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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2003-2004 - 28ème jour de séance, 70ème séance

1ère SÉANCE DU JEUDI 20 NOVEMBRE 2003

PRÉSIDENCE de M. Marc-Philippe DAUBRESSE

vice-président

Sommaire

      SAISINE POUR AVIS 2

      REVENU MINIMUM D'INSERTION
      ET REVENU MINIMUM D'ACTIVITÉ (suite) 2

      MOTION DE RENVOI EN COMMISSION 16

      AVANT L'ARTICLE PREMIER 24

      ARTICLE PREMIER 24

      COMMISSION MIXTE PARITAIRE 26

La séance est ouverte à neuf heures trente.

SAISINE POUR AVIS

M. le Président - J'informe l'Assemblée que la commission de la défense nationale et des forces armées a décidé de se saisir pour avis du projet de loi de finances rectificative pour 2003.

REVENU MINIMUM D'INSERTION ET REVENU MINIMUM D'ACTIVITÉ (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, portant décentralisation en matière de revenu minimum d'insertion et créant un revenu minimum d'activité.

M. Bernard Derosier - Vitesse et précipitation ne sont pas bonnes conseillères en matière politique.

Pensez-vous, Monsieur le ministre, qu'une loi qui mette en _uvre un tel dispositif administratif, qui doit faire l'objet de deux lectures dans chaque assemblée, qui sera soumise au Conseil constitutionnel, qui donc sera promulguée au plus tôt dans la deuxième quinzaine du mois de décembre, puisse entrer en application le 1er janvier 2004 ? A moins que l'Assemblée ne se prépare à voter conforme le texte adopté par le Sénat, mais je n'ose y croire ?

Contrairement à ce que vous avez répondu à M. Philippe Martin, les présidents des conseils généraux ne souhaitent pas s'engager le plus vite possible. Nombre d'entre eux vous ont écrit, ainsi qu'au Premier ministre, et parmi eux quinze sénateurs de la majorité : « Nous comptons sur votre pragmatisme et vos connaissances des collectivités pour réexaminer cette date d'application qui nous semble trop rapprochée pour mettre en _uvre dans chaque département un dispositif fiable et efficace ». Le collectif Alerte, qui regroupe la majorité des associations concernées, a fait de même.

Ce projet n'est qu'un moyen pour « dégraisser » le budget de l'Etat sur le dos des collectivités territoriales. Le transfert, certes, est l'esprit même des lois de décentralisation de 1982, mais cessez de galvauder ce terme quand votre seul objectif consiste à faire des économies pour financer les 30 % de baisse d'impôt sur le revenu promis par le Président de la République.

Votre projet suscite bien des interrogations, même dans votre camp, notamment sur la compensation financière d'un transfert qui n'est pas assuré dans la transparence et l'équité.

Quant au RMA, c'est un cadeau de Noël avant l'heure pour le Medef. On brade ainsi le droit du travail en créant un sous-contrat pour ceux qui sont considérés comme des sous-citoyens.

Mme Christine Boutin, rapporteure de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales - On ne peut pas dire ça !

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales - Non !

M. Alain Gest - Tout ce qui est excessif est dérisoire.

M. Bernard Derosier - Cela illustre le peu de considération du Gouvernement pour l'autonomie des collectivités territoriales, en l'occurrence, les départements, mais aussi pour la représentation nationale.

Mépris, encore, quand le Gouvernement adresse aux préfets, sous votre signature et celle des ministres de l'intérieur et du budget, le 30 octobre, des instructions par voie de circulaire pour la mise en _uvre d'un projet qui n'est pas encore voté. Comment une circulaire peut-elle faire si peu de cas du Parlement ?

En fait, le Gouvernement veut réaliser des économies sur le dos des collectivités territoriales et faire baisser artificiellement les chiffres du chômage.

Même si vous vous en défendez, quinze ans après la mise en _uvre du RMI, cinq ans après la loi de lutte contre les exclusions, nous assistons à un retour en arrière social inspiré par le Workfare anglo-saxon.

Au traitement social du chômage, le Gouvernement a préféré la réduction de la durée des allocations. Les signaux d'alarme ont été nombreux : diminution des crédits d'insertion - moins 20 % dans le département du Nord en 2003 -, réduction drastique de l'enveloppe des contrats aidés, réforme de la réduction du temps d'indemnisation des demandeurs d'emplois - en 2004, 180 000 d'entre eux seront touchés - enfin, limitation à deux ans du versement de l'ASS.

Ces mesures précipiteront des dizaines de milliers de personnes vers le RMI.

Vous avez affirmé hier votre intention de reconsidérer les conséquences de la suppression de l'ASS sur le coût du RMI pour les départements. Mais y aura-t-il effet rétroactif pour l'exercice antérieur ?

L'expérience récente de la mise en _uvre de l'APA et le désengagement financier de l'Etat ont contraint nombre de conseils généraux à augmenter la pression fiscale locale, qui est la plus injuste. Mon département compte 63 000 allocataires du RMI pour lesquels le conseil général a inscrit une somme de 43 millions en 2003 pour les crédits d'insertion. L'Etat devrait transférer 275 millions. Or, avec la mise en _uvre de la réforme, les besoins estimés en matière d'allocation sont de l'ordre de 290 millions, hors impact ASS et création du RMA.

De plus, l'impact de la réduction de la durée de l'indemnisation de l'ASS a été estimée pour le Nord à 29 millions, et la mise en oeuvre du RMA à 16 millions, soit une charge non financée de 60 millions.

Comme pour l'APA, le compte n'y est pas. Qui compensera cette augmentation ? Les départements ne peuvent, comme l'Etat l'a fait pour l'APA, recourir à l'emprunt pour des dépenses de fonctionnement !

La circulaire que j'ai citée indique « que les départements verseront à terme échu à compter de janvier 2004 les allocations RMI aux CAF ». Cela met donc à leur charge l'allocation du mois de décembre ainsi que la prime de Noël, sans compensation financière. « Les recettes correspondantes, précise la circulaire, feront l'objet d'un premier versement aux départements avant le 20 janvier 2004. » Mais les départements devront financer l'allocation avant le 5 janvier ! Ils devront donc faire la trésorerie de l'Etat, à hauteur de 23 millions pour mon département. De qui se moque-t-on ?

M. Augustin Bonrepaux - Des départements !

M. Bernard Derosier - Le RMI est une allocation de vie qui bénéficie également aux ayants droit de l'allocataire : on ne peut prendre le risque d'une rupture dans son versement. Cela suppose la mise en _uvre, entre les départements et les CAF ou la MSA, d'une procédure financière qui ne s'improvisera pas entre Noël et le nouvel an. Contrairement à ce qui s'est passé lors de sa création en 1988 ou de celle de l'APA, il ne peut y avoir pour le transfert du RMI une montée en charge graduelle. Ce sera, du jour au lendemain, un lourd défi à relever, sans compter qu'il faudra attendre la parution des décrets d'application.

Pour toutes ces raisons, je vous demande, Monsieur le ministre, de reporter l'entrée en vigueur de la réforme au 1er janvier 2005. Il y va de la crédibilité de votre action (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

M. Alain Gest - Ce projet de loi présente une multitude d'intérêts.

Il marque le souci du Gouvernement de remédier aux carences du dispositif RMI dans le domaine de l'insertion et constitue le premier acte des transferts de compétences dont la loi sur les responsabilités locales sera le temps fort. Il exprime une volonté de redonner leur dignité à nos compatriotes les plus fragiles. Enfin, il répond à un engagement du Président de la République et de la majorité. Ce n'est pas rien : cela contribue à rétablir la confiance des citoyens envers la représentation nationale.

Le texte voté en juillet par le Sénat et les précisions que vous avez apportées, Monsieur le ministre, comportent bien des motifs de satisfaction. Le principe d'un revenu minimum n'est pas remis en cause : il est de notre devoir d'organiser la solidarité nationale autour de ceux de nos compatriotes qui en ont le plus besoin. Quel que puisse être le succès du RMA, la marginalisation de certains allocataires du RMI exigera le maintien d'un accompagnement social comme préalable à toute réinsertion.

Mme la Rapporteure - Absolument !

M. Alain Gest - Ce texte le permet. Il marque aussi un pas décisif dans la décentralisation, en confiant l'intégralité du dispositif aux conseils généraux. Président de celui de la Somme, je ne puis que confirmer combien la dualité de direction a dilué les responsabilités et ruiné l'efficacité du système. La multiplication des interlocuteurs rendait le dispositif illisible. Les départements assument depuis vingt ans des compétences sociales. Ils ont su gérer l'APA malgré l'imprévoyance imputable au précédent gouvernement, ils sauront relever ce nouveau défi.

Créer le RMA, c'est reconnaître que l'exercice d'une activité est la meilleure chance d'une réinsertion durable. Président d'une association d'insertion depuis douze ans, je puis témoigner que les allocataires du RMI qui se réinsèrent le mieux sont ceux à qui a été confiée une activité d'intérêt public, fût-ce, par un contrat emploi-solidarité.

Mme Marie-Anne Montchamp, rapporteure pour avis de la commission des finances - Très bien.

M. Alain Gest - Ils ont en effet repris l'habitude de respecter des horaires et de s'inscrire dans le cadre de relations hiérarchiques. Pour l'UMP, l'efficacité d'une politique sociale ne se mesure pas au nombre de personnes assistées, mais à celui de celles qui retrouvent un emploi ouvrant de réelles perspectives d'avenir. Le RMA participe ainsi de la réhabilitation salutaire de la valeur travail, fil conducteur de la politique du Gouvernement.

Vous avez donné des garanties financières aux conseils généraux : dispositif de compensation, prime de Noël - dans des conditions à préciser - recettes transférées. Il n'y a donc pas lieu de redouter une hausse de la fiscalité locale, voire un désengagement de l'Etat. Nos collègues de l'opposition peinent à le reconnaître : les gouvernements qu'ils soutenaient ne portent-ils pas la responsabilité de l'insuffisance des moyens transférés en 1982 - notamment pour les lycées et les collèges - et de la gestion budgétaire catastrophique de l'APA ? Ils feignent d'oublier la garantie financière que constitue la réforme constitutionnelle adoptée il y a quelques mois. Leurs erreurs d'hier ont entamé la crédibilité de la décentralisation : nous nous devons d'être plus prévoyants.

Mme la Rapporteure pour avis - Absolument.

M. Alain Gest - Je devrais me montrer pleinement satisfait. Je ne puis pourtant me défendre d'un certain agacement, voire d'une certaine colère. Plusieurs interventions ont témoigné d'un manque de confiance envers les élus locaux. Certains ne vont-ils pas jusqu'à mettre en doute la transparence et la légitimité des décisions de suspension du RMI que prendraient les présidents de conseils généraux et à proposer pour cette raison de les soumettre au contrôle des CLI ?

Mme la Rapporteure - Mais non !

M. Alain Gest - Dans le même ordre d'idées, l'obligation faite aux départements de consacrer 17 % des dépenses du RMI à des actions d'insertion est maintenue, au mépris du vote du Sénat et de l'avis de l'Assemblée des départements de France. Je puis vous assurer que mon département consacre largement plus de 17 % des dépenses du RMI aux actions d'insertion et que ces crédits sont inscrits en toute transparence au budget. Tout manquement à ce souci de solidarité serait donc aisément dénoncé.

L'objectif de la création du RMA est de réduire le nombre d'allocataires du RMI. Les départements doivent pouvoir adapter leurs crédits d'insertion en fonction de leurs résultats en matière de RMA. Je propose donc de maintenir la rédaction du Sénat. L'article 40 bis prévoyant un bilan du dispositif, il sera toujours temps de rétablir si nécessaire l'obligation de 17 % en 2006.

La défiance envers les élus locaux est encore à l'_uvre quand certains vous invitent à reporter l'entrée en vigueur de la loi en se réclamant de la majorité des présidents de conseils généraux.

M. Augustin Bonrepaux - Ils ont été nombreux à l'écrire !

M. Alain Gest - Ne siégeant qu'épisodiquement à l'Assemblée des départements de France, vous ignorez sans doute que vos collègues socialistes ne sont pas tous hostiles à une entrée en vigueur du dispositif dès janvier 2004. Je ne doute pas que M. Derosier ait, comme moi, déjà entrepris de préparer avec la CAF la mise en place du RMA. Que ceux qui prétendent croire en la décentralisation le prouvent en faisant enfin confiance aux acteurs locaux !

Je m'indigne tout autant de la suspicion que certains manifestent à l'égard des entreprises. Nos politiques d'insertion les ont toujours ignorées. Nos collègues de l'opposition, y compris M. Le Garrec, ont reconnu l'échec du volet insertion du RMI. Ils redoutent de voir augmenter le nombre des allocataires, mais ils nous proposent le statu quo ! L'effet d'aubaine ne serait-il pas - pour eux - de pouvoir reprocher une politique anti-sociale au Gouvernement ?

M. Le Garrec craint que nous ne favorisions la montée des extrêmes si le système n'évolue pas. Qu'il nous soutienne donc !

En accusant les milliers de petits chefs d'entreprise et en les assimilant à quelques patrons indélicats, vous condamnez la grande nouveauté du RMA : un parcours de retour à l'emploi grâce à l'ouverture sur l'entreprise. Il est indispensable qu'un tel système soit attractif pour les entreprises. C'est ce qui justifie le contrat, que certains ont qualifié d'atypique. Il faut bien une incitation - du type CIE - pour encourager l'entreprise à transformer à terme le RMA en CDI.

Par ailleurs, Monsieur le ministre, ne laissez pas dénaturer l'esprit et la portée de votre projet par des responsables administratifs soucieux de leurs prérogatives, qui depuis quelques semaines s'évertuent à retirer des postes des services RMI. Dans mon département, huit des treize postes ne sont plus pourvus. Si l'on voulait faire échouer cette loi pour des raisons financières, on ne s'y prendrait pas autrement. Je sais que vous en êtes conscient et que vous envisagez un moyen de contourner ce dysfonctionnement : j'espère que vous nous rassurerez pleinement sur ce point.

Nous avons choisi l'activité plutôt que l'assistance, et la réconciliation des Français. Si les départements savent faire preuve de créativité pour mobiliser les entreprises, nous mettrons le pied à l'étrier de dizaines de milliers de Français. Nouveau progrès social, après la revalorisation du SMIC et l'accès à la retraite des salariés ayant commencé à travailler très jeunes, ce projet est bien accueilli par nos concitoyens, en particulier dans les milieux populaires.

De tout cela, d'aucuns avaient parlé ; nous, nous le faisons (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Mme Marie-Renée Oget - Le chômage atteint un niveau historique. Un an et demi après votre retour au pouvoir, vous êtes parvenus à faire reculer la France d'un des premiers à celui de bon dernier de la classe européenne (Exclamations sur les bancs du groupe UMP). Et dans un tel contexte, vous tentez de faire croire aux chômeurs qu'ils auront demain une activité, alors que jusqu'à présent vous vous êtes distingués par la suppression des emplois-jeunes et la réduction drastique du nombre de CES et de CEC. Vous proposez un dispositif qui laisse sceptiques les associations du secteur de la solidarité et de l'insertion, dont vous avez choisi d'ignorer les critiques, alors même que vous supprimez l'allocation spécifique de solidarité pour des centaines de milliers de sans emploi et que vous réduisez la durée et le montant des indemnisations chômage.

Même des critiques venant de votre propre majorité, y compris de Mme la rapporteure, qui demande d'ajourner l'entrée en vigueur du dispositif, n'ont pas suffi à vous convaincre ! Nous, députés de l'opposition, avons décidé de soutenir un nombre non négligeable d'amendements, tout en refusant la logique d'un texte qui n'est qu'une mystification supplémentaire.

Vous stigmatisez les chômeurs comme des feignants qu'il s'agirait de remettre au travail. Au passage, vous ne dites mot des anciens bénéficiaires de l'ASS qui seront exclus du RMI et qui ne pourront donc pas davantage prétendre au RMA.

En outre,vous voulez transférer aux départements le financement du RMI. Des élus de droite comme de gauche tirent la sonnette d'alarme, mais rien n'y fait... Le Premier ministre aurait pu nous gratifier d'une nouvelle maxime : « Le texte est vide, mais la note est sèche »... En réalité, votre gestion catastrophique des finances publiques aura des incidences sur la fiscalité locale, et seuls les plus aisés continueront de bénéficier de vos cadeaux fiscaux.

Sans expérimentation ni évaluation crédible du RMA, vous décidez de faire l'impasse sur les programmes d'insertion qui, jusqu'alors, englobaient non seulement l'emploi, mais aussi le logement, la santé, la prévention du surendettement, l'éducation des enfants... Or, le seul accès à l'emploi ne suffit pas à mettre à l'abri de la précarité. Au demeurant, la majorité des employeurs déclarent ne pas être prêts à recruter et à former des publics en proie à trop de difficultés.

Le coût d'un emploi RMA pour les entreprises équivaudra à un tiers du SMIC. Conséquence inévitable : les bas salaires seront tirés vers le bas et les employeurs remplaceront les emplois au SMIC par des contrats à moindre coût, limités à vingt heures par semaine. Votre réforme ouvre donc la voie à une aggravation de la situation sociale. Un ajournement de son entrée en vigueur serait un geste de sagesse, mais son retrait serait une preuve de bon sens ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Yves Boisseau - Plus d'un million de personnes sont allocataires du RMI, la moitié seulement sont porteuses d'un projet d'insertion, et les projets sont souvent trop éloignés des besoins de l'économie pour aboutir à une insertion professionnelle.

L'une des causes de cette évolution est la diminution progressive, depuis deux à trois décennies, du nombre des métiers à faible qualification, sous l'effet des progrès technologiques et d'une comparaison des coûts souvent plus favorable à la machine qu'à l'homme. Bien sûr, il n'est ni envisageable ni souhaitable de revenir en arrière ; mais alors que faire pour aider ceux qui se trouvent ainsi écartés de l'emploi ?

Leur donner une formation, disent certains. Mais nous recevons tous dans nos permanences ces hommes et ces femmes qui refusent les formations trop théoriques, ces « stages parking » qui ne débouchent pas sur une intégration professionnelle. Certains, qui ne se sentent plus la capacité de retourner sur les bancs d'une école, nous demandent tout simplement « du travail », en ajoutant parfois « dans n'importe quoi » - quelle formule terrible...

Autre possibilité : le passage par une association intermédiaire, une entreprise d'insertion. Je salue le formidable travail qu'accomplissent ces institutions, mais il ne s'agit souvent que d'une première étape - de remise en bon état sur le plan physique et moral.

La nouvelle solution proposée à travers le RMA est bonne dans son principe. En phase avec la nouvelle étape de décentralisation, ce projet mise sur la proximité. Le point le plus important est l'élargissement du champ d'application aux secteurs marchand et non marchand.

C'est faire un procès d'intention aux employeurs de croire qu'ils n'auront pas à c_ur, dans leur majorité, de promouvoir cette nouvelle forme d'insertion. Ce type de formation par la pratique n'existe-t-il pas déjà dans l'apprentissage ?

Certains voient dans les conditions financières faites aux employeurs un avantage exorbitant. Mais comment nier la nécessité d'une compensation pour ceux qui emploieront un personnel dont on sait bien qu'il faudra davantage l'encadrer ?

Quant à l'intérêt des postes proposés, il tiendra aux conseils généraux de veiller à le garantir en passant les conventions.

Le nombre de postes offerts sera-t-il suffisant ? Peut-être. En tout cas, priorité doit être donnée à ceux dont les besoins sont les plus criants. C'est la raison pour laquelle, après avoir souhaité la suppression de l'exigence de deux ans de RMI, je souhaite qu'une telle condition soit maintenue, probablement en en réduisant la durée.

M. le Président de la commission des affaires sociales - Très bien !

M. Yves Boisseau - Par ailleurs, je veux rappeler que les droits garantis au titre du RMI, notamment la CMU et la CMU complémentaire, sont maintenus dans le cadre du RMA, ce qui signifie bien qu'il ne s'agit pas seulement d'une insertion professionnelle.

Une politique vigoureuse de croissance doit permettre le retour à l'emploi des demandeurs les moins en difficulté. Pour les autres, ceux qui forment la trop longue cohorte des érémistes, le projet de RMA est bienvenu, et je le soutiens (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Georges Colombier - Je commencerai par m'exprimer avec le c_ur, face aux ravages causés par la précarité et par la pauvreté.

Nous rencontrons tous des allocataires du RMI, qui vivent avec 362 € par mois. Ils ne demandent souvent qu'à s'insérer dans la société, tant il est impossible de vivre décemment avec une telle somme.

Représentants d'un pays civilisé et prospère, sachons ne pas détourner le regard des exclus de notre société. Le RMI a l'avantage de ne pas laisser entièrement démunies des milliers de personnes. Mais, après quinze ans d'existence, ce dispositif doit tenir compte du triste fait qu'une frange de notre population ne peut pas reprendre immédiatement une activité professionnelle ordinaire. Il s'ensuit que 48 % seulement des allocataires du RMI bénéficient d'un contrat d'insertion.

Décentraliser la gestion du RMI rendra le dispositif plus efficace, puisqu'il sera mis en _uvre au plus près des intéressés, et non pas supprimé comme je l'ai parfois entendu dire.

Le revenu minimum d'activité, lui, formera le chaînon manquant de la réinsertion, une sorte de palier de décompression avant de rejoindre le monde du travail. La création de ce dispositif est entourée de solides garanties, encore renforcées par les amendements examinés en commission. L'ouverture au secteur privé marque un heureux changement de cap. A ceux qui dénoncent un cadeau offert aux entreprises, je réponds qu'intégrer une personne au RMI depuis deux ans requiert un accompagnement social et une volonté citoyenne méritoires de la part de chefs d'entreprise qui subissent par ailleurs les difficultés de la conjoncture. On pourrait regretter l'absence d'un système de cotisation d'assurance chômage, qui aurait rendu l'accès au RMA plus attractif. Mais il paraît logique de pousser les allocataires du RMA à trouver un emploi stable plutôt que de les laisser retomber dans une sorte de RMI amélioré.

M. Alain Gest - Très bien !

M. Georges Colombier - Un point particulier me préoccupe. Lorsque les chômeurs dont le conjoint exerce une activité professionnelle perdront le droit à l'ASS, ils ne pourront prétendre ni au RMI ni au RMA, et les revenus du ménage se trouveront ainsi brusquement - et fortement - amputés, alors qu'un couple non marié pourrait bénéficier du RMI et du RMA. J'attire votre attention sur ce problème juridique.

Il est nécessaire, je le comprends, de créer le RMA au plus vite tant les besoins sont grands. Il me paraît cependant difficile de promulguer le texte en si peu de temps, au risque de rencontrer des difficultés d'adaptation comparables à celles auxquelles ont dû faire face les conseils généraux lors de l'entrée en vigueur de l'APA.

Comment comptez-vous assurer la continuité du RMI, alors que le nouveau dispositif doit s'appliquer le 1er janvier prochain ? Votre réponse rassurerait les conseils généraux, dont celui de l'Isère.

Je me félicite de ce projet, qui va contribuer à rendre l'espoir et la dignité à nos concitoyens les plus démunis et à faciliter l'insertion des érémistes par le travail. Les élus locaux deviendront les véritables responsables de l'action sociale sur le terrain. Si au transfert de charges correspond celui des moyens financiers, alors nous aurons fait faire à l'insertion et à la décentralisation un pas décisif et reconnu le travail comme une valeur à part entière de la dignité humaine (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Patrick Roy - Voici une mauvaise loi de plus !

M. Alain Gest - Cela commence mal !

M. Patrick Roy - Une loi injuste et totalement démagogique ! Ce n'est pas un projet pour la France, c'est d'abord un message clair lancé à votre électorat le plus conservateur ! Par votre propos simpliste, vous tentez d'évacuer le drame du chômage de masse, qui a souvent cassé les bénéficiaires du RMI, détruisant leur avenir. Alors que notre pays connaît un niveau record d'insécurité sociale, vous outragez tous ces Français victimes de l'arrogance du profit !

Caviar pour les uns, conserves pour les autres !

Electoraliste, votre vision est aussi hâtive et secrète. Comment un texte relatif à une question d'une telle envergure a-t-il pu être écrit dans cette incroyable précipitation ?

M. Alain Gest - Le Sénat l'a adopté il y a six mois !

M. Patrick Roy - Pourquoi avoir choisi le secret des ministères plutôt que le dialogue avec les structures associatives. Vous me direz que c'est faux, mais vous savez très bien que le Gouvernement a méprisé ce dialogue ! Aussi votre texte est-il rejeté par tous ceux qui connaissent la réalité du terrain.

M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité - Parce que nous ne la connaissons pas ?

M. Patrick Roy - Ne laissez pas le secret des ministères attiser les flammes de la misère !

Alors que nous sommes déjà fin novembre, comment pouvez-vous maintenir une application au 1er janvier 2004 ? Le Gouvernement est-il responsable, ou est-il sourd aux appels au secours des acteurs de l'insertion, des présidents des conseils généraux, comme l'a dit Bernard Derosier ?

M. Alain Gest - Tout le monde peut se tromper !

M. Patrick Roy - En revanche, le Gouvernement n'est pas sourd à ses amis du Medef, à qui vous faites un cadeau impérial !

Vos amis ont beau minimiser en commission l'effet d'aubaine que sera le RMA pour l'employeur, la vérité va renverser les plus incrédules : jamais les employeurs n'auront eu de la main-d'_uvre à si bon marché !

Le Medef en avait rêvé, vous l'avez fait !

Pour moins de deux euros de l'heure, le bénéficiaire du RMA va s'engager dans une voie qui ne lui assure aucun avenir ! Pour moins de deux euros, et avec des charges de transport, tenues vestimentaires, garde d'enfants, dont vous ne dites rien.

De plus, ce contrat balaie nos règles sociales collectives. Pour un véritable salarié, un an de travail c'est un an de cotisations sur la retraite. Mais un an de RMA, c'est un trimestre de cotisations sur la retraite !

M. Alain Gest - Et au RMI, c'est combien ?

M. Patrick Roy - Quelle aubaine en revanche pour l'employeur qui après dix-huit mois d'utilisation du bénéficiaire du RMA pourra le laisser repartir vers son découragement et librement utiliser un autre bénéficiaire du RMA !

Et pendant ce temps, les éventuelles embauches, même précaires, resteront à la porte de l'entreprise.

Un contrat de RMA, ce sera un contrat CDI ou CDD en moins !

Le RMA ne construit pas d'avenir, il ne sera que l'illusion de l'été indien ! A moins que vous obligiez les employeurs à offrir un vrai contrat, et donc une vie digne et fière, aux bénéficiaires du RMA à l'issue du contrat ?

Nous connaissions déjà le refrain des fonctionnaires privilégiés, vous avez l'été dernier ajouté celui des retraités trop prospères, voilà maintenant que vous allez nous faire connaître un nouveau privilégié : le smicard en CDI.

Bâclé et secret, ce texte est aussi un terrible camouflet infligé aux professionnels de l'insertion, et en même temps un renoncement de l'Etat.

Pour vous, l'insertion, c'est : « Courage, fuyons ! »

Vous voulez vous décharger sur l'employeur de la mission d'insertion, qui demande pourtant une compétence particulière, face à la casse humaine provoquée par vingt-cinq ans de chômage de masse.

Les employeurs ont souvent de grandes qualités professionnelles. Mais croyez-vous vraiment qu'ils soient formés pour l'insertion ?

Le suivi individuel, l'accompagnement du bénéficiaire ne sont que vaguement évoqués dans votre texte ! Pourtant, ces actions sont nécessaires pour réussir l'insertion par l'économie. Le RMA ne sera pas un contrat d'emploi, ce sera un constat de désarroi.

Et puis, si vous n'aviez pas préparé ce texte en secret, aveuglé par votre idéologie conservatrice (Rires sur les bancs du groupe UMP), si vous aviez écouté un peu ceux qui travaillent à l'insertion sur le terrain, vous auriez su qu'il fallait simplifier les dispositifs. Au contraire, vous en rajoutez. Vous aurez la médaille de la lourdeur administrative ! Pourquoi ne pas tout refondre en un seul dispositif ?

Moins d'un Français sur cinq a voté pour votre politique en 2002 (Exclamations sur les bancs du groupe UMP).

M. Alain Gest - Et pour la vôtre ?

M. Patrick Roy - Il a fallu, pour sauver la démocratie, qu'au deuxième tour la gauche fasse le choix de la patrie plutôt que du parti (Murmures sur les bancs du groupe UMP). J'aime à le rappeler.

Aujourd'hui, pour rendre un sens à la démocratie, il faut ...

M. Alain Gest - Tenir nos engagements.

M. Patrick Roy - ...apporter des réponses aux questions de la vraie vie, pas celle des salons feutrés et des voitures teintées (Exclamations sur les bancs du groupe UMP), celle par exemple des femmes isolées avec enfants à charge. Que faites-vous pour ces femmes courageuses ? Rien.

Est-ce négligence ? Incompétence ? Conséquence de ce travail mené en secret ?

Malgré les efforts de Mme la rapporteure pour le corriger, - j'ai été « bluffé », je l'avoue -, ce texte reste une catastrophe.

De plus, à quoi sert l'Assemblée nationale puisque, avec deux autres ministres, vous avez envoyé aux préfets dès le 31 octobre une note très précise sur les dispositions dont nous commençons seulement à débattre ?

M. Jean-Pierre Gorges - Mais nous allons les voter.

M. Patrick Roy - Vous écrivez un bien mauvais scénario. Dans votre film, pour tous ceux qui souffrent, l'avenir ne sera pas un long fleuve tranquille. Votre texte est antisocial. Mais prenez garde, les érémistes risquent de perdre leur sang-froid (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Augustin Bonrepaux - Je me limiterai aux aspects financiers du transfert du RMI. Pourquoi proposons-nous de le reporter au 1er janvier 2005 ? C'est qu'une évaluation du coût est indispensable, et qu'il ne faut pas agir dans la précipitation.

M. Gabriel Biancheri - Comme pour l'APA ?

M. Augustin Bonrepaux - C'est ce que disent seize présidents de conseil général de vos amis et les présidents de gauche. Comment pouvez-vous affirmer qu'une majorité de ces présidents vous est favorable ?

M. Alain Gest - C'est la vérité !

M. Augustin Bonrepaux - Pourquoi perdez-vous votre sang-froid quand nous dénonçons votre précipitation ? Pourquoi ne pas suivre Mme Boutin, qui a fait un excellent rapport, et demande ce report à 2005 ?

Le 31 octobre, vous avez demandé aux conseils généraux d'être prêts le 5 janvier à verser le RMI de décembre. L'Etat est-il à ce point en difficulté qu'il ne puisse régler la facture et doive ainsi demander aux départements d'assurer sa trésorerie ? Mais comment feront-ils puisque vous n'assurerez la compensation que fin janvier ? Pourquoi faire si vite pour faire si mal ?

Nous demandons une évaluation du nombre exact de bénéficiaires au 31 décembre, de ceux qui ne toucheront plus l'ASS, de ceux qui ont perdu leur droit à l'ASSEDIC suite au changement du PARE, et du coût de gestion du RMI. En outre, votre politique de l'emploi va augmenter la précarité, donc le nombre de bénéficiaires du RMI. Enfin, comme le montre Mme Boutin dans son excellent rapport (Rires sur les bancs du groupe UMP), la substitution d'un RMA à un RMI se traduira par un surcoût mécanique, immédiat, de quelques dizaines de millions pour les départements.

A titre de compensation, le Gouvernement prévoit le transfert d'un partie du produit d'un impôt, non de l'impôt lui-même. Vous nous assurez qu'il y aura révision en 2005, mais la loi garantit-elle que cela se traduise bien par une compensation équivalente aux charges de l'année 2004 ? En effet, le coût du RMI va augmenter chaque année. D'abord, le coût de l'allocation suit au moins celui de l'inflation, soit 1,5 % à 2 %. Ensuite, le département prendra en charge le coût des personnels - on ne sait toujours pas s'il y aura compensation pour ceux de l'ANPE - qui augmente, en raison du GVT, d'au moins 3 % par an. Enfin, comme l'a démontré Mme Boutin, le passage du RMI au RMA correspond à une augmentation de 15 à 20 %. La compensation, elle, restera figée puisque les départements, à la différence des régions, ne pourront pas faire évoluer le taux de TIPP à mesure de la progression des charges. Mme Montchamp montre bien dans son rapport que le produit de la TIPP n'est pas évolutif - Mme Boutin le montre aussi : le RMI progresse, la consommation de carburant reste étale. Comme vous n'allez pas augmenter le taux de la TIPP, les départements n'auront plus qu'à augmenter les impôts locaux.

Enfin, vous parlez de péréquation mais ce que vous inscrivez dans la loi de finances n'est qu'un affichage. Là encore, le rapport de Mme Montchamp nous éclaire, car il montre que certains départements du sud, parmi les plus pauvres, ainsi que certains départements industriels ont beaucoup de érémistes, tandis que d'autres départements comme l'Ain ou l'Ille-et-Vilaine en ont un faible pourcentage. Mais vous n'avez rien prévu pour aider les départements les plus pauvres, où l'aggravation de la charge pèsera le plus sur les contribuables locaux.

Vous remplacez la solidarité nationale, garante de l'égalité républicaine, par une solidarité localisée, aléatoire, qui dépend des moyens des départements et de la volonté politique de leurs dirigeants. C'est pourquoi nous sommes opposés à ce projet (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

Mme Huguette Bello - Grande est l'attention portée à ce texte à la Réunion. Le RMI y symbolise en effet le principe républicain d'égalité dans les départements d'outre-mer. Les Réunionnais ont dû attendre jusqu'en 2002 pour voir son montant aligné sur celui servi en métropole. Les 68 000 allocataires et leur famille représentent presque le quart de la population. Or le projet initial ne prenait pas en compte les particularités des départements d'outre-mer. C'est au fur et à mesure de son examen qu'on a semblé les découvrir.

La compensation du transfert de la gestion du RMI au conseil général soulève ainsi des inquiétudes. L'incertitude qui entoure le transfert des ressources n'est pas rassurante. Déjà décentralisée dans les départements d'outre-mer, la TIPP ne saurait constituer une nouvelle recette, et la faiblesse du potentiel fiscal ne laisse guère envisager de grandes marges de man_uvre. Vous avez reconnu, Monsieur le ministre, qu'il fallait d'autres solutions. Lesquelles ?

Bien des élus, et le président du conseil général lui-même, s'interrogent sur les conséquences financières de la décentralisation du RMI. Le transfert du montant des allocations, qui représente déjà plus de six fois celui de la fiscalité directe, entraînerait une augmentation de 70 % du budget de fonctionnement du département. Comment faire face à un tel changement d'échelle ? Le Gouvernement ne prévoit ni réévaluation de la compensation, ni péréquation entre les départements. Il veut ignorer l'augmentation inévitable, à la Réunion, du nombre des allocataires, car les créations d'emplois, quoique élevées, demeurent plus faibles que la croissance de la population active. Il oublie également un peu vite les effets de sa réforme de l'allocation de solidarité spécifique et de sa politique ultralibérale.

C'est le droit au RMI lui-même qui risque d'être remis en cause. Si le nombre d'allocataires augmente et non les crédits transférés, faudra-t-il éliminer des allocataires, arbitrer entre les demandes ? Le montant du RMI est-il condamné à ne jamais plus augmenter ? Vous n'opposerez pas à l'enfer du RMI le paradis du RMA. Payer les entreprises pour qu'elles embauchent s'inscrit dans votre logique d'allégement du coût du travail. Cependant, jamais l'aide aux employeurs n'a été aussi élevée en pourcentage. Jamais non plus les droits des salariés n'auront été bafoués à ce point. L'assiette des cotisations pour la retraite et le chômage fait du dispositif une version légale du travail au noir !

Il est choquant que les pauvres n'aient plus à choisir qu'entre la souffrance de ne pouvoir travailler (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) et l'humiliation de n'être embauchés que pour des contrats quasiment gratuits (Protestations sur les bancs du groupe UMP).

Mme Nadine Morano - Le travail !

M. Patrick Roy - Il doit être payé !

Mme Huguette Bello - Quelle place occupera un dispositif aussi régressif ? (Interruptions sur les bancs du groupe UMP) Va-t-il se substituer aux contrats emploi-solidarité ou aux contrats d'accès à l'emploi, qui offrent de meilleures garanties ? Croyez-vous que l'application du RMA soit vraiment nécessaire à la Réunion ( « Oui ! » sur les bancs du groupe UMP) où des lois d'orientation ou de programme ont créé différents dispositifs pour les allocataires du RMI ?

Plusieurs députés UMP - Plus qu'ailleurs !

Mme Huguette Bello - C'est moi qui suis élue de la Réunion, pas vous !

Qu'il s'agisse du financement du RMI ou de l'articulation du RMA avec les dispositifs existants, aucun des deux volets de votre réforme ne sont applicables en l'état à la Réunion. C'est pourquoi il est nécessaire de différer son application. Revoir les moyens d'existence des plus modestes demande un peu plus de rigueur et d'attention (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

Mme Nadine Morano - Le travail !

M. Patrick Roy - Il faut le payer !

M. Alain Gest - C'est ce qu'on fait !

Mme Huguette Bello - Dites tout de suite que les Français sont paresseux !

M. Gaëtan Gorce - Ramener vers l'emploi ceux qui en sont le plus éloignés est une ambition qui ne peut être critiquée. Mais ni vos intentions ni les moyens dégagés ne semblent convenir à cet objectif.

Depuis dix-huit mois, vous ne cessez de parler de la réhabilitation de la valeur travail. Il s'agit certes d'un élément fondamental de notre pacte social (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP) mais est-il à ce point abîmé et oublié qu'il faille le réhabiliter ? (« Oui ! » sur les bancs du groupe UMP). Votre discours masque en fait bien d'autres intentions moins louables. Vous utilisez cette notion pour remettre en cause les acquis de la précédente législature, à commencer par la réduction du temps de travail. Comme si, en créant 300 000 emplois et en permettant aux salariés de récupérer de leurs heures de travail, nous avions remis cette valeur en question ! (Interruptions sur les bancs du groupe UMP). Si vous pouviez garder votre sang-froid lorsque nous nous exprimons, le débat serait plus serein, mais je comprends que mes arguments vous gênent...

M. le Président - Poursuivez, Monsieur Gorce.

M. Gaëtan Gorce - Cette référence vous sert également à masquer votre échec sur le terrain de l'emploi. Que devient le travail alors que depuis 18 mois, le nombre de chômeurs a augmenté de 150 000 ?

Un député UMP - Il augmente depuis vingt-quatre mois !

M. Gaëtan Gorce - On ne peut prétendre réhabiliter le travail lorsqu'on débilite l'emploi ! Vous cherchez enfin tout simplement à culpabiliser les Français au sujet des droits sociaux. On le voit dans la remise en cause d'un jour férié...

Mme Nadine Morano - Par solidarité !

M. Gaëtan Gorce - ... comme dans la rediscussion de la réduction du temps de travail ou dans vos commentaires sur ce projet. Vos propos font état de personnes qui ne voudraient pas travailler, par paresse ou par défaut moral. On sait pourtant bien que les exclus n'attendent que de pouvoir revenir à l'emploi, et qu'ils font beaucoup d'efforts pour cela.

Mme Nadine Morano - Il faut les aider !

M. Gaëtan Gorce - Cela passe par des conditions qui ne sont pas remplies, la première d'entre elles étant de disposer de bons emplois et de lutter contre la précarité.

M. Alain Gest - Qu'avez-vous fait pour cela ?

M. Gaëtan Gorce - Une autre est de gagner un bon salaire, ce qui n'est manifestement pas le souci de ce Gouvernement si l'on en juge par l'évolution du pouvoir d'achat des salariés. La dégradation des conditions de travail et la faiblesse des salaires sont des facteurs de démotivation bien plus importants que les inconvénients que vous trouvez à la réduction du temps de travail ! Enfin, cette référence à la valeur travail cherche à masquer vos réductions budgétaires. Vous mettez en avant le RMA ou le CIVIS, mais les moyens consacrés à ces engagements de l'Etat, qui seront payés par les conseils généraux, sont en réduction. Votre budget de l'emploi a diminué l'an dernier. Il stagne cette année, et il continue à baisser pour les plus défavorisés.

Il est vrai que le RMI n'a pas atteint tous ses objectifs en matière d'insertion. Nous avons tous une responsabilité pour trouver plus de moyens et le rendre plus efficace. Mais votre réponse manque de cohérence. Comment vont s'articuler les politiques de l'Etat, des régions, chargées de l'emploi des jeunes et des départements chargés de l'emploi des exclus ? Comment vont s'articuler ces dispositifs avec les CES, dans le secteur non marchand, et les CIE dans le privé ? Pourquoi ne pas utiliser les outils existants plutôt que de créer un nouvel instrument hybride ?

M. Alain Gest - Vous dites vous-même que cela n'a pas marché !

M. Gaëtan Gorce - Il est mi-contrat de travail, mi-autre, mi-salaire et mi-allocation... Il ne peut en tout cas servir à atteindre votre objectif.

Surtout, vous commettez une erreur d'appréciation. Vous considérez que la seule façon de lutter contre l'exclusion est d'utiliser des outils de fragilité et de précarité sociale. L'ensemble des pays qui ont optimisé leurs dépenses pour l'emploi ont renforcé leur système d'indemnisation chômage et leur couverture sociale. Vous dites vouloir changer l'opinion des salariés qui « regardent de travers » les bénéficiaires des allocations et qui doutent de leur légitimité, mais vous les stigmatisez en mettant en place des outils spécifiques ! Il faudrait au contraire impliquer les partenaires sociaux, inscrire le dispositif dans le droit commun et profiter de la négociation et de la concertation.

M. le Président - Monsieur Gorce, il faut conclure.

M. Gaëtan Gorce - Nous proposerons des amendements pour corriger cette dérive. Une véritable politique d'insertion professionnelle en faveur des plus en difficulté aurait dû s'appuyer sur des outils beaucoup plus cohérents.

Plusieurs députés UMP - Lesquels ?

M. Gaëtan Gorce - Les outils existants auraient pu être adaptés. Cette politique supposait à l'évidence l'implication des partenaires sociaux. Une large concertation aurait permis d'éviter la polémique et aurait été plus profitable à l'intérêt général (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Pascal Terrasse - S'il est une loi qui est bien comprise de la part de nos concitoyens, c'est bien celle relative au RMI. Tous les pays européens se sont indignés, à une époque, de voir des personnes dans la plus grande précarité. Il a fallu répondre à leurs besoins. L'abbé Pierre et beaucoup d'acteurs se sont préoccupés de la question et Michel Rocard a trouvé la bonne idée : alors que vous aviez, en 1986, supprimé l'impôt sur les grandes fortunes, pour satisfaire votre clientèle, il l'a rétabli pour pouvoir aider les plus pauvres parmi les plus pauvres.

Et les Français ont compris cette loi. Votre projet, lui, rompt le pacte républicain. Certes, il est louable de vouloir trouver des solutions pour des personnes en grande difficulté. Mais comment le financement s'organisera-t-il ?

Le Premier ministre, concernant les personnes âgées, a dit que la solidarité nationale devait s'appliquer. Et pour les personnes en situation de précarité, ce serait la solidarité départementale ?

M. Jean-Pierre Gorges - Vous n'avez pas lu le texte.

M. Pascal Terrasse - Mme Boutin fait référence à un rapport de l'IGAS, dont elle considère que les conclusions sont bonnes, et finalement, elle estime que la gestion du RMI doit être transférée aux départements. En fait, je ne suis pas sûr qu'elle soit convaincue, non plus d'ailleurs que M. le ministre lui-même, du bien-fondé de ce projet.

Vous voulez donner des gages au Conseil européen en matière d'équilibre financier.

Mme la Rapporteure pour avis - Il faut lire le texte !

M. Pascal Terrasse - Je l'ai lu ! Près de 60 % des présidents de conseils généraux, quelle que soit la formation politique à laquelle ils appartiennent, trouvent ce projet ahurissant.

M. Daniel Spagnou - Il ne faut donc rien faire ?

M. Pascal Terrasse - Qui financera la prime de Noël ? Les conseils généraux, qui paieront celle de 2003, transférée par le Gouvernement, et celle de 2004.

M. Jean-Pierre Gorges - Mentir est un vilain défaut.

M. Pascal Terrasse - Allez donc expliquer dans vos circonscriptions que ce n'est plus l'impôt sur la fortune qui financera le RMI, mais les impôts locaux !

Mme Nadine Morano - Quelles sont vos propositions ?

M. Pascal Terrasse - Nous aurons l'occasion d'en débattre pendant la discussion des articles. Nous vous démontrerons que vous avez tort (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

La discussion générale est close.

M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité - Je remercie les deux rapporteures, et en premier lieu Mme Christine Boutin, pour la qualité de son intervention et la force de son engagement.

Nous sommes d'accord sur trois points importants : il ne faut pas stigmatiser les érémistes. Il ne faut pas être naïfs : les abus existent.

Mme Hélène Mignon - 1 % des allocataires.

M. le Ministre - Enfin, nous ne devons pas avoir de préjugés : la sphère économique peut jouer un rôle dans l'insertion sociale. Pour le reste, nous aurons l'occasion pendant la discussion des articles de croiser nos arguments.

M. Pascal Terrasse - Divergences !

M. le Ministre - J'ai été impressionné par la précision du travail de Mme Marie-Anne Montchamp. Nous sommes d'accord : le centralisme n'est pas un gage de générosité et d'efficacité ; nous devons faire preuve de courage au service de la solidarité. Oui, le changement est plus fructueux que l'immobilisme.

Je voudrais répondre aux orateurs sans entrer dans une polémique qui m'a déçu. Je mesure la différence entre la qualité que j'ai entendue louer des débats en commission et les propos tenus en séance quand j'entends dire que notre projet instituerait une sorte de travail obligatoire ou de travail forcé et serait contraire aux conventions de l'Organisation internationale du travail.

M. Dominique Tian et Jean-Marc Roubaud - C'est diffamatoire.

M. le Ministre - L'article 3 renvoie à la loi de finances pour une stricte application des règles constitutionnelles. Concernant la compensation financière aux départements, un amendement à l'article 40 de la première partie du PLF pour 2004 sera proposé au Sénat dans les tout prochains jours et soutenu par le Gouvernement. Il s'agira de faire une évaluation sur la base des dépenses en 2003 et de proposer une correction définitive, au vu des comptes de 2004, dans la loi de finances de 2005. Il sera ainsi tenu compte des conséquences de la réforme de l'ASS et de la création du RMA.

La compensation des dépenses de 2004 engendrées par la décentralisation sera garantie à 100 % comme je m'y étais engagé.

Un amendement du Gouvernement complètera l'article 3 du projet en précisant qu'au titre de l'année 2004, la compensation est calculée sur la base des dépenses de 2003 et qu'au titre des années suivantes, la compensation sera ajustée de manière définitive au vu des comptes administratifs des départements pour 2004 dans la loi de finances suivant l'établissement des dits comptes (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Mme la Rapporteure - C'est une très belle avancée.

M. le Ministre - Si, dans le passé, nous avions bénéficié des mêmes garanties à l'occasion des transferts de compétences confiées aux collectivités locales, les choses auraient été très différentes (Protestations sur les bancs du groupe socialiste).

M. Augustin Bonrepaux - Heureusement que l'opposition a fait son travail !

M. le Ministre - Quant au versement qui doit intervenir le 5 janvier sous la responsabilité des départements alors que ceux-ci ne recevront les versements de TIPP que quelques jours plus tard, il reviendra aux caisses d'allocations familiales d'assurer l'avance de trésorerie pour quelques jours. A partir du mois de février 2004, la trésorerie sera assurée par les versements de TIPP dans les quinze jours.

Pourquoi avoir choisi de recourir à la TIPP plutôt qu'à d'autres financements ? C'est en tout cas une solution plus dynamique qu'une formule fondée sur la taxe professionnelle. Je vous rappelle à ce propos que les ressources des collectivités locales sont désormais figées pour toujours sur la base de l'année où le transfert a été effectué.

M. Augustin Bonrepaux - C'est faux ! La DGF évolue chaque année !

M. le Ministre - Concernant la prime de Noël, il n'y a aucun projet de transfert aux départements.

M. Augustin Bonrepaux - Très bien.

M. Pascal Terrasse - Dont acte.

M. le Ministre - Nous allons financer la prime sur le budget de l'Etat alors qu'elle l'était auparavant sur le budget de la sécurité sociale (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

J'ai souhaité que la gestion du RMI assurée par les CAF et les MSA soit un service rendu gratuitement aux départements. Il est certes possible de s'interroger sur cette disposition, comme l'a fait Mme Boutin, en souhaitant que ce service soit rémunéré.

Mais s'il l'était, les départements devraient avoir la liberté de choisir l'opérateur (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe socialiste).

M. Alain Gest - Tout à fait !

M. le Ministre - Nous avons préféré, conformément au souhait des CAF, préserver l'unité de gestion du dispositif. En contrepartie, le service restera gratuit, sauf si les départements souhaitent un service différent, auquel cas il faudrait passer des conventions particulières.

Je sais que les transferts de personnel se heurtent à des résistances. Je proposerai donc un amendement afin de lever toute ambiguïté sur ce sujet. La mise à disposition sera de droit, comme il est de règle en matière de décentralisation.

Du point de vue du bénéficiaire, est-il légitime d'espérer un succès du RMA ? Non si l'on retient, comme le souhaitent certains, l'ensemble de la rémunération pour l'assiette des cotisations : le différentiel de rémunération avec le RMI est alors réduit de 200 à 123 € par mois, et l'intéressé, par conséquent, y perd d'autant. C'est pourquoi l'assiette des cotisations est limitée au surplus versé par l'employeur. Cela réduit les droits à l'assurance chômage et à la retraite (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains), mais le bénéficiaire du RMA dispose d'une couverture maladie, maternité, accidents du travail gratuite. Il n'est pas illégitime qu'une gradation existe sur ce point entre le RMI, qui n'aura aucun droit... (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste).

Mme Martine Billard - Cela n'a rien à voir !

Mme Hélène Mignon - C'est une allocation !

M. le Ministre - ...le RMA, qui permettra d'acquérir deux trimestres au titre des régimes de retraite, et l'emploi salarié, qui ouvre des droits pleins.

Le RMA est-il susceptible de constituer un effet d'aubaine pour les employeurs ? Je rappelle que les personnes concernées sont très loin de l'emploi. Je redoute donc moins l'effet d'aubaine que l'insuffisante mobilisation des entreprises. Je table donc sur la constitution de réseaux entre élus locaux et employeurs pour parier sur la réussite du RMA (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

L'exonération de cotisations sociales patronales est limitée au secteur non marchand. Certains, à l'instar de M. Estrosi, l'ont regretté. Mais le Gouvernement a voulu éviter toute ambiguïté quant à un éventuel « cadeau ».

Le département conclura avec l'entreprise une convention qui lui permettra d'assurer un suivi individuel et de contrôler l'accompagnement effectif du bénéficiaire dans l'entreprise. Toute insuffisance devra être sanctionnée.

M. Vercamer s'est demandé pourquoi l'accès au RMA n'était pas ouvert d'emblée. Hormis le cas où l'intéressé bénéficiait précédemment de l'ASS, qui sera traité par amendement, il ne me paraît pas logique de supprimer l'exigence d'une durée minimale de RMI. Un tiers des érémistes accèdent déjà à l'emploi dans un délai d'un an. Ne pas prévoir de durée minimale, on risque des effets pervers. Or le dispositif du RMA doit bénéficier à ceux qui sont les plus éloignés de l'emploi, qui n'ont même plus accès aux CES ou aux CIE.

Plusieurs orateurs de la gauche ont dit redouter une rupture des contrats pour des érémistes incapables de travailler. Cette menace n'existe que dans leur imagination : les droits d'accès au RMI ne sont pas modifiés et le RMA n'est qu'une option offerte à son bénéficiaire.

Le risque d'une « territorialisation » du RMI n'existe pas davantage : le RMI reste encadré par la loi de 1988, qui reste la référence en matière d'accès aux soins et au logement.

Je suis très attentif, Madame Bello, à la situation outre-mer. Il n'y aura aucune incertitude quant au financement. La TIPP, outre-mer, étant déjà transférée aux régions, c'est sur la TIPP métropolitaine que sera financée la compensation - à 100 % - pour l'outre-mer.

M. Gorce s'est un peu emballé dans sa démonstration, mais les chiffres lui donnent tort sur le pouvoir d'achat des salariés, qui a augmenté de 2,5 % l'année passée, en partie grâce à la hausse garantie de 11,4 % du SMIC horaire en valeur réelle sur trois ans...

M. Pascal Terrasse - Pas pour tout le monde !

M. le Ministre - Pour la moitié des salariés payés au SMIC, en effet pour les autres, la hausse sera tout de même de 6 % ! Le Gouvernement soutient plus la rémunération du travail que cela n'avait été fait depuis longtemps ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF) Les 35 heures sont loin d'être un succès à cet égard : elles ont lourdement pesé sur le pouvoir d'achat des salariés.

M. Pascal Terrasse - Ce n'est pas ce qu'ils disent !

M. le Ministre - Quelle solidarité envers les plus démunis voulons-nous ? Les politiques de lutte contre l'exclusion ont solennellement affirmé la primauté de l'accès au droit, de l'objectif d'insertion et le refus de l'assistance. Or le décalage entre l'affirmation de ces principes et leur effectivité ne cesse de croître. L'objectif d'insertion n'a pas été atteint.

L'ambition du RMI était de rompre avec les processus d'exclusion et d'assistance. Mais un allocataire sur dix touche le RMI depuis dix ans ! Cette situation est désormais dénoncée et refusée par les personnes en situation d'exclusion, qui attendent moins une assistance qu'une reconnaissance de leur utilité sociale.

La démultiplication des politiques sociales ciblées ne nous a-t-elle pas éloignés des véritables aspirations des plus démunis ? Ils attendent de nous que nous les aidions à retrouver le chemin de l'emploi et de la dignité. Ces constats, nous les partageons avec les associations comme avec les élus locaux. Nous devons réinventer une politique de solidarité qui rompe avec les logiques d'assistance. C'est l'objectif que le Gouvernement poursuit, notamment avec le CIVIS, le contrat jeune en entreprise, l'intégration des étrangers, la consolidation des dispositifs d'hébergement et de réinsertion sociale.

La décentralisation du RMI et la création du RMA misent sur la proximité et sur le retour à l'emploi. Il est temps d'offrir une nouvelle chance d'insertion et d'accès à l'emploi à ceux qui sont exclus du monde du travail et qui aspirent à l'autonomie et à la dignité personnelle pour retrouver toute leur place au sein de la collectivité (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

MOTION DE RENVOI EN COMMISSION

M. le Président - J'ai reçu de M. Alain Bocquet et des membres du groupe des députés communistes et républicains une motion de renvoi en commission, déposée en application de l'article 91, alinéa 7, du Règlement.

Mme Muguette Jacquaint - Depuis votre arrivée au pouvoir, la richesse nationale a diminué de 0,2 % et le nombre des chômeurs a progressé de 7 %

La situation ne cesse de se dégrader depuis un an. La hausse du chômage a trouvé son rythme de croisière : le nombre des chômeurs a augmenté de 25 000 au cours du seul mois de septembre, soit entre 160 000 et 170 000 depuis l'arrivée de ce gouvernement. Celui des chômeurs de moins de vingt-cinq ans et des chômeurs de longue durée a même augmenté de 8 %.

Ces chiffres catastrophiques appelaient des mesures particulières. Mais si le discours est bien tourné, le flacon bien présenté, le contenu n'en reste pas moins dangereux.

M. Maxime Gremetz - C'est de l'éther de glycol !

Mme Muguette Jacquaint - Il accentue le décalage entre les actes et les paroles. Voilà qui me rappelle le discours du Président de la République à Valenciennes : « Il est inacceptable, qu'en France les gens n'aient plus droit au travail, au logement, soient de plus en plus en situation de précarité et de plus en plus pauvres », déclarait-il.

En face des cadeaux fiscaux contenus dans le projet de loi de finances - abaissement de 3 % de l'impôt sur le revenu, allégement de l'ISF, augmentation de la réduction d'impôt pour l'emploi de salariés à domicile, déductions fiscales pour favoriser la retraite par capitalisation, baisse des charges sur les bas salaires, report illimité des déficits des entreprises -, que trouve-t-on ? La réduction de l'indemnisation des chômeurs au titre de l'ASS, la hausse de la TIPP sur le gazole, l'augmentation dérisoire de la prime pour l'emploi, l'augmentation du forfait hospitalier.

Oui, la fracture sociale se creuse un peu plus chaque jour, on pousse les gens toujours plus près du précipice ! Monsieur le ministre, prenez la mesure de la gravité de la situation !

Quatre millions de personnes sont en dessous du seuil de pauvreté. Plus de trois millions sont mal logées ou même sans logement, et néanmoins le budget du logement diminue de 8,5 %. 14 % de la population renonce à des soins pour des raisons financières, et cette proportion atteint 23 % parmi les personnes gagnant moins de 750 € par mois et 30 % parmi les chômeurs. Voyez-vous, Monsieur le ministre, qu'on vit de plus en plus mal dans notre pays ? L'emploi lui-même, de plus en plus précaire, ne protège plus de la pauvreté.

Vous proposez aux allocataires du RMI de devenir des travailleurs pauvres, après avoir été des pauvres sans travail. Après la remise en cause des 35 heures, la suspension-abrogation des lois anti-licenciements boursiers, l'arrêt des emplois-jeunes et la suppression des 20 000 postes d'assistant d'éducation, voici le RMA, qui aggrave la flexibilité du travail et la dégradation des conditions d'emploi. C'est une nouvelle pièce de la machine à exclure. M. Raffarin, qui se rêve en Margaret Thatcher, fait des working poor une figure normale du salariat. Le contrat d'insertion-RMA, dérogeant au droit du travail, contraint les bénéficiaires à accepter un emploi au rabais et permet aux entreprises de les faire travailler vingt heures par semaine pour le tiers du coût du SMIC. Vous allez ainsi créer, vous le savez bien, un effet d'aubaine. Une association de chômeurs a d'ailleurs écrit : « Cinq érémastes pour le prix d'un SMIC : il faudrait être fou pour dépenser plus ! ». 327 € par mois, soit 4,3 € de l'heure, c'est Noël avant l'heure !

Plus grave encore, vous faites entrer dans le code du travail le mi-temps payé la moitié d'un SMIC comme une nouvelle norme d'emploi. Des emplois déjà précaires risquent ainsi d'être remplacés par des emplois encore plus précaires. Les entreprises susceptibles de recruter des érémistes sont en effet celles qui recourent déjà massivement aux emplois à bas salaires, à travers le temps partiel et les contrats de courte durée ; les autres, qui misent sur des relations durables avec leurs salariés et recrutent sur des critères d'expérience et de qualification, ne changeront pas leurs pratiques.

Les entreprises auront tout intérêt à attendre que les salariés en contrat précaire basculent dans le RMI, pour mieux les rattraper en contrat RMA !

Aux Etats-Unis, on oblige les bénéficiaires de l'aide sociale à travailler pour un salaire de misère. C'est la réintroduction d'un esclavage moderne (Exclamations sur les bancs du groupe UMP). Mais oui : ainsi, l'hôpital public de New York voulait restructurer ses services en renvoyant plusieurs centaines d'employés à temps plein et en en conservant mille, payés trois à quatre fois moins... Si ce n'est pas exactement ce que vous nous proposez, Monsieur le ministre, cela y ressemble étrangement (Mêmes mouvements).

Les érémistes n'auront plus guère d'espoir de décrocher par eux-mêmes un emploi, quand une entreprise pourra les embaucher pour le tiers du coût du SMIC. Il y aura pour eux à la fois perte d'autonomie dans le choix de l'emploi et perte financière.

M. Jacques-Alain Bénisti - Arrêtez de nous faire pleurer !

Mme Muguette Jacquaint - Il y a des gens qui souffrent en France, et je vous demande de les respecter !

M. Christian Jeanjean - Nous le savons aussi bien que vous !

Mme Muguette Jacquaint - Actuellement, les allocataires peuvent cumuler pendant quatre à six mois un revenu et leur allocation. Ils peuvent donc, en décrochant un mi-temps, percevoir jusqu'à 860 €. Avec le RMA, ils ne toucheront que 550 € - ce qui correspond au seuil de pauvreté.

En outre, les cotisations versées au titre du chômage et de la retraite ne seront assises que sur le complément salarial versé par l'employeur. En travaillant un an, un érémiste ne validera qu'un trimestre de retraite... N'est-ce pas institutionnaliser un sous-salariat, dans un contrat de travail assorti d'obligations sans droits ?

Si nous mettons le présent texte en parallèle avec votre projet relatif à la réforme du dialogue social et à la possibilité d'accords dérogatoires, nous avons de quoi nous inquiéter quant à l'architecture de votre projet social. Vous ouvrez la porte à la loi du plus fort, à un monde sans foi ni loi, où l'ordre public social est bafoué, où, surtout, l'employeur est délié de toute obligation. C'est une logique très dangereuse que celle qui conduit à dédouaner les employeurs de toute responsabilité en matière d'emploi. Pour finir, quel sera le plus assisté des deux, de l'employeur qui demande toujours plus d'aides, ou de l'allocataire qui reçoit le soutien de la solidarité nationale ? Votre projet conduit à favoriser l'assistanat au profit des employeurs. Le Medef devient un assisté potentiel aux frais des contribuables ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP)

M. Maxime Gremetz - On ne donne qu'aux riches !

Mme Muguette Jacquaint - De fait l'employeur, outre les exemptions de charges dont il bénéficie, perçoit le montant du RMI. Voilà donc une allocation de solidarité nationale versée en contrepartie d'une embauche ! Et qui paie le coût de la solidarité ? Les contribuables ! N'est-ce pas travestir notre Constitution pour servir les intérêts patronaux ?

Le RMA n'offre pas un véritable salaire, mais constitue la contrepartie dégradée d'un travail imposé, quoique vous en disiez. Le dispositif tend à contraindre les érémistes à s'activer en prenant n'importe quel travail, et surtout précaire. Vous substituez à un CDI un contrat d'exclusion à durée indéterminée. Vous vous gardez de parler de contrepartie imposée. Mais n'entendons-nous pas dire que l'échec de l'insertion est due à l'allocataire lui-même, volontiers paresseux, voire tricheur ? N'est-ce pas de sa faute s'il se retrouve exclu du marché du travail ?

Pourtant toutes les études sérieuses ont montré que le chômage est d'abord lié à la pénurie d'emploi. Après les malades qui consomment trop de médicaments, après les fonctionnaires qui sont trop nombreux, voici les érémistes livrés à la vindicte populaire. A entendre les membres de la majorité, les allocataires du RMI ne seraient pas dans la capacité de travailler et ne relèveraient pas de la solidarité nationale, dont ils profiteraient pour s'installer dans l'inactivité (Protestations sur les bancs du groupe UMP). Pourtant 80 % d'entre eux reconnaissent se sentir mieux après avoir retrouvé un emploi. Quel mépris à l'égard de personnes auxquelles il s'agit de redonner un statut social ; ce à quoi n'auront même pas droit les « érémastes »...

La vie de plus d'un millier de gens mérite une autre approche. Peut-on vraiment se complaire dans une situation où l'on ignore comment on nourrira ses enfants dès la deuxième semaine du mois, où l'on ne sait pas si on aura encore un logement le mois prochain, si on pourra se soigner et élever ses enfants dans de bonnes conditions ? C'était hier la journée des droits de l'enfants. Certains enfants sont nés sous une mauvaise étoile. Prenons garde à ne pas l'éteindre complètement...

Votre conception des « pauvres gens » est conforme à l'idéologie libérale, qui dit vouloir supprimer l'assistanat et conditionner le bénéfice de la solidarité nationale à une activité, même payée misère. C'est renouer avec l'ancien temps où les gens étaient taillables et corvéables à merci.

Vous avez oublié qu'à l'origine le RMI est un revenu minimum, auquel a été ajouté un dispositif destiné à aider les personnes concernées à s'en sortir, sous réserve que des moyens conséquents soient mobilisés à cette fin . Il ne s'agit pas d'un salaire de complaisance, mais d'un minimum de survie versé au titre de la solidarité nationale. C'est là l'honneur de cette allocation, en dépit de l'indignité dont certains la frappent.

Vous comprendrez alors mieux que l'allocataire est tributaire de la situation économique générale et de l'évolution du marché de l'emploi. Ceux qui ont du mal à sortir du RMI ont en commun de se trouver placés sur le segment le plus précaire du marché du travail, et d'être confrontés à des employeurs qui n'embauchent qu'à temps partiel ou à titre saisonnier.

La création du RMA entérinera ces phénomènes en dégradant davantage encore la situation de l'allocataire, à qui sera retiré le peu de droits que leur accordait la loi de 1988. Lui seul sera désormais tenu de respecter le contrat d'insertion, tandis que la collectivité ne sera plus engagée à honorer le RMI. De plus, les conseils généraux auront tout pouvoir pour nommer les représentants aux commissions locales d'insertion et agréeront seuls le contrat d'insertion. La suppression des crédits obligatoires d'insertion met fin à la politique publique d'insertion.

Votre projet aboutira à aggraver la situation de tous les salariés. Dès lors, votre discours sur la valeur du travail, celui du Président de la République sur la fracture sociale, sonnent faux. Il est indécent de culpabiliser les plus pauvres, alors que le chômage s'envole et que les plans de licenciement se multiplient parce que les bénéfices des entreprises doivent s'accroître encore et encore pour rassasier l'appétit des actionnaires.

Mme Nadine Morano - C'est trop !

Mme Muguette Jacquaint - Ainsi, M. Guillaume Sarkozy, vice-président du Medef, se dit fier d'être un patron qui délocalise (Interruptions sur les bancs du groupe UMP).

M. Maxime Gremetz - Et dire qu'il exerce en Picardie !

Mme Muguette Jacquaint - Que pensaient de la « valeur du travail » les dirigeants de Metaleurop, Alstom, Lu, Flodor, Péchiney...

M. Jean-Pierre Gorges - N'en jetez plus !

Mme Muguette Jacquaint - Je pourrais, hélas, allonger la liste. Elle montrera où sont les véritables responsables, que vous soutenez ! (Interruptions sur les bancs du groupe UMP)

Le RMA crée un précédent dangereux et inacceptable. Au nom de quoi les allocataires du RMI seraient-ils relégués dans un sous-contrat et privés d'une partie de la protection sociale liée indissolublement au contrat de travail ? Vous annoncez que les ex-bénéficiaires de l'ASS pourront signer un CIRMA ; mais tous n'auront pas le RMI et ne pourront donc pas le faire. Vous me direz si je me trompe, Monsieur le ministre, mais je crains que vous ne me rassuriez pas...

Vous préparez, avec ce projet, de terribles inégalités sociales. Nous sentons que vous êtes obsédés par le souci d'économies budgétaires, au détriment des érémistes. Vous cherchez à vous débarrasser du problème du RMI en l'éclatant entre les départements et en espérant ainsi casser le thermomètre de la pauvreté.

Le risque d'un tel transfert, même si le montant du RMI reste fixé au plan national, c'est qu'il dépende peu à peu de la politique de chaque département. Or certains sont riches, d'autres moins. Un président de conseil général pourra décider pratiquement seul de suspendre l'allocation et l'on glissera d'un dispositif universel vers une aide départementale (Interruptions sur les bancs du groupe UMP).

Par ailleurs, le projet est imprécis sur les conditions financières du transfert, par exemple en ce qui concerne la prime de Noël ou d'éventuels « coups de pouce », de même que sur le transfert des personnels des DDASS chargés de la gestion du RMI. De plus, le contenu des contrats d'insertion risque de s'appauvrir, car un employeur ne mobilisera pas toutes les ressources d'accompagnement social. Enfin, les plus démunis risquent d'être écartés d'un dispositif qui ne vise que l'emploi. Pour toutes ces raisons, le transfert doit être accompagné d'une compensation intégrale pour pérenniser le dispositif. Le ministre a dit que ce serait le cas. Mais un amendement en ce sens est tombé sous le coup de l'article 40. Nous sommes donc fondés à nous inquiéter. Ne répétons pas l'erreur faite avec la prestation spécifique dépendance, sur laquelle les départements avaient finalement fait des économies substantielles.

Ce texte érige l'inégalité en principe, précarise l'emploi, dégrade la condition des chômeurs, crée un sous-prolétariat, exclut ceux qu'il prétend insérer. Il est rejeté par l'ensemble des associations et il faut le combattre à la mesure du danger qu'il représente. Je tiens à saluer le travail de Mme la rapporteure.

M. Maxime Gremetz - Très bien !

Mme Muguette Jacquaint - Nous avons avec elle des convergences sur la solidarité et la lutte contre la pauvreté et nous avons ainsi comblé bien des lacunes, mais d'autres demeurent en ce qui concerne les effets d'aubaine et les moyens de l'insertion. C'est pourquoi, je demande le renvoi en commission (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains).

Mme la Rapporteure - Il m'a semblé que plusieurs de vos arguments relevaient plutôt d'une exception d'irrecevabilité.

En premier lieu, je veux affirmer que le souci de s'attaquer à la pauvreté, qui mine l'équilibre social, est partagé par chacun ici, sur tous les bancs. Il n'est pas réservé à certains.

Ce qui est vrai, c'est que nous avons une approche différente du RMA. Vous n'y croyez pas, nous y croyons. Nous pensons que le travail est une nouvelle chance...

Mme Nadine Morano - Très bien !

Mme la Rapporteure -...pour des personnes au RMI, qui peuvent ainsi retrouver une espérance, une dignité, un sens à leur vie. Vous stigmatisez le RMA, nous pensons que, même s'il reste des points à régler, il représente une chance.

Mme Muguette Jacquaint - Je stigmatise la précarité !

Mme la Rapporteure - Personne ici n'a dit que les allocataires du RMI sont des paresseux utilisant le système.

M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint - Si, malheureusement !

Mme la Rapporteure -Nous savons qu'il y a des gens dans ce cas, mais ils sont minoritaires. Je le répète, nous ne considérons pas que les allocataires du RMI soient en grande partie des profiteurs

M. Maxime Gremetz - Ils n'osent pas le dire ici !

Mme la Rapporteure - Cessons de montrer du doigt cette population. C'est pourquoi je vous demande de cesser d'appeler les allocataires du RMI des « érémistes » et de ne pas créer ensuite le terme « érémastes ». Il faut respecter leur dignité ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF)

M. Maxime Gremetz - Et ils osent applaudir ! Heureusement que vous êtes là, madame la rapporteure, pour le leur rappeler !

Mme la Rapporteure - Quant au processus d'intéressement, il ne concerne pas les candidats au RMA, mais ceux qui en sortiront. Je crois avoir compris qu'il y aura des avancées sur ce point...

Vous avez aussi laissé entendre, Madame Jacquaint, que ce gouvernement et la majorité qui le soutient remettaient en cause la solidarité nationale. Pour faire partie de cette majorité et soutenir ce gouvernement, je puis vous assurer que la solidarité nationale est notre souci constant.

M. Alain Gest - Absolument !

Mme la Rapporteure - Le RMA est une chance supplémentaire que nous donnons aux allocataires du RMI, même si nous savons que le retour au travail sera très lent pour certains d'entre eux.

Quant au montant du RMA, il faut rappeler qu'il correspond à un emploi à mi-temps. Il faut donc comparer ce qui est comparable (Exclamations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et du groupe socialiste).

Mme Muguette Jacquaint - C'est la précarité que nous dénonçons !

Mme la Rapporteure - En ce qui concerne la compensation du transfert, je note avec satisfaction que le ministre a donné des réponses claires et fortes. Vous avez par ailleurs salué la qualité des travaux de la commission.

Mme Muguette Jacquaint et M. Maxime Gremetz - Tout à fait !

Mme la Rapporteure - Je ne peux m'empêcher de penser que d'une certaine façon, ses travaux ont pu aider le ministre à obtenir un arbitrage qu'il attendait.

M. Jean Le Garrec - Très bien !

Mme la Rapporteure - Je ne doute pas que le débat public permettra de lever d'autres incertitudes encore. Je suis donc défavorable au renvoi en commission (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

Mme Nadine Morano - Vous nous accusez, Madame Jacquaint, de vouloir « casser le thermomètre de la pauvreté ». Notre devoir est de nous occuper des plus fragiles, des accidentés de la vie.

M. Maxime Gremetz - En diminuant l'ISF ?

Mme Nadine Morano - Vous faites un amalgame ! Nous ne remettons pas du tout en cause le RMI.

M. Maxime Gremetz - Vous donnez de l'argent aux riches ! C'est ça, la solidarité ?

Mme Nadine Morano - Le revenu minimum assure une certaine dignité. Mais la dignité, c'est aussi de rendre à ces personnes un emploi.

M. Maxime Gremetz - Vous les mettez dehors ! Les plans de licenciement se succèdent ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

M. le Président - Monsieur Gremetz, laissez parler madame Morano.

Mme Nadine Morano - Les titulaires du RMI ne sont pas une population homogène. Certains sont allocataires depuis plus de dix ans ; on ne peut les laisser sur le bord de la route.

Créer le RMA, c'est leur offrir un contrat de retour dans l'entreprise.

Mme Muguette Jacquaint - Ce n'est pas un contrat !

Mme Nadine Morano - Ce contrat est assorti, qui plus est, d'une aide personnalisée.

Vous avez vous-même reconnu que le dispositif d'insertion ne fonctionnait pas. En effet, les compétences étaient diluées entre l'Etat et les départements.

Mme Muguette Jacquaint et M. Maxime Gremetz - Ce n'est pas pour ça qu'il ne fonctionnait pas !

Mme Nadine Morano - Il a donc été nécessaire de rechercher plus de cohérence, et le ministre vient de nous donner des précisions de nature à rassurer chacun d'entre nous.

M. Maxime Gremetz - Mais contraires à ce que vous défendiez !

Mme Nadine Morano - Comme la rapporteure, je préfère parler de « bénéficiaires du RMI », car ce n'est pas en les stigmatisant que nous les aiderons. En revenant aux affaires, nous avons pris le problème à bras-le-corps (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste).

Mme Muguette Jacquaint - Il fallait commencer par les écouter, pour les respecter !

Mme Nadine Morano - Je ne laisserai pas non plus attaquer le président de la République. C'est pour tenir ses engagements que le ministre des affaires sociales a, très rapidement, élaboré cette passerelle vers l'emploi qu'est le RMA.

Soyez sincère, Madame Jacquaint : vous demandez le renvoi en commission alors que les débats y ont été d'excellente qualité et que les trois séances se sont très bien passées.

M. Maxime Gremetz - Vous avez été battue sur tous les points !

M. le Président - Monsieur Gremetz, vous allez avoir la parole. Laissez Mme Morano conclure.

Mme Nadine Morano - Notre objectif est de remettre ces personnes au travail. Quarante-trois amendements ont été adoptés, plus dix-sept au titre de l'article 88, et treize ont été cosignés par l'opposition.

M. Maxime Gremetz - Ce ne sont pas les salariés de Flodor ou de Whirlpool que vous aidez, ce sont les patrons voyous ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

Mme Nadine Morano - Le groupe UMP votera donc contre le renvoi en commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur les bancs du groupe UDF).

M. Maxime Gremetz - On ne peut qu'apprécier la transparence, surtout quand il s'agit de virages sur l'aile ! Vous avez été battue en commission, alors que vous vous étiez faite le porte-voix du Gouvernement, dont vous considériez le projet initial comme excellent et intangible ! C'est contre vous et certains de vos amis que nous avons heureusement pu faire adopter certains amendements, et vous vous félicitez aujourd'hui que la commission ait tenu compte de notre avis !

Mme Nadine Morano - La commission n'est qu'une étape de la discussion. !

Maxime Gremetz - Il s'est dit ici des choses insupportables. Vous prétendez qu'il ne faut pas stigmatiser les érémistes et les chômeurs, mais vous ne faites que ça dans vos circonscriptions ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

Plusieurs députés UMP - Ce n'est pas vrai !

M. Maxime Gremetz - Bien sûr que si ! Et lorsque vous dites dans les Echos que les Français réclament plus de rigueur vis-à-vis des chômeurs, vous ne laissez pas entendre qu'ils ne le sont que parce qu'ils le veulent bien ? Les licenciements se multiplient, les patrons voyous font ce qu'ils veulent et vous ne bougez pas ! Vous savez ce qui se passe chez Flodor, Whirlpool ou Metaleurop, et vous prétendez lutter contre la pauvreté et pour la dignité au travail ?

Mme Nadine Morano - Arrêtez donc de stigmatiser les entreprises, ce sont elles qui créent les emplois !

M. Maxime Gremetz - Nous nous battons, nous, pour que chacun ait droit, ainsi que le prévoit la Constitution, à un travail et à un statut digne (Interruptions sur les bancs du groupe UMP). Ne vous fatiguez pas, vous ne m'arrêterez pas !

Les gens ne veulent pas de votre assistanat. Vous proposez 100 000 RMA ! Pensez-vous vraiment, Monsieur le ministre, à ces millions de jeunes qui sont à la recherche d'un emploi ? N'avez-vous que ça à leur proposer comme avenir ?

Mme Nadine Morano - Nous avons créé 100 000 contrats jeunes ! Et vous ?

M. Maxime Gremetz - Pensez-vous à ces millions de chômeurs et de travailleurs précaires ? Cela vous fait toujours rire que je me réfère à des fiches, mais je préfère les chiffres de l'INSEE et du ministère du travail aux grands discours généraux ! Tous ces gens sont utilisés, embauchés illégalement par des contrats de trois ou de six mois sur des emplois permanents, et renvoyés au RMI ensuite !

Mme Marie-Hélène des Esgaulx - Qu'avez-vous fait en sept ans ?

M. Maxime Gremetz - C'est un peu facile ! Je n'étais pas au pouvoir, moi ! (Interruptions sur les bancs du groupe UMP) Laissez-moi parler !

Le Medef... (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP). Excusez-moi de citer le baron Seillière ! Il se félicite des réformes du Gouvernement : celle des retraites et celle de l'assurance maladie sont merveilleuses ! Et pour lui, le RMA est encore mieux, sans même parler de la réforme du dialogue social ! M. Fillon a été obligé d'obtempérer et de permettre la remise en cause de tout le socle de la législation sociale par des accords certes majoritaires, mais réalisés dans des conditions inacceptables.

Est-ce cela que vous appelez solidarité, dignité et droit du travail ? Nous ne laisserons pas passer les choses en l'état. C'est pourquoi nous voterons cette motion de renvoi en commission. Madame la rapporteure, je sais que vous êtes obligée de composer - sans vous décomposer le moins du monde (Sourires) - mais restez au moins fidèle à vos idées ! Je sais que ce n'est pas facile, entre ceux qui ne comprennent rien et ceux de vos amis qui vous traitent d'irresponsable... Mais nous serons avec vous pour défendre les amendements qui limitent les effets désastreux de cette loi.

Plusieurs députés UMP - Maxime, il est l'heure !

M. Maxime Gremetz - Ce n'est pas vous qui présidez ! Ne faites pas comme Estrosi, qui veut être le roitelet de son département et attribuer les RMI et les RMA comme il l'entend ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

M. le Président - Monsieur Gremetz, achevez votre démonstration...

M. Maxime Gremetz - Monsieur le président, ils veulent prendre votre place !

M. le Président - Ne vous inquiétez pas pour moi... (Sourires)

M. Maxime Gremetz - Avec un président aussi peu impressionné par vous que ne l'est la rapporteure, nous allons avoir un formidable débat ! Et je suis même sûr que, samedi matin, nous finirons par voter un bon texte (Exclamations surs divers bancs).

M. Gaëtan Gorce - Vos précisions, Monsieur le ministre, sur le financement et les conditions de la décentralisation étaient utiles. Cela signifie que les questions de l'opposition, et notamment de M. Bonrepaux, étaient justifiées, et qu'elles ne méritaient pas la réaction que vous avez eue hier. Nous ne voulons que faire avancer le débat.

Votre réponse à Mme Jacquaint a une nouvelle fois fait apparaître le décalage entre votre discours et vos actes. Vos intentions sont toujours très spectaculaires : la lutte contre le chômage serait une priorité... mais vous utilisez une toute petite échelle pour gravir un gratte-ciel ! Le problème est pour ceux qui ont besoin de cette échelle... La question n'est pas de savoir s'il faut renouveler les outils de l'insertion, mais si ceux que vous proposez sont adaptés et si, au-delà des discours, les moyens nécessaires sont disponibles.

Or, comment imagine-t-on aider des personnes éloignées du monde du travail depuis un ou deux ans par un contrat à temps partiel, juridiquement discutable, au financement incertain et hybride ? Pour passer d'une association à une collectivité locale, on peut s'appuyer sur des dispositifs adaptés et de même pour retourner durablement dans le monde de l'entreprise, quitte à adapter ces dispositifs. Le CIE, par exemple, présente les caractéristiques d'un contrat de travail, avec l'avantage de la stabilité, mais il n'est pas adapté à un public très en difficulté. Il faudrait donc le modifier par étapes, mais l'outil existe, sans parler des associations ou des entreprises de travail temporaire pour l'insertion ou d'insertion par l'économie... Vouloir présenter le RMA comme une solution pour ceux qui sont au chômage depuis longtemps est un leurre.

La véritable question...

Mme Nadine Morano - C'est : qu'avez-vous fait ?

M. Gaëtan Gorce - C'est d'éviter cette coupure avec les exclus, et pour cela il fallait associer les partenaires sociaux à la réflexion. La mise en place de ces contrats aurait dû être discutée soit dans les branches, soit au niveau interprofessionnel avec le Gouvernement. Impliquer les syndicats de salariés et de patrons aurait permis de réintroduire ceux qui sont sur le bord de la route dans la société du travail.

L'efficacité de votre dispositif est discutable, ses conséquences sont difficiles à mesurer et les associations se sont toutes plaintes du manque de concertation. Nous voterons donc la motion de renvoi en commission, car le texte est mal ficelé et il ne sert qu'à alimenter un discours idéologique. Vous cherchez à vous défausser de votre échec en matière d'emploi en recourant à la notion de valeur du travail. Faites plus pour l'emploi, et vous ferez plus pour la valeur du travail ! (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste)

M. Rodolphe Thomas - Tout a été dit. Nous connaissons le point de vue de l'opposition. Il faut maintenant aller de l'avant et passer aux articles. Le groupe UDF ne votera donc pas la motion de renvoi en commission (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et du groupe UMP).

La motion de renvoi en commission, mise aux voix, n'est pas adoptée.

La séance, suspendue à 12 heures 30, est reprise à 12 heures 40.

M. le Président - J'appelle les articles du projet de loi dans le texte du Sénat.

AVANT L'ARTICLE PREMIER

Mme Hélène Mignon - Une réflexion est à mener sur l'ensemble des dispositifs d'insertion - CES, contrat emploi consolidé, TRACE ou RMI.

En effet, l'insertion ne se limite pas à l'accès à l'emploi. Il s'agit d'une démarche globale, qui doit prendre en compte toutes les dimensions de la vie quotidienne. Il faut également se pencher sur les démarches que doivent effectuer les personnes concernées.

C'est ainsi que nous pouvons espérer faire progresser l'idée d'un « contrat unique d'insertion ». Tel est le sens de l'amendement 208.

Mme la Rapporteure - La commission n'a pas examiné cet amendement. Mme Mignon le sait, beaucoup de rapports sont prévus. La loi elle-même prévoit d'examiner les conditions de financement de ces dispositifs. Quant à l'idée d'un contrat unique d'insertion, il me semble que M. le ministre envisage son examen ultérieur. Avis défavorable, donc, à titre personnel.

M. le Ministre - Même avis.

M. Jean Le Garrec - La bonne foi de Mme Boutin est entière lorsqu'elle refuse de stigmatiser les érémistes. Mais il faut prendre garde à des dérapages verbaux souvent dangereux, par exemple lorsque l'on parle de « réhabiliter le travail ». C'est ainsi, en effet - et ce n'est pas nouveau - que ceux qui ont la tête juste au-dessus de l'eau sont incités à désigner comme coupables ceux qui l'ont juste au-dessous...

Reste que vous avez tort, Madame la rapporteure, de ne pas être favorable à un nécessaire travail d'évaluation, qui d'ailleurs pourrait être fait par la commission.

Mme la Rapporteure - Pourquoi pas ?

M. Jean Le Garrec - En revanche, vous avez eu raison de lier insertion sociale et insertion professionnelle. C'est la clé de la démarche, et c'est bien ce qui nous fait douter de l'efficacité du RMA.

Mme la Rapporteure - Nous avons tous la même préoccupation. Il ne me semble pas nécessaire d'inscrire ces évaluations dans la loi, mais la commission pourrait en effet se saisir d'une telle réflexion. Je pense que son président y serait favorable.

L'amendement 208, mis aux voix, n'est pas adopté.

ARTICLE PREMIER

Mme Muguette Jacquaint - Si l'on s'en tient à sa lettre, l'article premier vise à inscrire dans la loi le principe d'une revalorisation du RMI une fois par an au lieu de deux.

Afin de garantir le pouvoir d'achat des plus démunis, la loi de 1988 avait prévu, par dérogation aux règles applicables aux prestations et minima sociaux, une revalorisation bisannuelle du RMI, mais cette règle n'a jamais été appliquée, et le RMI est revalorisé une fois l'an. Sous couvert de « sécurité juridique », on nous propose aujourd'hui d'aligner la loi sur la pratique.

La révision annuelle serait opérée par décret en fonction de l'évolution des prix. Mais la formulation retenue est moins précise que celle qui concerne les prestations sociales : elle autorise à ne prendre en compte qu'une partie de l'évolution de l'indice des prix. Nous proposons pour notre part une indexation du RMI sur l'évolution du SMIC, qui est supérieure sur l'année, à celle des prix.

Permettez-moi de revenir sur notre conception du RMI. Il n'est pas question de stigmatiser les allocataires du RMI ou de l'assurance chômage. On entend aujourd'hui dire qu'ils seraient des assistés, qu'ils seraient avantagés, alors que c'est tout le contraire ! Si nous en sommes arrivés là, c'est parce que notre politique de relèvement des bas salaires est insuffisante et que la solidarité nationale est toujours financée par les mêmes, c'est-à-dire les classes moyennes, cependant qu'on diminue l'ISF et l'impôt sur le revenu des plus riches.

Votre nouveau dispositif s'inscrit pleinement dans la logique qui veut que l'adversaire de l'emploi soit le coût du travail, que vous n'avez donc de cesse de réduire : nouvelle convention de l'UNEDIC, PARE, réforme de l'ASS. Les chômeurs se trouvent ainsi poussés vers des emplois sous-payés.

M. le Président - Veuillez conclure.

Mme Muguette Jacquaint - Pour ceux qui resteront allocataires du RMI, il faut impérativement opérer cette revalorisation, car aujourd'hui, le RMI permet tout juste de survivre.

Mme Martine Billard - Je regrette que ce projet de loi n'opère pas la réforme en profondeur du RMI souhaitée par l'ensemble des acteurs qui _uvrent dans le champ de l'insertion. Je m'étonne d'ailleurs de l'absence de Mme la secrétaire d'Etat à la lutte contre l'exclusion, dont le regard eût été précieux. Le préambule de la Constitution de 1946 dispose que « tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental ou de la situation économique, se trouve dans l'incapacité de travailler, a le droit d'obtenir de la collectivité des moyens convenables d'existence ». Nul ne parlait à l'époque d'« assistanat » !

Votre projet ne règle pas le problème des jeunes de moins de vingt-cinq ans qui se retrouvent à la rue. Or pour pouvoir bénéficier des dispositifs spécifiques aux dix-huit à vingt-cinq ans, nombre d'entre eux ont besoin d'un accompagnement social préalable. Je regrette que cette question ne soit pas posée, car les associations devront continuer à la gérer avec des bouts de ficelle.

Le mode de calcul du RMI est si complexe, en outre, qu'il peut faire obstacle au retour au travail. En effet les allocataires peuvent rarement savoir à l'avance quels revenus ils vont conserver ou perdre. Il eût été judicieux de profiter de ce texte pour revoir le système de calcul du RMI et favoriser ainsi la démarche de retour à l'emploi. On a toujours peur de ce qu'on ne connaît pas, a fortiori lorsqu'on est dans une situation précaire.

J'en viens à la modification proposée par l'article premier. Mme la rapporteure a fort bien expliqué que, s'il ne l'avait jamais été jusqu'à présent, le rattrapage de l'inflation pourrait s'avérer nécessaire un jour. Or, nous n'allons pas réformer le RMI tous les trois ans. Mieux vaudrait donc maintenir le dispositif existant qu'écarter définitivement cette possibilité : pour un érémiste, une différence de quelques dizaines d'euros n'est pas anodine.

M. Augustin Bonrepaux - Les réponses du ministre montrent que nous avions raison. On a voulu nous démontrer en commission que la compensation était entière. Depuis, le Gouvernement a reçu de nombreuses lettres de présidents de conseils généraux qui s'inquiètent et il est certain qu'il y a un problème d'évaluation du coût pour 2004. Le Gouvernement a consenti une avancée, mais les autres problèmes restent entiers.

Le texte précise que « la compensation sera ajustée de manière définitive, au vu des comptes administratifs des départements pour 2004, dans la loi de finances suivant l'établissement desdits comptes. » Les augmentations ultérieures seront donc à la charge des départements ! Compensera-t-on aussi les surcoûts de 2004 et de 2005 ? La correction n'interviendra en effet au mieux que dans la loi de finances rectificative pour 2005 ou dans la loi de finances pour 2006.

Je me réjouis que la prime de Noël reste nationale et soit inscrite au budget. C'est heureux, car autrement son montant aurait dépendu de la richesse des départements. Les deux rapporteures s'en étaient d'ailleurs inquiétées.

Plusieurs problèmes demeurent cependant. Tout d'abord, le personnel transféré sera-t-il seulement celui de la DDASS, ou visera-t-on également les agents de l'ANPE qui travaillent pour le RMI ? Dans l'Ariège, ils représentent la moitié : 3,8 équivalents temps plein pour la DDASS, 3 pour l'ANPE.

Il y a ensuite la question de la compensation du RMA. Mme Boutin a bien montré dans son rapport qu'il coûterait plus cher que le RMI. Si vous voulez que les départements vous suivent dans votre réforme, il faut leur assurer une compensation équitable.

Force est de constater l'insuffisance de la compensation par la TIPP. Je vous renvoie, Monsieur le ministre, au rapport de Mme Montchamp, qui montre que la TIPP reste stable. Vous ne pouvez pas, Monsieur le ministre, comparer son évolution à celle de la DGF, qui a progressé chaque année de plus de 1,5 %.

M. le Ministre - Je vais vous montrer les comptes de ma commune !

M. Augustin Bonrepaux - Le Gouvernement aurait-il l'intention, contrairement à ses déclarations écologiques, de ne pas limiter la consommation de carburants ? Ou bien s'apprêterait-il - mais alors il faudrait nous le dire - à augmenter chaque année la taxe sur les carburants ?

Enfin, il y a le problème de la péréquation entre départements. La proportion de érémistes variant, selon les départements, entre 1,5 et 7 %, le surcoût du RMA ne sera pas le même pour tous. Que ferez-vous pour remédier à cette inégalité ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

Mme Martine Billard - J'ai déjà défendu l'amendement 97 de suppression de cet article.

Mme la Rapporteure - Les articles concernant le RMI ne remettent nullement en cause les conditions d'attribution ; ils ne font que décentraliser sa gestion.

Dans la pratique, le RMI a été revalorisé une fois par an et non pas deux ; cela ne l'a pas empêché de gagner environ 6 % de pouvoir d'achat depuis l'origine. En conséquence, rejet.

M. le Ministre - Même avis.

L'amendement 97, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Martine Billard - Madame la rapporteure, si nous pouvons améliorer le RMI, faisons-le... Par mon amendement 98, je propose de préciser que c'est un droit individuel - et non familial. Le fait, par exemple, que dans le calcul du RMI les ressources apportées par un enfant soient déduites introduit une relation de dépendance malsaine au sein de la famille.

Mme la Rapporteure - Il est vrai qu'il faudra un jour réfléchir à une individualisation du RMI, mais ce n'est pas possible aujourd'hui car les conséquences financières seraient très importantes. Cela ne peut se faire que dans le cadre d'une réforme d'ensemble du RMI, qui n'est pas l'objectif de ce texte.

M. le Ministre - Une nouvelle fois, même avis.

L'amendement 98, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Martine Carrillon-Couvreur - Les personnes en situation précaire ont particulièrement besoin de ne pas être pénalisées par l'évolution des prix. C'est pourquoi nous demandons par notre amendement 134 que le RMI soit révisé deux fois par an.

Mme la Rapporteure - Défavorable, pour les raisons indiquées précédemment.

L'amendement 134, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article premier, mis aux voix, est adopté.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

COMMISSION MIXTE PARITAIRE

M. le Président - J'ai reçu de M. le Premier ministre une lettre m'informant qu'il a décidé de provoquer la réunion d'une commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004.

Prochaine séance cet après-midi, à 15 heures.

La séance est levée à 13 heures 15.

            Le Directeur du service
            des comptes rendus analytiques,

            François GEORGE


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