Accueil > Archives de la XIIe législature > Les comptes rendus > Les comptes rendus analytiques (session ordinaire 2002-2003)

Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2002-2003 - 92ème jour de séance, 221ème séance

SÉANCE DU MERCREDI 28 MAI 2003

PRÉSIDENCE de M. Jean-Louis DEBRÉ

Sommaire

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT 2

ÉDUCATION NATIONALE 2

ÉDUCATION NATIONALE 3

CIADT 5

RÉFORME DES RETRAITES 5

EUROPE SPATIALE 6

LUTTE CONTRE LE TABAGISME 7

AIDE MÉDICALE D'URGENCE 7

CHANTIERS NAVALS 8

CONTRATS DE SITE 9

ENTREPRISES D'INSERTION 9

AUTISME 10

INTERCOMMUNALITÉ 11

URBANISME, HABITAT
ET CONSTRUCTION (CMP) 11

ART. 2 BIS AA 20

SAISINE POUR AVIS DE COMMISSIONS 20

ERRATUM 20

ORDRE DU JOUR DU MARDI 3 JUIN 2003 21

La séance est ouverte à quinze heures.

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

ÉDUCATION NATIONALE

M. Jacques Barrot - Monsieur le Premier ministre, nous n'avons jamais sous-estimé les difficultés de nos enseignants dans une société complexe (Protestations sur les bancs du groupe socialiste). Ils ont en charge notre jeunesse qui manque parfois des repères nécessaires.

Un député socialiste - Amen !

M. Jacques Barrot - Mais nous souhaitons que les enseignants, dont la mission est décisive pour l'avenir de la nation, ne s'enfoncent pas dans des peurs excessives et ne se replient par sur eux-mêmes. La nation ne comprendrait pas que certains d'entre eux compromettent le bon déroulement des examens, au détriment de l'avenir de notre jeunesse (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). Le ferme refus de tels débordements doit cependant s'accompagner, Monsieur le Premier ministre, d'un dialogue approfondi. Il ne s'agit certes pas de remettre en cause la démarche décentralisatrice : les lycées et collèges en ont tiré depuis vingt ans des bénéfices certains (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF). Mais il faut en discuter ouvertement les modalités, le calendrier et les garanties.

Un député socialiste - Oui, mon Père !

M. Jacques Barrot - Vous avez ouvert hier deux chantiers significatifs sur le métier et la carrière des enseignants et sur le rôle fondamental de l'éducation nationale dans la préparation de l'avenir du pays.

Pouvez-vous réaffirmer ici votre volonté d'écoute et d'ouverture à l'égard des enseignants, des personnels et de leurs représentants ? La nation a besoin que la bonne volonté de tous et l'attachement de chacun à l'avenir du pays l'emportent sur toutes les tentatives d'obstruction et d'intimidation ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. le Président - La parole est à M. le Premier ministre (Mmes et MM. les députés du groupe UMP se lèvent et applaudissent).

M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre - Nous sommes très attentifs à l'inquiétude de la communauté éducative nationale, des enseignants et de tous les personnels. C'est pour cela que j'ai organisé hier un comité interministériel sur les métiers de l'éducation, réunissant une vingtaine de ministres (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) pour évoquer les problèmes de l'éducation - c'est-à-dire ceux de la sécurité et de l'autorité, de la culture, du sport, des affaires sociales, des finances, bref ceux de toute la société. Je ne veux pas qu'on présente l'éducation comme le concentré des problèmes d'une société qui y projette sa difficulté à assumer ses mutations. Nous sommes attachés à une éducation nationale : nationale elle est, nationale elle restera ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF) Nous avons tous de la reconnaissance pour les maîtres qui nous ont façonnés (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), qui ont forgé nos personnalités. Parce que nous les respectons profondément, nos engagements doivent être respectés, l'information doit remplacer la désinformation (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF) et la vérité la rumeur ! (Mêmes mouvements)

Nous défendrons l'école maternelle française, l'une des meilleures au monde : chaque semaine, nos écoles maternelles reçoivent des délégations étrangères. Jamais il n'a été question d'affaiblir l'école maternelle, fierté de notre société et de notre République ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur plusieurs bancs du groupe UDF) Par malice ou par provocation, on parle de privatisation de l'éducation. Cela me choque : l'éducation est un service public national.

Confiés aux régions et aux départements, les lycées et les collèges ne dispensent pas pour autant une éducation régionale ou départementale ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

La majorité peut être fière...

M. François Hollande - De quoi ?

M. le Premier ministre - ...d'avoir inscrit le principe de la péréquation dans la Constitution, afin que soit respectée l'égalité territoriale ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur plusieurs bancs du groupe UDF) Aujourd'hui, on n'a, hélas, pas le même destin selon que l'on vient de tel ou tel établissement ; certains sites sont privilégiés et d'autres fragilisés. La péréquation assurera l'égalité nationale, l'égalité républicaine ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur plusieurs bancs du groupe UDF)

Vous souhaitez le dialogue, vous avez raison. Hier, à l'issue du comité interministériel, j'ai tendu la main aux forces sociales (Protestations sur les bancs du groupe socialiste ; applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF) pour leur proposer de négocier sur trois grands sujets. D'abord, sous la houlette des ministres de l'éducation nationale et de la fonction publique, les carrières, l'ensemble des métiers de l'éducation nationale.

Ensuite, je me suis engagé, s'agissant de la décentralisation, à discuter avec les partenaires sociaux avant d'adresser notre avant-projet au Conseil d'Etat, afin de tenir compte de leur avis (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

M. Bruno Le Roux - Négociez !

M. le Premier ministre - Je tiens à la décentralisation, je tiens à appliquer le rapport Mauroy (Protestations sur les bancs du groupe socialiste), à faire de la décentralisation un atout pour la France - et ce dans le dialogue et la concertation. Voilà pourquoi nous avons ouvert les discussions.

Troisième sujet : la nation et l'école. Nous ouvrons un grand débat national : les ministres discuteront avec les syndicats, avec les parlementaires...

M. François Hollande - Quand ?

M. le Premier ministre - Nous sommes prêts à engager dès vendredi ce grand débat national (« Non ! » sur les bancs du groupe socialiste) où chacun pourra s'exprimer - et non hurler ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF). Il s'agit d'écouter les uns et les autres, dans le respect (« Boniments ! » sur les bancs du groupe socialiste). A l'issue du débat, la représentation nationale débattra librement d'une loi d'orientation pour les dix années qui viennent.

J'observe la société (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), j'écoute. Quand on propose la réforme aux Français, ils hésitent, il faut les convaincre. Mais quand on leur propose l'immobilisme, ils refusent : d'où le changement de majorité du printemps dernier ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF ; protestations sur les bancs du groupe socialiste)

ÉDUCATION NATIONALE

M. Jean-Marc Ayrault - Monsieur le Premier ministre... (Interruptions sur les bancs du groupe UMP)

M. le Président - Ecoutez ce que vient de dire le Premier ministre, respectez M. Ayrault !

M. Jean-Marc Ayrault - Nous sommes à un moment de vérité (Interruptions sur les bancs du groupe UMP). Un mouvement social de grande ampleur vous interpelle : il requiert attention, respect et justice. Il attend que vous retissiez les fils de la confiance en acceptant de négocier. Nul ne veut le pire, nul ne demande l'impossible. Hélas, hier, les mots, les gestes d'apaisement tant espérés vous ont manqué (Exclamations sur les bancs du groupe UMP). Certes, vous avez souhaité le dialogue, mais quelle peut en être la portée quand les bases de la discussion sont celles qui ont été fixées unilatéralement avant le début du conflit ? Quand allez-vous commencer une vraie négociation sans préalable ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste) Comment parler de réussite de l'éducation nationale quand tant de décisions prises depuis un an, de la décentralisation imposée à la suppression des aides-éducateurs, du gel des crédits à celui des effectifs, l'ont fragilisée sans que vous envisagiez un seul instant de la reconsidérer ? Comment les enseignants peuvent-ils croire à votre sincérité quand vous leur donnez pour interlocuteur le ministre de l'intérieur ? Il est des symboles surprenants ! Vous êtes comptable de la cohésion nationale. Croyez-vous l'assurer en opposant les salariés du public et du privé, les professeurs et les parents, la France qui travaille et celle qui fait grève ? C'est un même peuple, qui se défie non de la réforme mais d'un modèle, le vôtre, qui conjugue l'incompréhension et l'intransigeance. Je redoute que vos refus n'enfantent des radicalités et ne brisent l'esprit même de réforme.

Nous aimerions que de temps en temps, vous écoutiez l'opposition (Huées sur les bancs du groupe UMP) et lui répondiez ! Nous demandons le respect ! Le courage politique ne se taille pas à coups de bras de fer, il se fonde sur la capacité à établir la confiance. Les organisations syndicales vous tendent la main. Qu'attendez-vous pour la saisir ? Tout retard est désormais une faute contre la nation (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. le Président - La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale (Huées sur les bancs du groupe socialiste, où de nombreux députés se lèvent en signe de protestation ; applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

M. Luc Ferry, ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche - Le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin a été porté au pouvoir par des élections dont j'ose espérer que personne ne conteste la légitimité (Exclamations et claquements de pupitres sur les bancs du groupe socialiste).

M. le Président - Ecoutez le ministre ! Le spectacle que vous donnez est indigne !

M. le Ministre - Vous nous invitez au dialogue, mais ce ne sera peut-être pas facile ! Pour commencer, on ne peut demander comme préalable à la discussion le retrait pur et simple de la réforme - ce n'est pas sérieux ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains) Et il ne l'est pas davantage de tenter d'obtenir par le chantage ce que l'on n'a pas obtenu par les urnes (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

Comme l'a rappelé le Premier ministre, le Gouvernement est ouvert au dialogue (Mêmes mouvements). A ce sujet, que demandent donc les personnels technique, ouvrier et de service, lorsqu'ils font part de leurs inquiétudes ? Des garanties sur les accords relatifs à la RTT, des garanties sur leurs missions et, pourquoi pas, des progrès s'agissant de leurs régimes indemnitaires. Sur tous ces sujets, et sur beaucoup d'autres, des négociations sont ouvertes ou le seront. Sortons donc de cette confrontation stérile (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF ; protestations sur les bancs du groupe socialiste).

CIADT

M. Gilles Artigues - Avant-hier, le Premier ministre a réuni un comité interministériel à l'aménagement et au développement du territoire, dans un souci de cohésion nationale et de solidarité territoriale. Nous nous réjouissons de la signature annoncée de douze contrats de site avec des bassins d'emplois en difficulté du fait de la restructuration industrielle de l'armement terrestre ou du secteur textile. Après une spirale de mauvaises nouvelles et de coups durs, c'est un bol d'oxygène qui nous est offert, notamment dans la Loire. Mais après que le gouvernement socialiste nous a habitués à tant d'annonces restées sans lendemain, nos concitoyens sont en droit d'attendre des actes. C'est pourquoi les membres du groupe UDF, et particulièrement mon collègue Rochebloine, seront attentifs aux suites données à ce CIADT. Par ailleurs, à quelle hauteur les collectivités territoriales, dont les moyens sont limités, seront-elles sollicitées ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et du groupe UMP)

M. Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire - Le CIADT du 27 mai a été exemplaire tant par l'effort consenti, qui est de 350 millions, que par son objectif : la création de 8 000 emplois, sur les sites en difficulté, d'ici à 2006. C'est à cette fin qu'a été mobilisée la solidarité nationale. Des contrats de site ont été décidés pour Lens, Angers, Longwy et Romorantin, villes touchées par des plans sociaux, ainsi que pour les bassins d'emploi textile. Ce CIADT a été exemplaire aussi en ce qu'il prévoit l'accompagnement social de la restructuration de GIAT Industries, et je salue les efforts réalisés à ce sujet par la ministre de la défense. Je le rappelle : deux emplois seront proposés à chaque salarié dont l'emploi est supprimé par GIAT Industries, dont l'un dans la défense.

S'agissant plus particulièrement du département de la Loire, des engagements précis ont été pris, comme le souhaitaient M. Clément et beaucoup de vos collègues. Ils concernent Roanne et Saint-Chamond mais aussi les infrastructures, qu'il s'agisse de l'A89, pour laquelle mandat a été donné au ministre de l'économie et à celui de l'équipement de trouver un concessionnaire, ou du projet d'autoroute A45, confié au préfet de région. Enfin, sur les 500 emplois envisagés à Cusset, 300 sont déjà trouvés (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

RÉFORME DES RETRAITES

M. Jacques Brunhes - Ma question s'adresse à M. le Premier ministre, auquel je me permets de rappeler que le respect de la démocratie parlementaire devrait le conduire à répondre aussi à l'opposition (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et du groupe socialiste).

Ce matin, le conseil des ministres a approuvé un projet portant réforme des retraites, présenté comme étant la seule solution possible. Que cela soit clair : personne ne songe à demeurer au statu quo ! Notre groupe défend depuis des semaines des propositions alternatives, qu'il a transmises hier au Gouvernement. Malgré cela, ce dernier a exclu a priori tout débat sur l'élargissement de la base des cotisations sociales (« Heureusement ! » sur les bancs du groupe UMP) ou sur l'augmentation de la taxation des profits. Une réforme des retraites autre que la vôtre, est possible ! (« Il fallait la faire ! » sur les bancs du groupe UMP) Et, en dépit de médiocres et dangereuses tentatives de dénigrement du mouvement protestataire, en dépit de tout aussi médiocres tentatives visant à opposer certains Français aux autres, votre réforme ne passe pas ! Au contraire, elle a servi de détonateur, ce qui n'a rien d'étonnant, puisque vous avez délibérément choisi la surdité et la confrontation (Protestations sur les bancs du groupe UMP). Hier encore, à propos de l'éducation nationale, vous avez pris la lourde responsabilité du blocage.

Tout peut rentrer dans l'ordre, et les grèves peuvent cesser demain (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP) mais, Monsieur le Premier ministre, la balle est dans votre camp : retirez votre projet, et ouvrez de véritables négociations (Protestations sur les bancs du groupe UMP), car c'est le seul chemin possible. Entendrez-vous enfin ? Prendrez-vous conscience de l'ampleur du mouvement ? (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et du groupe socialiste)

M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité - Le Gouvernement tient ses engagements (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). Ce matin, j'ai présenté, avec mon collègue Jean-Pierre Delevoye, un projet portant réforme des retraites qui, s'il est adopté (« Il le sera ! » sur les bancs du groupe UMP), fera de notre système de retraite le plus solidaire et le plus généreux dans toute l'Europe (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). Ce projet est l'aboutissement d'une longue concertation qui, comme vous le savez, a abouti à un accord avec certains partenaires sociaux. Comme l'a souligné le Président de la République, l'accord a permis d'améliorer le projet, notamment pour ce qui concerne la retraite des salariés les plus modestes.

Pour autant, l'approbation du conseil des ministres ne clôt pas le débat, puisque nous allons aborder la discussion parlementaire. Elle permettra que les positions se confrontent, que les chiffres soient explicités et que se révèlent les fragilités des prétendues propositions alternatives.

J'ai pris connaissance des propositions que le parti communiste m'a adressées hier - et je l'en remercie, car ce parti, au moins, a proposé quelque chose ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) Je n'ai pu les examiner qu' « à chaud » mais j'ai constaté qu'elles reposent essentiellement sur l'augmentation massive des prélèvements obligatoires et une taxation indexée sur l'évolution des marchés boursiers. Or, le Gouvernement estime la première dangereuse pour l'économie et pour l'emploi. Quant à la seconde, elle doit être appréciée en gardant à l'esprit que les trente premiers groupes français ont affiché un résultat négatif en 2001, et que l'assiette taxable des dividendes des sociétés cotées est inférieure à 1 % du PIB... Cela montre la faiblesse de vos propositions. Cela étant, le débat parlementaire va s'engager et je m'en réjouis, car chacun devra prendre ses responsabilités (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

EUROPE SPATIALE

M. Christian Cabal - Les négociations relatives à l'Europe spatiale se sont déroulées dans un contexte difficile : situation économique pour le moins délicate, industrie spatiale européenne sinistrée, hégémonie américaine dominatrice... Le succès remporté par Mme Haigneré est d'autant plus éclatant. Non seulement le projet Galileo est-il officiellement lancé, comme l'avait annoncé Mme Alliot-Marie, mais tous les dossiers présentés par la ministre déléguée à la recherche ont été acceptés et seront financés par l'Union européenne.

On le constate une fois encore : le Général de Gaulle avait eu une vision prémonitoire dans ce domaine de l'espace. Quant au Gouvernement, il a fait la preuve de son efficacité. Comment va s'organiser la nouvelle politique spatiale européenne ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF)

Mme Claudie Haigneré, ministre déléguée à la recherche et aux nouvelles technologies - C'est vrai que les derniers jours ont été un moment fort pour l'Europe spatiale. Les réunions ont été longues et difficiles, mais constructives, et la France a joué un rôle moteur. Plusieurs étapes ont été franchies. Après l'engagement pris par la France en avril dernier, nos partenaires européens se sont associés à l'ambition de garantir l'accès à l'espace et l'indépendance de l'Europe et de promouvoir une vision tournée vers l'avenir.

Premier succès, un accord a été définitivement conclu sur le projet Galileo, qui est un programme stratégique pour l'Europe car il offre une alternative au GPS américain pour la navigation par satellite. La réunion d'hier, qui a porté principalement sur les lanceurs, a permis d'atteindre un accord sur trois points : consolider Ariane 5, établir un programme économique d'avenir et ouvrir le centre spatial à la Russie. Parallèlement une restructuration de l'industrie spatiale européenne sera opérée pour garantir sa pérennité.

Enfin l'Union européenne et l'Agence spatiale européenne se sont mises d'accord pour renforcer leur collaboration. Pour la France, l'enjeu est économique, certes, car les retombées industrielles sont importantes, mais aussi stratégiques. Je suis heureuse que l'ensemble des Etats européens partagent maintenant notre vision ambitieuse (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

LUTTE CONTRE LE TABAGISME

M. Dominique Le Mèner - A l'approche de la journée mondiale sans tabac, samedi prochain, je voudrais interroger le ministre de la santé sur la lutte contre le tabagisme.

En mars dernier, le Président de la République a présenté un plan de lutte contre le cancer, qui se fixait notamment pour objectif de réduire fortement la consommation de tabac chez les adultes et plus encore chez les jeunes. Le tabagisme est à l'origine de 12 % des décès, dont la moitié par cancer.

La lutte contre ce fléau passe par plusieurs types d'action : sensibilisation de l'opinion publique, soutien aux personnes souhaitant s'arrêter de fumer, aides aux associations et à la recherche.

La situation actuelle est inquiétante : le pourcentage de fumeurs atteint 53 % chez les 15-24 ans : c'est le taux le plus élevé d'Europe !

Les pouvoirs publics sont décidés à lancer un vrai plan d'action, tout en s'efforçant de préserver un équilibre difficile avec les intérêts économiques. Vous avez présenté hier ce plan à la presse. Pourriez-vous en préciser les modalités ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées - Le tabac tue ! (« Et Raffarin est son complice ! » sur les bancs du groupe socialiste) Il tue par cancer, par maladies respiratoires, par accidents vasculaires et cérébraux. Et le tabagisme passif est une atteinte à la liberté de chacun.

Le Gouvernement s'est engagé à mener une action énergique contre le tabagisme. L'un des volets de cette action est d'inciter à ne pas fumer et le meilleur outil, c'est la hausse des droits proportionnels.

M. Maxime Gremetz - Hypocrisie !

M. le Ministre - Autres moyens d'action en ce sens, les mesures prévues dans la future loi sur la santé publique et le respect des dispositions de la loi Evin interdisant de fumer dans les lieux publics.

Je recevrai demain les représentants des buralistes pour examiner leurs préoccupations.

Second volet de la lutte contre le tabagisme, les incitations à arrêter de fumer. Nous avons procédé à une évaluation de l'efficacité des substituts à la nicotine, en vue d'un éventuel remboursement par l'assurance-maladie.

M. Maxime Gremetz - Enfin !

M. le Ministre - Enfin, la France a contribué à la signature de la convention-cadre de l'OMS (Quelques applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

AIDE MÉDICALE D'URGENCE

Mme Hélène Mignon - Monsieur le Premier ministre, en refusant de répondre vous-même au président du groupe socialiste, vous avez manifesté votre mépris de l'opposition (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste) et recherché l'affrontement au lieu de l'apaisement.

Les fortes réactions des associations à votre projet d'exiger le paiement du ticket modérateur pour l'aide médicale d'urgence vous avaient conduit, croyait-on, à renoncer à réaliser cette réforme.

En réalité, vous avez fait le dos rond pendant quelques semaines et voilà maintenant que vous publiez une circulaire détaillant sur vingt pages la procédure à suivre pour attribuer cette aide médicale d'urgence ! Vous qui prônez la simplification, vous faites tout pour empêcher l'accès à cette aide. Pour éviter quelques fraudes - il y en a, c'est vrai - on met en place un parcours du combattant pour les malades et on transforme les assistantes sociales en enquêteurs.

Certes, les dépenses d'aide médicale d'urgence sont en augmentation, mais elles ne représentent que 0,17 % des dépenses de l'assurance-maladie. Est-ce par ce texte à relents xénophobes que vous allez résoudre les problèmes financiers de la sécurité sociale ? Et avez-vous examiné les conséquences d'une telle mesure sur la santé publique ? Abandonnez ce projet ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

Mme Dominique Versini, secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion - S'il y a un domaine où il faut éviter la caricature, c'est bien celui-là.

Je me suis rendue, à votre invitation, au groupe d'études Quart Monde, que vous présidez, pour y expliquer les mesures concernant l'aide médicale d'Etat - l'intérêt n'était d'ailleurs pas manifeste puisque vous n'étiez que deux !

Le dispositif actuel a été créé sous la précédente majorité, mais si vous aviez voulu le rendre indiscutable, vous auriez pris les décrets d'application, ce que vous n'avez pas fait...

L'aide médicale d'Etat vise à permettre l'accès aux soins aux personnes sans ressources. Or c'est actuellement le seul dispositif d'aide sociale qui ne soit pas encadré : aucun contrôle n'a été mis en place.

Le Premier ministre a pris une décision responsable en préservant l'accès aux soins pour tous et en appliquant les mêmes règles à tous. Est-ce choquant ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) Et je ne vous permets pas de dire qu'il s'agirait d'un texte xénophobe ! (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste ; applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

CHANTIERS NAVALS

M. Michel Hunault - La Commission européenne a présenté un rapport sur l'état de la construction navale dans le monde et devrait prochainement se pencher sur la situation des chantiers de la Corée du Sud (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste). Les chantiers de l'Atlantique subissent de leur part une concurrence déloyale. A l'heure où Gaz de France vient de lancer un appel d'offres pour la construction de deux méthaniers, que compte faire le Gouvernement pour soutenir l'activité des chantiers de l'Atlantique ? (Quelques applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie - L'entreprise « Chantiers de l'Atlantique » est une magnifique réussite industrielle française. Elle se heurte malheureusement à quelques difficultés du fait de la chute des commandes et du dumping agressif de la Corée du sud. Je regrette, à ce sujet, que le gouvernement précédent se soit systématiquement opposé à l'adoption par l'Union européenne d'un mécanisme d'aide temporaire (Interruptions sur divers bancs). Aujourd'hui, nul n'en conteste la nécessité.

J'ai demandé, pour ma part, que le dispositif soit étendu aux méthaniers et qu'une procédure contentieuse soit engagée devant l'OMC contre la Corée.

Ces demandes ont été vigoureusement relayées par mes collègues allemands, espagnols et portugais ; j'y vois l'amorce de la politique industrielle européenne que j'appelle de mes v_ux. Pour sa part, la Commission m'a assurée qu'elle serait extrêmement diligente. Nous y veillerons. Vous-même contribuerez au suivi de cet important dossier dans le cadre de la mission qui vous a été confiée par le Premier ministre, auprès de Mme Lenoir.

Je crois que nous pouvons donc être confiants dans la capacité de Chantiers de l'Atlantique de retrouver un carnet de commandes important, notamment dans le secteur des méthaniers où l'entreprise a su montrer ses aptitudes à innover (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

CONTRATS DE SITE

M. Patrice Martin-Lalande - Le Gouvernement vient de prendre des mesures conséquentes pour les sites les plus sinistrés en matière d'emploi, mesures qui visent à créer d'ici 2006 7 à 8 000 emplois. A Romorantin, après le naufrage de Matra-Automobile, l'objectif est de recréer 1 500 emplois en trois ans.

Nous constatons avec satisfaction que, pour le contrat de site de Romorantin-Salbris, l'ensemble des actions représente un effort financier global de 26 millions d'euros, dont 6,5 millions en crédits d'Etat et 3 en crédits européens.

Le contrat de site n'est pas un remède-miracle, mais il est le meilleur moyen de réussir la revitalisation de ces territoires, car il engage l'Etat et toutes les collectivités sur une stratégie cohérente et sur l'utilisation la plus efficace possible des moyens financiers.

Le Gouvernement peut-il nous confirmer que les crédits annoncés sur trois ans seront protégés des aléas budgétaires ? Que les entreprises qui ont causé ces sinistres - je vise par exemple Matra-Auto, le groupe Lagardère et Renault - seront bien contraintes à contribuer le plus possible à cette revitalisation, sans se limiter au plancher de l'article 118 de la loi de modernisation sociale ? Enfin, que sera étudié le cas des communes qui perdent une trop lourde part de taxe professionnelle ? Romorantin va perdre 72 % de sa taxe professionnelle, le quart de son budget. Il faut, dans ces cas très exceptionnels, mettre en _uvre une compensation exceptionnelle sur cinq ans (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire - Trois questions, trois réponses.

Le contrat de site de Romorantin s'élève à 26 millions. Mandat a été donné au préfet et l'Etat respectera ses engagements.

La responsabilité des entreprises est bel et bien impliquée. Une convention de redynamisation a été passée avec Matra et un décret sera pris prochainement.

Enfin, la péréquation est désormais inscrite dans la Constitution et nous sommes en train de réfléchir, M. Devedjian et moi-même, à un décalage de la compensation pour les communes ayant perdu beaucoup en taxe professionnelle (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. le Président - Merci de votre brièveté, Monsieur le ministre.

ENTREPRISES D'INSERTION

M. Germinal Peiro - Monsieur le Premier ministre, le simple respect de la démocratie voudrait que les députés de l'opposition soient traités avec les mêmes égards que ceux de la majorité et non avec mépris (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste ; exclamations sur les bancs du groupe UMP).

Depuis de nombreuses années, les entreprises d'insertion par l'activité économique réalisent un travail remarquable. Par des contrats de droit commun, elles permettent à des dizaines de milliers d'exclus d'accéder au monde du travail et, grâce au sas de transition qu'elles constituent, d'intégrer la sphère économique et de retrouver une place dans la société. Tout le monde s'accorde à reconnaître qu'elles jouent un rôle essentiel tant sur le plan social que dans le cadre de la lutte contre le chômage.

Pourtant, en gelant le report des crédits de 2002, votre gouvernement vient de mettre leur existence en péril. Plus de 900 d'entre elles risquent la cessation de paiement et sont au bord du dépôt de bilan. Plus de 30 000 personnes risquent de ce fait d'aller grossir le nombre des chômeurs.

Avec l'abandon de la réduction du temps de travail, la suppression des emplois-jeunes, la suppression des bourses emploi des moins de 25 ans prévues par le programme Trace, avec enfin votre politique fiscale en faveur des plus aisés, vous menez depuis un an une politique qui pénalise l'emploi (Protestations sur les bancs du groupe UMP).

M. le Président - Posez votre question !

M. Germinal Peiro - Allez-vous rétablir les aides en faveur des entreprises d'insertion et engager enfin une politique résolue et efficace contre le chômage ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

Mme Dominique Versini, secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion - Tout d'abord, croyez bien que les entreprises d'insertion par l'activité économique sont au c_ur des priorités du Gouvernement (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). Nous sommes évidemment conscients des difficultés qu'elles connaissent depuis de nombreuses années. Ces difficultés tiennent en particulier aux modalités de financement des aides qui leur sont versées. Vous n'aviez pas résolu cette question (Protestations sur les bancs du groupe socialiste). Pour notre part, nous étudions la possibilité d'un paiement mensuel des aides, comme le demandent les entreprises concernées. Un nouveau dispositif sera mis en place dès le 1er janvier 2004.

Concernant d'autre part les réserves de précaution, si l'objectif du Gouvernement est de maîtriser les dépenses de 2003, il entend pour autant tenir les engagements de l'Etat vis-à-vis des entreprises d'insertion. C'est pourquoi nous travaillons à un dispositif permettant de régler ce problème. Les entreprises d'insertion et vous-mêmes serez bien entendu informés dans les meilleurs délais (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

AUTISME

M. Jean-François Chossy - Madame la Secrétaire d'Etat aux personnes handicapées, au cours des journées de l'autisme qui se sont déroulées le week-end dernier, vous avez été sensibilisée à nouveau aux difficultés énormes que rencontrent les familles et au combat permanent qu'elles mènent pour assurer une prise en charge de leur enfant et vous avez constaté le manque cruel de places en établissements ainsi que la faible capacité d'accueil en milieu scolaire ordinaire.

Certes, depuis la circulaire de Mme Veil, bien des choses ont évolué. Mais beaucoup reste à faire pour améliorer la prise en charge de ce type de handicap. Quelles sont vos intentions à ce sujet ?

Le repérage précoce des troubles autistiques ouvre la perspective d'une prise en charge adaptée et spécifique à un âge où certains processus du développement peuvent encore être modifiés. Il faudrait donc que tous les accompagnants - pédiatres, médecins généralistes, éducateurs, enseignants et bien sûr les familles - soient largement informés et formés sur toutes les conséquences et spécificités des syndromes autistiques. Il faudrait aussi que des centres de diagnostic précoce soient ouverts en nombre suffisant, à l'instar de ceux qui fonctionnent à Toulouse ou à Saint-Etienne. Que comptez-vous faire ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées - Mon ambition pour toutes les personnes handicapées, et donc pour les autistes, est qu'elles trouvent leur place dans la société, afin qu'elles donnent le meilleur d'elles-mêmes et s'épanouissent.

Dans le cas de l'autisme, il ne s'agit pas de nier le handicap mais de le contenir. Cela passe par un diagnostic précoce, mais celui-ci est difficile car l'on n'arrive pas à se mettre d'accord sur les critères. Une conférence de consensus sera donc organisée à ce sujet en 2004. Ses conclusions serviront notamment à la formation des professionnels.

Au-delà du diagnostic, il y a l'information et l'accompagnement des familles. Pour cela, nous avons besoin de plus de centres ressources : il y en a actuellement quatre, nous allons en ouvrir trois autres.

Et surtout, il y a la prise en charge des enfants, différenciée selon le degré et le type d'autisme. Elle peut passer par l'intégration en milieu scolaire ou par un accueil en établissement dès le départ. Dans tous les cas de figure, les réponses restent insuffisantes, malgré les efforts importants consentis cette année, notamment en ce qui concerne les auxiliaires de vie scolaire. Nos efforts devront donc s'amplifier.

Enfin, il nous faut optimiser les moyens dont nous disposons. J'organise à ce sujet, le 11 juin, une rencontre avec les parents, les professionnels et les associations. Nous mettrons alors ensemble au point un certain nombre de dispositions (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

INTERCOMMUNALITÉ

M. Yves Deniaud - Monsieur le ministre délégué aux libertés locales, on estime que dans deux ans la totalité des 36 000 communes de France seront regroupées en intercommunalité. Il importe donc, dans les lois de décentralisation qui s'annoncent, que le Gouvernement prenne en compte cet échelon, sans doute le plus porteur car celui qui correspond aux équipements structurants.

Une simplification et une clarification sont nécessaires car les élus locaux ont parfois un peu de mal à utiliser cet outil. Que compte faire le Gouvernement en ce sens ?

Par ailleurs, les élus s'interrogent sur le devenir des incitations financières, une fois que tout le territoire sera couvert. Quel est donc le projet du Gouvernement concernant l'intercommunalité ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Hervé Mariton - Subsidiarité !

M. Patrick Devedjian, ministre délégué aux libertés locales - L'intercommunalité est un grand succès - qu'a permis la loi de 1999, je n'ai aucune gêne à le reconnaître - puisque 30 000 communes sur 36 000 sont désormais réunies en intercommunalité et que la formule attire 3 000 nouvelles communes par an.

Le Gouvernement a pris en compte le phénomène par deux dispositions constitutionnelles : c'est ainsi que l'intercommunalité peut désormais bénéficier de l'expérimentation et du concept de chef de file.

Nous travaillons maintenant sur des dispositions financières et de simplification structurelle. Dans le cadre de la réforme de la DGF, nous voudrions réorganiser le système des dotations, favoriser la pérennité des financements et améliorer le dispositif de solidarité au sein même de l'intercommunalité. Dans ce domaine, le Gouvernement a retenu la piste des fonds de concours.

Pour ce qui est de la simplification structurelle, nous entendons autoriser les syndicats intercommunaux à se transformer en communautés de communes et permettre à ces dernières de fusionner entre elles.

Telles sont les pistes sur lesquelles nous travaillons (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

La séance, suspendue à 16 heures, est reprise à 16 heures 15 sous la présidence de M. Salles.

PRÉSIDENCE de M. Rudy SALLES

vice-président

URBANISME, HABITAT ET CONSTRUCTION (CMP)

M. le Président - J'ai reçu de M. le Premier ministre une lettre soumettant à l'approbation de l'Assemblée le texte de la commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant diverses dispositions relatives à l'urbanisme, à l'habitat et à la construction.

En conséquence, l'ordre du jour appelle la discussion du texte de la commission mixte paritaire.

M. Jean Proriol, rapporteur de la commission mixte paritaire - Ce projet, dont la version initiale ne comportait qu'une vingtaine d'articles, a été considérablement enrichi par nos travaux. Des esprits chagrins reprocheront peut-être à la représentation nationale d'avoir gonflé le texte, mais on ne saurait vilipender les effets du parlementarisme rationalisé et appeler à renforcer le rôle du Parlement tout en déplorant que nous usions de nos prérogatives ! L'initiative appartient prioritairement au Gouvernement, mais le Parlement ne vote pas seulement la loi : il délibère et il la façonne.

Je sais gré au ministre et à son cabinet de leur écoute et de leur disponibilité. Ce texte est ainsi issu d'une étroite collaboration entre le Gouvernement et le Parlement. Mais je tiens également à remercier Mmes les administratrices de la commission, qui ont su nous guider dans les méandres des codes.

Nous avons parfois poussé le Gouvernement à prendre des voies de traverse, en particulier lorsqu'il s'est agi de la montagne ! Mais, en retour, nous avons aussi écouté la voix de la sagesse gouvernementale et ce travail en commun a permis de surmonter les divergences et d'aboutir à des dispositions applicables, privilégiant l'intérêt général : ainsi en ce qui concerne la constructibilité en montagne ou le renouvellement urbain au voisinage des aéroports. Nous avons pu de la sorte atteindre les deux principaux objectifs de ce projet : assurer la sécurité des constructions - en particulier des ascenseurs - et conjurer la crise du logement.

La réforme proposée visait avant tout à desserrer les contraintes de la loi SRU, comme s'y était engagé le Premier ministre dès sa déclaration de politique générale. C'est ainsi que l'application de la règle des 15 km, qui incite fortement les communes à élaborer un SCOT au risque de bloquer leur expansion, est désormais limitée à celles qui sont situées à 15 km du rivage ou d'une agglomération de plus de 50 000 habitants, au lieu de 15 000 auparavant. C'est ainsi encore que nous avons assoupli le système de participation, qui permet à une commune de partager avec les propriétaires de terrains la charge de l'aménagement des voiries rendues constructibles.

M. François Sauvadet - Très bien !

M. le Rapporteur - Cette participation, qui a la nature d'un impôt, concernera en effet aussi bien les voiries existantes que celles qui doivent être aménagées pour l'extension d'un réseau ou les voiries nouvelles. A cet effet, la dénomination « participation pour voirie et réseaux » a été substituée à celle, plus ambiguë, de « participation pour voiries nouvelles et réseaux ». Nous avons également précisé que cette participation peut financer, outre les travaux obligatoires pour la délivrance d'un permis de construire, les éléments nécessaires pour le passage d'un réseau de télécommunication. De même, afin d'autoriser des aménagements individuels sans imposer cette participation, le projet instaure un régime dérogatoire en faveur des communes dans lesquelles n'est délivré qu'un faible nombre de permis de construire.

A cela s'ajoutent d'importantes clarifications du droit commun. Elles concernent notamment les dispositions transitoires entre POS et PLU et la transformation des PLU - la procédure la plus contraignante devenant l'exception et non la règle. Dans cet esprit, la « révision d'urgence » devient « révision simplifiée » et le projet d'aménagement et de développement durable - PADD - cesse d'être opposable aux permis de construire.

Cette volonté d'assouplissement nous a également conduits à nous atteler à la réforme de l'intercommunalité : le régime des pays retrouve sa vertu initiale, grâce au Président Ollier, et le conseil de développement s'organise librement ; le pays doit respecter les limites des EPCI à fiscalité propre ; les périmètres sont soumis pour avis au conseil général et au conseil régional, le préfet jouant le rôle d'un notaire, vérifiant que le pays peut être formé et en publiant le périmètre.

S'agissant des ascenseurs, les propriétaires ont l'obligation de réaliser dans les 15 ans les travaux de mise en sécurité, de conclure un contrat d'entretien et d'assurer un contrôle technique périodique.

Enfin, le nouveau dispositif « de Robien » réforme l'amortissement fiscal en cas d'investissement locatif de manière à relancer l'offre. L'investisseur qui s'engage à louer son bien pendant neuf ans bénéficie d'une déduction de 8 % les cinq premières années, puis de 2,5 % les quatre années suivantes.

Nous avons voulu un texte équilibré, refusant de suivre les sénateurs qui voulaient revenir sur la création des SCOT. Nous avons permis aux maires de fixer une taille minimale des terrains constructibles, mais en encadrant cette faculté.

Le texte qui vous est aujourd'hui soumis et qui est issu d'un accord entre les deux assemblées, a pleinement bénéficié de la navette. Les sénateurs ayant choisi de s'intéresser aux difficultés des zones de montagne, nous avons souhaité aller plus loin en nous attaquant aux règles de constructibilité. Forte d'une concertation préalable avec mes collègues rapporteurs du Sénat, la commission mixte paritaire s'est déroulée dans un climat serein, sans grandes divergences de fond. Ainsi, le principe général de la constructibilité en continuité a été maintenu mais les critères ont été précisés : nous avons introduit les notions de « groupes de constructions » et de « groupes d'habitations », ces groupes étant plus réduits que les « hameaux ». La double possibilité de dérogation, pour adaptation et pour changement de destination, est également maintenue.

D'autres dérogations ont été introduites à l'article 5 bis DAA afin de permettre, dans trois cas précis, une urbanisation en discontinuité.

Cependant, les assouplissements ne sont pas tout : il faut maintenant faire _uvre de pédagogie auprès des élus, mais aussi auprès des services de l'Etat, afin de faire prévaloir l'interprétation du législateur et de mettre ainsi fin à l'hypertrophie des contentieux. Mais je ne doute pas que les engagements pris seront tenus ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Patrick Ollier, vice-président de la commission mixte paritaire - Je me réjouis sincèrement de la collaboration qui a prévalu entre les deux assemblées, mais aussi entre elles et le Gouvernement. Ce partenariat a permis, non seulement de grossir ce texte qui, à l'origine, ne s'intéressait qu'aux ascenseurs, mais aussi de résoudre nombre de problèmes. Les maîtres mots de ce projet sont ainsi devenus : assouplir et simplifier. Par exemple, les fameux SCOT, grâce au rapporteur, ont été considérablement simplifiés cependant que les PADD seront désormais aux PLU ce que le débat d'orientation budgétaire est au budget d'une ville : un document indicatif, et non plus contraignant.

Nous avons également rétabli l'exigence d'une taille minimale pour construire sur une parcelle d'une ville et nous avons mis fin à la division parcellaire, moyen astucieux introduit dans la loi SRU pour « sur-densifier » certaines zones contre la volonté des maires.

L'ancien président des élus de la montagne se réjouit également de l'assouplissement des règles de constructibilité, acquis grâce à l'introduction de la notion de « groupes ». Désormais, le juge n'aura plus à faire la loi et nous le devons pour beaucoup à l'extraordinaire travail accompli par le rapporteur.

La loi Voynet avait complètement bloqué la mise en place des pays par des contraintes supplémentaires. J'ai souhaité supprimer ces dispositions pour encourager l'émergence des pays, qui seront particulièrement bénéfiques pour le développement en zone rurale.

Un mot sur les éoliennes.

M. le Rapporteur - Je vous les ai laissées !

M. le Vice-Président de la CMP - Je suis en effet très attentif à ce que leur implantation soit réglementée. On ne peut pas, sous prétexte de favoriser les énergies renouvelables, sacrifier la qualité des paysages !

M. François Sauvadet - Très bien !

M. le Vice-Président de la CMP - Le permis de construire, l'étude d'impact et l'enquête publique que nous avons imposés permettront d'appréhender le risque de nuisance des éoliennes.

M. François Sauvadet - Et les effets d'aubaine !

M. le Vice-Président de la CMP - Je ne suis pas contre les éoliennes, mais les élus doivent pouvoir décider en toute connaissance de cause.

Que de chemin parcouru donc, Monsieur le ministre, entre le projet initial sur les ascenseurs et ce texte cohérent, qui permet de rattraper beaucoup de temps perdu ! J'en remercie le rapporteur, les commissaires, qui ont toujours été présents, qu'ils soient de la majorité ou de l'opposition, et les administrateurs de la commission. J'en remercie également MM. Bussereau et de Robien, qui ont toujours été ouverts à nos propositions et avec lesquels nous avons conduit un véritable travail en partenariat. Ce débat honore le Parlement, qui a su faire entendre sa voix, et je serais ravi que nous y mettions un terme en adoptant le texte de la CMP (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat aux transports et à la mer - Je vous prie tout d'abord d'excuser l'absence de Gilles de Robien, qui se trouve en Normandie, où il aura d'ailleurs l'occasion d'exposer les nombreuses avancées de ce projet. Il est en effet très attentif à ce que la réforme que vous allez voter soit comprise et acceptée au c_ur de nos régions. En son nom, je souhaite remercier l'Assemblée pour la qualité du travail qui a été accompli sur tous ses bancs, qui a permis d'améliorer le texte initial, et pour la sérénité et la courtoisie qu'elle a su maintenir au-delà des clivages politiques. Je salue tout particulièrement M. le président Ollier et Jean Proriol, qui fut comme à son habitude un rapporteur tenace et travailleur.

Le travail et la capacité d'écoute des membres de la commission ont permis d'aboutir à des compromis de qualité sur des sujets aussi importants que la loi montagne ou la participation pour voiries et réseaux, indispensable au développement des collectivités rurales. De nouvelles dispositions doivent également assurer la sécurité dans les ascenseurs. Enfin, une disposition essentielle, à laquelle j'espère que le nom de M. de Robien restera associé, permettra de relancer l'investissement locatif privé sur tout le territoire, y compris dans les grandes agglomérations, où la crise du logement se fait le plus sentir. Le Gouvernement présentera deux amendements purement rédactionnels concernant le décomptes des alinéas.

Une fois voté, il nous reviendra de faire vivre ce texte. Gilles de Robien a décidé d'assurer un véritable « service après vote » sur l'ensemble du territoire, pour présenter ces réformes fondamentales aux élus locaux afin qu'ils puissent utiliser les nouveaux outils qu'ils ont à leur disposition. Le 11 juin, il réunira les directeurs départementaux de l'équipement pour leur présenter cette loi et leur transmettre ses consignes, afin que les élus soient en relation avec des cadres de l'Etat parfaitement informés. Je puis vous assurer que le Gouvernement s'attachera à prendre les décrets d'application très rapidement, en particulier celui concernant la sécurité dans les ascenseurs (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

Mme Janine Jambu - Parvenus au terme de l'examen de ce texte, nous ne pouvons que constater que nos craintes quant aux objectifs que vous poursuivez étaient justifiées. Les dispositions diverses sont devenues un dispositif cohérent marqué par la philosophie libérale et la primauté de la loi du marché. Cette même logique s'exprime également à propos de la protection sociale et des retraites, et nous savons le rejet qu'elle entraîne.

Vos dispositions répondent-elles aux besoins de nos concitoyens, dans le souci de favoriser un développement équilibré du territoire ? Il semble plutôt s'agir de casser le plus vite possible les efforts de cohérence entrepris par la loi SRU, qui n'aura connu qu'une esquisse d'application.

M. le Vice-Président de la CMP - C'est préférable !

Mme Janine Jambu - Tout le volet sur l'évaluation des besoins en matière de développement, d'aménagement de l'espace ou d'équilibre social est balayé, ouvrant la voie à la relance d'un développement anarchique des zones urbaines et périurbaines. La voix des citoyens n'est toujours pas entendue pour l'élaboration des projets qui les concernent.

L'empressement mis à saper le volet urbanisme de la loi SRU laisse augurer du sort du dispositif sur la construction sociale. La remise en cause frontale tentée au Sénat n'est pas oubliée, mais seulement différée. Vous avez dit à plusieurs reprises, Monsieur le ministre, que la contractualisation et la souplesse doivent prévaloir sur la contrainte. Est-ce à dire qu'une réelle mixité sociale, le droit de chacun à accéder au logement de son choix sont des contraintes ? Que devient alors l'Etat, garant de la solidarité nationale ? Car la fondation Abbé Pierre, le Haut comité pour les personnes défavorisées, les associations de locataires, les élus et les organismes sociaux soulignent tous que nous sommes au c_ur d'une gravissime crise du logement.

La flambée des loyers dans le parc privé provoque l'engorgement des logements sociaux, alors que le parc disponible est en quasi stagnation. Les délais d'attribution s'allongent. Les ménages défavorisés sont les premiers concernés, mais des milliers de jeunes salariés ou de familles monoparentales ou recomposées attendent aussi. Les chiffres annoncés par M. Borloo ne sauraient masquer la faiblesse des opérations de construction envisagées. Avant de démolir, il faut reloger des milliers de familles : où ? avec quel accueil ? Quelles communes vont-elles impliquer alors qu'aucune volonté politique ne les y incite ? Dans un contexte d'austérité, alors que des crédits sont gelés et que les collectivités ploient sous les transferts de charge, les limites risquent d'être vite atteintes. Quant à la mise aux normes des ascenseurs, avec les restrictions de crédits PALULOS et ANAH, elle nous semble compromise, sauf à faire supporter l'essentiel de la charge par les locataires et par les petits propriétaires.

Comment, au début du XXIe siècle, le droit à un logement agréable peut-il ne pas être garanti ? Aucune impulsion n'est donnée pour décoller du rythme des 30 000 nouveaux logements sociaux par an. Qui financera les 90 000 que vous avez annoncés ? En Ile-de-France, l'initiative privée représente 70 % des constructions. Cent communes concentrent à elles seules la moitié du parc social. Dans le département des Hauts-de-Seine, dont je suis l'élue, tout comme M. Ollier, les politiques immobilières perpétuent un véritable apartheid. L'essentiel de la demande est concentré sur quelques communes qui ont un héritage de patrimoine social ou ont choisi d'encourager une construction sociale moderne, formée de petites unités bien intégrées dans le tissu urbain. Dans ma seule commune de Bagneux, 1 800 demandes sont recensées.

M. le Vice-Président de la CMP - Il y en a 1 200 à Rueil !

Mme Janine Jambu - Oui, mais pour plus 80 000 habitants ! La politique immobilière des communes d'Antony, Neuilly, Courbevoie ou Boulogne est entièrement vouée à la promotion privée et fait les beaux jours des majors du bâtiment. Les logements qu'elles construisent, à plus de 22 000 francs le mètre carré ou de 7 000 francs de loyer pour un F3, sont inaccessibles à la majorité des salariés.

C'est pourtant ce secteur que vous avez choisi de favoriser en introduisant, par le biais d'un amendement déposé en deuxième lecture au Sénat, « l'amortissement de Robien » - un « Périssol » amélioré !

Les encadrements sociaux du dispositif Besson sont supprimés, le champ d'investissement étendu, et les beaux jours des cadeaux fiscaux reviennent pour les investisseurs et les professionnels qui piaffaient d'impatience.

M. Guy Geoffroy - Ils ne guériront jamais !

Mme Janine Jambu - Absolument. Ils ont d'ailleurs tôt fait de s'en réjouir. L'Information Immobilière, publication de l'UNPI, réclame en toute logique de nouveaux allégements, voire la suppression de l'impôt de solidarité sur la fortune, et donne de judicieux conseils pour obtenir une décote en investissant dans l'immobilier locatif.

Voilà qui permet de cerner à qui s'adresse ce nouveau dispositif qui, avez-vous précisé, a vocation à « donner de l'air au locatif » et « à lui permettre de remplir son office au bénéfice de la collectivité nationale ».

Le cercle des bénéficiaires sera hélas restreint.

M. le vice-président de la CMP- C'est caricatural !

Mme Janine Jambu - Mais non : je le vis tous les jours. Nous n'approuvons pas l'orientation politique que révèle cet effort fiscal sans commune mesure avec les aides publiques à la construction sociale.

Il ne s'agit pas d'oublier la dimension de la petite propriété privée, qui est déjà la structure majoritaire de logement en France, mais de savoir où faire porter l'effort pour surmonter la crise et assurer l'égalité d'accès au logement des citoyens, de faire un choix de société : celui du désengagement de l'Etat au profit du secteur marchand ou celui d'un véritable service public du logement appuyé sur un pôle public de financement.

C'est le second que nous faisons, et c'est dans cet esprit que nous aborderons les débats à venir sur la rénovation urbaine et la réforme de la politique du logement.

Dans l'immédiat, sur ce texte, notre groupe confirme son vote négatif.

M. François Sauvadet - Au nom du groupe UDF et de mes collègues Philippe Folliot, Jean Dionis du Séjour et Jean Lassalle, je remercie le Gouvernement de son écoute et de sa volonté de répondre aux préoccupations d'élus locaux confrontés, dans nos communes rurales, à des difficultés quotidiennes. Les soixante articles ajoutés au titre premier à l'initiative du Parlement, sans parler des modifications apportées aux articles initiaux, suffisent à prouver que vous l'avez entendu. Je salue aussi le remarquable travail de vos services, que je remercie ainsi que notre rapporteur, M. Proriol, dont le travail sur un sujet aussi compliqué que le droit de l'urbanisme fut sérieux et précis. Quant au président de notre commission, Patrick Ollier, il a contribué, sur les pays, à rendre de la souplesse à nos territoires. Nous sortons d'une période de fortes contraintes, de procédures très lourdes. Pour modifier le périmètre d'un pays, il fallait saisir les groupements de communes, la commission départementale de coopération intercommunale, la conférence régionale de l'aménagement et du développement du territoire, ce « machin »... Nous avons donc avancé. Le préfet constatera simplement qu'il y a une volonté de travailler ensemble. Il reste dans son rôle : acteur et représentant du Gouvernement, mais aux côtés des élus locaux. C'est en tout cas dans cet esprit que Patrick Ollier et la commission ont travaillé.

Vous n'en serez pas surpris, le groupe UDF votera ce texte. Il approuve sans réserve les conclusions de la commission mixte paritaire. Nous faisons en effet _uvre utile avec ce projet.

L'amendement du Gouvernement - complété par le Sénat - qui réforme le dispositif d'amortissement fiscal pour les investissements locatifs est une bonne mesure qui permettra de relancer la construction de logements et l'offre locative. Son extension aux logements anciens - délabrés ou insalubres - sera une réelle incitation à la rénovation, qui permettra de remédier à la pénurie de logements locatifs...

Mme Janine Jambu - Pas sûr !

M. François Sauvadet - ...et d'encourager l'accession au logement social. Ces mesures sont conformes à notre conception de la fiscalité : inciter plutôt que sanctionner, encourager l'investissement dans le logement neuf ou ancien plutôt que taxer les logements vacants comme l'envisageait le gouvernement précédent.

Nous avons aussi levé les craintes de nombre d'élus locaux, notamment des petits villages. La loi SRU a en effet eu de graves conséquences : on ne pouvait plus construire ! Nous avons assoupli le volet urbanisme et clarifié des règles en mettant un terme à une certaine insécurité juridique : règle des 15 km, documents d'urbanisme - la première partie du plan de développement n'est plus opposable - réécriture de la participation pour voies et réseaux, mesures concrètes pour sortir des difficultés liées à la loi SRU - que nous avions dénoncées en leur temps.

M. le Vice-Président de la CMP - Tout à fait ! 

M. François Sauvadet - Les élus locaux me comprendront ! Nous vous demandons de veiller à ce que les décrets d'application et les circulaires soient publiés le plus rapidement possible, afin que cette loi rebaptisée fort à propos « Urbanisme et habitat » puisse être appliquée.

Quelques amendements de l'UDF ont apporté au texte une contribution significative, tel celui de mon collègue Folliot qui permet aux communes très rurales, qui ne délivrent que rarement des permis de construire, de faire le raccordement aux réseaux par le pétitionnaire.

L'article 6 bis BA est l'exception qui confirme la règle de la participation pour voies et réseaux, formidable progrès par rapport à l'ancien dispositif qui faisait peser une réelle insécurité sur les élus locaux.

Avec mon collègue Jean Dionis du Séjour, nous avons souhaité très utilement accélérer la réhabilitation d'anciens bâtiments agricoles parfois laissés à l'abandon. Le classement en zone agricole interdisait en effet de leur donner un autre usage. Je crois que le législateur se grandit en répondant ainsi aux préoccupations concrètes de nos compatriotes. C'est une exigence éthique et morale. Comme vous le voyez, le groupe UDF a voulu _uvrer en faveur du monde rural, qui souffre souvent d'un sentiment d'abandon. Ce texte sera pour lui un signe fort. Nous pouvons nous féliciter d'avoir ainsi réconcilié mondes rural et urbain.

Nous avons enfin, mon cher président Patrick Ollier, beaucoup travaillé sur les pays. Aux pays façon Voynet fondés sur la contrainte, nous avons préféré une libre organisation en bassins de vie. Nous avons fait _uvre utile en levant les obstacles administratifs pour rendre leurs responsabilités aux élus locaux. Il faut leur faire confiance !

Le préfet publiera l'arrêté de périmètre défini par les élus locaux, sans autre formalité. L'avis de la CRADT est supprimé et c'est une bonne chose. Elu des plateaux et des vallons, abritant 344 communes dans ma circonscription - c'est, je crois, le record de France - je puis vous dire que c'est chaque semaine qu'il aurait fallu réunir le CRADT !

Nous avons également débattu des conseils de développement, pour lesquels j'avais souhaité une plus libre constitution. Nous avons abouti à une formule consensuelle qui nous donne toute satisfaction. Les élus du territoire pourront organiser comme bon leur semble ce conseil de développement. C'est heureux : pour avancer en matière d'aménagement du territoire, il faut reconnaître comme une nouvelle chance la diversité de nos territoires (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Mme Odile Saugues - Les quelques dispositions de ce projet qui restaient en discussion n'appellent pas de remarque de notre part, excepté l'article 19 ter sur lequel je reviendrai.

Nous pouvons admettre la nécessité d'un toilettage de la loi Solidarité et Renouvellement Urbain. M. de Robien a parlé de service « après-vote ».

C'est une formule que nous pouvons faire nôtre et, les excès de votre majorité contenus, nous avons fait _uvre utile sur bien des points.

Ainsi, l'essentiel de notre philosophie relative aux pays est préservé, des assouplissements, sans doute légitimes, ont été approuvés en matière d'urbanisme, et les menaces qui pesaient sur la mixité sociale dans l'habitat ont été écartées, grâce à la mobilisation des acteurs du logements et à la vigilance de l'opposition.

En matière de sécurité des ascenseurs, nous avons amélioré sensiblement le texte grâce à des dispositions clarifiant les responsabilités entre entreprises et propriétaires. Néanmoins, je regrette que vous n'ayez pas pu dégager des moyens financiers à la hauteur des enjeux.

Nous vous avions pourtant fait des propositions par analogie avec les dispositifs que le précédent gouvernement avait acceptés pour encourager la réalisation des travaux d'accessibilité pour les personnes handicapées. A l'époque, cette demande émanait de vos rangs ! Aujourd'hui, vous l'écartez ; vous savez bien, pourtant, que la réalisation de ce programme pénalisera, à terme, les locataires les plus modestes.

Plus généralement, je regrette que ce projet ait servi de prétexte à l'adoption de dispositions discutables. Je ne parle pas, bien sûr, de l'article 6 duodevicies concernant la gestion des jardins du Luxembourg... J'en devine facilement l'origine et j'y retrouve l'expression d'une vigilance connue dans nos terres d'Auvergne... (Sourires)

D'autres dispositions sont beaucoup plus contestables, dont « l'enterrement » des plans de déplacements urbains. Lors de l'examen de votre budget, déjà, nous avions tiré le signal d'alarme. Tout au long de ce débat, le Gouvernement et le rapporteur n'ont pas tenu compte de nos inquiétudes. Au mieux avons-nous eu droit à quelques contrevérités, ce que M. le rapporteur reconnaîtra aisément, je n'en doute pas.

Mais il y a plus grave. Vous avez, en seconde lecture, décidé d'utiliser ce projet pour remettre en cause le dispositif Besson destiné à relancer la construction de logements locatifs privés, et qui prévoyait à la fois des avantages fiscaux pour les investisseurs et des contreparties sociales, puisque le montant des loyers et le niveau des ressources des locataires étaient pris en compte.

Sur la forme, il ne s'agit pas, vous en conviendrez, d'une question annexe. Je suis donc assez surprise de constater que le Parlement n'a été saisi de ce sujet qu'en seconde lecture, par le biais d'un amendement gouvernemental que notre commission n'a pu examiner.

Sur le fond, nous ne rejetons pas le principe de l'adaptation des dispositifs existants : le marché de la construction de logements connaît des tensions importantes, notamment dans les grandes agglomérations, et le gouvernement de Lionel Jospin avait, en février 2002, revu les plafonds de loyer pour améliorer la situation.

Mais, au Sénat, vous avez étendu votre dispositif aux locations déléguées, au bâti ancien réhabilité et aux sociétés civiles de placement immobilier.

Ces nouvelles modifications ne sont pas sans risque si un contrôle effectif des réhabilitations effectuées n'est pas entrepris, alors que nous connaissons par ailleurs votre détermination à lutter contre les marchands de sommeil.

Nous ne pouvons approuver l'orientation dite du guichet ouvert, celle de dispositifs précédents, dont on a pu mesurer très rapidement les effets pervers et les détournements. Et ce n'est pas la présentation d'un rapport devant le Parlement dans trois ans, qui dissipera nos craintes.

Voilà les raisons qui conduisent le groupe socialiste à voter contre le texte issu des travaux de la commission mixte paritaires (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Serge Poignant - Il y avait urgence à remédier aux blocages et à l'incompréhension nés de la loi SRU votée en décembre 2000. Je me félicite donc de ce projet, qui fait _uvre utile.

Outre d'importants assouplissements des dispositions relatives à l'urbanisme, le projet comporte plusieurs articles ayant trait à la sécurité des constructions et notamment à la sécurité dans les ascenseurs ce qui est des plus opportun. Enfin, aux mesures sur la participation des employeurs à l'effort de construction et sur l'activité des HLM, se sont ajoutées d'heureuses dispositions relatives aux pays grâce au président de notre commission et à notre rapporteur. A mon tour, je me félicite de l'écoute du ministre.

En ce qui concerne l'urbanisme, je me limiterai à relever les dispositions les plus importantes : l'assouplissement de la règle de constructibilité limitée en l'absence de SCOT, la clarification du PADD dans les plans locaux d'urbanisme, l'assouplissement des procédures de révision et de modification de ces PLU ou encore l'instauration de la participation pour voies et réseaux en lieu et place de la PVNR. Désormais, les zones d'urbanisation future délimitées avant le 1er juillet 2002 pourront être ouvertes à l'urbanisation en l'absence de SCOT. De plus, la limite spatiale est assouplie puisque la règle dite « des 15 km » ne sera valide qu'autour d'une ville centre de 50 000 habitants au lieu de 15 000.

D'autre part, seront désormais distinguées les « orientations générales » qui portent sur la politique générale d'urbanisme de la commune et les « orientations d'aménagement », non contenues dans le PADD, et qui précisent les conditions d'aménagement d'un quartier ou d'une zone à urbaniser. Le règlement du PLU devra donc être conforme aux « orientations générales » formulées par le PADD et en simple cohérence avec les « orientations d'aménagement » formulées par le schéma d'aménagement. L'ambiguïté sur les rapports entre le règlement du PLU et le PADD est donc définitivement levée.

Par ailleurs, à l'initiative du président de notre commission, la CMP s'est accordée pour donner au maire la facilité de fixer un minimum parcellaire sans qu'il s'agisse uniquement d'assainissement, afin de préserver, le cas échéant, l'urbanisation traditionnelle ou les paysages, donc d'éviter une urbanisation excessive. Cette disposition est essentielle pour les communes de montagne.

Par ailleurs, dans les zones soumises à un coefficient d'occupation des sols où une partie a été détachée depuis moins de dix ans, on ne pourra construire dans la parcelle restante que dans la limite des droits qui n'ont pas encore été utilisés.

La loi SRU avait prévu une procédure uniforme, lourde et contraignante, qu'il s'agisse d'une révision complète du PLU ou d'une simple modification. Le projet précise que la procédure de modification, la plus simple, est la règle de droit commun, la procédure de révision, plus complexe étant l'exception.

Par ailleurs, s'agissant de la montagne, députés et sénateurs se sont accordés en CMP sur la constructibilité en continuité de hameaux et groupes de constructions traditionnelles.

Quant à la participation pour voies et réseaux, elle peut désormais financer des travaux et des acquisitions foncières relatives à la voirie existante. Elle peut donc être utilisée pour financer des travaux et des réseaux indispensables à la délivrance du permis de construire, mais aussi les fourreaux.

En ce qui concerne la sécurité des constructions, le projet étend opportunément le champ du contrôle obligatoire aux installations présentant un risque particulier pour la sécurité des personnes du fait de leur localisation, et précise ce que doit être la sécurité des ascenseurs.

Pour l'investissement locatif, députés et sénateurs se sont accordés sur un amendement important déposé par le Gouvernement en première lecture, qui modifie l'amortissement dit Besson.

Mme Odile Saugues - C'était en deuxième lecture seulement !

M. Serge Poignant - Le dispositif, très largement assoupli, devrait permettre la réalisation de milliers de logements supplémentaires.

Enfin, pour ce qui concerne les pays, la CMP a adopté l'amendement de Patrick Ollier visant à simplifier les procédures d'élaboration prévues par la loi Voynet de 1999. Le conseil de développement et la charte de développement demeurent, mais leur mise en place est assouplie, tout comme l'est la procédure d'établissement des périmètres.

Des mesures transitoires de bon sens sont également proposées.

S'agissant des énergies renouvelables, je mesure toute leur importance, à condition toutefois que leur développement - pour les éoliennes particulièrement - préserve le paysage.

Le groupe UMP se félicite de l'accord intervenu en CMP car il y avait urgence. Il restera à donner une plus grande cohérence à l'ensemble que constituent les trois lois Voynet-Chevènement-Gayssot, dont l'application a mis en évidence le manque d'articulation. Et puis, je regrette que nous n'ayons pas revu la rédaction de l'article 55 de la loi SRU relatif à la construction de logements sociaux...

Mme Janine Jambu - Ah ! Nous y voilà !

M. Serge Poignant - ...dont l'application a montré l'inadaptation.

Je souhaite, Monsieur le ministre, que cette question, qui préoccupe de nombreux élus locaux, soit réexaminée dans un prochain texte.

Pour l'heure, le groupe UMP votera évidemment sans hésitation, le texte issu de la CMP, et fortement attendu (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

La discussion générale est close.

M. le Président - Conformément à l'article 113, alinéa 3, du Règlement, j'appelle l'Assemblée à statuer d'abord sur les amendements dont je suis saisi.

ART. 2 BIS AA

M. le Secrétaire d'Etat - L'amendement 1 vise à réparer une erreur matérielle.

L'amendement 1, accepté par la commission, mis aux voix, est adopté.

M. le Secrétaire d'Etat - L'amendement 2 rectifié répond à un souci de coordination. Comme de nombreux articles du code de l'urbanisme font référence à l'article L 421-1, plutôt que de le modifier, nous préférons créer un nouvel article relatif aux éoliennes.

M. le Rapporteur - Avis favorable.

L'amendement 2 rectifié, mis aux voix, est adopté.

L'ensemble du projet de loi, compte tenu du texte de la CMP, mis aux voix, est adopté.

SAISINE POUR AVIS DE COMMISSIONS

M. le Président - J'informe l'Assemblée que la commission de la défense et la commission des finances ont décidé de se saisir pour avis du projet de loi portant réforme des retraites.

Prochaine séance mardi 3 juin à 9 heures 30.

La séance est levée à 17 heures 15.

            Le Directeur du service
            des comptes rendus analytiques,

            François GEORGE

-----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

ERRATUM

au compte rendu analytique de la 3ème séance du mardi 27 mai 2003.

Dans l'intervention de M. Camille de Rocca Serra, à la fin du septième alinéa, lire après les mots : « et parlementaire », « je ne nie pas nos responsabilités dans la situation actuelle » (le reste sans changement).

ORDRE DU JOUR
DU MARDI 3 JUIN 2003

A NEUF HEURES TRENTE : 1ère SÉANCE PUBLIQUE

1. Questions orales sans débat.

2. Fixation de l'ordre du jour.

A QUINZE HEURES : 2ème SÉANCE PUBLIQUE

1. Questions au Gouvernement.

2. Discussion, en deuxième lecture, du projet de loi (n° 831) habilitant le Gouvernement à simplifier le droit.

M. Etienne BLANC, rapporteur au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. (Rapport n° 871)

3. Discussion, en deuxième lecture, du projet de loi (n° 760) pour l'initiative économique.

Mme Catherine VAUTRIN et M. Gilles CARREZ, rapporteurs au nom de la commission spéciale. (Rapport n° 882).

A VINGT ET UNE HEURES TRENTE : 3ème SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l'ordre du jour de la deuxième séance.

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne trois heures après la fin de séance.

Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.

www.assemblee-nationale.fr


© Assemblée nationale