisation fiscale », comme le craignaient certains. Ne maintenons donc pas cette mesure discriminatoire !

Notre amendement 172 vise précisément à supprimer ce délai de trois ans. En outre, il tend à relever de 57 000 à 80 000 euros le montant de l'abattement sur les mutations à titre gratuit.

Le Pacs existe depuis trois ans aujourd'hui : l'Assemblée s'honorerait à améliorer le régime fiscal de ceux qui ont opté pour ce pacte, en l'alignant sur le droit commun.

M. Patrick Bloche - L'amendement 294 a le même objet. La loi instituant le pacte civil de solidarité a en effet prévu une imposition commune des partenaires à compter des revenus de l'année du troisième anniversaire de l'enregistrement du Pacs, de manière à tirer les conséquences des obligations réciproques que souscrivent les intéressés. Elle créait ainsi un second cas d'imposition commune puisque, auparavant, seuls les couples mariés étaient soumis à ce régime fiscal.

Nous avions retenu un délai de trois ans, dès le dépôt de la proposition de loi...

M. Charles de Courson - Non.

M. Patrick Bloche - Si, j'en ai la preuve.

Le délai avait pour objectif d'écarter tout soupçon d'optimisation fiscale. Par contre, une imposition commune immédiate était prévue pour les signataires d'un Pacs assujettis à un impôt sur la fortune.

En outre, le délai retenu par les signataires bénéficiant de prestations sociales attribuées sous conditions de ressources pose problème : les revenus pris en compte pour le calcul de l'impôt sur le revenu sont déclarés séparément pendant trois ans, et ne peuvent donner lieu à l'attribution de part supplémentaire, alors qu'ils sont pris en compte globalement dès la première année pour l'attribution des prestations sociales. La signature d'un Pacs peut ainsi entraîner la perte de l'allocation de parent isolé.

Il convient donc aujourd'hui de supprimer ce délai.

Quant à l'amendement 244, il vise à supprimer la condition de deux ans donnant droit au bénéfice de l'abattement applicable aux donations entre partenaires pacsés.

M. le Rapporteur général - La commission a rejeté ces amendements car elle souhaite privilégier fiscalement le mariage par rapport au Pacs.

Vos amendements incitent à un comportement d'optimisation fiscale.

Nous avons d'ailleurs un précédent en la matière : au sein de l'Education nationale, beaucoup ont utilisé le Pacs pour obtenir des points en faveur d'une mutation ou d'un rapprochement.

M. le Ministre délégué - Avis défavorable. Ces délais visaient à donner une certaine stabilité du pacte qu'on ne peut remettre en cause.

M. Charles de Courson - Le délai de trois ans a été décidé après un débat assez comique : je vous avais menacé, au cas où aucun délai n'était retenu, de me pacser et de me dépacser une fois par an, ce qui m'aurait rapporté 30 000 F. J'aurais bien trouvé dans les annonces du Nouvel observateur une étudiante ne travaillant pas...

M. Jean-Pierre Brard - Quelle perversité ! (Sourires)

M. Charles de Courson - En outre, le Pacs n'implique pas les mêmes droits et devoirs que le mariage, loin de là !

Par ailleurs, le comportement d'optimisation fiscale joue contre les couples mariés.

Suffirait-il de se pacser pour aller travailler par exemple à Marseille ? Quelle étrange conception de la justice sociale !

M. Patrick Bloche - Les propos de M. de Courson nous ramènent aux heures que nous avons passées sur cette question.

M. Maurice Leroy - Cela me rappelle qu'au début, il vous a manqué du monde... (Rires sur les bancs du groupe UDF et du groupe UMP)

M. Patrick Bloche - Mais, Monsieur de Courson, le délai de trois ans était bien inscrit dans notre première proposition de loi. D'après le rapporteur général, l'imposition commune correspondrait automatiquement à une optimisation fiscale. Or, on peut être amené à payer davantage en faisant une déclaration commune. Enfin, si nous dressons le bilan de trois ans de Pacs, nous constaterons qu'il n'y a pas eu d'excès. Les précautions prises en 1998 n'ont plus lieu d'être aujourd'hui, les prétendus détournements du Pacs au sein de l'Education nationale ne relèvent que de la rumeur.

M. Jean-Pierre Brard - Il y a peut-être des Pacs blancs, comme il y a des mariages blancs. Remettons pour autant en cause l'institution du mariage ? Monsieur de Courson a une vision apocalyptique du Pacs bien éloignée de la réalité, mais il reste fidèle à lui-même, réactionnaire au sens de la monarchie de Juillet. Loin de la technique fiscale, il se situe dans le droit fil de monseigneur Escriva de Balaguer, canonisé il y a quinze jours. Monsieur de Courson a ses chances ! (Sourires)

L'amendement 172, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que les amendements 294 et 244.

M. Patrick Bloche - L'amendement 243 vise à supprimer la condition de deux ans donnant droit au bénéfice des tarifs minorés d'enregistrement applicables en cas de donation entre partenaires pacsés, d'autant que le Pacs a été raisonnablement utilisé pendant trois ans et que 120 000 de nos concitoyens en ont fait le choix.

M. le Rapporteur général - Rejet de la commission ; rappelons que le Conseil constitutionnel a subordonné son approbation à l'existence de ces délais.

M. le Ministre délégué - Avis défavorable.

L'amendement 243, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Yves Deniaud - L'amendement 194 de M. Merville a pour objet de faciliter les transmissions d'entreprises. M. Merville souhaite particulièrement insister sur le principe d'indexation des seuils. On ne les réactualise pas régulièrement, les assujettis se plaignent, mais l'effort à accomplir pour les réajuster serait trop douloureux. Il conviendrait donc de prévoir une indexation régulière.

M. le Rapporteur général - La commission a repoussé cet amendement pour les raisons déjà exposées. Et, si j'ai bien compris le ministre, le problème soulevé trouvera une réponse dans le projet de loi que présentera prochainement Renaud Dutreil.

M. le Ministre délégué - Je le confirme. Il est vrai que des commerçants, dont le fonds de commerce constitue l'essentiel du patrimoine, peuvent se trouver lourdement taxés lorsqu'ils le cèdent à leur départ en retraite. Cela étant, le régime d'imposition des plus-values professionnelles au taux forfaitaire de 16 % - auquel s'ajoutent les prélèvements sociaux -, applicable dès lors que le fonds cédé a été acquis depuis plus de deux ans, est nettement plus favorable que celui des plus-values immobilières, soumises, elles, au taux progressif de l'impôt sur le revenu. Le plus raisonnable serait donc que l'amendement soit retiré.

M. Yves Deniaud - Je vais le retirer comme l'aurait fait Denis Merville. Je note que l'on ne m'a pas répondu sur l'indexation des seuils. Je pense en particulier aux seuils d'exonération des droits de succession en ligne directe, lesquels n'ont pas été revalorisés depuis très longtemps.

L'amendement 194 est retiré.

M. Jean-Louis Christ - L'amendement 110 vise à harmoniser le traitement fiscal des contrats d'apprentissage et des contrats de qualification. En effet, seuls les revenus retirés des premiers sont exonérés d'impôt sur le revenu. Il faut mettre un terme à cette inégalité et ainsi favoriser la formation, notamment des jeunes.

M. le Rapporteur général - La commission a repoussé cet amendement au motif en particulier que les contrats de qualification peuvent s'adresser aussi à des adultes. L'extension d'exonération proposée serait manifestement excessive.

M. le Ministre délégué - Même avis.

L'amendement 110, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Nicolas Perruchot - L'amendement 146 vise à harmoniser les règles de déductibilité fiscale des frais de transport entre le domicile et le lieu de travail des contribuables applicables aux assujettis aux BNC et aux salariés. Pour les premiers, la déduction est admise lorsque la distance domicile/travail n'excède pas trente kilomètres. Au-delà, les contribuables doivent justifier que le choix de leur lieu de résidence n'est pas de pure convenance personnelle, faute de quoi aucune déduction n'est possible, même pour les trente premiers kilomètres. En revanche, depuis 1993, les salariés qui ont opté pour la déduction des frais réels sont autorisés à déduire sans justifications particulières leurs frais de déplacement jusqu'à une distance de quarante kilomètres. Il s'agirait bien entendu d'harmoniser les deux régimes sur la base des règles les plus favorables.

M. le Rapporteur général - La commission a repoussé cet amendement qui en réalité pose deux problèmes distincts. S'il faut impérativement harmoniser les distances prises en compte pour les salariés et les assujettis aux BNC -porter à quarante kilomètres le seuil retenu pour ces derniers relève du domaine réglementaire et pourrait donc être fait rapidement-, il paraît en revanche souhaitable, au-delà de ces quarante kilomètres, de continuer à traiter différemment les deux catégories, les assujettis aux BNC établissant, eux, une comptabilité précise.

M. le Ministre délégué - Il convient de conserver une certaine cohérence dans le traitement, par nature différent, des salariés et des autres catégories de travailleurs. Mais dans un esprit d'ouverture, je m'engage à porter de trente à quarante kilomètres la distance domicile/lieu de travail retenue pour les assujettis aux BNC. Au-delà, la déduction sera subordonnée à la production de justificatifs.

M. Jean-Pierre Brard - Grand succès pour l'UDF !

M. Nicolas Perruchot - Je vous remercie, Monsieur le ministre. Je retire donc mon amendement.

M. Marc Laffineur - Il n'est pas normal que des personnes habitant à plus de quarante kilomètres de leur lieu de travail, ce qui est fréquent en milieu rural, ne puissent pas déduire de leurs revenus leurs frais de transport. Il y va de l'aménagement équilibré du territoire. Il faudra regarder tout cela de plus près dans la prochaine loi de finances et sans doute assouplir les règles en milieu rural.

M. le Ministre délégué - Votre souhait est déjà satisfait puisque s'ils peuvent justifier que le choix de leur lieu d'habitation n'est pas de pure convenance personnelle, ils peuvent déduire leurs frais de transport.

M. le Président de la commission - Avant que nous n'interrompions nos travaux comme convenu à minuit trente, et comme je ne pourrai être là demain matin pendant la première demi-heure pour le début de l'examen de l'article 3 relatif à la prime pour l'emploi, je souhaite donner maintenant quelques explications sur la façon dont la commission a appliqué l'article 40. La PPE, on le sait, peut être perçue par des personnes imposables sur le revenu comme par des personnes non imposables. Depuis sa création, elle est considérée comme un droit à récupération fiscale. Mais il importe de bien clarifier son traitement budgétaire.

Je me suis référé à la position adoptée par mon prédécesseur, M. Emmanuelli, et j'ai considéré, comme lui, qu'il s'agit d'une charge pour le Trésor. Autrement dit, puisqu'il s'agit d'une dépense, tous les amendements qui tendent à accroître cette dépense doivent prévoir un gage, faute de quoi ils seraient irrecevables au titre de l'article 40. Comme M. Emmanuelli, je considère que la prime est assimilée à un dégrèvement, et l'application de l'article 40 ne remet pas en question cette interprétation, que je tenais à préciser, car je sais que d'autres avis se sont fait entendre à ce sujet au sein du Gouvernement.

M. Augustin Bonrepaux - Si la divergence d'appréciation persiste entre le président de la commission et le Gouvernement, un débat devra avoir lieu demain pour déterminer si la présentation du projet de loi de finances doit être modifiée.

M. Charles de Courson - La position du groupe UDF est claire : pour nous, tous les amendements concernant des personnes imposables sont recevables s'ils prévoient un gage. Mais nous allons plus loin, et nous avons déposé un amendement à ce sujet : nous considérons qu'il convient de porter en dépense la partie non imposable et de maintenir comme dégrèvement ce qui concerne les personnes imposables.

M. le Ministre délégué - Je m'en remets naturellement au président de votre commission s'agissant de l'interprétation de l'article 40. Mais j'appelle l'attention sur le fait qu'il ne faut pas confondre les modalités comptables de la mise en _uvre de la mesure et l'application de l'article 40.

M. Augustin Bonrepaux - Attention ! Ne peut-on craindre une manipulation ?

M. le Président - A la demande du président de la commission, nous interrompons nos travaux.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu ce matin, jeudi 17 octobre, à 9 heures.

La séance est levée à 0 heure 35.

            Le Directeur du service
            des comptes rendus analytiques,

            François GEORGE

ORDRE DU JOUR
DU JEUDI 17 OCTOBRE 2002

A NEUF HEURES : 1ère SÉANCE PUBLIQUE

Suite de la discussion des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2003 (n° 230).

M. Gilles CARREZ, rapporteur général au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan. (Rapport n° 256)

A QUINZE HEURES : 2ème SÉANCE PUBLIQUE

1. Discussion de l'article 33 du projet de loi de finances pour 2003 (n° 230) (évaluation du prélèvement opéré sur les recettes de l'Etat au titre de la participation de la France au budget des Communautés européennes).

M. Jean-Louis DUMONT, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan. (Annexe n° 2 du rapport n° 256)

M. Roland BLUM, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires étrangères. (Tome I de l'avis n° 259)

2. Suite de l'ordre du jour de la première séance.

A VINGT-ET-UNE HEURES : 3ème SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l'ordre du jour de la première séance.


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