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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2002-2003 - 12ème jour de séance, 30ème séance

2ème SÉANCE DU MERCREDI 23 OCTOBRE 2002

PRÉSIDENCE de M. Jean-Louis DEBRÉ

Sommaire

ÉLECTION DES JUGES DE LA HAUTE COUR DE JUSTICE ET DE LA COUR DE JUSTICE DE LA RÉPUBLIQUE 2

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT 2

AIDE PERSONNALISÉE À L'AUTONOMIE 2

FORMATION DES AGENTS TERRITORIAUX 2

CONSOMMATION DES MÉNAGES 3

FRANCE-TÉLÉCOM 4

TAUX DE LA TVA SUR LA RESTAURATION 4

SITUATION DES AIDES OPÉRATOIRES 5

ÉTABLISSEMENTS PÉNITENTIAIRES LYONNAIS 6

SÉCURITÉ EN ZONE RURALE 6

RÉFORME DE LA DÉCENTRALISATION 7

INTERMITTENTS DU SPECTACLE 8

PRATIQUES COMMERCIALES DE LA GRANDE DISTRIBUTION 8

RÔLE DES PAYS DANS L'ORGANISATION DU TERRITOIRE 9

LOI DE FINANCES POUR 2003 -deuxième partie- (suite) 10

INTÉRIEUR 10

ÉLECTION DES JUGES DE LA HAUTE COUR
DE JUSTICE ET DE LA COUR DE JUSTICE
DE LA RÉPUBLIQUE (suite) 34

La séance est ouverte à quinze heures.

ÉLECTION DES JUGES DE LA HAUTE COUR DE JUSTICE
ET DE LA COUR DE JUSTICE DE LA RÉPUBLIQUE

M. le Président - Les scrutins pour l'élection des juges de la Haute Cour de justice et de la Cour de justice de la République vont se dérouler dans les salles voisines de la salle des séances.

Je déclare les scrutins ouverts. Ils seront clos à 18 heures.

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

AIDE PERSONNALISÉE À L'AUTONOMIE

M. Jean-Claude Sandrier - L'aide personnalisée à l'autonomie pour les personnes âgées constitue un progrès social et humain considérable. Le succès de cette mesure, prise par le précédent gouvernement (Interruptions sur les bancs du groupe UMP), montre qu'elle correspond à un besoin trop longtemps sous-estimé.

Il y a certes des conséquences financières (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF), et, notre proposition de financement étant restée sans réponse de la part du Ministre de l'économie et des finances, je la réitère : ne pas baisser l'impôt sur le revenu des contribuables situés dans les deux plus hautes tranches - c'est-à-dire des contribuables les plus riches - rapporterait quelque 1,2 milliards d'euros, ce qui permettrait de financer le surcoût de cette mesure sociale sans aucune imposition supplémentaire, notamment de la part des départements.

Est-il vraiment si difficile d'aider les personnes âgées qui souffrent, plutôt que d'aider les riches à être encore plus riches ? (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et sur de nombreux bancs du groupe socialiste ; exclamations sur les bancs du groupe UMP)

M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat aux personnes âgées - Quel toupet, dirait-on dans le Midi ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains) Vous nous expliquez comment financer une mesure que vous avez vous-même prise ! Pourquoi, alors, ne l'avez-vous pas fait plus tôt ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF) Voilà ce qui arrive lorsque l'on met la charrue avant les b_ufs !

Vous vous êtes fait de la publicité avant même de travailler sérieusement à cette mesure sociale ! Faute d'une véritable concertation, vous avez créé des inégalités entre les bénéficiaires, l'APA n'étant pas la même selon que l'allocataire vit à son domicile ou en établissement.

Nous, nous entendons faire du social (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains), et sérieusement, car c'est nous qui allons financer votre mesure ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF ; protestations sur les bancs du groupe socialiste et sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains)

FORMATION DES AGENTS TERRITORIAUX

M. Bruno Bourg-Broc - Nombre de maires assistent, exaspérés, au départ de leurs agents territoriaux, sitôt après leur formation initiale accomplie et leur titularisation acquise : c'est par exemple le cas des policiers municipaux et des ingénieurs (« C'est vrai ! » sur plusieurs bancs).

La semaine dernière, Monsieur le ministre de la fonction publique, vous avez présidé le conseil supérieur de la fonction publique territoriale et esquissé à cette occasion - au conditionnel - un projet de réforme. Pouvez-vous nous en donner les grandes lignes et nous dire quand les communes - petites et moyennes en particulier - verront satisfaite l'une de leurs plus légitimes revendications ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF)

M. Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire - J'ai en effet esquissé un projet de réforme devant le conseil supérieur de la fonction publique territoriale. L'objectif en est clair : permettre aux collectivités locales de se doter des compétences dont elles ont et auront besoin. A cette fin, nous proposons de développer la formation, initiale et continue, qui est un investissement, non un coût. La formation devant contribuer à l'égalité d'accès à l'emploi, il faudra rompre avec certaines pratiques hypocrites, comme celle, par exemple, qui consiste à afficher les postes vacants une fois qu'ils sont déjà affectés. Nous entendons également organiser la validation des acquis de l'expérience professionnelle, afin de favoriser l'apport de compétences sans limite d'âge.

Nous devons aussi mettre un terme à l'injustice que vous décrivez : c'est une collectivité qui prend en charge une formation, mais c'est une autre qui en bénéficie ! Les agents formés seront incités à ne pas quitter avant trois ans la collectivité qui a financé leur formation (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF) ; dans le cas contraire, il appartiendra à leur nouvel employeur de verser à celle-ci une indemnité compensatoire (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

Je souhaite enfin qu'après avoir été reçu au concours, chaque fonctionnaire stagiaire suive chaque année, pendant trois ans, une formation d'un mois.

Nous avons engagé un dialogue constructif avec le centre national de la fonction publique territoriale, le conseil supérieur, les centres de gestion, ainsi que les organisations syndicales. La majorité des dispositions que je vous ai présentées pourront être prises par décret, je pense que nous les aurons toutes adoptées, ou presque, d'ici un an (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

CONSOMMATION DES MÉNAGES

M. Gérard Bapt - La consommation des ménages a fortement baissé en septembre - pourtant le mois de la rentrée scolaire - par rapport au mois d'août. Cette baisse a en particulier affecté la consommation populaire, la seule qui, lorsque l'investissement des entreprises est en panne, soutient la croissance.

Dès hier soir, le ministre délégué au budget en a d'ailleurs tiré les conclusions en révisant à la baisse la prévision de croissance - d'où la perspective inquiétante d'une montée du chômage.

Pendant toute la discussion du collectif et celle du projet de loi de finances lui-même, nous n'avons cessé de vous répéter qu'en multipliant les cadeaux fiscaux aux ménages les plus aisés (Protestations sur les bancs du groupe UMP) et en refusant de relancer la consommation populaire, vous prépariez l'austérité pour le plus grand nombre (« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste).

Il est encore temps de revenir sur les cadeaux fiscaux aux 70 000 familles les plus riches, en annulant le quasi-doublement de la réduction d'impôts pour emplois à domicile, et de choisir la croissance et l'emploi par la justice fiscale et la relance de la consommation du plus grand nombre (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

M. Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie - Les mois se suivent et ne se ressemblent pas. Vous évoquez la baisse de septembre ; je vous rappelle la hausse d'août, qui fut beaucoup moins commentée - sans doute parce que nous étions tous en vacances. Sur l'ensemble du troisième trimestre, nous constatons une hausse de 0,9 %.

Selon l'INSEE, nous pouvons avoir la quasi-certitude que, cette année, le pouvoir d'achat des ménages aura augmenté de 3 %. Les conditions sont donc réunies pour que la consommation reprenne : ni les taux de rémunération de l'épargne, ni l'évolution de la Bourse, ne sont en effet de nature à inciter les ménages à épargner plutôt qu'à consommer. Les perspectives budgétaires restent inchangées pour l'année prochaine (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

FRANCE-TÉLÉCOM

M. Jean Dionis du Séjour - Malgré des résultats d'exploitation exceptionnels, France-Télécom est en danger : sa dette atteint 70 milliards d'euros, et la valeur de l'action est passée de 219 € à 10,47 € en deux ans.

Où était donc passé, pendant ces deux ans, l'actionnaire majoritaire, à savoir le gouvernement socialiste ? Aux abonnés absents ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et du groupe UMP ; protestations sur les bancs du groupe socialiste)

M. Jean Glavany - L'actionnaire n'est pas le Gouvernement ! C'est l'Etat !

M. Jean Dionis du Séjour - Pour des raisons idéologiques, ce gouvernement a imposé le recours à l'emprunt pour financer l'achat d'Orange, afin de ne pas franchir la barre sacro-sainte des 50 %. Le gouvernement socialiste a failli à sa mission d'actionnaire majoritaire (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et du groupe UMP) en laissant derrière lui une bombe à retardement financière (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) qu'il nous revient de désamorcer.

Un plan de refinancement de France-Télécom sera présenté fin octobre, avait annoncé le ministre de l'économie. Nous y sommes. Aussi les 230 000 salariés de France-Télécom, les 1,6 million d'actionnaires, et l'ensemble des contribuables français ont-ils le droit de savoir quelles sont les intentions du Gouvernement, et quelle en sera la traduction budgétaire (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et du groupe UMP).

M. Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie - France-Télécom est au c_ur de l'économie numérique, qui est l'avenir de notre pays - avant que l'économie génétique ne prenne le relais. Nous avons donc le plus grand intérêt à restaurer la crédibilité, les finances et la stratégie de l'entreprise. C'est pourquoi nous avons nommé le 2 octobre un nouveau président, lequel a commencé, avec méthode, calme et professionnalisme, (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) par dresser un état des lieux. Celui-ci, dont j'ai partiellement pris connaissance hier, nous conduit à être confiants dans les capacités de redressement de France Télécom (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste).

Un plan sera annoncé dans les prochaines semaines, qui sera de nature à redonner à l'entreprise la crédibilité dont elle a besoin sur les marchés financiers pour continuer de mener à bien sa mission au service de notre pays. Il y aura bien, le moment venu, une recapitalisation. Les modalités n'en sont pas encore totalement définies car nous avons, comme vous, le souci de préserver à la fois la crédibilité de l'entreprise et les intérêts de ses actionnaires, en particulier les plus petits. Nous vous ferons part rapidement des conclusions auxquelles nous sommes parvenus (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF ; exclamations sur les bancs du groupe socialiste).

M. Jérôme Lambert - Ce n'est pas une réponse !

M. Jean-Pierre Brard - Et les salariés ? Et les usagers ?

TAUX DE LA TVA SUR LA RESTAURATION

M. Thierry Mariani - Nous nous sommes engagés il y a six mois à baisser la TVA sur la restauration. Dans un secteur lourdement pénalisé par les 35 heures, cette mesure permettra à la fois de revaloriser les bas salaires et de créer de nombreux emplois.

Nous connaissons les difficultés de ce dossier (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste), nous connaissons aussi votre détermination. Vous connaissez l'impatience d'une profession exaspérée par cinq années de promesses non tenues (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF ; protestations sur les bancs du groupe socialiste).

Où en est le dossier ? A quelle échéance notre engagement pourra-t-il être tenu ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF)

M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre - C'est en effet un dossier très important pour l'emploi dans les PME et le secteur des services (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste), mais aussi pour les territoires, car les activités de restauration sont bien réparties sur l'ensemble du territoire national. Nous en avons donc fait une priorité (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

Mais, c'est aussi - il faut tenir le langage de la vérité - un dossier difficile. Il faut en effet, d'une part, un rapport de la Commission européenne, et d'autre part l'accord de l'ensemble du Conseil européen (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste)... J'ai l'impression que certains, dans cette Assemblée, se réjouissent quand la consommation baisse et que les entreprises rencontrent des difficultés ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF ; huées sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains) Telle n'est pas notre attitude. Par notre détermination, nous avons réussi à obtenir ce qui n'avait pas été obtenu précédemment...(Brouhaha sur les bancs du groupe socialiste) Quelle image donnez-vous là de la démocratie ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF ; protestations sur les bancs du groupe socialiste) Souvenez-vous de l'exaspération exprimée par les Français le 21 avril ! (Mêmes mouvements) Je ne me suis, pour ma part, jamais comporté de la sorte dans un hémicycle !

Nous avons, disais-je, obtenu que la Commission dépose son rapport sur la TVA dans la restauration au premier trimestre 2003, M. Prodi nous l'a confirmé lors de sa visite à Paris (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF). Soyez assurés que, forts de cette avancée, nous tiendrons les engagements pris non seulement à l'égard des professionnels de la restauration, mais aussi des jeunes qui attendent avec impatience la baisse de la TVA sur le disque. Vous pouvez compter sur nous ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF ; huées sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

SITUATION DES AIDES OPÉRATOIRES

M. Daniel Spagnou - Il y a plus d'un an, notre collègue Bernard Accoyer faisait part au gouvernement de l'époque des inquiétudes des associations professionnelles d'aides-opératoires et aides-instrumentistes au sujet du décret d'application de l'article 38 de la loi de juillet 1999 relative à la couverture maladie universelle. En effet, celui-ci dispose que seuls peuvent intervenir auprès d'un chirurgien, lors d'une opération, les aides-opératoires et aides-instrumentistes exerçant cette activité depuis au moins six ans et ayant satisfait avant le 31 décembre 2002 à des épreuves de vérification des connaissances dans des conditions prévues par décret. Or, celui-ci n'est toujours pas publié, malgré l'injonction du Conseil d'Etat en ce sens. Il y a pourtant urgence : si rien n'était fait, quatre mille aides-opératoires se retrouveraient hors-la-loi le 31 décembre, alors même que les besoins en personnel sont considérables, à telle enseigne que les chirurgiens et les établissements craignent tout simplement de ne plus pouvoir assurer leurs missions.

Comment allez-vous mettre fin à cette situation paradoxale, créée par l'incapacité chronique du précédent gouvernement à régler les problèmes ? (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) Il faut donner à ces personnels extrêmement compétents la reconnaissance professionnelle qu'ils sont en droit d'attendre de l'Etat (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées - Pendant des années, un personnel dévoué a exercé les fonctions d'aide-opératoire. L'article 38 de la loi du 27 juillet 1999 prévoyait les conditions de reconnaissance de cette activité professionnelle. Le décret d'application a été attendu trois ans ! Mais je puis aujourd'hui vous indiquer qu'il est paru au Journal officiel du 12 octobre (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) et que l'arrêté d'application est signé ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF) Les épreuves seront organisées par les DRASS sur l'ensemble du territoire national, de façon que les résultats soient connus avant le 31 décembre 2002. Nos quatre mille aides-opératoires pourront ainsi poursuivre leur activité dans des conditions professionnelles et réglementaires enfin clarifiées (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

ÉTABLISSEMENTS PÉNITENTIAIRES LYONNAIS

M. Jean-Jack Queyranne - Monsieur le Garde des Sceaux, vous connaissez la situation des prisons Saint-Paul et Saint-Joseph à Lyon. Pour les avoir visitées, vous savez leur état de vétusté et leur surpeuplement. Le gouvernement précédent avait engagé le transfert de ces deux établissements pénitentiaires et prévu la création d'une maison d'arrêt d'une part, d'un centre de détention d'autre part. Les terrains proposés par la communauté urbaine avaient recueilli le consensus des élus.

Or, votre secrétaire d'Etat, M. Bédier, qui s'est rendu à Lyon la semaine dernière, a repoussé ces propositions, réduisant ainsi à néant le fruit du dialogue engagé avec les élus et les personnels pénitentiaires (Interruptions sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF). En donnant la préférence à un seul établissement de six cents places, vous avez choisi de servir plutôt les intérêts des grands groupes privés du bâtiment sollicités pour cette construction (Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP). Comment allez-vous régler le problème ? Le transfert est urgent. Sur la forme, le ministère de la justice entend-il, à l'avenir, passer ainsi outre l'avis des élus et des personnels et faire fi de leurs intérêts ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains ; protestations sur les bancs du groupe UMP)

M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice - Trêve de caricatures ! Vous êtes élu local, je le suis également. Nous connaissons donc tous deux parfaitement les compétences respectives de l'Etat et des collectivités. C'est à l'Etat qu'il appartient de construire puis de gérer les prisons, mais, dans la mesure où les collectivités sont compétentes en matière de droit de l'urbanisme, et décident donc des droits à construire, il faut nécessairement travailler en partenariat avec elles pour mener à bien les opérations.

Où en est-on à Lyon ? Tout d'abord, aucun transfert n'avait été engagé, puisque aucun terrain n'avait encore été choisi ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF ; interruptions sur les bancs du groupe socialiste) Pour le reste, nous souhaitons que les nouveaux établissements prévus dans le département du Rhône, en particulier ceux de l'agglomération lyonnaise, figurent dans le programme 2003. Le budget de la justice, dont nous débattrons dans quelques jours, prévoit précisément un doublement des autorisations de programme pour pouvoir engager sans retard les constructions nécessaires.

Nous prévoyons de construire à Lyon deux établissements, l'un pour adultes de six cents places en effet, ce qui n'est pas trop puisque le nombre actuel de détenus est même supérieur, et ce qui, soit dit au passage, n'occupe pas davantage de superficie qu'un établissement de trois cents places ; l'autre pour mineurs, mais pour ce projet je souhaite que nous poussions un peu plus loin l'analyse technique du terrain de Saint-Fond. Quant au terrain de Vaulx-en-Velin, il était situé en zone inondable (« Très bien ! » sur de nombreux bancs du groupe UMP).

Après les inondations du Gard, je crois que les pouvoirs publics doivent donner l'exemple de la prudence ! (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste) C'est avec les élus que nous réglerons ce problème, et chacun devra prendre ses responsabilités. L'Etat dispose des crédits nécessaires. Le dialogue nous permettra de trouver un terrain constructible (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

SÉCURITÉ EN ZONE RURALE

M. Alfred Trassy-Paillogues - La loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure que nous avons votée cet été a créé 13 500 emplois dans la police et la gendarmerie, et dégagé 5,6 milliards d'euros de crédits supplémentaires sur cinq ans. Le rôle des élus locaux en matière de sécurité a été renforcé, et police et gendarmerie sont placées ensemble sous la responsabilité du ministre de l'intérieur.

Deux mois après l'entrée en vigueur de ce dispositif, des résultats positifs peuvent déjà être observés en zone urbaine. En revanche, dans les zones rurales, qui sont du ressort de la gendarmerie, on assiste à une progression préoccupante de la délinquance.

Aussi les élus ruraux souhaitent-ils connaître les instructions données aux forces de gendarmerie, ainsi que la situation réelle et son évolution. Comment allez-vous améliorer leur information ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF)

M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales - Si la délinquance recule en ville, il est exact qu'il n'en va pas de même dans les zones périurbaines et rurales. La compétence des gendarmes n'est, naturellement, pas en cause. Depuis le début de l'année, le taux de progression de la délinquance, dans ces zones, était à deux chiffres ; pour le seul mois de septembre, il a même atteint 3,4 %, ce qui n'est pas supportable !

Nous allons donc revoir le maillage territorial, qui date de 1850. Nous allons également instaurer des communautés de brigades, car 60 % de nos brigades comptent moins de six gendarmes, ce qui ne permet pas d'assurer une présence de jour comme de nuit (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF ; interruptions sur les bancs du groupe socialiste). Je souligne que cette réforme n'aboutira pas à des fermetures de gendarmeries, puisque mon collègue de la défense et moi-même avons obtenu 7 000 créations de postes.

Enfin, nous allons créer des sections de recherche. Le travail des gendarmes ne consiste pas à saluer la boulangère le matin (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), mais à mener des investigations et à garantir la sécurité de jour comme de nuit (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

RÉFORME DE LA DÉCENTRALISATION

M. Jean-Pierre Nicolas - Si les élus locaux regardent avec intérêt le projet de réforme de la décentralisation annoncé par le Premier ministre, des inquiétudes demeurent (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste et sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains).

Les élus locaux sont entre le marteau et l'enclume ils ont toujours plus de responsabilités, dans des domaines de plus en plus diversifiés, sans pour autant avoir reçu, sous la précédente législature, les moyens financiers, techniques et humains dont ils ont besoin. Au contraire, les décisions du précédent gouvernement n'ont fait qu'aggraver leurs difficultés. Les 35 heures, l'allocation personnalisée d'autonomie, la réforme des services départementaux d'incendie et de secours, la réforme de la taxe professionnelle, la suppression de la part régionale de la taxe d'habitation (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste), celle de la vignette (Même mouvement), ont porté atteinte à l'autonomie fiscale des collectivités territoriales, et contraint nombre d'entre elles à augmenter la pression fiscale.

Plusieurs députés socialistes - La question !

M. Jean-Pierre Nicolas - On peut donc comprendre que les élus hésitent entre espérance et crainte.

M. le Président - Quelle est votre question, Monsieur le député ? (Rires sur les bancs du groupe socialiste)

M. Jean-Pierre Nicolas - Pouvez-vous garantir que la réforme de la décentralisation donnera aux élus les moyens de mieux servir nos concitoyens ?

M. Patrick Devedjian, ministre délégué aux libertés locales - Au cours des cinq dernières années, la fiscalité locale a perdu 15 milliards d'euros de recettes remplacés par des dotations qui ont eu pour effet d'aggraver la tutelle financière de l'Etat. Durant la même période, d'ailleurs, dix-neuf impôts d'Etat ont été créés ! (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste)

La réforme voulue par le Premier ministre rendra impossibles de telles évolutions, puisque quatre grands principes seront inscrits dans la Constitution : la libre disposition de leurs recettes par les collectivités locales ; l'assurance que le montant des recettes propres sera supérieur à celui des dotations ; l'honnêteté des transferts de compétence ; l'obligation pour l'Etat de corriger, par la péréquation, les inégalités territoriales.

Cette réforme signifie plus de liberté pour les élus, plus d'égalité entre les territoires et plus de solidarité pour les populations.

C'est donc une réforme qui renforcera notre démocratie (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur quelques bancs du groupe UDF).

INTERMITTENTS DU SPECTACLE

M. Maxime Bono - Lundi dernier, dix mille professionnels de la culture ont manifesté leur attachement au régime particulier des intermittents du spectacle.

On ne le répétera jamais assez : l'intermittence est une contrainte ; il n'existe pas une profession d'intermittents, mais des professionnels qualifiés que la perte de ce régime dérogatoire plongerait dans la précarité totale - en même temps qu'elle ferait vaciller l'ensemble de notre appareil de production culturelle, et disparaître des compagnies et des salles de spectacle (Interruptions sur les bancs du groupe UMP).

Or c'est ce régime dont le MEDEF réclame la suppression pure et simple. Monsieur le ministre de la culture, depuis des années vos prédécesseurs ont su préserver notre création artistique. Comment comptez-vous faire face à cette nouvelle offensive du MEDEF ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Jean-Jacques Aillagon, ministre de la culture et de la communication - C'est en effet une question récurrente, et mes prédécesseurs ont connu des manifestions semblables. C'est une question grave car elle concerne des dizaines de milliers de personnes. C'est une question grave car elle est déterminante pour l'avenir du spectacle vivant et de notre production audiovisuelle. Mais elle relève des partenaires sociaux : l'UNEDIC n'est pas gérée par l'Etat.

C'est une question grave, enfin, parce que le régime spécial de l'intermittence a donné lieu, ces dernières années, à des abus caractérisés (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). Les partenaires sociaux doivent comprendre que la préservation de ce régime suppose l'éradication de ces abus.

Le ministère des affaires sociales et moi-même avons confié à nos inspections générales respectives une mission d'expertise (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste), dont les conclusions vous seront remises le 30 novembre prochain. Nous agirons en fonction de leur contenu (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

PRATIQUES COMMERCIALES DE LA GRANDE DISTRIBUTION

M. Yannick Favennec - Après avoir subi des crises à répétition, le monde agricole doit faire face aux pratiques déloyales de la grande distribution. Les pouvoirs publics reconnaissent maintenant que les fameuses « marges arrière » ont atteint un niveau excessif : entre 30 et 40 % !

Les agriculteurs de mon département dénoncent depuis longtemps ces pratiques scandaleuses. Tandis que les centrales d'achat prospèrent, beaucoup de producteurs sont acculés à la faillite. Vous avez montré, Monsieur le secrétaire d'Etat aux PME, votre volonté de régler ce problème, et une réunion interministérielle vient d'avoir lieu à cette fin, mais les agriculteurs attendent des actes concrets. C'est pourquoi ils souhaitent savoir précisément quelles décisions seront prises, et dans quel délai.

M. Renaud Dutreil, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation - Il est exact que les « marges arrière » ont atteint en France des proportions excessives, sans rapport avec la réalité des prestations commerciales que les distributeurs fournissent aux producteurs. Cette situation est préjudiciable aux consommateurs - et le Gouvernement est attentif à leur pouvoir d'achat - comme elle l'est aux PME, qui ne peuvent lutter à armes égales contre des entreprises multinationales.

Quand je suis arrivé, la situation était totalement bloquée. La commission d'examen des pratiques commerciales ne fonctionnait pas, et aucune initiative n'avait été prise sur ce dossier qui traînait depuis des années : c'est dire le peu de cas que faisait le gouvernement précédent des consommateurs et des PME (Protestations sur les bancs du groupe socialiste ; applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF). J'ai renoué les fils du dialogue (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), et deux accords importants ont été signés entre la distribution et les producteurs, qui vont dans le sens d'une réduction des marges arrière. Mais nous souhaitons aller plus loin dans la résorption de cette « bulle ». J'ai donc rendu public un projet de circulaire qui remplacera les circulaires Scrivener et Delors, et permettra de réduire encore ces marges. Nous avons la volonté d'instaurer des pratiques commerciales plus équitables et plus transparentes (Applaudissements sur les sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

RÔLE DES PAYS DANS L'ORGANISATION DU TERRITOIRE

Mme Hélène Tanguy - Créés par la loi Pasqua de 1995 et confortés par la loi d'aménagement et du développement durable du territoire de 1999, les pays ont permis de constater des réalités territoriales fortes, notamment en Bretagne. Ils peuvent jouer un rôle fédérateur entre les élus et les responsables économiques. Mais ils peuvent aussi, hélas, devenir un lieu de passage contraignant pour tous les dossiers, bridant la liberté des collectivités locales. Par ailleurs la constitution des pays comporte des difficultés : chevauchements de périmètres avec des communautés de communes ou d'agglomération déjà existantes, partage de compétences avec elles, des coûts de gestion supplémentaires. Enfin la loi de 1999 leur a fait obligation de se constituer en EPCI, en syndicats mixtes ou en GIP.

Par conséquent, je souhaite connaître les intentions du Gouvernement quant au rôle précis des pays dans l'organisation des territoires. Par quelles mesures entend-il éviter que le pays devienne un échelon administratif de plus ? Si le pays n'existait pas, faudrait-il l'inventer ? Et quand il existe, faudrait-il le supprimer ? (Applaudissements sur les sur les bancs du groupe UMP et sur quelques bancs du groupe UDF)

M. Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire - Il y a des pays qui « marchent », comme le vôtre, et d'autres qui connaissent un échec total. Nous avons le « chic », en France, pour transformer une idée simple en parcours du combattant administratif (« Très bien ! » sur divers bancs), et pour étouffer une démarche politique intelligente dans une camisole réglementaire... Quel est l'objectif ? Favoriser le plus possible la réunion des volontés locales autour d'un projet de territoire. Mais il faut en rester là ! Le pays ne doit être qu'un espace de projet, porté par une structure juridique souple. Le périmètre doit épouser le projet, non l'inverse. En aucun cas il ne doit être une structure d'exécution, ni un enjeu de pouvoir pour les collectivités territoriales et l'Etat.

M. Jean Glavany - C'est ce qui est dans la loi !

M. le Ministre - C'est pourquoi il faut supprimer toutes les procédures consultatives obligatoires, CRADT ou CDCI, pour intégrer la volonté exprimée dans une cohérence de territoire régional. C'est par la qualité de son projet que le pays favorisera donc la mobilisation des fonds européens, nationaux, régionaux et départementaux. Il faut donc inciter les élus locaux à associer les forces vives économiques, sociales, associatives à l'élaboration du projet, en affichant clairement les principes, mais en leur laissant le soin d'organiser librement cette consultation.

En résumé : le pays comme espace de projet, non d'exécution ; comme expression de la volonté locale, non comme lieu de pouvoir ; priorité au projet, non à la procédure ; bref, non au formalisme ! Avec Gilles de Robien et Patrick Devedjian, nous proposerons rapidement une clarification et une harmonisation des quatre lois. J'ai également saisi de ce sujet les délégations parlementaires à l'aménagement du territoire.

M. le Président - Nous en avons terminé avec les questions au Gouvernement.

La séance, suspendue à 15 heures 50, est reprise à 16 heures 5 sous la présidence de M. Baroin.

PRÉSIDENCE de M. François BAROIN

vice-président

LOI DE FINANCES POUR 2003 -deuxième partie- (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2003.

INTÉRIEUR

M. Marc Le Fur, rapporteur spécial de la commission des finances pour la sécurité intérieure et la gendarmerie - En nous faisant confiance, les Français nous ont assigné une obligation de résultat : réduire l'insécurité. Le Gouvernement s'est attelé à la tâche dès cet été avec la loi d'orientation et de programmation sur la sécurité intérieure - LOPSI - que votre budget vient parachever.

La LOPSI a prévu, au cours de la période 2003-2007, 13 500 créations d'emplois de policiers et de gendarmes, et 5,6 milliards d'euros de crédits supplémentaires.

Si l'exécution intégrale d'une loi de programmation reste rare, l'inquiétude n'est plus de mise pour la LOPSI. Les syndicats de police que nous avons reçus, Gérard Léonard et moi-même, nous ont d'ailleurs dit leur satisfaction.

Avec 1 900 emplois créés dans la police, 1 200 dans la gendarmerie et les crédits dévolus au fonctionnement et à l'équipement de ces deux forces, plus de 40 % de l'effort prévu est accompli dès 2003. Le budget de la police atteindra l'année prochaine 5,4 milliards d'euros, c'est-à-dire 300 millions de plus que cette année, tandis que 330 millions d'euros viendront abonder le budget de la gendarmerie.

Plusieurs mesures nouvelles rétabliront les capacités opérationnelles des services de sécurité et augmenteront les effectifs sur le terrain.

Le budget s'attache ainsi à régler définitivement le dossier de la réduction du temps de travail dans la police, véritable bombe à retardement qui ne pouvait être désamorcée que par le rachat négocié de jours de RTT. Un jour de RTT racheté correspond au recrutement de 500 policiers ! Le budget 2002 avait prévu - incomplètement puisque le collectif de cet été a ajouté 30 millions d'euros supplémentaires - le rachat de trois jours seulement. Votre projet de budget permet de racheter trois jours supplémentaires à titre obligatoire et deux à titre facultatif, pour un coût de 47 millions d'euros. Le rachat de jours de RTT pourrait utilement inspirer d'autres ministères, notamment celui de la santé.

Le budget permettra d'augmenter les effectifs sur le terrain, directement par la création de 890 emplois de gardiens de la paix et de 1 200 emplois d'officiers et sous-officiers de gendarmerie, indirectement par la création de 1 000 emplois de personnels administratifs dans la police.

Je souscris à votre idée de recruter prioritairement des personnels administratifs : leur prise de poste peut intervenir rapidement, et l'encadrement administratif de notre police est notoirement insuffisant, ce qui débouche sur un gaspillage de compétences. La Cour des comptes et la mission d'évaluation et de contrôle de la commission des finances ont insisté à plusieurs reprises sur ce point. On ne peut que regretter que l'objectif de créer 5 000 emplois administratifs affirmé par la LOPS de 1995 n'ait pas été respecté, et que de trop nombreux policiers restent affectés à des tâches administratives. Créer des postes de personnels administratifs permettra de les redéployer sur le terrain.

Une telle politique se heurtera fatalement à des résistances et à la force des habitudes. Aussi vous faudra-t-il une volonté sans faille pour tirer toutes les conséquences du renforcement du personnel administratif et réaffecter à des tâches policières des personnels dont c'est le métier.

Le budget permettra enfin de renforcer les capacités judiciaires de la police, grâce à la création de 2 000 primes d'OPJ supplémentaires, l'objectif étant de doubler le nombre d'OPJ dans le corps des gradés et gardiens pour le porter à 8 000.

Le budget et la LOPSI vont sortir les services de sécurité intérieure d'une paupérisation indigne de la France de ce début de siècle, et qui démotive les personnels, comme en témoignent les mouvements de protestation de l'automne 2001.

Il n'est plus tolérable que nos policiers et gendarmes roulent dans des voitures mal entretenues, travaillent dans des locaux vétustes et en soient réduits à apporter au bureau leur ordinateur personnel.

Il n'est plus tolérable que le redéploiement du réseau ACROPOL, qui permettra aux policiers de communiquer sans être écoutés par les voyous, se poursuive au rythme d'un ou deux départements supplémentaires par an. L'an prochain, 14 nouveaux départements disposeront de ce réseau, l'objectif étant de couvrir l'ensemble du territoire en 2008.

L'enveloppe LOPSI pour la police permettra de financer les priorités en matière d'équipement individuel - doublement du nombre de gilets pare-balles, renouvellement de l'armement -, d'améliorer le parc automobile, d'accélérer le déploiement d'ACROPOL dans les sites souterrains de la SNCF et de la RATP, de poursuivre les grands projets immobiliers et de lancer un programme ambitieux pour la préfecture de police, le casernement des CRS en Ile-de-France et les écoles de police.

Le « rebasage » du budget de la gendarmerie permettra de rétablir la sincérité des comptes. Les maires se féliciteront des crédits supplémentaires destinés à éteindre les dettes de loyers de la gendarmerie.

Ces mesures sont le signe tangible que la nation fait confiance à ses policiers et gendarmes, qui assument une tâche des plus complexes et doivent avoir les moyens de le faire. Mais la politique de la sécurité intérieure ne se réduit pas à un budget : tout cet effort financier s'inscrit dans des réformes structurelles majeures.

Le rapprochement entre police et gendarmerie est la première d'entre elles. Désormais, l'emploi des forces de gendarmerie relève de votre autorité, Monsieur le ministre de l'intérieur, tandis que la gestion des personnels et du matériel reste au ministre de la défense. Sans remettre en cause le statut militaire de la gendarmerie, on peut se demander s'il ne faut pas aller encore plus loin.

Autre réforme prometteuse : la création d'unités pertinentes, telles que les 28 GIR ou la future police régionale des transports en Ile-de-France. Faire travailler ensemble policiers, gendarmes, douaniers, agents du fisc, ou de la répression des fraudes était indispensable.

Parmi les réformes structurelles figure aussi la réorganisation de la gendarmerie, avec son renforcement dans les zones périurbaines et le regroupement en communautés de brigades dans les zones rurales.

Si l'objectif poursuivi ne peut être discuté, sa mise en _uvre exigera prudence et discernement. Le but est d'accroître la rapidité d'intervention de la gendarmerie. Le regroupement peut permettre de concilier l'indispensable permanence du service et les exigences de confort de vie pour les gendarmes et leurs familles.

Dans ces domaines, nous devons faire preuve d'esprit d'innovation. Pourquoi ne pas imaginer, dans les villes où interviendrait un transfert de la police vers la gendarmerie, une période intermédiaire où les policiers déjà en place et les gendarmes cohabiteraient ?

Par ailleurs, il est indispensable que la doctrine d'emploi des forces mobiles évolue (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP).

Elles regroupent 30 000 personnes motivées et bien équipées. Il faut utiliser ce professionnalisme dans des missions de sécurité publique, au lieu de voir les policiers s'agglutiner autour des lieux de pouvoir, l'arme au pied.

Il faut territorialiser les forces de l'ordre et réduire les temps de déplacement. Aujourd'hui les critères de rémunération encouragent au déplacement ce qui fait que nos CRS, nos escadrons de gendarmes mobiles se croisent sur les routes, gâchant un temps précieux (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP).

La commission des finances se doit de poser le problème de l'efficacité de l'action publique. Je vous encourage, Monsieur le ministre, à faire la chasse aux gardes statiques, elles doivent devenir l'exception ! Un poste de policier en faction 24 heures sur 24 mobilise 7 personnes ! La question se pose en particulier dans les préfectures, où l'on pourrait remplacer les gardes statiques par un système combinant vidéosurveillance, présence de vigiles et rondes de police.

Il est temps aussi de sortir du tout-police de proximité. La première fonction des policiers n'est pas de dire bonjour aux commerçants ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) Ils ne sont pas non plus des travailleurs sociaux : ils sont recrutés pour prévenir la délinquance, poursuivre les voyous et les appréhender. L'erreur est d'avoir sacrifié à la police de proximité l'enquête judiciaire et l'investigation, ce qui a provoqué un effondrement du taux d'élucidation des affaires.

La gauche a trop misé sur la police de proximité car pour elle importait plus le « sentiment d'insécurité » que l'insécurité elle-même. De cette analyse erronée découlait une méthode erronée : il s'agissait de montrer des uniformes plus que d'accroître l'efficacité du dispositif (Protestations sur les bancs du groupe socialiste).

M. Jean-Pierre Blazy - Caricature !

M. Marc Le Fur, rapporteur spécial - Je terminerai en évoquant le dossier de la sécurité civile, et en particulier les pompiers, envers lesquels nous avons, après ce qui vient de se passer à Strasbourg, une dette particulière. Vous avez fait des annonces importantes concernant le volontariat. En 2003, le budget de la sécurité civile permettra le renforcement du Groupe des moyens aériens, la poursuite de la modernisation de la brigade de Paris et la pérennisation du soutien à l'investissement des SDIS.

La commission des finances a adopté les crédits de la police et de la sécurité civile pour 2003 (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Gérard Léonard, rapporteur pour avis de la commission des lois pour la police - Cet été, au moment de l'adoption de la LOPSI, nous étions nombreux à nous réjouir du nouvel élan donné à la politique de sécurité dans notre pays.

Un effort sans précédent en faveur de la police et de la gendarmerie était engagé : 13 500 emplois supplémentaires sur cinq ans, 5,6 milliards d'euros de crédits nouveaux, assortis d'une réorganisation et d'un redéploiement des forces. Jamais dans l'histoire de la Ve République, la sécurité intérieure n'aura bénéficié d'une contribution d'une telle ampleur.

Il est vrai aussi que jamais nous n'avions connu une telle explosion de la délinquance : plus 40 % entre 1981 et 2001, plus 16 % entre 1997 et 2001 ! En particulier, les crimes et délits contre les personnes ont augmenté de 90 % en dix ans et de 10 % pour la seule année 2001.

Un sujet de préoccupation spéciale est la délinquance des mineurs qui a augmenté de 79 % au cours de ces dix années. Les mineurs représentent désormais 21 % des personnes mises en cause alors qu'ils forment moins de 8 % de la population nationale.

Un tel défi justifie une détermination sans faille, s'exerçant, bien entendu, dans le respect des principes fondamentaux de notre droit.

La loi d'orientation et de programmation répond à l'attente des Français et à l'exigence de « reconquête républicaine ». Si certains exprimaient des doutes sur sa mise en _uvre concrète, ce budget, sonnant l'heure de vérité, devrait les rassurer et conduire les plus sceptiques à le voter (Protestations sur les bancs du groupe socialiste).

Pour le détail des mesures proposées, je vous renvoie à l'excellent rapport de Marc Le Fur, et accessoirement au mien... (Sourires) 1 900 emplois nouveaux seront créés dans la police nationale, s'ajoutant aux 1 200 emplois pour la gendarmerie et à un millier de postes administratifs, techniques et scientifiques, qui déchargeront les policiers des tâches qui ne relèvent pas directement de la sécurité publique.

Ainsi dès la première année, près du tiers des emplois prévus sur cinq ans auront été créés. A ces efforts s'ajoute la décision de pérenniser les 2 152 emplois en surnombre non encore régularisés. Par ailleurs, des crédits supplémentaires permettront de compenser les effets de la réduction du temps de travail. Enfin, la nouvelle doctrine de l'emploi des forces mobiles doit permettre d'affecter plusieurs milliers de CRS et de gendarmes mobiles aux missions de sécurité quotidienne.

Ces créations d'emploi s'accompagnent de mesures de revalorisation des carrières. L'indemnité d'OPJ sera doublée et la qualification d'OPJ attribuée à 2 000 gradés et gardiens supplémentaires.

Pour les crédits de fonctionnement, on note 45 millions d'euros de mesures nouvelles, auxquels s'ajoutent 40 millions d'euros en loi de finances rectificative. Cela permettra d'achever l'équipement en gilets pare-balles, d'acquérir des matériels de protection comme les « flash balls » et d'engager le renouvellement de l'armement. Saluons aussi l'effort très important pour le renouvellement du parc des véhicules - 40 millions d'euros supplémentaires lui seront consacrés dans la loi de finances rectificative.

S'agissant de l'investissement, les crédits d'équipement, qui financent l'informatique, les transmissions, les véhicules lourds, le logement et l'immobilier, progressent de près de 53 % en crédits de paiement et de 49 % en autorisations de programme. Les moyens prévus pour le parc immobilier, trop souvent délabré, augmentent de 100 millions d'euros en autorisations de programme dont 40 millions en loi de finances rectificative, et de 66 millions d'euros en crédits de paiement, ce qui représente un doublement par rapport à 2002. Les mises en chantier totalisant plus de 80 000 m2 en 2003, contre 45 000 m2 en 2002. L'objectif fixé par la LOPSI est de 100 000 m2 en 2007.

Au total, les crédits de la police augmentent de plus de 300 millions d'euros et ceux de la gendarmerie de 330 millions. Dans cet ensemble, 600 millions d'euros relèvent de la loi de programmation, ainsi déjà financée à 40 %.

Les moyens financiers ne suffisent cependant pas à assurer le succès d'une politique : la définition d'objectifs pertinents, servis par une stratégie performante, en sont la condition.

La LOPSI a fixé les nouvelles priorités ; l'excellent budget qui nous est soumis contribuera à leurs réalisations. Le placement des forces de gendarmerie et de police sous un commandement unique, la création des GIR, le redéploiement d'une grande partie des forces mobiles pour la sécurisation sont autant de nouvelles dispositions qui assureront une plus grande synergie opérationnelle et une efficience accrue des services engagés dans la lutte contre l'insécurité.

Le rééquilibrage, au profit de l'action judiciaire, figure au premier plan des nouvelles orientations du Gouvernement. J'ai mesuré combien il s'impose si l'on veut réduire le nombre des crimes et délits dans notre pays. Depuis cinq ans, priorité fut donnée à la police de proximité. L'option est louable - elle a été théorisée par la LOPS de 1995 - mais, faute de moyens adéquats, elle s'est soldée par un échec. La police de proximité est peu productive, excessivement diurne ; elle a contribué à affaiblir les services d'investigation, quand il fallait les renforcer. On a déshabillé Pierre l'enquêteur pour mal habiller Paul l'îlotier.

M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales - C'est vrai !

M. Gérard Léonard, rapporteur pour avis - A la préfecture de police de Paris, la direction régionale de la police judiciaire a vu ses effectifs diminuer de plus de 18 % en cinq ans. Dès lors, comment s'étonner du faible taux d'élucidation : 33 % en 1992, 25 % en 2001, police et gendarmerie confondues.

En quelques mois, un travail inverse a été accompli ; ce budget en est l'éloquente expression. Votre action, Monsieur le ministre, est impressionnante par sa force et sa pertinence ; elle est noble par les valeurs qui l'inspirent - celles de la République -, car au-delà des polémiques mesquines, c'est cela qui est en jeu dans votre combat : assurer la sécurité pour tous, sur l'ensemble du territoire. Telle est la cause de la liberté et de l'égalité.

La commission des lois a émis un avis favorable à l'adoption de votre excellent budget (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

M. Thierry Mariani, rapporteur pour avis de la commission des lois pour la sécurité civile - Paysages de désolation, vies brisées, populations meurtries, tel est le quotidien des personnels de la sécurité civile qui secourent les victimes de drames individuels ou collectifs.

Les tragédies de ces derniers mois ont montré l'étendue des missions de ceux qui mettent leur vie en danger pour sauver celle de leurs concitoyens. Les inondations, accidents industriels, incendies, accidents de la route et attentats dont les médias se font l'écho sont autant de catastrophes qui suscitent détresse, interrogations et parfois colère. Les sinistrés demandent si l'on ne peut améliorer la prévention des risques naturels ou technologiques, l'information des citoyens, l'efficacité des retours d'expérience ? Oui.

Grâce à ce budget, les moyens sont enfin disponibles pour cette amélioration. Il s'élève à 323 199 721 €, soit une augmentation de 29,7 % par rapport à l'année dernière qui permettra de poursuivre la modernisation de la sécurité civile.

L'organisation des secours relève d'une compétence partagée entre l'Etat et les collectivités territoriales, mais essentiellement à la charge de ces dernières qui financent les services départementaux d'incendie et de secours.

Le présent budget regroupe les moyens alloués à la direction de la défense et de la sécurité civile qui est une structure de coordination et de soutien aux moyens de secours locaux. Elle dispose de moyens aériens, d'unités militaires d'instruction et d'intervention, d'établissements de soutien logistique, de centres de déminage, d'états-majors responsables des zones de défense et de structures de formation.

En tant que rapporteur, je me réjouis que ce budget comporte enfin de réelles avancées. Outre des mesures en faveur des personnels, il accroît les moyens techniques de la sécurité civile, crée un fonds d'aide à l'investissement des services départementaux d'intervention et de secours - SDIS - et aide la sécurité civile à s'adapter aux nouvelles menaces.

Chaque année, des personnels de la sécurité civile sont victimes d'accidents. En 2001, vingt d'entre eux sont morts dont plus de la moitié dans le cadre d'opérations de secours, plus de 5 500 ont été blessés lors d'interventions opérationnelles, dont 2 256 gravement.

Certains sapeurs-pompiers ont été victimes d'actes de violence - et c'est insupportable - alors qu'avec courage et abnégation ils portaient assistance à leurs concitoyens. Trois pompiers ont ainsi été blessés ce week-end dans le quartier de Haute-Pierre à Strasbourg, et cinq cents de leurs collègues ont manifesté leur colère hier à Strasbourg. Nous avons pris note de votre volonté de mettre fin à cette situation.

240 000 hommes et femmes servent dans le corps des sapeurs-pompiers, dont 200 000 volontaires. Sur eux repose la lutte contre les risques naturels ou technologiques ; incendies, inondations, accidents nucléaires, radiologiques, bactériologiques ou chimiques. En 2001, ils ont réalisé plus de 3,6 millions d'interventions.

En 2003, vous avez décidé d'agir grâce à un budget qui tient compte des particularités et de la dangerosité des missions des personnels. Ainsi, une indemnité spécifique compensera l'exigence de disponibilité des personnels des unités militaires et de la Brigade des sapeurs-pompiers de Paris pour un montant de 3,3 millions d'euros.

Vous avez décidé de tout faire pour remédier à la crise du volontariat, clé de voûte du dispositif de secours. Depuis quelques années, les effectifs stagnent, alors que le nombre d'interventions s'accroît ; on constate également une diminution de la durée des engagements alors que la gestion des crises se révèle de plus en plus compliquée. Il s'agit sans doute des conséquences des contraintes de la vie professionnelle et sociale d'aujourd'hui, de la judiciarisation croissante de notre société ou du contexte de plus en plus difficile dans lequel se déroulent les interventions. Le temps libéré par l'instauration des 35 heures ne semble du reste pas avoir favorisé cet engagement au service de la collectivité - ceci dit à l'intention de mes collègues de gauche.

Dès cet été, vous avez mesuré l'enjeu de la crise du volontariat et apprécié l'urgence des mesures qu'il convient de prendre. Afin de remédier à ce qu'un quotidien a qualifié de « mal-être des pompiers volontaires », vous avez nommé, Monsieur Jean-Paul Fournier, maire de Nîmes, président d'une commission chargée de dresser un bilan des actions menées en faveur des volontaires depuis 1990, de leur application et de leur pertinence au regard des objectifs suivis.

Devant les sapeurs-pompiers réunis en congrès à la mi-septembre, vous avez présenté les axes de travail en faveur du volontariat. Ainsi, tous ces efforts devraient permettre d'agir rapidement. En outre, vous avez exprimé la volonté de voir évoluer la situation des volontaires, qu'il s'agisse de l'attribution d'un avantage retraite au titre du volontariat, du montant de l'allocation de vétérance versée aux sapeurs-pompiers ayant quitté le service actif avant le 1er janvier 1998, de mesures destinées à rendre le volontariat plus attrayant ou de la prise en compte, au niveau scolaire et professionnel, de l'expérience des volontaires.

Ce budget de la Sécurité civile comporte aussi des mesures propres à accroître les moyens de la Sécurité civile. Ainsi, les investissements de l'Etat connaissent une nette progression imputable à l'important effort réalisé sur les crédits de maintenance dotés de 57 millions d'euros en autorisation de programme et de 69 millions d'euros en crédits de paiement.

De même, les moyens de fonctionnement des services opérationnels progressent de 2,5 %, soit 32,6 millions d'euros. La poursuite de la modernisation de la flotte aérienne de la sécurité civile constitue l'un des objectifs de ce budget. En effet, si les Canadairs ont été renouvelés, des hélicoptères vétustes sont encore en service. A l'issue du processus de renouvellement de la flotte d'hélicoptères, la Direction de la défense de la sécurité civile disposera de moyens d'interventions modernisés, dont le concours est précieux pour lutter contre les incendies ou pour secourir les personnes.

Ainsi les hélitreuillages effectués par les hélicoptères lors des inondations des 8 et 9 septembre derniers ont sans doute permis d'éviter 800 morts, qui se seraient ajoutés aux 25 victimes, hélas à déplorer.

D'autre part, la création d'un nouveau fonds d'aide à l'investissement des SDIS constitue la principale innovation de ce budget 2003 et son troisième point fort.

Afin d'aider ces services à assumer les dépenses d'investissement nécessaires à leur modernisation, une majoration exceptionnelle de la dotation globale d'équipement leur a été affectée en 2000, 2001 et 2002, à hauteur de 45,7 millions d'euros. Mais l'article 24 de la loi du 28 décembre 1999 modifiant le code général des collectivités territoriales, n'avait rien prévu au-delà de 2002.

Un fonds d'aide à l'investissement des SDIS doté de 45 millions d'euros en autorisation de programme et crédits de paiement est donc créé à cette fin. Il sera géré par la direction de la défense et de la sécurité civiles.

Je souligne un double progrès : ce fonds est réellement pérennisé pour les années à venir ; les critères d'attribution ne tiennent plus compte des seules dépenses de fonctionnement mais prendront la forme de subventions ciblées sur les projets les plus importants.

Ainsi, vous avez exprimé le souhait que, dès 2003, le fonds puisse aider les SDIS qui souhaitent basculer leur réseau de transmissions sur la technologie ACROPOL.

A ce propos, vous avez affiché votre ambition de voir les trois forces de sécurité - police, gendarmerie, pompiers - utiliser le même réseau de télécommunications pour qu'il soit mis fin à la situation peu rationnelle qui prévaut actuellement.

La volonté d'adapter la sécurité civile constitue le quatrième point fort de ce budget. Elle doit aujourd'hui faire face à des risques nouveaux dont la gestion s'avère de plus en plus compliquée et pour lesquels la prévention doit être améliorée. Les attentats du 11 septembre et l'explosion de l'usine AZF ont mis en évidence l'existence de nouvelles menaces.

La modernisation de la sécurité civile est indispensable pour donner à ce service les moyens rendus nécessaires par l'élargissement de son champ d'intervention et par la demande croissante de nos concitoyens.

Plusieurs structures concourent à la formation des sapeurs-pompiers, dont les écoles départementales et interdépartementales. Dans un contexte de risques accrus et de nécessaire développement d'une culture de défense civile, vous avez annoncé la création, à Cambrai, d'un pôle de défense civile. Il répond à une nécessité de formation à la lutte contre les risques nucléaires radiologiques, biologiques et chimiques.

Grâce à ce budget pour 2003, la Sécurité civile se tourne résolument vers l'avenir et se prépare à mieux secourir encore la population demain. En prenant dès son entrée en fonctions des mesures relatives à l'organisation de la Sécurité civile et à ses personnels, le ministre a montré l'attention qu'il porte à ce service, essentiel au pays. Cet effort doit être salué.

La commission des lois a bien entendu donné un avis favorable à ces crédits (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

M. Marc Laffineur, rapporteur spécial de la commission des finances pour les collectivités locales - Les concours de l'Etat aux collectivités locales augmentent de 3,5% en 2003 pour atteindre 58,2 milliards d'euros, et même 58,3 si l'on tient compte du prélèvement de 100 millions d'euros opéré sur la régularisation de la DGF pour 2001. 2003 sera donc une bonne année pour les collectivités ! Il faut saluer la reconduction du contrat de croissance et de solidarité, laquelle n'avait rien d'évident dans le contexte actuel de maîtrise de la dépense publique. Ce contrat, indexé sur l'inflation mais aussi sur un tiers de l'évolution du PIB, permettra aux collectivités de partager les fruits de la croissance. L'enveloppe normée s'élève à 30,85 milliards d'euros, voire 30,95, en tenant compte du prélèvement évoqué précédemment.

La progression de la DGF, 2,29%, est satisfaisante. Elle donnera quelques marges pour le financement de l'intercommunalité, lequel requerrait en 2003 près de 1,8 milliard d'euros.

Les dotations de solidarité, tant urbaine que rurale, progressent légèrement, le Gouvernement ayant prévu des abondements exceptionnels représentant 162 millions d'euros.

La politique de péréquation est préservée. Les ressources du Fonds sont stabilisées - alors qu'elles avaient fortement chuté en 2002, grâce à une dotation de 271 millions d'euros allouée suite à l'assujettissement de France Télécom à la fiscalité locale dans les conditions de droit commun. En accord avec le Gouvernement, la majorité parlementaire a reconduit en 2003 l'abondement exceptionnel dont bénéficie le Fonds national de péréquation depuis 1999. Là encore, il faut saluer les efforts du Gouvernement et de sa majorité pour rétablir l'équilibre budgétaire de ces fonds nationaux de péréquation.

Autre motif de satisfaction : l'évolution de la dotation de compensation de la taxe professionnelle - DCTP. Certes, elle diminuera de 5,15 %, mais moins qu'en 2002 où elle avait baissé de 7,5 %. Cette diminution sera atténuée pour les collectivités les plus défavorisées, le Gouvernement ayant reconduit le dispositif de compensation.

Si je ne peux que me féliciter de toutes ces propositions, j'exprimerai cependant quelques inquiétudes concernant l'avenir.

Premier motif d'interrogation : la reconduction du contrat de croissance et de solidarité. Ce mécanisme devait permettre aux collectivités de mieux prévoir leurs ressources. Or, il ne remplit plus cette fonction, ne serait-ce que parce qu'il est reconduit d'une année sur l'autre, sans perspective pluriannuelle, ou parce qu'il ne couvre en réalité que 53 % des dotations de l'Etat aux collectivités. Le Gouvernement entend-il le reconduire sur plusieurs années, éventuellement sous une forme aménagée ?

Deuxième motif d'interrogation : le financement des structures intercommunales. La France compte désormais 2 174 établissements publics de coopération intercommunale regroupant 47 millions d'habitants. Or, jusqu'à présent, le succès des politiques d'incitation à l'intercommunalité n'a pas été suivi d'une politique financière cohérente, et ce pour deux raisons. D'une part, la DGF, dont la structure remonte à 1993, parvient de plus en plus mal à financer, au sein d'une même enveloppe, la dotation forfaitaire allouée aux 37 000 communes, la dotation d'intercommunalité et les dotations de solidarité. Devant le poids croissant de l'intercommunalité, qui nécessite 150 à 200 millions d'euros supplémentaires par an, les précédents Gouvernements ont choisi la facilité en recourant à des abondements budgétaires externes en faveur des dotations de péréquation. Il ne sera pas possible de continuer dans cette voie. D'autre part, le coefficient d'intégration fiscale et le critère du potentiel fiscal, censés faciliter la répartition objective des dotations, aboutissent de fait à leur forte volatilité d'une année sur l'autre et à une course à l'intégration fiscale quelque peu artificielle.

Les compétences de plus en plus lourdes exercées par les EPCI exigent une garantie du niveau de leurs recettes. Ne pourrait-on envisager, soit de créer une DGF spécifique à l'intercommunalité - en sus de la DGF des communes et de celle des départements -, soit de permettre un jeu de vases communicants entre la DGF des communes et celle des groupements ?

Troisième sujet d'interrogation : les modalités de financement de nouveaux transferts de compétences. La relance de la décentralisation exige de réformer en profondeur la structure des dotations de l'Etat aux collectivités locales. La complexité et le manque de lisibilité des mécanismes en place, l'imbrication des circuits de financements, les difficultés récurrentes à financer le développement de l'intercommunalité concomitantes de l'octroi de dotations de péréquation rendent cette évolution inéluctable. Par ailleurs, le succès même de la réforme est subordonné à des efforts accrus en matière de péréquation, que les mécanismes actuels de répartition de la DGF ne permettent pas.

C'est pourquoi je souhaiterai proposer la régionalisation de la DGF. Le Parlement se prononcerait sur un montant global, réparti entre les régions selon des critères objectifs et simples, prenant notamment en compte le nombre d'habitants et les ressources fiscales de chaque région. Une fois cette enveloppe ventilée, un comité des finances locales régional, regroupant des représentants des conseils régionaux, des conseils généraux et des communes, avec le préfet de région, selon des critères objectifs, répartirait cette DGF régionale, en fonction des spécificités locales. Cette réforme de grande ampleur, qui bouleverserait la tradition centralisatrice française, permettrait à la fois de mieux répondre aux spécificités des collectivités locales et de renforcer le poids de la péréquation au sein des concours de l'Etat. On ne peut pas décider depuis Paris ce qui est bon pour une commune rurale d'Auvergne ou de Bretagne !

La relance prochaine de la décentralisation ouvre également le débat sur la part des ressources fiscales dans les ressources totales des collectivités. Selon le rapport économique social et financier pour 2003, ces ressources représentaient, en 2001, 41,7 % du total. C'est le résultat de la suppression depuis 1997 de la part départementale et de la part régionale des droits de mutation à titre onéreux, mais aussi de la part régionale de la taxe d'habitation et de la part salariale de la taxe professionnelle. Ces suppressions ont certes donné lieu à compensation. Mais, au-delà même du coût de ces compensations pour l'Etat - près de 18 milliards d'euros en 2003, soit quatre fois plus qu'en 1998 -, cette politique n'est pas possible à long terme. Elle tend, en effet, à réduire l'autonomie financière des collectivités locales. Selon le rapport de l'observatoire des finances locales en 2002, l'Etat a pris en charge, en 2001, 30,5 % des recettes fiscales des collectivités locales perçues au titre des quatre « vieilles ». Ce pourcentage passe même à 33,7 % pour la taxe d'habitation et à 42,5 % pour la taxe professionnelle.

Or les collectivités doivent pouvoir disposer de recettes fiscales dynamiques leur permettant de financer les charges nouvelles que ne manquera pas d'entraîner pour elles la relance prochaine de la décentralisation. Les collectivités locales des Etats membres de l'Union européenne bénéficient d'ailleurs de telles recettes dynamiques, par le biais du transfert d'une partie, soit de l'impôt sur le revenu en Allemagne, Autriche, Grèce et Portugal, soit d'un pourcentage de la TVA en Allemagne, Autriche, Espagne, Grèce, Italie et au Portugal, soit d'un pourcentage de l'impôt sur les entreprises au Danemark, en Finlande et au Portugal. Je ne saurai trop recommander au Gouvernement d'étudier ces exemples.

En conclusion, le budget des dotations de l'Etat aux collectivités locales pour 2003 est un bon budget que la commission des finances a bien entendu voté. Mais c'est un budget de transition. Il nous appartient désormais de préparer l'avenir et de réformer en profondeur les mécanismes d'octroi de ces dotations (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

M. Jérôme Chartier, rapporteur spécial de la commission des finances pour l'administration générale et territoriale - C'est la première fois que la commission des finances élabore un rapport spécial sur le budget de l'administration générale et territoriale du ministère de l'intérieur. L'innovation se justifie par l'ampleur même des masses budgétaires en cause, lesquelles représentent, avec quatre milliards d'euros, un cinquième du budget total du ministère. Les crédits se répartissent en 2,4 milliards d'euros de charges de pensions, 1,4 milliard de dotations à l'administration centrale et aux préfectures, 37 millions pour les cultes, notamment pour l'application du concordat d'Alsace-Moselle, enfin 158 millions pour la vie politique, suite aux lois adoptées de 1988 à 1995 sur le sujet. Cette dernière enveloppe diminue car il n'est pas prévu d'élections en 2003.

Cette innovation se justifie également en ce que l'expérience de globalisation du budget, menée dans dix-huit préfectures depuis trois ans, constitue un véritable laboratoire de la réforme de l'Etat. Dans ces préfectures, les préfets préparent, en concertation avec les syndicats, le budget de la préfecture et gèrent eux-mêmes les crédits alloués, Ils peuvent notamment transformer des crédits de personnel en crédits de fonctionnement ou d'investissement si cela est plus approprié.

Cette démarche de globalisation a renouvelé le dialogue avec les forces syndicales, le préfet arbitrant à la fin. Il est très instructif d'observer qu'une centrale nationale comme FO est opposée à cette démarche, mais que ses élus l'approuvent à l'échelon local. Quand le budget est préparé sur le terrain, les responsables syndicaux comprennent l'arbitrage du préfet.

Je me réjouis que les crédits de l'administration territoriale augmentent de 2 %.

Alors que nous vivons partout ailleurs sous l'empire de la loi de séparation de 1905, le Concordat continue de s'appliquer en Alsace-Moselle. Le budget des cultes ne s'élève qu'à 37 millions, mais vous le gérez avec une certaine latitude puisque vous avez décidé de transférer des crédits de personnel en fonctionnement afin d'améliorer certaines primes, comme la prime de binage. Ces primes n'avaient pas été réévaluées depuis 1972, voire 1966. Vous les augmentez de 44 % : il aurait fallu 660 %, mais c'est un bel effort.

Le régime concordataire a l'inconvénient de ne pas proportionner les crédits au nombre des fidèles. Par ailleurs, il ne permet pas de financer d'autres cultes que ceux reconnus à l'époque du Concordat.

Les crédits destinés au financement de la vie politique s'élèvent à 250 millions d'euros. Ils comprennent le remboursement forfaitaire des dépenses de campagne et l'aide de l'Etat aux partis politiques. Je vous proposerai par un amendement de fixer un seuil en deçà duquel les partis ne pourront en profiter.

J'ai apprécié votre effort en faveur de l'action sociale : les crédits dégagés à ce titre s'élèvent à 39 millions, soit une hausse de plus de 8 %. Ils serviront à financer l'arbre de Noël des enfants des fonctionnaires de police, mais aussi l'accompagnement psychologique des personnels, qui vivent parfois des moments difficiles.

Vous ne serez pas surpris que la commission des finances ait approuvé ce budget (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

M. Manuel Aeschlimann, rapporteur pour avis de la commission des lois pour l'administration générale et les collectivités locales - En hausse de 5 %, le budget du ministère de l'intérieur est un de ceux qui progressent le plus. Cela illustre que la sécurité est bien devenue une des priorités du Gouvernement.

Comme l'a dit mon collègue Gérard Léonard, cette hausse est aussi la traduction de la loi d'orientation et de programmation sur la sécurité intérieure que nous avons adoptée en juillet.

Mais les missions du ministère de l'intérieur ne se limitent pas à la sécurité. Il lui appartient aussi de procéder à la réforme des structures de l'Etat annoncée par le Président de la République. Dans ce contexte, l'examen des concours de l'Etat aux collectivités locales est d'un grand intérêt. A cet égard, je salue l'effort consenti pour reconduire le contrat de croissance et de solidarité, selon les mêmes modalités d'indexation que l'année précédente. Vous garantissez de la sorte la pérennité des ressources. En effet, les crédits progressent de 1,9 % au sein de l'enveloppe normée. En particulier, la dotation globale de fonctionnement progresse de 2,29 %, pour représenter au total 18,87 milliards d'euros. La dotation de compensation de la taxe professionnelle continue de jouer le rôle de variable d'ajustement. Elle recule de 3,9 % - hors l'abondement lié au contentieux de Pantin. Les abondements exceptionnels au titre de la dotation de solidarité urbaine ou de la dotation de solidarité rurale représentent 160 millions d'euros.

Pour satisfaisants qu'ils soient, ces concours restent ceux d'un budget de transition. Ils s'inscrivent dans l'architecture de l'enveloppe normée, dont on connaît les imperfections. Le poids croissant de l'intercommunalité, l'empilement des dotations et des abondements justifient une réforme de grande ampleur, mais celle-ci serait prématurée à la veille d'une réforme de la décentralisation. Celle-ci s'accompagnera nécessairement d'une refonte des concours financiers.

J'ai souhaité que soit analysé le degré d'autonomie financière de nos collectivités locales par rapport à ce qui se passe en Europe. Il apparaît que la France est en bonne position. Toutefois, il est urgent de réformer la décentralisation, car nos collectivités territoriales ont dû faire face ces dernières années à une recentralisation insidieuse de leurs ressources, alors que leurs charges s'accroissaient notablement.

Le projet de révision constitutionnelle tend à garantir leurs recettes. Contrairement à ce qu'a fait le précédent gouvernement, l'Etat veillera à ce que les nouvelles compétences données aux collectivités locales soient intégralement financées.

Ce budget préfigure en certains points cette réforme : je pense en particulier à l'article relatif à la déliaison des taux. J'ai défendu vendredi en commission un amendement visant à rendre cette déliaison totale, c'est-à-dire à donner toute liberté aux élus. Cet amendement avait recueilli plus de 140 signatures. Au terme d'un long et riche débat, j'ai accepté de le retirer, compte tenu des assurances données par le Gouvernement. Cet article n'est qu'une étape et il faudra aller plus loin.

M. Gérard Léonard, rapporteur pour avis - Très bien !

M. Manuel Aeschlimann, rapporteur pour avis - Je salue par ailleurs l'effort exceptionnel de revalorisation catégorielle, qui permettra de rattraper certains retards.

L'administration préfectorale continue de se moderniser, puisque la réforme de la globalisation va toucher onze nouvelles préfectures. Ainsi, près du tiers de nos préfectures sera globalisé, dont, pour la première fois, une préfecture d'outre-mer : celle de la Martinique. La globalisation, qui exige un changement de culture administrative, doit être généralisée.

La commission des lois a approuvé ces crédits et je vous invite à en faire autant (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

M. Debré remplace M. Baroin au fauteuil présidentiel

PRÉSIDENCE de M. Jean-Louis DEBRÉ

M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales - Je remercie les rapporteurs d'avoir présenté si clairement ce budget. Je ferai le meilleur usage de leurs suggestions. Patrick Devedjian et moi nous réjouissons que vous approuviez l'esprit de ce budget. Il s'agit de tenir les engagements pris, ce qui est nécessaire pour recréer les conditions d'un débat politique dans ce pays.

Chacune de vos interventions a été marquée par une volonté réformatrice. J'ai noté le souci des six rapporteurs, qui ont appelé le Gouvernement à poursuivre des objectifs globaux et cohérents : on ne doit oublier personne. Eh bien ! Ce budget répond à l'esprit de vos interventions. En juillet, je vous ai présenté une loi d'orientation : certains parlementaires, notamment de l'opposition, se sont interrogés sur son utilité, nous reprochant de légiférer à crédit. Je peux comprendre cette crainte, tant il y a eu dans le passé de promesses non tenues. Mais j'en appelle à votre objectivité : ceux qui nous ont reproché de légiférer à crédit auront à c_ur de voter un budget qui comporte la réalisation de 40 % des objectifs financiers prévus dans la loi (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). C'est cela aussi, la crédibilité des responsables politiques. Sommes-nous capables de sortir du train-train, du discours de nos formations politiques, pour reconnaître, quand un gouvernement propose des décisions qui vont dans le sens que nous avons souhaité, que ces décisions méritent d'être encouragées ? Vous avez dit : nous voterons les moyens, mais nous ne partageons pas toutes les orientations ; c'est bien votre droit. Mais ces moyens sont au rendez-vous dans la loi de finances pour 2003 : y a-t-il une seule raison pour qu'ils ne fassent pas l'objet d'un consensus sur tous les bancs de cette assemblée ? Ce serait dire à nos compatriotes que le rétablissement de la sécurité publique n'est pas une victoire de la droite contre la gauche, du Gouvernement contre l'opposition, mais la compréhension que tous les élus de la nation ont des craintes légitimes de leurs concitoyens !

Pour ce qui est des effectifs, je comprends bien le scepticisme que nous rencontrons. Nos concitoyens entendent parler de milliards d'euros, de milliers de postes : ils voudraient dès le lendemain en voir les effets dans la rue ! Comment faire pour aller vite ? Nous avons annoncé la création de 1 900 emplois dans la police et 1 200 dans la gendarmerie Mais sur les 1 900 emplois de la police, 1 000 seront des emplois administratifs. Pourquoi ? Pour une raison simple : ça va vite ! On organise le concours, et aussitôt après on affecte les postes, alors que pour un gardien de la paix il faut au moins un an. Quant à ces mille emplois administratifs, le ministre des finances m'a autorisé à les engager sans attendre le vote de la loi de finances, afin qu'ils soient opérationnels avant fin 2002. Mais j'ai eu la surprise de constater qu'au ministère de l'intérieur il y avait mille autres emplois administratifs prévus au budget, mais non pourvus. J'ai donc engagé dès le mois d'août un autre concours, et ce ne sont pas mille, mais deux mille emplois administratifs qui seront créés avant la fin de l'année ! Ce qui signifie deux mille gardiens de la paix au service de la sécurité des citoyens.

Tout cela ne servirait à rien si nous ne répondions pas aux questions que posent les trente-cinq heures dans la police. Daniel Vaillant avait commencé, c'est vrai, et prévu de racheter trois jours au titre de la réduction du temps de travail. Mais il nous manquait toujours 4 000 équivalents temps plein... J'ai donc eu une discussion franche avec les syndicats sans faux-semblants. Je leur ai expliqué que pour rattraper ces 4 000 postes il fallait que chacun s'engage à travailler huit jours de plus. Et c'est huit jours dont nous avons proposé le rachat. C'est un effort, mais sans lequel on ne peut assurer la sécurité de nos concitoyens. Il me plaît d'ajouter que nous avons proposé de les racheter, non à 71 euros, comme M. Vaillant, mais à 85 euros. Ce ne sont pas ceux qui ont sans cesse à la bouche le mot « social » qui en font le plus en réalité ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF) Et je voudrais qu'on me dise comment expliquer aux policiers qu'on leur propose 71 euros pour le rachat au titre de la réduction du temps de travail, alors que les gendarmes en ont 85 pour le même travail. Telle n'est pas ma conception de l'égalité. Ces décisions aussi, je l'espère, pourraient faire l'objet d'un consensus.

Se posait ensuite l'important problème de l'emploi des forces mobiles, compagnies républicaines de sécurité ou escadrons de gendarmerie mobile. Le 1er novembre, leur doctrine d'emploi aura changé. Et de ce seul fait, ce sont 4 000 fonctionnaires et militaires de plus qui pourront se consacrer à l'ordre public et à la sécurité publique. J'ai requis tous les états de déplacement des CRS et des escadrons, et constaté que pour certains ils atteignaient 234 jours de déplacement... Comment peut-on faire de l'ordre public quand on a passé son année dans des cars, à aller d'un point à un autre ? Et quelle est l'efficacité d'une CRS ou d'un escadron qu'on installe dans un endroit où ils n'ont jamais mis les pieds, ne savent pas s'orienter et ne connaissent personne ? La nouvelle doctrine d'emploi les fidélisera systématiquement, pour les mettre au service de la sécurité publique, et non pas seulement de l'ordre public.

Dans la gendarmerie, une réforme de grande ampleur va s'engager avec les communautés de brigades. Cela n'implique aucune fermeture de brigade par principe. Pourquoi la réforme a-t-elle échoué auparavant ? Parce qu'on s'évertuait à faire des schémas nationaux, qui ne tiennent pas compte de la diversité. En montagne, quand il faut quarante-cinq minutes pour aller d'une brigade à l'autre, même une petite brigade doit être conservée, car la réalité du terrain ne permet pas à la grande brigade de secourir à temps les habitants. Mais si, en zone périurbaine, vous avez trois brigades par canton, on peut se poser la question de la restructuration. Et surtout l'organisation actuelle ne permet pas de faire des patrouilles et d'ouvrir les gendarmeries pendant le week-end. Si une communauté regroupe trois brigades, et qu'on distingue l'emploi de la brigade et son logement, chacun garde son logement, mais les forces se répartissent de façon à couvrir tout le canton, jour et nuit, toute la semaine. Or on l'a constaté, par exemple dans le Var, la délinquance a reculé partout où l'on a multiplié les patrouilles et les contrôles de nuit. Police et gendarmerie doivent être disponibles là où est la délinquance. A quoi bon déployer des moyens considérables entre huit heures et midi ? Les délinquants ne se lèvent pas tôt. Il faut mobiliser les forces l'après-midi, en soirée, et la nuit ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

Reste la question des redéploiements. Elle est très difficile, et suscite des inquiétudes légitimes. Mais la dernière répartition entre police et gendarmerie date de 1941. Qui soutiendra qu'en 63 ans la délinquance a si peu changé que nous pouvons garder la même carte de répartition ? De fait, dans leur discours national, toutes nos formations politiques ont reconnu la nécessité d'un redéploiement. Et je rends hommage à Lionel Jospin, qui a voulu y procéder en 1998. Je rends hommage du moins à l'objectif, non à la méthode - bien que je m'en sois saisi comme d'un contre-exemple... Pourquoi cela n'a-t-il pas marché ?

D'abord, à cause de l'idée très centralisatrice - qu'on enseigne peut-être trop dans certaines écoles - que la France, n'étant pas très intelligente, ne peut supporter qu'un schéma national, élaboré le plus souvent dans un bureau fermé par des inspecteurs généraux : ils ont la vérité sur tout, l'intelligence est dans le schéma national, le reste n'est que bêtise, démagogie et populisme... Avec une telle méthode, le temps de compter jusqu'à trois, le schéma est par terre et la réforme est enterrée ! C'est ce qui s'est passé. La réforme a fait passer trente-et-une gendarmerie en zone de police et onze commissariats en zone de gendarmerie : que de bruit pour un tel résultat !

Donc, on ne trouvera pas de schéma national dans le redéploiement que nous préparons, mais des schémas départementaux. Chaque préfet nous fait remonter le sien, qui n'est qu'une proposition ; puis nous déciderons.

M. Jérôme Lambert - Après quelles consultations ?

M. le Ministre - J'y viendrai dans un instant. La seconde raison de l'échec, c'est que le vrai but de la réforme était de masquer une baisse des effectifs (Protestations sur les bancs du groupe socialiste). Quand je suis arrivé il y a cinq mois, j'ai trouvé un trou de 2 500 emplois dans la gendarmerie. Mais les Français s'en rendent compte quand on leur raconte des balivernes. Nous, nous voulons faire le redéploiement en l'accompagnant des 7 000 hommes supplémentaires dont nous avons besoin.

Qui faut-il consulter pour cela ? Je l'ai déjà dit : le temps de la cogestion au ministère de l'intérieur est terminé. Je précise, car je ne souhaite pas que cette formule blesse : la cogestion, c'est quand on ne sait plus qui décide, du ministère ou des syndicats, et qui est responsable de quoi. Le dialogue avec eux est une obligation, particulièrement dans la police. Mais nous devons discuter avec eux des conséquences sociales du redéploiement, et non de son principe.

Le redéploiement pose certes des questions sociales - un brigadier ou un gardien de la paix a acheté son logement, tel autre fonctionnaire devra déménager - mais elles ne doivent pas aboutir à remettre celui-ci en cause.

Les élus locaux ne sont pas non plus des sots. Ils ne demandent que des postes de police et de gendarmerie ouverts jour et nuit et le maintien des effectifs. Loin d'être opposés au changement, ils savent souvent mieux le gérer que l'Etat. C'est avec eux que nous traiterons la question du redéploiement.

J'étais l'autre jour à Nantes - je crois l'avoir rappelé hier (Sourires) - où j'ai constaté que les 42 kilomètres du périphérique de cette ville présentent la particularité d'être situés pour les trois quarts en zone de police et pour un quart en zone de gendarmerie. Comment imaginer que les délinquants n'exploitent pas cette bizarrerie ? dans un souci d'efficacité, l'ensemble du périphérique nantais doit évidemment passer sous le contrôle de la police !

En ce qui concerne les moyens juridiques, j'attends avec impatience notre prochain débat car chacun pourra comprendre les dispositions que nous préparons. Nous parlerons prostitution, mais pas pour en faire un sujet de colloque à l'instar de cette intelligentsia qui s'indigne en passant porte de Saint-Ouen avant d'aller dîner et laisse finalement prospérer un phénomène qu'elle condamne à table ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Nos propositions, les habitants de ces quartiers les comprendront ! Aucune bande ne m'empêche de rentrer dans mon immeuble. Ce n'est donc pas pour moi que je défends cette mesure, mais pour tous ceux qui sont contraints de baisser la tête pour rentrer chez eux ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF) En ce qui concerne les nomades, je ne n'accepterai aucun amalgame. Le Gouvernement aidera les élus qui font des efforts, ceux qui ont appliqué la loi Besson dans leur département. Que les tartufes qui donnent des leçons depuis la cabine téléphonique du café de Flore me répondent : s'il y avait une telle urgence à agir, pourquoi seuls 21 départements sur 100 disposent-ils de terrains pour les nomades ? Avant de donner des leçons, mieux vaut s'interroger sur son bilan !

Le budget 2003, c'est aussi le matériel pour les policiers et les gendarmes. Les flashballs ne sont plus décriés. Etait-il si étrange de doter les forces de l'ordre d'une arme dont elles pouvaient se servir ? Nous voulons équiper chaque véhicule de police ou de gendarmerie de ce film protecteur qui permet d'éviter les éclats de verre. Je souhaite aussi que tous les fonctionnaires de police aient leur gilet pare-balles personnel avant la fin de l'année.

M. Jean-Pierre Blazy - Les gilets pare-balles, c'est nous !

M. le Ministre - Les obliger à enfiler le gilet imprégné de sueur de leur collègue qui vient d'achever sa patrouille méconnaît leur dignité (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF). Petit détail sans doute, mais c'est en additionnant les petits détails que l'on fait une grande politique sociale. Quant aux véhicules, il y a bien longtemps que leur état les met à l'abri de la convoitise des délinquants ! Rappellerai-je enfin que la semaine dernière, une compagnie de CRS a refusé de regagner son casernement tant celui-ci lui paraissait indigne ? Ce n'est à l'honneur ni de la droite, ni de la gauche.

ACROPOL fait l'objet de polémiques souvent injustes. Le système, qui fonctionne bien en province, a connu quelques ratés à Paris, notamment dans les tunnels du métro. J'ai rencontré le fabricant : le problème sera réglé à la fin de l'année. Mais qui peut admettre que la police, la gendarmerie et les pompiers utilisent des réseaux de transmission différents ? Ils doivent désormais impérativement être sur la même longueur d'ondes !

La police scientifique et technique est au c_ur de ce budget 2003. Le fichier des empreintes génétiques, n'en déplaise à certains, n'est que l'équivalent du fichier des empreintes digitales d'il y a quinze ans. Il ne compte que 1 200 noms, contre 1,7 million en Grande Bretagne - où il est interrogé 60 000 fois par an ! Quelle image notre pays donne-t-il de sa police scientifique quand il se refuse à utiliser une centaine d'empreintes de crainte de bafouer les droits de l'homme ? Les droits de l'homme qui comptent pour nous, ce sont ceux des victimes ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF) La présomption d'innocence doit bien sûr bénéficier au coupable, mais les victimes ont depuis trop longtemps besoin que l'on parle d'elles !

Je m'étonne d'entendre certains contester, après la réalité de l'insécurité, celle de la peur des Français. Faut-il que cette intelligentsia soit éloignée des préoccupations quotidiennes de nos concitoyens pour contester ainsi jusqu'à la sincérité des sentiments qu'ils expriment ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) Nous voulons redonner la parole à la France des oubliés, à la France modeste, à la France qui parce qu'elle ne se sentait pas représentée par la République n'a pas voté ou a choisi le pire, l'extrême-droite. Je n'adresse aucun message à la gauche. Quand le Gouvernement agit, il ne se demande pas si c'est en faveur d'une commune de droite ou de gauche ! Quand la délinquance baisse à Paris, je ne me demande pas si cela sert les intérêts de M. Delanoë : cela sert les intérêts des Parisiens ! Quand la situation explose à Mulhouse, je ne cherche pas à savoir si son maire est socialiste ou UMP, j'agis, parce que tous les maires sont confrontés au même problème ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF) Quand un campement illégal s'installe dans le Val-de-Marne, je ne me demande pas si le maire est communiste ou UMP : le second est aussi désarmé que le premier devant l'inertie de l'Etat ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF) Puisque le Gouvernement met en place cette politique de sécurité pour tous les élus, pour tous les Français, tous vos bancs devraient reconnaître que ce budget est un bon budget ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF)

M. Patrick Devedjian, ministre délégué aux libertés locales - Vous l'avez compris, le Gouvernement a consenti un effort très important pour le budget du ministère de l'intérieur. Mais il place intelligemment l'argent des contribuables puisque la ténacité et le talent de Nicolas Sarkozy commencent déjà à porter leurs fruits (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

Le budget du ministère de l'intérieur inclut également celui des collectivités territoriales. Pour elles aussi, le Gouvernement a consenti un effort, dans une perspective décentralisatrice. Vous en avez débattu la semaine dernière, puisque les dotations des collectivités territoriales, qui prennent principalement la forme de prélèvements sur recettes, figurent en première partie du projet de loi de finances. Comme l'ont rappelé vos rapporteurs Marc Laffineur et Manuel Aeschlimann, l'ensemble des concours de l'Etat aux collectivités territoriales s'élève à 58,2 milliards d'euros.

C'est une somme très importante, qui recouvre trois ensembles : les dotations budgétaires proprement dites sur lesquelles portera votre vote d'aujourd'hui - 8,2 milliards d'euros pour la DGD et la DGE - puis les prélèvements sur recettes que sont la DGF et la FCTVA, soit un total de 22,3 milliards d'euros, enfin, une masse un peu informe résultant de la recentralisation financière opérée par le gouvernement précédent, celle des compensations pour exonérations et dégrèvements qui atteint 26 milliards d'euros. En effet, la modernisation de la fiscalité locale n'a pas été effectuée et près de 15 milliards d'euros de ressources locales ont été remplacées par des dotations, renforçant la tutelle financière de l'Etat.

La politique de ce Gouvernement est, au contraire, de restaurer la liberté financière des collectivités locales, en se fondant sur trois principes.

Le premier est le respect des engagements financiers de l'Etat : la contractualisation pluriannuelle des relations financières entre l'Etat et les collectivités locales a été reconduite cette année, en dépit d'une conjoncture économique difficile.

En votant l'article 29 du projet de loi de finances, vous avez confirmé ce choix.

Deuxième principe, le renforcement de la péréquation entre les territoires. Ce ne sera plus un thème de discours, mais un droit protégé par la Constitution. C'est dans cet esprit que le projet initial proposait une progression de 2 % de la DSU et de la DSR. Sur proposition de la commission, un abondement supplémentaire de 23 millions a été opéré et des garanties spécifiques accordées aux communes ayant perdu le bénéfice de la DSU du fait du passage à la taxe professionnelle urbaine de leur groupement.

Je ne reprends donc pas à mon compte la polémique sur la baisse de la DCTP. Votre rapport a d'ailleurs démontré la justification de cette mesure.

Troisième principe, accentuer la responsabilité et l'autonomie fiscale des collectivités territoriales. Le futur projet de loi constitutionnelle leur garantit la libre disposition de leurs ressources fiscales. Ce budget s'inscrit dans cette volonté de rupture par rapport au passé. L'article 14 est une étape vers la liberté des taux.

Je répondrai d'ailleurs au MEDEF que les élus locaux sont aussi responsables que les chefs d'entreprise et ils savent très bien que s'ils augmentent trop la fiscalité locale, ils feront fuir les entreprises. Je rappelle que les entreprises ont bénéficié d'un cadeau extraordinaire de la part du gouvernement précédent : la compensation par l'Etat de la taxe professionnelle atteint 8 milliards d'euros, le patronat a donc été bien servi ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste)

C'est un budget de transition car les nouveaux principes constitutionnels obligeront à une réforme profonde comme l'a relevé le rapporteur spécial, la multiplication des dégrèvements et exonérations d'impôts a abouti à ce que le contrat de croissance ne représente plus que la moitié des transferts de l'Etat et ce n'est pas satisfaisant. En 2003 nous allons discuter d'une réforme d'ensemble de la DGF, en préservant la méthode du contrat pluriannuel.

M. Laffineur a également évoqué de nouvelles pistes pour financer l'intercommunalité. Une DGF spécifique poserait des problèmes car elle devrait augmenter de 15 % par an alors que la DGF n'augmente que de 2 à 3 % par an. Autre solution, la globalisation de la DGF, qui passerait ainsi de 18 à 30 milliards. Mais il faut faire des simulations pour éviter de mauvaises surprises.

Le Gouvernement est convaincu que la tuyauterie très complexe des finances locales doit être revue. Ce sera la suite logique et nécessaire des nouveaux principes constitutionnels, si le Parlement les vote, mais cette réforme exigera aussi concertation et simulations préalables (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

M. Baroin remplace M. Debré au fauteuil présidentiel

PRÉSIDENCE de M. François BAROIN

vice-président

M. Jean-Christophe Lagarde - Ce qu'il y a de dangereux dans les lois de programmation, c'est que très souvent elles ne sont pas appliquées : on oriente, on programme et puis on abandonne en cours de route, en fonction des difficultés du moment.

Monsieur le ministre, vous vous étiez engagé à décliner la loi de programmation sur la sécurité intérieure dès le budget 2003. La représentation nationale et le groupe UDF ne peuvent que vous être reconnaissants d'avoir tenu parole : dès la première année, 40 % des crédits annoncés sont engagés, c'est un cas unique qui montre que le Gouvernement a voulu traiter dans l'urgence un problème que les Français vivent aussi comme une urgence.

Vous avez cherché à être opérationnel le plus vite possible en résolvant des situations matérielles absurdes ou indignes. Indignes quand on pense à l'état des locaux et des logements des policiers - je vous indique à ce sujet que dans ma commune, Drancy, 150 logements de gendarmerie sont vides et pourraient être utilisés.

Les crédits débloqués faciliteront la construction de commissariats et de logements. Vous avez aussi mis fin à des situations absurdes, comme l'inachèvement du réseau ACROPOL, qui oblige les policiers parisiens à utiliser leurs portables personnels pour communiquer entre eux !

Il était également nécessaire de compléter les équipements individuels protégeant les policiers et d'augmenter les crédits de maintenance des aéronefs de la sécurité civile, trop souvent inutilisables faute d'entretien.

Vous avez également cherché à rendre plus opérationnels les moyens humains, ce qui est sans doute le plus difficile. En dégageant des crédits pour 1 000 emplois administratifs, vous libérez rapidement les fonctionnaires de police les plus expérimentés pour des missions sur le terrain.

Il est souhaitable qu'ils retournent sur le terrain. C'est au sein de la préfecture de police de Paris que l'on trouve le plus de gradés. Dans les banlieues, on envoie de jeunes policiers qui sortent à peine de l'école. C'est un miracle que, sans encadrement suffisant, il n'y ait pas plus d'incidents.

M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales - C'est vrai...

M. Jean-Christophe Lagarde - Le déblocage que vous opérez rendra bien des services. Vous connaîtrez des résistances à la préfecture de police, mais je compte sur vous pour passer outre.

Par ailleurs, ne vaut-il pas mieux utiliser des policiers dans la rue plutôt que de les voir rester des journées entières dans des cars ? Vous avez veillé à ce que leur rémunération ne varie pas pour autant ; c'est tout à votre honneur.

Le recrutement de 900 actifs de plus, l'augmentation de 2 000 du nombre des OPJ permettront un bien meilleur accueil de nos concitoyens dans les commissariats. Vous n'avez pas non plus oublié la revalorisation des fonctions.

Vous tenez donc vos engagements, mais je souhaite vous interroger sur la formation et la capacité d'accueil des écoles de police. Votre plan se traduit par des emplois administratifs et des emplois d'actifs ; les écoles de police ne pourront former autant de policiers qu'il le faudrait. Les formateurs doivent être expérimentés et motivés. Le gouvernement précédent a décidé de limiter à cinq ans la durée d'enseignement d'un formateur. Vous devriez revenir sur ces dispositions.

Où en êtes-vous de votre réflexion sur les emplois-jeunes ? Les milliers de postes concernés ont trouvé leurs limites mais ils ne peuvent disparaître sans être remplacés.

Il serait nécessaire que les policiers exerçant dans des zones difficiles bénéficient d'une « discrimination positive » quant à leur rémunération. Leur fidélisation constituerait une avancée, notamment en Ile-de-France, où tous aspirent, dès qu'ils sont nommés, à repartir en province. Faciliter le logement de ces fonctionnaires serait un autre bon moyen de les fidéliser. L'accès à la propriété doit être facilité pour des policiers qui s'engageraient à rester dans certaines zones - dans ma commune, il n'y en a pas plus de dix qui vivent sur place depuis plus de cinq ans.

Bien des jeunes policiers nommés à Paris paient des loyers extrêmement élevés, disproportionnés avec leur rémunération. En banlieue, je suis persuadé que vous trouveriez des maires prêts à contractualiser avec votre ministère pour loger ces fonctionnaires à moindre coût.

Pourquoi vous fait-on un procès en sorcellerie ? On entend dire que vous feriez « la guerre aux pauvres », mais la seule guerre vécue par les pauvres, en Seine-Saint-Denis par exemple, est celle qui leur est imposée par les caïds, les gangs, les bandes ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et du groupe UMP) Les premières victimes de la criminalité se trouvent dans les banlieues déshéritées, pas à Neuilly. Et à quoi sert la justice lorsque les menaces, dans les halls d'immeubles, empêchent les gens d'aller témoigner ou porter plainte ?

Le budget de la sécurité civile augmente de façon très significative. L'UDF trouve excellent que soient reconnus les besoins et le mérite de ceux qui y travaillent.

La progression de 2,3 % de la DGF est évidemment satisfaisante pour les maires et les présidents de conseils généraux - néanmoins, n'a-t-on pas trop favorisé l'intercommunalité ?

Au nom de l'UDF, je n'ai qu'une chose à vous dire : continuez, rendez dignité et moyens aux fonctionnaires de police. C'est la « France des abandonnés » qui en profite - sinon, elle a recours, nous l'avons vu, aux extrêmes et à la désespérance (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et du groupe UMP).

M. Jacques Brunhes - « La sécurité des personnes et des biens est un droit fondamental, un élément essentiel de la liberté, de la fraternité et de la citoyenneté. Sa demande est d'autant plus légitime que pour nombre de nos concitoyens, l'insécurité renforce les difficultés sociales et économiques. » Tels sont les propos que je tenais à cette tribune en 1999. Mon groupe a souvent souligné cela, et les questions de sécurité sont pour nous une préoccupation essentielle depuis fort longtemps. Nos circonscriptions comptent de nombreux quartiers « sensibles », victimes d'un urbanisme de relégation que vos amis ont voulu et entretenu.

Certes, nous reconnaissons la responsabilité individuelle dans les actes délictuels et considérons la répression comme une partie intégrante de la prévention ; mais nous réclamons aussi une politique de prévention qui nécessite des éducateurs spécialisés, le déploiement de la police de proximité, les contrats locaux de sécurité ainsi qu'une meilleure efficacité du traitement pénal de la délinquance.

La lutte contre l'insécurité doit être aussi un combat social. Elle ne peut faire l'impasse sur ses causes structurelles sous peine d'une dérive vers la « carcéralisation » à l'américaine, où l'emprisonnement de masse est la seule réponse à la criminalité et aux délits. Dans les zones reléguées, la situation socio-économique des habitants est marquée par l'extrême précarité, le chômage augmente, l'avenir se nomme « stage sans contenu » ou « petit boulot », la désespérance accompagne les stratégies de rupture chez beaucoup de jeunes. Dans ces zones de « sans droits », symboles d'un véritable apartheid social et spatial, l'autorité de l'Etat qui s'exerce par la répression ne pourra qu'accentuer les phénomènes de défiance, affaiblir la légitimité des institutions démocratiques et signifier l'échec durable du modèle français de l'intégration citoyenne.

Or, c'est le choix du Gouvernement. Sa conception de l'Etat est celle, libérale, d'un Etat minimal, cantonné dans ses missions « régaliennes ». En témoignent la suppression des postes dans l'éducation nationale, la fin des emplois-jeunes, la baisse des crédits pour le logement social, la fin des remboursements pour de nombreux médicaments, la diminution des impôts au profit des plus fortunés et des charges sociales pour l'employeur - sans aucune contrepartie pour l'emploi, dont le budget régresse. Le principe de mixité sociale consacré par la loi SRU est lui-même dans le collimateur du Gouvernement qui s'apprête à modifier l'obligation, pour toutes les communes, de construire 20 % d'HLM sur leurs territoires : les riches pourront donc continuer à vivre entre eux tandis que les pauvres supporteront toujours plus le poids d'une politique de désengagement et de ségrégation sociale.

Vous comptez combattre le surcroît d'anomie sociale ainsi généré par une politique de sécurité fondée sur la stigmatisation de certaines catégories de la population, et la préconisation de méthodes répressives de traitement de la délinquance. Nous voilà devant l'amplification de droits et pouvoirs accordés aux forces de l'ordre et face à de nouveaux délits. Pourtant, les tribunaux sont déjà surchargés, faute d'effectifs suffisants, et le taux de réponse judiciaire par rapport aux infractions poursuivables n'est que de 60 %. L'Union syndicale des magistrats, pourtant modérée, dénonce « une justice pénale virtuelle » et parle de « pénalisation de la misère », tout comme la Ligue des droits de l'homme : en somme, pour citer l'Abbé Pierre, une « guerre contre les pauvres » et non contre la pauvreté (Protestations sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF). Le Syndicat de la magistrature voit dans votre projet « un choix de société : émancipation de la police, marginalisation du juge et de l'avocat, fichage systématique de la population ».

Je pourrais citer bien d'autres réactions, notamment l'appel commun des 34 organisations politiques, associatives, et syndicales, qui se prononcent unanimement contre la politique de votre Gouvernement (Protestations sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

Certes, les dotations atteignent 5,449 milliards d'euros, et permettront de créer de nouveaux emplois, de maintenir le potentiel opérationnel des forces et d'en moderniser les équipements, mais ces moyens certes nécessaires s'inscrivent dans le cadre de nouvelles orientations que nous ne pouvons approuver. Vous comprendrez donc qu'un consensus soit impossible. Nous le regrettons.

Il est indispensable de disposer de statistiques fiables pour évaluer de manière crédible les politiques de sécurité. Or, les outils actuels sont insuffisants et contestables, chacun le reconnaît. Le rapport Pandraud-Caresche propose plusieurs mesures intéressantes d'amélioration. Les mettrez-vous en _uvre ?

Pour ce qui est du budget de la sécurité civile, je me félicite que le dispositif actuel de soutien à l'investissement des SDIS soit pérennisé et que la DGE ait été, comme ces trois dernières années, abondée de 45 millions d'euros. Les besoins sont en effet tels que les collectivités ne peuvent y faire face sans le concours de l'Etat. Je souhaite, à l'occasion de l'examen de ce budget, rendre hommage au courage et au dévouement des sapeurs-pompiers dont une vingtaine ont perdu la vie en mission cette année, et les assurer de notre solidarité lorsqu'ils s'élèvent contre les agressions dont ils sont victimes. Il est urgent de moderniser la sécurité civile dont la réforme remonte à 1967 et de trouver des solutions à la crise du volontariat.

Enfin, je ne partage pas votre optimisme, s'agissant du budget des collectivités locales. L'enveloppe normée ne progresse que de 1,5 % pour atteindre 30,5 milliards d'euros, y compris les abondements : elle est donc simplement reconduite, compte tenu de l'inflation. Les crédits du Fonds national de péréquation diminuent de 18 % et ceux de la DCTP de 5,16 %. En outre, cette dernière dotation ne sera plus modulée entre communes favorisées et communes défavorisées. Quant aux dotations de solidarité urbaine et rurale, elles n'évoluent pas, en dépit des besoins croissants, et malgré une ponction sur la régularisation de la DGF des communes et la suppression des droits de licence sur les boissons. Cela s'explique par la part croissante des crédits nécessaires au financement de l'intercommunalité. Bref, nous ne partageons pas l'idée selon laquelle les ressources seraient largement suffisantes et qu'il suffirait d'assurer une meilleure péréquation entre collectivités.

Pour toutes ces raisons, le groupe communiste et républicain ne votera pas ce budget (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains).

M. Jacques Pélissard - Je centrerai mon intervention sur le budget de la sécurité intérieure, l'examen des futurs projets de loi constitutionnelle et organique sur la décentralisation allant nous donner l'occasion de nous exprimer largement sur ce qui concerne les collectivités locales.

Monsieur le Ministre de l'intérieur, vous portiez le 16 juillet dernier un diagnostic pertinent en rappelant que la sécurité était la première préoccupation des Français, et que ceux-ci avaient voulu un gouvernement qui applique une nouvelle politique en ce domaine. Et vous avez, avec l'efficacité que chacun vous reconnaît, mis en _uvre cette politique tout en respectant nos valeurs humanistes et en prenant des positions courageuses, sur le centre de Sangatte ou l'examen au cas par cas de la situation des sans-papiers .

Cette politique se fonde sur la prévention mais aussi la répression. Il le faut car l'augmentation de la délinquance, de 40 % entre 1981 et 2001, s'est beaucoup accélérée ces dernières années, atteignant 16 % depuis 1998, et même 7,69 % au cours de la seule année 2001 et 3,41 % au cours du premier semestre 2002. En dix ans, le nombre de crimes et délits à l'encontre des personnes a augmenté de 91,39 %. Quant aux vols, s'ils avaient diminué pendant la décennie précédente, ils ont recommencé à progresser en 2001. Alors que les mineurs représentaient seulement 13 % des personnes mises en cause en 1992, ils étaient 21 % en 2001. Dans le même temps, le taux d'élucidation des affaires tombait de 32,9 % à 24,9 % - 7,4 % seulement des cambriolages et 2,7 % des vols à la tire étant élucidés.

Au-delà de la froideur de ces chiffres, n'oublions pas la souffrance des victimes : dans ma ville, l'ouvrier d'une zone sensible victime du vol de sa voiture ou la retrouvant les pneus crevés à l'heure de partir au travail, la retraitée à qui l'on vole son sac à l'arraché et qui se retrouve dans le plâtre plusieurs mois pour avoir courageusement tenté de résister à ses agresseurs, les personnes âgées qui après une vie de labeur sont contraintes de rentrer dans leur immeuble en baissant la tête et de subir quolibets et injures, parce que des individus dés_uvrés en squattent le hall.

Vous avez remis, Monsieur le ministre, les victimes au c_ur de vos préoccupations. C'était la réponse républicaine nécessaire. En effet, le sentiment d'insécurité accroît la méfiance à l'égard de l'autre et peut nourrir le racisme. L'explosion de la délinquance ne menace rien moins que le lien social. D'où l'ardente obligation que nous avons de rétablir l'Etat de droit sur l'ensemble du territoire national, en zone rurale comme en zone urbaine.

La sécurité est la première des libertés, rappelait le Premier ministre lors de sa déclaration de politique générale. L'insécurité était devenue un défi pour l'Etat. Vous l'avez relevé, sans retard et avec efficacité. La LOPSI a prévu un renforcement sans précédent des moyens de la police et de la gendarmerie avec 13 500 emplois supplémentaires et 5,6 milliards d'euros pour la période 2003-2007, non compris l'évolution du GVT et la revalorisation du point.

L'opposition s'était gaussée en martelant que cette ambitieuse loi de programmation ne serait pas traduite dans le budget. Il n'en est rien, n'en déplaise à ses Cassandre. Le budget de la police pour 2003 augmente de 5,8 % et près du tiers des emplois prévus sur cinq ans seront créés dès l'année prochaine. Le budget de la gendarmerie, lui, progresse de 8,4 % avec 1200 emplois nouveaux, mais aussi les crédits nécessaires au paiement des loyers des casernes, qui n'étaient plus réglés depuis plusieurs années !

Enfin, le troisième volet du triptyque est le projet de loi sur la sécurité intérieure présenté ce matin même en Conseil des ministres. En effet, l'augmentation des crédits ne saurait suffire et surtout ne doit pas conduire à différer les réformes nécessaires. Vous les avez engagées en invitant les forces de l'ordre à une culture du résultat, en motivant les préfets et les directeurs départementaux de la sécurité publique et en vous imposant à vous-même cette obligation de résultat puisque dorénavant, les statistiques de la délinquance seront publiées mensuellement. C'est à une véritable révolution des mentalités que vous avez appelé. Vous avez également accéléré les procédures de recrutement : 500 agents administratifs et 500 gardiens de la paix pourront prendre leur poste ou entrer en formation dès cette année. Enfin, vous organisez la complémentarité entre police et gendarmerie : dès mai dernier, institution d'un commandement opérationnel unique, mise en place des GIR, équipes pluridisciplinaires qui permettront une approche transversale des problèmes, amélioration de l'emploi des forces mobiles, en appui des DDSP et de la gendarmerie dans leur région d'implantation, recentrage de l'emploi des fonctionnaires sur des fonctions de sécurité effective. Cette complémentarité pourrait encore être accélérée par le rapprochement des réseaux Rubis et ACROPOL, ainsi que des fichiers d'informations criminelles STIC et JUDEX.

Monsieur le ministre, votre action réhabilite les principes même de l'action politique qui sont de susciter puis de justifier la confiance, de tenir les engagements pris, de mettre en _uvre le programme sur lequel on a été élu. Telle est bien la voie sur laquelle vous vous êtes engagé. C'est avec enthousiasme que le groupe UMP votera votre budget. 

M. Jean-Pierre Blazy - Je ne suis pas de ceux, Monsieur le ministre qui fréquentent assidûment le café de Flore ni les dîners en ville. Elu de la banlieue nord de Paris, je sais les difficultés et les attentes de la population du Val-d'Oise. Aussi parlerai-je clair.

Le budget de la police pour 2003 progresse de 5,8 % par rapport à 2002. On ne peut que saluer l'effort consenti en faveur des forces de sécurité (Murmures sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF). Mais ce budget s'inscrit dans la continuité de la politique menée par le précédent gouvernement (Interruptions sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF) - je parle bien entendu des masses budgétaires, non des orientations. Cette hausse est sensiblement la même en effet que celle de 2002 - 5,2 %. Or, l'an dernier, à droite, vous protestiez contre l'insuffisance des dotations du ministère de l'intérieur. Vous dissertiez, mais il est vrai que nous étions en pré-campagne sur la nécessité d'un « plan Marshall » contre l'insécurité. Vous réclamiez à cor et à cri de dizaines de milliards d'euros, ironisant sur les 3 000 créations d'emploi prévues par Daniel Vaillant, alors que vous vous vantez aujourd'hui de vos 1 900 créations de postes ! Votre budget rompt en revanche avec ceux des gouvernements Balladur et Juppé qui avaient réduit les crédits, en particulier entre 1995 et 1997, lorsque vous étiez vous-même ministre du budget !

En tout cas, le groupe socialiste sera très vigilant quant à l'exécution de ce budget. Nous nous souvenons en effet que celui de 1997, voté en 1996 pour financer la LOPS de M. Pasqua, avait été largement amputé en cours d'année.

Ce budget se situe très en deçà de la démarche stratégique pour la police nationale que votre prédécesseur avait envisagée pour 2002-2006, avec seulement 6 500 emplois nouveaux contre 13 000 alors prévus.

Beaucoup de questions restent posées. J'aimerais savoir, Monsieur le ministre, ce que vous comptez faire de la police de proximité. Celle-ci a été généralisée en 2002. Quelles missions lui seront-elles assignées et de quels moyens disposera-t-elle ?

Une police de proximité équipée de flash-balls restera-t-elle une véritable police de proximité, conforme à la doctrine d'emploi originelle ?

La disparition des adjoints de sécurité dont vous n'avez pas parlé posera des problèmes à la police de proximité. C'est un effectif de 14 000 personnes qui disparaît, pour des raisons purement idéologiques. Or, en dépit des critiques qui ont pu être formulées, la création des ADS a été une réussite, y compris pour les ADS eux-mêmes, puisqu'une grande partie d'entre eux a passé avec succès le concours de gardien de la paix, ce qui, compte tenu de la crise de vocation que connaît la police, n'est pas négligeable. Au 4 mars 2002, 7 177 ADS avaient réussi le concours de gardien de la paix ! Les ADS ont ainsi constitué un véritable vivier pour la police nationale, alors que vous n'aviez pas prévu, avant 1997, de remplacer les départs en retraite.

A l'évidence, la création de 6 500 emplois au titre de la loi d'orientation ne compensera pas la perte de ces 14 000 ADS. Vous avez eu raison de souligner, Monsieur le ministre, lors de votre audition devant la commission des lois, qu'il s'agissait d'un enjeu réel pour la police nationale, d'autant que les écoles de police sont au maximum de leurs capacités, que vous n'avez pas prévu la création de nouvelles écoles et qu'on imagine mal aujourd'hui une quelconque solution de rechange.

M. Gérard Léonard, rapporteur pour avis - C'est laborieux !

M. Jean-Pierre Blazy - Le statu quo que vous proposez pour un an ne fait que reporter le problème. Tous les syndicats considèrent que la disparition des ADS causera une paralysie des services. Nous aimerions donc savoir quel sort vous réservez, à terme, aux adjoints de sécurité et quelles solutions vous envisagez pour donner à ces personnels le soutien et la reconnaissance qu'ils méritent.

Autre problème : la diminution des crédits de formation, malgré les importants besoins induits par la généralisation de la qualité d'OPJ. Faut-il en conclure, Monsieur le ministre, que vous avez l'intention de raccourcir le temps de formation des policiers ? En tout cas, cette baisse de crédits atténuera fortement l'effet des recrutements.

S'agissant des personnels administratifs, chacun reconnaît l'importance des nouveaux recrutements, qui pourraient permettre de ramener sur le terrain des policiers en tenue. On éviterait ainsi que deux corps exécutent les mêmes tâches pour des rémunérations très différentes. La loi d'orientation prévoyait 2 000 recrutements, mais une bonne partie des postes prévus au budget 2003 seront pourvus par promotion interne, ce qui réduit le nombre des créations de postes.

Concernant les compagnies républicaines de sécurité, on a peine à saisir les intentions du Gouvernement. On nous dit que le programme de fidélisation va se poursuivre, mais les crédits de déplacement sont en forte augmentation !

Enfin, vous êtes le ministre de la sécurité intérieure, le ministre des policiers et des gendarmes. On aurait pu penser que le budget 2003 vous donnerait l'occasion de rapprocher les deux forces de sécurité. Or, on n'observe que de timides convergences. Dans les GIR, les officiers de police se trouvent en porte à faux avec les officiers de gendarmerie, ce qu'ils vivent fort mal. Par ailleurs, contrairement aux commissariats, les gendarmeries sont fermées la nuit. Comment voulez-vous faire accepter aux élus et aux citoyens la fermeture des commissariats dans les villes de moins de 20 000 habitants si vous ne garantissez pas en échange l'ouverture, la nuit, des gendarmeries ?

L'année dernière déjà, dans mon rapport pour avis, j'avais insisté sur le taux de rotation excessif des effectifs en Ile-de-France. La situation est très tendue dans le Val-d'Oise. Il faut augmenter la durée de maintien dans les postes en augmentant la rémunération et en garantissant un droit de mutation prioritaire en fin de période, sans oublier les possibilités de promotion. Cela serait à discuter avec les organisations syndicales.

Je veux enfin évoquer les statistiques de la délinquance. L'an dernier, en pleine polémique sur ce sujet, Daniel Vaillant avait confié à deux parlementaires, Christophe Caresche et Robert Pandraud, une mission tendant à la création d'un observatoire de la délinquance et à une refonte du mode de comptabilisation des crimes et délits. La création d'une autorité indépendante chargée de produire des statistiques incontestables est indispensable. Vous avez renoncé à suivre les préconisations de ce rapport, qui avait pourtant fait l'objet d'un consensus. Les statistiques de la police nationale mesurent autant l'évolution de la délinquance que le niveau d'activité des services de police. Vous nous répétez sans cesse que, lorsque vous êtes au pouvoir, la délinquance diminue et que lorsque nous sommes au pouvoir, la délinquance augmente (« C'est vrai ! » sur les bancs du groupe UMP). On peut aussi dire que, lorsque vous êtes au pouvoir, l'activité des services de police diminue... Convenons ensemble que les outils statistiques actuels sont loin d'être fiables.

Monsieur le ministre, quand on vous voit distribuer des bons et des mauvais points aux préfets et aux commissaires, personne n'est dupe ! Ceux-ci vont être tentés de ne pas enregistrer les plaintes et d'avoir recours aux mains courantes pour faire croire que la délinquance diminue !

Votre projet de budget semble à première vue ambitieux, mais c'est un budget en trompe-l'_il (Interruptions sur les bancs du groupe UMP). Le groupe socialiste ne peut le voter (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Nicolas Perruchot - La montée de l'insécurité a gagné les petites communes et les zones rurales. En zone de gendarmerie, l'année 2001 a vu la criminalité progresser de 11,89 %, contre 6,23 % en zone de police. Les chiffres des derniers mois confirment cette tendance avec des augmentations successives de 13,16, 4,94 et 3,45 % pour les mois de juillet, août et septembre, alors que la criminalité dans les zones de police nationale stagnait ou régressait. Même si la zone de police regroupe 75 % de la criminalité et 71 % de la population, notre pays est confronté à une situation nouvelle. Dès lors, il est nécessaire de revoir la répartition des zones de compétence entre les forces de sécurité intérieure et d'adapter l'organisation ainsi que les modes de fonctionnement des services.

Cette réorganisation est prévue par la loi d'orientation et de programmation de la sécurité intérieure. Une répartition plus rationnelle est recherchée entre les zones de compétence de la police et de la gendarmerie, chaque force devant s'organiser pour prendre effectivement en charge les missions de sécurité publique dans l'ensemble de la zone de responsabilité qui lui est confiée. Cet effort de rationalisation est effectué dans le but d'améliorer la qualité du service et le taux d'élucidation.

Dans les zones rurales comme dans les zones péri-urbaines, il faudra rendre obligatoire le travail de nuit et procéder à un redécoupage des compagnies. Deux pôles sont créés, d'une part les communautés de brigade et d'autre part les brigades territoriales de proximité. Les brigades de gendarmerie ne peuvent plus fonctionner de façon autonome. Il est possible de les regrouper en communautés de brigades, dotées d'un commandement unique, agissant sur une circonscription cohérente. Ce nouveau maillage territorial aura des répercussions sur les zones de police. Un certain nombre de commissariats vont connaître un élargissement de leur périmètre d'intervention.

Monsieur le ministre, comment ce redéploiement des activités va-t-il se traduire en termes d'effectifs ? L'Etat a-t-il prévu de faire cette réforme à moyens constants ? Ou bien les créations d'emplois envisagées dans le projet de loi de finances vont-elles servir à réorganiser nos forces ?

J'aimerais par ailleurs aborder le problème de la réduction du temps de travail dans la police nationale. Un décret du 25 août 2000 a limité la durée annuelle du travail effectif dans les services de l'Etat à 1 600 heures au maximum. Le nombre de jours attribués annuellement a été fixé à 30,23 ou 18 jours selon les durées hebdomadaires du travail. En vue de préserver le potentiel opérationnel de la police, des dérogations ont été prévues, notamment des mesures réglementaires de nature à limiter les jours d'absence. S'agissant des seuls fonctionnaires actifs des services de police au titre de l'année 2002, le ministère a appliqué le principe de l'indemnisation de trois jours en année pleine ; ces trois jours seront par conséquent travaillés. La loi de finances 2002 prévoyait une enveloppe de 31,6 millions d'euros, complétée de 30 millions d'euros par une loi de finances rectificative, afin de mettre en _uvre l'aménagement de la réduction du temps de travail. Par ailleurs, 1 700 emplois de gardiens et gradés et 300 emplois administratifs ont été créés.

Pour 2003, il est envisagé de porter jusqu'à huit le nombre de jours rachetés sauf pour les fonctionnaires investis de responsabilités particulières. Des compensations en temps vont être nécessaires. Les commissaires devront donner entre 10 et 14 jours de congés supplémentaires par an ; ce qui signifie une perte d'effectifs de 10 à 12 %.

Sachant que la réduction du temps de travail devra se mettre en place avec un effet rétroactif au 1er janvier 2002 et que les écoles de police fonctionnent à flux tendu, un réel problème d'effectifs va se poser.

Comment faire pour continuer à enregistrer de bons résultats en matière de sécurité urbaine ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et du groupe UMP)

M. Axel Poniatowski - Monsieur le ministre, vous présentez aujourd'hui à la Représentation nationale un budget 2003 qui vient crédibiliser votre loi d'orientation.

Vous avez bâti une architecture cohérente et engagé les réformes nécessaires, au niveau national avec le nouvel office central chargé de la recherche des malfaiteurs, au niveau régional avec la mise en place des GIR et au niveau local en donnant un rôle accru aux maires.

Vous avez voulu rendre plus efficace les forces de l'ordre : policiers et gendarmes travailleront ensemble sous votre autorité, de même que les CRS et les gendarmes mobiles interviendront ensemble.

Vous avez encore accru les moyens : entre les nouvelles embauches d'une part et les rachats de temps de travail d'autre part, vous augmentez les forces de sécurité de l'équivalent de 18 000 hommes. Vous avez décidé de redoubler le rythme de construction des commissariats et des casernes de gendarmerie. Enfin, vous avez donné des moyens nouveaux en tenues, en armes, en véhicules. Les premiers effets de ces dispositions commencent à se faire sentir et l'amélioration sur le terrain est apparente ; les statistiques en témoignent.

Je souhaite néanmoins appeler votre attention sur trois points Le premier concerne la police de proximité, sur laquelle je ne partage pas l'appréciation de mon collègue du Val-d'Oise.

Elle doit être réorganisée car elle a eu pour effet pervers d'atomiser le dispositif policier. On demande aujourd'hui à chaque gardien de la paix d'être polyvalent, de faire à la fois de la voie publique et de l'investigation judiciaire. Résultat : la paperasse engendrant la paperasse, les heures sur la voie publique ont fortement diminué au profit de celles passées à taper des rapports, parfois maladroitement et toujours avec ennui. Aujourd'hui, la présence de patrouilles pédestres dans nos villes et surtout nos banlieues, reste encore assez rare pour être remarquée. Sans revenir à l'organisation d'autrefois, avec le Corps urbain d'un côté, axé sur la prévention, et la sûreté urbaine de l'autre, axée sur l'investigation, il pourrait être judicieux de substituer une polyvalence de groupe à cette polyvalence individuelle.

Le deuxième point est celui des effectifs. L'effort que vous faites dans la loi de programmation est important. Mais les villes qui ont expérimenté la mise en place d'une vraie police de proximité ont compris que l'efficacité exige des effectifs plus conséquents encore. De 1993 à 2000, le nombre des policiers new-yorkais est passé de 28 741 à plus de 40 000 ; Chicago dispose de trois fois plus de policiers par habitant que la grande banlieue parisienne. Dans les deux cas, les résultats ont suivi. Or, en de nombreux endroits d'Ile-de-France, la tranche horaire de 21 heures à 4 heures du matin est une tranche de non-droit... Beaucoup d'entre nous vous suivront pour aller plus loin encore dans l'exigence d'effectifs supplémentaires.

Le troisième point concerne le rôle des élus locaux, et en particulier du maire, dans la lutte contre l'insécurité. Le maire doit jouer un vrai rôle opérationnel et non plus simplement consultatif. Dans le cadre de la nouvelle étape de décentralisation à venir, pourquoi ne pas lui donner une véritable autorité sur la police de proximité ? Il faudrait réfléchir à l'institution d'une police à deux niveaux. La police nationale serait en charge du grand banditisme, de la lutte anti-criminelle, de l'immigration clandestine et des enquêtes judiciaires, cependant qu'une police de proximité s'occuperait de cette délinquance quotidienne de plus en plus violente qui pollue la vie de nos concitoyens.

Voilà quelques réflexions pour contribuer à atteindre ce difficile objectif que vous vous êtes fixé : non seulement stabiliser la délinquance, mais « renverser la tendance ». En tout cas c'est avec enthousiasme, comme toute l'UMP, que je voterai ce budget (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Jean-Pierre Balligand - Je formulerai une remarque technique, Messieurs les ministres, et une réflexion sur les futures lois de décentralisation. La première concerne l'assouplissement des modalités de répartition de la dotation d'intercommunalité. Je l'ai souvent dit ici, à propos des lois Joxe de février 1992 comme de la loi Chevènement de juillet 1999 : l'événement majeur dans notre pays, avant même, selon moi, les lois Defferre, la vraie révolution tranquille de notre architecture institutionnelle, ce sont les lois d'intercommunalité. Cela pose d'ailleurs un problème dans le cadre des futures lois de décentralisation, à en juger le premier avant-projet : j'y reviendrai.

Mais je commencerai par le problème technique, comme il sied à l'un des responsables de l'Association des districts et communautés de communes de France. La loi du 12 juillet 1999 disposait que les communautés de communes à DGF bonifiée et les communautés d'agglomération bénéficiaient d'une progression de l'enveloppe moyenne par habitant indexée au minimum sur l'inflation. Par ailleurs, l'amendement Bonrepaux, adopté en loi de finances rectificative pour 2001, garantissait aux communautés de communes à fiscalité additionnelle datant de plus de deux ans une évolution de leur dotation moyenne identique à celle de la dotation forfaitaire des communes. L'amendement assurait en outre aux communautés urbaines, dès 2003, une progression identique. Or le projet de loi de finances pour 2003 supprime ces garanties ! Il propose, il est vrai, d'accroître les marges de choix du Comité des finances locales en matière de répartition de la DGF, en supprimant les indexations minimales automatiques, tout en préservant comme seuil minimal de chaque année les niveaux atteints l'année précédente. Mais, politiquement, la garantie d'évolution de l'enveloppe moyenne par habitant était un signal fort en direction des communes et des communautés, puisque l'Etat garantissait l'évolution des ressources intercommunales. Un retour en arrière risque de freiner le mouvement intercommunal.

L'intercommunalité reste encore peu développée dans certaines régions. Nous sommes quelques militants, quels que soient les bancs où nous siégeons, à nous être battus très tôt sur ce thème. A l'époque de la loi du 6 février 1992, nous étions bien peu nombreux ; et je me souviens de M. Poujade, désolé de devoir voter avec ses amis, alors qu'il s'était beaucoup investi dans la commission spéciale - mais les élections de 1993 approchaient... Cette loi fut donc votée par les seuls socialistes. Mais, aussitôt après, le dispositif a fonctionné, et tous les élus de droite et de gauche s'y sont mis. L'intercommunalité s'est donc développée, mais pas uniformément. Dans l'Ouest du pays, l'Est, le Nord, ce fut plus facile ; c'était plus compliqué dans le Sud, là où le communalisme est très fort. Les progrès sont rapides, néanmoins, et en région parisienne aussi, vous avez fait des progrès, même si les communes riches se sont associées parfois avec d'autres aussi riches.

Reste que l'intercommunalité demeure encore peu développée dans certaines régions. Un moindre engagement de l'Etat pourrait donc casser la dynamique, alors que nous sommes tous intéressés à ce que la France soit entièrement couverte par l'intercommunalité. Une stagnation de la dotation par habitant d'une année sur l'autre jouera défavorablement sur le montant de la DGF d'un certain nombre de communautés. Certaines d'entre elles, en effet, jouissent d'une garantie individuelle de progression de la DGF, avec une indexation sur la dotation forfaitaire des communes : à dotation moyenne par habitant constante, il faudra donc réduire la dotation des autres groupements pour assurer la garantie de ces communautés. C'est ce mécano qu'il faut revoir, car nous ne pouvons tenir ainsi très longtemps. En fait, il faut revoir l'ensemble du dispositif de dotations, en tenant compte notamment de la dynamique intercommunale.

Cette discrimination envers le mouvement communal ne reflète-t-elle pas un refus de prendre en compte le nouveau territoire émergent qu'est l'intercommunalité sur les plans de l'économie locale, de l'aménagement urbain, du développement des micro-territoires ?

D'autre part, doit-on laisser se mettre en place une course au coefficient d'intégration fiscale ? La crainte que les DGF ne progressent pas assez incite en effet les intercommunalités, y compris rurales, à vouloir capter de nouvelles compétences, pour accroître leur CIF. Mais alors n'est-on pas en train de faire de la commune une coquille vide ?

Enfin, j'ai beau relire l'avant-projet de loi constitutionnelle, il y a un grand absent : les EPCI. Ils sont rayés de la carte : il n'y a plus que la commune, le département et la région... Je pose la question au Gouvernement : il s'agit là aujourd'hui de l'élément dynamique de notre territoire, qui regroupe 47 millions d'habitants dans des structures à fiscalité propre. N'est-il pas temps - considérant qu'on ne va pas changer la Constitution tous les ans - d'en prendre acte dans une modification constitutionnelle ? J'espère que vous n'entendez pas simplement défendre les droits acquis de structures qui ne sont plus toujours adaptées... Je ne comprends pas qu'on fasse disparaître de tout projet de modification de la Constitution la notion même d'intercommunalité. Bien sûr une structure intercommunale n'est pas encore une collectivité territoriale - c'est un débat que nous pourrions d'ailleurs avoir. Mais, sans aller jusque là, il est essentiel de rephaser tout cela. L'exemple technique que j'ai pris, sur la DGF intercommunale, suscite une crainte, et il est souhaitable que le Gouvernement nous rassure sur ses intentions envers ce mouvement très important qui est en route dans le pays. Il faut que nous puissions le retrouver quelque part, et si ce n'est pas dans la loi constitutionnelle, au moins dans la loi organique (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. le Président - A la demande du Gouvernement, nous allons suspendre nos travaux.

La suite du débat est renvoyée à la prochaine séance.

ÉLECTION DES JUGES DE LA HAUTE COUR DE JUSTICE
ET DE LA COUR DE JUSTICE DE LA RÉPUBLIQUE (suite)

M. le Président - Les scrutins pour l'élection des juges de la Haute Cour de justice et de la Cour de justice de la République ont été clos à 18 heures.

Les résultats des scrutins seront annoncés à la séance de ce soir.

Prochaine séance ce soir, à 21 heures.

La séance est levée à 19 heures.

            Le Directeur du service
            des comptes rendus analytiques,

            François GEORGE


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