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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session extraordinaire de 2003-2004 - 2ème jour de séance, 6ème séance

2ème SÉANCE DU VENDREDI 2 JUILLET 2004

PRÉSIDENCE de M. Éric RAOULT

vice-président

Sommaire

      ASSURANCE MALADIE (suite) 2

      ARTICLE PREMIER (suite) 2

      APRÈS L'ARTICLE PREMIER 3

      AVANT L'ART. 2 18

La séance est ouverte à quinze heures.

ASSURANCE MALADIE (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi relatif à l'assurance maladie.

ARTICLE PREMIER (suite)

M. Jean-Marie Le Guen - Je voudrais d'abord me féliciter que l'Assemblée ait adopté ce matin un amendement fort important du groupe socialiste, qui fait obligation à l'assurance maladie d'intervenir en cas de désertification médicale, notamment pour l'ouverture de maisons médicalisées. Nous ne pouvons plus nous contenter de mesures incitatives, susceptibles de produire des résultats dans cinq ou dix ans. Les situations d'urgence existent, et elles vont se multiplier.

L'adoption de cet amendement va également nous permettre d'aborder les prochains articles dans de bonnes conditions. Pour la première fois, l'idée a été admise que nous ne pouvions nous contenter d'agir sur la demande, mais qu'il fallait aussi restructurer l'offre médicale. Je me félicite du progrès qu'a fait la discussion ce matin et j'espère qu'il y en aura d'autres dans les jours prochains.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur de la commission spéciale - Je me félicite également, au nom de la commission spéciale, de cette convergence. Le Gouvernement a voulu sous-amender un amendement du groupe socialiste, qui diminuait le rôle des caisses d'assurance maladie. Au bout du compte, nous avons adopté l'amendement corrigé, qui permet la mise en place de maisons médicalisées. On ne peut que se réjouir de ce consensus.

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat à l'assurance maladie - L'amendement qui a été adopté en fin de matinée montre bien ce que nous pouvons faire ensemble - et qu'avait déjà préfiguré la mission d'information présidée par M. Debré. Le constat sur l'assurance maladie était partagé. Nous avons prouvé qu'avec une volonté commune, nous pouvions avancer. Je souhaite d'autres débats passionnés, mais apaisés, qui aboutissent à un consensus.

M. Jean-Marie Le Guen - Les amendements identiques 6341 à 6355 auraient dû être totalement inutiles, car ils vont de soi : ils rappellent que les associations d'usagers ont un rôle majeur dans notre système de santé. Mais votre projet de loi, Monsieur le ministre... A ce propos, j'imagine que M. Douste-Blazy ne saurait tarder...

M. le Président - M. le secrétaire d'Etat représente aussi bien le Gouvernement que M. le ministre, et M. Bertrand est spécialement chargé du dossier de l'assurance maladie.

M. le Rapporteur - C'est un homme de grande qualité !

M. Jean-Marie Le Guen - Mais pour une réforme aussi essentielle, et en première lecture, le respect de l'Assemblée impose au ministre d'être à nos côtés. C'est bien parce qu'il était présent ce matin pour nous écouter qu'il a pu faire voter notre amendement, alors que la majorité semblait réticente à franchir ce pas. Si le ministre n'arrivait pas dans quelques minutes, je demanderais une suspension de séance.

M. Pierre-Louis Fagniez - Vous ne faites pas confiance à M. Bertrand ?

M. Jean-Marie Le Guen - Sans doute. Mais nous aimons bien parler aussi avec M. Douste-Blazy !

Pour en revenir à notre amendement, les associations d'usagers ont pris une place de plus en plus importante dans notre pays, comme dans l'ensemble des pays développés. L'épidémie du sida, par exemple, a frappé des personnes jeunes et actives, qui ont créé une dynamique associative. Les malades atteints de maladies chroniques, qui sont de plus en plus nombreux, ont également envie, si ce n'est besoin, de s'impliquer davantage dans les processus de soins.

Depuis la Libération, les représentants des assurés étaient traditionnellement les organisations syndicales, agissant en tant que gestionnaires du salaire différé. Mais aujourd'hui, nous sommes au-delà de cette seule notion. Les organisations syndicales demeurent les représentants les plus légitimes des assurés, mais l'intervention des associations d'usagers est devenus indispensable. Les mentionner dès l'article premier serait une garantie de bon fonctionnement de nos institutions de santé.

M. le Rapporteur - Avis défavorable. Depuis la loi de mars 2002, la place des usagers a été confortée, et M. Le Guen comme moi avons pu apprécier la qualité de leurs représentants au sein du haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie. La commission est donc très favorable à la reconnaissance du rôle des assurés, mais elle n'a pas sa place dans l'article premier. Par ailleurs, la rédaction de l'amendement n'est pas satisfaisante. Mais la commission avait déposé d'autres amendements, que vous aviez votés d'ailleurs, Monsieur Le Guen, visant à conforter la place des usagers au sein des conférences nationale et régionale de santé. Cela permettra de considérer leur avis à tous les niveaux.

M. le Secrétaire d'Etat - Avis défavorable, pour les mêmes raisons.

M. Jean-Marie Le Guen - J'accepterais volontiers les rectifications rédactionnelles que vous pourriez suggérer si cela suffisait à faire apparaître, dès l'article premier, que le droit est donné aux usagers de s'exprimer sur les sujets qui les concernent.

Les amendements 6341 à 6355, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

L'article premier, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ARTICLE PREMIER

M. le Président - J'appelle les amendements identiques 316 à 327.

M. Alain Bocquet - Il s'agit de simplifier l'application, au niveau régional, des actions de santé publique définies sur le plan national. Tous les observateurs ont noté la complexité du dispositif proposé par le Gouvernement et, surtout, l'inquiétant cloisonnement entre décideurs et financeurs. Mieux vaut une architecture plus simple et plus cohérente, celle que nous proposons.

M. Maxime Gremetz - Mon amendement 317 est très semblable (Sourires). J'ai le souvenir précis du tableau qu'avait présenté M. Dubernard lors de l'examen, par la commission, du projet de loi de santé publique. Nous aurait-il été présenté aujourd'hui qu'il aurait utilement éclairé nos collègues.

M. le Président - Nous ne sommes pas dans une salle de travaux pratiques, Monsieur Gremetz !

M. Maxime Gremetz - Il faut innover, Monsieur le président ! L'architecture que nous propose le Gouvernement ne nous convient pas du tout. D'ailleurs, c'est une régression par rapport à ce qu'avait amorcé M. Dubernard qui, lui, souhaitait démocratiser le système. Pour notre part, nous continuons de proposer la création de comités régionaux de santé publique, pour éviter de laisser les ARH décider seules de tout. Est-il normal que ces agences distribuent comme elles l'entendent, et sans contrôle, les crédits votés par le Parlement ? Est-ce là une gestion démocratique ? Nous avions voté contre ce dispositif, institué par la loi Juppé, car nous savions bien qu'il s'agissait d'une forme d'étatisation. Nous continuerons donc de demander la création de comités régionaux, auxquels pourront participer tous ceux qui sont concernés par la politique de santé.

M. Jean-Luc Préel - C'est une très bonne idée.

M. Maxime Gremetz - En effet, mais vous savez comme moi qu'elle a été repoussée par la majorité. En l'état actuel des choses, vous dites vouloir responsabiliser les assurés, mais vous ne leur donnez pas le droit à la parole ! Dans ces conditions, comment prétendre prendre en compte les besoins réels de chaque région pour élaborer des propositions conformes aux aspirations de la population locale ? J'ajoute...

M. le Président - Pour conclure...

M. Maxime Gremetz - ...que le dispositif proposé marque une régression évidente, puisque un seul homme, désigné par le Gouvernement sera appelé à décider seul, les pouvoirs des représentants des élus et des salariés étant réduits à leur plus simple expression. Où est la démocratie dans un pareil système ?

M. le Rapporteur - La commission a rejeté ces amendements, non qu'elle demeure insensible aux arguments de M. Gremetz, mais parce que les dispositions proposées figurent dans la loi de santé publique, qui sera vraisemblablement adoptée avant la fin de la législature. Maxime Gremetz a lui-même rappelé que nous avions rétabli la conférence nationale et les conférences régionales de santé, ce qui montre que nous souhaitons, nous aussi, la démocratisation qu'il appelle de ses vœux.

M. Gérard Bapt - Dans ces conditions, le rapporteur se fera un devoir de défendre l'amendement de M. Gremetz pendant la navette...

M. le Rapporteur - Vous devriez savoir, Monsieur Bapt, que le projet de loi de santé publique ne reviendra plus devant nous.

M. Gérard Bapt - Je me réjouis que les amendements de nos collègues communistes et républicains aient passé le cap de l'article 40 mais je m'étonne que cela n'ait pas été le cas pour les nôtres, qui demandaient l'installation d'agences régionales de santé. Le dispositif que nous proposions était pourtant le même, car nous considérons également qu'en matière de santé publique, la région est l'échelon pertinent...

M. le Rapporteur - C'est un autre débat ! Vous faites de l'obstruction !

M. le Président de la commission spéciale - Nous ne parlons pas de santé publique, mais d'assurance maladie !

M. Gérard Bapt - La santé publique est un ensemble. J'attends de savoir pourquoi nos amendements ont été déclarés irrecevables.

M. le Président - Je suis saisi par le groupe des députés communistes et républicains d'une demande de scrutin public sur les amendements 316 à 327.

M. Jean-Marie Le Guen - Je vous le dis tout net, Monsieur le ministre, vous n'imposerez pas un système de santé piloté par un homme seul et incontrôlé. Nous ne reconnaîtrons aucune légitimité à ses décisions. Nous refusons que se dissimulent ainsi derrière une apparente irresponsabilité ceux qui seront en fait chargés de réduire la protection sociale de nos concitoyens.

Puisque le ministre est à présent arrivé, je souhaite revenir un instant sur l'article premier. Permettez-vous qu'au cours de la navette, on reconnaisse le rôle des associations d'usagers dès cet article ? Vous n'avez pas été en mesure de les recevoir avant le dépôt de ce texte, mais vous connaissez leur importance dans le domaine de la santé. C'est pourquoi j'espère que vous trouverez le moyen de les réintroduire à l'article premier.

M. Maxime Gremetz - Cessons de jouer au ping-pong, Monsieur le rapporteur ! Lors de l'examen du texte sur la santé publique, on nous a dit que ce que nous proposions aurait sa place dans le projet sur l'assurance maladie, et là, on nous renvoie au texte sur la santé publique ! J'observe en outre que les grands principes qui étaient posés dans ce dernier sont contredits dès qu'il s'agit de dégager des moyens. Le ping-pong, je préfère y jouer sur table. Assez d'hypocrisie !

M. le Rapporteur - Ne nous accusez pas ainsi ! Moi qui tout à l'heure saluais votre sens de la démocratie, j'ai l'impression de voir King Kong réapparaître (Sourires). La réponse à cet amendement est inscrite noir sur blanc dans le texte relatif à la santé publique.

A la majorité de 25 voix contre 9, sur 34 votants et 34 suffrages exprimés, les amendements 316 à 327 ne sont pas adoptés.

M. le Président - Nous en arrivons aux amendements identiques 6519 à 6533.

M. Jean-Marie Le Guen - Notre pays a un système de PMI qui fonctionne bien pour les enfants de moins de 2 ans, mais la médecine infantile baisse ensuite la garde et la médecine scolaire est tout à fait insuffisante. Notre amendement rappelle donc la priorité qu'il convient de donner au suivi des enfants lors de leur scolarité.

Mme Elisabeth Guigou - La prévention a un rôle crucial à jouer dans toute réforme de l'assurance maladie et l'on ne peut pas se contenter, comme nous l'avons sans doute tous trop fait dans le passé, de n'agir que sur le curatif. La prévention permet de limiter par la suite le recours à l'assurance maladie, en termes de remboursement des soins. Elle est donc une source d'économies.

Elle commence à l'école et doit se poursuivre sur le lieu de travail. Nous avions mis en place plusieurs dispositifs et accepté notamment une revalorisation des honoraires des dentistes en échange d'un effort de prévention de leur part, en particulier de visites systématiques à l'école. Mais l'éducation à la santé, c'est aussi la lutte contre l'obésité, le contrôle de la vue et bien d'autres problèmes qu'il vaut mieux repérer précocement.

M. Alain Claeys - Il ne peut y avoir de réorganisation de notre système de soins sans une politique volontariste en matière de prévention. Dans les écoles, les collèges et les lycées, elle relève de la responsabilité exclusive de l'Etat et il ne faudrait pas que les carences de ce dernier obligent les collectivités locales à se substituer à lui, car cela ne ferait que renforcer les inégalités territoriales. La prévention est un axe essentiel de la réforme de l'assurance maladie.

M. Gérard Bapt - Nos amendements peuvent sembler aller de soi mais ils supposent un tel rattrapage de moyens qu'il n'est vraiment pas inutile de les inscrire dans le code de la santé publique. Ma commune est l'une des dix où a commencé un suivi expérimental de quatre ans de l'obésité, problème majeur de santé publique. Il faut savoir que, sur trois enfants en surpoids, deux deviendront obèses et qu'une majorité de ces obèses développera une maladie métabolique ou souffrira d'hypertension artérielle ou d'une affection cardiovasculaire. Mais dix communes, c'est peu. L'ajout que nous proposons serait de nature à accroître le nombre d'initiatives de ce genre.

M. le Rapporteur - La commission est consciente de l'importance de la prévention et de l'éducation à la santé, en particulier à l'école. En 1989, j'ai eu la charge, à Lyon, du système scolaire et donc de la santé scolaire. J'avais pu constater que seules 17 communes, en France, qui s'occupaient directement de cette question mais que les résultats y étaient bien meilleurs qu'ailleurs. Bien sûr, cela coûtait cher : 22 millions de francs, ce qui même pour une ville comme Lyon était beaucoup. Mais l'enjeu en valait la peine.

Pour le reste, même réponse que précédemment : cela relève de la loi sur la santé publique. Pourquoi n'abordons-nous pas enfin le sujet de l'assurance maladie ?

M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale - L'éducation à la santé, la prévention, la médecine scolaire sont en effet des éléments essentiels d'une politique de santé publique. C'est pourquoi nous réglerons ces questions dans le cadre du projet de loi sur la santé publique, qui viendra en deuxième lecture au Sénat le 9 juillet. J'ai d'ailleurs l'intention de préparer avec le ministre de l'éducation nationale une contribution commune visant à mieux définir et à développer la médecine scolaire.

M. Maxime Gremetz - La partie de ping-pong continue ! Vous nous renvoyez à la loi sur la santé publique, mais peut-être ne savez-vous pas, Monsieur le ministre, puisque vous n'étiez pas alors à ce poste, que tous nos amendements sur ces sujets avaient été repoussés, au motif qu'on devait examiner cela dans le cadre de la réforme de l'assurance maladie !

La santé à l'école est une question majeure, comme la santé au travail. Chaque enfant devrait avoir droit à des visites médicales régulières. Mais les moyens manquent terriblement. Peut-être y a-t-il assez d'infirmières scolaires à Paris, mais ce n'est pas le cas en Seine-Saint-Denis ou en Picardie, où la situation est dramatique - M. Bertrand pourrait vous le confirmer (M. le président de la commission s'exclame). Des enfants sont en échec scolaire tout simplement parce qu'ils entendent mal ou qu'ils voient mal. Pourquoi ne prend-on aucune mesure ?

Une vaste enquête épidémiologique menée aux Etats-Unis, et qui n'a pas d'équivalent en France, a révélé une baisse de 0,5 % par an du nombre de nouveaux cas de cancer après des efforts de prévention sans précédent. La prévention est un investissement humain, et aussi un investissement pour la sécurité sociale !

M. le Président - Vos cinq minutes sont écoulées !

M. Maxime Gremetz - Puisque vous me bousculez, je demande un scrutin public sur ces amendements.

M. le Rapporteur - Mercredi prochain à 12 heures au Sénat, l'office parlementaire d'évaluation des politiques de santé, qui est présidé alternativement par les présidents des deux commissions des affaires sociales, présentera devant les journalistes son premier rapport, qui est une synthèse des travaux effectués en France sur le cancer du sein. Vous serez le bienvenu à cette réunion.

M. le Président - Je suis saisi par le groupe communiste d'une demande de scrutin public sur les amendements 6519 à 6533.

M. Maxime Gremetz - J'imagine que ce rapport contient des propositions en matière de prévention. Comment se fait-il que vous n'en repreniez aucune ici ?

M. le Rapporteur - Cela relève du projet de loi sur la santé publique.

M. Maxime Gremetz - Il n'y a rien de concret dedans ! Elle ne contient que des affirmations de principe.

M. le Ministre - 57 plans de prévention figurent en annexe de ce projet, et celui-ci pourra être amélioré le 9 juillet au Sénat.

M. Maxime Gremetz - Il n'y aura toujours pas de moyens pour le mettre en œuvre, là est le problème !

M. Jean-Marie Le Guen - Je voudrais faire une remarque de fond sur les limites de notre débat. Si nous ne sommes pas ici pour parler des problèmes de santé, si pour le rapporteur et le Gouvernement les questions de l'assurance maladie se résument à la gouvernance et au financement, qu'on nous le dise tout de suite ! Mais alors pourquoi avoir fait voter l'article premier ?

Du reste, nous éprouvons un sentiment de malaise car, tandis que nous travaillons à essayer d'améliorer la santé de nos concitoyens, certains de nos collègues pressent le Premier ministre d'abroger la loi Evin, afin de relancer la consommation de vin ! Croyez-vous que, quand on parle de la santé des enfants, on puisse s'abstraire des problèmes d'alcoolisme ? (Exclamations sur les bancs du groupe UMP)

M. le Rapporteur - Je rappelle haut et fort que ce texte est la pièce maîtresse d'un ensemble de projets sur la santé publique, la simplification du droit...

M. Jean-Marie Le Guen - Répondez sur la loi Evin !

M. le Rapporteur - ...l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées. L'honneur de ce gouvernement sera d'avoir donné un nouvel élan à notre politique de santé (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Jean-Marie Le Guen - A la buvette !

A la majorité de 28 voix contre 9 sur 37 votants et 37 suffrages exprimés, les amendements identiques 6519 à 6533 ne sont pas adoptés.

M. le Président - Les amendements 328 à 339 sont identiques.

M. Maxime Gremetz - Comme j'ai beaucoup à dire et que vous avez tendance à réduire le temps de parole, je vais présenter les amendements un par un.

M. le Président - Ils doivent être présentés par les orateurs présents, comme les présidents de groupes en ont convenu avec M. le Président de l'Assemblée nationale. Je suis prêt, néanmoins, à vous donner un peu plus de cinq minutes de temps de parole.

M. Maxime Gremetz - L'amendement 329 vise à organiser une visite médicale annuelle obligatoire jusqu'à l'âge de seize ans, car la santé scolaire est un élément fondamental de l'organisation de la santé publique. Je note à ce propos que la plupart de nos amendements concernant la prévention sont tombés sous le coup de l'article 40.

Or, la Picardie, par exemple, accumule un certain nombre de retards étroitement liés les uns aux autres : prévention, santé publique, pouvoir d'achat, emploi, salaires, formation. Et ce ne sont pas les cinq milliards du plan Borloo qui règleront quoi que ce soit alors que les 40 000 habitants des quartiers nord d'Amiens, sur décision unilatérale de l'ARH, vont être victimes d'un regroupement hospitalier. M. Gest connaît bien le projet.

M. Alain Gest - Cela n'a aucun rapport avec notre sujet.

M. Maxime Gremetz - Heureusement que ce n'est pas vous qui en jugez. Vous n'avez toujours pas compris le message des électeurs !

M. Alain Gest - Attention à ce que vous dites !

M. Maxime Gremetz - Il y aurait beaucoup à faire pour la santé dans les quartiers où règnent le chômage et la pauvreté. Mais je vois des personnes qui rient. C'est insupportable sur un sujet aussi grave.

M. le Président - Revenons au débat, Monsieur Gremetz.

M. Maxime Gremetz - Je ne veux pas que l'on rie de la misère humaine !

M. le Président - Mais personne ne rit.

M. Maxime Gremetz - Si ! Il ne faut pas exagérer.

Au lieu de faire de grands projets, apportez des réponses concrètes et précises aux problèmes qui se posent ! A l'hôpital de Creil, par exemple !

M. le Président de la commission spéciale - Avis défavorable. La loi sur la santé publique actuellement en discussion au Sénat répond à votre demande. L'article 6 A prévoit ainsi une visite médicale préventive pendant la scolarité.

Notre débat est très sérieux, Monsieur Gremetz. Il est temps de se concentrer sur ses enjeux, car il n'est pas question de recommencer notre discussion autour du projet sur la santé publique. Nous connaissons les problèmes spécifiques de votre circonscription, mais de grâce, ne donnez pas des leçons à des collègues qui peuvent sourire non de vos affirmations, mais de la façon dont vous dirigez les débats. Continuons, mais dans la sérénité (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. le Président - Je vous remercie de ces propos apaisants, mais je rappelle que ce n'est pas M. Gremetz qui dirige les débats, même s'il les anime : c'est la présidence.

M. le Ministre - Avis défavorable. Un contrôle annuel systématique n'est pas souhaitable. Il est préférable de cibler les contrôles préventifs en dernière année de maternelle et en classe de troisième.

De plus, une mesure présentée le 29 juin dernier dans le cadre de la conférence sur la famille prévoit de renforcer le suivi de la santé des adolescents grâce à la généralisation d'entretiens de santé personnalisés en classe de cinquième et de troisième.

Enfin, la loi de modernisation sociale a instauré un bilan de santé dans le cadre de la journée de préparation à la défense.

M. Maxime Gremetz - Un amendement que j'avais déposé, adopté à l'unanimité, prévoyait un bilan de santé lors de cette journée. Or, il n'a jamais été appliqué car, nous a-t-on dit, son coût était trop élevé. Et quid des bilans de santé pour les demandeurs d'emploi ? Des millions de jeunes au chômage ne bénéficient d'aucun bilan de santé gratuit.

Les amendements 328 à 339, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Président - Les amendements 424 à 435 sont identiques.

M. Maxime Gremetz - Ces amendements concernent la prévention au travail. Nous ne pourrons pas, hélas, avoir le débat que nous aurions souhaité, beaucoup de nos amendements étant tombés sous le coup de l'article 40.

Comme la médecine scolaire, la médecine du travail ne cesse de reculer dans notre pays, alors que les accidents du travail et les maladies professionnelles ne cessent d'augmenter. Il est en gros deux catégories d'entreprises : d'un côté, celles dotées d'un comité d'entreprise et d'un CHSCT, où existe une certaine prévention en matière de santé -même si les CHSCT ne sont pas associés aux décisions et ont de moins en moins de moyens, et même si on peut douter de l'indépendance du médecin de prévention, dès lors qu'il est embauché et payé par l'entreprise ; puis celles où il n'y a ni comité d'entreprise ni délégués du personnel, et où la prévention est totalement inexistante. C'est ainsi que des millions de salariés n'ont eu aucun bilan de santé depuis des années. C'est ainsi que le scandale de l'amiante a pu durer. Bien qu'une faute grave des employeurs ait été reconnue, les victimes ont le plus grand mal à obtenir réparation. (Interruptions sur les bancs du groupe UMP) Pour avoir été moi-même victime de l'amiante, comme tous mes anciens camarades de Valeo, je sais ce qu'il en est ! Tout le monde connaissait les dangers de l'amiante et savait qu'il existait des produits de substitution. Mais sous la pression des lobbies, et comme les produits de substitution coûtaient plus cher, les entreprises ont continué d'utiliser l'amiante.

Quant aux jeunes, après les carences de la médecine scolaire, des centaines de milliers d'entre eux, au chômage, n'ont droit à aucune visite médicale de prévention gratuite. Et il n'y a même plus le service militaire, qui était au moins l'occasion d'un bilan santé.

M. le Président - Veuillez conclure, je vous prie.

M. Maxime Gremetz - D'après des statistiques de l'INRS, le stress a pourtant coûté en France, en 2000, entre 963 et 1 600 millions d'euros, soit 10 à 20 % du budget de la branche accidents du travail et maladies professionnelles.

C'est pour toutes ces raisons que je défends l'amendement 425.

M. le Rapporteur - Un reversement forfaitaire de la branche accidents du travail et maladies professionnelles à la branche maladie vise déjà à compenser les conséquences financières de la sous-déclaration des accidents du travail et maladies professionnelles. Avis défavorable à ces amendements.

M. le Ministre - Le Gouvernement est bien décidé à cerner les causes de cette sous-déclaration et à améliorer les conditions dans lesquelles les victimes peuvent faire valoir leurs droits. Il entend également renforcer l'outil statistique de la branche accidents du travail et maladies professionnelles. Le moyen d'y parvenir est la convention d'objectifs qui doit être prochainement signée avec elle, et qui améliore de façon significative les applicatifs de gestion des prestations accidents du travail, afin de mieux suivre la procédure de reconnaissance et de mieux évaluer les taux de refus. Pour l'heure, le Gouvernement n'est pas favorable à ces amendements.

M. Jean-Marie Le Guen - L'éditorialiste des Echos Favilla, que l'on ne peut suspecter d'être hostile aux entreprises, s'appuyait ce matin sur les travaux d'un chercheur qui a mené une étude comparée sur la situation des maladies professionnelles aux Etats-Unis et en France. Celle-ci montre que l'on a négligé en France l'évolution du monde du travail, notamment le développement du commerce et des services au détriment des industries traditionnelles, dont les effets sur la santé au travail étaient mieux connus -accidents dans le BTP ou la sidérurgie, maladies professionnelles dans les industries chimique ou métallurgique... De ce fait, on a négligé les troubles musculo-squelettiques ou liés au stress, lesquels ont en revanche été bien étudiés outre-Atlantique. Aux Etats-Unis, le coût réel de ces maladies a été intégré, notamment par le biais de primes, et cela a suscité de vives réactions, largement relayées par les syndicats qui ont pu ainsi peser sur les processus de production, et faire diminuer le nombre des accidents du travail et des maladies professionnelles.

Monsieur le ministre, vous qui n'avez pas hésité à alerter les Français sur de prétendus abus dans l'utilisation de notre système de soins, notamment par le biais d'arrêts maladie injustifiés, oserez-vous leur dire que le coût réel des accidents du travail et des maladies professionnelles représente un montant au moins trois fois supérieur ? Les indemnités journalières, soit dit au passage, représentent aujourd'hui 5,7 milliards d'euros, ce qui signifie que si, comme vous l'avez annoncé, vous voulez réaliser là 1,5 milliard d'économies, il vous faudra diminuer d'un tiers le nombre d'arrêts maladie ! Irréaliste !

J'en reviens à la sous-déclaration des accidents de travail et maladies professionnelles en France. Les chiffres donnés sont eux-mêmes très en dessous de la réalité, car ils ne prennent en compte que les maladies et accidents bien identifiés des industries traditionnelles.

Sans doute a-t-on très largement sous-estimé la réalité des conditions de travail dans le secteur des services. Il est indispensable de changer d'approche. Or la loi de santé publique est muette sur ce sujet, et votre projet sur l'assurance maladie ne s'intéresse qu'aux indemnités journalières. S'il existe un choix idéologique, c'est bien celui qui consiste à se retourner contre les salariés, quitte à déformer la réalité, et à laisser en revanche toute latitude aux entreprises d'exploiter leurs employés, avec les conséquences de plus en plus néfastes qui s'ensuivent pour leur santé, et pour les finances de l'assurance maladie.

M. Maxime Gremetz - M. Le Guen a cité Les Echos. Je vous renvoie à mon tour à une étude sérieuse récemment parue au Seuil sous le titre « Les désordres du travail ». Il en ressort que chaque jour 2 000 salariés du secteur privé sont victimes d'un accident entraînant un arrêt de travail. Le coût des accidents du travail et des maladies professionnelles atteindrait le chiffre colossal de 3 % du PIB.

Je sais, pour le voir de mes yeux, quelle est l'origine des sous-déclarations : des usines appartenant à des grands groupes, je vois sortir des personnes blessées, qui rentrent chez elles, mais retournent ensuite dans leur entreprise pour éviter que l'employeur ait à déclarer les accidents. Voilà la vérité, dont vous devriez vous occuper. Les tricheries massives sont avant tout le fait des grands groupes qui ne veulent pas faire de déclaration. Il faut aussi, comme nous le demandons par notre amendement, améliorer la qualité des statistiques, en commandant une véritable étude sur le sujet. Mais cela n'a pas l'air de vous préoccuper. L'importance de la question me conduit à demander un scrutin public.

Mme Martine Billard - « Quand on n'a rien à dire sur l'assurance maladie, on parle de la santé publique », a déclaré le rapporteur. Voilà en effet ce qui nous sépare. A nos yeux, il est impossible de maîtriser les dépenses de santé si on ne développe une prévention propre à éviter nombre de maladies. Oui, le nombre d'arrêts de travail et d'indemnités journalières augmente, en particulier pour les salariés de 55 à 59 ans. Ce n'est pas un hasard si l'intensité du travail fait qu'à partir d'un certain âge certains postes deviennent intenables. Aujourd'hui, sur 170 00 opérations du canal carpien, 10 000 sont prises en charge par la CNAT, alors que, on le sait, cette maladie est liée à la répétition de certains gestes professionnels induite par les nouvelles techniques de production, dans l'électronique par exemple. Or ces changements ne sont pas pris en compte dans la redéfinition des maladies professionnelles. De même, sur les milliers de cancers professionnels qui se déclarent, à peine 10 % sont reconnus par la médecine du travail. De 1997 à 2001, le nombre de maladies professionnelles est passé de 15 554 à 34 517 cas reconnus, les plus répandues étant les affections péri-articulaires, celles dues à l'amiante et les lombalgies. Améliorer les outils statistiques, comme vous l'annoncez, est sans doute appréciable. Mais quand interviendrez-vous pour prévenir le développement de ces maladies ? Dans bien des cas les entreprises sont en mesure d'agir dans ce sens à moindre coût. Reste qu'en période de chômage et de délocalisations, les salariés n'osent plus réclamer la déclaration de leurs accidents du travail, et acceptent de négocier avec l'employeur, de sorte que, à la fin, c'est l'assurance maladie qui paie. Quand nous saisirons-nous du problème de la santé au travail ?

A la majorité de 25 voix contre 6 sur 31 votants et 31 suffrages exprimés, les amendements 424 à 435 ne sont pas adoptés.

Mme Martine Billard - Je défends ensemble mes sept amendements 7544 à 7550, qui tendent à insérer dans le projet un véritable chapitre consacré à la prévention. Un rapport de la CNAM relatif à l'exécution de l'ONDAM en 2003 distingue trois facteurs principaux de croissance de cet ONDAM : le progrès des sciences et techniques médicales, le vieillissement de la population, l'épidémiologie des affections de longue durée, dont quatre se partagent 84% des prises en charge : les maladies cardio-vasculaires, les cancers, les troubles mentaux et le diabète. Face à ce constat on peut suggérer, comme l'a fait le Gouvernement, de moduler la prise en charge des ALD. Mais on peut aussi se dire qu'il n'y a pas de fatalité, et que c'est à nous d'agir pour prévenir l'apparition des quatre affections en question. Lors de la deuxième lecture de la loi de santé publique, nous avons adopté à l'initiative de M. Bur et contre l'avis du Gouvernement un amendement tendant à supprimer les distributeurs de sodas et de friandises dans les établissements scolaires. Quelle position le Gouvernement adoptera-t-il au Sénat face à cet acte de prévention ? S'agissant du cancer, une directive européenne est en débat, relative à l'étude d'un certain nombre de molécules. Jusqu'à présent le gouvernement a cherché à réduire la portée de cette directive, sous la pression du lobby des industries chimiques, renonçant ainsi à la politique de prévention qu'il déclare par ailleurs vouloir développer. C'est pourquoi je propose, par l'un de mes amendements, d'élaborer chaque année un plan national de prévention.

Il faut coordonner toutes ces politiques de prévention. Ces amendements me semblent donc particulièrement importants.

M. le Rapporteur - La commission a repoussé tous ces amendements.

M. le Secrétaire d'Etat - Même avis.

Mme Martine Billard - Et que ferez-vous au Sénat, à propos des distributeurs ?

M. Maxime Gremetz - Votre comportement est inacceptable. La moindre des politesses, entre citoyens, est tout de même de répondre lorsqu'une question est posée ! Nous n'avons pas l'habitude d'être traités de cette façon, et nous ne l'accepterons pas longtemps.

M. le Secrétaire d'Etat - Vous savez l'intérêt que je porte au débat parlementaire. Les questions que vous posez sur la prévention relèvent du texte sur la santé publique, qui est en deuxième lecture au Sénat et à propos duquel le Gouvernement gardera les positions qu'il a eues ici-même. Mais nous traitons aujourd'hui de l'assurance maladie. Vous savez que nous sommes prêts à tout débat de fond, du moment qu'il s'agit du texte que nous sommes en train d'examiner.

M. Jean-Marie Le Guen - Les deux questions qui vous ont été posées ne sont pas sans rapport avec l'assurance maladie. L'absence de réponse du Gouvernement, qui ne manque pourtant jamais de se déclarer prêt à la discussion, risque de fragiliser le dialogue. Nous avons besoin de connaître sa position à propos des distributeurs de boissons sucrées, et aussi sur le fait qu'une partie du Parlement se mobilise contre la loi Evin. Nous avons besoin que le ministre nous assure qu'il fait partie de ceux qui se battent pour la santé publique. Cela améliorerait beaucoup la crédibilité de son projet de loi.

M. le Ministre - En ce qui concerne les distributeurs de boissons sucrées, je suis formel : je n'en veux pas dans les collèges. Leurs incidences sur l'obésité sont absolument effrayantes, et je vous invite à voir à ce sujet le film qui vient de sortir sur les fast-foods. C'est une des premières mesures à prendre pour la lutte contre l'obésité. Et je suis également formel quant au respect de la loi Evin.

L'amendement 7544, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Maxime Gremetz - Je demande une suspension de séance.

La séance, suspendue à 16 h 50, est reprise à 17 heures.

L'amendement 7548, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que les amendements 7547, 7545,7549, 7550 et 7546.

M. le Président - Les amendements 352 à 363 sont identiques.

M. Maxime Gremetz - L'article 12 du décret du 1er février 2001 dispose qu'un travailleur ne peut être affecté à des travaux l'exposant à un agent cancérogène, mutagène ou toxique pour la reproduction que s'il peut faire état d'une fiche d'aptitude délivrée par le médecin du travail attestant qu'il ne présente pas de contre-indication médicale à ces travaux. Un collectif et la fédération nationale des accidentés du travail et handicapés, qui ont introduit un recours en annulation de cet article devant le Conseil d'Etat, ont été déboutés. Pourtant, les risques de discrimination que recèle cette disposition sont inquiétants. Il est inacceptable de sélectionner les individus en fonction de prédispositions supposées. Ainsi, la carte génétique des salariés pourrait être utilisée pour écarter tous ceux qui ont des antécédents familiaux pathologiques - antécédents qui pourraient par ailleurs figurer dans la puce du dossier médical personnel... Selon les prescriptions du Conseil d'Etat, le médecin du travail devrait donc écarter d'un emploi exposé aux radiations ionisantes toutes les femmes ayant un antécédent familial de cancer du sein. Et c'est ainsi que, sous prétexte de protéger les salariés, on introduit la discrimination à l'emploi en fonction de l'état de santé tout en exonérant le patronat de toute mesure de prévention. Cette conception dévoyée du système de santé au travail a poussé les pouvoirs publics à publier, en 1977, un décret fixant une limite d'exposition à l'amiante dont on savait pourtant depuis 1973 qu'elle était insuffisante pour protéger les salariés du mésothéliome. Et, selon l'épidémiologiste Marcel Goldberg, il faut s'attendre à des dizaines de milliers de morts dues à l'amiante au cours des vingt années à venir.

Va-t-on assister à la répétition de ce scandale pour les éthers de glycol, à propos desquels je ne cesse de vous alerter mais que les pouvoirs publics se refusent toujours à interdire en dépit de leur nocivité avérée et alors que des produits de substitution existent ?

Faute de pouvoir abroger l'article 12 du décret du 1er février 2001, je propose, par l'amendement 353, un système permettant d'évaluer le degré d'exposition aux risques que comporte un poste de travail pour un salarié.

M. le Rapporteur - Avis défavorable.

M. le Ministre - Même avis.

Les amendements 352 à 363, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Maxime Gremetz - Et sur un sujet aussi grave, le Gouvernement n'a rien à dire ?

M. le Ministre - La disposition proposée est inutile car il appartient au médecin du travail de proposer à l'employeur des mesures de prévention, individuelles ou collectives. La réforme permettra d'ailleurs aux médecins du travail de consacrer une plus grande partie de leur temps à la prévention « à la source ». L'inspection du travail ne peut, comme cela est suggéré, se substituer aux acteurs de la prévention au sein des entreprises.

S'agissant des éthers de glycol, le ministère de la santé agira en toute transparence s'ils se révèlent dangereux. Enfin, une négociation est engagée entre les services et ceux de M. Borloo sur le thème « santé et travail ».

M. Maxime Gremetz - Des études nombreuses et incontestables font état de la nocivité des éthers de glycol, que l'on trouve dans les cosmétiques, les peintures, les laques... Toute la population française y est donc exposée. Faudra-t-il, comme pour l'amiante, attendre quinze ans pour reconnaître ce que chacun sait, parce que les producteurs veulent écouler leurs stocks avant de mettre sur le marché les produits de substitution qui existent déjà ?

M. le Président - Les amendements 6354 à 6548 sont identiques.

M. Alain Claeys - On ne peut parler de réorganisation des soins sans inclure l'hôpital. Nous sommes tous d'accord pour dire que le système de dotation globale n'est plus opérationnel et doit être revu. En 1991, dans la loi hospitalière, et en 1999, dans la loi sur la CMU, nous avions introduit à titre expérimental la tarification à la pathologie. Il est aujourd'hui question de tarification à l'activité, qui doit concerner la médecine, l'obstétrique et la chirurgie, le reste relevant des missions d'intérêt général de l'hôpital. Sans remettre en cause la tarification à l'activité elle-même, nous en contestons la mise en œuvre, d'abord parce qu'elle se fera sur une enveloppe unique pour la clinique et l'hôpital, ce qui pénalisera l'hôpital et crée un risque de sélection des malades, ensuite parce que nous craignons que les missions d'intérêt général soient la variable d'ajustement et soient en définitive remises en cause.

La tarification à l'activité ne peut de toute façon régler à elle seule le problème des hôpitaux de proximité et elle risque d'aggraver les inégalités territoriales. J'aimerais donc savoir, Monsieur le ministre, si vous partagez nos craintes, quelles garanties vous pouvez nous donner concernant les hôpitaux de proximité et si les hôpitaux sont techniquement en mesure de mettre en place cette tarification. Ont-ils tous une comptabilité analytique ?

Quoi qu'il en soit, le Gouvernement doit négocier sur les conditions d'application de cette tarification. C'est ce que nous demandons dans nos amendements.

M. Gérard Bapt - Nous ne sommes pas opposés au principe de la tarification à l'activité, mais celle-ci pourrait aboutir au résultat inverse de celui qui est recherché si elle s'appliquait dans de mauvaises conditions. Elle a déjà un défaut majeur, celui de s'exercer dans une enveloppe fongible. Nous sommes quant à nous partisans d'une distinction entre les établissements publics et privés et nous pensons que les missions d'intérêt général doivent représenter au moins 50 % des budgets hospitaliers.

Si c'est le mauvais côté du paiement à l'acte, à savoir la recherche de rentabilité, qui est privilégié par certains gestionnaires, le travail hospitalier changera de nature et la réforme ira à l'encontre de l'état d'esprit qui prévaut actuellement dans l'hôpital public, un état d'esprit fait de disponibilité, d'enthousiasme, d'écoute du malade. C'est pourquoi une négociation sur les conditions d'application de cette tarification est absolument nécessaire.

M. le Rapporteur - La commission a repoussé ces amendements, car la négociation existe déjà. Le code de la sécurité sociale prévoit en effet que les grandes décisions liées à la tarification à l'activité doivent être prises après consultation des fédérations, lesquelles sont au demeurant toutes favorables à celle-ci (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste).

Quant à la mission d'accompagnement, elle existe déjà également. C'est l'article 23 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 qui l'a créée.

M. le Ministre - Les mesures proposées ont déjà été prises par voie réglementaire. Le Gouvernement a en effet, dès le début, mis en place les instances de concertation. L'arrêté du 20 novembre 2002 a ainsi créé un comité de suivi et de concertation réunissant les représentants de l'hospitalisation publique et privée, lequel a été consulté à toutes les étapes importantes. Un arrêté du 25 mai 2004 a ensuite ouvert le comité de suivi à l'ensemble des représentants syndicaux et institutionnels des établissements de santé. Toutes les modalités de la réforme y seront débattues. Une mission d'audit et d'accompagnement a été créée pour aider les établissements à s'y adapter. Enfin, un comité d'évaluation a été créé, associant des experts et des acteurs hospitaliers, pour mesurer les effets de la réforme, en tirant parti des expériences étrangères, en particulier allemande, et proposer d'éventuelles améliorations.

Comme vous le voyez, le Gouvernement est conscient des difficultés et se donne les moyens de les traiter dans la concertation et l'échange permanent avec les acteurs hospitaliers. Si cela est nécessaire, il apportera des correctifs, par exemple pour tenir compte des sujétions particulières du service public, du poids des charges de structure des établissements ayant réalisé des investissements importants, de la nécessité de maintenir un service public de proximité ou encore de celle de préserver la capacité d'innovation des établissements.

Vous avez raison de dire, Monsieur Claeys, que la tarification à l'activité ne permettra pas de régler toutes les difficultés de financement des établissements de proximité. Il faudra que nous regardions les choses de près. Enfin, Monsieur Bapt, je suis d'accord avec vous pour dire qu'il faut se fixer un ordre de grandeur - et pourquoi pas en effet 50 % ?

M. Jean-Marie Le Guen - Je constate un certain nombre d'inflexions de la part du ministre qui vont dans le bon sens. Il me semble que vous avez un jour déclaré, Monsieur le ministre, que l'idée d'une enveloppe commune pour le secteur public et privé de l'hospitalisation vous semblait dangereuse. Pouvez-vous nous le confirmer ?

En effet, les salariés du public craignent que dans un tel cadre, on aille vers une privatisation. Les comparaisons public - public sont intéressantes, mais tout ce qui pousse aux comparaisons public - privé nous fait retomber dans un débat idéologique et bloque toute perspective de réforme.

M. le Ministre - Je ne crois pas avoir écrit cela... Vous avez raison, on ne peut pas comparer le secteur public et le secteur privé, sinon sur quelques sujets précis, parce que l'hôpital public a des missions d'intérêt général que l'hôpital privé n'a pas.

Il me paraît très important d'aller vers la tarification à l'activité, mais cela ne doit pas être l'alpha et l'oméga du financement d'un établissement public hospitalier.

M. Maxime Gremetz - L'hôpital public est dans une situation explosive. Qu'est-ce que la réforme va changer pour les malades, pour les personnels, pour le service public hospitalier ? Les personnels hospitaliers que nous avons rencontrés considèrent que la tarification à l'activité en vertu de laquelle plus l'on fait d'actes, plus l'hôpital reçoit d'argent, va conduire les hôpitaux à adopter des critères de rentabilité. Ils considèrent qu'une réforme aussi importante de l'hôpital public ne peut se faire sans un grand débat national.

M. Pierre-Louis Fagniez - J'ai été très sensible aux propos de MM. Claeys et Bapt sur le fait qu'il convient, en matière de tarification à l'activité, de distinguer secteur public et secteur privé. Le ministre nous a tout à fait rassurés sur ce point.

Monsieur Gremetz, il se trouve que je connais moi aussi un peu le service public hospitalier, et j'ai constaté que l'évocation d'une tarification à l'activité a entraîné immédiatement une mobilisation de tous les acteurs, et tout particulièrement des infirmières, qui ont vu là une mesure d'efficacité dans la gestion de la prise en charge des malades. On se plaint en effet dans beaucoup d'hôpitaux publics de ne pas pouvoir répondre à la demande ; à cet égard, le budget global avait un effet très pervers puisqu'on avait intérêt à garder un malade jusqu'au lundi plutôt que de le laisser sortir le samedi. Aujourd'hui, nos infirmières nous disent qu'elles se sont réorganisées, non pas pour « faire de l'activité » mais pour satisfaire à la demande. Soyez donc rassuré.

Les amendements 6534 à 6548, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Jean-Marie Le Guen - Les amendements 6549 à 6563 sont défendus.

Les amendements 6549 à 6563, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Président - Nous en venons aux amendements identiques 6504 à 6518.

M. Jean-Marie Le Guen - Certains sujets relèvent bel et bien de la santé publique : sécurité sanitaire, environnement, comportements alimentaires et addictifs... Mais dans le projet sur la santé publique, on a aussi fixé des objectifs dits de santé publique qui relèvent plutôt de politiques publiques de santé, dans la mesure où elles ne sont pas à mener simplement avec les moyens de l'Etat, mais en liaison avec l'ensemble des soignants. On oublie de nous dire quel sera le lieu d'animation de ces politiques. Par nos amendements, nous proposons la création de conférences nationales pour examiner annuellement, sous l'autorité du ministre, les moyens consacrés par les divers intervenants à telle ou telle pathologie.

Par exemple, qui relèvera le défi posé par la maladie d'Alzheimer ? Le professeur Debré a déclaré que, dans quelques années, plus d'un million de Français seront touchés. Allons-nous laisser l'assurance maladie ou la CNSA créer quelques centaines de milliers de places pour les personnes dépendantes ? Allons-nous mener une politique de dépistage précoce et d'animation médico-sociale ? Qui arbitrera entre les sommes en jeu, les différentes préconisations et les différents acteurs qui auront des intérêts contradictoires ?

Il est nécessaire de disposer, pour ce type de pathologie, de lieux précis où s'élaborent des stratégies coordonnées.

M. le Rapporteur - Avis défavorable.

M. le Ministre - Même avis.

M. Jean-Marie Le Guen - Il me semble que cette question mériterait un commencement de réponse de la part du Gouvernement.

M. le Ministre - Il suffit de demander (Sourires).

Le Gouvernement a déjà entrepris d'améliorer la prise en charge des personnes atteintes de pathologies lourdes.

55 % des dépenses de l'assurance maladie concernent les personnes en ALD. C'est d'ailleurs une des raisons de la réforme de leur prise en charge amorcée lors du PLFSS de 2004.

Afin d'améliorer la coordination des soins, l'article 3 du présent projet renforce le protocole de soins établis par le PLFSS de même que le périmètre adéquat de prise en charge des soins par l'assurance maladie. Cet article donne également compétence à la Haute autorité pour faire des recommandations quant aux actes et prestations ouvrant droit à exonération.

Le Gouvernement s'est également engagé à développer les réseaux de santé dont l'intérêt est d'assurer précisément la coordination de la prise en charge des personnes en ALD.

Enfin, un plan national de prise en charge des maladies rares et des maladies chroniques est en cours d'élaboration.

Dès lors, il n'est pas opportun de mettre en place ces conférences nationales.

M. Jean-Marie Le Guen - Le problème n'est pas de savoir si la prise en charge sociale des personnes atteintes de ces maladies sera améliorée. Il s'agit du problème financier : l'argent de la CNSA sera-t-il destiné à créer des places en institution ? Est-ce plutôt du côté de la politique du médicament qu'il faudra œuvrer avec l'assurance maladie ? Ou bien faudra-t-il organiser un dépistage précoce et développer des processus d'accompagnement médico-sociaux ? Qui arbitrera entre ces différentes préconisations et les dépenses qui sont en jeu ?

M. le Ministre - Je pensais que vous aviez compris mon propos.

Une politique de santé publique digne de ce nom ne saurait être dispersée selon les pathologies.

Nous allons mettre en place une conférence nationale de santé avec tous les acteurs concernés et une Haute autorité avec les professionnels de santé publique qui permettront de définir précisément une politique de santé.

M. le Rapporteur - Il importe particulièrement d'articuler politique de santé publique et assurance maladie, ce que rendent possible ces deux structures sans qu'il soit nécessaire d'en créer d'autres.

M. Maxime Gremetz - 52 % des dépenses de santé concernant l'hôpital public, je regrette qu'il n'en soit pas question dans votre projet.

Je note de plus que des organismes importants comme la commission de la transparence - issue de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé - ont été supprimés.

M. le Président de la commission spéciale - Elle a été réorganisée.

M. Maxime Gremetz - Or, cette commission a fait du bon travail.

M. le Président de la commission spéciale - Naturellement.

M. Maxime Gremetz - Elle a ainsi mis en évidence que des anti-inflammatoires dont l'élaboration a coûté 227 millions ne sont pas plus efficaces que ceux existants.

Les amendements 6504 à 6518, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Président - Les amendements 340 à 351 sont identiques.

M. Maxime Gremetz - Nous pensons qu'il convient, au nom du principe de sécurité alimentaire, de renforcer l'information du consommateur sur la composition des produits alimentaires d'origine industrielle et de responsabiliser davantage l'industrie agro-alimentaire. D'où ces amendements, dont le 341, qui tendent à exiger que sur l'emballage de tous ces produits figurent le nombre de calories et la teneur en graisses saturées et insaturées ainsi qu'en sodium.

M. le Rapporteur - Rejet.

M. le Ministre - Même avis car cet amendement n'a pas place dans le présent projet de loi. Je suis en revanche tout à fait favorable à ce que cette disposition figure dans le projet de loi relatif à la santé publique, surtout pour ce qui est de la teneur en graisses, saturées et insaturées. Le Gouvernement est prêt à déposer un amendement en ce sens le 9 juillet prochain au Sénat.

M. Maxime Gremetz - Compte tenu de cet engagement, je retire les amendements.

Les amendements 340 à 351 sont retirés.

M. le Président - Les amendements 6579 à 6593 sont identiques.

M. Jean-Marie Le Guen - Le ministre m'a reproché tout à l'heure de vouloir segmenter la santé publique quand j'ai proposé de créer des groupes de pilotage par grande pathologie. Ce sera pourtant indispensable, notamment pour les affections de longue durée. Il est vrai que vous vous contentez, vous, d'une liquidation médicalisée de ces préoccupations.

Vous espérez régler les problèmes de l'assurance maladie en changeant les comportements quand il faudrait agir sur les structures. Il faudra bien que quelqu'un - Etat, assurance maladie... - s'attelle un jour à la gestion du risque pathologie par pathologie. Des structures horizontales qui pourraient prendre la forme de services de promotion de la santé sont pour cela nécessaires, d'où nos amendements 6579 à 6593 demandant au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport avant le 31 décembre 2004 sur les conditions de création de tels services.

Alors que vous fustigez un prétendu nomadisme médical et une surconsommation de soins par nos concitoyens, on constate en réalité une sous-consommation ou, plutôt, une consommation trop tardive ou inappropriée par une large partie de la population qui, pour des raisons culturelles et non pas seulement financières, n'utilise pas notre système de soins à bon escient. D'où l'intérêt de créer des services de promotion de la santé au niveau local. Notre politique de protection maternelle et infantile est assez bonne pour les enfants, mais il faudrait la poursuivre auprès des pré-adolescents et des adolescents, en particulier dans les milieux populaires. L'Académie de médecine s'est elle-même inquiétée du risque que certaines pathologies ne soient plus dépistées après la suppression du service militaire qui donnait l'occasion d'un bilan de santé.

M. le Rapporteur - Rejet.

M. le Ministre - Même avis.

M. Jean-Marie Le Guen - Peut-on savoir pourquoi ?

M. le Ministre - Parce qu'en matière de santé publique, il faut cohésion et unité.

Les amendements 6579 à 6593, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Président - Les amendements 6490 à 6503 sont identiques.

M. Jean-Marie Le Guen - L'alcool tue dans notre pays 60 000 personnes chaque année, sans parler de ses victimes indirectes. L'alcoolisme est donc un problème majeur de santé publique qui n'est, hélas, pas du tout traité dans le projet de loi de santé publique. Il est grand temps de sortir de la torpeur sur ce sujet. Depuis la loi Evin, la mobilisation a été assez faible et bien peu de mesures ont été prises, si l'on excepte la création de centres d'addictologie prévue par la loi relative aux droits des malades -centres qui ont d'ailleurs vu leurs moyens diminuer depuis deux ans.

Pour ce qui est des moyens financiers de la lutte contre l'alcoolisme, nous en reparlerons lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Nos amendements 6490 à 6503 demandent simplement au Gouvernement de « mettre en mouvement » pouvoirs publics, professionnels de santé, associations... en organisant avant la fin de l'année des Etats généraux de la lutte contre l'alcoolisme.

M. le Rapporteur - Rejet.

M. le Ministre - Monsieur Le Guen, votre propos liminaire m'a étonné. En effet, un amendement identique à ceux que vous défendez ici a été discuté en deuxième lecture du projet de loi de santé publique, modifié en séance, avec votre accord d'ailleurs, et adopté pour figurer désormais à l'article 16 ter du texte.

Je suis donc défavorable à ces amendements, non pour des raisons de fond, mais parce qu'ils sont déjà satisfaits dans un autre texte.

M. le Rapporteur - M. Le Guen cherche à dessein à entretenir la confusion !

M. le Ministre - Après modification de l'amendement, il n'est plus demandé qu'un rapport, et non la tenue d'Etats généraux.

Les amendements 6490 à 6503, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Président - Les amendements 6476 à 6489 sont identiques.

M. Jean-Marie Le Guen - Nos amendements sont destinés à ouvrir la voie à une autre politique de santé au travail, car le système actuel ne donne pas satisfaction. On a évoqué les nombreuses pathologies qui se développent dans le milieu de travail. Nous proposons donc de doter notre pays d'une agence nationale de la santé au travail, et de sortir ainsi d'une gestion à la fois éclatée et paritaire, si l'on peut encore parler de paritarisme.

M. Maxime Gremetz - Mais si ! C'est le patron et le patron !

M. Jean-Marie Le Guen - De fait ce qu'il reste de paritarisme n'est guère propice à une véritable dynamique sociale et médicale. Devant la mission présidée par M. Debré, le président du Medef M. Seillière a été clair : l'entreprise n'a plus rien à voir avec les questions de santé, qui à ses yeux dépendent entièrement de l'Etat. Les employeurs ne souhaitent être présents que dans la branche accidents du travail. Nous avons montré aussi comment les dépenses d'accidents du travail étaient en fait reportées sur l'assurance maladie. Dans ces conditions, il importe d'intervenir en amont, et de mettre ainsi en place une médecine du travail digne du XXIe siècle. Après la longue expérience d'un système plus ou moins paternaliste, le temps est venu de créer une agence nationale, en mettant fin au partage ambigu des responsabilités entre le ministère de la santé et celui du travail.

M. le Rapporteur - Avis défavorable. Il existe déjà des organismes compétents, comme l'INVS qui possède un département santé-travail. Je pourrais vous demander pourquoi n'avoir pas créé entre 1997 et 2002 l'agence que vous proposez aujourd'hui. Reste qu'il est indispensable de rapprocher les services des différents ministères.

M. le Ministre - La création d'une force d'expertise solide et indépendante pour la santé au travail est en effet nécessaire. Le Gouvernement y réfléchit à la lumière du rapport d'évaluation de la loi de 1998, que je viens tout juste de recevoir. En revanche il n'est pas concevable de créer aujourd'hui une agence ex nihilo. L'INVS, l'INERIS, l'agence française de sécurité-santé-environnement sont au travail. Il faudra regrouper leurs compétences. L'exemple américain que vous avez cité ce matin, Monsieur Le Guen, montre que nous avons tout intérêt à monter une agence comme celle que vous suggérez. Votre proposition est intéressante, mais prématurée, d'autant que l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques n'est pas encore allé au bout de sa réflexion.

M. Maxime Gremetz - J'approuve pour ma part cette proposition. Certes, il existe des organismes qui étudient déjà ces questions. Mais l'agence nationale rassemblerait les données et surtout présenterait des propositions d'action.

M. Jean-Marie Le Guen - Et exercerait un contrôle.

M. Maxime Gremetz - J'ai fait partie du comité d'hygiène et de sécurité d'une entreprise. J'en ai tiré la conclusion qu'il fallait que le médecin du travail dispose d'un statut indépendant au sein de l'entreprise, faute de quoi son efficacité demeure limitée. Il faut également former un plus grand nombre de ces médecins. De plus, les CHSCT devraient disposer de davantage de pouvoirs et de moyens. Aujourd'hui leurs membres sont élus, mais ils dépendent de ce que l'employeur veut bien leur accorder de temps, et ils ne possèdent aucun moyen d'investigation.

J'attire l'attention sur un autre point : dans la grande majorité des entreprises, il n'existe même pas un correspondant santé. Nous avions naguère proposé qu'au moins un correspondant pour les conditions de travail soit élu dans chaque entreprise, mesure qui ne coûte rien.

Enfin, il faut songer aux moyens dont dispose la médecine du travail pour remplir son rôle. Savez-vous qu'un salarié qui demande à passer une visite médicale doit attendre des mois, voire plus d'un an ? Comment dans ces conditions garantir la santé au travail ? Je soutiens donc les amendements, sur lesquels je demande un scrutin public.

M. le Président - Il est annoncé. En attendant, commençons d'examiner les amendements 6446 à 6460, qui sont identiques.

M. Jean-Marie Le Guen - L'un des problèmes majeurs de notre système de soins est que nous ne possédons pas de véritables indicateurs de qualité. Nous savons à peu près ce que coûte l'ensemble mais nous ne connaissons pas le prix de tel ou tel produit nouvellement créé. On ne sait même pas si ce produit est de bonne qualité !

Sont visées en priorité la iatrogénie et les maladies nosocomiales. On estime que 8.000 morts par an sont dues à des intoxications médicamenteuses, mais on est bien incapable de préciser ce chiffre ! Quant aux infections contractées à l'hôpital, personne ne peut dire ce qu'il en est précisément établissement par établissement, voire service par service. Les indicateurs de qualité sont un des facteurs fondamentaux de l'évolution de notre système de santé. Ils sont indispensables pour garantir l'égalité d'accès aux soins, puisque sans eux, seuls les malades bien informés savent quels établissements éviter. Il est par ailleurs à noter que ceux qui produisent des soins de moins bonne qualité n'en ont pas forcément conscience. S'ils étaient mis devant leurs responsabilités, ils pourraient atteindre le même niveau que les autres. L'idée du zéro défaut n'est pas taboue en matière de santé.

M. Yves Bur, Président de la commission spéciale - Vous parlez du texte sur la santé publique !

M. Jean-Marie Le Guen - Pas du tout ! La production de soins est au cœur de la problématique du pilotage du système de santé. L'assurance maladie ne devrait pas pouvoir rembourser les secteurs défaillants, et l'Etat devrait pouvoir intervenir.

M. le Président - Nous revenons au scrutin public sur les amendements 6476 à 6489.

A la majorité de 17 voix contre 5 sur 22 votants et suffrages exprimés, les amendements 6476 à 6489 ne sont pas adoptés.

M. le Rapporteur - Il est indispensable de mieux connaître les complications iatrogènes provoquées par les médicaments et les traitements, ainsi que les infections nosocomiales. Mais faut-il réellement créer une structure pour cela ? L'agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé ne pourrait-elle s'en charger ? La solution est là. Avis donc défavorable aux amendements 6446 à 6460.

M. le Ministre - Ces amendements proposent d'établir un rapport sur la création d'un observatoire. Une réflexion sur la création d'un observatoire des risques médicaux est déjà en cours. Des propositions seront débattues au Sénat. Je m'en remets donc à la sagesse de l'Assemblée. Il est sûr qu'on ne peut continuer à supporter les infections nosocomiales et les 120 000 hospitalisations dues à des problèmes iatrogéniques par an sans rien faire ! La réponse doit être trouvée d'ici quelques mois.

M. Jean-Marie Le Guen - Nous ne demandons qu'un rapport, c'est-à-dire l'assurance que nous reparlerons de cette question essentielle. Je signale que les Etats-Unis, qui sont peu susceptibles de bureaucratie, disposent d'une agence spécifique sur la qualité. L'édiction des normes de qualité ne doit pas être réalisée par ceux qui procèdent aux évaluations : ce sont deux activités différentes. Il est regrettable que l'accréditation se fasse encore sur la base des procédures de l'ensemble de l'hôpital plutôt que sur les procédures médicales de chaque service. La production de normes de qualité est un élément majeur pour l'évolution de notre système. Les arguments financiers ne suffiront pas : les problèmes de qualité sont beaucoup plus susceptibles de soulever les interrogations nécessaires chez les acteurs.

Les amendements 6446 à 6460, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Jean-Marie Le Guen - Par les amendements 6461 à 6475, nous voulons attirer l'attention du Gouvernement sur l'évolution des pathologies. La population évolue, le savoir médical aussi ; il est donc logique que l'appareil de soins fasse de même. L'une des dimensions essentielles de ce changement est le vieillissement de la population. Or, nous ne disposons d'aucune vision panoramique de ses conséquences sur la santé publique. Elle est pourtant nécessaire, sur un plan stratégique et prospectif. J'ai peur que nous ne soyons plus en mesure de gérer la somme des problèmes que va induire cette évolution. Les politiques liées au vieillissement - prévention, soin, réadaptation, éducation - méritent de mobiliser le pays.

M. le Rapporteur - Avis défavorable. De nombreuses structures produisent déjà des études sur le vieillissement, comme l'INSERM, mais aussi l'école des hautes études en santé publique, qui est chargée de coordonner la recherche en ce domaine. Une coordination efficace est bien préférable à un institut spécifique.

M. le Ministre - Un institut de la longévité a été créé en mai 2002. Il avait pour objet de dresser le bilan des recherches dans ce domaine, d'en dégager les orientations et d'être le lieu de la confrontation d'idées sur les questions de santé et de société liées au vieillissement. Une place importante a été par la suite réservée aux sciences humaines et sociales. L'institut s'est ouvert aux professionnels, aux associations et aux collectivités locales. Avis donc défavorable.

Les amendements 6461 à 6475, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

AVANT L'ART. 2

M. le Président - Les amendements 532 à 543 sont identiques.

M. Maxime Gremetz - L'hôpital est le grand absent de cette réforme de l'assurance maladie, alors qu'il représente plus de la moitié des dépenses de la branche. Il subit de plein fouet la politique du Gouvernement : fermeture de lits - 120 à l'hôpital de Creil, alors que nous sommes déjà une des régions les plus mal loties -, maîtrise comptable, plan hôpital 2007 qui le jette dans la sphère marchande, avec toutes les conséquence que cela induit en matière d'offre de soins et de couverture de l'ensemble du territoire... L'hôpital n'a plus les moyens d'exercer ses missions.

Et pour cause : l'OMC exige que la santé devienne une marchandise et, relayant les souhaits du Medef, le Gouvernement concourt avec zèle à cette évolution en organisant la privatisation de la protection sociale et en cassant le socle de solidarité qui fonde notre société. Le Gouvernement prétend que chacun trouvera une solution à sa mesure dans la jungle des marchés. Pour notre part, nous refusons cette perspective inhumaine, et nous ne sommes pas les seuls, comme le prouvent les mouvements de grève qui ont secoué les hôpitaux à répétition. Que le Gouvernement écoute et entende ! Qu'il ne prenne pas ses désirs pour des réalités, car agir de la sorte se paie durement, et c'est fort dangereux pour le pays. Une autre conception est nécessaire, celle d'une politique publique de santé fondée sur une protection solidaire. Tel est le sens de l'amendement 533.

M. le Rapporteur - La commission a rejeté l'amendement. M. Gremetz ne le précise pas : il souhaite que le directeur de l'ARH subordonne son action à l'avis de la commission exécutive. Or, celle-ci est composée pour moitié de représentants de l'Etat et pour moitié de représentants de l'assurance maladie. Dans ces conditions, la meilleure coordination entre les ARH et l'assurance maladie que souhaite M. Gremetz est déjà acquise.

M. le Ministre - Au sein des ARH, l'exercice du pouvoir est réalisé en fonction d'un juste équilibre entre les prérogatives du directeur et celles de la commission exécutive. La proposition romprait cet équilibre institutionnel, voulu par le législateur, alors que la commission exécutive dispose déjà de compétences élargies. Avis défavorable.

M. Maxime Gremetz - Il se trouve que les conseils d'administration sont aujourd'hui dessaisis de tout pouvoir réel au bénéfice des ARH, ces ARH que nous proposons de supprimer. Le conseil d'administration doit pouvoir décider réellement de l'avenir de l'hôpital. Sa gestion en serait démocratisée, puisque le conseil rassemble, aux côtés des élus, des représentants du personnel, des associations de malades et des assurés sociaux.

M. le Ministre - Je respecte ce point de vue mais M. Gremetz conviendra qu'un maire ou que le conseil d'administration d'un hôpital donné n'aura pas la vision d'ensemble nécessaire à la définition d'une politique de santé générale.

M. Maxime Gremetz - Il est vrai qu'une vision globale s'impose. Pour nous, l'échelon pertinent est la région. Le problème n'est pas que le préfet prenne les décisions ; ce qui est nécessaire, c'est qu'il soit assisté d'un comité régional de santé chargé d'appliquer la politique de santé définie sur le plan national en tenant compte des particularités régionales. On ne peut se lancer dans des projets somptuaires, qui draineront toutes les ressources, alors que de si grands retards ont été accumulés à l'hôpital public, notamment dans le Nord-Pas-de-Calais, la première région industrielle de France et l'une des plus jeunes. Procéder de la sorte, c'est montrer beaucoup de mépris envers les personnes qui ont du mal à se faire soigner.

Les amendements 532 à 543, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Président - Les amendements 520 à 531 sont identiques.

M. Maxime Gremetz - L'amendement 521 est dans le même esprit : réintroduire l'hôpital dans une réforme qui l'ignore. La situation actuelle des hôpitaux est catastrophique ; au vrai, on est au bord de l'explosion. Les personnels n'en peuvent plus et la sécurité des patients est mise en péril. Comment s'en étonner ? L'hôpital est asphyxié par les restrictions budgétaires et par une privatisation rampante, et il doit subvenir aux besoins de santé croissants de la population la plus défavorisée, celle qui ne peut se tourner que vers lui. On sait bien que l'hôpital public est l'un des éléments clé de toute politique de santé, en tant que maillon privilégié de l'offre de soins. Pourtant, vous avez choisi une politique de rationnement des soins, mise en œuvre par les ARH, en privant les conseils d'administration de tout pouvoir réel. Les élus sont ainsi dessaisis de leurs prérogatives. Cela ne peut durer. Les élus, les représentants des salariés, des associations de malades et des assurés sociaux réunis au sein du conseil d'administration de l'hôpital doivent pouvoir à nouveau décider réellement de l'avenir des établissements. Les médecins et l'ensemble du personnel doivent être reconnus, chacun à sa place, comme participant à la gestion hospitalière à tous les niveaux de décision.

M. le Rapporteur - Cet amendement, comme le précédent, traite de l'organisation et du pilotage de l'hôpital public, sujet sur lequel la mission Couanau a fait, de l'avis général un excellent travail. Comme Mme Fraysse en faisait partie, je vous conseille de vous reporter aux conclusions unanimes de cette mission, lesquelles n'allaient pas tout à fait dans votre sens.

M. le Secrétaire d'Etat - Il y a à l'article 50 du projet de loi d'habilitation pour simplifier le droit un dispositif qui a fait l'objet d'une concertation et au-delà duquel il serait donc gênant d'aller aujourd'hui. Il vous donne satisfaction sur certains points, puisqu'il y aura plus de souplesse dans les établissements, avec le régime des crédits évaluatifs et le fait que le budget et les décisions modificatives ne feront plus l'objet d'une approbation expresse du directeur de l'ARH.

M. Maxime Gremetz - Tous les amendements que je défends ont été élaborés en concertation avec Mme Fraysse...

M. le Rapporteur - Que je respecte particulièrement.

M. Maxime Gremetz - Très bien mais il faudrait aussi voter ses amendements ! (Sourires) Si elle était là, elle les défendrait elle-même et vous expliquerait qu'après avoir écouté beaucoup de professionnels de l'hôpital, elle a infléchi sa position. Elle pourra d'ailleurs vous le confirmer elle-même ce soir.

Les amendements 520 à 531, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Président - Nous en arrivons aux amendements identiques 7639 à 7653.

M. Jean-Marie Le Guen - Ce sont des amendements très importants qui insistent sur la nécessité de construire des réseaux de soins dans notre pays. Il en existe déjà, leur mise en œuvre a commencé de façon artisanale au début des années 1990. Ils étaient ensuite censés trouver une nouvelle dynamique avec la réforme Juppé et la commission Soubie, mais les résultats se sont fait attendre. Dans la loi de janvier 2002 sur la modernisation du système de santé, de nouvelles propositions ont été faites et une enveloppe dédiée au développement national des réseaux a été créée. Le rôle de celle-ci s'est accru en 2003 et 2004 mais les sommes qu'elle contient restent marginales.

Toutes les études montrent pourtant que les réseaux de soins fonctionnent à la plus grande satisfaction des praticiens, des malades et des organismes de l'assurance maladie. Je pense en particulier au réseau mis en place par la MSA en gérontologie ou à ceux organisés par Groupama. Il semblerait que d'autres réseaux soient moins performants, par exemple celui sur le diabète, mais en tout état de cause, ce sont les réseaux qui sont les mieux à même d'assurer une prise en charge globale, associant prévention et soins, des malades. Ils sont particulièrement adaptés aux publics les moins favorisés, par exemple, dans le cas du réseau MSA, aux ruraux très âgés.

L'idéal serait donc d'arriver à un premier niveau constitué de cabinets regroupant plusieurs professionnels de santé ; à un deuxième, constitué par le réseau, qui seul permet un véritable décloisonnement entre la médecine de ville et l'hôpital et dans lequel le DMP sera particulièrement utile. Le troisième niveau est bien sûr l'agence régionale de santé.

L'objet de nos amendements est d'affirmer la volonté politique de développer cette offre globale coordonnée.

M. le Rapporteur - En commission, M. Le Guen avait retiré son amendement. Je lui avais fait remarquer que la notion de réseau figurait déjà à l'article 162-5 du code de la sécurité sociale et que l'article 6 du projet abordait cette question. La logique serait de le retirer à nouveau, quitte à en rediscuter lorsque nous débattrons de l'article 6.

M. le Secrétaire d'Etat - Nous croyons aux réseaux de soins, l'effort budgétaire qui leur est consenti en est la preuve : la dotation est passée de 23 millions en 2002 à 125 millions en 2004. Mais ce sont les moyens, non les fins, qui nous séparent : vous prônez l'obligation, nous préférons l'incitation. L'expérience montre que le volontariat est un gage de réussite. Pour cette raison, avis défavorable.

M. Jean-Marie Le Guen - Nous ne souhaitons pas obliger, mais nous voulons que se manifeste une volonté politique. La réunion, il y a quinze jours, du haut conseil de l'assurance maladie, qui nous a permis d'auditionner les responsables de la caisse nationale et ceux de votre ministère, a été l'occasion de constater qu'elle n'existait pas. Depuis la commission Soubie de 1996, seulement quelques dizaines de réseaux ont été constitués. Pourquoi ? Parce que ceux qui aimeraient faire partie d'un réseau doivent se débrouiller seuls pour trouver des partenaires et pour faire toutes les démarches administratives. Tant qu'on procédera de cette façon, cela ne marchera pas.

Nous proposons, nous, que dans chaque caisse primaire d'assurance maladie, deux ou trois personnes soient là pour expliquer comment fonctionne un réseau, repérer ceux qui sont intéressés et les aider à en constituer un. Il faut donner à cette réforme une impulsion politique, tout le monde y a intérêt.

M. le Rapporteur - Je partage votre enthousiasme pour les réseaux, mais je pense que leur mise en place est précédée par un temps de latence. Je connais bien le réseau cancer ONCORA, en Rhône-Alpes, qui marche extrêmement bien : il a démarré très lentement, sur la base de l'adhésion spontanée. On ne peut pas imposer ; informer, pourquoi pas, mais nous aurons l'occasion d'en reparler plus loin.

M. le Secrétaire d'Etat - La volonté politique existe. Ce qui nous différencie, c'est la voie choisie. Le volontariat nous paraît être la meilleure garantie de succès - ce qui n'empêche pas d'être incitatifs vis-à-vis de l'assurance maladie.

Le fait est qu'aujourd'hui, des réseaux fonctionnent très bien avec la MSA - peut-être parce que le maillage territorial est meilleur, peut-être aussi du fait du partenariat avec Groupama.

Les amendements 7639 à 7653, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Président - Monsieur Le Guen, je vous propose de reporter l'examen de votre amendement 8185 à lundi, lorsque nous aborderons le dossier médical personnel.

M. Jean-Marie Le Guen - D'accord.

M. le Président - Nous en arrivons aux amendements 6967 à 6981.

M. Jean-Marie Le Guen - Nous sommes confrontés à de très sérieux problèmes de démographie des professions de santé ; il nous faut faire un gigantesque effort pour mener une politique globale, qui passe par la requalification des actes et par une redistribution entre médecins et personnels paramédicaux. Aujourd'hui, une sage-femme est à Bac + 5, une infirmière à Bac + 4, beaucoup d'aides-soignants sont à Bac + 2. Nous proposons par ces amendements une véritable planification des recrutements, des qualifications, des formations, en sachant que les professionnels de santé connaîtront des restructurations à l'intérieur de leur profession. Il faudra par exemple que dans telle ou telle petite ville, on puisse passer d'un service spécialisé n'ayant plus les moyens de fonctionner vers un service de suite. Les formations devront évoluer, mais nous pouvons rassurer les personnels concernés.

Plus de 40 % d'infirmières renoncent à exercer, en moyenne, dix ans après avoir obtenu leur diplôme.

M. le Rapporteur - Sept ans.

M. Jean-Marie Le Guen - Ne pourrait-on imaginer des réaffectations dans les maisons médicalisées ou dans les services de médecine scolaire ?

Il faut mobiliser l'ensemble des ressources humaines de ce secteur et mettre fin aux rigidités existantes.

M. le Rapporteur - Avis défavorable.

Votre amendement préconise la réunion d'une conférence nationale sur la profession médicale avant le 31 décembre 2004.

M. Jean-Marie Le Guen - J'accepte un sous-amendement pour changer la date !

M. le Rapporteur - Il faudrait donc aller très vite après la promulgation de la loi !

En outre, vous parlez de planification quand c'est d'action que nous avons besoin - et, précisément, nous agissons.

Enfin, notre projet contribue à résoudre un certain nombre de questions que vous posez à travers la coordination des soins, la mise en place de réseaux, les protocoles de soins pour les ALD.

J'ajoute que la commission a déposé un amendement pour créer une union nationale des professions de santé ainsi qu'une union régionale aux côtés des URML. Les professionnels eux-mêmes ont un grand rôle à jouer que ce soit en matière de formation continue ou de transferts de compétences.

M. le Secrétaire d'Etat - Avis défavorable.

Une conférence nationale avant le 31 décembre peut-elle régler les questions qui se posent ? Non. Je crois davantage à la concertation permanente. Nous avons joué cette carte pour élaborer notre projet. Vous avez parlé des infirmières : un exemple nous a été donné dans le Calvados. 10 % d'entre elles n'exerceront jamais et 30 % refusent de s'installer. Une conférence permettrait-elle donc de tenir compte de ces évolutions ? Non.

En outre, comme l'a dit M. le rapporteur, ce texte propose de nouveaux outils de représentation pour penser les évolutions et les adaptations nécessaires.

M. Jean-Marie Le Guen - Ne jouez pas trop avec la procédure : c'est l'article 40, vous le savez bien, qui nous amène à proposer une conférence à une date qui peut ne pas vous plaire !

Ce que nous voulons, c'est savoir si l'Etat mettra ou non en œuvre un plan d'action global et coordonné, car tout dépend de lui : numerus clausus, qualifications, emplois, normes. Il n'a pas à attendre qu'un syndicat d'infirmières du Calvados lui soumette des problèmes spécifiques : il doit agir !

Oui, la planification est nécessaire quand il faut douze ans pour former un médecin ! C'est sans doute parce que nous n'avons pas été capables de planifier que nous connaissons aujourd'hui cet invraisemblable désordre de la démographie médicale.

Il faut une gestion globale des ressources humaines dans un secteur où les personnels ressentent un malaise profond.

M. le Rapporteur - La mission Couanau dont vous faisiez partie, Monsieur Le Guen, a diagnostiqué ce désenchantement. C'est aux structures administratives de changer leurs modes de gestion. J'attends beaucoup de la réforme du pilotage.

M. le Secrétaire d'Etat - M. Le Guen propose de fixer un cadre, mais il faut compter avec l'ensemble des acteurs concernés : l'Etat n'est pas seul.

On ne peut d'ailleurs pas dire que les professionnels de santé soient abandonnés compte tenu du travail accompli, notamment pour la validation des acquis de l'expérience. Voilà un exemple de promotion et une solution d'avenir !

M. Maxime Gremetz - J'ai rencontré des infirmières qui travaillent dans le secteur privé depuis quinze ans : elles n'ont plus le droit d'entrer dans le bloc opératoire faute de diplôme, et vous parlez de validation des acquis ?

M. le Rapporteur - Ce n'est pas le même problème. Il s'agit là des aides opératoires.

M. Maxime Gremetz - En quoi est-ce un autre problème ?

Alors que les conditions de travail de ces personnels sont ce que l'on sait, souvenez-vous de ce que nous ont dit les responsables du secteur de la santé, les grands professeurs. Tous font l'éloge de ces personnels toujours dynamiques, disponibles, pleins d'initiative même lorsqu'ils sont épuisés. La situation actuelle ne peut plus durer.

M. le Président - Veuillez conclure.

M. Maxime Gremetz - Nous sommes obligés d'utiliser des subterfuges pour que nos amendements ne tombent pas sous le coup de l'article 40 et que les sujets importants que nous souhaitons aborder puissent venir en débat. La réunion d'une Conférence nationale sur la profession médicale associant tous les acteurs concernés ne coûte rien.

Les amendements 6967 à 6981, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Président - Les amendements 580 à 591 sont identiques.

M. Maxime Gremetz - Tous les gouvernements successifs ont déploré que la prévention et l'éducation à la santé demeurent les parents pauvres des politiques de santé. M. Mattéi lui-même avait dénoncé la faiblesse de leurs moyens : 3,6 milliards d'euros par an seulement sur un total de dépenses de santé de 145 milliards. Pourtant, tous ces gouvernements, comme aujourd'hui celui-ci, ont contribué à ce que l'Etat se désengage de la médecine préventive. La médecine scolaire a été littéralement abandonnée, au point que les obligations légales de suivi médical des enfants scolarisés ne sont plus remplies. Les conditions de travail sont laissées au bon vouloir du patronat alors que tous les indicateurs de la santé au travail montrent que la situation s'est dégradée et que les employeurs sous-déclarent les accidents du travail et les maladies professionnelles - sous-déclaration particulièrement coûteuse pour l'assurance maladie et pour les salariés. La lutte contre les risques environnementaux et alimentaires est au point mort, malgré la tragédie de la maladie de la vache folle ou le développement de la légionellose.

L'examen du projet de loi de santé publique, confirme, hélas, ce triste constat. Ce texte, conjugué à celui sur la décentralisation -deux textes, soit dit au passage, dont l'examen se poursuivra durant cette session extraordinaire, ce qui illustre le respect porté au Parlement...-, entérine ce désengagement de l'Etat en matière de prévention et le transfert sur les régions du coût de cette politique. Non, décidément, la santé n'est pas une priorité de ce Gouvernement, pas plus que la prévention. Si l'Etat doit jouer tout son rôle dans la définition des objectifs de santé publique et de prévention, les structures publiques nationales et régionales doivent également se mobiliser. Une nouvelle dynamique est nécessaire.

D'où l'amendement 581 demandant que la loi de finances pour 2005 comporte un plan pluriannuel de soutien à la recherche en matière de santé et de prévention, comme vous l'ont d'ailleurs demandé les chercheurs. J'espère que vous les entendrez.

M. le Rapporteur - La commission a repoussé cet amendement. Le projet de loi de santé publique répond à ces préoccupations. Un Institut national du cancer, une Ecole des hautes études en santé publique ont été créés, un plan cancer et un plan santé/environnement lancés.

M. le Secrétaire d'Etat - Des outils existent en effet déjà. Le futur plan de cohésion sociale doit en outre permettre d'ouvrir une négociation sur le thème santé et travail.

Les amendements 580 à 591, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Président - Les amendements 544 à 555 sont identiques.

M. Maxime Gremetz - Nous demandons par ces amendements que le Gouvernement transmette avant le 1er septembre 2005 au Parlement un rapport sur l'opportunité de la création à l'échelon national d'un service public pour le maintien à domicile des personnes âgées, étant entendu que les conclusions de ce rapport pourraient donner lieu à un projet de loi dans l'année suivante.

La nation doit répondre à l'aspiration très forte d'un grand nombre de personnes âgées de pouvoir rester à leur domicile. Près de 90% des personnes de plus de 75 ans vivent chez elles, dans des conditions parfois difficiles, puisqu'un million et demi d'entre elles ont besoin d'une aide pour se déplacer. Le nombre de structures reste pourtant très insuffisant avec seulement 1 700 services de soins à domicile, dont 522 relevant du secteur public, n'offrant que 77 642 places, soit un ratio de 17,53 places pour mille personnes âgées. En dépit des efforts des collectivités locales, l'offre de services de soins infirmiers à domicile est, elle aussi, très insuffisante. Une demande sur trois seulement peut être satisfaite en région parisienne, par exemple, pour certains types de soins. Or, le nombre de personnes âgées va croître, jusqu'à représenter un tiers de la population totale en 2040, d'après un rapport du COR. Il faut donc apporter rapidement des réponses, afin d'éviter que se reproduise la catastrophe sanitaire de l'été dernier.

Les aides à la création de tels services sont, hélas, très inégales, dépendant du bon vouloir des collectivités, et une large part de l'effort repose sur le secteur associatif. Si le maillage du territoire est à peu près satisfaisant, le nombre de places est très insuffisant par rapport aux besoins, si bien qu'il y a des files d'attente et que les services peuvent être obligés de « faire des choix lors des périodes de tension », comme le reconnaît notre collègue Jacquat dans un rapport très instructif. Pour redonner de l'attractivité à ces métiers, où l'on manque cruellement de personnels, il faut revaloriser les rémunérations, développer les formations et les qualifications, mais aussi apporter une reconnaissance institutionnelle. D'où notre proposition de créer un service public du maintien à domicile.

M. le Rapporteur - Rejet. La loi relative à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et handicapées répond déjà à ce souci.

M. le Secrétaire d'Etat - Même avis. Le secteur associatif joue un grand rôle en matière de maintien à domicile, représentant 68% des places en SSIAD et 84% en SSAD. Qu'en adviendrait-il si nous suivions la proposition de M. Gremetz ?

M. Maxime Gremetz - Ces associations, qui rencontrent beaucoup de difficultés, pourraient être associées à un grand service public.

Les amendements 544 à 555 mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Président - Les amendements 568 à 579 sont identiques.

M. Maxime Gremetz - Nous proposons de créer une commission de suivi et de vigilance des risques industriels au plan local, afin d'assurer une information complète sur l'entretien et le contrôle des différents équipements et sites industriels. Une mesure comme celle-là, croyez-moi, ce n'est pas du pipeau ! On en a vraiment besoin.

M. le Rapporteur - Nous avons eu un long débat sur cette question au cours de l'examen de la loi de santé publique. Mais, je le répète, ne confondons pas assurance maladie et santé publique, même s'il faut les articuler étroitement. Avis défavorable.

M. le Secrétaire d'Etat - Même avis.

Les amendements 568 à 579 mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Président - A la demande de la commission, les amendements 8037 à 8051, 8179 et 8180, ainsi que l'amendement 8185 sont réservés pour être examinés avec les autres amendements traitant du dossier médical personnel.

Comme il a été indiqué jeudi soir, l'examen de l'article 2 et des articles additionnels après l'article 2 aura lieu lundi.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu ce soir à 21 heures trente..

La séance est levée à 20 heures 5.

            Le Directeur du service
            des comptes rendus analytiques,

            François GEORGE


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