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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2002-2003 - 22ème jour de séance, 58ème séance

2ème SÉANCE DU MARDI 12 NOVEMBRE 2002

PRÉSIDENCE de M. Jean-Louis DEBRÉ

Sommaire

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT 2

FERMETURE DU CENTRE DE SANGATTE 2

IRAK 2

CANDIDATURE DE LA TURQUIE
A L'UNION EUROPÉENNE 3

RETRAITES 4

LUTTE CONTRE LE TERRORISME 5

GESTION DES ENTREPRISES PUBLIQUES 5

FERMETURE DU CENTRE DE SANGATTE 6

HÔPITAUX D'ILE-DE-FRANCE 7

EFFECTIFS DE L'ADMINISTRATION PENITENTIAIRE 7

AIDES SOCIALES AUX JEUNES SCOLARISÉS 8

APPRENTISSAGE 9

LUTTE CONTRE LE RAT MUSQUÉ 10

LOI DE FINANCES POUR 2003
-deuxième partie- (suite) 11

SANTÉ, FAMILLE ET
PERSONNES HANDICAPÉES 11

La séance est ouverte à quinze heures.

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

FERMETURE DU CENTRE DE SANGATTE

M. Thierry Lazaro - Pendant quatre ans, faute de courage politique, le précédent gouvernement a laissé de côté le problème de Sangatte. Votre premier geste, Monsieur le ministre de l'intérieur, fut de vous rendre sur place. Depuis, vous avez multiplié les rencontres avec les élus calaisiens et la population, avec les autorités britanniques pour qu'elles acceptent de durcir la législation, avec les représentants du HCR afin d'identifier, avec leur aide, les occupants du centre. Vous avez aussi intensifié la lutte policière contre les réseaux de passeurs, grâce notamment à la mise en place de patrouilles franco-belges. Le dernier réseau de passeurs démantelé, vous avez pu annoncer que le centre de Sangatte serait désormais fermé à tout nouveau réfugié, adressant ainsi un signal aux réfugiés du monde entier. Les Français ne comprennent pas que ceux qui, hier, auraient pu agir, exploitent aujourd'hui la misère humaine à des fins purement politiciennes (Protestations sur les bancs du groupe socialiste).

Pouvez-vous nous indiquer quelles sont les prochaines étapes de votre action, notamment sur le plan humanitaire, qui est, nous le savons, l'une de vos préoccupations ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF)

M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales - Trois raisons ont motivé la fermeture du centre de Sangatte à tout nouvel arrivant. En premier lieu, c'est l'engagement que nous avons pris en contrepartie du durcissement de la législation britannique sur l'immigration. Ensuite, il ne fallait pas laisser le temps aux six réseaux de passeurs démantelés de se reconstituer. Enfin, le centre héberge actuellement entre 1 600 et 1 800 personnes, alors que 5 000 cartes d'accès ont été distribuées.

Reste - ce qui ne sera pas plus facile - à gérer l'après-Sangatte. Je rends hommage à tous les élus de la région, en particulier le maire socialiste de Sangatte, le député de la circonscription, M. Jack Lang, le maire communiste de Calais et le maire de Dunkerque, M. Delebarre, qui ont dû faire preuve d'un grand sens des responsabilités. Aucun élu, je le souligne, n'a demandé la réouverture du centre (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

Tous reconnaissent que les flux de migrants diminuent chaque jour : nous sommes passés de 400 interpellations chaque nuit en juin, à 60 ou 70 aujourd'hui ; c'est encore trop, mais c'est tout de même beaucoup moins ! Tous demandent que les nouveaux réfugiés soient traités avec humanité, et je me suis engagé à ce qu'aucun d'entre eux ne couche dehors. Inutile d'occuper des églises ou des stades : il y a de la place pour tous, et c'est pourquoi l'église désaffectée de Calais sera évacuée sous vingt-quatre heures.

Par ailleurs, un comité de suivi est mis en place, et une délégation d'élus m'accompagnera en Angleterre.

Le message que la France adresse, par cette décision, aux migrants du monde entier est qu'il n'y a plus d'espoir pour eux sous le hangar de Sangatte. Il est temps pour eux d'en tirer les conséquences ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF) .

IRAK

M. Jean-Marc Ayrault - Selon les autorités des Etats-Unis, la résolution 1441 du Conseil de sécurité leur donne le feu vert pour intervenir en Irak en cas de manquement de Saddam Hussein à ses obligations. De plus, la publication, dans le New York Times, d'un plan d'attaque des forces militaires américaines en Irak, confirme que le risque de guerre n'a pas décru, au contraire.

Tous ces signaux contredisent les déclarations du Gouvernement, selon lesquelles le recours à la force armée n'est pas automatique, mais subordonné à une nouvelle résolution du Conseil de sécurité.

Ma première question est donc : quelle est la bonne interprétation de la résolution 1441 ? Nous ne contestons pas que la France ait fait des efforts pour défendre le droit international et pour préserver les chances de la paix...

M. Pierre Lellouche - Ce n'est pas Jospin qui aurait fait ça ! Heureusement qu'il y a Chirac !

M. Jean-Marc Ayrault - ...mais vous n'êtes pas allés jusqu'au bout (Protestations sur les bancs du groupe UMP). Puisque vous avez renoncé à présenter un projet de résolution au nom de la France et écarté tout recours au droit de veto (Protestations sur les bancs du groupe UMP). Sans doute, ce compromis ambigu a-t-il permis à la communauté internationale de rester unie, mais à quel prix ? Demain, ni la France ni l'ONU peut-être n'auront les moyens juridiques d'empêcher une intervention qu'elles réprouvent.

Deuxième question, donc : êtes-vous prêts à refuser de participer militairement à cette aventure, et dans le cas contraire, vous engagez-vous à demander au Parlement de se prononcer par un vote ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Dominique de Villepin, ministre des affaires étrangères - La France saura faire face, avec lucidité, exigence et détermination, à ses responsabilités (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

Les Etats-Unis n'ont jamais caché leur volonté d'intervenir militairement en Irak si Saddam Hussein n'appliquait pas la résolution des Nations unies ou s'il refusait toute coopération avec la communauté internationale. Les manoeuvres en cours dans la région du golfe Persique en témoignent. Parallèlement, ils ont marqué, dès l'ouverture de l'assemblée générale des Nations unies, leur disponibilité à rechercher une solution collective.

La résolution 1441 fournit un cadre adéquat à cette recherche. Elle consacre, je le rappelle, la non-automaticité du recours à la force, quelles que soient les violations que l'Irak pourrait commettre (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF). C'est d'ailleurs pourquoi elle a été votée par la Russie, par la Chine et par la Syrie, et saluée, hier, par la Ligue arabe elle-même. Un passage devant le Conseil de sécurité est prévu à chaque étape, ce qui permettra à chacun d'assumer ses responsabilités en connaissance de cause.

Le vote unanime du Conseil de sécurité montre que la communauté internationale adhère toute entière à cette démarche, qui donne une nouvelle chance à la paix, à condition toutefois que Saddam Hussein accepte sans délai la résolution des Nations unies. La balle est dans son camp. Notre pays, quant à lui, saura assumer ses responsabilités (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

CANDIDATURE DE LA TURQUIE A L'UNION EUROPÉENNE

M. Bernard Bosson - Le président Giscard d'Estaing en posant le problème de la Turquie a posé celui des frontières de l'Europe. En 1963, l'Union européenne, qui n'était encore qu'une communauté économique, avait signé avec ce pays un accord de coopération qui évoquait la perspective de son éventuelle adhésion. En 1999, alors que l'Union européenne est devenue toute autre chose qu'une simple communauté économique, l'Europe et la France ont cru devoir donner à la Turquie le statut de pays candidat. Il y a quinze jours, les chefs d'Etat et de gouvernement ont estimé que la Turquie ne répondait « pas encore » aux critères de Copenhague, ce qui revient à reconnaître sa vocation européenne.

Pour l'UDF, la Turquie ne peut intégrer l'Union européenne (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et sur plusieurs bancs du groupe UMP), mais il faut créer, pour cette grande nation, pont entre l'Orient et l'Occident, un statut particulier qui ne signifie ni l'adhésion ni le rejet. Au moment où, faute d'une vision claire de l'Europe politique, l'élargissement risque de conduire à l'anéantissement de la construction européenne, quelle est la position de la France ? Le Gouvernement organisera-t-il, sur cette question, un débat parlementaire suivi d'un vote ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et sur quelques bancs du groupe UMP)

M. Dominique de Villepin, ministre des affaires étrangères - Je rappelle que la candidature de la Turquie n'est pas une nouveauté. C'est une perspective ouverte dès 1963, par le premier accord d'association, et relancée en 1999, par le Conseil européen d'Helsinki. Aucune décision n'est encore prise cependant quant à l'ouverture de négociations : il appartiendra au Conseil européen de Copenhague de le faire.

La France souhaite, pour sa part, transmettre à la Turquie un double message. Elle entend encourager ce pays à poursuivre sur la voie des réformes - et beaucoup a été fait au cours des derniers mois - mais aussi le juger à ses actes, car l'appartenance à la famille européenne traduit une volonté et un choix politique : celui de la tolérance et du dialogue, celui du respect des valeurs humanistes qui sont le fondement de la construction européenne (Protestations sur les bancs du groupe UDF ; applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Plusieurs députés socialistes - Le Gouvernement n'a pas répondu !

RETRAITES

M. Maxime Gremetz - Vous avez promis, Monsieur le Premier ministre, un large débat sur les retraites. Nous le souhaitons aussi, car nous voulons conforter le régime par répartition. Vous avez aussi promis qu'aucune décision ne serait prise sans que les partenaires sociaux aient été consultés. Or, il n'en est rien, puisque le Gouvernement vient de supprimer d'un trait de plume le congé de fin d'activité des fonctionnaires et le ministre des affaires sociales d'annoncer que les salariés devront cotiser plus longtemps (« Et alors ? » sur les bancs du groupe UMP). Qui plus est, il a annoncé qu'il allait mettre fin à tous les dispositifs de préretraite, y compris pour les salariés qui ont commencé à travailler très jeunes. Il sait bien, pourtant, que les grands groupes que protège le Gouvernement recourent largement aux préretraites lorsqu'ils « restructurent » leurs activités ! Ainsi, à l'usine Whirlpool d'Amiens, il y aura 160 licenciements de plus si les préretraites sont supprimées !

Pendant ce temps, on exonère les grands groupes de cotisations sociales patronales et on abroge la loi de modernisation sociale, pour autoriser les entreprises à délocaliser comme il leur semble bon. Le MEDEF peut vous remercier !

Continuerez-vous d'écarter d'un débat aussi essentiel les partenaires sociaux et les salariés ? Il est encore temps de montrer votre bonne volonté en demandant au Parlement de rétablir le congé de fin d'activité ! (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains)

M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité - Comme le Premier ministre l'a indiqué dès sa déclaration de politique générale, le débat sur les retraites aura lieu en février prochain. Il s'agit d'aboutir à un consensus national, comme l'Espagne, l'Allemagne et la Suède ont su le faire. De fait, ce sujet nous dépasse largement ; la seule question qui vaille est de savoir si notre génération aura le courage de prendre les mesures nécessaires pour sauvegarder le système de retraite par répartition (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains) La négociation entre partenaires sociaux sera au c_ur de cette recherche du consensus. J'ajoute que toutes les solutions sont connues : elles figurent dans tous les rapports, depuis le Livre blanc de Michel Rocard jusqu'au rapport du COS ! Tout le monde sait par où il faudra en passer ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains) Dans tous les cas, le Gouvernement prendra ses responsabilités, et le Parlement sera saisi d'un texte en juin.

Quant aux préretraites, elles ne sont pas supprimées, mais nous avons décidé d'en renchérir le coût, pour ne plus avoir à entendre des femmes et des hommes nous dire : « parce que j'ai plus de 50 ans, je n'ai plus d'avenir » ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF)

LUTTE CONTRE LE TERRORISME

M. Étienne Blanc - Les terroristes ont frappé à Bali après avoir frappé à Djerba, et l'appel à la vigilance que M. Blair a lancé à ses concitoyens renforce les craintes d'une attaque en Europe. Déjà, les enquêtes menées en France ont révélé l'existence de réseaux terroristes organisés et de filières de recrutement actives, et les attentats commis à Karachi et au Yémen, parce qu'ils visaient des intérêts français, disent la réalité de la menace. Quelles mesures supplémentaires le Gouvernement compte-t-il prendre pour renforcer la lutte contre le terrorisme ? Et comment s'organise la coopération internationale en cette matière ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF)

M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice - L'efficacité de la lutte contre le terrorisme repose, sur le plan national, sur la coopération entre les services de renseignement, la police, l'armée et la justice ; cette coopération nationale est bonne. Mais l'efficacité résulte aussi, comme vous l'avez souligné, de la coopération internationale, qui est de règle tant avec l'Italie, l'Espagne, le Royaume-Uni ou la Tunisie, qu'avec les Etats-Unis. Je me rendrai d'ailleurs, dans quelques heures, à Washington, où je rencontrerai mon homologue John Ashcroft.

L'efficacité commande aussi de faire évoluer notre droit, en révisant la loi de 1986. Le texte sera soumis au Parlement dans quelques semaines, qui proposera de nouvelles dispositions de procédure pénale. D'autre part, j'ai décidé d'augmenter le nombre des juges d'instruction de la section anti-terroriste, qui de 4 passeront à 5 en janvier (Murmures sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains). Enfin, les moyens du parquet de Paris seront renforcés, et un audit est en cours sur le fonctionnement du TGI de la capitale. Ses conclusions nous permettront, sous peu, de déterminer quels moyens seront nécessaires pour améliorer encore son efficacité (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

GESTION DES ENTREPRISES PUBLIQUES

M. Dominique Tian - Les Français ont encore en mémoire les catastrophes financières du Crédit lyonnais, du CCF, du Comptoir des entrepreneurs, du GAN, catastrophes dont la Cour des comptes a évalué le coût pour le Trésor public à plus de 130 milliards de francs, soit quelque 9 000 F par contribuable (« Scandaleux ! » sur les bancs du groupe UMP).

Plus récemment, d'autres entreprises publiques se sont trouvées au centre d'une polémique, qu'il s'agisse de France Télécom, dont le président a dû se démettre, d'Areva, dont la présidente avait « oublié » d'informer l'Etat de sa prise de participation dans SAGEM, ou de la SNECMA, dont la gestion a suscité quelque émotion. D'évidence, les relations ne sont pas ce qu'elles devraient être entre l'Etat et des entreprises dont la direction se caractérise au mieux par l'opacité, au pire par des manquements à l'éthique.

Monsieur le ministre des finances, vous travaillez à un texte sur la sécurité financière des entreprises privées, que les petits actionnaires attendent avec impatience. Envisagez-vous aussi un projet sur la gouvernance des entreprises publiques ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie - Les règles de la gouvernance des entreprises, qu'elles soient privées ou publiques, doivent être actualisées ; il en va de la crédibilité même du système économique. S'agissant du secteur privé, la réforme est en marche dans les entreprises, dans les fédérations et dans les pays. En France, les conclusions du rapport Bouton, qui sont dans la ligne du rapport Vienot, serviront de base à un projet de loi sur le gouvernement d'entreprise. La France fera de ce sujet l'une des priorités de sa présidence du G7, qui commence en janvier.

S'agissant de nos entreprises publiques, les chiffres sont éloquents : leur chiffre d'affaires est de 200 milliards, leur dette s'élève à 150 milliards, leurs fonds propres ne sont que de 50 milliards et leurs effectifs de 1,2 million de salariés (Mouvements divers). Nous devons revoir leurs règles de fonctionnement et réviser leurs relations avec l'Etat-actionnaire (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). A cette fin, j'ai demandé un rapport à quatre personnalités qualifiées, qui ont exercé des fonctions tant dans le secteur privé que dans des entreprises publiques (« Messier ? » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains). Ses conclusions, qui me seront rendues avant le 20 janvier, nous permettront de prendre des dispositions de nature à renforcer l'efficacité, la responsabilité et la performance globale de ces entreprises (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

FERMETURE DU CENTRE DE SANGATTE

M. Gilles Cocquempot - Monsieur le ministre de l'intérieur, la décision de fermer le centre de Sangatte a des conséquences que chacun connaît aujourd'hui. Vous avez reçu ce matin, à l'occasion d'une table ronde que j'avais sollicitée, les élus locaux et les parlementaires du littoral. Je vous en remercie et suis sensible à l'hommage que vous avez rendu tout à l'heure aux élus socialistes, mais je regrette que cette réunion n'ait pu avoir lieu avant la décision de fermeture (Interruptions sur les bancs du groupe UMP).

Créé dans l'urgence afin d'éviter que des familles arrivées dans le Calaisis avec l'espoir de trouver un avenir en Grande-Bretagne se retrouvent à la rue, le centre de Sangatte n'avait pas vocation à durer éternellement. Je veux d'ailleurs rendre hommage aux populations locales pour leur extrême patience, ainsi qu'aux associations qui défendent les droits de l'homme.

Toutefois, cette fermeture ne réglera rien si des mesures d'accompagnement ne sont pas prises au niveau national et européen. Il faut que l'Etat donne une plus grande lisibilité à son action, que la Grande-Bretagne fasse très clairement savoir sa détermination à enrayer le phénomène migratoire et que l'ensemble des pays de l'Union européenne prennent conscience de la nécessité d'une action collective. Sans cela, nous risquons d'assister à la multiplication de nouveaux Sangatte et des entorses aux libertés publiques, le dernier exemple en date étant celui des Bulgares à Bordeaux.

Quelle est la position du Gouvernement sur ce sujet, que la France ne peut gérer seule, et encore moins le Calaisis ? Les moyens d'accueil et d'hébergement dévolus aux préfets étant, me dit-on, en diminution, que comptez-vous faire pour que les réfugiés soient traités humainement ?

M. le Président - Veuillez conclure.

M. Gilles Cocquempot - Les procédures d'examen des demandes d'asile seront-elles accélérées ? Enfin, ne pensez-vous pas qu'une harmonisation européenne s'impose en matière de gestion des flux migratoires ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales - J'ai apprécié la façon dont vous avez posé votre question et je puis vous dire que le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin ne vous décevra pas ! Nous vous écouterons davantage que ne l'a fait le gouvernement Jospin et nous agirons aussi davantage (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Le Pas-de-Calais n'a pas vocation à être le réceptacle de tous les miséreux du monde et il n'y a pas de raison non plus que l'Etat abandonne les élus du Pas-de-Calais face à une réalité qui concerne la France dans son ensemble.

Ensuite, il va de soi qu'une politique européenne de l'immigration est indispensable, ne serait-ce que pour se mettre rapidement d'accord sur les pays que l'on peut considérer comme sûrs et pour qu'il y ait enfin une procédure allégée d'instruction des demandes d'asile politique. Quand une demande émane d'un ressortissant d'un pays démocratique, il n'y a pas de raison de consacrer des années à son examen, car il s'agit à l'évidence d'un détournement de procédure (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Je suis convaincu que la formule « immigration zéro » n'a aucun sens ; le Premier ministre l'a déjà dit avec force. Mais je ne voudrais pas pour autant que l'on conteste à la France le droit de choisir ceux qu'elle veut accueillir sur son sol et ceux qu'elle veut refuser (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Vous avez parlé du cas des Bulgares, et vous avez bien fait. Je n'ai pas à porter de jugement sur une décision de justice, mais j'observe que 39 Bulgares en situation irrégulière vont être remis en liberté ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) Les Néerlandais ont rempli 17 charters pour reconduire des étrangers en situation irrégulière, et personne ne considère que les Pays-Bas ne sont pas une démocratie. Au nom de quoi la France serait-elle le seul pays à n'avoir pas le droit d'expulser des étrangers n'ayant aucun titre à rester ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF)

HÔPITAUX D'ILE-DE-FRANCE

M. Yves Jego - Depuis 1996, les établissements hospitaliers franciliens font les frais d'une politique de redéploiement des moyens au bénéfice des autres régions françaises, considérées comme sous-dotées. Selon une récente étude menée par l'union hospitalière d'Ile-de-France, ce sont aujourd'hui plus de 250 millions d'euros qui manquent pour boucler les budgets des hôpitaux de la région parisienne, lesquels souffrent en outre d'une pénurie de personnel médical, d'infirmiers en particulier : 3 000 postes feraient défaut dans le seul secteur public.

Cette situation dramatique justifie un traitement spécifique. Comment le Gouvernement compte-t-il donc y remédier, et répondre aux attentes de ces hôpitaux qui se sentent abandonnés depuis de trop nombreuses années ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées - La correction des inégalités entre régions entreprise il y a quelques années était justifiée par l'écart important qui existait entre le coût de l'offre de soins en Ile-de-France et la moyenne nationale. De 20 % en 1997, cet écart a été ramené aujourd'hui à 11 %. L'effort a donc été considérable. Je regrette néanmoins que l'on n'ait pas, en même temps, instauré une procédure d'accompagnement, car les hôpitaux franciliens se trouvent aujourd'hui dans une situation intenable. L'Ile-de-France ne peut servir durablement de réservoir financier aux autres régions de France. Il faut donc desserrer l'étau autour d'elle, tout en poursuivant bien sûr la lutte contre les inégalités régionales. La nouvelle répartition permettra aux hôpitaux franciliens de recevoir 50 millions d'euros de plus que l'an dernier, ce qui représente un gros effort.

M. Bernard Roman - Au détriment de qui ?

M. le Ministre - Vous avez raison de vous inquiéter du nombre de postes non pourvus de soignants. Il s'élève en effet à 2 400, soit 1 200 pour l'assistance publique et 1 200 pour les hôpitaux franciliens, ce qui s'explique à la fois par une situation générale de pénurie et par l'attrait d'une qualité de vie qu'ils espèrent meilleure dans nos provinces profondes (Sourires). Nous allons donc réfléchir, avec la direction de l'hospitalisation, à des mesures de nature à rendre les postes en Ile-de-France plus attractifs (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

EFFECTIFS DE L'ADMINISTRATION PENITENTIAIRE

Mme Maryse Joissains Masini - Bonjour à tous ! (Applaudissements et rires sur les bancs du groupe UMP)

M. le Président - Bonjour, Madame. Posez votre question... (Sourires)

Mme Maryse Joissains Masini - Monsieur le garde des sceaux, les effectifs de l'administration pénitentiaire constituent un dossier préoccupant. Certes, votre projet de loi de programmation prévoit la création de 3 740 emplois, mais une part non négligeable d'entre eux est déjà affectée à certains aspects de votre politique, notamment vis-à-vis des mineurs délinquants.

Or, la réinsertion - qui reste le moyen le plus sûr de protéger la société - exige un personnel nombreux et spécialisé. Et si l'on veut que les petits délinquants ne deviennent pas des grands délinquants, il faut des moyens.

La surpopulation carcérale et le manque de moyens rendent nombre de prisons ingérables. J'ajoute que l'administration pénitentiaire n'est pas outillée pour assurer les escortes de prisonniers. Ceux-ci sont donc convoyés par des agents de la police nationale - qui n'ont pas reçu de formation à cet effet.

Le gouvernement socialiste a laissé les prisons françaises dans une situation dramatique et dangereuse (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). Comment comptez-vous y faire face et quelle politique de recrutement allez-vous mettre en _uvre ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice - L'administration pénitentiaire est dans une situation difficile, c'est vrai, du fait de la surpopulation carcérale
- situation antérieure à notre arrivée aux responsabilités, et que l'on constatait déjà il y a dix ans - et de l'augmentation de la violence à l'intérieur des prisons, violence qui tient à la nature de la population accueillie et au nombre croissant de prisonniers atteints de déséquilibres psychiques.

Comment y faire face ? La loi d'orientation et de programmation constitue une première réponse : l'augmentation substantielle de la capacité d'accueil des établissements. M. Bedier et moi-même présenterons donc au conseil des ministre, la semaine prochaine, le « plan prisons », c'est-à-dire l'ensemble des opérations de construction que nous allons lancer - pour certaines, dès 2003.

En ce qui concerne le personnel, nous avons prévu une augmentation des effectifs budgétaires de 3 740 sur cinq ans. Mais nous devrons aussi faire face aux départs à la retraite : ce sont donc quelque 10 000 surveillants que nous allons recruter au cours des cinq prochaines années, ce qui représente un défi considérable. Nous allons aussi accroître la capacité d'accueil de l'école de surveillants d'Agen, et nous avons lancé il y a quelques semaines une grande campagne d'information et de recrutement. Ainsi, d'ici l'été prochain, ce sont 2 500 surveillants de prison que nous entendons recruter ; nous devrons donc communiquer sur les possibilités de recrutement de cette administration. Enfin, pour répondre à votre question sur les accompagnements entre tribunal et prison, nous allons constituer un groupe de travail avec Nicolas Sarkozy (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

AIDES SOCIALES AUX JEUNES SCOLARISÉS

Mme Catherine Génisson - Ma question s'adresse à M. Luc Ferry, ministre de l'éducation nationale (« Ah ! » sur de nombreux bancs du groupe socialiste). Vous avez gelé les crédits des fonds sociaux destinés aux familles en difficulté qui ont des enfants au collège ou au lycée. De nombreux chefs d'établissement s'inquiètent parce qu'ils ne peuvent plus venir en aide à des élèves en situation précaire, notamment pour le paiement de la restauration scolaire. En effet le gel de ces crédits entraîne une baisse de 20 à 50 % du montant des secours aux familles concernées. Ce parti pris de votre politique consterne et inquiète les milieux éducatifs, qui se demandent comment faire face aux besoins des enfants dans des établissements souvent classés en ZEP, et que vous délaissez (Exclamations sur les bancs du groupe UMP). Etrange manière de se préoccuper de la « France d'en bas » ! Que répondez-vous aux chefs d'établissement et aux familles qui subissent vos choix politiques, que vous tentez de dissimuler, mais qui montrent une fois de plus que l'éducation nationale n'est plus la priorité du Gouvernement ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

M. Xavier Darcos, ministre délégué à l'enseignement scolaire - Madame la députée ... (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste) Je vous remercie d'avoir rappelé l'utilité du fonds social collégiens (« Ferry doit répondre ! Il est là ! » sur de nombreux bancs du groupe socialiste) créé sous le gouvernement d'Alain Juppé et sensiblement réabondé sous celui de M. Balladur ! A la rentrée dernière, les établissements avaient reçu leurs dotations pour l'ensemble des fonds sociaux collégien et lycéen et le fonds des cantines, à hauteur de 64 millions d'euros. Il manque à peu près 20 % de la dotation annuelle, qui vont être versés prochainement. Le directeur des lycées et collèges l'a demandé aux établissements par une note du 8 novembre, qui rappelle le principe suivant : puisque nous disposons de dotations déjà très importantes, la délégation des crédits restants doit se faire en fonction des besoins des élèves et des établissements. Certains établissements ont en effet trop de dotations, d'autres pas assez.

Comme nous voulons faire _uvre de justice, plutôt que de distribuer n'importe comment, nous examinons chaque établissement (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). Nous prenons en compte le nombre de boursiers, la présence ou non de SECPA, le fait qu'il s'agit ou non d'un établissement sensible, faisant partie d'une ZEP ou d'un REP, bref : nous regardons la réalité avec pragmatisme, et, en fonction des besoins, nous allons déléguer la fin des crédits dans les jours qui viennent. Leur montant total sera d'ailleurs supérieur à celui de l'an dernier (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). Peut-être voulez-vous faire croire que ce gouvernement veut affamer les lycéens et les collégiens : il faudra trouver des arguments moins caricaturaux ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; protestations sur les bancs du groupe socialiste)

APPRENTISSAGE

M. Patrick Beaudouin - Ma question s'adresse à M. Ferry (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste) et concerne l'apprentissage. Dans le Val-de-Marne, plus de sept mille emplois qualifiés restent non pourvus à ce jour, notamment dans les métiers de bouche ou les métiers sociaux, faute de main-d'_uvre qualifiée. Récemment, dans ce même département, les chantiers du bâtiment se sont arrêtés faute, là encore, de main-d'_uvre qualifiée, notamment dans l'électricité et la plomberie.

Le 7 novembre dernier, le marché d'intérêt national de Rungis a organisé une journée portes ouvertes à l'intention des jeunes, pour lutter contre la pénurie de main-d'_uvre qui menace l'avenir de nombreuses PME. Les emplois en cause font en outre partie de notre culture, et assurent dans nos communes une proximité sociale forte.

Il est temps de restaurer un véritable apprentissage, qui soit une vraie formation professionnelle, associant un métier qui réponde aux besoins des entreprises et une formation culturelle qui valorise l'individu. Il faut réconcilier les entreprises avec l'éducation nationale, les familles et surtout les jeunes, pour préparer des métiers qui sont aussi importants et valorisants que des troisièmes cycles.

M. Jean-Claude Lefort - Il faut commencer par mieux les payer !

M. Patrick Beaudouin - Vous savez, Monsieur le ministre, que l'intelligence peut revêtir différentes formes, à différents moments de la vie. Comment entendez-vous réformer l'apprentissage en France ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Luc Ferry, ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche - (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste). Vous avez raison de dire, et toutes les enquêtes le montrent, qu'il y a un décalage parfois alarmant entre l'image qu'ont les jeunes des métiers, y compris parfois dans l'enseignement professionnel lui-même, et la réalité des besoins des entreprises. Vous avez également raison de souligner la place essentielle de l'apprentissage dans notre système de formation professionnelle. On peut le dire sans exagérer, c'est grâce à lui que notre système éducatif a découvert, fût-ce tardivement, la vertu des formations en alternance.

Mais il faut avoir le courage de dire la vérité : les difficultés qui pèsent aujourd'hui sur l'enseignement et la formation professionnels ne sont pas liées seulement à la question de l'apprentissage, mais à la nature actuelle de ce qu'on appelle encore, étrangement, le collège unique. Aujourd'hui, les familles et les élèves n'ont aucune véritable raison de choisir la voie professionnelle si ce n'est par défaut, à la suite d'un échec dans la voie générale : c'est ce problème qu'il faut traiter aujourd'hui (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

Je vous proposerai donc trois séries de mesures, après en avoir discuté avec les partenaires sociaux. Tout d'abord, je souhaite ouvrir dès le collège, pour les élèves qui le souhaitent, la possibilité de découvrir plus tôt des métiers, par exemple dès la quatrième, au moyen notamment de stages en lycée professionnel (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

Ensuite, il faut améliorer l'orientation et l'information. Sur les 60 000 jeunes qui sortent chaque année du système sans qualification, 53 000 le quittent en plein milieu d'un CAP ou d'un BEP, parce que l'affectation qu'ils avaient demandée ne leur a pas été accordée et qu'on leur fait découvrir un métier qui ne leur plaît pas. Voilà un point à régler d'urgence, en même temps que celui de l'information, notamment en direction des enseignants de l'enseignement général : ceux-ci ont souvent une image très négative du lycée professionnel, dont la réalité a pourtant bien évolué par rapport à celle que nous avons connue dans notre jeunesse (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

Enfin, dans le cadre de la décentralisation, il faut améliorer le copilotage des formations entre les élus et les recteurs. Sur ces sujets je ferai demain une communication au Conseil des ministres ; puis je continuerai le tour de France des lycées professionnels pour rencontrer tous les proviseurs et tous les chefs de travaux (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

LUTTE CONTRE LE RAT MUSQUÉ

M. Jean-Pierre Decool - Ma question, qui s'adresse à Mme la ministre de l'écologie, risque de m'attirer quelques railleries. Il s'agit cependant d'un sujet grave : l'invasion du rat musqué sur le territoire national, et particulièrement dans les Flandres (Exclamations et rires sur les bancs du groupe socialiste). Ce rongeur, classé nuisible, cause des dégâts importants dans les zones humides. Les galeries qu'il creuse minent les berges et les digues, fragilisant les infrastructures et créant un risque majeur pour les zones inondables et leurs utilisateurs. Il est en outre le vecteur de maladies transmissibles à l'homme, la leptospirose et l'échinococcose alvéolaire, constituant de ce fait un risque sanitaire grave.

Le 25 avril, votre prédécesseur, M. Cochet a pris un arrêté interdisant l'utilisation de tout produit chimique contre ce rongeur, ce qui a déjà des conséquences désastreuses (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste)

M. le Président - Mes chers collègues, je vous prie d'écouter la question. Nous sommes tous concernés par le rat musqué ! (Rires)

M. Jean-Pierre Decool - Les pièges ne peuvent suffire. Seule la chlorophocinone, employée en Belgique, permettrait l'éradication du nuisible (Brouhaha sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

Quelles solutions envisagez-vous ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF)

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable - Si votre question a suscité des railleries sur certains bancs, elle n'en suscite pas chez moi. Le rat musqué est en effet classé parmi les nuisibles. Sa destruction est non seulement recommandée, mais obligatoire depuis un arrêté de juillet 2001. Mais on ne peut pas détruire le rat musqué par le poison - chlorophocinone ou autre -, car les lieux qu'il habite sont proches des zones de culture. L'usage de ce poison menacerait en outre des espèces protégées, ainsi que certains gibiers, rapaces et sangliers notamment, ce qui alarme chasseurs et pêcheurs. Nous recherchons donc des solutions alternatives, comme les cache-pièges, et nous préconiserons des méthodes à la fois efficaces et écologiques (Applaudissements sur divers bancs).

M. le Président - Nous en avons terminé avec les questions au Gouvernement.

La séance, suspendue à 16 heures est reprise à 16 heures 25, sous la présidence de M. Baroin.

PRÉSIDENCE de M. François BAROIN

vice-président

LOI DE FINANCES POUR 2003 -deuxième partie- (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2003.

SANTÉ, FAMILLE ET PERSONNES HANDICAPÉES

M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées - Il y a quinze jours, nous avons adopté le projet de loi de financement de la sécurité sociale. L'examen du projet de budget me donne l'occasion de rappeler la politique de santé du Gouvernement, non plus sous l'angle de l'assurance maladie, mais sous celui de la politique régalienne de l'Etat.

Le PLF et le PLFSS sont toutefois cohérents l'un avec l'autre. J'en veux pour preuve les mesures de clarification des rôles entre l'Etat et l'assurance maladie : le transfert à celle-ci des dépenses relatives à l'IVG et au fonctionnement des centres de soins spécialisés pour les toxicomanes, le transfert à celui-là des stages de résidanat auprès des médecins généralistes. Je veux poursuivre cette clarification pour aboutir à un PLFSS consacré aux soins et à un budget consacré à la santé publique et à la sécurité sanitaire. Il faut en effet sortir de l'enchevêtrement actuel des compétences, accroître la lisibilité des comptes sociaux et du budget et mieux identifier les responsabilités. C'est une exigence forte du Parlement et, à travers lui, de la société tout entière.

Je conclurai, sur ce sujet de la clarification, en réaffirmant mon engagement total dans la mise en _uvre de la loi organique relative aux lois de finances. Passer d'une démarche de moyens à une démarche de résultats est, pour l'administration, un enjeu majeur, et je mesure le peu de temps que nous avons pour préparer l'expérimentation, prévue dès le budget 2005.

Après avoir souligné la part importante consacrée aux dépenses de solidarité, j'évoquerai deux aspects majeurs de l'action de l'Etat : la santé publique, la sécurité sanitaire. Je conclurai par les priorités de la politique en faveur de la famille, en lieu et place du ministre délégué à la famille, Christian Jacob, actuellement retenu au Sénat pour la discussion de la proposition de loi de M. About sur la responsabilité civile médicale, mais qui nous rejoindra dès que possible.

Devant financer des dépenses de plus en plus massives, ce budget progresse de 400 millions d'euros, soit 4,4 %, pour s'établir à 9,4 milliards en intégrant les crédits de gestion des politiques de santé et de solidarité dont je partage la responsabilité avec François Fillon. J'ai tout lieu d'être satisfait d'une hausse qui traduit la priorité accordée au ministère dans un contexte fortement contraint.

Pourtant, la marge de man_uvre est réduite pour mener une politique de santé. En effet, sur 9,4 milliards, 4,8 milliards sont consacrés aux handicapés, 1 milliard à la CMU complémentaire, 800 millions à l'allocation de parent isolé, soit 6,6 milliards, ou 70 % du total, réservés pour les grandes prestations de solidarité. Ajoutons 1,1 milliard pour les CAT, 200 millions pour les formations médicales et paramédicales, 100 millions pour les tutelles et curatelles, 1 milliard pour les moyens de fonctionnement et dépenses de personnel. Il reste « seulement » 400 millions pour conduire la politique de santé publique et de sécurité sanitaire. En outre, ces dépenses de solidarité progressent fortement, de 400 millions entre le budget 2002 et le budget 2003, ce qui ne laisse finalement cette année aucune marge nouvelle pour la politique de santé.

La lutte contre le handicap tient la première place. Je m'en réjouis, car il s'agit d'un des grands chantiers du quinquennat. Mme Boisseau y reviendra. J'insiste pour ma part sur l'importance de la CMU complémentaire dont bénéficient aujourd'hui 4,7 millions de personnes. Pour lisser l'effet du seuil fatidique de 534 € - 3 500 F - nous avons aidé cet été ceux qui sont juste au-dessus de ce seuil à acquérir cette couverture complémentaire.

M. Jean-Marie Le Guen - C'était déjà prévu auparavant.

M. le Ministre - Mais certains organismes complémentaires - la mutuelle de Provence l'a fait savoir - veulent se retirer d'un système où elles perdent de l'argent car la déduction forfaitaire n'a pas été revalorisée depuis 1999. C'est pourquoi le Gouvernement propose par amendement de la revaloriser de 228 à 283 €.

M. François Goulard - Très bien.

M. le Ministre - L'an prochain, nous proposerons une réforme de la CMU pour clarifier le rôle de chaque acteur et, comme l'a proposé le Premier ministre, assurer un égal accès des Français aux soins et une véritable couverture complémentaire.

Ce budget traduit la priorité que nous accordons à la santé publique, notamment à la lutte contre le cancer. Le choix implicite fait jusqu'à présent en faveur du curatif par rapport au préventif n'est plus acceptable. Un de mes objectifs essentiels est donc de développer une véritable culture de la prévention et les crédits qui y sont consacrés progressent de 30 % pour atteindre 173 millions.

Prévention, éducation à la santé, dépistage, sont les fondements de la loi cadre que je souhaite présenter avant l'été 2003. J'ai provisionné 5 millions dans ce budget pour la préparer.

Elle définira le rôle des acteurs et les priorités de santé publique pour les cinq ans à venir, avec des indicateurs précis permettant un véritable contrôle par le Parlement. Cette politique générale sera ensuite déclinée successivement par pathologie et s'appuiera sur des actions de communication, d'information et d'éducation ainsi que sur le dépistage et les prises en charge précoces.

La loi de programmation prendra d'abord en compte la lutte contre le cancer, grand chantier du quinquennat. 700 000 personnes sont atteintes d'une maladie cancéreuse et 250 000 nouveaux cas sont diagnostiqués chaque année. Le cancer est la première cause de mortalité prématurée, la seconde cause médicale de décès. Or 70 % des cancers sont imputables à des facteurs de risque sur lesquels il est possible d'intervenir efficacement.

La commission d'orientation sur le cancer a été installée le 9 septembre 2002 pour identifier tous les aspects d'une lutte nationale et organisée contre le cancer, du dépistage à l'accompagnement des malades. La première phase des travaux est pratiquement terminée. La commission s'ouvre désormais aux associations pour tenir compte de tous les besoins des malades. Après cette concertation, le rapport définitif me sera remis à la fin de l'année ou au début de 2003.

Sans attendre, deux opérations vont être lancées. Le dépistage dans une même famille des femmes qui présentent un risque génétique de cancer du sein et des personnes qui présentent un risque de cancer rectocolique commencera le 1er janvier 2003. Le dépistage du cancer du sein, organisé dans 32 départements seulement, sera généralisé en 2004. Il n'est pas normal qu'une femme sur deux n'en fasse pas l'objet actuellement. L'Etat peut être amené à recentraliser certaines fonctions dévolues aux départements, pour remédier à des disparités au plan national. Cette garantie au niveau national n'interdit pas que le relais soit pris par d'autres opérateurs sur le terrain.

Avec 35 millions d'euros supplémentaires au budget 2003, les moyens consacrés à la lutte contre le cancer seront quatre fois supérieurs à ce qu'ils étaient en 2002 (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Je souhaite également renforcer la lutte contre le SIDA et l'intégrer dans une action internationale (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP). La pandémie est loin d'être maîtrisée, d'autant que les comportements préventifs se relâchent. Comme l'a indiqué avec force le Président de la République à la 14e conférence internationale sur le SIDA à Barcelone, l'efficacité des multithérapies ne doit pas masquer le fait que l'infection VIH reste mortelle et expose à la précarité, à l'isolement et aux discriminations.

La politique de lutte contre le SIDA, intégrant les nouvelles données épidémiologiques mais aussi sociologiques et thérapeutiques, vise pour 2003 à maintenir un haut niveau d'information, en particulier pour éviter la transmission à l'enfant pendant la grossesse ; à renforcer la prévention en direction des populations prioritaires ; à veiller à la qualité de la prise en charge des malades hors de l'hôpital ; à développer la formation des professionnels sanitaires et sociaux. En 2003 le ministère consacrera 65 millions à ces programmes.

La situation des pays en voie de développement justifie que la France s'engage dans une politique d'aide et de coopération. En particulier, les crédits du groupement d'intérêt public ESTHER augmenteront de 3 à 4 millions. Il s'agit de créer un réseau qui associe les établissements hospitaliers et organise le partenariat entre les gouvernements du Nord et du Sud, la société civile et le monde des affaires, de façon fonctionnelle et pragmatique. Des accords ont été signés par cinq pays et je prévois de me rendre au Cambodge et au Burkina Faso.

Il est également nécessaire de relancer la lutte contre le fléau que reste la toxicomanie, en sortant de considérations trop théoriques, car le traitement n'est pas le même pour le tabac, l'alcool ou les psychotropes. L'expérience que j'ai acquise depuis six ans à Marseille dans ce domaine me conforte dans cette approche de terrain, en liaison avec les associations. Je me félicite de la nomination de Didier Jayle, médecin et responsable au centre régional d'information et de prévention sur le SIDA d'Ile-de-France comme président de la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie. Je souhaite qu'avec la collaboration des ministères concernés, nous donnions une nouvelle impulsion à ce combat. J'indique au passage que si les crédits de la MILDT passent de 45,6 à 40 millions en 2003, c'est que la communication de la mission sera assurée par l'institut national de prévention et d'éducation à la santé.

J'en viens à la sécurité sanitaire. C'est un combat de tous les jours et, forts de notre expérience, nous avons aujourd'hui un dispositif bien plus performant qu'il y a une dizaine d'années, essentiellement fondé sur le travail d'expertise et d'évaluation des risques mené par les agences sanitaires. Certaines doivent assainir leur gestion financière et nous avons décidé de financer ces agences par des subventions de l'Etat - 53 millions d'euros - et par le réemploi de crédits non consommés. Ainsi, des mesures nouvelles seront financées à hauteur de 10 millions d'euros en 2003.

Il est essentiel de séparer l'expertise de la décision politique, prise en toute transparence. Ainsi, à titre d'exemple, s'agissant de la levée de l'embargo sur la viande bovine britannique, l'AFSSA, après avoir procédé à une analyse scientifique de la question, a rendu des conclusions, puis le pouvoir politique a pris le temps de réfléchir avant de décider.

Nous allons poursuivre le développement des agences, en particulier l'Agence française de sécurité sanitaire environnementale - AFSSE - et l'Institut de veille sanitaire. L'AFSSE, dotée d'un budget de 5 millions d'euros, devrait commencer à travailler avant la fin de l'année.

Quant à l'Institut de veille sanitaire, la surveillance des pathologies contagieuses ou dues à des actions terroristes, ainsi que le signalement des infections nosocomiales sont essentiels pour agir préventivement. L'exemple des méningites dans la région de Clermont-Ferrand fin 2001 et dans le sud-ouest en octobre 2002 en témoigne.

Par ailleurs, les moyens du ministère en matière de prévention et de lutte contre les risques sanitaires environnementaux ont été accrus de plus de 7 millions d'euros. Dioxine, plomb, mercure, pollution atmosphérique, rayonnements électromagnétiques, éthers de glycol, antennes-relais de téléphonie mobile : il convient de mieux évaluer l'ampleur des risques sanitaires et de les hiérarchiser. S'agissant des antennes-relais, je salue le rapport parlementaire qui nous a éclairés. Cela dit, le principe de précaution n'est pas une formule magique.

Concernant la politique de la famille, l'essentiel des interventions publiques figure au PLFSS. Christian Jacob a mis en place, le 22 octobre dernier, des groupes de travail en vue de préparer la conférence de la famille qui aura lieu au printemps 2003. Deux mesures fiscales ont déjà été votées : le doublement de l'abattement pour les donations entre les grands-parents et les petits-enfants et l'augmentation des seuils pour les emplois familiaux. Cette dernière mesure, favorable à l'emploi, permettra de lutter contre l'économie souterraine et de protéger les salariés concernés.

La dotation pour l'allocation de parent isolé, qui bénéficiera en 2003 à plus de 175 000 personnes, progresse de 8,8 %. Une réforme de cette allocation est en cours.

Telles sont les grandes lignes de ce projet de budget. Je laisse le soin à Marie-Thérèse Boisseau de vous exposer notre politique du handicap (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées - Lors du débat sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale, M. Mattei a indiqué que la part des dépenses réservées à l'amélioration des conditions de vie des personnes handicapées augmentait de 6 %. Par cohérence, le projet de loi de finances y consacre un effort aussi important, puisque le budget réservé aux personnes handicapées progresse de 5,6 %, traduisant ainsi la volonté du Gouvernement de mieux intégrer les personnes handicapées dans notre société. Des progrès importants ont été accomplis grâce à la loi d'orientation du 30 juin 1975, mais beaucoup reste à faire.

Le présent projet de budget augmente de 317 millions d'euros pour atteindre 5,9 milliards. 4,526 milliards d'euros sont destinés à l'allocation pour adultes handicapés - plus 5,8 % -, un peu plus de 1 milliard aux centres d'aide par le travail - CAT -, 78,9 millions aux crédits déconcentrés, 263,5 millions au fonds spécial d'invalidité - FSI -, et 12,7 millions d'euros aux instituts nationaux pour les sourds et aveugles.

En 2001, 200 000 personnes environ ont bénéficié de l'AAH - 120 000 personnes ont un taux d'incapacité égal ou supérieur à 80 %, et leur proportion est stable depuis 1995, alors que celles dont le taux se situe entre 50 et 80 % sont chaque année plus nombreuses. En effet, de plus en plus de personnes atteintes de déficiences mentales, et jusqu'à présent accueillies dans des hôpitaux psychiatriques, demandent l'AAH, leur état de santé ne leur permettant pas de trouver un emploi. Quelle est alors l'efficacité de notre dispositif d'insertion professionnelle ?

J'ai proposé au président et à la directrice générale de l'AGEFIPH de travailler avec le réseau cap emploi à l'amélioration de l'insertion professionnelle en milieu ordinaire. L'évaluation médicale individualisée par les COTOREP sera renforcée, et s'appuiera sur la création de 43 nouveaux postes de médecins coordonateurs, ainsi que sur l'actualisation du système informatique et la simplification des procédures.

Alors que le plan quinquennal, qui s'achèvera en 2003, prévoyait de créer 1 500 places de CAT par an, notre budget permettra d'en réaliser 3 000. Certes, les personnes handicapées doivent être, en priorité, orientées vers le travail en milieu ordinaire, mais ce n'est pas toujours possible, d'où l'importance des ateliers protégés ou des CAT. Ceux-ci sont d'ailleurs victimes d'une polémique dont l'auteur, après une procédure disciplinaire, a été exclu du corps des administrateurs de l'INSEE. Les CAT ne sont ni des lieux d'enfermement, ni des lieux d'esclavage mais apportent une réponse médico-sociale à certaines formes de handicap. Il est urgent d'y augmenter le nombre de places afin de désengager les IME ou d'éviter le retour des jeunes au sein de leur famille où l'inactivité les fera régresser.

La gestion des CAT doit cependant être améliorée, tant au plan financier qu'en termes d'organisation du travail. Certaines personnes devraient pouvoir travailler à temps partiel, ou se réorienter vers le travail en atelier protégé ou en milieu ordinaire.

Mais, dans tous les cas, il doit s'agir de parcours individualisés.

Imaginer le travail en milieu ordinaire comme la seule solution à l'insertion professionnelle des personnes handicapées, c'est nier la réalité et donc faire fausse route. Il est essentiel de maintenir le travail protégé sous des formes plus souples. Ce sera l'un des objectifs de la réforme de la loi de 1975.

Les mesures concernant l'allocation adulte handicapé et les centres d'aide par le travail s'accompagnent d'une majoration de 30 % des crédits déconcentrés, qui s'établiront à 78,9 millions en 2003. Cet effort budgétaire permettra d'accroître les services offerts, et la déconcentration permettra aux élus locaux de travailler avec les services de l'Etat dans le cadre de projets territoriaux.

Ces nouveaux crédits permettront de créer trente sites pour la vie autonome, interlocuteurs uniques pour les personnes handicapées dans leur recherche de financement des aides techniques qui, trop souvent, est un véritable parcours du combattant (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP).

Dans un second temps, ces sites apporteront des informations de toutes sortes aux personnes handicapées et à leur famille.

J'ai par ailleurs confié au professeur Lecomte une mission d'étude sur les conditions de prise en charge des aides techniques. A ce jour, elles sont quelque 35 000, dont 700 seulement sont remboursées. Cette question sera, sans nul doute, au centre de la réflexion sur la compensation du handicap.

Les crédits déconcentrés nous permettront aussi de créer 500 nouveaux postes d'auxiliaires, essentiels pour l'intégration et la réussite scolaire des enfants handicapés. Avec le ministre de l'éducation nationale, j'ai installé, le 17 octobre, un groupe de travail chargé de définir un nouveau statut pour les auxiliaire d'intégration scolaire. Il remettra ses propositions début 2003. Pour l'heure, Luc Ferry et moi-même nous engageons à ce que le nombre d'auxiliaires d'intégration scolaire soit préservé jusqu'à la fin de l'année scolaire.

M. Jean-François Chossy, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales pour les personnes handicapées - Très bonne initiative !

Mme la Secrétaire d'Etat - Si les enfants ont l'obligation d'aller à l'école, l'éducation nationale a l'obligation d'accueillir tous les enfants, à l'exception bien sûr des plus lourdement handicapés. Or, trop d'enfants sont à ce jour en attente d'intégration scolaire !

M. François Goulard - C'est vrai !

Mme la Secrétaire d'Etat - Outre les postes d'auxiliaires d'intégration scolaire, 1 100 postes d'auxiliaires de vie seront créés, ce qui portera leur nombre à 5 000 à la fin de l'année prochaine.

Il reste à respecter le choix du mode de vie. De plus en plus de personnes souhaitent vivre à domicile plutôt qu'en établissement, quelle que soit la lourdeur de leurs handicaps. J'ai donc demandé à mes services déconcentrés de rechercher des solutions personnalisées.

Grâce aux crédits déconcentrés, il sera également possible de développer l'accueil temporaire en établissement, essentiel tant pour les personnes handicapées que pour leur famille qui a besoin, de temps à autre, de se reposer et de vivre selon un autre rythme.

M. Jean-François Chossy, rapporteur pour avis - J'apprécie !

Mme la Secrétaire d'Etat - Le maintien à domicile suppose aussi des services de soins infirmiers à domicile dont j'ai demandé la poursuite à titre dérogatoire en attendant la parution prochaine du décret qui leur donnera un statut légal.

Le financement de ces soins et celui de l'externalisation d'équipes travaillant dans les maisons d'accueil spécialisé ou dans les foyers d'accueil médicalisé sont prévus dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Avant de généraliser les dispositions de maintien à domicile, des expérimentations seront nécessaires. Je les suivrai avec attention car le choix de vie des personnes handicapées sera un des principaux axes de la réforme de la loi de 1975.

J'en viens au fonds spécial d'invalidité, dont 91 700 personnes bénéficient, pour vous annoncer que, courant 2003, l'IGAS lancera un audit sur son financement.

Vous le savez, ce budget ne résume pas, à lui seul, les efforts en faveur des personnes handicapées. Ainsi, si l'on y ajoute les mesures fiscales et les interventions de l'Etat en faveur de la garantie de ressources, le montant des actions pour les personnes handicapées excède 7,5 milliards.

La solidarité nationale se traduit également par le doublement du nombre de places en maisons d'accueil spécialisé.

Et si l'on intégrait les efforts consentis par les collectivités territoriales, en matière d'hébergement ou d'allocation compensatrice pour tierce personne, cet effort apparaîtrait encore plus important, ce dont je me réjouis. Déjà, près d'une vingtaine de conseils généraux ont décidé de déplafonner l'ACTP.

Ces principes, ces efforts budgétaires, ce souci d'innover et d'expérimenter visent un seul but : une meilleure intégration des personnes handicapées. Tel sera l'objectif de la réforme de la loi d'orientation de 1975 qui sera présentée au Parlement courant 2003. Comment faire en sorte que la future loi permette à chaque personne handicapée de trouver sa place dans la société, et à la société de l'y aider ? Cette question difficile renvoie à la solidarité nationale, grâce à une politique de compensation du handicap. Elle suppose la mobilisation de tous.

C'est pourquoi je multiplie les déplacements. Mes contacts avec les intéressés et leurs associations m'ont permis de mesurer l'engagement de tous les acteurs, la nécessité de diversifier les modes de prise en charge, et la volonté d'expérimenter, démarche qui sera facilitée par la loi sur la décentralisation.

Mes déplacements m'ont aussi montré l'urgence de traiter certains problèmes aujourd'hui ignorés : celui des personnes lourdement handicapées, celui des personnes handicapées vieillissantes ou polyhandicapées, celui des autistes et des traumatisés crâniens, sans oublier celui de l'aide aux familles.

Dans cette perspective je compte beaucoup sur les travaux du Conseil national consultatif des personnes handicapées et des conseils départementaux. Les propositions faites par les parlementaires me seront également très précieuses. Je pense notamment aux suggestions intéressantes des rapporteurs de ce budget, MM. Chossy et Bapt, mais aussi au rapport sénatorial très complet publié cet été.

Ensemble, nous devons proposer aux personnes handicapées et à leur famille un nouvel outil législatif plus simple et plus efficace. Tel est le beau défi qui nous attend. J'entends le relever avec vous et avec le Gouvernement, dans la droite ligne de l'engagement du Président de la République. Il en va de la dignité de la société tout entière de le relever mais aussi de la dignité de chacun d'entre nous (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

M. Gérard Bapt, rapporteur spécial de la commission des finances - Vous avez pris vos fonctions sous les meilleurs auspices, Madame et Monsieur les ministres, puisque vos compétences ministérielles recouvrent deux domaines élevés au rang de priorités par le Président de la République : la lutte contre le cancer et l'insertion des personnes handicapées. Ce sera une chance si vous disposez de moyens privilégiés, mais un enjeu redoutable si vous ne les obtenez pas.

Bien que dans l'opposition, je souhaite votre réussite, comme l'ensemble de la représentation nationale, et elle sera acquise si vous amplifiez les efforts déjà réalisés, dans les mêmes domaines, au cours de la précédente législature.

Ce budget donnait lieu précédemment à deux rapports : le budget de la santé et le budget des personnes handicapées. De plus, lui ont été adjointes des lignes budgétaires qui ressortissaient du budget « solidarité » pour la CMU et du budget « famille » pour l'API. C'est dire que la construction budgétaire qui nous est présentée aujourd'hui est quelque peu baroque.

Les services de votre ministère se félicitent des progrès accomplis dans la préparation de l'application de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances. Il est exact que la création d'un comité de planification stratégique ou la définition des futurs projets de performance dès l'an prochain sont de bonnes choses.

Mais il ne faut pas contredire les intentions de demain dans les documents budgétaires d'aujourd'hui pour donner l'impression d'une augmentation des crédits ! Cette construction budgétaire nouvelle correspond-elle vraiment à l'objectif de cohérence et de transparence qui est celui de la loi organique relative aux lois de finances ?

Venons-en aux crédits proprement dits. Dans la nouvelle configuration, les crédits de la santé, de la famille et des personnes handicapées seront en légère progression en 2003, augmentant de 1,87 % pour s'établir à 8,4 milliards en dépenses ordinaires et crédits de paiement, hors services communs.

M. Pascal Terrasse - Voilà la vérité, qui n'a pas été dite !

M. le Rapporteur spécial - Les chiffres parlent d'eux-mêmes ! Près de deux tiers de ces sommes correspondent au financement de l'allocation aux adultes handicapés et de l'allocation de parent isolé. Les autorisations de programme seront divisées par 5,5 pour s'établir à 41 millions, en raison de l'absence de dotation du FIMHO.

Hors loi de finances rectificative, la progression en dépenses ordinaires et crédits de paiement s'établit à 5,5 %.

Les actions en faveur des personnes handicapées et la lutte contre le cancer font l'objet, dit-on au plus haut niveau, d'une priorité, mais il semble que la réalité de l'effort dépende du niveau des annulations de crédits qui auront lieu d'ici à la fin de l'année. Or, les gels en 2002 et les reports sur 2003 pourraient représenter, pour le ministère de la santé, plus de 100 millions d'euros.

La loi de programmation de santé publique annoncée pour 2003 devra consolider les avancées de la loi Kouchner sur les droits des malades et des 25 plans de santé publique existants. 5 millions d'euros sont « provisionnés » en prévision de son dépôt et les crédits destinés à la santé publique et à la sécurité sanitaire augmentent de 5,5 %. La lutte contre le cancer bénéficie d'une mesure nouvelle de 35 millions d'euros, mais le doute plane sur la poursuite des autres programmes de santé publique - nutrition, suicide, santé mentale, lutte contre la douleur... Il semble en particulier que les crédits consacrés à la lutte contre le sida baissent de 2 millions d'euros et que les fonds de la MILDT - mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie - diminuent de 12 % par rapport à 2002, sans compter une mesure d'annulation portant sur le tiers de la dotation initiale qui pourrait intervenir avant la fin de l'année.

Permettez-moi, Monsieur le ministre, d'insister sur la nécessité de conforter la prévention des maladies cardio-vasculaires, qui représentent la première cause de mortalité dans notre pays ainsi que la première cause de dépenses médicales. Le traitement bien conduit de quelques facteurs risques tels que l'hypertension ou le diabète pourrait sensiblement améliorer les choses.

Sur les 150 millions d'euros par an qui sont consacrés aux soins, 3 seulement vont à la prévention. La loi de programmation corrigera-t-elle ce déséquilibre ?

Les quatre agences de sécurité sanitaire - AFSSAPS, AFSSA, AFSSE et l'institut de veille sanitaire - se trouvent pour la première fois confrontées à des difficultés de trésorerie potentielles, car des gels de crédits portant sur 25 millions d'euros, soit 30 % des crédits votés, sont prévus pour 2002. Les mesures nouvelles déjà engagées, des recrutements et des programmes immobiliers notamment, devront donc être financées par ponction sur les fonds de roulement, qui risquent de ne pas suffire. J'ai pris bonne note, Monsieur le ministre, de vos engagements concernant la mise en place avant la fin de l'année de l'AFSSE.

Les crédits spécifiques de sécurité sanitaire s'élèvent à près de 20 millions d'euros, dont 7 millions de mesures nouvelles pour renforcer la prévention des risques liés à l'environnement et au milieu de vie.

L'agrégat « offre de soins », qui devient en 2003 pour le moins hétéroclite, augmente de 2,7 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2002 mais baisse de 13,7 % par rapport à la loi de finances rectificative. Les mesures nouvelles en matière de soutien à la formation médicale tiennent compte de l'augmentation des quotas d'étudiants décidée par le précédent gouvernement. 1,6 million d'euros ira aux instituts de formation en soins infirmiers et 3,5 millions financeront l'augmentation du nombre de bourses.

Dans le domaine de l'organisation des soins, la dotation en faveur des agences régionales de l'hospitalisation est portée à 19,2 millions d'euros, soit une hausse de 2 millions, tandis que les autres dépenses restent stables.

Le Gouvernement a évoqué la suppression possible du FIMHO - Fonds d'investissement et de modernisation des hôpitaux. J'aurais pour ma part préféré une procédure accélérée et déconcentrée, ainsi que des critères élargis d'admission aux aides, car le FIMHO répondait à de réels besoins de restructuration.

En matière d'action sociale, je constate une incongruité : alors qu'on fait disparaître de l'agrégat « offre de soins » des dépenses d'action sociale qui y avaient leur place - celles afférentes à l'IVG -, on y inclut dans le même temps d'autres dépenses qui relèvent plutôt de la lutte contre l'exclusion, à savoir les crédits d'Etat relatifs à la prise en charge de la CMU complémentaire.

L'évolution des prestations couvertes par la CMU complémentaire conduit à des mouvements de crédits contradictoires, dont nous pourrons parler tout à l'heure en examinant l'amendement du Gouvernement, ce que la commission des finances n'a malheureusement pas pu faire.

La priorité aux personnes handicapées a été proclamée par le Président de la République. Reste à vérifier qu'elle est bien suivie d'effets. Or, 20 millions d'euros de gels en 2002 et 15 millions d'euros de reports sur 2003 sont prévus en ce domaine. Je note par ailleurs que pour le moment, les conditions d'admission au bénéfice de l'AAH ne sont pas réexaminées, contrairement à ce que préconise, paraît-il, la Direction du budget. Je sais, Madame la secrétaire d'Etat, que vous êtes vigilante à ce sujet. Il faut éviter tout « recentrage » inconsidéré. Je note aussi que l'effort entrepris sous la précédente législature s'accentue, puisque 3 000 nouvelles places en CAT sont créées, au lieu des 1 500 prévues et que l'aide au retour ou au maintien en milieu ordinaire est renforcée.

Mais je m'alarme des conditions de consommation des crédits de l'article 10 du chapitre 66-20, qui financent des opérations de développement des structures d'hébergement pour adultes lourdement handicapés. De la consommation et du niveau de ces crédits dépend pourtant la concrétisation de la priorité affichée en faveur des handicapés.

Les « guichets uniques » que constituent les sites pour la vie autonome sont très attendus et je sais que le ministère réfléchit au moyen de prolonger le recours aux emplois-jeunes, qui ont acquis de réelles compétences et dont l'utilité n'est plus à démontrer.

Une dernière critique sur le redécoupage des agrégats : l'inclusion dans les moyens destinés à la famille des crédits consacrés au financement d'organismes exerçant, au nom de l'Etat, la tutelle ou la curatelle publique prononcée par les juges. Dans l'esprit de la nouvelle loi organique, faudra-t-il évaluer l'efficacité de la politique familiale au nombre de placements sous tutelle ?

Il est à noter que 97,6 % des « interventions en faveur de la famille et de l'enfance » concernent le remboursement de l'allocation de parent isolé. La dotation est stable par rapport à la loi de finances rectificative pour 2002.

M. le Président - Veuillez conclure.

M. Gérard Bapt, rapporteur spécial - En conclusion, il s'agit d'un budget contrasté dont les zones d'ombre peuvent être expliquées par son caractère de transition, mais dont la réalisation est obérée par les nombreuses incertitudes qui pèsent sur l'ampleur des annulations à venir, outre celles survenues dès cette année. Il est marqué par quelques mesures nouvelles illustrant la priorité donnée à la lutte contre le cancer et à l'insertion des handicapés. La majorité de la commission des finances l'a adopté (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Jean-Luc Préel, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles pour la santé. - Je salue tout d'abord la création d'un ministère de la santé de plein exercice, même si le domaine de la formation reste partagé avec l'éducation nationale.

Discuter d'un budget de la santé qui ne porte que sur 8,4 milliards d'euros a un caractère artificiel, alors que nous venons de voter un ONDAM de 123,5 milliards.

Mais la clarification des relations entre l'Etat et l'assurance maladie devrait à l'avenir permettre une étude unifiée des crédits de la santé.

En 2003, les crédits du ministère progressent, à périmètre constant, de 5 %.

Dans l'agrégat « santé publique et sécurité sanitaire », les demandes de crédits s'élèvent, à structures constantes, à 329 millions d'euros.

Le financement des agences sanitaires en constitue un volet important, même si certaines disposent aussi de ressources propres. Notons la création de l'institut de prévention et d'éducation à la santé ; la forte diminution de la dotation de l'agence française de sécurité sanitaire des produits de santé ; et l'accroissement des moyens de l'ANAES, dont les dysfonctionnements ont été pointés par la Cour des comptes.

Autre volet important : le financement des actions de santé publique. Les programmes de prévention bénéficient de crédits en hausse de 30 %. Le dépistage des cancers du sein et du colon devrait, espérons-le, être rapidement généralisé.

L'agrégat « offre de soins » comporte 1,18 milliard d'euros en crédits de paiement, dont 960 millions pour financer la part de l'Etat dans la CMU. Notons la lenteur de la montée en charge du FIMHO.

Dans l'agrégat « gestion des politiques de santé et de sécurité », il est malaisé de départager ce qui relève respectivement des ministères de la santé et des affaires sociales. Les crédits atteignent 1 milliard d'euros, en hausse de 2,7 %. Ils servent essentiellement à financer le personnel, avec un repyramidage qui augmentera le nombre des postes de cadres A. La dotation de l'Ecole nationale de santé progresse de 50 %, soit 25,41 millions d'euros, et celle des ARH de 2 millions d'euros.

Enfin la répartition des champs de compétence entre l'Etat et l'assurance maladie évolue encore ; elle devrait être clarifiée. Trois modifications importantes interviennent cette année. D'abord le coût des stages de résidanat chez les médecins généralistes agréés, soit 40 millions d'euros, est transféré au budget de l'Etat. En revanche les dépenses afférentes à l'IVG, soit 24,7 millions, et aux centres de soins spécialisés pour toxicomanes, soit 107,5 millions, sont transférées à l'assurance maladie.

J'ai consacré cette année l'essentiel de mon rapport aux ARH, à leurs relations avec les organes de l'Etat, et à la perspective d'une transformation en ARS ou agences régionales de la santé. Les vingt dernières années ont vu trois étapes importantes : les lois de décentralisation, la création des ARH en 1996, et l'apparition des agences sanitaires en 1998. Au bout de cinq ans, le bilan des ARH est globalement positif, mais elles sont au milieu du gué. Plusieurs problèmes doivent être résolus : les relations avec le secteur ambulatoire et le médico-social, et la question de la non-fongibilité des enveloppes ; la prise en compte de la prévention et de l'éducation à la santé ; les relations avec les divers échelons de l'Etat et de l'assurance maladie ; le contrôle démocratique des ARH. La création d'ARS, dans la perspective d'une décentralisation, pourrait offrir des solutions.

L'ARH, institution originale, est une modernisation administrative réussie. Elle a amélioré la coopération entre l'Etat et l'assurance maladie et posé les jalons d'une vraie planification hospitalière. Les ARH, structures légères, sont des personnes morales de droit public, constituées sous forme de GIP entre l'Etat et l'assurance maladie. Les décisions sont prises par le directeur ou par la « Comex », commission exécutive qui associe à parité l'Etat et l'assurance maladie. Les ARH ont peu de moyens propres, humains ou financiers : elles emploient 1 030 équivalents temps plein provenant de l'Etat et 1 080 de l'assurance maladie. Les « équipes rapprochées » de dix à quinze personnes se constituent sur une base thématique ou géographique.

Les directeurs des ARH ont une position politique ambiguë. Nommés par décret en Conseil des ministres, ils sont théoriquement autonomes, mais révocables. La DHOS leur adresse une lettre de mission. L'administration centrale limite leur marge de man_uvre par la procédure des crédits fléchés ; il est vrai que le suivi de ces crédits n'est pas assuré. Leurs relations avec le ministère ne sont donc pas claires.

Quelles sont leurs relations avec les préfets, les DRASS et les DASS ? Ces dernières ont vécu avec circonspection, voire hostilité, la création des ARH. Les relations se sont maintenant améliorées, mais certains chevauchements de compétences appellent une clarification. Le préfet conserve en effet des compétences sanitaires, et a autorité sur les services déconcentrés DASS et DRASS ; il est responsable de la sécurité des bâtiments et de la sécurité sanitaire. Il l'est aussi de l'élaboration et de la réalisation des contrôles, mais c'est le directeur de l'ARH qui doit en tirer les conséquences. Le préfet doit organiser la permanence des soins. Il préside le CODAMU, le comité des transports et il est habilité à réquisitionner les médecins. Il joue un rôle central dans le fonctionnement des conférences régionales de santé ; il définit et fait appliquer les programmes régionaux de santé et ceux d'accès à la prévention et aux soins.

Mais il est surtout un acteur essentiel dans la négociation des contrats de plan. Il contrôle la légalité des délibérations des Comex et des marchés publics des établissements, note les directeurs d'établissements de santé, gère une partie des personnels médicaux et met en congé de longue durée les praticiens atteints de certaines affections. Notons enfin une curiosité : le préfet de région préside le conseil d'administration du centre anticancéreux de la région, et doit donc demander les moyens à l'ARH.

Quant aux DRASS et aux DASS, elles s'interrogent sur leur rôle réel, dans le domaine sanitaire. Services déconcentrés de l'Etat placés sous l'autorité du préfet, elles assurent la définition, la gestion et l'animation des politiques sociale et sanitaire au niveau régional et départemental.

L'ARH, pour sa part, dispose de personnels mis à disposition par les DRASS et les DASS. Elle définit leurs missions, mais ils continuent à être notés par les préfets, ce qui n'est guère cohérent.

Certaines ARH ont désigné des « chargés de mission départementaux », mais c'est le directeur de la DASS qui siège à la Comex. Il en est résulté quelques difficultés. Ces directeurs ont-ils une certaine latitude pour apprécier les propositions de l'ARH, ou doivent-ils se conformer lors du vote à ses décisions ?

Les personnels traversent une crise d'identité profonde, aggravée par de nombreuses vacances de postes. Ils déplorent l'élargissement constant de leur champ d'action, la multiplication non planifiée de programmes prioritaires. Il est donc urgent et nécessaire de clarifier les compétences.

Quelles sont enfin les relations de l'ARH avec les établissements ? Elle exerce sur eux une tutelle. C'est elle qui arrête le SROS et la carte sanitaire, adopte les projets d'établissement, négocie les contrats d'objectifs et de moyens, arrête les budgets et leurs modifications, veille à l'utilisation des crédits fléchés et décide des créations de postes. Ses pouvoirs sont donc en théorie très importants, et posent le problème de l'autonomie des établissements et du pouvoir des conseils d'administration. Mais de tels pouvoirs, pour être réels, exigeraient un personnel plus nombreux et compétent... Il faut noter par ailleurs la situation particulière de l'APHP.

Deux problèmes méritent encore d'être signalés. D'abord, l'absence de fongibilité entre les enveloppes sanitaires au sein de l'ONDAM provoque une division artificielle entre l'hôpital, l'ambulatoire et le secteur médico-social. Faute d'un vrai pilotage, il n'y a pas de coordination sur des sujets frontières comme l'hospitalisation à domicile, l'organisation des urgences ou la gérontologie.

Second problème : l'absence de contrôle démocratique des décisions des ARH.

La régionalisation et la création d'ARS pourraient représenter un espoir. La régionalisation permettrait de mener une politique de santé de proximité, de rendre chacun acteur et responsable, de prendre en compte les besoins, d'effectuer un contrôle démocratique. La création des agences régionales de santé en constituerait un maillon essentiel.

Quel serait tout d'abord leur périmètre de compétence ? La création des ARS permettrait d'associer l'ambulatoire et l'hospitalier.

Il est temps de mettre fin au cloisonnement, afin de gérer l'ensemble du soin, d'éviter les éternelles discussions des reports de l'un vers l'autre, et de pouvoir développer les alternatives. En outre, l'ARS pourrait gérer les carrières hospitalières et la formation des personnels médicaux et paramédicaux.

Les ARS devraient se voir confier la prévention et l'éducation à la santé. Cela garantirait une politique de prévention rigoureuse, enfin coordonnée, et permettrait de rééquilibrer notre système de santé trop centré sur le curatif. Faut-il, dans une deuxième étape y adjoindre le médico-social, personnes âgées et handicapés ?

De nombreux hôpitaux gèrent des services de longue durée et des maisons de retraite médicalisées. Quant aux handicapés, ils relèvent, le jour, de la compétence de l'Etat, la nuit, des conseils généraux. Une clarification semble nécessaire. On pourrait envisager de confier la responsabilité complète des personnes âgées aux conseils généraux, à condition que des conventions soient passées avec l'Etat et l'assurance maladie pour définir le financement. Dès lors, l'Etat, et donc les ARS au niveau régional, pourraient assurer totalement la prise en charge des personnes handicapées.

L'Etat, au niveau national, garderait la responsabilité de la définition de la santé publique et serait le garant de l'équité, de l'égal accès aux soins. Au niveau régional, la création des ARS permettrait de clarifier les missions des services de l'Etat : ils assureraient le respect du principe d'égalité, le contrôle de la légalité, la sécurité sanitaire et la prévention des risques. La sécurité sanitaire relèverait exclusivement du préfet.

Au niveau régional, la DRASS et la DASS chef-lieu pourraient fusionner. Les DASS géreraient les dispositifs sociaux, avec des personnels plus motivés puisque les missions seraient enfin claires. Les ARS pourraient être dotées du statut d'établissement public. Leur rôle serait de surmonter des cloisonnements actuels en appliquant une véritable politique de santé régionale. L'ARS correspondrait à l'exécutif régional de la santé. Le conseil d'administration comprendrait des membres issus du conseil régional de santé, du conseil régional politique, et des financeurs. Le directeur, nommé en conseil des ministres, pourrait ultérieurement être nommé par le conseil régional.

Les ARS disposeraient de leur personnel. Les financements proviendront de la régionalisation sur les critères objectifs - morbidité, mortalité, population - d'un ONDAM enfin médicalisé, voté par le Parlement. Les financements pourraient être abondés par la région sur ses ressources propres. En ce qui concerne le contrôle démocratique, l'ARS, serait responsable devant une instance régionale délibérative, le « conseil régional de santé ».

La création de ces ARS permettra de mettre fin au cloisonnement actuel, à la non-fongibilité des enveloppes, et de mieux prendre en compte les besoins de la population. Une telle réforme devra être appliquée de manière pragmatique en recourant éventuellement à l'expérimentation.

La commission m'a suivi pour émettre un avis favorable à l'adoption des crédits de la santé pour 2003. Enfin je remercie M. Charles d'Arailh, administrateur, pour sa compétence, sa gentillesse et sa disponibilité (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

M. Jean-François Chossy, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles pour les personnes handicapées - Dans un contexte financier serré, pour respecter les engagements du Président de la République et satisfaire les attentes légitimes des personnes handicapées, le budget 2003 consacre globalement 7,1 milliards d'euros aux mesures en leur faveur. Il progresse de 5,6 % par rapport à l'année dernière. Ce budget permettra, grâce à 49 millions d'euros de mesures nouvelles, un effort significatif dans deux secteurs où les manques sont criants : les places en établissement et les aides à domicile. Actuellement, 90 % des personnes handicapées vivent chez elles, que ce soit par choix ou par manque de places. L'effort budgétaire portera particulièrement sur les personnes lourdement handicapées.

Les mesures nouvelles de ce budget comportent notamment la création de 3 000 nouvelles places en centres d'aide par le travail, le financement de 500 nouveaux postes d'auxiliaires d'intégration scolaire, la création de postes d'auxiliaires de vie, la généralisation des sites à la vie autonome.

La création de 3 000 nouvelles places en CAT représente un doublement de l'effort de création par rapport au plan 2001-2003 du précédent gouvernement. Il offrira aux adultes lourdement handicapés une activité professionnelle permettant une socialisation et une certaine intégration, comme le font aussi les ateliers protégés et les entreprises adaptées. Au total, près de cent mille places sont ouvertes dans les CAT ; les crédits consacrés à leur fonctionnement s'élèvent à 1,1 milliard d'euros. Ce budget intègre bien sûr les mesures d'ajustement de 15 millions d'euros prenant en compte l'évolution de la masse salariale. De nombreux efforts seront nécessaires pour réduire de façon significative les délais d'admission en CAT ; ce budget participe à cette démarche.

Toujours au sujet des CAT, Madame la ministre, il n'est pas admissible que le travail exemplaire d'accueil, de suivi et d'intégration des personnes handicapées soit aujourd'hui détourné de son objet et insulté par un écrivain à l'encre sale !

Le financement de cinq cents nouveaux postes d'auxiliaires d'intégration scolaire devra s'inscrire dans une continuité et un effort soutenu, car la demande est pressante.

La création de postes d'auxiliaires de vie est un axe important dans la recherche de l'autonomie. Ici encore le rendez-vous budgétaire devra être annuel, afin d'épauler dignement ceux qui ont fait le choix conscient du maintien à domicile. Enfin la généralisation des sites à la vie autonome, et le lancement de trente sites nouveaux, participera à l'installation sur tout le territoire de lieux qui pourront, le moment venu, se transformer en guichets d'accueil, d'information, d'évaluation et de développement des moyens de compensation, en faveur de toutes les personnes handicapées.

Le problème du handicap lourd - polyhandicap, autisme, traumatismes crâniens, handicaps sévères - reste largement devant nous, si l'on considère les accidents de la vie - notamment de la route -, la réanimation, la grande prématurité et l'allongement de la durée de la vie... Or ces personnes sont trop souvent celles qui ont le plus de mal à trouver une solution adaptée, qu'il s'agisse de vie autonome à domicile, de prises en charge séquentielles avec répits temporaires, ou de l'accueil permanent dans une structure adéquate.

Dans tous les cas, les besoins de services à domicile augmentent. Les mesures nouvelles du projet de loi de finances permettront ainsi de créer 400 postes supplémentaires d'auxiliaires de vie, pour 3,86 millions d'euros.

L'écart croissant entre l'évolution du SMIC et le niveau de l'ACTP aboutit à ce que trois heures par jour, environ, sont prises en charge au titre de l'aide à domicile. C'est insuffisant. Certains handicapés moteur recourent ainsi à une hospitalisation, deux à trois jours par semaine, pour compléter la prise en charge hebdomadaire. La mesure expérimentale décidée en 2003 - qui portera à 28 950 € par poste d'auxiliaires de vie la prise en charge par l'Etat, est donc fondamentale. Nous devons poursuivre dans cette voie.

Les compléments de l'allocation d'éducation spéciale ont été réformés en 2002 ; ils étaient au nombre de trois, et de niveaux très différents. L'objectif était alors de moduler l'aide aux familles en créant des catégories intermédiaires entre le deuxième et le troisième compléments, pour arriver à un total de six compléments. Cette modification a permis d'améliorer la prise en charge mais elle se révèle très complexe à appliquer. Sa mise en _uvre a donné lieu à l'élaboration d'un questionnaire extrêmement précis dans lequel les dépenses doivent être justifiées. Les parents d'enfants polyhandicapés, en particulier, le considèrent comme inquisitorial et assurent avec raison que le certificat médical devrait suffire à apprécier la prise en charge. Il est trop tôt pour apprécier dans le détail les effets de cette réforme, elle devra faire l'objet d'un suivi attentif. Une évaluation est en cours, les résultats doivent être connus à la fin de l'année.

Des efforts financiers pour les personnes handicapées ont été décidés par le passé - augmentation du nombre de places en foyers de vie et en foyers à double tarification. Je voudrais qu'il soit mis fin aux graves lacunes de leur suivi. La Cour des comptes l'a dénoncé : les besoins, en matière de handicaps, sont mal connus ; de même le niveau de l'offre. Les derniers chiffres disponibles portent sur 1998.

Pourquoi les services déconcentrés - la DDASS, les DRASS - n'effectuent-ils pas un suivi précis des places effectivement créées ? Cette situation ne fait qu'entretenir les mécontentements. Des besoins insatisfaits subsistent. C'est ainsi que des familles sont conduites à se tourner vers des établissements belges - wallons, en particulier - pour l'accueil de personnes autistes ou polyhandicapées. Pourquoi ?

2 800 Français sont actuellement accueillis dans des établissements belges - des adultes pour la plupart ; ces structures ont un statut particulier. En quarante ans, ces services d'accueil de patients français se sont développés dans la plus grande liberté qui soit. Ils ne sont pas financés par l'Etat belge ; ils ne sont donc pas soumis à la procédure d'agrément. Le fonctionnement est donc bien plus souple et les coûts moindres.

Depuis 1995, la Belgique a soumis ces structures à une autorisation de création. Il ne s'agit pas là, néanmoins, de l'agrément applicable au secteur médico-social, comme en France. Avant 1995, seuls les établissements agréés étaient connus de l'administration belge ; l'autorisation a permis de faire connaître les autres - 129 entrent dans cette catégorie et 32 hébergent exclusivement des Français.

Enfin, les financements sont français. La prise en charge est financée soit par les conseils généraux soit, dans le cas des enfants, par des caisses d'assurance maladie. Il en résulte un double paradoxe : la Belgique accueille sur son territoire des personnes handicapées et leur offre des services auxquels ses propres ressortissants n'ont pas droit ; en France, en raison du manque de places et d'un coût de revient inférieur dans les établissements wallons, les organismes payeurs subventionnent des établissements qui ne sont pas soumis aux règles et aux normes qui ont été récemment rénovées. Ces établissements - divers - offrent des solutions à des parents désemparés, mais la situation, telle que je viens de la décrire, est insatisfaisante.

Il faudra, pour répondre aux besoins des personnes handicapées, procéder à une importante remise à plat. Les associations attendent ainsi la réforme de la loi de 1975 ; il faudra également définir le droit à compensation et adapter les moyens humains et techniques. Dans tous les cas, il sera nécessaire de simplifier, d'innover, d'individualiser.

Simplifier : le parcours du handicap ne doit plus être un parcours du combattant. Il faudra créer des guichets uniques qui garantiront la continuité des moyens mis à la disposition des handicapés quand leur situation ou leurs besoins évolueront. Ils aideront les familles et permettront la recherche de financements spécifiques.

Innover : il conviendra de préciser les modalités de l'accueil temporaire dont nous avons posé le principe. Le décret est en préparation pour définir sa mise en place et sa tarification. Il y a urgence ; les besoins sont réels.

Indemniser : chaque personne est un cas particulier ; chacun peut avoir un projet de vie différent.

Dans une assemblée comme la nôtre, où siègent les opposants et les proposants, on ne peut s'attendre à un vote unanime. Ce budget de consensus, en tout cas, répond aux souhaits des familles qui nous entendent (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

Mme Jacqueline Fraysse - Monsieur le ministre de la santé s'était ému de la part insuffisante consacrée à la santé publique dans notre pays - en particulier du fait que sur 150 milliards d'euros dépensés pour la santé trois, seulement, seraient destinés à la santé publique.

Après ces déclarations, nous attendions une ambition nouvelle, le début d'une inversion de tendance. Il n'en est rien.

Ce budget s'élève à 15,5 milliards d'euros, dont un peu plus de 8 milliards seulement pour la santé au sens strict. Si la progression annoncée de 5 % peut sembler importante en pourcentage, elle reste très modeste en valeur absolue, les crédits ne correspondant pas aux besoins à couvrir. Nous ne pouvons que souscrire à votre intention de faire voter une loi de programmation de santé. Mais pour que les lois soient efficaces, il faut des moyens.

Vous annoncez 40 millions d'euros supplémentaires pour renforcer l'action collective en matière de santé publique. Très bien. Mais sur ces 40 millions, 35 sont déjà destinés à la lutte contre le cancer - action d'autant plus indispensable que, malgré les annonces, notamment sur le dépistage du cancer du sein, d'importants retards sont accumulés. Un tiers seulement des départements le mettent effectivement en _uvre. Vous voulez étendre ce dépistages aux cancers de l'utérus et colo-rectaux. Mais avec quels moyens ? Ce serait pourtant de l'argent bien placé, propre à éviter des gâchis, tant financiers qu'humains. Reste seulement 5 millions pour des mesures destinées à la prévention de l'hépatite C, du sida et des maladies sexuellement transmissibles.

Dans ces conditions, comment faire face aux nouvelles pathologies et aux nouveaux défis de la santé publique - obésité, maladies mentales et troubles psychiques, vaccination, lutte contre les drogues et les dépendances ?

L'insuffisance des dotations en faveur des outils et des acteurs de la santé est patente. Les directeurs généraux de quatre agences de sécurité sanitaire ont confirmé que leurs agences se trouvent confrontées à des difficultés de trésorerie potentielles. En 2002, vous prévoyez 25 millions d'euros de gels de crédits, soit plus de 30 % des crédits votés. Les mesures nouvelles déjà engagées - recrutements et programmes immobiliers - devront être financées par ponction sur les fonds de roulement de ces agences - qui risquent de n'y pas suffire - au détriment des outils d'analyses utiles à une politique de santé publique efficace.

Sur le plan de la formation des professions médicales et paramédicales, nous vous donnons acte d'une petite progression de 3,5 % et des engagements que vous avez pris à l'égard de certaines professions.

Mais quid des médecins du travail, si précieux pour la prévention et la détection des maladies professionnelles ? Quid des médecins de PMI pour la prévention des maladies infantiles ? Quant aux médecins et infirmières scolaires, quelle politique comptez-vous mener, avec votre collègue du ministère de l'éducation nationale, pour favoriser leur formation en nombre suffisant, afin d'assurer leur présence dans les établissements ?

De même, vous annoncez des moyens nouveaux en faveur de l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé, mais nous ne voyons pas clairement leur répartition - notamment en raison de la refonte des périmètres de ce budget.

Nous ne savons pas comment les crédits seront employés dans la lutte contre les pratiques addictives. Concernant l'aide aux personnes handicapées, vous poursuivez la politique du précédent gouvernement. Les engagements pris devraient donc être tenus.

Ce budget progresse de 5,6 % - ce qui permettra sans doute de rattraper un peu le retard accumulé dans un domaine particulièrement douloureux pour les handicapés eux-mêmes et leurs familles. Places en centres d'aide par le travail ; places dans les établissements spécialisés - je pense aux établissements pour jeunes sourds et jeunes aveugles ; aide au maintien à domicile pour les personnes qui le peuvent et le souhaitent ; aide à l'intégration scolaire pour les enfants handicapés : autant de domaines où des efforts considérables restent à accomplir.

De ce point de vue, je regrette que vous n'ayez pas du tout revalorisé l'aide aux adultes handicapés.

Pour la famille, vous nous renvoyez à la conférence nationale et l'utilisation des 956 millions de ce budget, dont 23 millions seulement de mesures nouvelles, reste obscure. 97,6 % de ce budget sont absorbés par le remboursement de l'allocation de parent isolé qui, par ailleurs ne sera pas revalorisée.

Les crédits affectés à la solidarité augmentent de 4,8 %. Mais déduction faite de ceux nécessaires pour le RMI et la CMU, il reste peu de choses pour soutenir les plus démunis. Or votre politique va aggraver les difficultés. Ces crédits risquent donc d'être bien insuffisants. Votre gouvernement diminue les impôts des plus aisés, met fin aux emplois aidés, réforme l'ARTT et envisage de réduire la portée de la loi de modernisation sociale. Cela n'annonce rien de bon. Déjà sur les six premiers mois de 2002, le nombre d'allocataires du RMI a augmenté de 1 %. Or 31,7 % d'entre eux n'ont aucun autre moyen de subsistance et cette situation s'aggrave.

Nous regrettons que la CMU ne soit toujours pas ouverte de droit aux bénéficiaires de l'AAH, de l'API et du minimum vieillesse. La participation de l'Etat augmente de 2,7 % par rapport au budget initial de 2002, mais diminue de 13,7 % compte tenu de la loi de finances rectificative.

Nous sommes donc loin de mettre en _uvre une politique de santé publique à la hauteur des défis. D'ailleurs, si vous avez voulu être rassurant mardi dernier, dès le lendemain M. Barrot indiquait de façon plus explicite qu'il fallait mieux préciser les contours du panier de soins, chantier que vous avez confié à M. Chadelat. Nul ne met en cause l'assurance complémentaire, mais chacun comprend bien ce qu'il y a derrière ces propos. Vous dites vous-même que l'augmentation des dépenses de santé est inéluctable ; j'espère que cela vaut pour les plus modestes. Vous dites aussi que les recettes de la protection sociale sont insuffisantes, mais vous ne proposez aucun changement de l'assiette pour procurer des ressources nouvelles. Ceci explique cela ! Je l'ai dit au nom du groupe communiste lors du débat sur le PLFSS et la confirmation est venue avec les propos de M. Barrot après que le ministre médecin a essayé d'arrondir les angles. A chacun sa partition...

Face à une telle politique, nous ne pouvons que voter contre ce budget (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et du groupe socialiste).

Mme Muriel Marland-Militello - Ce budget est symbolique pour l'avenir des 5 millions de handicapés. Au delà des chiffres, je voudrais dégager les lignes de force qui intéressent l'opinion et les familles concernées.

Le premier symbole politique fort est que pour la première fois un secrétariat d'Etat est réservé aux handicapés. En second lieu, l'augmentation des moyens est parmi les plus importantes. Malgré un contexte difficile, vous avez réussi, Madame, à l'obtenir et les familles de handicapés vous en remercient. Enfin, ce budget exprime une forte volonté de privilégier l'intégration sociale plutôt que les aspects sociaux du handicap. Beaucoup de familles préfèrent d'ailleurs parler de « personnes en situation de handicap », pour ne pas les réduire à cette seule dimension.

Ce budget prend en compte de façon pragmatique tout ce qui relève de l'accompagnement du handicap, de la petit enfance aux personnes âgées. Il était important d'en finir avec les effets d'annonce.

Actuellement 13 000 enfants handicapés attendent que l'école leur offre une solution. Vous créez 500 postes d'auxiliaires d'intégration scolaire dès la rentrée 2003 et le ministère de l'éducation nationale consacrera 8,6 millions au plan Handiscol lancé il y a trois ans, mais qui n'a pas donné les résultats escomptés faute de crédits. Dans la mesure du possible, il faut avoir pour objectif l'intégration en milieu scolaire ordinaire. Un obstacle important est l'absence de formation du corps enseignant. Il faut donc l'intensifier, voire l'imposer, dans les IUFM et lors de stages. La baisse du nombre d'enfants par classe favorisera aussi cette intégration. Pour les polyhandicapés, vous augmentez le nombre des classes adaptées et des institutions médico-éducatives. Nous comptons sur vous pour poursuivre l'effort dans les années suivantes.

Pour les adultes, 3 000 nouvelles places seront créées en 2003 dans les centres d'aide par le travail, pour 1,1 milliard, soit le double de ce qui était prévu au plan quinquennal. Il manque actuellement entre 10 000 et 15 000 places. Cette augmentation, qui libérera d'ailleurs des places dans les instituts médico-éducatifs, doit s'accompagner d'une orientation plus ciblée vers le marché du travail. L'insertion professionnelle restant insuffisante, le taux de chômage des handicapés est de 26 % contre une moyenne nationale de 9 %. La première raison de cette situation est l'impossibilité de cumuler l'AAH et un emploi à temps partiel.

M. François Goulard - Très juste !

Mme Muriel Marland-Militello - Une réforme dans ce domaine est indispensable. En second lieu, la loi de 1987 qui impose aux entreprises de plus de 20 personnes un quota de 6 % d'employés handicapés n'est pas respectée par la moitié d'entre elles. Je propose donc d'augmenter la compensation qu'elles versent dans ce cas, et, comme l'avait déjà proposé M. Accoyer, d'imposer aux entreprises publiques qui ne respectent pas le quota d'investir pour adapter les lieux de travail et faciliter les conditions de vie et de travail des handicapés. On favoriserait ainsi l'insertion professionnelle en même temps qu'on diminuerait le coût pour l'Etat des travaux d'accessibilité.

L'insertion des handicapés dépend également de meilleures conditions de vie à domicile ou dans les établissements. Aussi apprécions-nous la création de 400 emplois d'auxiliaires de vie pour favoriser le maintien à domicile de ceux qui le souhaitent, et de 309 postes pour aider des personnes très lourdement handicapées. Actuellement, 13 % seulement des handicapés sont aidés par des professionnels, les autres l'étant par des non-professionnels et des proches. Aussi apprécions-nous la création, en collaboration avec le ministère de l'éducation nationale, d'un vrai métier d'auxiliaire de vie. Nous comptons sur vous pour la mener à bien. Elle est essentielle pour assurer la qualité et attirer des candidats.

Enfin pour faciliter l'insertion sociale des handicapés, la simplification des démarches administratives va être généralisée grâce à la création de 30 sites départementaux pour la vie autonome. Les familles n'iront plus d'un service à l'autre, mais pourront s'adresser à un guichet unique.

Enfin, s'il faut se mobiliser pour favoriser le travail des personnes handicapées en milieu ordinaire, c'est aussi parce que plus nous les côtoierons dans la vie quotidienne plus nous les considérerons comme des personnes à part entière et plus notre sentiment de solidarité sera spontané (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Jacques Le Guen - Votre budget est à l'image de votre politique : intéressant au premier regard mais, à l'examen, on s'interroge sur la forme et on s'inquiète sur le fond. Les effets d'annonce l'emportent sur la continuité de l'action, pourtant essentielle en matière de santé publique.

Sur la forme, vous n'avez eu de cesse de mettre en avant la transparence de votre budget, mais nous ne savons toujours pas comment se construira l'action publique globale ni comment s'appliquera la loi d'orientation que nous avons adoptée. Votre présentation budgétaire se caractérise non par des progrès, mais par des reculs sur certains points. C'est ainsi que vous groupez artificiellement des crédits autour du pôle santé au détriment du pôle solidarité.

Aussi avons-nous quelques difficultés à juger le fond, qui dépendra de la mise en _uvre de la loi de financement de la sécurité sociale et des régulations budgétaires. D'ores et déjà, les prévisions de gel en 2002 et les reports sur 2003 s'élèvent à plus de 100 millions d'euros. Or pour le plan quinquennal de santé publique, les 5 millions d'euros prévus ne sont pas à la hauteur de vos ambitions.

Votre plan contre le cancer affiche une avancée de 35 millions d'euros, la même, au vu de l'action publique globale, qu'en 2001-2002. Pour autant, il ne faut pas oublier les autres plans de santé publique.

Pour les agences, vous avez aujourd'hui mobilisé des réserves, mais nous risquons de connaître en 2003 de grandes difficultés et sans doute faudra-t-il ensuite augmenter fortement les dotations d'une année sur l'autre.

Vous ne proposez aucune mesure nouvelle pour le financement de la CMU. Si 10 % ont été dégagés pour lutter contre les effets de seuils, c'est grâce à la convention d'objectif et de gestion négociée en 2002 entre la CNAM et l'Etat. Vous ne faites rien de plus.

Enfin, substituer une allocation personnalisée de santé à la CMU reviendrait à oublier que la CMU a justement été créée pour combler l'insuffisance des complémentaires de santé à faire jouer la solidarité. La lutte contre les effets de seuils est louable, mais ne doit pas conduire au démantèlement de la CMU (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Gilles Artigues - Beaucoup de choses ont été dites à propos de l'ONDAM, mais un chiffre doit être retenu : 5 % d'augmentation pour le budget de la santé, voilà qui est cohérent avec les déclarations du Président de la République, le 14 juillet dernier, sur le cancer et le handicap.

Le groupe UDF se réjouit des propositions faites en matière de formation médicale, notamment de l'augmentation des crédits de l'Ecole nationale de la santé publique, et nous saluons ce qui est fait dans le domaine de la lutte contre les risques sanitaires liés à l'environnement. Pourriez-vous préciser votre programme concernant la nutrition ainsi que la santé mentale et le suicide ?

Nous sommes inquiets de la diminution des crédits affectés à la lutte contre le sida, et de ceux qui sont consacrés à lutter contre la toxicomanie. M. Vercamer nous a d'ailleurs alerté sur le risque de fermeture de certains services, ou du moins de réductions de personnel.

Dans un souci de clarification, vous avez transféré à l'assurance maladie le secteur de la toxicomanie et celui des IVG. A ce propos, avez-vous la volonté d'apporter de l'aide aux femmes en détresse, qu'elles aient avorté ou qu'elles aient choisi de garder leur enfant ?

Par ailleurs, nous souhaiterions avoir des précisions sur vos intentions au sujet des soins palliatifs qui, aujourd'hui, ne couvrent qu'un tiers des besoins.

Enfin, allez-vous vous préoccuper des maladies orphelines, et en particulier de la difficulté, pour les malades, à obtenir des congés longue maladie ?

Quelques points évoqués par M. Préel sont d'une importance particulière : régionalisation des soins, organisation d'un débat annuel sur notre système de santé, évolution vers une meilleure maîtrise médicalisée des dépenses de santé, développement des actions de prévention. Enfin, il conviendrait de reprendre le débat, soulevé en commission des finances, sur la démographie médicale.

Concernant la famille, vous avez pris des mesures pour responsabiliser les parents, et renforcer les droits des enfants, et la lutte contre la maltraitance. Par contre, nous étions hostiles, vous le savez, au transfert des excédents de la branche famille vers la branche vieillesse, et aurions souhaité que le montant du complément de prestations familiales soit variable, et prolongé de 21 à 22 ans. De même, les allocations familiales auraient pu être revalorisées.

L'UDF a toujours soutenu la politique familiale, qui ne peut se satisfaire de mesures ponctuelles.

M. François Sauvadet - Très bien !

M. Gilles Artigues - Sur le handicap, nous nous réjouissons de l'augmentation du nombre de postes en CAT et du nombre d'auxiliaires de vie, ainsi que de la progression de l'allocation adulte-handicapé. Les sites départementaux pour la vie autonome seront-ils multipliés ? Allez-vous vous aligner sur nos partenaires européens, en avance sur la question du maintien à domicile ?

L'UDF considère que la région est sans doute l'échelon le mieux adapté à l'application d'une politique de soutien aux personnes handicapées - plutôt que le département. Cette question sera débattue dans le cadre de la prochaine loi de décentralisation.

Notre groupe continuera de défendre la place de la personne handicapée dans la société, comme il l'a toujours fait. Un changement de mentalité est nécessaire mais nous savons que vous en être convaincue, Madame la ministre.

Le groupe UDF votera ce budget, qui est un bon budget de transition. L'héritage est lourd, en effet, faute, pour le gouvernement précédent, d'avoir eu une vision prospective. Mais ce vote doit être compris, dans l'attente des grandes lois annoncées, comme un appel à une politique plus ambitieuse encore (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et du groupe UMP).

M. François Goulard - Nous sommes un certain nombre, au sein de la commission des finances, qui regrettons d'entendre des ministres expliquer que leur budget est bon parce qu'il augmente... Cependant, il est des exceptions, et le budget que vous nous présentez en est incontestablement une.

Certains orateurs ont critiqué la présentation de ce budget, qui ne fait pourtant que refléter la modification de la structure du Gouvernement. On retiendra de cette observation que la loi organique doit entrer en vigueur au plus vite. Nous attendons d'ailleurs avec impatience la présentation des programmes qui permettra au Parlement de mieux cerner l'utilisation réelle des crédits.

S'agissant du gel des crédits, faut-il rappeler que la pratique existe depuis une vingtaine d'années ? Constatons au moins que de grands progrès ont eu lieu, puisque la commission des finances est à présent tenue informée de ces régulations.

Le budget qui nous est présenté, bien qu'il reflète une partie seulement de l'action gouvernementale en faveur de la santé des personnes handicapées et de la famille, trace des axes précis, notamment en matière de prévention. S'il est un progrès dans la présentation, c'est bien celui qui consiste à distinguer la politique de prévention, qui relève de l'Etat, de la politique de soin, qui relève de l'assurance maladie. Chacun se félicitera, de plus, de cette inflexion décisive : faire, enfin, de la prévention une priorité.

Quant aux agences sanitaires, nul n'ignore qu'elles avaient soit une trésorerie excédentaire, soit des budgets non consommés. C'est dire que l'on peut, sans nuire à leur action, diminuer leurs crédits ; il n'y a là rien de critiquable. Et il est agréable d'entendre le ministre rappeler que les experts sont faits pour éclairer les choix des politiques, auxquels la décision doit revenir. Il était bon, aussi, de clarifier la notion de « principe de précaution » qui, prise au pied de la lettre, a une puissance inhibitrice complète. Le ministre a donc eu mille fois raison de le rappeler : les agences sanitaires ont été créées pour rendre les choix politiques objectifs.

S'agissant des crédits de la CMU complémentaire, c'est une annonce plus que satisfaisante que celle d'une revalorisation de la compensation forfaitaire, jusqu'à présent beaucoup trop basse. Des besoins n'étaient pas couverts, car l'effet de seuil jouait à plein : comment le nier, et pourquoi feindre de croire que parfaire la couverture sociale des plus démunis représenterait une menace pour l'assurance maladie ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

A terme, il faudra, par souci de cohérence, transférer du budget de l'Etat vers la loi de financement de la sécurité sociale les crédits de la CMU complémentaire. Mais l'on comprend facilement qu'un gouvernement installé depuis si peu de temps n'ait pas eu le temps d'engager cette réforme.

Le groupe UMP, qui sait l'ambition du Gouvernement en faveur de la protection sociale, approuve et soutient ce budget (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

Mme Hélène Mignon - Les personnes handicapées ne constituent pas un groupe homogène mais presque toutes, jusque dans un passé récent, étaient confinées dans le silence, dans le secret des familles, hors de toute vie sociale. C'est l'appréhension culturelle du handicap qui doit changer, et le regard des autres, vous en êtes consciente, Madame la ministre. Il est de notre devoir de tout faire pour combler le retard de la France par rapport aux pays scandinaves, et les efforts doivent commencer dès l'école. En créant les FIPE, Mme Royal avait marqué cette volonté, et il faut poursuivre dans cette voie, tout en s'assurant que les engagements souscrits par les collectivités locales ont été tenus. La généralisation du programme handiscol demande à la fois volonté et crédits ; or vos propositions ne sont pas à la hauteur des besoins, d'autant que de nombreux emplois-jeunes occupaient des fonctions d'auxiliaires de vie.

La loi sur l'accessibilité des handicapés aux lieux publics date de vingt ans. Et pourtant ! Quels sont les guichets des administrations où un sourd profond peut, seul, accomplir les formalités indispensables à tout citoyen ?

Les personnes handicapées ne demandent pas la charité mais, dans le cadre de la solidarité nationale, l'accès au droit, à la dignité, à la connaissance. Nous devons les écouter et écouter leurs familles, et trouver comment respecter leur choix de mode de vie.

Au cours de la précédente législature, des progrès notables ont été accomplis, en particulier en révisant la loi de 1975. Ces progrès doivent se poursuivre ; pour cela, il faut des moyens. Or, ce budget dit de transition n'est pas à la hauteur de l'ambition affirmée. De nombreux dossiers sont en attente, qu'il s'agisse de polyhandicapés ou d'accueil de personnes âgées, en raison du décalage entre les décisions des CROSS et le déblocage des crédits nécessaires. Dans ces conditions, je ne comprends pas les gels de crédits pour 2002, et l'explication avancée - la non-consommation des crédits - ne vaut pas pour tous les départements, tant s'en faut. Ainsi, en Haute-Garonne et, plus largement, dans la région Midi-Pyrénées, c'est tout le contraire : il se passe de longs mois, sinon des années, entre le moment où le CROSS prend une décision et l'octroi tangible des crédits annoncés (Murmures d'approbation sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

De ce fait, aucune solution n'a été trouvée pour 8 000 enfants et adultes au moins, et vraisemblablement beaucoup plus encore, car la population vieillit, et celle des handicapés aussi, si bien qu'à leur handicap s'ajoutent les conséquences du vieillissement.

Des mesures en faveur des personnes âgées et handicapées restant à domicile sont annoncées dans ce budget, mais il nous faut aussi penser à celles qui sont en institution et qui, à 60 ans perdent leur statut de handicapés. Leur départ en maison de retraite ou en long séjour serait catastrophique.

L'augmentation des places en CAT est une bonne chose, mais il faudrait aussi que l'accueil des handicapés dans le service public et le secteur marchand devienne une réalité. Les AGEFI n'ont pas pour mission d'être des caisses enregistreuses.

Je n'ai pas trouvé dans ce budget, Madame la secrétaire d'Etat, la progression qu'on était en droit d'attendre après la priorité proclamée le 14 juillet par M. le Président de la République. C'est pourquoi le groupe socialiste votera contre.

J'ai lu dans la presse une nouvelle qui m'a choquée et qui vous choquera certainement aussi : une enfant de 3 ans n'a pas été accueillie dans la cantine de sa commune parce qu'elle est diabétique. Je pense que la DDASS pourrait se pencher sur la question et faire en sorte que la mère ne soit pas obligée de cesser son travail afin de préparer le déjeuner de son enfant (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. François Sauvadet - Notre système de santé a fait le preuve de son efficacité mais il est aujourd'hui au bord de l'explosion et les personnels sont soumis à forte tension, notamment du fait de l'application des 35 heures.

Vous avez raison, Monsieur le ministre, de placer votre action sous le double signe de la solidarité - qui n'est en rien l'apanage de la gauche - et de l'éducation à la santé - qui est précisément le meilleur moyen de maintenir un système solidaire. Nous devons passer à une culture de la prévention, et pas seulement pour les cancers.

J'ai pris bonne note des efforts en faveur de l'insertion des handicapés, mais je voudrais aussi insister sur la nécessité d'augmenter la capacité d'accueil des maisons d'accueil spécialisé, car l'attente des familles confrontées à un handicap lourd est très forte.

S'agissant de la CMU, il faut bien sûr veiller aux effets de seuil et travailler à un lissage, mais il est d'autres inégalités à combattre, je veux parler des inégalités territoriales. Certains hôpitaux et certaines structures de proximité connaissent en effet des difficultés croissantes faute de personnel en nombre suffisants. Beaucoup de postes ont du mal à être pourvus. Il faut desserrer l'étau sur la formation et penser à des incitations fiscales ou salariales qui facilitent l'implantation en milieu rural des médecins ou des infirmières qui font défaut. Il existe en effet bel et bien une fracture territoriale dans le domaine de la santé.

Je crois, d'autre part, qu'il faut créer des passerelles entre les CHU et les hôpitaux de proximité, notamment en autorisant les premiers à mettre certaines compétences à disposition des seconds.

M. Préel a évoqué tout à l'heure toutes les structures existantes. Je pense qu'il faudrait clarifier l'ensemble et le rendre plus lisible pour nos compatriotes. Je crois aussi qu'il faudrait arrêter de créer de l'instabilité dans ce pays : puisque les schémas régionaux d'organisation de santé sont arrêtés, pourquoi repartir, avant même qu'ils s'appliquent, dans une réflexion nouvelle ? Les territoires aussi ont besoin d'une action qui s'inscrive dans la durée.

La régionalisation de notre système de santé est devenue incontournable, si l'on veut vraiment mettre en adéquation les moyens et les besoins.

Pour être l'élu d'une circonscription qui compte 344 communes, je sais que les médecins qui exercent en milieu rural ont le plus grand mal à se faire remplacer. Voilà un problème concret auquel nous devons impérativement trouver une solution.

Permettez-moi un dernier mot à propos de l'ESB, sujet qui me tient à c_ur car j'ai présidé la commission d'enquête de l'Assemblée s'y rapportant. Vous avez raison, Monsieur le ministre, de dire qu'il ne faut pas faire jouer aux experts le rôle qui revient aux politiques. C'est en effet à ces derniers qu'il incombe de prendre les décisions et la responsabilité de celles-ci, une fois éclairés par les experts sur les contours scientifiques d'une question.

Vous n'avez pas parlé de l'Europe, Monsieur le ministre. Pourtant, si nous avons connu des dysfonctionnements lourds au niveau européen, c'est bien parce que nous manquions d'une expertise partagée. Je voudrais donc que vous soyez aussi le ministre de la coordination européenne des politiques de santé et de précaution. Il s'agit là, en effet, d'une nécessité absolue car nous nous trouvons dans un marché ouvert, où les marchandises circulent. La question devrait même remonter jusqu'à l'OMC (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et du groupe UMP).

Mme Henriette Martinez - Le budget pour la famille que nous examinons aujourd'hui marque la volonté du Gouvernement de donner à la famille toute sa place au c_ur de notre société. Comme le disait le Président de la République, le 10 octobre 2001, « régulièrement, on croit la famille démodée, on prévoit sa disparition, on annonce que le lien entre les générations va se rompre et bien sûr, régulièrement on se trompe. ».

En augmentation de 8 % par rapport à 2002, les crédits pour la famille comportent deux volets importants : le financement de l'allocation parent isolé et le financement d'organismes exerçant au nom de l'Etat la tutelle ou la curatelle publique. Mais la politique familiale ne saurait se résumer à ces deux aspects et il convient d'y ajouter certaines dispositions de la première partie du projet de loi de finances ainsi que la mesure pour les familles nombreuses ayant de grands enfants contenue dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale. La politique de la famille, c'est aussi la préparation de la conférence de la famille et la réflexion engagée pour le Gouvernement.

Créée en 1976, l'API voit le nombre de ses bénéficiaires augmenter constamment, du fait de l'augmentation du nombre des familles monoparentales. En 2001, elle a été versée à 175 609 personnes, alors qu'elle concernait seulement 25 000 personnes en 1977. Indispensable à ces familles en difficulté, l'API doit néanmoins susciter nos questions sur deux points : la lenteur de l'amélioration de la situation économique des familles qui en bénéficient - alors qu'elle a été créée pour favoriser le retour à l'emploi - et les fraudes qu'elle occasionne, certaines familles dissimulant une situation de concubinage à seule fin de la percevoir.

Les organismes publics exerçant au nom de l'Etat la tutelle ou la curatelle des majeurs incapables bénéficient d'une dotation de 128 millions d'euros. La mission conjointe des inspections générales des affaires sociales, des services judiciaires et des finances a mis en évidence dans son rapport de juillet 1998, des dysfonctionnements et souligné la confusion des finalités juridique et sociale de la tutelle. Une réforme de ce dispositif apparaît donc nécessaire et vous avez engagé avec la Chancellerie, Monsieur le ministre, une réflexion à cet effet.

Plusieurs dispositions de la première partie de la loi de finances sont à porter à l'actif de la politique familiale voulue par le Gouvernement. Ainsi, la baisse du barème de l'impôt sur le revenu de 6 % va profiter directement à plus de 16 millions de ménage et aura pour effet mécanique le réajustement du plafond du quotient familial ainsi que celui de l'abattement accordé pour un enfant majeur rattaché à la famille.

L'augmentation des plafonds pour les emplois familiaux permettra aux familles de mieux concilier vie personnelle et professionnelle et contribuera à développer l'emploi.

Enfin, le doublement de l'abattement pour les donations de grands parents aux petits enfants accentuera la solidarité financière entre les générations, et ce dans un contexte d'allongement de l'espérance de vie.

Le PLFSS contient aussi une mesure très favorable aux familles : le versement d'une allocation familiale de 70 € par mois aux familles de trois enfants et plus dont l'aîné atteint vingt ans.

Ce dispositif vient en aide aux familles dont les enfants restent à charge des parents après vingt ans. Il concerne 145 000 familles, coûtera 130 millions d'euros en année pleine et prendra effet au 1er juillet 2003.

Mais votre ambition, Monsieur le ministre, se traduit aussi dans la préparation de la conférence de la famille prévue pour le printemps 2003, avec la volonté d'instaurer une politique familiale de plein exercice qui ne saurait se confondre avec une politique sociale, ni avec la lutte contre l'exclusion. Les groupes de travail que vous avez mis en place sur la prestation de libre choix, les services à la famille et à la parentalité, le statut des assistantes maternelles, la politique familiale dans les entreprises manifestent l'esprit de concertation dans lequel vous préparez cette conférence.

Vous avez également exprimé votre volonté de réaliser un audit sur les dispositifs d'aide sociale à l'enfance, de réfléchir sur les problèmes des adolescents, de réguler la diffusion de films pornographiques à la télévision. Vous avez enfin engagé une réflexion sur le problème de l'enfance maltraitée, avec le lancement de la première journée des droits de l'enfant, le 20 novembre prochain. Je souhaite que cela témoigne de votre engagement pour briser le mur de silence qui entoure trop souvent la maltraitance des enfants sous toutes les formes, y compris la pédophilie ou pédocriminalité, pour laquelle je vous demande une attention toute particulière.

Je souhaite vivement que dans le cadre d'une action interministérielle, et même internationale, le Gouvernement mette en _uvre un plan de lutte contre la pédocriminalité, la cybercriminalité et les réseaux, à l'instar de ce qui se fait dans d'autres pays.

Monsieur le ministre, votre politique doit prendre en compte la famille dans toute sa diversité sociale actuelle, avec les problèmes qui en découlent : familles traditionnelles certes, mais aussi familles adoptives, monoparentales, éclatées, recomposées, avec pour ces dernières les problèmes du divorce et de la garde des enfants... En concertation avec les associations familiales, nous devons tout faire pour que la famille, quelle que soit sa composition, reste le lieu privilégié où l'enfant apprend la vie et s'épanouit. Nous devons tout faire pour que chaque enfant bénéficie d'un environnement familial serein, car rien n'est plus révoltant que la souffrance des enfants.

Nous vous faisons confiance pour conduire cette politique, Monsieur le ministre. C'est pourquoi le groupe UMP votera avec conviction votre budget (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

Mme Ségolène Royal - Il y aurait beaucoup à dire, mais j'irai directement au fait en dénonçant la scandaleuse remise en cause du plan Handiscol. C'était l'essentiel du testament que je vous avais transmis lors de la passation de pouvoir. Il y avait mille postes d'auxiliaires d'intégration à mettre en place cet été dans les établissements. Vous aviez la liste des départements, le nom des associations porteuses de projets, les lieux où le ministère de l'éducation nationale devait installer les aides éducateurs. Vous avez prétendu que les crédits n'étaient pas au budget : c'est faux. Du fait de votre inaction, deux mille enfants handicapés sont restés à la porte des écoles. Les associations de parents vous ont interpellés. Cette politique fut difficile à mettre en place, mais elle avait atteint son rythme de croisière, puisque six mille enfants avaient été intégrés grâce à elle. Le coup d'arrêt qui lui est porté est scandaleux.

Il l'est d'autant plus que vous avez arrêté dans sa troisième année le FIPE, le fonds d'investissement pour la petite enfance. Or il était désormais obligatoire dans ce fonds d'accueillir les enfants handicapés en crèche. En supprimant le fonds, vous supprimez aussi cet effort qui préparait leur intégration à l'école maternelle.

Je déplore que la politique de la famille et de l'enfance soit en panne. Pour la première fois depuis sept ans, il n'y a pas eu de conférence de la famille. Vous dites qu'il vous faut du temps pour la préparer. Mais nous avons bien compris, Monsieur Jacob, en examinant la loi de financement de la sécurité sociale, pourquoi vous n'avez pas les moyens de faire une conférence de la famille : vous avez opéré sur la branche famille le rapt que vous dénonciez l'année dernière, mais en doublant le prélèvement au profit de la branche vieillesse. On comprend qu'il vous soit difficile ensuite de vous présenter devant les associations familiales, dont vous recevez les pétitions....

La rénovation du droit de la famille est également en panne. Heureusement, certaines réformes montent en puissance malgré vous : ainsi 180 000 pères ont bénéficié du congé paternel. Mais le livret de paternité n'est plus distribué. Pourquoi ? Vous avez cessé de publier les textes d'application de la loi sur l'autorité parentale et déclaré remettre en cause la transmission à l'enfant du double nom de famille. Et vous avez donné un coup d'arrêt à la réforme du divorce, annonçant que vous alliez maintenir le divorce pour faute, ce qui est bien regrettable.

La politique familiale, c'est aussi la conciliation des temps de la vie familiale et de la vie professionnelle, mais elle aussi est remise en cause. En effet, vous ressortez ce vieux projet d'allocation de libre choix, qui sent un peu la naphtaline... 80 % des femmes travaillent et elles veulent les deux : des structures de qualité pour accueillir leurs enfants et la possibilité de travailler sans subir de discrimination salariale ! Voilà ce que signifie le libre choix. Plus grave : tout en faisant cette promesse, qui n'est toujours pas réalisée, vous supprimez le FIPE, portant un coup d'arrêt à la construction de crèches. Ce que cache cette décision, c'est sans doute la remise en cause de la prestation unique de la CAF, car c'est ainsi que vous entendez financer l'allocation de libre choix. Cela est grave, car il en résultera une redistribution à rebours au détriment des salaires les plus modestes.

L'abandon de la politique de la famille et de l'enfance, c'est aussi la fin des états généraux de protection de l'enfance, qui avaient lieu depuis deux ans, et la suppression de la mission de prévention des violences en institution. Enfin l'articulation avec la politique éducative est tout aussi préoccupante. Le plan violence du ministre de l'éducation ne dit pas un mot des parents, des familles, sauf pour les taxer d'une amende... Et la réduction de 30 % des crédits des contrats éducatifs locaux va fragiliser le partenariat entre les familles et l'école. Tout cela est désolant... Ressaisissez-vous, pour continuer l'action engagée ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Paul-Henri Cugnenc - Avec une progression de 4,4 % de ce budget, le Gouvernement manifeste sa volonté de faire de la santé publique une priorité. Hors transferts entre l'Etat et la sécurité sociale, la progression est d'ailleurs supérieure à 5 %.

Ce budget donne une nouvelle importance aux actions de prévention. Le financement des programmes de prévention progresse de 30 % pour s'établir à 173 millions d'euros. Pour la lutte contre le cancer, les crédits passent de 14 à plus de 48 millions d'euros : l'amélioration et la généralisation du dépistage du cancer du sein et du cancer colorectal deviennent des objectifs accessibles. La lutte contre le cancer est un des trois grands chantiers définis pour ce quinquennat par le Président de la République. Cette maladie affecte 700 000 Françaises et Français et 250 000 nouveaux cas sont diagnostiqués chaque année. Il s'agit de la deuxième cause médicale de décès et de la première cause de mortalité prématurée dans notre pays. Or 70 % des cancers résultent de facteurs de risque sur lesquels il est possible d'agir ; et vous affichez la volonté de lutter contre l'usage du tabac et l'abus de l'alcool. Vous avez voulu privilégier l'éducation à la santé, la prévention, le dépistage, et c'est un point fort de ce budget.

Pour ce qui concerne l'administration, l'encadrement et la formation, vous manifestez un souci de clarification et d'efficacité, qui est indispensable dans la gestion hospitalière. Dans notre cohabitation à la française entre hôpitaux publics, centres anticancéreux et autres structures d'hospitalisation civiles ou militaires, il n'est pas toujours sûr que la diversité soit source d'enrichissement...

Dans l'harmonisation des formations aux professions de santé, il faut, dans un souci de cohérence, étudier en partenariat avec l'enseignement supérieur la possibilité de formations communes aux formations médicales, paramédicales, mais aussi de gestion. Une des difficultés de l'hôpital public, malgré la grande qualité de ses acteurs, réside en effet dans le fait que ceux-ci n'ont jamais été formés ensemble et nous ne sommes pas sûrs qu'ils aient des objectifs communs. Il devrait y avoir identité de vues, ou pour le moins convergence, entre ceux qui gèrent, qui ont le pouvoir, et ceux qui soignent, qui ont le savoir ; or il y a souvent méconnaissance et divergence.

Le budget pour les personnes handicapées progresse de plus de 5 %. Le handicap, selon la volonté du Président de la République, est une priorité du quinquennat que ce budget traduit bien.

Je n'insiste pas sur les mesures prises - 3 000 nouvelles places dans les CAT ; 2 200 places dans les maisons d'accueil spécialisé et les foyers à double tarification ; 400 postes d'auxiliaires de vie.

La politique de santé publique en faveur des plus démunis, des handicapés, des malades atteints du cancer est bien l'une des priorités de ce Gouvernement.

Vous voulez redonner aux malades la première place. Si les praticiens sont associés à ces nouvelles orientations, je ne doute pas de votre réussite. Je ne peux qu'inviter nos collègues à vous soutenir en votant ce budget (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Pascal Terrasse - Je voudrais reprendre quelques extraits de l'introduction du rapport de Jean-François Chossy : « La volonté bien affirmée, reste à définir les moyens nécessaires à l'ouverture de ce noble chantier car, aujourd'hui, l'espérance est immense et l'impatience est grande. »

Nous sommes tous d'accord : l'impatience est grande chez les personnes handicapées - l'ONU a d'ailleurs fait de 2003 l'année du handicap.

Vous nous dites que le handicap est un grand chantier du quinquennat. Nous aurions souhaité que dans ce budget de transition, outre les mesures qu'exige la continuité, des voies nouvelles soient ouvertes. Il n'en est rien.

J'ai eu l'occasion de présenter ici même, l'an dernier, la loi rénovant l'action sociale et médico-sociale, qui a été votée à l'unanimité. Le handicap est bien un sujet sur lequel il faut dépasser les clivages politiques et s'interdire les effets d'annonce, d'autant que l'heure de vérité viendra peut-être plus vite que vous ne le pensez.

Il est nécessaire, nous en sommes tous d'accord, de renforcer les moyens des CAT, des ateliers protégés, et d'_uvrer en faveur de l'intégration en milieu ordinaire. M. Bouvard a donné, dans un rapport dont il avait la charge, un certain nombre de chiffres à ce sujet. Pour l'intégration des handicapés en milieu ordinaire, on ne note aucune évolution budgétaire entre 2001 et 2003 ; pour les ateliers protégés, les crédits augmentent légèrement - l'augmentation est plus sensible pour les CAT. L'an passé, l'évolution budgétaire en faveur des personnes handicapées était de 5,7 % ; aujourd'hui, elle est de 5,6 % ! Est-ce là un grand chantier ? 298 millions d'euros supplémentaires ont été affectés en 2002 ; 317 cette année. Certains s'interrogent à propos des CAT : traite-t-on le problème du handicap ou du handicap social ? Les définitions, en Europe varient et celle qui est retenue aux Pays-Bas, par exemple, n'est pas celle qui a prévalu sous l'égide de M. Lenoir, dans la loi de 1975 que nous devons d'ailleurs revoir.

La loi d'orientation en faveur des handicapés est bien faite ; elle a été votée à l'unanimité, mais les décrets d'application sont toujours en attente. Il est urgent de les promulguer.

Nous serons là, l'an prochain pour vous poser des questions ; ne nous objectez pas, alors, la situation économique... (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

Mme Martine Aurillac - Voici donc, Monsieur le ministre, le premier budget de la législature consacré à la famille, que beaucoup attendaient. L'exercice n'était guère facile : le gouvernement précédent, à l'instar d'André Gide, n'aimait guère les familles, qu'il ne les gratifiait que de quelques mesures de redistribution sociale. On se souvient du tollé provoqué par la baisse brutale de l'AGED, sans parler du pillage des excédents de la branche famille destinés en partie au financement des 35 heures (Protestations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et du groupe socialiste ; applaudissements sur les bancs du groupe UMP). En second lieu, l'état des finances, tel que nous l'avons trouvé l'été dernier, rend vos marges de man_uvre fort étroites.

Pour autant, l'exercice est réussi. La baisse du barème de l'impôt sur le revenu de 6 % profitera aux familles ; l'augmentation des plafonds - délibérément baissés par le précédent gouvernement - pour les emplois familiaux ils passent de 6 900 à 10 000 € - permettra à de nombreuses familles de concilier vie de famille et activité professionnelle. Nous ne pouvons qu'approuver le doublement de l'abattement de 15 000 à 30 000 € tous les dix ans pour les donations entre grands-parents et petits-enfants, qui favorise la solidarité entre les générations. Enfin, vous proposez qu'une somme de 70 € par mois soit versée, à compter du 1er juillet 2003, pendant un an, aux familles de trois enfants et plus dont l'aîné atteint l'âge de vingt ans - soit 840 € pour l'année.

Vous avez engagé en outre une démarche de concertation approfondie pour préparer la prochaine conférence de la famille autour de trois axes majeurs : la prestation de libre choix, les services à la famille et à la parentalité, le partenariat avec les entreprises. Sur ce dernier point, on a proposé, conformément aux orientations du Président de la République, une mesure originale - la création d'un crédit d'impôt famille-entreprises ouvrant droit à une déduction fiscale en faveur des entreprises qui développeraient des actions spécifiques pour concilier la vie familiale et la vie professionnelle de leurs salariés.

Vous vous êtes engagé à rendre à la branche famille ce qui leur appartient et qui avait fait l'objet d'un détournement. Nous allons ensemble réfléchir, également, à un meilleur soutien aux veuves qui se retrouvent seules avec des enfants à charge - et à une aide accrue pour les familles qui accueillent dans leur foyer leurs parents âgés dépendants. Il conviendrait aussi de développer l'aide périscolaire, et de permettre aux parents qui se sont arrêtés de travailler à la naissance d'un enfant de bénéficier d'une meilleure formation professionnelle. Enfin, vous avez déjà mis en place un groupe de travail sur le statut des assistantes maternelles et des puéricultrices.

La famille, lieu privilégié de la solidarité, de la tendresse, de l'apprentissage de la vie en commun, est une valeur moderne. Parce qu'elle conditionne l'épanouissement personnel et une démographie vivante, nous avons besoin d'une grande politique familiale qui ne saurait se résumer à de simples prestations. Vous tournez le dos à ces dernières années où on l'a confondue avec une politique sociale ; vos premières mesures témoignent de votre volonté de relancer le soutien aux familles. Pour toutes ces raisons, nous voterons bien volontiers votre budget (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu ce soir, à 21 heures.

La séance est levée à 19 heures 30.

            Le Directeur du service
            des comptes rendus analytiques,

            François GEORGE


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