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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session extraordinaire de 2003-2004 - 12ème jour de séance, 31ème séance

1ère SÉANCE DU JEUDI 15 JUILLET 2004

PRÉSIDENCE de M. Jean-Louis DEBRÉ

Sommaire

      ASSURANCE MALADIE (suite) 2

      ART. 28 2

      ART. 29 14

La séance est ouverte à quinze heures.

ASSURANCE MALADIE (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi relatif à l'assurance maladie.

ART. 28

M. Claude Evin - Cet article entre plus avant dans l'architecture de notre système de santé telle que tend à l'édifier le Gouvernement, puisqu'il concerne les relations conventionnelles entre les caisses de sécurité sociale et les professions libérales de santé. Premier inconvénient majeur de votre approche, elle se cantonne - comme le Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie - aux relations avec les professions libérales de santé alors que c'est l'ensemble de l'offre de soins qu'il eût fallu aborder. Ensuite, cet article ne propose qu'une évolution très limitée par rapport à la loi Guigou du 6 mars 2002, laquelle avait refondé le cadre conventionnel après le « Grenelle de la santé » faisant suite à la mission Glorion. S'il introduit l'UNCAM dans la négociation conventionnelle, le principe d'une négociation collective à plusieurs niveaux existait en effet déjà dans la loi du 6 mars 2002.

Ainsi, alors que le Gouvernement se plaît à répéter que nous n'aurions rien fait entre 1997 et 2002, il fonde cet article sur la loi du 6 mars 2002, cependant que nombre d'autres dispositions du présent texte ne peuvent faire fi de la loi relative aux droits des malades du 4 mars 2002. C'est reconnaître implicitement que nous avons donc fait beaucoup.

Introduisant toujours davantage de complexité, notamment pour ce qui concerne le droit d'opposition, cet article ne règle pas l'ensemble des problèmes liés à l'organisation de l'offre de soins et ne remet pas en cause de manière significative le dispositif conventionnel issu de la loi du 6 mars 2002.

M. Jean-Pierre Door - Les articles 28 et 29 de ce projet de loi revêtent une importance majeure dans la mesure où ils constituent le cœur de l'optimisation de l'offre de soins et de la maîtrise médicalisée et où ils participent au premier chef à la responsabilisation des acteurs. La négociation de nouvelles conventions est essentielle, celles-ci devant tendre à rendre le système le plus efficace possible, en fixant des engagements précis en termes de qualité, d'évolution des activités et de tarifs. S'agissant de l'organisation et de la coordination de l'offre de soins, chacun sait combien nous sommes attachés à une meilleure régulation des installations, notamment dans les zones déficitaires, et nous souhaitions que la négociation conventionnelle en fasse l'un des axes forts de sa réflexion. En tous domaines, il n'est que temps de rétablir un climat conventionnel normal, après la panne sèche des années 1997 à 2002. Veillons aussi à ne pas laisser perdurer le « saucissonnage » conventionnel : il faut adopter une convention médicale assez large, quitte à l'assortir d'avenants techniques par spécialités. A nos yeux, la nouvelle construction conventionnelle doit réunir tous les professionnels de santé.

Enfin, les négociations conventionnelles doivent permettre de résoudre un certain nombre de difficultés techniques, relatives tant à l'organisation qu'à la permanence des soins. Nous sommes résolus à donner sa chance au dispositif qui nous est proposé et ne comprenons guère que certains proposent d'ores et déjà sa suppression.

M. Jean-Pierre Brard - Monsieur le Président, nous sommes vraiment très heureux de vous retrouver... mais nous ne voudrions pas qu'un excès d'éloges de notre part puisse vous mettre en difficulté !

M. Door vient de qualifier de « majeurs » les articles 28 et 29. Pour nous, ils sont surtout emblématiques de la méthode du Gouvernement. Comme l'a fort justement relevé M. Evin, en concentrant l'approche sur les relations entre les caisses et les professions libérales de santé, vous excitez une nouvelle fois la fringale libérale de votre majorité, sans toutefois vous donner les moyens de la rassasier complètement. D'où les poussées corporatistes de certains ! Ainsi, s'agissant du règlement arbitral, votre nouvelle rédaction de l'article L. 162-14-2 du code de la sécurité sociale dispose que l'arbitre est désigné par l'UNCAM et au moins une organisation syndicale « représentative » des professionnels de santé libéraux concernés. Las, on ne trouve dans votre texte point de définition des critères de représentativité. A vos yeux, il suffit, pour être représentatif, d'avoir une plaque de cuivre bien astiquée vissée quelque part (Murmures sur les bancs du groupe UMP). Le Gouvernement tombe à nouveau dans la caricature...

M. Xavier de Roux - C'est vous qui êtes caricatural !

M. Jean-Pierre Brard - Je ne prétends pas à votre degré d'expertise en la matière !

Monsieur le ministre, convenez que votre arbitre est à ranger au rayon des farces et attrapes ! Il vous suffira d'avoir un faux nez dans l'une de vos organisations prétendument représentatives pour désigner un arbitre à la botte des caisses. Vous persistez dans la logique qui vous pousse à désigner un proconsul à votre solde pour diriger l'UNCAM. Très éloigné de la démocratie sociale que nous revendiquons - et que nous mettrons en œuvre au prochain changement de majorité, c'est bien l'esprit de l'étatisation qui plane sur tout votre texte.

M. Gérard Bapt - Cet article instaure une nouvelle procédure de conventionnement, tendant notamment à définir les tarifs, la rémunération des praticiens et un certain nombre d'engagements sur l'évolution des activités. S'il répond à une revendication ancienne du principal syndicat de médecins - notamment pour ce qui concerne le droit d'opposition - le Gouvernement en profite pour créer un dispositif d'arbitrage dont il y a tout lieu de craindre - en ce qu'il prévoit notamment qu'à défaut d'accord, l'arbitre soit désigné par le Premier président de la Cour des comptes - qu'il tende surtout à rendre le projet de convention médicale conforme à la loi organique de financement dont nous débattrons à l'automne. Quant au droit d'opposition tel que vous l'envisagez, il vise plus à organiser la contestation qu'à responsabiliser les parties. A la vérité, vous donnez surtout l'impression de vouloir re-corseter la procédure d'établissement des conventions médicales. Nul doute que les organisations syndicales de médecins auront quelques surprises lorsqu'elles devront appliquer le dispositif, s'il est adopté tel quel.

Permettez-moi aussi, Monsieur le ministre, de vous demander quelles réponses vous comptez apporter aux spécialistes français de la nutrition, mis en grand émoi par les derniers reculs du Sénat en matière de lutte contre l'obésité. Les dispositions de la loi de santé publique adoptées en nouvelle lecture par les sénateurs ont suscité une pétition qui compte aujourd'hui quatre cents signatures prestigieuses. Le Gouvernement va-t-il se ressaisir, entendre l'appel angoissé de la communauté médicale et revenir sur les dispositions scandaleuses adoptées par le Sénat ?

M. Jean-Marie Le Guen - Avec l'accord du ministre !

M. Maxime Gremetz - L'article 28 fixe le cadre d'une nouvelle procédure de conventionnement entre les professionnels de santé et l'assurance maladie. S'appuyant sur la nouvelle loi relative au dialogue social - ou du moins ce que le Gouvernement appelle ainsi -, le Gouvernement semble faire un geste en direction des professionnels de santé, dans la mesure où il facilite l'établissement de conventions interprofessionnelles. Mais en même temps, il introduit, en cas de rupture des négociations ou d'absence d'accord, le recours à un arbitre désigné par le Président de la Cour des comptes, lequel arbitre pourrait être amené à élaborer lui-même un projet de convention, « dans le respect du cadre financier pluriannuel des dépenses de santé. » C'est du jamais vu dans le droit du travail ! On ne tiendra donc plus compte des propositions formulées par les uns et les autres, on s'en remettra à la Cour des comptes !

Je rappelle que depuis la loi sur le dialogue social, un accord est réputé majoritaire s'il rassemble la majorité des organisations, et ce indépendamment du nombre des suffrages que chacune d'elle a obtenus !

Le droit d'opposition défini dans la loi relative au dialogue social relevant plus d'un droit de contestation que d'un droit de la responsabilité, cet article ne fait que donner l'illusion d'une ouverture. En réalité, il contribue à corseter l'établissement des conventions nationales. Nous défendrons donc des amendements de suppression de l'article.

M. Jean-Marie Le Guen - Après les articles qui pénalisent les patients, nous voici à une section qui traite des relations avec les professionnels de santé, celles-ci étant censées reposer totalement sur la convention. L'Etat se décharge en effet complètement sur l'assurance maladie des problèmes relatifs à l'organisation des soins. La formation, la qualité, la continuité des soins, tout cela ne relève pas, selon le Gouvernement, des prérogatives de l'Etat, mais de la convention.

Il faut savoir que le corps médical se caractérise par une très forte division syndicale, qui se combine à l'individualisme traditionnel du milieu et à l'existence de diverses coordinations, sans parler de la persistance de certains discours radicaux qui ne font qu'exacerber les revendications. Nous avions ainsi été choqués, l'an dernier, de voir certains responsables politiques mettre de l'huile sur le feu. Vous-même, Monsieur le ministre, n'aviez rien fait pour calmer le jeu.

L'article 28 est le résultat d'une première discussion, en quelque sorte une convention dans la convention. Il a en effet visiblement été écrit pour faciliter le travail de certaines organisations syndicales, une en particulier, sur les revendications de laquelle l'Etat s'apprête donc à s'aligner. Cela étant, le mécanisme prévu est tellement complexe qu'il n'est pas certain qu'il tourne toujours à l'avantage de la négociation sociale.

Nous aurons des objections à formuler mais nous ne nous opposerons pas complètement au dispositif, étant entendu que le Gouvernement a fait le choix de s'en remettre à la convention. Le système marchera-t-il ? Il est permis de s'interroger.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale - L'objectif du présent article est de définir un cadre qui facilite la négociation et la signature de conventions entre les professionnels de santé et l'assurance maladie. Il importe en effet, pour la démocratie sociale, que de telles convention puissent être conclues, dans un rapport de confiance.

L'article allège la procédure d'approbation des conventions : ne sont plus concernés que les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale, le délai d'approbation est réduit à 21 jours et les motifs d'opposition sont limités - non conformité aux lois et règlements en vigueur, motifs de santé publique et de sécurité sanitaire.

L'article confère aux syndicats non signataires un droit d'opposition, l'objectif étant d'éviter l'adoption de dispositions conventionnelles auxquelles serait opposée la majorité de la profession concernée.

Enfin, il institue une procédure d'arbitrage : en cas d'absence d'accord ou d'opposition de la majorité de la profession à un accord, un arbitre est choisi conjointement par les partenaires ou à défaut par le premier président de la Cour des comptes. Sa mission est d'arrêter un projet de convention dans le respect du cadre financier pluriannuel fixé par les PLFSS. Si l'UNCAM et au moins un syndicat représentatif adhèrent à ce projet, il devient la convention soumise à approbation ministérielle. En l'absence d'adhésion, il s'applique en tant que règlement arbitral.

Je remercie M. Door d'avoir souligné l'intérêt des articles 28 et 29. Il a attiré mon attention sur la création d'un cadre conventionnel global. C'est une possibilité, mais en faire aujourd'hui une règle imposée irait peut-être trop loin.

M. Evin trouve que l'article n'apporte pas grand chose à l'architecture actuelle. Le droit d'opposition, la procédure d'arbitrage et l'allègement des procédures d'approbation constituent pourtant bien des nouveautés.

Je voudrais dire à M. Bapt que la rénovation du cadre conventionnel passe par une simplification des conditions de conclusion des conventions, mais aussi par des dispositions dont le but est de renforcer l'applicabilité et la crédibilité de celles-ci. Je ne vois pas en quoi la procédure d'arbitrage limiterait la capacité des partenaires à négocier. Elle n'est en effet qu'un ultime recours. Pour ce qui est de la loi de santé publique, je vous renvoie aux articles parus aujourd'hui et hier...

M. Maxime Gremetz - Le 14 juillet ?

M. le Ministre - Quoi qu'il en soit, beaucoup de commentateurs ont souligné que nous avons interdit qu'il y ait des produits trop sucrés dans les établissements scolaires (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Jean-Marie Le Guen - Donc des centaines de professeurs de médecine n'ont rien compris...

M. le Ministre - Lisez la loi ! Ce que nous avons proposé a d'ailleurs été voté par le Sénat unanime, Monsieur Le Guen, y compris le groupe socialiste...

M. Maxime Gremetz - C'est une chambre non représentative.

M. le Ministre - ...et le groupe communiste aussi !

M. le Président - N'engageons pas le débat là-dessus, c'est un autre sujet.

M. le Ministre - Je constate en tout cas que vous n'avez pas été capables de supprimer les barres sucrées dans les écoles : nous l'avons fait (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Vous semblez découvrir, Monsieur Gremetz, qu'une négociation doit s'inscrire dans un cadre financier : pour moi, c'est la moindre des choses. Quant à l'arbitre, sa désignation par le premier président de la Cour des comptes vise à assurer son indépendance. J'accorde toutefois qu'une ambiguïté persiste sur ce point, et nous ferons droit à un amendement pour la lever.

M. le Président - Je suis saisi des amendements identiques 1672 à 1683 tendant à supprimer l'article 28.

M. Jacques Desallangre - Dans le dispositif de cet article, la rupture de la négociation entraîne le recours à un arbitrage. A nos yeux, le droit d'opposition défini dans la loi relative au dialogue s'apparente plus à un droit de contestation qu'à un droit de responsabilité. Ainsi, après avoir donné l'illusion d'une ouverture, le Gouvernement contribue à « recorseter » l'établissement des conventions. Le flou persistant dans la définition de la méthode crée un doute sur ses intentions véritables ; il rend possible, plus tard, l'apparition au grand jour d'arrière-pensées que dissimule cette habileté rédactionnelle. Il risque, en outre, de susciter des difficultés d'interprétation. Pour ces raisons, nous demandons la suppression de l'article.

M. Jean-Pierre Brard - Je livre à votre réflexion, Monsieur le ministre, en réponse à votre précédente intervention au sujet de l'unanimité - qui, vous le savez bien, sur les sujets importants, ne fait qu'abuser les nigauds - , cette pensée de Paul Valéry : « Ce qui a été cru par tous, toujours et partout a toutes les chances d'être faux »...

Pour ce qui est de l'arbitre, il sera choisi par le président de la Cour des comptes. Le Monde a donné cette semaine une description assez objective des rouages du pouvoir dans la France d'aujourd'hui. Du fait des institutions de la Ve République, nous vivons dans une sorte de république monarchique, quand il n'y a pas cohabitation. Nous ne sommes pas loin du pouvoir absolu. Parler du président de la Cour des comptes semble quelque chose de neutre, d'objectif, qui n'implique pas une prise de parti. Et, certes, le président actuel de la Cour est au-dessus de tout soupçon, puisqu'il s'agit de Philippe Séguin, un homme dont on ne peut préjuger les positions et qui vous ressemble beaucoup, Monsieur le Président, par sa liberté d'esprit.

M. le Président - Revenons à l'assurance maladie.

M. Jean-Pierre Brard - Néanmoins, dans le contexte quasi-monarchique de nos institutions, cet arbitrage risque de relever plutôt de l'arbitraire - cet arbitraire dont Benjamin Constant disait : « il n'est pas seulement funeste lorsqu'on s'en sert pour le crime ; employé contre le crime, il est encore dangereux ». Vous devriez y penser au moment de nous proposer un système pervers et pernicieux. Et, pour conclure sur la question de la majorité, je pense, Monsieur le ministre, que vous vous inspirez de la pensée de René Guénon : « l'avis de la majorité ne peut être que l'expression de l'incompétence »... La pensée profonde de la droite est celle-ci : « la volonté, la décision, l'entreprise sortent du petit nombre, l'assentiment, l'acceptation, de la majorité. C'est aux minorités qu'appartiennent la vertu, l'audace, la puissance et la conception ». C'est de Charles Maurras.

M. Maxime Gremetz - On ne peut pas dire que cet article soit extrêmement mauvais. On a vu pire. Mais c'est en le situant dans l'ensemble du projet qu'on voit où le bât blesse. Ici vous essayez d'être moins sévères. Quand il s'agit de responsabiliser les citoyens, les assurés sociaux, les syndicalistes, c'est le bâton, la répression. A ceux qui n'ont rien on dit : « Vous devrez payer un euro. Vous paierez plus cher le forfait hospitalier. On va augmenter la CSG pour les salariés, les personnes âgées, les handicapés. » Mais ici, vous dites : « Attention, pour les médecins, c'est un peu plus compliqué ; il faut plus de doigté. » Ce qui n'empêche que vos conventions sont tout à fait particulières. Vous rêvez toujours de revenir aux conventions nationales - même le Premier ministre, si attaché pourtant à la décentralisation qu'il est prêt à la faire voter au mois d'août... Mais ici, c'est différent. Les accords interprofessionnels ne se concluent pas du tout comme ailleurs. Il y a en effet un droit d'opposition. C'est-à-dire que vous vous appuyez non pas sur la majorité de ceux qui s'expriment pour construire ensemble la convention , mais sur ceux qui prennent une position négative. C'est un recul. On ne peut parler d'un accord majoritaire, car dans un accord majoritaire, on prend en compte non pas le nombre d'organisations syndicales, mais la majorité des suffrages dans la profession. Ainsi, même si cet article est moins mauvais que d'autres, parce que vous n'osez pas trop frapper les professionnels, il n'en est pas moins tout à fait négatif. Nous en demandons donc la suppression.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur de la commission spéciale - Il était indispensable de fixer un terme à la négociation et à la signature des conventions, notamment pour éviter les surenchères et les parties de billard à trois bandes qu'on a connues. Sur le droit d'opposition, M. le ministre s'est exprimé. La commission a donc rejeté ces amendements. Quant à l'arbitre, Monsieur Brard, un amendement de la commission va venir qui prévoit que ce sera le président du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie.

M. le Ministre - Défavorable.

M. Gérard Bapt - Nous modifions à la marge le dispositif conventionnel issu de la proposition de loi que Claude Evin a fait adopter en 2002, et contre laquelle l'actuelle majorité avait voté, préférant surfer sur les revendications de certaines catégories de médecins. Cette proposition avait mis fin à certains corsetages issus du plan Juppé. Comptez-vous signer, et quand, l'avenant à la convention avec les biologistes, qui tendrait à supprimer la lettre B flottante, alors que les dépenses en biologie ont augmenté de 10 % en 2003 ?

Quant à me répondre à propos des barres sucrées : « Vous ne l'avez pas fait », je vous signale que je n'ai jamais été ministre de la santé ; vous, qui l'avez déjà été, ne l'avez pas fait non plus. Sur la question nutritionnelle, votre réponse n'est pas convaincante. Limiter le taux de sucre ne suffit pas, puisque les produits addictifs contenus dans ces boissons créent une accoutumance qui conduira les jeunes, sitôt sortis du cadre scolaire, à consommer des boissons de même marque, mais cette fois sans limitation de sucre.

M. le Rapporteur - Le cassoulet est une nourriture riche !

M. Gérard Bapt - Ne vous moquez pas du cassoulet, car c'est dans notre région que le taux de maladies cardio-vasculaires est le plus faible.

M. Jean-Pierre Brard - Je suis choqué de constater que le rapporteur répond très brièvement, et que les ministres se mettent à deux pour ne rien répondre du tout. Ne sont-ils là que pour faire de la figuration ? Je crois pour ma part aux vertus du dialogue. Sur la question de l'arbitre, vous ne voulez pas répondre, et pas davantage sur l'inspiration maurrassienne qui anime votre projet.

Les amendements 1672 à 1683, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Rapporteur - Les amendements 8308 et 8309 sont rédactionnels.

Les amendements 8308 et 8309, acceptés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés.

M. le Président - Les amendements 1660 à 1671 sont identiques.

M. Jacques Desallangre - Nos amendements tendent à réintroduire la référence à la santé publique et à « l'égal accès aux soins », dont il est symptomatique qu'elle ait disparu de votre projet. L'égal accès aux soins doit en effet constituer un axe prioritaire de la politique conventionnelle, et donc rester inscrit dans la loi comme un critère de conformité de ces conventions. Voici une citation qui exprime notre position mieux que je ne saurais le faire : « La sécurité sociale est la garantie donnée à chacun qu'en toutes circonstances il disposera des moyens nécessaires pour assurer sa subsistance et celle de sa famille dans des conditions décentes. Elle répond à la préoccupation de débarrasser les travailleurs de l'incertitude du lendemain, qui crée chez eux un sentiment d'infériorité. » C'était un extrait de l'exposé des motifs de l'ordonnance créant la sécurité sociale le 4 octobre 1945. Voilà pourquoi nous demandons que demeure la référence à l'égal accès aux soins.

M. Maxime Gremetz - De fait, l'égal accès aux soins est passé à la trappe. M. Bertrand, parce qu'il est gaulliste, se réfère parfois aux principes de 1945 et 1946, et vous, Monsieur le ministre, pas du tout, parce que vous êtes issu de l'UDF (Protestations sur le banc du Gouvernement) ! Vous avez peur de vous y référer parce que, alors que la sécurité sociale ne joue déjà plus le rôle qui lui avait été imparti à l'origine, vous vous efforcez de mettre en cause le principe d'égal accès aux soins en créant une sécurité sociale à deux vitesses, même si vous vous en défendez. Aux plus faibles l'euro supplémentaire, le forfait hospitalier, la CSG, aux entreprises une contribution de 15,9 milliards alors qu'elles bénéficient de 25 milliards d'exonérations et que le ministre de l'économie veut encore développer les heures supplémentaires en les exonérant de cotisations, ce qui creusera encore le déficit.

M. Jean-Pierre Brard - Monsieur le ministre, comme vous êtes originaire du domaine des Plantagenêts, il n'y a rien à attendre de vous en matière d'égalité. Mais vous, Monsieur le secrétaire d'Etat, qui venez des terres de Saint-Just, vous êtes relaps par rapport à cet héritage. Edouard Herriot déclarait : « Il est plus facile de proclamer l'égalité que de la réaliser. » L'égalité des soins est en gros réalisée dans notre pays, ce qui fait l'envie de nos voisins, en particulier d'Outre-Manche. Or, même si vous ne pouvez pas le dire sans risquer d'être électoralement balayés, vous êtes en contradiction, par votre projet et son article 28 qui portent atteinte à l'égalité dans les droits d'accès aux soins, avec l'article premier de la déclaration des droits de l'homme.

M. le Rapporteur - Avis défavorable aux amendements.

Monsieur Brard, voici ce que disait Kierkegaard en 1843 : « Que les gens sont absurdes ! Ils ne se servent jamais des libertés qu'ils possèdent, mais réclament celles qu'ils ne possèdent pas. Ils ont la liberté de penser, ils exigent la liberté de parole ! »

M. Maxime Gremetz - Et ils veulent la liberté de manger !

M. le Ministre - Puisque nous en sommes aux citations, en voici une de Voltaire : « Il est plus facile de lire des livres que de raisonner par soi-même » (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Jean-Pierre Brard - Il est bien de citer Voltaire, surtout de la part d'un ancien ministre de la culture. Il me semble, Monsieur le ministre, que vous avez beaucoup raisonné pour mettre au point votre projet, et surtout pour faire prendre au peuple français des vessies pour des lanternes. En effet, comme vous ne pouvez pas afficher ouvertement l'idéologie maurrassienne qui imprègne votre texte, vous êtes obligé de l'attifer avec des oripeaux acceptables.

M. Jean-Marie Le Guen - Le principe d'égal accès aux soins doit figurer à ce point du projet, où il est question de la discussion conventionnelle. Quand on voit l'importance donnée à la fin du tarif opposable, il est impératif de rappeler le principe de base sur lequel doit reposer la convention. Cette égalité est de caractère social, mais aussi de dimension territoriale. Nous avons, à l'article premier, conféré à l'assurance maladie une obligation de résultat dans la lutte contre la désertification médicale. Si le coût de cette égalité territoriale n'est pas rappelé dans la convention, celle-ci restera largement sans suite. Si vous renoncez à imposer des contraintes fortes pour réaliser l'égalité territoriale, et du fait aussi de la liberté tarifaire, il se produira une migration générale des médecins vers les zones offrant une perspective de meilleure rémunération. Il est donc essentiel de faire figurer dans la loi la notion d'égal accès aux soins.

Les amendements 1660 à 1671, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Jean-Marie Le Guen - Notre amendement 7023 rétablit la référence pour les conventions au respect des objectifs de dépenses et aux risques que leur application ferait courir à la santé publique ou à l'égal accès aux soins. La suppression de cette référence témoigne d'une dérive très grave : si l'on donne tous les pouvoirs au proconsul de l'UNCAM, il faudrait au moins inscrire dans la loi des éléments délimitant son mandat de négociation...

M. le Rapporteur - Contre.

M. le Ministre - Rejet. Je ne peux pas laisser dire que nous remettons en cause l'égal accès aux soins, notion qui figure à l'article premier !

M. Jean-Marie Le Guen - Je vous parle des conventions.

M. le Ministre - Citez-moi un seul exemple de convention qui n'ait pas respecté l'égal accès aux soins !

M. Claude Evin - Si elles ne sont pas accompagnées de mesures concrètes, les affirmations contenues dans ce texte ne sont que des énoncés de principe. Cet amendement vise à permettre au ministre de refuser son agrément à une convention lorsque celle-ci ne respecte pas certains principes - lesquels doivent, pour cela, figurer dans la loi.

M. Gérard Bapt - Quand le principe d'égal accès aux soins sera tombé par terre, il ne faudra pas dire que c'est la faute à Voltaire...

Monsieur le rapporteur, vous avez écrit que la rédaction proposée « diminue sensiblement la marge de manœuvre des ministres et responsabilise d'autant les partenaires à la convention ». Où est cette responsabilisation ? En réalité, seuls les assurés sociaux sont responsabilisés, par la voie des déremboursements...

L'amendement 7023, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Martine Billard - Mon amendement 7578 vise à rétablir la référence à l'égal accès aux soins, dont la suppression n'est pas anodine. Vous nous renvoyez à l'article premier, mais nous y avions déposé des amendements réaffirmant l'égalité d'accès aux soins indépendamment des revenus, qui ont été rejetés... On ne peut qu'être inquiet de ce nouveau refus, y compris pour l'égal accès aux soins sur le territoire, puisque vous ne faites quasiment aucune proposition pour l'assurer. En fait, vous proposez seulement l'égalité d'accès au paiement !

M. Jean-Marie Le Guen - Notre amendement 8147 a le même objet. Il n'y a pas eu ces dernières années de convention qui n'ait donné lieu à recours, à tel point que certaines, du fait de ces recours, ont sombré... Sans doute ce gouvernement veut-il, pour des raisons tactiques, éviter de rappeler à une profession qui n'aime pas cela qu'elle a certaines obligations ; mais en renonçant à poser ces principes dans la loi, nous affaiblissons durablement notre système conventionnel. Cet amendement est donc très important, et nous demandons un scrutin public.

M. le Rapporteur - Rejet. Je rappelle qu'à l'article 5, nous avons adopté un amendement de la commission qui impose la non-discrimination entre les patients. Par ailleurs, il n'y a jamais eu de recours contre les conventions sur le fondement de l'égal accès aux soins. Plus le cadre conventionnel sera simple et clair, moins il y aura de risques de recours ; faisons confiance aux partenaires sociaux !

M. Jacques Desallangre - C'est l'antienne...

M. le Ministre - Article L. 1110-3 du code de la santé publique : « Aucune personne ne peut faire l'objet de discriminations dans l'accès à la prévention ou aux soins ». Arrêtez donc de faire croire que ce projet porte atteinte à l'égalité d'accès !

M. Jean-Marie Le Guen - Ce n'est pas une réponse !

M. Richard Mallié - Nos collègues semblent avoir oublié l'article premier du projet : « Les régimes d'assurance maladie favorisent un accès effectif de tous les assurés sociaux aux soins, notamment par une bonne répartition de l'offre de soins sur le territoire national ». Leur amendement est donc redondant, et nous ne pouvons l'accepter ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste)

M. Jean-Marie Le Guen - Autant ne pas légiférer, puisqu'il y a la Constitution !

Mme Martine Billard - Le rapporteur et le ministre se contredisent : le rapporteur a tenu à préciser à l'article 5 qu'il ne devrait pas y avoir de discrimination dans l'accès aux soins et le ministre nous répond maintenant que la disposition que nous proposons est superflue. Il en était alors de même pour l'amendement du rapporteur !

Enfin, comment osez-vous prétendre que cette précision ne ferait que compliquer la convention ? Allons-nous supprimer la notion d'égal accès aux soins dans toutes nos lois pour simplifier radicalement notre législation ?

M. Maxime Gremetz - C'est l'aveu qu'il y aura une médecine à deux vitesses !

M. Jean-Pierre Brard - Le rapporteur verse dans l'incantation. Deux bénédicités, trois ave et quatre pater pour obtenir les bonnes grâces du président du Medef !

M. Richard Mallié - Il y avait longtemps !

M. Jean-Pierre Brard - Par ailleurs, il a toujours été question, dans ce texte, d'égal accès aux soins. En quoi la notion de non-discrimination serait-elle préférable ? Si elle ne l'est pas, pourquoi supprimer la référence à l'égal accès aux soins ?

A la majorité de 71 voix contre 20 sur 91 votants et 91 suffrages exprimés, l'amendement 8147 n'est pas adopté.

L'amendement 7578 n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 8310 est rédactionnel.

L'amendement 8310, accepté par le Gouvernement , mis aux voix, est adopté.

M. le Président - Nous en venons à deux amendements identiques. 

M. Jean-Marie Le Guen - L'amendement 7839 est défendu.

M. le Rapporteur - L'amendement 3875 de la commission tend à lever toute ambiguïté en exigeant la majorité absolue des suffrages.

M. le Ministre - Favorable.

M. Jean-Pierre Brard - Parlez-vous de la majorité absolue des organisations ou de la majorité absolue de ceux qui votent ? C'est très différent ! Vous rajoutez à la confusion...

M. Maxime Gremetz - Absolument !

M. Jean-Pierre Brard - ....et cachez derrière de sympathiques adjectifs vos mauvaises intentions.

Les amendements 3875 et 7839, mis aux voix, sont adoptés.

M. le Rapporteur - L'amendement 8311 est de cohérence avec la création des unions régionales de professionnels de santé exerçant à titre libéral qui fera l'objet d'un amendement avant l'article 36.

L'amendement 8311, accepté par le Gouvernement,mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 8312 tombe compte tenu de l'adoption de l'amendement précédent.

M. Gérard Bapt - L'amendement 7884 est défendu.

L'amendement 7884, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Maxime Gremetz - Mais le Gouvernement ne parle jamais !

M. Jean-Pierre Door - Le ministre a déjà répondu à la question posée par l'amendement 77, aussi vais-je le retirer.

L'amendement 77 est retiré.

M. Jean-Marie Le Guen - Tout d'abord, à propos de notre amendement, précédent, nous aimerions que le ministre nous explique au nom de quoi une profession pourrait interdire à d'autres de passer des conventions ! Est-ce que, demain, la profession des médecins va pouvoir s'opposer à un accord conventionnel passé avec les chirurgiens dentistes ?

Par ailleurs, notre amendement 7840 tend à introduire plus de souplesse dans le déroulement des négociations, car nous ne comprenons pas pourquoi, en cas de désaccord, le Gouvernement ne pourrait pas, six mois plus tard, négocier avec d'autres organisations syndicales.

Cet amendement tend à forcer l'organisation syndicale majoritaire à négocier, alors que votre dispositif pourrait l'inciter à ne pas signer pour obtenir un arbitrage.

M. le Rapporteur - Défavorable.

M. le Ministre - S'agissant des accords interprofessionnels, il va de soi que seuls les syndicats de la profession concernée peuvent s'y opposer.

M. Jean-Marie Le Guen - Ce n'est pas clair dans votre texte !

M. le Ministre - Par ailleurs, l'accord cadre interprofessionnel couvre l'ensemble des professions, aussi votre amendement n'était-il pas pertinent.

Quant à l'amendement 7840, je comprends vos préoccupations, mais il s'agit de donner une légitimité incontestable aux conventions. Pour cette raison, nous avons créé un droit d'opposition, qui se distingue de la non signature, car il doit se traduire par un acte positif. S'opposer signifie prendre ses responsabilités. Votre amendement pourrait conduire les principaux syndicats à s'opposer systématiquement aux accords, car on restreindrait leurs marges de manœuvre au cours de la négociation.

M. Maxime Gremetz - Vous ne pouvez pas dire cela, car toutes les organisations syndicales ont dénoncé, lors du vote de la loi sur le dialogue social, l'application qui est faite désormais du principe majoritaire.

Vous mettez en œuvre un droit à l'opposition alors que, par ailleurs, vous incitez les syndicats à adopter une position constructive. On ne s'y retrouve plus !

L'amendement 7840, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Ministre - Aujourd'hui, en l'absence de convention nationale, il revient à l'Etat de prendre par arrêté un règlement conventionnel minimal, après consultation de la CNAM, des travailleurs salariés, des organisations syndicales représentatives des professions de santé et éventuellement, du conseil de l'ordre pour les questions déontologiques. Ce dispositif doit être réformé car les professions de santé, sachant qu'une voie de recours existe auprès de l'Etat, ne sont pas incitées à jouer le jeu de la négociation avec les caisses. Nous proposons donc de remplacer le RCM par une procédure arbitrale.

Il est prévu dans le projet qu'un arbitre puisse être choisi par les partenaires ou, en cas de désaccord, par le Premier président de la Cour des comptes. Il devra arrêter un projet de convention dans le respect du cadre financier pluriannuel fixé par les lois de financement de la sécurité sociale.

Le Gouvernement propose, par cet amendement 7801, d'améliorer le contenu de ces dispositions afin de favoriser l'aboutissement de négociations conventionnelles. Il s'agit de préciser que le règlement est arbitral, mais ne saurait avoir le statut d'une convention même si l'UNCAM et une organisation syndicale représentative des professionnels de santé libéraux y ont adhéré. Cela permet de marquer le caractère temporaire du dispositif. Enfin, les partenaires devront engager les négociations pour élaborer une nouvelle convention dans les deux ans.

M. le Rapporteur - La commission a accepté cet amendement.

M. Maxime Gremetz - Elle l'a examiné ?

M. le Rapporteur - Oui, et elle l'a adopté avec enthousiasme car les règlements conventionnels minimum créent toujours des situations sans issue.

M. Jean-Marie Le Guen - Avec cette proposition, le ministre reconnaît l'existence des situations de blocage qui motivaient mon dernier amendement, mais le mécanisme qu'il propose n'aboutira qu'à les rendre plus inextricables. Il est évident que les organisations syndicales n'auront pas intérêt à conclure de conventions, pour la simple - et légitime - raison qu'elles obtiendront toujours un petit quelque chose de plus de la part de l'arbitre, désigné conjointement avec le proconsul. Et la seule solution que vous proposez, c'est de recommencer exactement le même système ! Vous imposez à l'organisation syndicale majoritaire, quelle qu'elle soit, d'ouvrir de nouvelles discussions dans les deux ans, mais pas de les conclure ! Au final, vous n'aurez jamais de convention médicale. Les syndicats seront en perpétuelle position de revendication. Sachant que la convention concerne non seulement les rémunérations, mais aussi tous les sujets touchant à la réorganisation, à la qualité, à l'évaluation et à la formation, on se prépare des jours difficiles !

M. Maxime Gremetz - Cet amendement est gravissime.

M. le Président - Dans ce cas, je suppose que vous allez demander un scrutin public. Je le fais annoncer.

M. Maxime Gremetz - Vous allez au devant de mes désirs.

Cet amendement représente un véritable déni du code du travail. D'abord, vous vous placez dans la perspective où aucun accord n'est signé : vous redoutez donc le refus des syndicats, qui sont pourtant, on peut le dire, loin d'être révolutionnaires ! Cela en dit long sur le contenu des conventions... Ensuite, à défaut de convention, vous prévoyez un règlement arbitral. Cela ne s'est jamais vu ! Jusqu'à présent, en cas d'échec des négociations, on prorogeait l'ancienne convention le temps que de nouvelles discussions aboutissent. Votre invention ne peut que provoquer un recul du dialogue social. Il n'y aura jamais d'accord. Les organisations syndicales ne signeront jamais rien, à juste raison, contesteront le règlement arbitral et recommenceront... Une chose est sûre, c'est qu'il n'y aura jamais d'accord négocié.

A la majorité de 72 voix contre 22 sur 94 votants et 94 suffrages exprimés, l'amendement 7801 est adopté.

M. Maxime Gremetz - Je demande une suspension de séance.

La séance, suspendue à 16 heures 40, est reprise à 16 heures 50.

M. le Président - Les amendements 1684 à 1695 sont identiques.

M. Jacques Desallangre - Ils tendent à ce que l'arbitre soit désigné à la majorité, conjointement par les conseils d'administration des trois caisses nationales d'assurance maladie et par la majorité des organisations syndicales représentatives des professionnels de santé libéraux concernés. L'arbitre doit être mandaté en premier lieu pour élaborer un règlement conventionnel minimal dans l'attente de la convention définitive. Chacun s'accorde sur l'idée que la désignation de l'arbitre doit faire l'objet d'une attention particulière et qu'il doit tirer sa légitimité de son haut degré de représentativité des parties en présence.

M. le Rapporteur - Rejet.

M. le Ministre - Même avis.

M. Jean-Pierre Brard - C'est caricatural ! Soit le rapporteur n'a rien à dire, soit il veut amputer le débat...

M. le Rapporteur - Je ne veux rien entendre !

M. Jean-Pierre Brard - C'est illégitime et désobligeant. Dans les institutions de la Ve République, si chères à notre Président, le Parlement trouve l'une de ses prérogatives essentielles dans son droit d'amendement. Las, le rapporteur refuse le débat et les ministres se sont mis à deux pour conjuguer leur silence...

M. le Président - Puis-je vous rappeler que nous avons déjà eu 114 heures de débat ?

M. Jean-Pierre Brard - Au reste, comment « répondre » à la commission et au Gouvernement s'ils ne nous opposent qu'un silence distant ? La vérité, c'est que tel le proconsul de l'UNCAM, vous concevez l'arbitre comme un homme lige, ou, pour être gaullien, comme un godillot. Seule une désignation démocratique et consensuelle serait de nature à lui donner l'autorité et la légitimité que vous lui refusez finalement.

Les amendements 1684 à 1695, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

Mme Martine Billard - Notre amendement 8444 vise à éviter qu'une profession non directement intéressée à une convention puisse en bloquer la reconduction.

M. le Rapporteur - Rejet.

M. le Ministre - Même avis. Le Gouvernement cherche comme vous à renforcer la légitimité des conventions nationales et la précision que vous proposez n'est pas utile.

M. Jean-Marie Le Guen - Telle que le Gouvernement l'envisage, la procédure d'arbitrage soulève de sérieux problèmes juridiques. Depuis le début de l'examen de cet article 28, beaucoup ont été tentés de faire un parallèle avec le droit du travail, au risque d'oublier que les médecins exercent sur un mode libéral. De fait, la notion d'arbitrage ressortit plutôt du droit privé, et il est à cet égard légitime de se demander s'il est bien raisonnable de faire d'une personne privée le médiateur d'un conflit qui engage des millions de fonds publics et l'assurance maladie tout entière.

M. Jean-Pierre Brard - Je trouve le silence du rapporteur choquant, à moins qu'il ne fasse siennes cette phrase de Jean Anouilh : « Rien n'est vrai que ce qu'on ne dit pas » ou celle-ci de Max-Pol Fouchet : « Pour que demeure le secret, nous tairons jusqu'au silence ». Quoi qu'il en soit, entre lui qui ne dit rien et le ministre qui n'argumente pas, nous nous demandons à quoi nous servons. Donnez-nous donc votre opinion, Monsieur le rapporteur, sur l'amendement de Mme Billard, vous en avez forcément une !

M. le Rapporteur - Je pourrais vous répondre que la parole est d'argent et que le silence est d'or, mais je préfère vous renvoyer à cette phrase de Camus dans Noces : « Il est des lieux où meurt l'esprit pour que naisse une vérité qui est sa négation même » (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

L'amendement 8444 mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Pierre Door - Notre amendement 75 tend à ce que l'arbitre prévu par cet article soit désigné par le président de la Haute autorité de santé plutôt que par le premier président de la Cour des Comptes, puisque nous nous situons dans un contexte de maîtrise médicalisée - et non comptable - des dépenses de santé.

M. le Rapporteur - Soit l'UNCAM et les syndicats s'entendent sur un arbitre, et c'est alors celui-ci qui est désigné, soit ils ne s'entendent pas, et je propose alors dans un amendement suivant que l'arbitre soit désigné par le président du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie. La Haute autorité de santé doit en effet garder son caractère purement scientifique, à mon sens, et ne pas s'impliquer dans ce type de négociations.

M. Jean-Pierre Door - Je retire mon amendement.

M. le Ministre - Le Gouvernement est favorable à l'amendement 3876.

M. Claude Evin - Il faudrait quand même être sûr de la pérennité du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie. Quel est son fondement législatif ? On me dit qu'il est inscrit dans la loi de financement de la sécurité sociale, mais je n'en suis pas sûr et j'aimerais donc savoir s'il est déjà inscrit dans la présente loi.

M. le Ministre - Si vous le voulez, il y sera (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste).

M. Claude Evin - Donc, pour le moment, il n'y est pas ?

M. le Rapporteur - Le Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie se trouve dans le PLFSS de l'an dernier ...

M. Claude Evin - Je ne crois pas.

M. le Rapporteur - C'est en tous cas une structure pérenne qui a vocation à jouer un aussi grand rôle que, dans un autre domaine, le Conseil d'orientation pour les retraites. C'est une structure qui a un excellent diagnostic et dont le président est un homme de grande qualité.

M. Claude Evin - Nous sommes ici pour faire la loi, pas pour porter des appréciations sur la qualité de telle ou telle instance ou de telle ou telle personnalité. Je voudrais simplement être sûr que le Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie a une base législative incontestable. Il serait en effet fâcheux d'aller au devant de contentieux dès la première année où la procédure de désignation de l'arbitre serait appliquée.

M. Richard Mallié - Puisque nous avons créé la Haute autorité de santé, il me semblait évident que le Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie allait être supprimé (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste).

M. Claude Evin - Vous voyez bien !

M. le Ministre - Le Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie figure dans un décret d'octobre 2003, l'amendement de M. Dubernard l'inscrit dans la loi (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). Nous sommes attachés à cette structure qui fournit d'excellents rapports et qui a une vision d'ensemble. Elle est appelée à durer.

M. Jean-Marie Le Guen - Un excellent amendement de M. Dubernard nous avait amenés à supprimer toute référence à une éventuelle dimension économique de la Haute autorité de santé. Celle-ci n'étant ainsi constituée que d'experts médicaux, je m'étonne que certains veuillent en faire l'instance qui désignerait l'arbitre de problèmes économiques et sociaux de grande ampleur. Ecartons donc l'idée de la Haute autorité de santé.

Si l'on confie au Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie la responsabilité énorme de désigner quelqu'un qui prendra des décisions portant sur quelque 65 milliards d'euros, il serait préférable de s'assurer d'un ancrage législatif qui ne soit pas une simple incidente dans le présent projet. Par ailleurs, est-on sûr que le Haut conseil veuille assumer cette responsabilité-là, qui s'exercera dans le contexte conflictuel que l'on peut imaginer ? Je m'interroge enfin sur les garanties qui pourraient nous être données concernant la nomination du président de ce Haut conseil. L'actuel est excellent, mais qu'en sera-t-il à l'avenir ? Il serait peut-être plus sage d'en rester à la référence au président de la Cour des Comptes.

L'amendement 3876 mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 8313, 3ème rectification, est rédactionnel.

L'amendement 8313, 3ème rectification, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Gérard Bapt - Nous nous abstiendrons sur l'article 28.

L'article 28, modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 29

M. Jean-Marie Le Guen - Nous abordons ici la question délicate de l'installation des médecins. Il faut se garder de l'angélisme irresponsable qui consisterait à s'en remettre à des politiques d'incitation, dont nous savons déjà fort bien qu'elles ne marchent pas, dans la mesure où les critères financiers ne sont pas les plus déterminants pour les médecins, qui considèrent plutôt, lorsqu'ils s'installent, les conditions de travail, l'environnement et autres.

L'incitation financière ne suffira pas. Et quand on ajoute qu'il faudra faire le point vers 2010, c'est montrer qu'on ne comprend pas à quelle déferlante nous sommes confrontés, alors même que les problèmes d'installation seront encore aggravés par vos décisions. Celles-ci, en effet, vont conduire à une diminution des remboursements de la sécurité sociale, notamment pour les spécialistes. Ceux-ci auront donc une tendance croissante à s'installer dans les zones les plus favorisées, où la population dispose des plus hauts revenus. On assistera alors à une demande accrue de financements de la sécurité sociale, et en même temps à une augmentation des tarifs demandés par les spécialistes. Dans les zones défavorisées en revanche, l'assurance maladie n'aura plus les moyens d'intervenir et les médecins seront beaucoup moins nombreux, car ils y trouveront à la fois des conditions de travail plus difficiles et des clients moins capables de les accompagner dans l'évolution de leurs rémunérations. Il est donc impossible de s'en tenir à l'incitation et à l'idée d'un bilan dans quelques années : nous avons l'obligation d'agir.

Nous avons progressé à l'article premier, en prévoyant une obligation pour l'assurance maladie d'intervenir ; et nous lui avons donné un outil - il y en aurait d'autres - avec les mesures relatives aux statuts professionnels, aux remplacements, etc. Toute une panoplie est ainsi proposée pour qu'il existe une offre de soins sur ces territoires désertifiés. Ici le Gouvernement ouvre d'autres possibilités, y compris des évolutions dans la prise en charge des prestations. Nous attendons d'en savoir plus sur les propositions globales du Gouvernement étant entendu qu'il faut agir sur l'offre de soins.

M. Maxime Gremetz - L'article 29 entend lutter contre les disparités régionales en matière de soins, en élargissant le champ des conventions pour diversifier la palette des outils dont disposent les parties. De trop nombreuses zones souffrent d'une pénurie d'infrastructures médicales et de personnel soignant, en particulier les régions rurales et celles frappées par la crise économique. Qui plus est, on a vu s'accentuer ces dernières années les disparités territoriales en matière de soins, faisant apparaître très nettement une carte de la surmortalité qui va de la Picardie à l'Alsace et passe par ce que les géographes nomment la « diagonale du vide ». Cette situation ne fait qu'empirer, tant pour les patients que pour le personnel médical, littéralement assailli par la demande.

L'Etat s'émeut au moment où cette désertification touche les médecins généralistes, alors que depuis plus d'une décennie, dans de nombreuses régions rurales, on ne trouve plus guère de médecins spécialistes. Les généralistes ont ainsi été amenés, dans l'indifférence générale, à augmenter leurs cadences de travail pour pallier cette raréfaction.

Il est urgent d'agir pour équilibrer l'installation des médecins, donc l'offre médicale sur l'ensemble du territoire, garantissant ainsi un accès aux soins égal pour tous. L'article 29 dispose donc que le conventionnement des médecins définira également les modalités d'aides à l'installation. A première vue, l'idée semble séduisante. Mais il faut considérer la situation dans son ensemble, car lutter contre les disparités sanitaires régionales sous le seul prisme du financement est loin d'être suffisant. Malgré les incitations fiscales, les médecins généralistes rechignent toujours à s'installer dans les zones franches. II faut donc mener un combat global, qui passe aussi par la réhabilitation économique de ces régions.

En outre, le problème de la sous-représentation des médecins dans les régions rurales, par exemple, n'est pas seulement économique : il est de nature culturelle. Les médecins, notamment les plus jeunes, hésitent à s'installer dans les campagnes ou les zones frappées par la crise économique. L'isolement, la disparition croissante des services publics et des emplois réduisent en effet l'attrait de ces régions. Nous reviendrons à propos des amendements sur la nécessité de mener un combat d'envergure et audacieux contre les disparités sanitaires, en s'appuyant par exemple sur les conférences régionales de santé.

Outre que les mesures qu'il propose sont inefficaces, cet article menace le système de convention. Aujourd'hui, pour inciter les médecins à adhérer à la convention médicale, les caisses d'assurance maladie prennent déjà en charge les deux tiers des cotisations de l'ASV et une partie des cotisations d'assurance maladie et vieillesse. Ainsi, l'article innove seulement quant à l'assiette et au taux de cette prise en charge, laquelle est justifiée, non plus par le conventionnement, mais par des critères géographiques. Je cite l'article : « les caisses d'assurance maladie participent au financement des cotisations (...) en fonction du lieu d'installation ou d'exercice ». En somme, l'effort pour attirer des médecins conventionnés dépendra directement des sacrifices que seront prêtes à consentir les caisses d'assurance maladie... Nous tenons à rappeler que le conventionnement n'est pas la médecine du pauvre ou des exclus : la convention médicale est le garant du pacte social qui assure à tous les assurés sociaux un accès égal aux soins.

M. Hervé Mariton - La présence des médecins est un enjeu essentiel de l'aménagement du territoire. Leur absence, dans les zones rurales défavorisées, est un des problèmes les plus souvent mentionnés par la population. Dans nombre de cas, nous sommes parvenus à un tournant, avec l'épuisement de la présence de générations de médecins qui se succédaient traditionnellement dans certains cantons. Et nous parvenons aussi à la limite de la motivation de professionnels plus jeunes, qui ne veulent plus s'y installer dans les conditions actuelles. Très rapidement, de véritables déserts médicaux peuvent donc se créer.

Le projet de loi introduit un niveau d'incitation inconnu à ce jour. La question n'était pas restée inexplorée, mais ce texte comporte des dispositifs nouveaux. Pour ma part, je ne suis pas sûr qu'ils suffiront, au moins pendant la période intermédiaire où vont se concrétiser les risques que j'évoquais à l'instant et la démotivation d'un certain nombre de professionnels. Dans certaines situations, il se peut que les incitations ne produisent pas immédiatement leur plein effet. Elles valent toutefois la peine d'être explorées. Et il serait déraisonnable de s'engager dans un dispositif de contrainte, qui ne fonctionnerait pas. Dans quelques années, il faudra faire le point et peut-être les nécessités de l'aménagement du territoire exigeront-elles alors d'aller au-delà du présent projet. Celui-ci mérite cependant d'être soutenu par souci d'efficacité et pour accompagner une évolution des mentalités qui devra se faire à son rythme. C'est la réponse la plus adaptée possible aujourd'hui, compte tenu des besoins et du comportement des acteurs.

M. Claude Evin - Je partage les préoccupations exprimées par M. Mariton, et que nous avons déjà abordées notamment à l'article premier. Mais, pour résoudre ce problème d'une répartition équitable de l'offre de soins sur le territoire, on ne saurait s'en tenir au dispositif proposé aujourd'hui, qui renvoie à la seule négociation conventionnelle le soin de résoudre le problème par des aides ou des prises en charge de cotisations. Nous ne trouverons de solutions pérennes que grâce à une démarche appréhendant l'offre de soins globale, et non seulement libérale ou ambulatoire. M. Mariton le laisse d'ailleurs entendre quand il se demande si ce projet suffira pour inciter les médecins libéraux à s'installer dans les zones désertifiées. On peut accorder toutes les aides qu'on voudra, cela ne règlera pas le problème. On n'y parviendra que par une organisation de l'offre assurant à tous les habitants, non pas nécessairement un médecin dans chaque canton, mais la garantie, en quelque lieu qu'ils habitent, d'avoir accès à des soins de qualité, gradués en fonction de leur besoin.

Tel est bien l'objectif. Si le dispositif proposé peut conduire à l'installation d'un généraliste, tant mieux. Mais l'essentiel est d'offrir aux patients, et en particulier aux personnes âgées, vivant dans des cantons ruraux, un accès rapide y compris à des services d'urgence, en liaison avec le réseau hospitalier. Cela doit nous conduire à organiser différemment l'offre de soins. La proposition qui nous est faite peut avoir un aspect sympathique, mais elle est très insuffisante. Nous avons besoin, au niveau régional, d'une entité chargée du pilotage de l'offre de soins, qui pourrait intégrer les schémas régionaux d'organisation sanitaire. Ce pilotage devrait être exercé en liaison avec l'ARH. C'est ainsi seulement que l'on remédiera à la désertification médicale.

M. Jean Le Garrec - Nous sommes ici dans l'ordre de la nécessité, mais aussi de la modestie tant le sujet est complexe. Le métier de médecin est culturellement en cours de transformation, en partie en raison de son évolution démographique et de sa féminisation. Je suis l'élu d'une région où il faut attendre parfois huit à douze mois pour consulter un spécialiste, et où les médecins libéraux sont en voie de disparition. Les dispositions de l'article 29 marquent un petit pas en avant, mais l'incitation n'est pas de nature à résoudre le problème. Nous avons besoin d'une vision régionale globale de l'offre de soins, qui peut conduire à une péréquation, malheureusement supprimée, dans le financement hospitalier. Il faudrait, à mon sens, engager le débat avec les professionnels de santé sur la base d'une carte de la démographie médicale. L'incitation seule ne suffira pas. Nous devons inventer d'autres méthodes pour satisfaire à la demande de soins.

M. le Président - Les amendements 1696 à 1707 sont identiques.

Mme Janine Jambu - Ils tendent à supprimer l'article 29. En effet, la seule incitation financière ne suffit pas pour attirer les jeunes médecins, en l'absence de politique ambitieuse d `aménagement du territoire. Autant donc supprimer un article dont les dispositions sont inefficaces et qui, surtout, tend à soumettre le conventionnement médical à des critères géographiques, et non plus à des principes d'universalité et d'égal accès aux soins. En effet, les régions qui tenteront d'attirer des médecins libéraux sont celles qui souffrent de carences, des régions victimes. Mais qu'en sera-t-il des autres ? Face à la pénurie programmée de personnel médical due à un numerus clausus inepte, le conventionnement risque de perdre beaucoup de son intérêt, les assurés sociaux les plus aisés préférant payer davantage plutôt que d'attendre trop longtemps pour consulter. Dès lors, les régions manquant de médecins entreront en compétition pour prendre en charge les cotisations, et celles qui capituleront les premières verront augmenter le nombre de médecins en secteur 2. Le principe d'universalité de la sécurité sociale subira ainsi- une nouvelle atteinte, alors que près de 15 % des assurés sociaux renoncent déjà à se soigner convenablement faute de revenus suffisants. Au total, votre dispositif tend à créer une médecine à deux vitesses, ce que nous n'acceptons pas.

M. le Rapporteur - Non, madame Jambu, l'article 29 ne fait pas du tout éclater le principe d'un conventionnement des professionnels de santé en secteur 1. L'amendement 3877 de la commission lèvera sur ce point toute ambiguïté. De même, la prise en charge des cotisations sociales ne sera pas subordonnée au seul critère géographique. Le sénateur Descours, dans son rapport sur la permanence des soins, indique avec raison : « Des solutions locales, ponctuelles et adaptées apparaissent plus pertinentes qu'une réponse unique et globale. Ces solutions doivent être emboîtées les unes dans les autres, chaque étage ne pouvant donner sa pleine efficacité sans les autres pour influencer sensiblement l'installation de ces professionnels. D'où la nécessité de donner aux partenaires conventionnels de nouveaux outils pour favoriser une répartition de l'offre de soins libérale plus homogène sur l'ensemble du territoire. » Avis défavorable aux amendements.

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat à l'assurance maladie - Même avis. L'installation des médecins s'inscrit dans le cadre global de l'aménagement du territoire. Sur les rapports entre l'assurance maladie et les professionnels de santé, M. Mariton a développé une conception que nous partageons entièrement : la question n'est pas seulement financière, même si la rémunération de l'acte médical revêt pour les médecins une importance primordiale. Le Gouvernement, sur un sujet difficile, essaie d'avancer. A court terme, l'incitation nous semble être la démarche la plus efficace. Si nous changions complètement l'organisation de l'offre de soins, nous romprions le contrat de confiance passé avec les étudiants en médecine qui se sont engagés dans cette profession sur la base du système actuel. Au reste, c'est peut-être la dernière fois que nous recourons à l'incitation, si jamais elle ne produisait pas les effets attendus. Mais il ne me semble pas qu'on lui ait laissé le temps de faire ses preuves.

En effet des mesures avaient été prises dans la loi de financement pour 2001, mais du fait de la lenteur de publication des décrets d'application, ce n'est que depuis le début de l'année 2003 que l'incitation est effective. Nous n'avons donc pas encore assez de recul. L'amendement du rapporteur sur l'évaluation des dispositifs nous permettra d'y voir plus clair, et chacun devra prendre ensuite ses responsabilités ; mais pour l'instant, l'incitation est la meilleure solution (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Jean-Marie Le Guen - Nul ne pense que les mesures d'incitation seront suffisantes ; d'ores et déjà, nous savons que nous sommes obligés d'agir pour les zones en voie de désertification. Pour le reste, renvoyer à la convention en matière d'organisation des soins, c'est faire jouer au syndicalisme médical un rôle qui n'est pas le sien. Les zones de surdensité médicale vont également poser problème : nous devons le dire aux jeunes médecins, même si je ne propose pas un rationnement à l'installation. Il nous faut envoyer des signaux, par exemple fermer les secteurs à honoraires libres dans les zones à haute densité médicale ; sinon, demain, les syndicats médicaux demanderont à l'assurance maladie de fournir aux médecins un certain niveau de revenus, par le biais de la codification des actes et de l'absence de contrôle. C'est du reste déjà ce qui se passe aujourd'hui...

Nous devons dire aux jeunes médecins : attention, ne croyez pas les démagogues qui prétendent que jamais on ne touchera à la libre installation dans les zones à haute densité médicale - car les ressources de l'assurance maladie ne suivront pas.

M. Maxime Gremetz - Tout le monde est d'accord sur le constat ; les désaccords portent sur les mesures à prendre...

La situation des régions sous-médicalisées ne peut plus durer, ni pour les médecins qui travaillent dans des conditions épouvantables, en étant contraints de faire des centaines de kilomètres par jour, ni pour la population, dont la sécurité sanitaire n'est pas du tout assurée.

On nous propose d'accroître les exonérations de cotisations sociales, mais je crains qu'ainsi on favorise le secteur 2 plutôt que le secteur 1. Il faudra certainement, comme nous l'avions proposé - je vois que l'idée progresse -, prendre des mesures pour obliger des médecins à s'installer à tel ou tel endroit.

Les amendements 1696 à 1707, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Président - Je suis saisi de douze amendements identiques 4642 à 4653.

M. Jacques Desallangre - Nous sommes tous persuadés que les dispositifs d'aide ne seront pas suffisants ; alors pourquoi attendre pour prendre d'autres mesures ?

Je voudrais vous faire part d'une expérience personnelle : quand votre petite-fille souffre, un samedi à 15 heures, il n'est pas normal que vous deviez, faute de généraliste, la conduire aux urgences de l'hôpital le plus proche, à Chauny, pour qu'elle soit soignée trois heures plus tard par un médecin venu de Lille ! Il y a cinquante ans, quand j'étais malade, mon père appelait le médecin, qui venait !

M. Jacques Godfrain - L'effet des 35 heures... (Protestations sur les bancs du groupe socialiste)

M. Jacques Desallangre - Changez de disque !

Lors d'une récente campagne électorale, les jeunes médecins de l'Aisne m'ont dit : « Les aides, on n'en veut pas ! Nos femmes ne veulent pas vivre à la campagne, et pour nos enfants ce n'est pas pratique. Donc, nous n'irons pas ! »

L'enjeu mérite le volontarisme politique. L'Etat, garant de l'intérêt général, doit réfléchir dès maintenant à une nouvelle organisation de la santé sur notre territoire. Dans un pays de l'Union européenne très proche de nous, on demande aux jeunes médecins d'accomplir leurs premières années d'exercice dans les secteurs qu'on leur désigne.

Les amendements 4642 à 4653, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Jean-Pierre Door - En matière d'installation, l'intersyndicale des internes en médecine générale a fourni d'excellentes pistes, qui sont déjà reprises pour une bonne part dans la loi de financement de la sécurité sociale et dans ce projet. Pour le moment, les futurs médecins généralistes ne souhaitent pas de mesures coercitives pour l'installation dans les zones difficiles, mais ils demandent l'application effective des mesures d'aide à l'installation. Un nombre non négligeable d'entre eux sont intéressés par l'exercice dans ces zones.

Le Gouvernement propose une participation des caisses au financement des cotisations dues par les professionnels de santé ; à mon sens, la prise en charge de ces cotisations ne doit avoir pour contrepartie que le fait pour le médecin de percevoir des honoraires opposables. Ce dispositif ne doit pas pouvoir être remis en cause par les caisses.

L'aide à l'installation en zone déficitaire devrait se traduire par une minoration de la cotisation payée par les médecins, et non par une modulation de la prise en charge. Tel est le sens de mon amendement 89.

M. le Rapporteur - Avis défavorable, même si je comprends les arguments de M. Door. Je ne reviendrai pas sur les recommandations du sénateur Descours en matière de démographie médicale, mais il me semble essentiel de pouvoir définir dans la convention les dispositifs d'aide à l'installation dans les zones sous-médicalisées, dont les conditions d'attribution pourront être revues au niveau régional par l'URCAM après concertation avec les professionnels de santé.

Par ailleurs, c'est au 5° du I de l'article qu'il est fait référence aux cotisations sociales.

M. le Secrétaire d'Etat - Pour des raisons juridiques, votre proposition est irréalisable, car les cotisations sont porteuses de droits. Je vous demande donc de retirer cet amendement auquel le Gouvernement ne peut être favorable.

L'amendement 89 est retiré.

M. Maxime Gremetz - Je reprends l'amendement 62 rectifié de M. François Guillaume qui dispose au début du 4° du I de cet article, que « pour l'implantation des médecins, il sera délivré des licences en relation directe avec l'importance de la population ». Il convient, en effet, afin de favoriser l'installation des médecins en milieu rural, de conditionner l'ouverture des cabinets de généralistes au nombre d'habitants, comme pour les pharmacies.

Sur cet excellent amendement - voyez combien nous sommes ouverts ! (Sourires)-, je demande un scrutin public.

M. Jean-Marie Le Guen - Je demande une courte suspension de séance.

La séance, suspendue à 18 heures 5, est reprise à 18 heures 10.

M. le Secrétaire d'Etat - Le système de régulation proposé est comparable à celui qui régit la création des officines pharmaceutiques depuis plus de soixante ans. Cependant, l'exercice de la médecine libérale étant fort différent, on ne saurait appliquer les mêmes règles.

Par ailleurs, cet amendement n'entre pas dans notre logique d'incitation, et nous avons souvent répété qu'il était indispensable d'évaluer les nouveaux dispositifs mis en place ; plusieurs amendements du rapporteur vont d'ailleurs dans ce sens. Nous ne pouvons donc accepter celui-ci.

A la majorité de 51 voix contre 10 sur 68 votants et 61 suffrages exprimés, l'amendement 62 rectifié n'est pas adopté.

M. Jean-Marie Le Guen - Rappel au Règlement ! Nous sommes bien dans une session extraordinaire quant à notre méthode de travail, et quant à la surabondance de textes déposés !

M. Hervé Novelli - Et d'amendements !

M. Jean-Marie Le Guen - Le groupe socialiste, depuis le début, travaille sérieusement, sans précipitation, et tient à défendre les valeurs auxquelles il est attaché. Il ne s'agit pas d'autre chose, et je tenais à le rappeler avant la tenue de la Conférence des présidents à 19 heures.

M. Maxime Gremetz - Nous sommes sur la même position. Nous avons formulé des propositions et nous avons un contre-projet, qui se traduit par des amendements, que nous défendrons tous.

M. le Président - Nous en avons conscience ! Vous défendez même ceux qui ne sont pas de vous (Sourires).

M. le Rapporteur - L'amendement 8314 élargit le champ de l'article aux centres de santé.

L'amendement 8314, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme Martine Billard - Notre amendement 7580 propose d'établir, dans un délai de trois ans, un bilan qui sera discuté au Parlement. Le dispositif actuel, compte tenu des délais de publication des décrets, n'est en fait en vigueur que depuis un an. Il est donc sans doute trop tôt pour procéder à une évaluation, mais il faudra bien chercher sous peu à savoir si l'incitation a suffi à régler le problème ou s'il faut recourir à d'autres moyens. Plus nous laisserons perdurer le manque de médecins, plus il sera difficile d'y remédier.

M. le Rapporteur - La commission a préféré à cet amendement le 3878, 2e rectification, qu'elle a adopté à l'initiative de Mme Fraysse.

L'amendement 7580 est retiré.

M. le Rapporteur - Pour lever toute ambiguïté, l'amendement 3877 précise qu'il appartient bien à la convention nationale de déterminer les modalités de prise en charge, par les caisses d'assurance maladie, des cotisations sociales dues par les professionnels de santé.

L'amendement 3877, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 8315 apporte une précision.

L'amendement 8315, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. le Rapporteur - Nous en venons à l'amendement 3878, 2e rectification, dont je parlais à l'instant et qui prévoit des évaluation annuelles, régionales, suivies d'une évaluation nationale adressée au Parlement dans les trois ans à compter de la promulgation de la loi. La commission a adopté cette excellente proposition de Mme Fraysse et je suggère au groupe communiste de retirer les amendements 1708 à 1719, qui sont ainsi satisfaits.

M. Jacques Desallangre - Nous sommes prêts à les retirer. Une consultation régulière permettra de cerner les enjeux et les spécificités régionales et de coordonner les acteurs locaux. Ces évaluations doivent être discutées au Parlement. Nous espérons qu'elles aboutiront à une homogénéisation de l'accès aux soins, et qu'elles permettront de sauvegarder le système de la convention médicale.

M. Jean-Marie Le Guen - L'amendement 7841 est presque identique, à ceci près qu'il insiste sur la nécessité de donner des responsabilités à la conférence régionale de santé, acteur important de la démocratie sanitaire.

M. le Rapporteur - L'amendement adopté par la commission prévoit précisément que les évaluations régionales annuelles sont communiquées aux conférences régionales ou territoriales de santé.

Mme Martine Billard - Les évaluations régionales annuelles ne serviront à rien pour équilibrer la situation entre les régions. Il est donc particulièrement important de prévoir une discussion nationale.

M. le Rapporteur - Ce point a été longuement débattu en commission, et c'est pourquoi l'amendement a fait l'objet de deux rectifications successives, la seconde répondant à votre préoccupation, ainsi qu'à celle de M. Le Guen.

M. Gérard Bapt - Qui établira les bilans régionaux et l'évaluation nationale ?

M. le Rapporteur - Les URCAM établiront les bilans annuels, qui seront transmis à l'UNCAM.

M. le Secrétaire d'Etat - Devant une telle unanimité, le Gouvernement ne peut être que favorable à l'amendement de la commission.

L'amendement 3878 2e rectification, mis aux voix, est adopté. En conséquence, les amendements 1708 à 1719 et 7841 tombent.

Mme Janine Jambu - Nos amendements 4654 à 4665 visent à supprimer le II de cet article, qui prévoit que les CPAM fixent la participation au financement des cotisations des médecins qui décident de se conventionner.

M. le Rapporteur - Avis défavorable, pour des raisons qui ont déjà été exposées.

Les amendements 4654 à 4665, repoussés par la commission, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Rapporteur - L'amendement 8316 vise à corriger une erreur matérielle.

L'amendement 8316, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. Jacques Desallangre - Nos amendements 4666 à 4677 visent à supprimer le III de cet article, selon lequel la prise en charge des cotisations sociales et de l'allocation spécifique de vieillesse des médecins conventionnés ne serait plus définie par un décret national. Cela aurait de graves conséquences sur la cohésion du système d'assurance maladie : sous couvert de régionalisation, l'Etat se défausse une nouvelle fois de ses responsabilités sur les collectivités locales, en les contraignant à se rendre attractives pour les praticiens - et en encourageant ainsi la concurrence entre elles.

N'oublions pas que le nombre des praticiens va se réduire inexorablement. Nous commençons à payer le prix de la politique malthusienne menée en matière d'offre médicale : pour de nombreux gouvernements, dont certains que nous avons soutenus, elle était le moyen le plus efficace de lutter contre les dépenses de santé. Tout fut donc mis en œuvre pour cela, du numerus clausus aux diverses contraintes administratives censées réguler l'activité. D'ici dix ans, 75 000 médecins vont arrêter leur activité, pour 35 000 nouveaux arrivants ! Dans un tel contexte, déréguler le système du conventionnement serait le conduire à sa perte. Nous sommes conscients de la nécessité d'attirer des praticiens dans les déserts médicaux, mais cela ne doit pas se faire au prix de la mort du secteur conventionné.

M. le Rapporteur - Rejet.

M. le Secrétaire d'Etat - Rejet.

M. Maxime Gremetz - Il est des silences gênés et d'autres assourdissants ; les vôtres, Monsieur le ministre et Monsieur le rapporteur, sont simplement scandaleux. Ces amendements posent un problème d'intérêt national. Dans certaines zones désertifiées, on commence à demander aux collectivités de contribuer à l'installation de nouveaux médecins. Insidieusement, l'Etat se dessaisit de sa mission essentielle de solidarité et de son obligation régalienne d'assurer à tous un égal accès à des soins de qualité. Dans son intervention d'hier, le Président de la République a affirmé la nécessité d'un Etat fort pour éviter que la société ne se disloque. Mais un Etat réduit à ses missions de police, de défense et de justice reste-t-il un Etat fort ? Et la santé ? Et les droits sociaux constitutionnels ?

M. Jacques Desallangre - L'Etat doit être le garant de l'intérêt général !

M. Maxime Gremetz - Et savoir résister aux lobbies de toute nature.

Les amendements 4666 à 4677, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

Mme Janine Jambu - Par cohérence avec nos amendements précédents, nos amendements 4678 à 4689 visent à supprimer le IV de l'article, lequel tend à lancer les CPAM dans une course débridée à la prise en charge des cotisations sociales, et, partant, à creuser les inégalités entre les territoires. De plus, le fait de ne plus définir au plan national le niveau de cotisations pris en charge risque à terme d'enterrer le secteur 1. Or la médecine conventionnée, loin d'être réservée aux exclus ou au plus pauvres, a vocation à s'adresser à tous.

Les amendements 4678 à 4689, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Rapporteur - L'amendement 8317 est de coordination.

L'amendement 8317, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme Muguette Jacquaint - Nos amendements 4690 à 4701 sont défendus.

Les amendements 4690 à 4701, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Jacques Desallangre - Nos amendements 4702 à 4713 visent à supprimer le VI de l'article, lequel tend à organiser la pénurie de l'offre de soins et à enterrer le secteur conventionné. La convention médicale doit être préservée car elle le garant du pacte social, notamment parce qu'elle permet au plus grand nombre d'avoir accès à des soins de qualité.

M. le Rapporteur - Rejet.

M. le Secrétaire d'Etat - Rejet.

M. Jean-Pierre Brard - Je constate que la commission et le Gouvernement sont dans une position si difficile qu'ils ne répondent plus et tentent de forcer l'allure en espérant nous faire taire. Au risque de les décevoir, nous continuerons de nous élever avec force contre leur entreprise de démolition de nos droits fondamentaux. Quant à l'UMP, elle n'a visiblement qu'un seul droit, celui de se taire ! Vous êtes, mes chers collègues, les muets du sérail (Protestations sur les bancs du groupe UMP). Vous avez reçu la consigne de vous taire et vous obéissez sans discuter...

M. Jean Ueberschlag - Vous, vous parlez pour ne rien dire !

M. Jean-Pierre Brard - Depuis 1789, notre système social s'est construit sur l'universalité des droits et des valeurs, si chère à notre Président. Las, à la veille du soixantième anniversaire de la Libération, vous enterrez le programme du Conseil national de la Résistance et n'opposez à nos propositions humanistes qu'un silence gêné. Nous attendions mieux de notre jeune et brillant secrétaire d'Etat !

Les amendements 4702 à 4713, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Président - Les amendements 4714 à 4725 sont identiques, et pour anticiper la demande que va me faire M. Gremetz, j'annonce qu'ils feront l'objet d'un scrutin public.

M. Maxime Gremetz - Ces amendements visent à supprimer le VII de l'article. Le Président de la République, dans sa remarquable intervention télévisée d'hier,...

M. Jean-Pierre Brard - N'exagérons rien !

M. Maxime Gremetz - ...n'a pas seulement annoncé un référendum sur le projet de Constitution européenne - ce qui m'a réjoui car j'en avais fait le pari avec tous les journalistes -, il a également parlé de l'assurance maladie, et je l'ai écouté avec la plus grande attention. Car moi, je n'ai pas zappé pour regarder l'étape du Tour de France ! (Sourires) Il a souligné que cette réforme, à la différence des précédentes, s'attachait à changer les comportements. Quelle révolution ! Tous les gens qui vont payer plus pour être moins bien soignés, tous ceux qui sont obligés de faire des kilomètres pour consulter un médecin, tous ceux-là apprécieront.

L'article 29 traite d'une grande question : l'organisation territoriale de la santé. Mais on ne peut pas prétendre la résoudre et se débarrasser dans le même temps des hôpitaux de proximité, en particulier en Picardie, où l'offre de soins est très en deçà des besoins.

M. Jean-Pierre Brard - Vous présidez avec beaucoup d'énergie et d'efficacité, monsieur le Président, mais tout à l'heure vous n'avez pas vu que le rapporteur et le Secrétaire d'Etat s'apprêtaient pour une fois à me répondre, peut-être sur l'idéologie maurrassienne qui imprègne leur démarche (Exclamations sur les bancs du groupe UMP). C'est dommage, ils auraient pu participer un peu au débat.

M. le Rapporteur - La commission a repoussé ces amendements tendant à supprimer le paragraphe VII, comme elle avait repoussé les amendements de suppression des paragraphes VI, V, IV, III, II et I, pour les mêmes raisons qui l'avaient amenée à repousser l'amendement de suppression de l'article tout entier, raisons sur lesquelles je me suis expliqué, de même que le Gouvernement.

M. le Secrétaire d'Etat - Même avis.

A la majorité de 59 voix contre 12, sur 79 votants et 71 suffrages exprimés, les amendements 4714 à 4725 ne sont pas adoptés.

M. le Rapporteur - L'amendement 8319 rectifié corrige une erreur matérielle.

L'amendement 8319 rectifié, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Pierre Brard - Le rapporteur m'a répondu, mais sur le mode épicier, et non pas sur le fond, pas plus d'ailleurs que le ministre...

M. le Rapporteur - On fait ce qu'on peut !

M. Jean-Pierre Brard - Il est tout à votre honneur d'avoir conscience de vos limites, mais l'on attend de vous, comme de tout représentant de la Nation, une vision d'ensemble. Et vous, Monsieur le Secrétaire d'Etat, quelle trace laisserez-vous dans l'histoire avec votre silence obstiné ? Dites-nous donc si, en héritier de Maurras, vous privilégiez les intérêts d'une minorité sur l'héritage qui bénéficie à la majorité !

Nos amendements 4726 à 4737 sont défendus.

M. le Rapporteur - Avis défavorable.

M. le Secrétaire d'Etat - Même avis.

M. Gérard Bapt - Vous m'aviez promis, Monsieur le Président, que les amendements identiques ne seraient plus imprimés qu'à un seul exemplaire, avec une liste en annexe des différents signataires.

M. le Président - Il en sera ainsi pour la suite du débat, mais je n'ai pas le pouvoir de modifier la présentation des amendements déjà imprimés.

M. Maxime Gremetz - J'étais fier d'avoir un ministre picard, mais voici qu'il a pris les habitudes de son ministre de tutelle ! Monsieur le Secrétaire d'Etat, sauvez l'honneur de la Picardie, répondez ! (Sourires)

Les amendements 4726 à 4737, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Jean-Pierre Brard - Nos amendements 4738 à 4749 tendent à supprimer le IX de cet article, qui, en conditionnant la prise en charge des cotisations sociales des médecins à leur installation dans certaines zones géographiques, risque de les encourager à sortir du secteur 1, et ce au détriment des assurés sociaux, alors que 15  % d'entre eux renoncent déjà à se soigner faute de revenus suffisants. C'est une atteinte considérable aux principes d'universalité et de solidarité de la sécurité sociale.

Les amendements 4738 à 4749, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Président - Les amendements 4750 à 4761, sont défendus. N'est-ce pas, Monsieur Gremetz ? (Sourires)

M. Maxime Gremetz - Si cela peut vous être agréable... (Mêmes mouvements)

Les amendements 4750 à 4761, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

L'article 29 modifié, mis aux voix, est adopté.

M. le Président - Comme vous le savez, la Conférence des présidents se réunit à 19 heures. Je vais donc lever la séance.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu ce soir à 21 heures.

La séance est levée à 18 heures 55.

            Le Directeur du service
            des comptes rendus analytiques,

            François GEORGE

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne trois heures après la fin de séance.

Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.

www.assemblee-nationale.fr


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