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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2002-2003 - 110ème jour de séance, 267ème séance

2ème SÉANCE DU JEUDI 26 JUIN 2003

PRÉSIDENCE de M. Jean LE GARREC

vice-président

Sommaire

      CESSATION DE MANDAT ET REMPLACEMENT D'UN DÉPUTÉ 2

      RÉFORME DES RETRAITES (suite) 2

      APRÈS L'ART. 24 (suite) 2

      ART. 25 7

      APRÈS L'ART. 25 9

      ART. 26 11

      ART. 27 18

La séance est ouverte à quinze heures trente.

CESSATION DE MANDAT
ET REMPLACEMENT D'UN DÉPUTÉ

M. le Président - J'ai reçu de M. le Premier ministre une lettre m'informant qu'il avait décidé de prolonger la mission temporaire confiée à M. Jean Besson, député de la 10e circonscription du Rhône.

Le décret prolongeant cette mission a été publié au Journal officiel du jeudi 26 juin 2003.

En conséquence, il est pris acte, d'une part, de la cessation du mandat de M. Jean Besson, d'autre part, de son remplacement par M. Christophe Guilloteau, élu en même temps que lui à cet effet.

M. Bernard Accoyer - M. Jean Besson a été un excellent député.

RÉFORME DES RETRAITES (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi portant réforme des retraites.

APRÈS L'ART. 24 (suite)

Les amendements identiques 5556 à 5562, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Bernard Accoyer, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales - L'amendement 11 218 est la reprise, sous une forme plus précise, d'un amendement adopté à l'unanimité par la commission des affaires culturelles. Il s'agit de placer les parlementaires, qu'ils viennent de la fonction publique ou du secteur privé, sur un pied d'égalité. L'article L. 75 du code des pensions civiles et militaires de retraite permet actuellement aux parlementaires fonctionnaires ayant accompli quinze années de services effectifs à la date où ils ont accepté leur mandat de demander, à l'âge de cinquante ans, la liquidation immédiate de leur pension. Nous proposons de supprimer cet article de telle sorte qu'ils rentrent dans le droit commun qui comporte une liquidation à 60 ans.

Cet amendement consensuel pourrait être cosigné par des membres de tous les groupes parlementaires. La commission des finances a adopté un amendement 23, qui est semblable mais qui ne ferait pas entrer cette mesure en vigueur aussitôt. Mieux vaut que celle-ci s'applique dès la promulgation de la présente loi, comme le précise l'amendement 11 218. Aussi serait-il souhaitable que la commission des finances puisse renoncer à cet amendement au profit du nôtre.

M. Xavier Bertrand, rapporteur pour avis de la commission des finances - Je retire l'amendement 23 et le sous-amendement 11 215.

M. Gilbert Gantier - L'amendement 7046 de M. de Courson est également retiré.

M. Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire - Le Gouvernement prend acte de ce geste - il est noble de s'appliquer à soi-même ce que l'on applique aux autres - et rend hommage à vos commissions et à l'ensemble des groupes qui ont, à l'unanimité, proposé de supprimer l'article L. 75.

M. le Président - Demandez-vous un scrutin public, Monsieur Gremetz ?

M. Maxime Gremetz - Je le demanderai éventuellement lors de mon intervention.

M. le Président - Je demande dès à présent un scrutin public sur l'amendement 11 218.

M. Denis Jacquat - Je confirme que tous les députés du groupe UMP sont prêts à cosigner cet amendement.

M. Pascal Terrasse - Je me considère, au nom de mon groupe, comme signataire de cet amendement, puisque M. Gremetz, M. Accoyer et moi-même avions déposé en commission un amendement commun. Bien évidemment, les députés socialistes sont d'accord pour soumettre au droit commun la liquidation des droits à pension des parlementaires de l'Assemblée nationale - et des parlementaires du Sénat. Les parlementaires doivent donner l'exemple.

Le 21 avril dernier a marqué un tournant dans la vie politique de notre pays et il nous faut pouvoir dire : « Oui, les parlementaires seront dorénavant traités comme les autres citoyens. » A terme, il nous faudra bien poser la question du statut du parlementaire et plus généralement de l'élu (Interruptions sur divers bancs). Nous ne devons pas donner le sentiment qu'il a des choses à cacher. Cet amendement contribuera à la transparence.

M. Maxime Gremetz - Mme Fraysse s'est exclamée quand notre collègue a dit qu'il faudrait bien un jour poser la question du statut de l'élu, et je la comprends ! Elle avait en effet travaillé avec M. Mauroy à une proposition de loi sur ce sujet, à laquelle le gouvernement de l'époque n'avait malheureusement pas donné suite.

Pour ce qui est de la suppression de l'article L. 75, il est vrai que nous avons adopté en commission un amendement commun qui avait cet objet. Nous avions d'abord eu une discussion avec les présidents de groupe et les questeurs à ce sujet et nous n'avions pas voulu prendre position. Nous nous battons en effet pour harmoniser les régimes, mais par le haut et non pas en allongeant la durée de cotisation pour tout le monde !

Au reste, nous avons déjà discuté d'un amendement identique, dans cet hémicycle, un amendement que M. Baguet avait défendu au nom de M. de Courson (Assentiment de M. Gilbert Gantier). Avec un ton critique qui n'était pas de bon aloi, M. de Courson dénonçait alors dans les médias les avantages spécifiques des parlementaires. Comme toutefois il n'était pas là pour défendre son amendement en séance, nous l'avions repris et demandé qu'il soit voté par scrutin public. Les comptes rendus peuvent en témoigner. Las, la majorité avait voté contre et si je me réjouis de son revirement, je déplore que nous soyons conduits à examiner deux fois les mêmes sujets ! Nos débats s'en trouvent retardés ! (Murmures sur les bancs du groupe UMP)

Quoi qu'il en soit, le groupe des députés communistes et républicains votera cet amendement de justice sociale et souhaite, comme Mme Fraysse l'a déjà proposé, que l'on se penche aussi sur le statut de l'élu et en particulier des femmes salariées exerçant des fonctions électives. Sinon, on pourra toujours parler de la parité mais elle n'adviendra jamais dans les faits.

Sur cet amendement important, notre groupe demande un scrutin public.

M. Gilbert Gantier - Comme le dirait M. Brard, il faut rendre à César... Reconnaissons que M. de Courson a été l'initiateur de cet amendement important.

M. le Président - C'est dit !

M. le Rapporteur - Il n'y a pas de querelle de paternité à avoir puisque cet amendement a fait l'objet d'un consensus : il émane des quatre groupes de notre assemblée.

M. Maxime Gremetz - Dans ce cas, il faut l'indiquer dans le « chapeau » de l'amendement 11 218, comme cela a été fait pour l'amendement 1164.

M. le Rapporteur - D'accord.

M. Denis Jacquat - Nous l'avons demandé officiellement.

M. le Président - Il doit être clair pour tout le monde que les quatre groupes politiques de notre assemblée soutiennent l'amendement 11 218 (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP).

A l'unanimité des 62 suffrages exprimés sur 62 votants, l'amendement 11 218 est adopté.

Les amendements 5563 à 5569 et 5570 à 5576 tombent.

M. Denis Jacquat - L'amendement 53 de M. Laffineur et l'amendement 10 986 corrigé de M. Lett sont défendus.

M. le Rapporteur - La commission n'a pas pu les accepter, bien qu'elle juge légitime la demande des enseignants du privé d'être traités à égalité avec leurs collègues de l'enseignement public. Les deux régimes sont malheureusement trop différents pour qu'on les harmonise dans le cadre de cette réforme. Les enseignants du privé relèvent du régime général, ceux du public du régime des fonctionnaires. Par ailleurs, la commission rend hommage à la qualité du travail de tous ces enseignants.

M. le Ministre de la fonction publique - Avis défavorable.

M. Pascal Terrasse - Nos collègues du groupe UDF étaient déjà montés au créneau pour que les personnels de l'enseignement professionnel sous contrat d'association - qui cotisent plus pour toucher moins - bénéficient d'un meilleur traitement. Le Gouvernement se dit en quête d'équité : qu'il le prouve en mettant fin à des disparités que rien ne justifie, dans l'enseignement ou dans le secteur hospitalier. Les maîtres du privé se sont formés. Leur qualité est aujourd'hui unanimement reconnue. J'appelle aussi l'attention du Gouvernement sur la situation critique de plusieurs caisses de retraite complémentaire.

Monsieur le ministre, éclairez-nous sur les raisons qui vous poussent à écarter ces amendements. Vous passez à côté d'une évolution attendue par nombre d'enseignants.

M. Denis Jacquat - Notre groupe est très attentif à toutes les mesures qui vont dans le sens de l'équité. Cependant, ces amendements semblent mal positionnés. Nous souhaitons que la commission des affaires culturelles - compétente pour les questions relatives à l'éducation - se saisisse du sujet qu'ils abordent.

L'amendement 53, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que l'amendement 10 986 corrigé.

M. Gilbert Gantier - L'amendement 7047 de M. de Courson - retenu cet après-midi dans sa circonscription - traite des fonctionnaires détachés. Aujourd'hui, chacun sait que le fonctionnaire détaché ne peut être affilié au régime de retraite dont relève la fonction de détachement ou acquérir des droits quelconques à pension, sous peine de voir suspendre la pension d'Etat.

Depuis plusieurs décennies, toutefois, il existe une dérogation pour les fonctions publiques électives, qui permet au fonctionnaire élu député, sénateur ou parlementaire européen de cumuler des droits à pension dans le régime de la fonction publique d'Etat, en contrepartie du versement des retenues de pension, en plus des droits à pension du régime de l'Assemblée nationale ou du Sénat.

Cette situation est anormale. Les élus de la nation se devant d'être exemplaires, ils devraient ne bénéficier que du régime parlementaire.

M. le Rapporteur - La commission n'a pas adopté cet amendement, car le problème soulevé est moins celui de la retraite que celui du détachement. Nous pourrions revoir cette question dans le cadre d'un débat plus vaste sur le statut de l'élu.

M. le Ministre de la fonction publique - Je veux d'abord répondre à M. Terrasse au sujet des enseignants du privé. Il ne lui a pas échappé qu'ils relevaient du régime général. Ainsi, garantir une stricte équité imposerait de modifier le régime général. On ne peut baisser leur taux de cotisation, car il n'est pas souhaitable d'introduire des disparités au sein du régime général. Ce problème exige donc une réflexion plus approfondie. Si M. Terrasse nous proposait de modifier le statut des enseignants du privé, nous pourrions examiner la question de manière précise.

S'agissant de l'amendement 7047, le fonctionnaire qui a occupé plusieurs emplois bénéficie en fin de carrière d'une pension unique. La loi du 11 janvier 1984 ne fait qu'interdire le cumul de deux pensions pour une même activité. Le détachement ne peut pas être à l'origine d'un tel cumul.

M. Pascal Terrasse - Cet amendement pose un vrai problème, qu'il faut en effet se poser. Il n'y a pas de raison que certains parlementaires soient dans une situation différente des autres, d'autant qu'à la fin de leur mandat, ceux qui sont issus du privé n'ont pas beaucoup d'espoirs de trouver un emploi. Un CV de député, cela se négocie mal. Plusieurs de nos collègues de la précédente législature sont dans une situation difficile.

M. Maxime Gremetz - Il y a des millions de personnes à l'ANPE !

M. Pascal Terrasse - Ce n'est pas une raison pour y envoyer tout le monde. Il faudra se poser la question du statut de l'élu. Pour ma part, je souhaite qu'on limite le nombre des mandats à un maximum de trois.

M. Denis Jacquat - Pourquoi ne l'avez-vous pas fait ?

M. Pascal Terrasse - Ce sont des questions que nous devons examiner en commun, par-delà les clivages partisans. Nous ne sommes pas faits pour être députés à vie.

Puisque nous parlons de transparence, de statut de l'élu, nous devons aller jusqu'au bout.

M. François Loncle - Je trouve, moi aussi, intéressant l'amendement présenté par M. Gantier. Mais il convient d'examiner le problème d'ensemble que constitue la situation d'iniquité entre les parlementaires issus de la fonction publique et ceux qui viennent du privé ou des professions libérales.

M. Loïc Bouvard - C'est vrai ! Très bien !

M. François Loncle - J'observe que le rapporteur et le ministre reconnaissent l'existence du problème. Encore faudrait-il que nous nous attaquions au statut de l'élu avant la fin de la législature.

M. Maxime Gremetz - Si le président Bocquet était parmi nous, il emploierait une de ses expressions favorites : « C'est le bal des faux-culs ! » (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste). C'est une expression populaire du nord de la France.

Tout le monde est pour, mais il n'y a pas de statut de l'élu et personne ne parle du cumul des mandats. Vous oubliez que les parlementaires ont en général un autre mandat : quand ils sont battus, ils ne vont donc pas à l'ANPE.

M. François Loncle - Vous n'en savez rien ! Vous n'êtes pas ici pour régler des querelles personnelles !

M. le Président - Les interpellations entre députés sont interdites par le Règlement.

M. Maxime Gremetz - On nous dit toujours qu'il faut travailler à l'élaboration d'un statut de l'élu. mais ce travail a déjà été fait par la commission Mauroy, dont les conclusions ont été approuvées par tous. On en parle toujours, mais on ne fait rien.

Nous avons l'habitude qu'on noie une demande précise dans un océan de généralités. L'amendement de M. de Courson, présenté par M. Gantier, est intéressant et je demande un scrutin public, afin que chacun se situe clairement.

M. le Rapporteur - Nous ne pouvons pas rester dans l'ambiguïté. Notre collègue Gremetz a employé des mots excessifs.

Nous ne pouvons pas modifier le régime du détachement en général, mais il est vrai que le pays s'interroge. La commission n'a pas voulu confondre la question du détachement avec celle des retraites. Mais nous voulons rétablir l'équité entre le public et le privé. Il faut aller plus loin, qu'il s'agisse des mandats parlementaires ou des autres fonctions électives.

Je crois que quand Maxime Gremetz parle d'un manque de franchise, il traduit l'impatience d'une grande partie de ceux qui suivent la vie publique en France. Alors je fais une proposition à nos collègues du groupe socialiste : déposez une proposition de loi sur le statut de l'élu qui traite de cette question ; pour ma part, je suis disposé à m'y associer et je pense que beaucoup de nos collègues, sur tous les bancs sont aussi demandeurs (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP). En effet, ce genre de critiques nourrit l'antiparlementarisme et la démocratie en souffre.

Nous ne pouvons pas résoudre le problème en adoptant l'amendement, mais nous soutiendrons une initiative de ce type (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Jean-Marie Le Guen - Avec beaucoup d'habilité, le rapporteur a mélangé deux questions : celle, soulevée par MM. Loncle et Terrasse, de l'équité en matière de retraite, et celle de l'organisation de la représentation politique dans notre pays. Le deuxième point exige réflexion : on peut même se demander s'il ne serait pas logique de démissionner de la fonction publique quand on est élu. La question mérite d'être étudiée.

Mais sur le premier point, l'équité, il n'y a pas lieu d'attendre. Nous maintenons notre position et voterons l'amendement.

Par 34 voix contre 18 sur 52 votants et 52 suffrages exprimés, l'amendement 7047 n'est pas adopté.

M. Gilbert Gantier - Par l'amendement 7036, M. de Courson propose que la gestion des pensions civiles et militaires soit assurée par un comité paritaire qui, à terme, pourrait se transformer en caisse de retraite autonome.

M. le Rapporteur - La commission n'a pas accepté l'amendement. Il n'existe pas de caisse spécifique pour la gestion des pensions civiles et militaires. L'amendement est donc sans objet.

M. le Ministre de la fonction publique - Cet amendement remettrait complètement en cause le statut de la fonction publique et le Gouvernement y est totalement défavorable.

En revanche, il soutiendra un amendement du rapporteur de la commission des finances visant à identifier les flux financiers correspondant aux retraites, y compris les engagements « hors bilan ».

M. Maxime Gremetz - Nous sommes contre cet amendement et demandons un scrutin public.

M. Pascal Terrasse - Je suis d'accord avec le ministre : créer un régime propre à la fonction publique reviendrait à en réformer profondément le statut.

Pour autant, il est important de mieux connaître les budgets affectés aux retraites des fonctionnaires. Actuellement il y a des cotisations patronales et salariales fictives, qui varient parfois au sein d'une même fonction publique, ce qui est aberrant. Il faudrait que ces crédits soient isolés dans un chapitre propre au budget.

Mais mettre en place une caisse autonome, ce serait la révolution !

M. Denis Jacquat - Le groupe UMP est également défavorable à l'amendement.

M. le Ministre de la fonction publique - M. Terrasse reprend une conversation que nous avons eue avec les rapporteurs Xavier Bertrand et Gilles Carrez et ses préoccupations sont exactement les nôtres. Nous voulons parvenir à une transparence totale des flux. Je souhaiterais, pour ma part, que le budget de chaque ministère comporte un chapitre consacré à la gestion des ressources humaines et que les effectifs soient clairement identifiés, y compris les fonctionnaires mis à disposition par d'autres ministères ou se consacrant à des activités syndicales, mutualistes etc. Je souhaiterais que soient également isolés les crédits affectés à la formation et au financement des pensions. Il est évident que la situation au ministère de la défense, où les carrières sont courtes, est différente de celle d'autres administrations. Vouloir établir des cotisations moyennes serait donc fort dangereux. En revanche, nous devons connaître les masses budgétaires correspondant aux engagements de l'Etat, y compris pour l'avenir. c'est la condition indispensable d'une bonne gestion publique.

M. le Président - Je soumets l'amendement au vote.

M. Maxime Gremetz - Les cinq minutes ne sont pas écoulées ! Notre minuteur n'a pas sonné.

M. le Président - Il y a exactement cinq minutes dix-sept secondes que j'ai annoncé ce scrutin.

Par 47 voix contre 5 sur 52 votants et 52 suffrages exprimés, l'amendement 7036 n'est pas adopté.

M. Maxime Gremetz - Nous demandons une suspension de séance (« Oh merde ! » sur les bancs du groupe UMP). Fait personnel !

M. le Président - Les faits personnels sont traités en fin de séance. Je vous accorde une suspension de séance de quelques minutes.

La séance, suspendue à 16 heures 30, est reprise à 16 heures 35.

M. Jacques Desallangre - Après l'article 24, Mme Fraysse a déposé un amendement qui a encouru les effets de l'article 40.

M. le Président - Vous connaissez le Règlement. L'amendement ne peut pas être défendu.

ART. 25

M. Pascal Terrasse - L'article 25 ne modifie pas en profondeur le statut des fonctionnaires. Il porte sur les conditions de radiation des cadres et la liquidation de leur pension. Un fonctionnaire radié pour faute grave pourra-t-il, s'il a suffisamment cotisé, percevoir une pension de retraite ? Les études d'impact dont nous disposions pour les titres I et II nous ont beaucoup aidé à travailler. Je regrette que l'étude relative au titre III n'ait qu'un caractère général, et n'entre pas dans l'analyse de chacun des articles.

M. Denis Jacquat - L'article 25 tend à clarifier les relations entre la radiation des cadres et le droit à liquidation de la pension, la première n'entraînant pas systématiquement la seconde.

Mme Jacqueline Fraysse - Je veux revenir sur la controverse relative aux prétendus privilèges dont bénéficieraient les fonctionnaires. Si des différences existent, tâchons de placer tout le monde au meilleur niveau, plutôt que de cultiver des divisions qui tournent parfois à la contrevérité. Les fonctionnaires possèdent un régime spécial de retraite, puisque l'Etat gère leurs pensions. Leurs droits sont pleinement acquis à l'issue de trente-sept années et demies validées, et le montant de la retraite est calculé sur les six derniers mois de traitement. Rappelons qu'une retenue pour pension est effectuée sur leur salaire.

Nous n'acceptons pas que ces dispositions soient considérées comme des privilèges. Elles constituent des garanties au regard de la situation réelle des fonctionnaires. En effet, dans le privé une année à temps partiel compte comme une annuité complète, alors qu'un fonctionnaire à mi-temps cotise pour une demi-année. L'effet de cette disposition est extrêmement sensible.

Dans le privé, la naissance de deux enfants autorise deux années de bonification, contre une année seulement dans le public.

Le congé parental est validé dans le privé, il ne l'est pas dans la fonction publique.

Le montant des retraites est, dit-on, plus élevé dans le public. La cause en est que le nombre de cadres est plus important parmi les agents de l'Etat. Le départ à 60 ans serait automatique dans le secteur public ; ce n'est pas exact. En raison de l'entrée de plus en plus tardive des agents dans l'activité professionnelle, le départ à 60 ans est, comme dans le privé, de plus en plus menacé.

Enfin, le taux de remplacement est actuellement le même dans le public et dans le privé, de l'ordre de 75 %. C'est pourquoi nous refusons votre politique d'alignement général vers le bas. Aujourd'hui, c'est moins le nombre d'annuités qui est en cause dans la dégradation des retraites du privé que le mode de calcul imposé par la réforme Balladur de 1993. Cette régression devrait être annulée pour revenir à des garanties équivalentes.

Le Gouvernement, comme le Medef, présente le débat de façon démagogique et inexacte. Plutôt que de cultiver l'opposition entre secteurs public et privé, nous préférons insister sur la convergence des intérêts, tout en prenant en considération les spécificités de chacun. Telle est la philosophie défendue par le groupe communiste et républicain.

Mme Janine Jambu - Monsieur le ministre, vous avez affirmé devant la commission des affaires sociales, le 3 juin dernier : « Le Gouvernement estime être en droit de souligner et de corriger l'iniquité entre les régimes du public et du privé. Ce droit, certains le contestent au nom d'une étrange défense du service public, qui verraient l'Etat et ses fonctionnaires exonérés des efforts demandés à tous les Français. Telle n'est pas la conception du Gouvernement de l'égalité républicaine. »

Au nom de cette égalité républicaine, je suis en droit de souligner les raisons de cette iniquité. Je le fais d'autant plus volontiers que la retraite des fonctionnaires est la cible privilégiée du Medef et de tous ceux qui excitent les jalousies entre le public et le privé pour tirer vers le bas les acquis sociaux.

C'est la réforme Balladur qui en 1993 a créé de toute pièce cette inégalité.

M Balladur, alors Premier ministre, a fait voter en catimini, au mois d'août, cette réforme du régime général des retraites pour les salariés du secteur privé (« Oh ! » sur les bancs du groupe UMP). C'est l'évidence, vous ne pouvez pas la nier.

M. Denis Jacquat - Personne n'a changé la réforme de 1993 !

Mme Janine Jambu - Il a fixé d'abord à quarante ans la durée de cotisations nécessaires pour obtenir une pension à taux plein. Ensuite, les années de salaire de référence pour fixer la pension sont passées des dix aux vingt-cinq meilleures années.

Enfin, l'ajustement des pensions s'effectue désormais en fonction de l'indice des prix et non des salaires. Les salariés du secteur privé sont donc d'ores et déjà fortement pénalisés. Ceux qui sont nés en 1942 ont ainsi perdu 10 % de leur retraite en dix ans. Ces réductions visent à forcer les futurs retraités à la capitalisation.

Pourquoi ne pas revenir sur la réforme de 1993 ? Ce serait là la véritable égalité, l'équité bien comprise !

M. le Président - La discussion générale sur l'article 25 est close.

M. Jacques Desallangre - L'article 25 constitue une remise en question des conditions effectives du droit à pension pour les agents du secteur public. Le projet de loi organise le recul du niveau des pensions et de garanties collectives qui leur sont offertes.

Le papy boom, certes n'épargnera pas plus la fonction publique que le secteur privé, mais d'autres motivations expliquent la démarche du Gouvernement : il s'agit de remettre en cause l'organisation même des services publics par une réforme de l'Etat qui s'apparente plus à un démantèlement qu'à un retour à une plus grande « modestie » de ses interventions.

Votre réforme, c'est moins de service public, moins de relation directe avec les citoyens, donc moins de fonctionnaires.

Mais aussi, vous souhaitez progressivement réduire les charges de l'Etat. Dès après le vote de la loi de finances de 2003, un décret fut signé le 10 janvier dernier consistant à virer aux budgets des charges communes l'ensemble des charges de pension individualisées jusqu'alors dans chaque département ministériel.

Il s'agit de mettre les agents du secteur public en conformité non avec la législation communautaire, mais avec les exigences financières.

La baisse des prestations servies aux fonctionnaires correspond à leur contribution
- coûteuse sur le plan du niveau de vie et du pouvoir d'achat - à la réduction des déficits publics.

En revanche, ce projet ne contient aucune mesure pour accroître la contribution des entreprises au financement de notre système de retraite.

L'amendement 5578 tend donc à la suppression.

M. le Rapporteur - Avis défavorable.

Un fonctionnaire peut être radié pour liquider sa retraite, pour faute ou pour convenance personnelle. L'article 25 a pour but de clarifier ces différentes situations.

M. le Ministre de la fonction publique - Je comprends que l'on développe des arguments politiques à l'occasion de l'examen de chacun des articles.

Mme Janine Jambu - Nous sommes là pour ça.

M. le Ministre de la fonction publique - J'en suis bien d'accord. Cependant, cet article est d'ordre technique : il dissocie la radiation de la liquidation de pension, de manière à ce que la radiation n'entraîne pas immédiatement la liquidation de la pension.

Monsieur Terrasse, je vous rappelle que l'étude d'impact est à la disposition de chacun. S'il y a eu un problème de transmission, je vous prie de m'en excuser.

Madame Fraysse, personne n'a intérêt à opposer les secteurs public et privé. Nous avons eu le souci de mettre en place des convergences et, en cela, nous avons suivi les orientations du précédent gouvernement, qui était favorable à l'allongement de la durée de cotisation.

En ce qui concerne le temps partiel, comme en ce qui concerne le congé parental, nous aurons l'occasion de débattre de vos propositions favorables au service public.

Concernant l'âge de l'ouverture des droits, je me rappelle qu'il ne change pas. Avis défavorable.

L'amendement 5578 et les autres amendements identiques, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

L'article 25, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 25

M. Jacques Desallangre - Le droit à pension des fonctionnaires a fait l'objet de dispositifs législatifs successifs complétés par des dispositions réglementaires. Trois régimes se sont succédé depuis le début du siècle : les lois du 14 avril 1924, du 20 septembre 1948 et du 26 décembre 1964.

Actuellement le dispositif juridique est contenu dans le code des pensions civiles et militaires de retraite de l'Etat que les articles 24 à 43 de votre projet entendent réformer.

Le droit à pension relève du domaine législatif au titre des garanties fondamentales accordées aux fonctionnaires. ces règles s'inscrivent dans le droit fil des principes posés par la loi du 9 juin 1853 votée sous le Second Empire.

La loi du 9 juin 1853 unifie la liquidation de pension et fait de la pension de retraite du fonctionnaire un véritable droit. Elle cesse d'être une rente viagère, provenant d'un capital amassé par le fonctionnaire pour devenir un traitement continu tout le long de sa retraite si le pensionné a rempli des conditions réglementaires d'âge et de durée des services. Aussi nous semblait-il important d'insérer à l'article 3 du code des pensions civiles et militaires de retraite un alinéa qui reprend les termes du célèbre arrêt Cohen du Conseil d'Etat, en date du 13 juillet 1962.

L'article premier du code des pensions est déclaratif et définit la pension. Il aurait été opportun d'inscrire dans la loi que le droit à pension est une garantie fondamentale des fonctionnaires à laquelle il ne peut être porté atteinte que par une disposition législative expresse, même dans le cas où intervient une radiation des cadres.

Mme Muguette Jacquaint - L'article L. 3 du code des pensions traite de l'admission à la retraite. Avant de procéder à la liquidation d'une pension, l'administration doit radier l'agent des cadres, puis admettre l'agent à faire valoir ses droits à la retraite, s'il remplit les conditions pour bénéficier d'une pension, notamment être resté quinze ans au service de l'administration. En tout état de cause, la première décision reste acquise.

Si le fonctionnaire n'a pas atteint la limite d'âge, le choix de la liquidation lui appartient. Il est ainsi impossible de le radier pour les intérêts du service.

Or, avoir le choix implique la possibilité d'opter entre plusieurs alternatives crédibles. Les auraient-ils ? Entre partir à la limite d'âge et subir la décote, et travailler au-delà dans l'espoir d'obtenir une retraite décente, le choix est vite fait.

Aussi l'amendement 5585 reprend-il les conclusions de divers arrêts du Conseil d'Etat pour garantir la liberté de la demande d'admission à la retraite.

M. le Rapporteur - Défavorable. La demande d'admission à la retraite doit rester libre, au risque d'être frappée de nullité par le juge administratif. L'amendement est donc sans objet.

M. le Ministre de la fonction publique - Un fonctionnaire qui n'a pas atteint la limite d'âge de son corps ne peut être contraint de partir à la retraite. Le projet de loi prévoit, du reste, la possibilité de travailler au-delà de la limite d'âge...

Mme Muguette Jacquaint - On le sait !

M. le Ministre de la fonction publique - ...pour les fonctionnaires qui n'auraient pas cumulé le nombre de trimestres nécessaires. J'ai à votre disposition des courriers de fonctionnaires qui auraient souhaité travailler un ou deux ans de plus au-delà de la limite d'âge.

Les amendements identiques 5584 à 5590, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Gilbert Gantier - L'amendement 7038 de M. Préel propose de supprimer la limite d'âge d'accès à la fonction publique. Le dispositif statutaire actuel interdit à toute personne de plus de quarante-cinq ans d'être recrutée dans la fonction publique. Or, l'augmentation de l'âge de la retraite réduit la portée de ce seuil, qui empêche les salariés du privé de se reconvertir dans le public, ce qui prive la fonction publique de compétences et de métiers indispensables à sa mutation.

M. le Rapporteur - L'article 6 ne fixe pas d'âge obligatoire. Cela étant, la limite d'âge a le mérite de protéger les salariés âgés d'une carrière de moins de quinze ans dans la fonction publique, qui ne leur conférerait pas le droit à pension. Enfin, l'amendement semble confondre le recrutement contractuel et le recrutement par concours. Avis défavorable.

M. le Ministre de la fonction publique - Même position. Il n'est pas interdit de recruter après quarante-cinq ans, mais un fonctionnaire doit rester quinze ans dans la fonction publique pour avoir droit au régime de la fonction publique, sinon il tombe dans le régime IRCANTEC. Il est important pour l'équilibre des caisses de conserver ce contrat de quinze ans. Le souci est du reste moins la durée que la capacité de rémunérer au niveau donné par la validation des acquis professionnels. Nous sommes en cours de discussion avec les organisations syndicales sur ce sujet. Cet amendement n'a pas lieu d'être.

M. Pascal Terrasse - Chaque personne peut prétendre intégrer la fonction publique, sous réserve des conditions de nationalité et d'âge. Cela étant, il ne serait pas judicieux de laisser plus longtemps croire que les personnes âgées de plus de quarante-cinq ans en sont privées. De plus en plus de salariés ont des carrières mixtes, et je ne vois pas pourquoi une personne de cinquante-cinq ans ne pourrait pas accéder à un poste de gardien dans un office HLM ! Reste le problème du droit à pension, qu'il faudra régler, notamment s'agissant des « polypensionnés ».

L'amendement 7038, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Gilbert Gantier - Comme le propose la Cour des comptes, l'amendement 7037 tend à supprimer le bénéfice de l'indemnité versée à certains pensionnés outre-mer. Les indemnités ont coûté 154 millions d'euros à l'Etat pour 22 000 pensionnés. Le dispositif, mis en place il y a plus d'un siècle, à une époque où la France entendait affirmer sa présence coloniale, ne se justifie plus aujourd'hui.

M. le Rapporteur - Rejet. L'indemnité visée par l'amendement relève du domaine réglementaire et les fonctionnaires ultramarins exercent leurs fonctions dans des conditions qui justifient le maintien d'une indemnité spécifique.

M. le Ministre de la fonction publique - Même avis. Comme nous l'avons vu dans le cadre de la loi de programme pour l'outre-mer, le véritable enjeu, c'est de dégager un consensus sur les voies et moyens de l'ingénierie administrative qui doit être mise en _uvre pour développer l'outre-mer. L'Union européenne et la France ont tout à gagner au développement de ces régions ultrapériphériques réparties sur quatre océans.

L'amendement 7037, mis aux voix, n'est pas adopté.

ART. 26

Mme Catherine Génisson - A l'occasion de l'examen de cet article, je voudrais interroger le Gouvernement sur un sujet faisant l'objet d'un large consensus, le classement en service actif
- dit « catégorie B » - de deux catégories de la fonction publique hospitalière, les techniciennes et techniciens de laboratoire et les chauffeurs ambulanciers hospitaliers. Bien qu'ils répondent à l'évidence aux critères du service actif - contact permanent avec les patients, pénibilité, risques, permanence des soins 24 heures sur 24, 7 jours sur 7 -, ces fonctions ne relèvent pas de la catégorie B. Bien que ce
sujet fasse l'objet d'un large accord sur tous nos bancs, nous peinons à obtenir des gouvernements successifs la résorption d'une anomalie qui perdure depuis 1969. M. Mattei avait défendu un amendement à ce sujet dans le cadre de la loi de modernisation sociale. Il avait alors été convenu que la question serait réglée à l'occasion de la réforme des retraites. Elle a du reste été rouverte à l'occasion de la discussion de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades. Las, le rapport demandé à cette occasion sur la situation des techniciens de laboratoire n'a pas rendu des conclusions favorables à leur classement en catégorie B. Il est vrai que l'étude n'a portée que sur l'AP-HP où seulement 3 % des techniciens prennent des gardes - contre 60 % dans les hôpitaux généraux de province. Les risques professionnels encourus par les techniciens ne font aucun doute, non plus que ceux auxquels s'exposent les chauffeurs ambulanciers intégrés aux SMUR, dont le métier a beaucoup évolué depuis 1969.

Monsieur le ministre, je vous sais attentif à ce problème. Merci de tenir l'engagement pris à l'occasion de l'examen du présent texte.

M. Jean-Marie Le Guen - Excellente intervention ! Ça, c'est du concret !

M. Denis Jacquat - L'article 26 apporte des éclaircissements fort bienvenus sur les éléments constitutifs des droits à pension. Il tend à préciser les périodes validables et à accélérer la validation des services auxiliaires.

Mme Génisson a soulevé, fort bien, un problème que je voulais évoquer. Certes, sa résolution a un coût...

M. Pascal Terrasse - Allons, vous avez tous les pouvoirs !

M. Denis Jacquat - ...mais il est vrai qu'il ne faut pas oublier les deux professions dont Mme Génisson a parlé avec talent.

M. Charles Cova - Mon intervention a trait à la situation des miliaires sous contrat radiés des cadres pour infirmité. Nous plaidons pour la modification des articles L. 6 et L. 7 du code des pensions civiles et militaires de retraite.

Professionnalisées, nos armées ont changé de fonction. Engagées le plus souvent dans des opérations extérieures qui visent moins la destruction de l'adversaire que le maintien ou le rétablissement de la paix, elles accueillent sous contrat des militaires exerçant des fonctions analogues aux militaires de carrière. Exposés aux mêmes risques et aux mêmes contraintes, les militaires sous contrat doivent jouir des mêmes droits que leurs collègues.

L'article L. 6 du code des pensions dispose que le droit à pension est acquis aux militaires ne possédant pas le statut de militaires de carrière qui ont accompli plus de cinq ans de services effectifs et qui ont été radiés des cadres pour infirmités imputables au service. La solde de réforme destinée aux militaires sous contrat est en outre beaucoup moins avantageuse, alors qu'ils sont aussi exposés que leurs frères d'armes ayant de statut de militaires de carrière.

Nous demandons la suppression de cette double iniquité. Tous les militaires blessés en service doivent bénéficier des mêmes droits. Il n'y a pas de distinction à opérer en regard de leur statut. Je remercie le Gouvernement d'examiner cette question avec la plus grande attention, l'amendement que j'avais déposé à ce sujet étant tombé sous le coup de l'article 40.

M. Michel Vaxès - Nous souhaitons, dans le cadre de cet article, poser la question de la prise en compte des services accomplis dans des entreprises privées par des fonctionnaires en position de détachement ou de disponibilité. Un débat doit s'ouvrir à ce sujet.

Le calcul des droits à pension des fonctionnaires et agents publics ayant exercé dans le privé est souvent problématique. Le plus souvent les intéressés présentent en effet des carrières incomplètes dans le privé comme dans le public. Ne pourrait-on retenir pour principe de mettre en équivalence les durées d'assurance afin qu'ils bénéficient pleinement des dispositions du code des pensions civiles ?

Le Gouvernement peut-il nous faire connaître son opinion à ce sujet ?

M. Jacques Desallangre - Mes collègues et moi avions déposé plusieurs amendements qui ont été frappés par l'article 40. L'un d'eux visait à valider les trimestres passés dans les services publics d'un pays membre de l'Union européenne.

Le droit communautaire a défini un certain nombre de règles en matière de libre circulation des travailleurs au sein de l'Union européenne. Une exception au principe de libre circulation a été prévue concernant les emplois de l'administration publique. Cette notion, précisée par la Cour de justice des Communautés européennes, ne couvre pas toute la fonction publique et permet aux ressortissants de l'Union européenne d'accéder à certains corps de la fonction publique. Il demeure que la question de la prise en compte des services accomplis dans d'autres services publics de l'un des Etats membres n'est pas résolue. Un défaut de prise en compte pourrait être considéré comme une discrimination. Dans un arrêt du 22 novembre 1994, la Cour de justice des Communautés européennes a estimé que, lorsqu'un texte prévoit la prise en compte des services accomplis dans les établissements hospitaliers, il n'est pas possible d'exclure les services accomplis dans les services publics étrangers. Cette solution jurisprudentielle a été reprise par un règlement du Conseil du 29 juin 1998.

On accuse souvent les députés du groupe communiste et républicain d'être des « eurosceptiques ». Il s'agit d'un malentendu. S'ils se défient de la construction européenne, ce n'est pas par nationalisme, souverainisme ou xénophobie, mais parce qu'ils n'approuvent pas l'Europe des marchés et des marchands, qui oublie les aspirations du peuple. Nous défendons les intérêts des hommes et des femmes qui veulent une Europe de progrès et de justice.

M. Pascal Terrasse - L'article 26 modifie l'article 5 du code des pensions civiles et militaires, relatif aux éléments constitutifs du droit à pension.

En raison de la professionnalisation des armées, un certain nombre d'alinéas portant sur la prise en compte du service national vont être supprimés. Il faut cependant préciser le statut de ces contractuels qui ont remplacé les appelés. Ces jeunes sont embauchés pour cinq ans. Comment ces périodes seront-elles validées ?

Par ailleurs, pour les instituteurs, le temps passé à l'école normale sera-t-il validé ? Le problème ne se pose plus depuis la création des IUFM, mais il faut penser à tous ceux qui ont été formés auparavant. Il semble qu'après avoir songé à ne pas valider cette période, le Gouvernement s'est ravisé.

Enfin, comment le service partiel sera-t-il pris en compte ?

M. le Ministre de la fonction publique - Cet article a pour but de définir les différentes périodes prises en compte pour l'ouverture des droits à pension, ce qui est d'autant plus important que nous allongeons la durée de cotisation. Nous avons souhaité que seuls les services effectifs comptent, mais les congés maladie, les congés de longue maladie, les périodes de formation professionnelle, les congés maternité et les congés d'adoption seront validés. Il en ira de même de la période pendant laquelle le fonctionnaire recruté travaille avant sa titularisation. Pour rassurer M. Terrasse, le temps passé à l'école normale d'instituteur sera validé.

La validation des services auxiliaires, pour les agents qui ont travaillé dans la fonction publique avant leur titularisation peut être demandée. C'est donc une faculté. Cette demande peut être faite à tout moment avant la radiation des cadres. Nous souhaitons qu'elle intervienne dans un délai de deux ans à compter de la titularisation. Quand la titularisation sera antérieure au 1er janvier 2004, les demandes seront autorisées jusqu'au 31 décembre 2008.

Mme Génisson m'a interrogé sur le cas des chauffeurs ambulanciers et des techniciens de laboratoire. Dans le relevé de décisions du 15 mai, nous avons pris l'engagement d'ouvrir le débat de la pénibilité dans les services publics, comme nous l'avons fait pour le régime général. La difficulté du travail accompli par les infirmières devrait être reconnue. S'agissant des deux catégories défendues par Mme Génisson, Jean-François Mattei a souhaité qu'on examine leur situation. Aucun engagement ne peut être pris, mais leur cas sera intégré dans la réflexion.

M. le Rapporteur - Il faut le faire, Monsieur le ministre.

M. le Ministre de la fonction publique - M. Jacquat a eu raison de parler d'un « article de clarification ». M. Cova, dont nous connaissons la passion pour le monde militaire, a été victime de l'article 40. La règle qui s'applique est celle qui vaut pour l'ensemble des contractuels civils de l'Etat. Ceux-ci relèvent du régime général et cotisent à l'IRCANTEC. En cas d'invalidité, ils conservent 30 % de leurs ressources.

M. Vaxès souhaite que chaque trimestre soit validé, quel que soit le parcours professionnel de l'intéressé. Si vous précisez votre question, nous aurons le souci de votre répondre.

Monsieur Desallangre, il n'y a pas d'eurosceptiques et d'euro-enthousiastes, mais des citoyens qui ont des opinions différentes, ce qui est légitime. Il faut se réjouir que ne règne pas la pensée unique. Nous devons faciliter la mobilité dans l'espace européen. Vous nous proposez d'ouvrir un vaste chantier, ce qu'il faut faire puisque le règlement européen s'impose à la législation nationale. Les fonctionnaires français qui servent nos intérêts dans les autres pays ne doivent pas être pénalisés.

Mme Muguette Jacquaint - Notre amendement 5591 vise à supprimer le premier alinéa de l'article 26. Les organisations syndicales qui ont signé l'accord du 17 mai sont minoritaires dans la fonction publique.

On nous dit que cette réforme est gagée sur l'amélioration de la situation économique. Encore faut-il prendre les mesures de nature à améliorer la situation ! Ce qui est clair, c'est que les fonctionnaires vont devoir travailler plus sans que leurs pensions augmentent en conséquence. D'où cet amendement de suppression.

M. le Rapporteur - Supprimer l'alinéa visé ne serait pas une avancée car cela reviendrait à ne pas prendre en compte les périodes de stage effectuées avant dix-huit ans. Rejet.

M. le Ministre de la fonction publique - Même avis.

Les amendements 5591 à 5597, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Michel Vaxès - Une révision du code des pensions civiles et militaires est-elle nécessaire ? Une des faiblesses du projet est qu'il n'a pas fait l'objet de réelles négociations. L'accord signé avec des syndicats minoritaires ne suffit pas à justifier un recul global de la situation des agents publics. L'alinéa I de l'article 26 ne crée pas d'avancée. La distinction entre agents titulaires et stagiaires est justifiée et nous ne sommes pas certains que l'assimilation effectuée soit positive. Qu'en serait-il des périodes d'auxiliariat ? Seraient-elles exclues ? Si tel était le cas, cela suffirait à justifier la suppression de cet alinéa, comme le fait notre amendement 5598.

Les amendements 5598 à 5604, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Jacques Desallangre - L'amendement 5612 propose un retour à la rédaction de l'article L. 5 du code des pensions civiles et militaires, qui a sa cohérence.

Les modifications proposées pourraient avoir leur utilité si elles ne s'accompagnaient pas des « corrections », effectuées au nom de « l'équité », de l'exercice du droit à pension des fonctionnaires. Si leur niveau de retraite est parfois plus élevé que celui des agents du secteur privé, c'est à cause de la loi Balladur, qui a amputé le pouvoir d'achat des salariés.

Les amendements 5612 à 5518, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

Mme Muguette Jacquaint - L'amendement 5605 vise à simplifier la rédaction du 1° de l'article 5 du code des pensions civiles et militaires, sans faire de distinction entre les activités à temps plein et à temps partiel, d'autant que les agents à temps partiel ont souvent une productivité plus élevée.

Les amendements 5605 à 5611, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

Mme Muguette Jacquaint - L'article 26 vise à clarifier la liste des activités prises en compte pour le droit à pension. Son paragraphe II concerne les militaires. Selon le rapporteur, la disposition relative aux services effectués en temps de paix est devenue superflue avec la professionnalisation des armées. Nous avons néanmoins déposé, par précaution, des amendements de suppression. Si vous nous assurez que la nouvelle rédaction ne lésera personne, nous serions prêts à les retirer.

M. le Rapporteur - La commission a rejeté les amendements mais je suis persuadé que le ministre va pouvoir rassurer Mme Jacquaint.

M. le Ministre de la fonction publique - A partir du moment où nous supprimons le L. 16, l'indexation sur les prix est la garantie du maintien du pouvoir d'achat des pensions militaires. Car la définition du pouvoir d'achat, c'est l'évolution des prix...

M. Pascal Terrasse - Hors tabac ! Et justement le prix du tabac a beaucoup augmenté.

M. le Ministre de la fonction publique - Et nous savons que nous soutenez cette politique ! La garantie du pouvoir d'achat est même plus forte que dans le secteur privé puisque la pension est calculée sur les six derniers mois.

Un certain nombre d'organisations syndicales ont d'ailleurs soutenu cette approche.

Mme Muguette Jacquaint - Lesquelles ?

M. le Ministre - Pour nous, il n'y a pas de bonnes ou mauvaises organisations syndicales. Il y a les organisations représentatives.

Mme Muguette Jacquaint - Je retire, oh, timidement (Sourires), les amendements 5619 à 5625.

M. Michel Vaxès - Les amendements 5626 à 5632 sont défendus.

Les amendements 5626 à 5632, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Jacques Desallangre - Je défends les amendements 5668 à 5674. Il s'agit d'insérer un nouvel alinéa au titre III de l'article 26.

La durée minimale de service exigée pour le droit à pension est de quinze ans, sauf en cas d'invalidité.

En rédigeant les dispositions de l'article 26 relatives aux services pris en compte pour l'ouverture du droit à pension, le Gouvernement semble avoir oublié de recopier le 4° actuellement en vigueur. Ainsi proposons-nous, par nos amendements 5668 à 5674, de réparer cet oubli en insérant un 3° bis.

M. le Rapporteur - Le Gouvernement n'a commis aucun oubli et a parfaitement bien rédigé son texte. Les services sur lesquels porte l'amendement du groupe communiste sont inclus dans la nouvelle rédaction du 1°. Rejet.

M. le Ministre de la fonction publique - Avis défavorable.

Les amendements 5668 à 5674, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Jacques Desallangre - Monsieur le Président, pourriez-vous rappeler à M. le rapporteur que notre groupe s'intitule « communistes et républicains » ? J'en serais heureux.

M. le Président - Le rapporteur vous a écouté. Les amendements 5633 à 5639 sont identiques.

Mme Muguette Jacquaint - Je souhaite que la séance soit suspendue après l'examen de ces amendements.

Il s'agit de la situation des fonctionnaires ayant servi outre-mer, et plus particulièrement dans les DOM. Le cas des agents du secteur public local outre-mer est marqué par la précarité, tandis que persiste une différence de traitement entre les salariés résidants et les salariés métropolitains nommés outre-mer, qui bénéficient, dans leur rémunération puis leur pension, d'une prise en compte du coût élevé de la vie dans les DOM, alors que les agents exerçant dans leurs départements d'origine n'y ont pas droit. Certes, les collectivités locales ultra-marines auraient du mal à supporter les conséquences financières de l'application de l'égalité sociale. La solution pourrait se trouver dans une majoration sensible de leur DGF.

M. le Rapporteur - Je rassure nos collègues députés communistes et républicains... L'article 26 n'induit aucune dégradation d'aucune situation, dotation ou pension. La nouvelle rédaction tend à ne plus faire référence aux DOM comme à d'anciennes colonies. Contre.

M. le Ministre de la fonction publique - Je rassure à mon tour le groupe des communistes et républicains. Nous ne touchons pas au régime des DOM-TOM.

Les amendements 5633 à 5639, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

La séance, suspendue à 18 heures 10, est reprise à 18 heures 20.

M. Michel Vaxès - Nous avons suspendu le débat sur quelques difficultés à prononcer ensemble les mots « communistes et républicains ». L'un, désignant la communion, le partage, la générosité, l'autre, la République, sont plutôt des mots magnifiques. Il devrait vous être facile de les prononcer sans distinguer les communistes des républicains qui participent à l'activité du groupe.

Afin de faciliter le futur travail de codification, il importe de rester fidèle au texte. La rédaction actuellement en vigueur du 6° de l'article L. 5 du code des pensions civiles et militaires de retraite comporte le terme services « rendus » et non services « effectués ». L'amendement 5644 propose que l'on en reste au terme « existant ».

L'amendement 5644 et les amendements identiques, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

Mme Muguette Jacquaint - C'est un règlement d'administration publique qui, dans le CPCM, participe de la prise en compte des services effectués par les agents de la fonction publique ayant servi dans les anciens protectorats et territoires sous tutelle.

Les fonctionnaires sont invités à valider une démarche de sollicitation de l'avis du Conseil d'Etat. Une telle orientation nous semble nécessaire également pour les fonctionnaires ayant exercé des missions dans ce que l'on appelait l'Union française. Il conviendrait de leur accorder la même intention qu'aux fonctionnaires travaillant ou ayant travaillé dans les administrations publiques locales des DOM. Tel est le sens de l'amendement 5686.

L'amendement 5686 et les amendements identiques, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Michel Vaxès - L'amendement 5700 tend à supprimer une disposition incongrue. Parmi les services pris en compte dans la constitution du droit à pension, le paragraphe IV supprime les services de stage ou de surnumérariat accomplis à partir de l'âge de dix-huit ans. Ce paragraphe IV est-il opportun ? Combien de personnes concerne-t-il ? Quel en est l'impact financier ? En l'absence de toutes données chiffrées, cela mérite des explications.

Dans son actuelle rédaction, l'article distingue en effet les agents titulaires des agents stagiaires dans deux alinéas différents, la situation des agents stagiaires étant assimilée à celle des agents dits « surnuméraires ». Que deviennent ces agents du service public ? S'agit-il de leur dénier le droit de faire valoir leur droit à pension - et d'autant plus que de nombreuses administrations ont recours à des embauches ponctuelles ?

M. le Ministre de la fonction publique - Je tiens à vous rassurer. Les services de stage sont pris en compte dans le premièrement de l'article 25 et la suppression du septièmement actuel permet d'inclure ces services lorsqu'ils ont été accomplis avant l'âge de dix-huit ans.

Avis défavorable.

L'amendement 5700 et les amendements identiques, repoussés par la commission, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Jacques Desallangre - L'amendement 5655 concerne les fonctionnaires exerçant à temps partiel, et il sont assez nombreux dans la fonction publique d'Etat certes, mais surtout dans la fonction publique territoriale et hospitalière.

L'offre de travail à temps partiel risque du reste de se généraliser au fur et à mesure des transferts de charges dus à la décentralisation, de l'encadrement de plus en plus serré des dépenses de santé ou des effets de l'application de la loi organique sur les lois de finances en terme de gestion des dépenses de personnels de l'Etat.

L'emploi public sera transformé en une banque d'heures de travail à répartir au gré des possibilités laissées par les contraintes d'équilibre des comptes et les exigences de la Commission européenne.

Nombre de communes, d'établissements publics de coopération intercommunale voire de départements ne pourront probablement pas offrir une masse suffisante de contrats de travail à temps plein pour faire face aux importants besoins sociaux. On demandera demain aux agents salariés à temps partiel de surcotiser pour qu'ils puissent bénéficier de leur pension.

Nous ne pouvons donc accepter la rédaction du paragraphe V de cet article, pas plus que celle de son second alinéa.

L'amendement 5655 et les amendements identiques, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Président - Les amendements 5661 à 5667 sont identiques.

M. Michel Vaxès - L'amendement 5661 tend à supprimer le deuxième alinéa du V de l'article 26, qui apparaît superflu dans la mesure où les services à temps partiel sont déjà pris en compte dans le 1° de l'article 5 du code des pensions civiles et militaires.

M. le Rapporteur - Défavorable.

M. le Ministre de la fonction publique - Même avis. Le V de cet article simplifie et modernise le dispositif.

Les amendements identiques 5661 à 5667, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Président - Les amendements 5710 à 5716 sont identiques.

M. Jacques Desallangre - En l'état actuel de la législation, les services accomplis en qualité d'agent non titulaire peuvent être pris en compte pour la constitution du droit à pension, à la suite d'une validation de services, à condition que celle-ci ait été autorisée par un arrêté ministériel, à la suite d'une demande adressée à l'administration avant la radiation des cadres.

Vous proposez de remplacer cette dernière condition par une demande adressée par l'agent dans les deux ans à compter de la date de sa titularisation. Cette réduction du délai offrira de moindres garanties au fonctionnaire, d'autant plus que l'administration n'aura aucune obligation de l'informer.

Bref, votre modification pourrait donner le sentiment que le Gouvernement a pour seule ambition de limiter au maximum l'exercice par chaque fonctionnaire de ses droits, mais je n'irai pas jusque-là. Notre amendement vise donc à supprimer cette modification.

M. le Rapporteur - Défavorable.

M. le Ministre de la fonction publique - Merci de ne pas être allé jusque-là car cet article représente un progrès considérable. Le fonctionnaire a financièrement intérêt à valider ses périodes le plus tôt possible, à savoir dans les deux ans à compter de sa titularisation. La mesure que nous proposons représente donc un avantage pour lui, à condition, bien entendu, que l'administration l'informe notamment sur les impacts financiers de ses choix.

M. Pascal Terrasse - Comment l'administration informera-t-elle le fonctionnaire ?

M. Jacques Desallangre - Monsieur le ministre, votre argumentation est pertinente, mais le délai laissé au fonctionnaire pour faire son choix est trop court.

M. le Ministre de la fonction publique - Monsieur Terrasse, c'est vrai, cette disposition ne constituera une avancée sociale que si l'employeur informe son titulaire de cette possibilité ; aussi avons-nous demandé au COR de réfléchir à une nouvelle relation entre l'administration-employeur et le fonctionnaire dans la gestion des ressources humaines.

Monsieur Desallangre, c'est au début que le choix est le plus facile et le plus pertinent.

Cependant, nous avons prévu une phase de transition jusqu'en 2008 pour permettre aux jeunes titularisés de s'adapter, avant de passer à deux ans.

Les amendements identiques 5710 à 5716, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Président - Les amendements 5717 à 5723 sont identiques.

Mme Muguette Jacquaint - Notre amendement tend à ce que les droits des fonctionnaires et de leurs ayants droit ne soient pas méconnus. Aussi le code des pensions civiles et militaires de retraite de l'Etat doit-il être enrichi par les avancées jurisprudentielles. En adoptant cet amendement, vous prendriez acte de droits reconnus par la jurisprudence aux ayants droit de fonctionnaires.

Les amendements identiques 5717 à 5723, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

Mme Muguette Jacquaint - Nos amendements identiques 5745 à 5751 précisent la rédaction de l'article.

En vertu de l'article R. 3 du code des pensions civiles et militaires de retraite, l'agent désireux de faire valoir ses droits à la retraite dispose d'un délai d'un an pour accepter ou refuser la notification de validation qui lui est adressée, laquelle indique le détail des services pris en compte sur la foi des pièces justificatives transmises et des sommes à verser. Or, une instruction du ministère des finances - fort ancienne puisque datée du 1er janvier 1957 - indique que l'agent dispose d'un délai de trois mois pour accepter ou refuser cette notification. Passé ce trimestre, la validation est définitivement acquise. La règle ainsi posée est donc plus restrictive que celle fixée par l'article R. 3 du CPCM. En conséquence, notre amendement précise que le délai accordé à l'agent pour accepter la notification de validation ou la refuser ne peut être inférieur à celui qu'établit l'article R. 3. De ce fait, seul un décret - et non une simple instruction ministérielle - pourra modifier le délai considéré. Cette évolution va manifestement dans le sens d'un renforcement des garanties offertes aux fonctionnaires.

M. le Rapporteur - On ne peut rester insensible aux arguments qu'a bien développés Mme Jacquaint. Néanmoins, la commission n'a pas pu accepter cet amendement, la majorité des commissaires ayant fait valoir qu'il était proposé de légiférer sur une disposition d'ordre réglementaire.

Ce sont donc des questions de forme qui ont motivé notre décision et nous sommes très intéressés par le point de vue de M. le ministre sur le fond du problème.

M. le Ministre de la fonction publique - Cet amendement pose une bonne question. Je suis tenté de proposer à Mme Jacquaint d'en retenir très fidèlement l'intention mais de le rédiger d'une manière plus simple.

Je propose la rédaction suivante : « Après le dernier alinéa, est inséré un alinéa ainsi rédigé : "Le délai dont dispose l'agent pour accepter ou refuser la notification de validation est d'un an". » Les préoccupations du groupe CR et de votre rapporteur seraient ainsi pleinement satisfaits.

Mme Muguette Jacquaint - Nous avons besoin d'une brève suspension de séance pour étudier cette nouvelle rédaction.

M. Denis Jacquat - Il n'y a pas de piège !

M. le Rapporteur - Nous sollicitons également une suspension pour travailler sur les articles suivants.

La séance, suspendue à 18 heures 50, est reprise à 19 heures 10.

M. le Président - Le Gouvernement a déposé les sous-amendements 11 245 et 11 246. Le premier est de forme et le second de fond.

Mme Muguette Jacquaint - La solution trouvée nous satisfait.

M. Pascal Terrasse - Monsieur le ministre, vous ne précisez pas, dans votre sous-amendement, le point de départ du droit ouvert.

M. le Ministre de la fonction publique - Ce délai court à compter de la réception de la notification.

Le sous-amendement 11 245, mis aux voix, est adopté, de même que le sous-amendement 11 246.

L'amendement 5745 ainsi sous-amendé, mis aux voix, est adopté.

M. Pascal Terrasse - Malgré l'adoption de cet amendement, nous ne voterons pas cet article, qui aura pour conséquence la diminution des pensions versées aux fonctionnaires en raison du nouveau taux résultant de l'allongement de la durée de cotisation, sans parler de la décote. Bref, vous réduisez le pouvoir d'achat des retraités.

L'amendement 26 modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 27

M. le Président - Je comptais lever la séance à 19 heures 30, mais il y a plusieurs inscrits sur l'article 27.

Je propose qu'on prolonge la séance jusqu'à 19 heures 45, avec reprise à 21 heures 45.

M. Pascal Terrasse - Cet article est d'importance majeure car il va modifier les modalités de bonification pour enfants à charge et il pose en réalité la question de la place des mères dans la vie active : il tend à faire croire que la seule bonne solution pour elles est de rester au foyer.

En effet, jusqu'à présent, toutes les femmes fonctionnaires voyaient leur pension bonifiée de 2 % par enfant. Avec cette réforme, les enfants nés après 2003 ne seront plus pris en compte, si la femme poursuit son activité professionnelle.

Vous invoquez la jurisprudence de la Cour de justice européenne sur l'égalité de traitement des travailleurs masculins et féminins pour modifier l'architecture des bonifications : mais vous auriez pu effectuer l'égalisation par le haut en étendant la majoration aux pères de famille.

Avec votre dispositif, les mères qui ne s'arrêteront pas de travailler ne bénéficieront pas de bonifications. Quant à celles qui interrompront leur activité, elles se verront appliquer la décote. Dans les deux cas, les femmes fonctionnaires verront leur pension baisser. Je rappelle que la durée moyenne d'activité des femmes dans les trois fonctions publiques est de 34 ans : jusqu'à présent, la bonification permettait à celles qui avaient des enfants d'obtenir une pension à taux plein. Ce ne sera plus le cas.

Derrière cet amendement se cache la volonté que les femmes retournent au foyer. C'est un véritable recul social. J'aurais souhaité entendre la délégation aux droits des femmes dans ce débat car son rapport met bien en évidence ce recul.

M. le Rapporteur - Mais non ! Vous l'avez pas lu

M. Denis Jacquat - Cet article répond au souci du Gouvernement d'appliquer le droit et la jurisprudence communautaires, en particulier l'arrêt Griesmar. Je vous signale, à ce sujet, que je reçois des courriers de salariés du privé réclamant l'application de cette jurisprudence !

Je ne peux admettre les propos de Pascal Terrasse dénonçant un « recul social ».

La situation actuelle n'est pas défavorable aux femmes fonctionnaires, contrairement à ce qu'on entend souvent. Dans le régime général, la majoration de deux ans par enfant porte sur une valeur d'annuité équivalent à 1,33 % du salaire moyen des vingt-cinq meilleures années, dans la limite du plafond de la sécurité sociale ; elle ne s'applique pas aux retraites complémentaires. Dans la fonction publique, la bonification représente 2 % du traitement hors primes des six derniers mois.

Face à la jurisprudence de la Cour de justice européenne, le gouvernement précédent s'était contenté de temporiser.

Mme Ségolène Royal - Il avait bien fait !

M. Denis Jacquat - Le Gouvernement actuel a choisi d'agir et a adopté un dispositif généreux. Il n'en attend d'ailleurs aucune économie, contrairement à ce qui a été dit.

Et quand on annonce que cette mesure va réduire la natalité, je suis très sceptique car la conciliation de la vie familiale et de la vie professionnelle est l'objectif de l'UMP et du Gouvernement et c'est bien le sens du programme qu'a annoncé M. Jacob lors de la conférence sur la famille.

Mme Muguette Jacquaint - Je suis en désaccord total avec cette politique familiale et de nombreuses associations aussi !

Cet article 27 va pénaliser les femmes qui travaillent, quoi que vous en disiez. Vous prenez prétexte de la nécessité d'adapter notre droit à la jurisprudence européenne : mais pour réaliser l'égalité, vous auriez pu ramener la durée de cotisations à trente-sept ans et demi pour tout le monde ! Quant aux inégalités de rémunérations entre les hommes et les femmes, qui existent aussi dans la fonction publique compte tenu du caractère arbitraire des primes, vous êtes moins pressés d'y mettre fin !

Jusqu'à présent les fonctionnaires bénéficiaient d'une bonification d'un an par enfant élevé : en pratique, le dispositif ne concernait que les femmes. Vous proposez de remplacer cette bonification par une validation des périodes d'interruption ou de réduction d'activité pour élever des enfants en étendant la mesure aux hommes.

Au premier abord, ce dispositif peut sembler égalitaire et plus avantageux. Mais il ne tient aucun compte de la réalité de notre société.

A une bonification qui est un droit, vous substituez une validation conditionnelle. Cette opération aura des conséquences très négatives pour les femmes. Les hommes sont très peu nombreux à envisager d'interrompre leur carrière pour élever leurs enfants. Vous allez donc obliger les femmes à le faire pour que la période d'éducation des enfants soit prise en compte, accentuant ainsi les inégalités dans le déroulement des carrières.

Vous faites souvent référence au COR : mais celui-ci a mis en garde contre les conséquences pour les femmes de l'allongement de la période de référence décidé par M. Balladur et il a suggéré de prendre des mesures propres à les atténuer. Ce n'est pas ce qui nous est proposé, bien au contraire. La disparité des déroulements de carrière entraîne une différence de 42 % du niveau de pension entre hommes et femmes. Remplacer la bonification par la validation creuserait l'écart encore davantage. Voilà pourquoi nous voterons contre l'article 27.

Mme Danièle Hoffman-Rispal - A entendre le Gouvernement et aussi M. Jacquat, l'article 27 marquerait un pas vers l'égalité entre les hommes et les femmes. Il découlerait ainsi du fameux arrêt Griesmar rendu en 2001 par la Cour de justice des Communautés européennes, qui constate que dans notre système de retraite les hommes et les femmes qui ont des enfants ne sont pas soumis aux mêmes dispositifs.

Pour réparer ce qui serait une injustice insupportable, le Gouvernement fait mine d'améliorer la situation des salariés en étendant les possibilités de bonification à trois ans par enfant, pour les hommes comme pour les femmes.

Nous devrions donc nous réjouir. Mais cette présentation est trompeuse. En fait l'article 27 représente pour les femmes un recul social considérable, et exprime une idéologie qui préfère voir les femmes au foyer plutôt qu'au travail. Cette mesure est l'une des plus contestables de votre projet. Ainsi Le Monde titrait récemment : « Le plan Fillon risque de pénaliser les femmes ». Vous ne répondez rien aux recommandations du COR sur les retraites des femmes, dont on vient de rappeler que le niveau est de 42 % inférieur à celles des hommes. Les femmes ont déjà du mal à valider 150 trimestres. Comment feront-elles pour 160 ? Le fossé va continuer à se creuser au détriment des femmes fonctionnaires. En effet, la bonification automatique d'un an est remplacée par une validation à hauteur seulement des périodes non travaillées. Les femmes fonctionnaires devront donc prolonger leur arrêt d'activité au-delà de leur congé de maternité.

Pour les enfants nés après le 1er janvier prochain, ces avantages ne s'appliqueront en effet que si le père ou la mère opte pour un temps partiel, un congé parental ou une mise en disponibilité. Or, ce sont à peu près toujours les femmes qui interrompent leur activité pour élever leur enfant. Vous les poussez ainsi hors de l'emploi effectif, alors qu'elles souhaitent le plus souvent mener de front travail et vie de famille.

Dans le même temps, l'Etat n'a rien prévu pour accroître l'offre de garde des jeunes enfants. Vous mettez donc en _uvre un parti pris idéologique tendant à renvoyer les femmes à la maison, ou à les inciter fortement à y rester. Vos déclarations de bonne volonté sur l'égalité professionnelle sont démenties par les mesures que vous prenez en matière de retraite.

Mme Ségolène Royal - Vous vous apprêtez à accomplir une bien mauvaise action, et même une basse besogne (Protestations sur les bancs du groupe UMP). D'abord, vous avez voulu laisser croire que votre réforme améliorerait la situation des femmes. Vous allez chercher à la rescousse le droit communautaire. Cet argument n'est pas courageux. Le droit communautaire dit que chaque pays européen doit progresser dans l'égalité entre les hommes et les femmes. Or votre réforme va aggraver l'inégalité entre eux. M. Fillon nous demandait l'autre jour de faire des propositions. En voici une : répondez aux instances communautaires que, tant que l'égalité salariale ne sera pas réalisée, il n'est pas concevable de supprimer un avantage créé pour compenser le ralentissement de carrière des femmes qui choisissent de s'arrêter, qui subissent la double journée, qui ont moins de possibilités de formation. La bonification pour enfants n'est pas un cadeau fait aux femmes, mais la juste compensation de l'inégalité de traitement qu'elles subissent.

Si, de façon scandaleuse, vous appelez à la rescousse le droit communautaire, cela signifie que, tôt ou tard, vous allez aussi revenir sur les deux années de bonification du régime général... Vous hochez la tête ? Vous allez donc le faire ? C'est scandaleux !

M. le Ministre de la fonction publique - Je n'ai pas hoché la tête pour vous répondre ! Je n'ai rien dit ! Je ne vous permets pas d'interpréter !

M. le Président - Le ministre prend attentivement des notes. Il répondra dès la reprise de la prochaine séance.

Mme Ségolène Royal - Ne vous fâchez pas ! Pour l'instant, ce sont les femmes qui sont en colère du fait de vos mesures ! (Interruptions sur les bancs du groupe UMP)

Je répète qu'il est très dangereux de recourir à l'argument communautaire. Assumez plutôt votre décision de faire des économies au détriment des femmes et dites-nous ce que cela vous rapporte (Exclamations sur les bancs du groupe UMP).

Pour mieux avancer masqué, vous nous avez raconté la belle histoire de la parité et du progrès social, en soulignant que la validation était ouverte aux hommes. De qui vous moquez-vous donc ? Combien d'hommes aujourd'hui vont s'arrêter de travailler pendant trois ans pour élever leurs enfants ? Nous avons créé le congé parental de quinze jours, et les hommes bénéficieront pour leur retraite d'une validation de la même durée. Tant mieux ! Mais cela ne remplace pas la bonification d'un an pour enfant élevé.

A suivi la légende de l'avantage reconnu aux arrêts de travail pour élever les enfants. Voilà un gros mensonge par omission que commet le Premier ministre dans sa lettre de propagande aux Français, en se félicitant de la validation des arrêts de travail. Or, aujourd'hui, les femmes bénéficient de la bonification, qu'elles s'arrêtent ou qu'elles ne le fassent pas. La grande liberté acquise par les femmes ces dernières années est de pouvoir concilier la vie familiale et la vie professionnelle. En imposant aux femmes de s'arrêter pour bénéficier de la validation, vous remettez en cause ce libre choix (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Michel Vaxès - L'article 27 tend à modifier substantiellement l'article L.9 du code des pensions en énumérant un certain nombre de positions selon lesquelles les droits à pension sont validés même lorsque le service n'est pas accompli.

Les apparences de l'article 27 sont séduisantes, mais elles seules. Pour partie il se borne à codifier ce qui figurait déjà dans de nombreux textes réglementaires. En revanche, la référence au traitement des longues maladies disparaît de l'énumération. Cette omission ne peut guère être considérée comme une avancée sociale ! Voilà l'inconvénient de vouloir être trop précis : le champ d'application de l'article L. 9 s'en trouve limité, et les conditions de bonification sont en quelque sorte proratisées aux périodes effectives de congé, plutôt que de découler de règles applicables à tous, comme aujourd'hui.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu ce soir, à 21 heures 45.

La séance est levée à 19 heures 45.

            Le Directeur du service
            des comptes rendus analytiques,

            François GEORGE

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne trois heures après la fin de séance.

Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.

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