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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2002-2003 - 62ème jour de séance, 155ème séance

2ème SÉANCE DU MERCREDI 5 MARS 2003

PRÉSIDENCE de M. Marc-Philippe DAUBRESSE

vice-président

Sommaire

      RISQUES TECHNOLOGIQUES ET NATURELS (suite) 2

      ART. 2 (suite) 2

      APRÈS L'ART. 2 10

      ART. 3 12

      APRÈS L'ART. 3 14

      ART. 3 BIS 16

      APRÈS L'ART. 3 BIS 18

      ART. 4 18

      ORDRE DU JOUR DU JEUDI 6 MARS 2003 21

La séance est ouverte à vingt et une heures quinze.

RISQUES TECHNOLOGIQUES ET NATURELS (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, relatif à la prévention des risques naturels et technologiques et à la réparation des dommages.

ART. 2 (suite)

M. Yves Cochet - Mme la Ministre souhaite que nous nous contentions, à cet article, de poser le principe de la création des CLIC, renvoyant tout ce qui concerne leur composition et leur fonctionnement à des textes réglementaires ultérieurs, en particulier à la charte, qui garantira une certaine homogénéité sur le territoire national. J'espère d'ailleurs que la France montrera l'exemple et qu'une telle charte concernera, un jour, l'ensemble de l'Europe.

Si je comprends ce souci de concision, je pense qu'il convient néanmoins que la loi soit un peu plus précise, afin d'encadrer ces textes à venir, notamment sur ce qui a trait à l'exercice de la démocratie. Tel est le sens des amendements que je défendrai à cet article.

Le premier, qui porte le numéro 10, 2ème rectification, vise à garantir que ces comités seront présidés par une personnalité indépendante, non seulement, bien sûr, des industriels concernés, mais aussi des pouvoirs publics, car les représentants de l'Etat sont aussi investis d'un pouvoir de contrôle. Je ne souhaite donc pas que les CLIC soient, comme les SPPPI, présidés par les préfets, mais plutôt par des journalistes, des universitaires ou des experts.

M. Alain Venot, rapporteur de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire - Avis défavorable. Sur la forme, il m'apparaît que les modalités de fonctionnement des CLIC relèvent plutôt du domaine réglementaire.

Sur le fond, je suis en total désaccord avec M. Cochet : s'il est évidemment exclu que le comité soit présidé par un industriel, je pense que la personne qui offre les plus grandes garanties d'indépendance est, de loin, le représentant de l'Etat, qui ne défend que le seul intérêt général.

Le comité pourra toujours choisir un autre président, mais on ne peut exclure qu'il le soit par le préfet au motif que ce dernier ne serait pas indépendant !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable - Il n'est, en effet, pas souhaitable que le comité soit présidé par un industriel. En revanche, je rejoins le rapporteur, il n'y a aucune raison que la présidence ne revienne pas au préfet. Sauf à Toulouse et à Strasbourg, où les présidents sont des universitaires, les SPPPI sont présidés par les préfets, tout comme les CLIS, les comités locaux d'information nucléaire étant eux, présidés par des élus locaux.

En ce qui concerne les CLIC, vous savez que nous avons privilégié une démarche expérimentale ; le décret en tirera les enseignements.

Enfin, je regrette profondément que M. Cochet se soit laissé aller à dire que les représentants de l'Etat ne sont pas indépendants, alors qu'ils sont précisément les garants de l'intérêt général. Je ne comprends pas cette défiance.

Je suis donc défavorable à cet amendement qui, sur la forme, relève du domaine réglementaire et qui, sur le fond, est choquant.

M. Pierre Cohen - Ce n'est en rien mettre en cause le rôle de l'Etat pour défendre l'intérêt général que de dire que, dans un lieu de concertation comme le CLIC, son représentant n'est pas forcément le mieux placé pour garantir le dialogue. Puisque vous créez ces comités pour réunir tous les partenaires, - et j'y suis favorable - ne les faites pas présider par le préfet ou par la DRIRE.

M. Yves Cochet - Effectivement, nul ne met en doute l'impartialité de l'Etat dans sa défense de l'intérêt général. Mais la grandeur de la démocratie représentative est aussi de diffuser le pouvoir. Les exemples abondent. Ce n'est pas un représentant de l'Etat qui préside la commission nationale du débat public instituée par la loi Barnier ou l'ACNUSA, ce n'est pas un préfet qui préside le CSA. Donner à une instance consultative un autre président que le représentant de l'Etat, afin de bien souligner son indépendance, c'est cela la véritable démocratie.

Mme la Ministre - Non.

M. Léonce Deprez - Je suis étonné par cette réticence à reconnaître l'autorité de l'Etat qu'en décentralisant nous ne voulons pas affaiblir, mais conforter, pour mieux défendre l'intérêt général. Vous évoquez l'indépendance. Mais où commence-t-elle, où finit-elle ? L'Etat, lui, rend des comptes aux citoyens.

L'amendement 10, 2ème rectification, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Yves Le Déaut - Je souhaitais intervenir avant le vote. Pour que le travail soit constructif, le débat doit pourvoir se tenir. Sur les SPPPI et les CLIC, nous avons des précisions à apporter, par exemple pour dire que l'Etat, qui exerce certes un pouvoir de contrôle, n'a pas forcément celui d'expertise ou d'information. Sans prétendre tout inscrire dans la loi, il était important de souligner le rôle des différents partenaires dans les CLIC. Nous étions par exemple pour une élection, ce qui n'empêchait pas un représentant de l'Etat d'être élu.

M. le Président - J'ai utilisé ce qui n'est pas une obligation mais une faculté en donnant la parole à un orateur pour répondre à la commission et à un autre pour répondre au Gouvernement. Votre groupe pouvait s'entendre sur l'intervenant, mais nous ne pouvons prolonger excessivement le débat. Il me paraît raisonnable de laisser s'exprimer un orateur par groupe.

M. Jean-Yves Le Déaut - Dans ces conditions, je rappelle que la demande de suspension pour réunir mon groupe n'est pas une simple faculté.

M. le Président - Elle vous sera accordée si vous le demandez. Mais il faut bien ordonner le débat et je fais une application déjà libérale du Règlement.

M. Yves Cochet - Mieux vaut préciser dans la loi que ce comité, qui est compétent pour tous les aspects du risque, « est informé des mesures de secours prévues ». Tel est l'objet de notre amendement 409 corrigé.

M. le Rapporteur - La commission l'a repoussé.

Mme la Ministre - Défavorable.

L'amendement 409 corrigé, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Yves Cochet - D'expérience je sais que les « experts reconnus » ont souvent tendance à aller dans le même sens, alors que sur bien des sujets, il y a débat même parmi les scientifiques. L'amendement 11 précise donc que les débats doivent être contradictoires.

M. Jean-Yves Le Déaut - Notre amendement 191 demande la même chose en des termes plus précis.

Il existe des études de danger, réalisées à la demande de l'industriel. Leur méthodologie peut être contestée.

Le CLIC peut souhaiter une expertise contradictoire pour disposer d'un autre avis que celui des experts qui ont aidé l'industriel à réaliser son étude de danger.

Avec Claude Birraux, qui préside actuellement l'office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques, j'ai déposé un amendement visant à prévoir des contre-expertises dans le domaine nucléaire.

Je pense que vous serez réceptive à ces amendements, Madame la ministre, ou bien le travail de l'office, dont le rapport a été adopté à l'unanimité, n'aura servi à rien.

M. le Rapporteur - Nous sommes d'accord sur le principe, mais je préfère l'amendement 310, cosigné par MM. Cohen et Le Déaut.

Mme la Ministre - Monsieur Le Déaut, vous posez un vrai problème. Selon notre réglementation des installations classées, il appartient à l'exploitant d'assumer tout ce que contient l'étude de danger. C'est l'industriel qui connaît la meilleure façon de réduire le risque et c'est lui qui est responsable des salariés. Rien ne serait pire que de transférer cette responsabilité à l'administration, nous sommes tous d'accord sur ce point.

M. Pierre Cohen - Nous sommes d'accord.

Mme la Ministre - Ce principe admis, nous ne pouvons toutefois nous assurer que les études soient exhaustives et de qualité homogène.

J'ai donc demandé à l'inspection des installations classées de demander systématiquement une expertise à un tiers indépendant pour les sites Seveso visés par la loi. Il ne s'agit pas d'une possibilité : ce sera systématique. Votre amendement est donc superflu. Une simple contre-étude suffit. Evitons de susciter des guerres d'experts qui exacerbent les tensions au lieu de nourrir la concertation.

Je suis donc défavorable à l'amendement 191 mais je trouve l'amendement 310 plus pertinent.

M. François Sauvadet - Le CLIC a pour mission de choisir des experts qui éclaireront ses membres. Il s'agit d'une instance de concertation et je ne doute pas que l'intelligence prévaudra. Il faut éviter que chacun vienne avec son expertise.

Je comprends votre souci, Monsieur Cochet, mais il faut donner une valeur normative à la loi et faire confiance à ces comités.

Mme Royal a parlé cet après-midi de démocratie participative. J'ai confiance dans l'intelligence de ceux qui débattront. Monsieur Le Déaut, quand nous adoptons un rapport à l'unanimité, c'est que nous trouvons un accord après avoir entendu les experts. Pourquoi ce qui vaut au niveau de nos commissions ne vaudrait-il pas à l'échelon local ? Votre amendement est superfétatoire.

M. Jean-Yves Le Déaut - L'amendement 191 est retiré au profit de l'amendement 310.

L'amendement 11, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Yves Cochet - Mon amendement 16 a le même objet que le précédent. Je suis prêt à le retirer si mes collègues du groupe socialiste veulent bien que je m'associe à l'amendement 310.

M. Pierre Cohen - Nous acceptons, bien sûr, la proposition de M. Cochet.

Je veux revenir sur la question des expertises contradictoires. Le projet autorise les CLIC à inviter des experts. Mais une expertise, cela va plus loin qu'émettre un avis devant un comité.

Le but d'une expertise contradictoire n'est pas nécessairement d'arriver à des conclusions contraires à celles de l'industriel. Deux experts différents peuvent aboutir aux mêmes conclusions. Si l'amendement 310 vous convient, je m'en contenterai.

M. le Rapporteur - Avis favorable à l'amendement 310.

Mme la Ministre - Il faut faire la différence entre tiers experts et tierce expertise. Il ne s'agit pas de faire venir devant le CLIC quelqu'un qui arbitrera le débat en se prévalant de son savoir. Une tierce expertise suit une démarche scientifique, sous l'égide d'un organisme comme l'INERIS, pour aboutir à un document. Evitons toute confusion.

Sur l'amendement, je m'en remets à la sagesse de votre rapporteur.

M. François-Michel Gonnot - Qui va définir le cahier des charges de la tierce expertise ? Par ailleurs, l'étude de danger est à la charge de l'industriel. La tierce expertise le sera-t-elle aussi, ou bien le comité devra-t-il la financer ?

Mme la Ministre - C'est parce qu'il est difficile de vous répondre que j'ai souhaité privilégier une démarche expérimentale. La solution retenue devra résulter d'un large consensus. Nous ferons un bilan des CLIC, ce qui nous permettra de voir comment ils doivent mandater une contre-expertise.

Nous n'en sommes pas à fixer de telles règles par la voie législative.

M. Pierre Cohen - Je comprends que vous défendiez la possibilité d'avoir des experts...

Mme la Ministre - L'obligation de la tierce expertise !

M. Pierre Cohen - ...des tiers-experts qui donnent des informations aux membres du CLIC. Nous savons que si les CLIC ne peuvent faire des tierces expertises, nous n'avancerons pas.

Je respecte la position de M. le rapporteur, qui soutient cette proposition ; je souhaite que nos collègues le suivent.

L'amendement 310, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Yves Le Déaut - L'amendement 192 est de précision : « le comité local est tenu informé de tout événement touchant à la sûreté des installations visées ci-dessus ».

Les incidents ou quasi-incidents dans les usines Seveso sont, pour un certain nombre, tenus secrets - c'est ainsi que 13 tonnes de Butadiene de sont échappées à l'étang de Berre sans que l'on en soit informé, avant que la commission d'enquête n'en fasse état.

Il y a quelques années, j'ai rendu un rapport relatif au secteur nucléaire au Premier ministre, où j'évoquais déjà « la longue marche vers la transparence ».

Dans le domaine nucléaire, aujourd'hui, les incidents ou quasi-incidents sont rendus publics à partir de l'échelle INES, selon les degrés de gravité. Nous n'en sommes pas encore là dans le domaine des risques industriels. Les CLIC doivent être avertis des incidents ou quasi-incidents qui surviennent dans les usines qui relèvent de leurs compétences.

J'espère que cet amendement sera voté unanimement.

M. le Rapporteur - Je remercie mes collègues d'avoir approuvé l'amendement précédent et Mme la ministre de s'en être remise à la sagesse de l'Assemblée. Quand un amendement est concret, réaliste, conforme à l'esprit de la loi, nous sommes ouverts.

Il importe que le CLIC soit informé des événements concernant la sécurité. C'est une évidence. Néanmoins, un texte d'une portée aussi large - « tout événement » - risque de submerger le CLIC sous de multiples signalements d'incidents qui n'auraient que de lointains rapports avec la sécurité. Je suis donc défavorable à l'amendement 192.

Mais peut-être un décret pourra-t-il préciser que les incidents doivent être signalés au CLIC ?

Mme la Ministre - La formule « événements touchant à la sûreté des installations » est juridiquement floue. La définition éventuelle de ces « événements » relève effectivement du pouvoir réglementaire.

M. François Sauvadet - M. Le Déaut pose un vrai problème. Les structures d'échanges et d'informations autour du nucléaire sont tenues informées de tous les incidents. Je comprends la difficulté de donner un caractère normatif à l'amendement proposé, mais je souhaiterais que l'on se saisisse de cette question pour que les CLIC soient informés. La transparence et l'information sont nécessaires.

M. Jean-Yves Le Déaut - Tenant compte des remarques de Mme la ministre et de M. le rapporteur, je propose de rectifier l'amendement en remplaçant « événement » par « incident ou accident ». Les échelles de risques vont de 0 à 7. Le niveau 0 est qualifié d'« écart » - et l'on ne peut, en effet, en submerger les CLIC ; mais les niveaux 1 à 3 concernent les « anomalies, les incidents et les incidents graves ». Ces deux derniers niveaux ainsi que les accidents doivent être définis dans la loi et signalés.

M. Yves Cochet - Dans le domaine aéroportuaire, la commission de l'environnement, à Roissy, est une sorte de CLIC. Anomalies, incidents, accidents, « événements » sont signalés puisqu'y sont répertoriés tous les vols de tous les avions tous les jours. La transparence est totale.

Aéroports de Paris met les informations à la disposition de la commission de l'environnement sur un site web. Il pourrait en être de même pour les CLIC.

M. le Rapporteur - A titre personnel, je suis favorable à l'amendement rectifié. Toutefois, ne serait-il pas préférable de remplacer aussi « sûreté » par « sécurité » ?

M. Jean-Yves Le Déaut - J'en suis d'accord.

Mme la Ministre - Cet amendement rectifié est évidemment de nature réglementaire, mais M. Le Déaut ayant soulevé un vrai problème, j'y suis favorable...

M. François Sauvadet - Très bien !

Mme la Ministre - ...sous réserve que soit adoptée la rédaction proposée par M. le rapporteur.

M. François-Michel Gonnot - Goûtons ce moment de grâce ! (Sourires) Il conviendrait toutefois également de remplacer « le comité local » par « il » dans un souci rédactionnel.

M. le Président - Nous avons donc un sous-amendement rédactionnel de M. Gonnot, une rectification de M. Le Déaut et un sous-amendement du rapporteur.

Le sous-amendement de M. Gonnot, mis aux voix, est adopté.

Le sous-amendement du rapporteur, mis aux voix, est adopté.

L'amendement 192 rectifié, ainsi sous-amendé, mis aux voix, est adopté.

M. Yves Cochet - L'amendement 12 tend à ériger les membres des SPPPI créés sur les installations Seveso en membres consultatifs du CLIC, dans le bassin industriel concerné.

M. le Rapporteur - L'articulation entre les SPPPI et les CLIC doit se faire au cas par cas.

Mme la Ministre - La rédaction de cet amendement est en effet trop restrictive. Un bon bilan a été dressé de l'activité des SPPPI, lieux de concertation, d'expertise et de dialogue, et il est vrai qu'une concertation doit exister entre les CLIC et les SPPPI. Lorsque leur champ de responsabilité est identique, la confusion est possible, mais il convient de raisonner au cas par cas dans les autres situations. Avis défavorable.

L'amendement 12, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 44 est rédactionnel pour lever toute ambiguïté quant à la nécessité d'un décret pour fixer la composition de chaque CLIC.

M. Yves Cochet - Le sous-amendement 380 et l'amendement 381 tendent à fixer dans la loi les principes de composition de ces CLIC, afin de ne pas faire naître de différences d'un CLIC à l'autre. De nombreuses lois se sont d'ailleurs déjà prêtées à cet exercice, comme la loi Barnier de 1995 en son article 2. J'observe que vous faites de même à l'article 19 bis du présent projet. Les CLIC étant le fondement de votre loi, il importe de poser le principe de leur composition.

M. Pierre Cohen - L'amendement 311 - dans lequel il faut corriger une erreur en remplaçant « contrôle » par « concertation » - tend à fixer les grandes lignes de la composition du CLIC en précisant qu'il comprend des représentants des industriels, des salariés, des associations de riverains, et des élus locaux. Par ailleurs, il s'agit de rendre obligatoire la participation des représentants des collectivités territoriales, des pouvoirs publics et des industriels aux réunions de ce comité.

M. le Rapporteur - La commission s'en tient à la fixation par décret de la composition du comité, et a donc repoussé ces amendements. Monsieur Cochet, vous avez dû mentionner par erreur, à la fin de votre amendement, qu'un décret fixe la composition du comité (Sourires). Cela étant, votre amendement est meilleur que celui de MM. Cohen et Le Déaut en ce qu'il n'omet pas les représentants des salariés, et pourra ainsi nourrir notre réflexion pour la composition du comité par décret.

Mme la Ministre - La composition des CLIC est une question importante, et toutes les parties prenantes doivent être représentées. A cet égard, l'amendement de M. Cochet constitue une excellente base de travail, dont le décret s'inspirera. Cependant, je souhaite privilégier une démarche expérimentale - 80 CLIC sont actuellement en observation, et nous en attendons les résultats, même si des échanges courtois ont déjà eu lieu sur la qualité du président - un représentant de l'Etat, un élu, un expert ? Merci pour votre travail exploratoire, mais nous en restons au décret.

M. François Sauvadet - C'est sage !

M. Daniel Paul - Fixer par décret la composition des CLIC est la voie ouverte à toutes sortes de pression. A vos gestes de dénégation, Madame la ministre, je préfère la loi.

S'agissant d'une commission d'une telle nature, cet amendement me semble donc très important.

Dans la région havraise, qui comprend 17 sites Seveso 2, une association regroupe les élus, les industriels, les salariés, les administrations et les associations. Nous avons d'ailleurs tenu à ce que ce soit des associations locales, qui connaissent bien le terrain, et non nationales ou internationales.

M. François-Michel Gonnot - Très bien !

M. Daniel Paul - Cette structure va sans doute se transformer en CLIC, et je regrette que vous ne vouliez pas indiquer aujourd'hui les principes qui vont guider leur composition. Selon que la région concernée comprendra 17 sites Seveso ou un seul, le nombre de représentants dans chaque collège sera forcément différent, mais la structure par collège restera la même. C'est une idée générale sur laquelle il aurait pu y avoir unanimité.

M. Pierre Cohen - Le rapporteur n'a pas voulu trop insister, mais pour qu'il n'y ait aucun malentendu, je confirme que l'absence des salariés est due à un oubli... (Sourires)

Madame la ministre, puisque vous semblez vous acheminer vers la transcription de l'amendement Cochet par décret, pensez-vous rendre obligatoire la présence des interlocuteurs principaux, les représentants de l'Etat et des industriels ?

Mme la Ministre - Ce qui est sûr, c'est que l'Etat viendra ! Mais si l'un des autres interlocuteurs joue la politique de la chaise vide, je ne vais pas le faire encadrer par des gendarmes pour qu'il vienne !

Plusieurs députés socialistes - Si !

Mme la Ministre - Je suis sûre que les industriels seront présents. Ils y auront d'ailleurs tout intérêt. Vous n'allez pas criminaliser l'absence à un CLIC !

M. Yves Cochet - Je voudrais corriger l'amendement 381. Au troisième tiret, il faut lire les représentants des exploitants, plutôt que des exploitations. D'autre part, dans la dernière phrase, il faut supprimer « la composition du comité », ce qui donne : « Un décret fixe les conditions d'application du présent article ».

Mme la Ministre - Vous voyez bien qu'on a besoin des enseignements de l'expérience ! Renvoyez donc cela au décret...

M. Yves Cochet - Tous les élus qui ont de l'expérience savent que la composition sera de cet ordre. Vous-même l'avez plus ou moins admis. De nombreuses lois prévoient une composition faite de collèges à parts égales, et c'est d'ailleurs le cas de votre propre article 19 bis, pour le comité départemental des risques naturels ! Pourquoi ne pas le mentionner ici ?

Le sous-amendement 380, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'amendement 44, mis aux voix, est adopté.

M. le Président - Les amendements 381 et 311 tombent.

M. Jean Diébold - Compte tenu de ce qui vient d'être dit, j'ai bien peur que l'amendement 402 corrigé ne recueille un avis défavorable, mais j'insiste sur le fait qu'il est le fruit de l'expérience. Dans les faits, les administrations, les élus, les riverains et les salariés participent aux commissions. Les représentants des exploitants, eux, sont absents. Le débat ne peut donc pas aboutir, puisque ce sont les seuls qui peuvent fournir des explications, des documents, ou entendre des réclamations. Il me semblait conforme à l'esprit de votre texte que la présence des exploitants soit rendue obligatoire, sans quoi les CLIC ne seront que des forums d'où ne sort pas grand chose. J'espère que ce témoignage, issu de plus d'un an de présence aux réunions à Toulouse, pourra infléchir votre position.

M. le Président - Je souligne que l'amendement fait porter l'obligation sur la composition des comités, pas sur les présences effectives.

M. le Rapporteur - Pour les raisons que M. Diébold a comprises, la commission lui donne un avis défavorable, mais la présence des industriels sera évidemment prévue dans les décrets.

Mme la Ministre - Je tiendrai compte de l'observation de M. Diébold, et la présence des industriels sera bien sûr expressément prévue.

M. Daniel Paul - Il va de soi que la présence des industriels sera requise dans les décrets, mais ce qui compte, c'est qu'ils soient réellement là ! Hier, Madame la ministre, nous mettions en cause votre tendance, dans ce texte, à faire confiance aux entrepreneurs. Mais l'expérience prouve qu'à Toulouse, même après la plus grande catastrophe de ces dernières années, ils ne viennent pas aux réunions. S'ils ne viennent pas là où il y a eu trente morts, qu'en sera-t-il pour les sites qui n'auront connu que quelques incidents !

Le décret ne doit donc pas se contenter d'indiquer la composition des CLIC. Vous devez trouver le moyen de contraindre chacun, et pas seulement les patrons, à être présent. Il ne s'agira pas d'une contrainte par corps, certes, mais ce qu'a dit M. Diébold a de quoi faire réfléchir !

Mme la Ministre - Je peux vous assurer que lorsqu'il s'agit de sécurité industrielle, je ne fais aucune confiance. Je ne donnerai qu'un exemple : celui des incinérateurs hors normes, émetteurs de dioxines.

M. Daniel Paul - Ce sont les collectivités locales !

Mme la Ministre - Non ! En arrivant dans ce ministère, j'ai trouvé 34 incinérateurs. On m'a dit que je n'aurais jamais le courage politique de les fermer ou des les faire mettre aux normes. Mais au 31 décembre 2002, comme je m'y étais engagée, c'était chose faite ! Je ne fais pas confiance : j'applique ma politique en matière de sécurité industrielle, et ne me prenez pas pour une idéaliste dans ce domaine.

En ce qui concerne la présence des industriels, à part criminaliser les absences, je ne vois pas comment je pourrais les obliger ! Mais je crois qu'ils seront là, car les CLIC auront un véritable pouvoir. C'est la vie de l'entreprise qui va y être décidée. Je ne leur fais pas confiance, mais je sais qu'ils auront intérêt à être là ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean Diébold - Après avoir entendu cela, je crois que je peux, moi, vous faire confiance, Madame le ministre. Je retire donc mon amendement, mais je resterai vigilant. Soyez sûre que je vous tiendrai informée si les choses ne se passent pas comme nous le souhaitons. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF)

M. le Président - Un bon CLIC vaut mieux qu'un mauvais choc ! (Sourires)

M. Jacques Pélissard - Les gares de triage et les ports maritimes et fluviaux sont des lieux de concentration des risques. L'amendement 366 précise donc qu'ils doivent être membres des CLIC. Ce sujet étant du domaine réglementaire, je retire cet amendement d'appel, mais je souhaiterais que vous en teniez compte.

M. Jean-Yves Le Déaut - N'étant pas parvenu précédemment, sur le même sujet, à convaincre la ministre et le rapporteur, je retire l'amendement 190.

Je souhaite toutefois revenir sur la question des échelles de gravité, pour dire que celle des accidents industriels qu'utilisent l'Union européenne et l'OCDE fait référence à un très grand nombre de critères - quantités de substances rejetées, au nombre de victimes, de tiers sans abris, de riverains évacués, à l'ampleur des dommages matériels et aux atteintes à l'environnement -, on dirait un tableau de Jérôme Bosch... Personne n'y comprend rien, certaines DRIRE l'utilisent et d'autres pas. La commission d'enquête a donc souhaité qu'on utilise une échelle de gravité, simplifiée et harmonisée, pour les incidents et accidents industriels.

M. Yves Cochet - Les CLIC sont au c_ur de ce projet, mais ils ne sont que des intermédiaires car l'ensemble de la population est intéressée. Je propose donc, par l'amendement 15, que le déroulement des travaux des comités et leurs conclusions soient portés à la connaissance du public par une publication dans les médias locaux.

M. Pierre Cohen - L'amendement 309 a le même objet. Il convient, en effet, que la population soit informée des résultats des travaux des CLIC.

Si M. Diébold a remarqué l'absence des dirigeants des entreprises, pour ma part, je regrette celle, depuis le début de ce débat, du maire de Toulouse (Protestations sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

M. François Sauvadet - C'est scandaleux !

M. François-Michel Gonnot - Il est auprès des sinistrés !

M. le Président - Evitez les attaques personnelles, Monsieur Cohen.

M. Jean Diébold - Il est pour le moins inélégant d'attaquer les absents.

M. Pierre Cohen - C'est précisément cette absence que je déplore...

M. le Rapporteur - Dès lors que le mot « information » figure dans l'intitulé des comités, à quoi bon insister sur cette mission évidente ? Diriez-vous qu'un journal d'information doit diffuser des informations ? En proférant de telles banalités, vous montrez que vous n'avez pas perçu la portée et le rôle des CLIC.

Mme la Ministre - Les comités locaux d'information et de concertation seront des réservoirs d'idées et je suis convaincue qu'ils renforceront la conscience du risque dans la population. Vous proposez qu'ils fassent connaître leurs travaux par la presse locale ou par des réunions publiques, mais ils pourront aussi publier un bulletin, diffuser des dépliants, créer un site internet, former des personnes qui iront expliquer chez eux aux riverains ce qu'est le risque industriel. L'imagination sera au pouvoir ! Je l'ai dit, au cours de la période d'installation des CLIC, nous regarderons ce qui marche et ce qui ne marche pas et la future charte tirera le bilan de ces expériences.

D'ici là, je ne vois pas l'intérêt que cela figure dans la loi et je suis donc défavorable à ces amendements.

L'amendement 15, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que l'amendement 309

M. Yves Cochet - Les CLIC se réuniront fréquemment, je propose donc, par l'amendement 13, que les représentants des salariés bénéficient d'une décharge de travail, comme lorsqu'il participent à d'autres instances comme les jurys d'assises.

M. le Rapporteur - Avis défavorable. Les jurés rendent la justice au nom du peuple français, même si la mission des CLIC est noble, elle n'est pas de même nature.

Mme la Ministre - La rédaction de l'amendement est trop imprécise. Si vous voulez parler des représentants de l'administration, il va de soi qu'ils participeront aux réunions dans le cadre de leur travail. On voit mal également les représentants bénévoles des associations demander une décharge à des employeurs qui n'ont rien à voir avec ces comités.

Je suppose donc que vous visez les représentants des salariés des entreprises concernées.

M. Yves Cochet - C'est cela.

Mme la Ministre - Dans ce cas, vous soulevez un vrai problème, dont je m'entretiendrai avec le ministre des affaires sociales afin que nous trouvions une solution au cours de la navette. Quoi qu'il en soit, le décret le prévoira expressément.

M. Daniel Paul - La fin de votre réponse va dans le bon sens. Les représentants des salariés sont de plus en plus souvent appelés à siéger dans de telles instances, mais les heures de délégation n'augmentent pas dans les mêmes proportions. Je souhaite donc que ce soit sous cet angle que vous engagiez vos discussions avec M. Fillon.

De même, les bénévoles qui représentent des associations tout en travaillant sont de plus en plus sollicités, mais n'ont toujours pas de statut. Il faudra réfléchir à ces problèmes si l'on veut que les CLIC fonctionnent bien.

M. Yves Cochet - Je retire l'amendement 13

M. Christian Paul - Pour des raisons que j'ai déjà évoquées, nous voulons permettre au préfet, par l'amendement 258, de mettre en place un CLIC dans le cas d'un établissement dangereux mais non classé.

M. le Rapporteur - Le débat a effectivement eu lieu. Logique avec elle-même, la commission a repoussé cet amendement.

Mme la Ministre - Nous avons longuement traité de seuils, qui ont des effets pervers. Je le répète, nous visons essentiellement les installations à risque correspondant au seuil élevé de la directive Seveso, c'est-à-dire qui peuvent mettre la vie humaine en danger. Mais j'incite fortement les préfets à prendre l'initiative de créer un CLIC chaque fois que ce danger existe même s'il ne s'agit pas d'une installation classée.

L'amendement 258, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 2, amendé, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 2

M. François Sauvadet - Nous sommes heureux de constater que la création de ce lieu de concertation fait l'unanimité.

Plusieurs collègues l'ont fait observer, les élus locaux ne sont pas toujours informés au préalable de l'installation d'un établissement classé. L'amendement 455 de M. Demilly demande que le préfet en informe les conseils municipaux intéressés.

M. le Rapporteur - Peut-être n'ai-je pas bien compris l'amendement, mais à quel niveau de la procédure faut-il faire cette information ? Certaines déclarations portent sur des projets qui ne seront pas exécutés. Ce serait bien difficile à gérer. De ce fait, la commission a repoussé l'amendement, tout en souhaitant bien sûr que le dépôt ou l'instruction d'un dossier soit porté immédiatement à la connaissance des communes concernées.

Mme la Ministre - L'auteur de l'amendement a-t-il bien perçu qu'il touchait ainsi les 400 000 installations classées, et qu'il demandait au préfet de faire connaître a priori aux communes des projets dont lui-même n'est informé qu'a posteriori ? Ce serait un travail de titan.

M. François Sauvadet - Je prends acte de la bonne volonté du rapporteur, et la création même des CLIC manifeste la volonté d'information. Mais il faut bien veiller à ce que les élus locaux soient associés dans tous les cas, même s'il ne s'agit pas d'installations industrielles. Le souci auquel il répond étant pris en compte, je retire l'amendement.

M. Jacques Pélissard - L'amendement 446 de M. Kert vise à éviter la concentration des nuisances et des pollutions dans un certain périmètre.

M. le Rapporteur - La commission a émis un avis défavorable. Outre qu'une telle disposition n'a pas forcément sa place dans cette loi, on ne précise pas à quelle directive européenne on se réfère.

Mme la Ministre - Il s'agit ici des installations classées soumises à autorisation, qui donnent lieu à une étude de risque mais aussi à une étude d'impact sanitaire qui répond à cette demande.

L'amendement 446 est retiré.

M. David Habib - Notre amendement 312 vise à améliorer le système d'alerte. Lorsque le préfet le met en _uvre, les gens sont tenus de rester confinés au signal donné par les sirènes. Or, lors des exercices, par exemple celui que nous avons organisé encore en décembre dans le bassin de Lacq, il est apparu que l'on n'entendait pas forcément les sirènes. Le ministre de l'intérieur, saisi par le préfet, a confirmé que c'était aussi le cas ailleurs. Il faut donc inscrire dans la loi que les sirènes doivent être entretenues et testées.

Les industriels considèrent qu'il n'est pas de leur responsabilité de mettre en place des sirènes suffisamment puissantes pour être entendues dans l'ensemble de la zone concernée. Je sais que nous allons examiner un texte sur la protection civile. Mais on ne peut ignorer ce problème.

M. le Rapporteur - La commission a estimé qu'une telle disposition n'était pas du domaine de la loi. Vous ne dites pas que rien n'est prévu, mais que le dispositif ne fonctionne pas, et je ne suis pas certain qu'il se mette à fonctionner parce que nous aurons fait ce constat dans la loi. Avis défavorable.

Mme la Ministre - J'étais il y a quelques jours dans les Pyrénées-Atlantiques...

M. Jean-Marie Geveaux - ...pour entendre le chant des sirènes ! (Sourires)

Mme la Ministre - On m'a signalé le dysfonctionnement que vous évoquez. Nous ne sommes pas là dans le domaine de la loi, ni dans le domaine réglementaire, mais dans celui des bonnes pratiques.

Puisque M. Le Déaut a cosigné cet amendement, je reprendrai son expression pour vous éviter une « sédimentation géologique » de la loi.

Mme Claude Darciaux - Ma commune vient de recevoir les instructions de sécurité. Nous avons un PPI, un PPRT, un aéroport et une autoroute, ce qui ne nous a pas empêchés de signer une charte de l'environnement.

La population serait heureuse qu'on prenne en compte son inquiétude. Il y a huit jours, un début de séisme a fait sortir toute la population.

M. David Habib - La dernière couche géologique de mon amendement, sur la prise en charge des équipements par les industriels, justifie qu'on emprunte la voie législative. Les industriels considèrent qu'aucun texte ne les oblige à financer les sirènes. Je maintiens mon amendement, pour préciser que celles-ci ne sont pas à la charge des collectivités territoriales.

Mme la Ministre - Vous dites qu'il n'y a pas de texte : je ne suis pas d'accord. La loi du 22 juillet 1987 relative à l'organisation de la sécurité civile définit dans son article 4 les obligations des exploitants et le décret du 6 mai 1988 relatif aux plans d'urgence précise les modalités de diffusion de l'alerte parmi les populations voisines des installations.

Nous disposons donc des outils juridiques nécessaires. Ce qui manque, c'est une volonté politique, que les CLIC devraient susciter.

L'amendement 312, mis aux voix, n'est pas adopté.

ART. 3

M. Jean-Yves Le Déaut - Les articles L. 515-8 et suivants du code de l'environnement prévoient l'institution de servitudes d'utilité publique à l'initiative du demandeur de l'autorisation d'exploitation, du maire de la commune d'implantation ou du préfet.

Ces servitudes peuvent comporter la limitation ou l'interdiction du droit d'implanter des constructions ou des ouvrages et d'aménager des terrains de camping ou de stationnement de caravanes, la subordination des autorisations de construire au respect de prescriptions techniques tendant à limiter le danger et la limitation des effectifs employés dans les installations industrielles et commerciales qui seraient créées ultérieurement.

L'institution de ces servitudes permet de maîtriser l'urbanisation d'une manière plus souple que les dispositifs existants. Il faut toutefois noter qu'elles ne pourront pas conduire à l'abandon ou à la démolition de bâtiments légalement édifiés, ce qui relève de la procédure de l'expropriation.

Ces servitudes peuvent donner lieu à une indemnisation des riverains, à la condition qu'elles entraînent un préjudice « direct, matériel et certain ». Cette indemnisation est à la charge de l'exploitant.

Ce point constitue la différence essentielle entre les servitudes d'utilité publique instituées sur le fondement du code de l'environnement et les servitudes imposées au titre de la législation d'urbanisme, qui n'ouvrent droit à indemnité que s'il en résulte « une atteinte à des droits acquis ou une modification à l'état antérieur des lieux déterminant un dommage direct, matériel et certain ».

Cette perspective d'indemnisation rendra les propriétaires concernés moins réticents à l'institution de contraintes nouvelles.

C'est le rapport publié en 1987 de M. Gardent, conseiller d'Etat, qui préconisa l'institution de servitudes d'utilité publique au voisinage des installations présentant des risques particuliers.

Le constat dressé par ce rapport reste d'une parfaite actualité : « le code de l'urbanisme offre une palette de moyens d'intervention qui couvrent en principe de façon complète le champ du problème posé », mais « la création de servitudes foncières qui, dans le cadre du code de l'urbanisme, ne sont normalement pas indemnisées, suscite des résistances, des hésitations politiques, et à la limite l'absence de mise en _uvre des moyens juridiques disponibles ».

L'institution de ces servitudes est une bonne chose, mais le nouvel article L. 515-8 du code de l'environnement que nous allons voter va coexister avec l'article L. 421-8 du code de l'urbanisme et un certain nombre de servitudes liées aux PPRT.

Il y aura donc plusieurs types d'indemnisation différents.

Vous avez cependant raison de recourir à l'institution des servitudes. C'est la meilleure solution, et elle avait été préconisée par votre prédécesseur, M. Cochet. Mais il faudrait supprimer l'article du code de l'urbanisme, qui rend notre droit trop complexe.

M. Jacques Pélissard - Des régimes différents vont se juxtaposer. Mon amendement 362 vise à prévoir une articulation entre les dispositions relatives aux projets d'intérêt général, qui ne donnent pas lieu à indemnisation, et les servitudes d'utilité publique de l'article L. 515-8-1.

M. le Rapporteur - Avis défavorable. Ce serait contraire à l'intérêt des habitants.

Mme la Ministre - Il y aura certes superposition de certaines procédures, mais les projets d'intérêt général ayant vocation à être progressivement remplacés par les PPRT, ces deux dispositifs ne se superposeront pas.

L'amendement 362 est retiré.

M. David Habib - Mon amendement 313 reprend une demande ancienne de l'Association nationale des communes soumises à des risques technologiques majeurs. Celle-ci se réjouit de l'adoption de ce projet, mais les dispositions que nous examinons ne s'appliquent qu'aux installations nouvelles et aux extensions, mais pas aux installations existantes. Les riverains ne seront donc pas dédommagés, alors que leurs maisons peuvent être antérieures à la création des sites industriels. La révision des bases locatives pourrait être un moyen de les dédommager.

M. le Rapporteur - Avis défavorable.

La dépréciation n'est pas forcément identique pour tous les immeubles et pour tous les propriétaires alors que vous proposez un système forfaitaire d'abattement.

La dépréciation du bien concerne le propriétaire : pourquoi, dès lors, un dégrèvement de 30 % de la taxe d'habitation payée par le locataire ? Je comprends que, s'il y a dépréciation du lieu occupé, le locataire demande à son propriétaire une diminution du loyer ; mais qu'il demande un dégrèvement à l'Etat, je le comprends moins bien.

Mme la Ministre - Dans les périmètres des PPRT, des immeubles peuvent en effet subir des dépréciations. Mais celles-ci peuvent être variables. Pourquoi ce taux uniforme de 30 % ?

En outre la dépréciation effective ne sera constatée qu'à la vente de l'immeuble. Il est difficile d'évaluer une dépréciation éventuelle.

Enfin, l'application du coefficient de situation générale permet déjà de réduire la valeur locative des locaux situés à proximité d'installations génératrices de nuisances par rapport aux mêmes types de locaux non soumis à ces nuisances. Si aucune réduction n'a été appliquée lors de la fixation de l'évaluation initiale, celle-ci peut être modifiée lorsque la prise en compte de ce changement conduit à modifier la valeur locative de plus de 10 %.

Accorder une faveur fiscale entraînerait en outre d'autres contribuables qui s'estimeraient victimes de nuisances, autoroutes ou voies ferrées, à des revendications analogues. Ne nous engageons donc pas dans cette direction. A partir d'une bonne intention, on aboutit à un mécanisme d'une extrême complexité. De toute façon, il est exclu que l'Etat prenne à sa charge un tel dispositif. La participation de l'Etat, au titre de la taxe d'habitation et du foncier bâti, représente déjà plus de 4,8 milliards d'euros en 2001. Je vous demande donc de retirer l'amendement.

M. David Habib - Je le retire, son application étant en effet difficile - mais il en sera de même du droit de délaissement puisque la loi ne fixe pas de règles de financement. En commission, vous avez déclaré que « faire intervenir la révision des bases locatives en matière d'indemnisation pouvait être une mesure intéressante ».

L'amendement 313 est retiré.

M. Jean Diébold - L'amendement 461 concerne les bâtiments publics qui peuvent être implantés dans un périmètre proche de sites industriels à risque, comme ce fut le cas lors de la catastrophe de Toulouse, avec une école maternelle, deux lycées et un hôpital. Leur implantation doit être limitée en fonction de l'intensité du risque qui résultera de l'étude de dangers.

M. le Rapporteur - Le 1° de l'article 515-8 répond déjà à votre légitime préoccupation, en permettant la limitation ou l'interdiction d'implantations de bâtiments publics dans ces zones.

Mme la Ministre - Je comprends le sens de cet amendement, mais sa rédaction est ambiguë, puisque vous visez en réalité non des établissements publics, mais des établissements recevant du public.

De telles interdictions sont déjà prévues en zone Z2. La question ne se pose pas pour l'urbanisme à venir, mais pour l'urbanisme existant, et l'article 4 permettra de répondre à vos légitimes interrogations.

Je suis donc défavorable à l'amendement, non aux préoccupations qu'il exprime.

L'amendement 461 est retiré.

L'article 3, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 3

M. Daniel Paul - L'amendement 260 est défendu.

L'amendement 260, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Yves Cochet - L'amendement 18 complète l'article 515-9 du code de l'environnement par la phrase suivante : « Le modèle de calcul des périmètres doit, pour un produit donné, être le même sur tout le territoire, en tenant compte de la perte totale et instantanée du confinement du produit sans aucune probabilité d'occurrence ».

Quelle était la probabilité d'occurrence de l'explosion, à Toulouse, le 21 septembre 2001 ? Sans doute aurait-on dit qu'elle était très faible. Or, sans une intervention rapide des secours à Toulouse, les conséquences de l'accident auraient pu être bien plus graves ! Aussi doit-on calculer le périmètre en tenant compte de la perte totale et instantanée du confinement du produit.

M. le Rapporteur - La commission a rendu un avis défavorable, préférant approuver un amendement de M. Le Déaut à l'article 3 bis qui répondra à votre souci.

Mme la Ministre - Votre amendement s'oppose à la logique de prévention. Vous ne tenez pas compte de l'analyse des risques, ni des mesures de sécurité susceptibles de réduire la probabilité d'accidents, systèmes de détection, d'extinction automatique - ou la gravité des effets potentiels - murs coupe-feu, unités de traitement d'atmosphère viciée par des fuites de gaz toxique. Tout le monde convient qu'il faut avant tout réduire les risques à la source. Or, vous ne distinguez pas entre les industriels selon leurs efforts de prévention et votre proposition conduit à geler l'urbanisme autour de toute usine, dangereuse ou non, sur plusieurs kilomètres de rayon, touchant ainsi plusieurs millions de constructions.

Je souhaite au contraire que mes services tiennent compte des probabilités, comme cela se fait dans de nombreux autres pays européens. Nous avons une divergence de fond, quasi philosophique, car votre amendement confond risque et danger.

M. Daniel Paul - La priorité essentielle reste de réduire la dangerosité de nos usines, si ce n'est de la faire disparaître. N'oublions pas que l'instauration de périmètres conduira aussi à la dépréciation de l'immobilier sans qu'une évolution ultérieure de ces périmètres efface la marque d'infamie. D'un autre côté, comment réduire les risques à la source ? Quelles contraintes peut-on imposer aux industriels pour, par exemple, déplacer un stockage de produits dangereux ?

Mme la Ministre - Vous allez dans mon sens !

M. Daniel Paul - Bien sûr, mais j'ai aussi posé une question !

M. Yves Cochet - Loin de moi l'idée de décourager les industriels de réduire les risques à la source ! Mais je ne partage pas votre philosophie utilitariste, basée sur un calcul de probabilités. Multiplier epsilon par quasiment zéro, cela n'a aucun sens !

Mme la Ministre - Mais votre logique à vous est déterministe.

M. Yves Cochet - Il faut au contraire sortir de ce raisonnement pour s'appuyer sur une logique des droits de la personne à un environnement sain et sûr. Comment peut-on savoir avec certitude que telle explosion se produira ou non ? Personne n'avait prévu la catastrophe de Toulouse, aussi faut-il diminuer le risque avant de pouvoir réduire le périmètre.

Mme la Ministre - Vous ne tenez pas compte, dans le calcul de vos périmètres, de la réduction, par l'industriel, des probabilités d'accidents. Dans votre logique, il faudrait interdire toute construction à Lyon, au Havre ou sur tout autre site industriel. Or, le risque zéro n'existe pas et nous voulons conserver un tissu industriel !

L'amendement 18, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Yves Cochet - L'article L. 515-9 du code de l'environnement prévoit que l'avis des communes sera sollicité sur l'implantation des usines à risques. Dans l'amendement précédent, vous avez fait référence au nucléaire. Si une échelle de gravité peut être établie, le nucléaire est sans doute tout en haut, même s'il y a des procédures spécifiques. Mais je prendrai un autre exemple : celui des OGM. Un débat existe sur ce thème, et même un moratoire européen, pour l'instant du moins. En votre absence en effet, Madame la ministre, j'ai posé une question d'actualité sur ce moratoire, et Mme Haigneré m'a répondu qu'il serait bientôt levé. Quoi qu'il en soit, l'an dernier, le Gouvernement s'interrogeait sur les essais aux champs. Il a fait appel à quatre sages, dont M. Le Déaut, qui ont recommandé que les communes concernées par des projets d'essais puissent en délibérer en conseil municipal.

De la même façon, vous avez prévu que les conseils municipaux délibèrent des projets d'installation d'usines à risques. L'amendement 19 précise qu'ils donnent un avis conforme. Vous avez refusé tout à l'heure le référendum d'initiative locale. Il s'agissait pourtant de faire une balance, non pas probabiliste, mais démocratique. Dans la démocratie représentative, à l'échelon local, ce sont les conseils municipaux qui expriment les souhaits des habitants. Qu'une commune refuse ou qu'elle accepte, elle doit le faire en toute transparence.

M. le Rapporteur - L'avis conforme conférerait un droit de veto à une commune. On prendrait le risque que la sensibilité prenne le pas sur d'autres éléments tout aussi importants. Avis défavorable.

Mme la Ministre - Le parallèle avec les OGM était très intéressant. Je partage l'avis de la commission des sages sur l'information et la consultation des communes concernées par des projets d'essais aux champs. Mais elle n'a jamais préconisé un avis conforme, qui serait exorbitant à la fois du droit de la propriété et de la procédure d'autorisation des installations, qui relève du ministère de l'agriculture sur avis d'autres ministères, dont celui de l'écologie. La consultation du conseil municipal relève d'une procédure d'information et de consultation. L'avis conforme lui donnerait un droit de veto qui aboutirait, à terme, à la désindustrialisation du pays !

En outre, vous faites référence à l'article L. 515-9 du code de l'environnement, qui est relatif à l'institution de servitudes d'utilité publique. Il va donc à l'encontre de ce que vous préconisez.

M. Yves Cochet - Comme vous le diriez vous-même, il faut tout lire ! Dans le troisième alinéa, il est mentionné que « le projet », c'est à dire le projet industriel à risque, est soumis à l'enquête publique et à l'avis du conseil.

Il s'agit de savoir si les représentants de la population peuvent dire quelque chose sur un projet d'installation à risque. Le rapporteur a utilisé le terme de « sensibilité ». On a l'impression que nos concitoyens, malgré les CLIC, l'information, le débat, la transparence, conserveront une réaction paranoïaque envers l'industrialisation. Ce n'est pas vrai ! Ils veulent pouvoir balancer entre ses avantages - emploi, activité, taxe professionnelle - et ses risques. Comme l'a montré le sociologue allemand Ulrich Beck, nous sommes entrés dans une société du risque. Mais ce risque doit être décidé démocratiquement, et non par un calcul utilitariste ! Je crois que sur ce point, nos conceptions de la démocratie présentent pour le moins des nuances.

Mme la Ministre - Il est question ici du droit des installations classées. Le problème est de savoir si un projet répond aux normes de sécurité qui permettront de l'autoriser. Votre amendement n'est plus du tout dans la même logique.

Quant à l'article L. 515-9, il dispose que le projet définissant les servitudes et le périmètre est soumis à enquête publique. Il ne s'agit pas du projet industriel ! Votre amendement établit une référence erronée.

M. Daniel Garrigue - M. Cochet invoque la démocratie, mais sa conception en est curieuse. Le texte dont nous débattons a pour objet de défendre l'intérêt général, qu'il s'agisse de la protection des populations ou du développement de l'activité dans le pays. Dans ces domaines, la démocratie s'exerce au niveau national. Prétendre qu'elle ne peut s'exprimer qu'à l'échelle des communes conduirait à un morcellement du territoire. Par ailleurs, comment la population pourrait-elle se prononcer en toute connaissance de cause ? Aucune commune ne peut mettre en _uvre les procédures d'expertise nécessaires. Il faut les moyens de la nation pour cela. Or, le niveau de décision doit correspondre au niveau d'analyse.

Prétendre que la démocratie n'existerait en fait qu'au niveau communal est une conception ridicule de la démocratie.

M. Yves Cochet - Pas du tout !

M. Daniel Garrigue - Autant dire que la nation n'existe plus !

L'amendement 19, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Yves Cochet - L'amendement 20 est défendu.

M. le Rapporteur - Avis défavorable. L'article 514-1 répond déjà à ses préoccupations, et beaucoup mieux.

L'amendement 20, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Yves Le Déaut - Je voudrais simplement souligner, tout en approuvant totalement l'article 3, qu'à partir du moment où l'on crée de nouvelles servitudes et de nouveaux systèmes d'indemnisation, l'article L. 421-8 du code de l'urbanisme ne s'impose plus. L'amendement 193 propose donc de l'abroger.

M. le Rapporteur - La commission considère au contraire qu'il reste utile.

L'amendement 193, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

ART. 3 BIS

M. le Rapporteur - La commission avait adopté l'amendement 45 de suppression parce que la rédaction du Sénat restait problématique. Mais un travail de concertation a abouti, grâce à M. Le Déaut, à une rédaction plus satisfaisante. Je retire donc cet amendement.

M. Pierre Cohen - L'amendement 314 prévoit que les autorisations sont délivrées pour une durée limitée. Il sera toujours bon de refaire des études de danger, surtout compte tenu de l'évolution des connaissances. L'autorisation pourra être renouvelée pour une période de 5 à 25 ans en fonction de la dangerosité des installations.

M. le Rapporteur - Avis défavorable. Un délai si court risquerait de décourager tout investisseur de venir d'installer sur notre territoire. Le caractère pérenne de l'autorisation actuelle n'empêche absolument pas les autorités administratives d'ordonner la suspension de l'installation, voire sa fermeture.

Mme la Ministre - L'administration peut en effet toujours remettre en cause son autorisation lorsqu'il y a un changement de nature ou de destination d'une installation, un changement de ses modalités de fonctionnement ou une extension. Je suis donc opposée à la limitation de la période d'autorisation. Cette mesure est néanmoins utilisée en cas d'épuisement des sols, comme c'est le cas pour les carrières. Cette notion existe donc déjà dans la réglementation.

L'amendement 314, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Yves Le Déaut - L'amendement 525, que j'ai déposé conjointement avec le rapporteur, est le fruit du travail que nous avons fait en commission. Un grand nombre d'installations Seveso sont incluses dans le tissu urbain et il est bien sûr impossible de les supprimer d'un coup de baguette magique. L'article suivant, reprenant une proposition du projet Cochet, prévoit la création de zones vertes afin de séparer le périmètre de danger des zones d'habitation. Mais il faut travailler surtout sur les études de danger et sur la réduction du risque à la source, d'autant qu'on ne peut se satisfaire que les périmètres de danger varient, à risques identiques, selon les pays de l'Union. Pour les harmoniser, il faudra s'attacher à la cinétique et aux probabilités d'occurrence. De ce point de vue, j'ai trouvé la démonstration de M. Cochet convaincante mais imparfaite car il n'a évoqué que d'espérance mathématique. Multiplier le zéro par l'infini donne un résultat incertain... (Rires)

M. Daniel Garrigue - Ça donne zéro...

M. Jean-Yves Le Déaut - Si on est sûr du zéro (Sourires).

L'étude probabiliste ne se résume pas à la pondération des risques. Elle doit s'accompagner de mesures de prévention. Il s'agit alors d'études probabilistes de sûreté, qui permettent d'évaluer l'apport des dispositifs sur la sûreté globale de l'installation et qui tiennent compte de la probabilité de succès ou d'échec des fonctions de sûreté prévues pour limiter les conséquences des événements.

Tel est le cas dans le domaine nucléaire, où travailler sur des scenarii d'accident aboutirait à renoncer aux périmètres de protection. On a donc mis en place des lignes de défense successives et on travaille sur la sûreté passive des installation et sur des systèmes de défense en profondeur.

Compte tenu de la diversité des installations chimiques, il faut partager les connaissances au niveau européen, afin de pouvoir évaluer sur des bases statistiques suffisamment larges la fiabilité des lignes de défense successives ainsi que les conséquences des réactions des opérateurs. Il convient également d'élargir le champ des études de danger, l'organisation et les conditions de travail étant essentielles à la sûreté. En effet, 29 % des accidents industriels majeurs proviennent de défaillances des matériels et 53 % de dysfonctionnements de l'organisation.

Cet amendement essentiel vise donc à inscrire dans la loi les études de danger prévues par la directive européenne. Il se fonde sur le lien entre le risque et l'activité car les systèmes surprotégés comme le nucléaire, l'aviation civile, le rail en France, sont aussi les plus sûrs. C'est ainsi que nous avancerons vers la réduction du risque à la source.

M. le Rapporteur - Favorable.

Mme la Ministre - Sagesse.

M. Daniel Paul - Je me retrouve pleinement dans cet amendement qui répond aux interrogations sur la réduction du risque à la source. C'est à partir de là qu'on pourra avancer sur les périmètres de protection afin de préserver la vie des habitants angoissés.

Je retire l'amendement 259.

M. Yves Cochet - Je partage l'objectif visé par les auteurs de cet amendement qui est de définir les études de danger. Mais l'amendement 17 me paraît préférable car je récuse la notion de probabilité d'occurrence, tant du point de vue de la démocratie et de la sécurité des personnes que du point de vue mathématique. C'est une philosophie du risque utilitariste.

M. Jean-Yves Le Déaut - Mais non !

M. Yves Cochet - Si, car elle conduit à faire une balance entre les bénéfices et les coûts : plus on veut réduire le risque, plus la sûreté est onéreuse. On va maximiser la combinaison algébrique du bénéfice - compté comme positif - et des coûts, comptés comme négatifs. Et cela conduira à brandir la menace de la concurrence internationale pour fixer la limite acceptable.

Je retirerai donc l'amendement 17 si l'idée de probabilité d'occurrence est supprimée de l'amendement 525.

L'amendement 525, mis aux voix, est adopté.

L'article 3 bis, modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 3 BIS

M. Yves Cochet - L'amendement 206 rectifié est défendu.

L'amendement 206 rectifié, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Yves Le Déaut - Je retire l'amendement 194.

M. Yves Cochet - Je retire également l'amendement 174 rectifié.

L'amendement 382 est défendu.

L'amendement 382, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Pierre Cohen - L'amendement 394 prévoit que les zones Z1 et Z2 calculées selon la définition de l'étude de danger sont incluses dans le périmètre foncier de l'entreprise.

L'amendement 394, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. François-Michel Gonnot - L'amendement 368 est défendu.

L'amendement 368, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

ART. 4

M. Daniel Paul - Le financement prévu pour les délaissements et expropriations dans le cadre des PPRT risque de ne pas fonctionner. Nous avions déposé un amendement, déclaré irrecevable, indiquant qu'à défaut de convention, la charge serait supportée à 50 % par l'exploitant, 25 % par l'Etat, 25 % par la région. Cette dernière tire bénéfice des activités. Mais certaines collectivités n'auront pas les moyens de financer ces mesures, d'où la nécessité de faire intervenir l'Etat au titre de la solidarité. L'exploitant, bien entendu, doit être le principal contributeur. De ce fait, nous sommes opposés à la solution que proposera le rapporteur.

M. Daniel Garrigue - Le dispositif des PPRT, élément majeur du texte, garantit à la fois la protection des riverains et le développement économique et sa mise en place sera progressive. Je partage la préoccupation de M. Paul en ce qui concerne les petites communes, mais la commission a cherché par amendement à établir un meilleur équilibre financier.

Cependant, deux problèmes subsistent. D'abord, on appliquera la procédure de délaissement en cas de simple danger, celle d'expropriation en cas de danger grave. Si dans ce second cas la collectivité a la maîtrise de l'opération, dans le premier, elle revient aux propriétaires privés qui se manifestent et qui doivent obtenir une réponse dans un délai d'un an. C'est encourager à étendre fortement les zones de grave danger pour éviter que le droit de délaissement ne soit trop utilisé. Sinon, il faut allonger le délai d'un an qui, si tous les propriétaires concernés exercent ce droit, peut avoir une incidence financière importante.

D'autre part, dans le délai de quatre à cinq ans prévu pour mettre en _uvre les PPRT, les communes sont obligées de suspendre leurs projets. Ne pourrait-on, par voie de circulaire, prévoir des dispositions transitoires pour éviter de figer toute évolution pendant l'élaboration des plans?

Mme la Ministre - Je comprends les préoccupations du député-maire de Bergerac, commune où est installée un établissement de la SNPE. Je veillerai à tenir compte dans le décret de ses observations concernant le délaissement et l'expropriation. S'agissant de la période transitoire, le ministre de l'équipement a effectivement préconisé un gel qui peut gêner les communes. Je prendrai contact avec lui à ce sujet.

M. le Rapporteur - L'amendement 46 précise que les PPRT s'appliquent également aux installations nouvelles.

L'amendement 46, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Yves Le Déaut - Les matières dangereuses ne se trouvent pas seulement dans les usines à risque mais aussi dans les ports et les gares de triage. Ainsi, dans le Rhône, le site le plus dangereux n'est pas Pierre-Bénite, mais la gare de la Part-Dieu. Le PRTT doit donc également couvrir ces gares et ces ports. C'est l'objet de notre amendement 195, mais je le retire au profit de l'amendement 47 de la commission. En outre, Mme la ministre a annoncé qu'elle ferait des propositions d'ici la seconde lecture. Je rappelle également ma demande, au nom du groupe socialiste, de création d'une mission d'information sur les transports de produits dangereux.

M. Yves Cochet - L'amendement 21 prévoit que le périmètre du plan tienne compte « des scénarios d'accidents les plus graves ».

M. le Rapporteur - Défavorable.

Mme la Ministre - Défavorable. Nous avons déjà entendu le débat sur déterminisme et probabilité.

M. Yves Cochet - Il ne se limite pas à cela.

L'amendement 21, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 47, que je présente avec M. Brottes, porte sur le transport des matières dangereuses. Mais il conviendrait de le retirer pour l'améliorer pendant la navette. Je suis certain que M. Brottes serait d'accord.

Mme la Ministre - Le Gouvernement est favorable au retrait de cet amendement.

La coordination du dispositif Seveso avec les règles applicables au transport de matières dangereuses est très complexe. Avec mon collègue de Robien, nous avons pris l'initiative d'une mission conjointe de nos deux inspections. Il est proposé de créer une commission d'enquête parlementaire ou une mission d'information. J'attendrai les résultats avec intérêt.

Nous ne sommes pas mûrs pour légiférer aujourd'hui. On ne comprendrait pas qu'il y ait dissymétrie entre les zones soumises à un PPRT et les autres, alors que le transport de matières dangereuses comporte les mêmes risques partout.

Je suis sensible à la préoccupation de M. Brottes, mais il faut suivre l'avis du rapporteur.

M. Pierre Cohen - M. Brottes, qui a dû partir, m'a expliqué qu'il avait trouvé un accord avec le rapporteur pour améliorer la rédaction de l'amendement. Je ne suis pas sûr qu'il faille le retirer. Pourquoi ne pas le voter, et le modifier ensuite ?

M. Yves Cochet - Je vais tenter de simplifier mon propos, qui a pu paraître quelquefois énigmatique (Quelques exclamations).

Ce projet traite des « Seveso fixes... »

Mme la Ministre - Qu'entendez-vous par là ?

M. Yves Cochet - Ceux qui ne sont pas mobiles ! Or, l'amendement porte sur les Seveso mobiles, ceux qui se déplacent sur l'eau ou sur des roues.

Mme la Ministre - Mais cela n'existe pas, les « Seveso mobiles » !

M. Yves Cochet - Je parle de façon métaphorique. On trouve sur nos routes, sur le rail, sur mer ou sur nos fleuves des produits aussi dangereux que ceux des installations de stockage. Or l'amendement ne résout pas ce problème. Une étude réalisée il y a quelques années par un établissement public montre que si, par accident ou par malveillance, une brèche de 50 centimètres carrés s'ouvrait dans un conteneur d'ammoniaque, la bouffée toxique aurait en cinq minutes des effets létaux dans une zone de 470 mètres de diamètre et des effets nocifs dans une zone de 1 900 mètres. « En conséquence, lit-on dans cette étude, les itinéraires de transport devraient être éloignés d'au moins 300 mètres des zones d'habitation ».

Ce seraient donc des millions de personnes qui devraient être soumises à un PPRT. C'est un problème difficile, dont nous avions discuté au niveau européen. L'expression « société à risque » prend ici tout son sens. On ne sait pas comment faire, mais le problème existe.

M. le Président - Merci, Monsieur Cochet, d'avoir tenté de simplifier votre pensée, en passant du probabilisme à la métaphore. Mais il est plus que probable, voire quasi certain, que la séance de demain soir finira très tard (Sourires).

M. le Rapporteur - Je veux assurer M. Cohen de ma complète bonne foi. Je n'ai fait l'objet d'aucune pression. Je prends devant lui l'engagement de proposer une nouvelle rédaction en deuxième lecture.

M. Pierre Cohen - Je vous fais confiance.

L'amendement 47 est retiré.

M. Yves Cochet - Mon amendement 410 apporte une précision.

L'amendement 410, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Claude Darciaux - M. Garrigue a posé le problème de la période transitoire. Nous proposons par l'amendement 196 de fixer un délai de deux ans pour l'élaboration des PPRT. Les plans prévus dans la loi sur les mines de 1999 ne sont toujours pas réalisés. Cela doit nous mettre en garde.

L'amendement 196, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Yves Le Déaut - Un mot encore à ce sujet. Mes collègues Grosdidier et Liebgott ont constaté comme moi que, quatre ans après la loi sur les mines, la définition des PPR miniers n'a pas reçu le plus petit commencement d'exécution. Selon les DRIRE, l'exercice est si complexe qu'il pourrait encore durer quatre ou cinq ans, ce qui fait une période d'incertitude d'une dizaine d'années.

Prévoir un délai pour l'élaboration des PPRT nous rassurerait.

Mme la Ministre - Ce délai est dans la loi, il sera de cinq ans.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu ce matin, jeudi 6 mars, à 9 heures.

La séance est levée à 1 heure.

            Le Directeur du service
            des comptes rendus analytiques,

            François GEORGE

ORDRE DU JOUR
DU JEUDI 6 MARS 2003

A NEUF HEURES : 1ère SÉANCE PUBLIQUE

1. Discussion du projet de loi, adopté par le Sénat (n° 268), autorisant la ratification de la convention entre la République française, le Royaume d'Espagne et la Principauté d'Andorre relative à l'entrée, à la circulation, au séjour et à l'établissement de leurs ressortissants.

M. Henri SICRE, rapporteur au nom de la commission des affaires étrangères. (Rapport n° 601).

(Procédure d'examen simplifié ; art. 107 du Règlement)

2. Discussion du projet de loi, adopté par le Sénat (n° 267), autorisant la ratification de la convention entre la République française, le Royaume d'Espagne et la Principauté d'Andorre relative à la circulation et au séjour en Principauté d'Andorre des ressortissants des Etats tiers.

M. Henri SICRE, rapporteur au nom de la commission des affaires étrangères. (Rapport n° 601).

(Procédure d'examen simplifié ; art. 107 du Règlement)

3. Discussion du projet de loi, adopté par le Sénat (n° 270), autorisant la ratification de la convention de sécurité sociale entre la République française et la Principauté d'Andorre signée à Andorre-la-Vieille le 12 décembre 2000.

M. Henri SICRE, rapporteur au nom de la commission des affaires étrangères. (Rapport n° 601).

(Procédure d'examen simplifié ; art. 107 du Règlement)

4. Discussion du projet de loi, adopté par le Sénat (n° 48), autorisant la ratification d'un accord entre la République française et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord relatif à l'établissement d'une ligne de délimitation maritime entre la France et Jersey.

M. Gilbert GANTIER, rapporteur au nom de la commission des affaires étrangères. (Rapport n° 602).

(Procédure d'examen simplifié ; art. 107 du Règlement)

5. Discussion du projet de loi, adopté par le Sénat (n° 49), autorisant la ratification de l'accord relatif à la pêche dans la baie de Granville entre la République française et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord (ensemble quatre échanges de notes).

M. Gilbert GANTIER, rapporteur au nom de la commission des affaires étrangères. (Rapport n° 602).

(Procédure d'examen simplifié ; art. 107 du Règlement)

6. Discussion du projet de loi, adopté par le Sénat (n° 265), autorisant la ratification du traité entre la République française, le Royaume d'Espagne, la République d'Italie et la République portugaise portant statut de l'Eurofor.

M. Paul QUILES, rapporteur au nom de la commission des affaires étrangères. (Rapport n° 603).

(Procédure d'examen simplifié ; art. 107 du Règlement)

7. Discussion du projet de loi, adopté par le Sénat (n° 275), autorisant l'approbation de la décision des représentants des Gouvernements des Etats membres de l'Union européenne, concernant les privilèges et immunités accordés à l'Institut d'études de sécurité et au Centre satellitaire de l'Union européenne, ainsi qu'à leurs organes et aux membres de leur personnel.

M. Paul QUILES, rapporteur au nom de la commission des affaires étrangères. (Rapport n° 603).

(Procédure d'examen simplifié ; art. 107 du Règlement)

8. Discussion de la proposition de loi (n° 534) de M. Christian PHILIP relative aux privilèges et immunités de la délégation du Comité international de la Croix-Rouge en France (CICR).

M. Bruno BOURG-BROC, rapporteur au nom de la commission des affaires étrangères. (Rapport n° 636).

9. Suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat (n° 606), relatif à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages.

M. Alain VENOT, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire. (Rapport n° 635).

A QUINZE HEURES : 2ème SÉANCE PUBLIQUE

Suite à l'ordre du jour de la première séance.

A VINGT ET UNE HEURES : 3ème SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l'ordre du jour de la première séance.


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