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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2003-2004 - 36ème jour de séance, 91ème séance

2ème SÉANCE DU VENDREDI 5 DÉCEMBRE 2003

PRÉSIDENCE de M. Rudy SALLES

vice-président

Sommaire

OBLIGATIONS DE SERVICE PUBLIC
DES TÉLÉCOMMUNICATIONS ET
FRANCE TÉLÉCOM (
suite) 2

ARTICLE PREMIER (suite) 2

APRÈS L'ARTICLE PREMIER 11

ART. 2 11

ART. 2 BIS 12

ART. 3 13

ART. 3 BIS 14

ART. 4 14

ART. 5 17

ART. 6 17

ART. 7 17

ART. 8 17

ART. 9 18

ART. 10 18

APRÈS L'ART. 10 18

ARTICLE PREMIER (amendements précédemment réservés) 21

ORDRE DU JOUR DU
MARDI 9 DÉCEMBRE 2003 22

La séance est ouverte à quinze heures.

OBLIGATIONS DE SERVICE PUBLIC DES TÉLÉCOMMUNICATIONS ET FRANCE TÉLÉCOM (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, relatif aux obligations de service public des télécommunications et à France Télécom.

ARTICLE PREMIER (suite)

M. Jean Dionis du Séjour - L'amendement 79 rectifié que Jean-Paul Charié et moi-même vous présentons a fait l'objet de longs débats en commission. Il s'agit de séparer complètement l'activité « infrastructure de réseau » et l'activité « offre de services » au sein de France Télécom, sur le modèle de ce qui existe tant pour les voies ferrées, avec la SNCF et RFF, que pour l'électricité, avec EDF et RTE.

J'ai entendu M. le ministre expliquer que ce qui valait pour l'électricité ne vaut pas pour la téléphonie, au motif que, dans le premier cas, il y a monopole, et pas dans le second. Mais qu'en est-il vraiment ? France Télécom a la propriété de 99 % des accès physiques au réseau de télécommunications, elle détient 90 % du marché de détail et 60 % du marché de gros. La situation de monopole est donc réelle.

Il reste à savoir si l'objectif visé peut être atteint ; il peut l'être, car tous les organigrammes de France Télécom montrent qu'une distinction est déjà faite entre les « unités réseaux », qui comptent quelque 23 000 agents, et les unités de gestion des services.

Sur un plan plus général, nous nous devons de légiférer de manière équilibrée, car nous ne sommes pas réunis pour traiter du seul cas de France Télécom mais bien de l'ensemble d'un secteur stratégique. En mobilisant 9 milliards pour participer à l'augmentation de capital de France Télécom, l'Etat actionnaire a fait son devoir. Il lui faut maintenant jouer son rôle régulateur. Différents gestes ont été faits en faveur de France Télécom, qu'il s'agisse de l'assouplissement de la liberté tarifaire ou de la prudence avec laquelle est abordée la revente des abonnements en gros. Ces gestes doivent trouver une contrepartie, sous la forme d'une transparence incontestable des coûts de l'activité « réseaux ». Tel est le sens de l'amendement...

M. Jean-Paul Charié - Très bien !

M. Jean Dionis du Séjour - ...qui doit d'ailleurs être apprécié en relation avec l'amendement 126, lequel tend à donner une plus grande liberté tarifaire à l'opérateur historique. Je demande donc à mes collègues de gauche de se déprendre de leur amour exclusif pour France Télécom, et à nos collègues de la majorité d'accepter d'avancer vers la séparation comptable et managériale des deux entités : il le faut.

M. Alfred Trassy-Paillogues, rapporteur de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire - Notre collègue Jean Dionis du Séjour fait une analogie qui n'est pas entièrement pertinente, car, tant pour l'électricité que pour le rail, il n'y a qu'un outil de transport, ce qui n'est pas le cas pour la téléphonie. De plus, deux textes existent déjà qui obligent France Télécom à une séparation comptable par activité : le code des postes et télécommunications et l'arrêté du 12 mars 1998 annexé à l'autorisation de licence donnée à France Télécom.

Le code des postes et télécommunications impose à l'entreprise l'obligation de tenir une comptabilité séparée par activité pour identifier les coûts. L'arrêté précise les conditions d'une concurrence loyale, et contraint France Télécom a fournir à l'ART les documents prouvant que la loyauté de la concurrence est respectée.

Quant à la comptabilité, l'opérateur produit à partir de la même comptabilité les comptes de produits et charges, appelés comptes individualisés : réseau général, réseaux d'accès commutés, interconnexions, services téléphoniques au public, liaisons louées et autres activités couvertes par la présente autorisation.

L'opérateur valorise chacun des éléments du réseau général qu'il utilise au même coût unitaire que celui auquel il établit ses services d'interconnexion destinés aux opérateurs.

Pour ce qui est de la transparence dans les comptes, et dans les relations avec les autres entités du groupe de l'opérateur et ses partenaires, les comptes individualisés sont audités périodiquement par un organisme indépendant désigné par l'ART. Cet audit vérifie notamment la cohérence des comptes individualisés avec la comptabilité générale et la comptabilité analytique de l'opération. Les auditeurs doivent être indépendants des commissaires aux comptes de l'opérateur.

Ainsi deux textes très précis obligent déjà France Télécom à ce que souhaite M. Dionis du Séjour, c'est-à-dire une séparation comptable. Est-ce fait ou non, je ne peux le dire, mais les textes existent. En outre, l'article 11 de la directive accès, qui va être transposée par ordonnances dans le paquet Télécom, prévoit les obligations relatives à la séparation comptable, recoupant à peu près les deux textes précédents. Après cette transposition, nous aurons trois textes précis. Faut-il continuer à empiler ? La commission a rejeté l'amendement.

M. Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie - Non, il ne faut pas continuer à empiler ! M. le rapporteur a répondu pour l'essentiel. Mais en outre je lis dans votre amendement : « Le directeur du gestionnaire est seul responsable de sa gestion. Il négocie librement les contrats », etc. Ici je tiens à dire qu'une entreprise - même si elle est utilisée par des concurrents pour faire circuler des informations, des trains ou de l'électricité - a besoin d'avoir l'intégrité de ses fonctions, de la fonction recherche à la fonction commerciale en passant par la fonction transport, et même si cette dernière est filialisée en interne : c'est de sa responsabilité. Je le dis en tant que ministre de l'industrie : je ne peux accepter intellectuellement l'idée qu'une entreprise comme France Télécom puisse être démantelée, avec en son propre sein - même si elle détient 100 % de cette activité - un sous-ensemble indépendant, dont le conseil d'administration serait nommé par l'ART. L'adoption de votre amendement sera contre-productive sous l'angle industriel. D'autre part, l'essentiel de ce que vous proposez existe déjà.

M. Jean-Paul Charié - Cet amendement et les suivants représentent un enjeu très important, pour la vie quotidienne des Français comme pour le développement de nos entreprises, qui n'est plus possible sans l'ADSL et le téléphone. C'est aussi un sujet complexe, parce que très technique, très réglementé, très coûteux, et porteur d'enjeux économiques cruciaux pour les opérateurs.

De ce côte de l'hémicycle, Monsieur le ministre, nous avons voulu ouvrir le téléphone à la concurrence. Cette ouverture signifie d'abord baisse des prix.

M. Daniel Paul - Ce n'est pas évident.

M. Jean-Paul Charié - Or on empêche souvent France Télécom de baisser ses prix. L'ouverture, c'est permettre à de nouveaux concurrents d'entrer sur le marché : or ceux-ci, malgré la bonne volonté de France Télécom, que je salue, ont du mal à obtenir les découplages. L'ouverture, c'est aussi un meilleur aménagement du territoire : or de nombreuses collectivités ont du mal à satisfaire les demandes de connexion. L'ouverture enfin doit permettre aux entreprises de dégager des marges : or on ponctionne les entreprises, France Télécom comme les autres, qui doivent s'endetter.

C'est pourquoi, Monsieur le ministre, nous essayons tous - que ce soit le président Ollier, M. Trassy-Paillogues, M. Dionis du Séjour ou tous ceux qui sont ici, y compris les membres de l'opposition - de trouver un équilibre entre l'intérêt de France Télécom et celui des opérateurs alternatifs. On ne peut pas examiner cet amendement sans prendre en compte les suivants. Par exemple, nous sommes favorables, avec M. Ollier, à ce qu'on permette à France Télécom de baisser ses prix, dans l'intérêt des usagers. Mais en échange, il faut l'encourager à ouvrir beaucoup plus ses lignes aux autres entreprises. Voilà l'enjeu de nos amendements.

M. Alain Gouriou - Au risque de paraître une fois de plus en accord avec vous, Monsieur le rapporteur - ce qui n'est pas une tare -, j'aurais tendance à partager votre position. Vous avez rappelé la spécificité du réseau France Télécom, tout différent des réseaux ferré ou électrique. La démarche de M. Dionis du Séjour comporte des risques. Si l'on s'en tient à une comptabilité séparée - dont je ne suis d'ailleurs pas certain qu'elle n'existe pas -, il n'y a pas grand mal. Mais derrière cette idée, je vois s'en profiler une autre : celle de dissocier peu à peu le réseau et les opérateurs, ce qui n'est pas sans risques. Tout d'abord, un opérateur peut aussi travailler sur notre territoire sans utiliser les réseaux de France Télécom : il y a le satellite, le câble, voire les boucles radios. D'autre part, on risque de voir progressivement ce réseau démantelé, voire proposé à des collectivités territoriales, par morceaux. La cohérence du réseau national serait alors en péril, et l'on verrait apparaître de grandes inégalités dans l'état des réseaux. Ce n'est le but d'aucun d'entre nous. Nous sommes donc opposés à l'adoption de cet amendement.

M. François Brottes - Cet amendement sur le RTT, ou réseau de transport des télécommunications (Sourires), soulève une vraie question. Le contexte évolue en effet, avec la privatisation de France Télécom et avec la directive qui engage éventuellement à morceler le réseau. M. Martin-Lalande l'a d'ailleurs proposé ce matin ; à ce jour, le Gouvernement y est opposé, mais cela peut arriver demain. Ce contexte peut donc conduire certains collègues à poser la question de l'avenir du réseau. Cette question n'est pas essentiellement technique ou commerciale, mais politique, d'où la nécessité d'en débattre ici.

Un risque existe donc que soit mise en cause l'existence d'un réseau qui présente une unité comme infrastructure nationale. Il importe que l'Etat s'engage, quoi qu'il arrive, à garantir cette unité.

Mais il y a une autre menace, et le Sénat avait adopté un amendement scélérat sur la revente des abonnements. C'est le risque de nier le coût d'entretien et de maintenance de ce réseau. Nous devons donc réfléchir à la garantie de l'unité de ce réseau et de son évolution technique, même si la question ne se pose pas aujourd'hui : compte tenu de ce qui germe, nous devons y penser.

M. Daniel Paul - Ce qui ajoute à la complexité du problème, c'est l'existence de réseaux appartenant à des entreprises publiques autres que France Télécom. Nous sommes contre les gâchis. La diversité des propriétés et des affectations de ces réseaux, l'éventualité que France Télécom soit mise en concurrence avec un opérateur privé qui passerait un accord avec une autre entreprise publique propriétaire d'un réseau, pourraient créer des situations assez complexes. Je partage ce que viennent de dire mes deux collègues socialistes. Mais en outre nous sommes favorables à ce que les réseaux de télécommunications soient placés, dans une cohérence nationale, sous la responsabilité de France Télécom, tout en préservant les capacités des structures publiques qui ont créé leur propre réseau. Raison de plus pour ne pas se débarrasser de celui de France Télécom !

M. Jean Dionis du Séjour - Nous parlons ici de la seule téléphonie fixe. Or sur ce secteur, France Télécom est - quoi qu'on en dise - en position de monopole, avec 90 % du volume du trafic et la propriété de 99 % des lignes. Il y a monopole de France Télécom, au moins sur le dernier kilomètre. Les textes existent, me dit le rapporteur. Sans doute. Mais ils ne garantissent pas à l'heure actuelle la transparence concurrentielle, puisque les opérateurs réclament tous cette séparation managériale et comptable.

J'en appelle à chacun de mes collègues. La commission a souhaité que des gestes forts soient faits en faveur de France Télécom, qu'il s'agisse de l'ouverture tarifaire ou de la revente de l'abonnement à France Télécom. Mais n'allons pas trop loin ! Il faut assurer en contrepartie une vraie transparence sur les prix de revient et l'information économique.

Le modèle que nous proposons, c'est le modèle RTE, celui du réseau national. Il est vrai que nous avons pu plaider pour des réseaux régionaux, mais notre position a évolué.

Il n'est pas question de séparation juridique. Nous proposons une séparation comptable et managériale, destinée à garantir l'accès à l'information économique. Le réseau restera la propriété et la filiale de France Télécom. Je reconnais que tout cela touche plus à l'organisation de la concurrence qu'au statut interne de France Télécom. Si l'Assemblée estime que ce débat relève plutôt de la loi sur l'économie numérique, soit.

M. Jean-Paul Charié - Compte tenu de la qualité du débat et des réponses du rapporteur et du ministre, je pense que nous pouvons retirer notre amendement. Mais il faut faire appliquer les textes en vigueur.

M. Jean Dionis du Séjour - Le président de la commission et le rapporteur acceptent-ils au moins que le problème soit reposé lors de l'examen de la loi sur l'économie numérique ?

M. le Rapporteur - J'ai bien reçu le message. Nous devons vérifier que le principe de la séparation comptable, déjà posé dans deux textes - et bientôt dans un troisième - est bien respecté. S'il ne l'est pas, il sera toujours temps d'agir. Mais ne votons pas un quatrième texte !

M. Jean Dionis du Séjour - Nous allons nous pencher sur l'état du droit et sur son application par France Télécom. Nous verrons alors si nous devons redéposer cet amendement au projet de loi sur l'économie numérique. En attendant, je le retire.

L'amendement 79 rectifié est retiré.

M. le Ministre - Je demande la réserve des amendements 126 et 132, ainsi que du sous-amendement 134, jusqu'après l'article 10.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire - La réserve est de droit. Au demeurant, elle est logique : ces amendements abordent le problème de l'assouplissement de la tarification, sur lequel il convient d'avoir un débat d'ensemble.

M. le Président - A la demande du Gouvernement, les amendements 126 et 132 et le sous-amendement 134 à l'article premier ainsi que le vote sur l'article premier sont réservés jusqu'après l'amendement 130.

M. Daniel Paul - Le service public des télécommunications est financé par une péréquation financière entre les activités rentables et non rentables de France Télécom, le prix de l'abonnement et une contribution des autres opérateurs.

La réécriture de l'article L. 35-3 du code des postes et télécommunications, dans la logique des évolutions voulues pour fractionner le service universel, ne permettra plus cette péréquation.

Par ailleurs, nous refusons d'accroître les pouvoirs de l'autorité de régulation des télécommunications. Notre amendement 99 tend donc à supprimer cet article.

M. le Rapporteur - Avis défavorable.

M. le Ministre - Même avis. Je m'étonne que ceux qui prétendent défendre notre service public veuillent le priver de financement. Il n'est ni équitable, ni efficace économiquement de pénaliser les opérateurs qui remplissent une mission de service public par rapport à ceux qui ne le font pas. C'est la meilleure manière de tuer le service public.

M. Jean-Paul Charié - Très bien !

M. le Ministre - Je vous demande donc de retirer cet amendement, au nom des valeurs que nous partageons.

M. Daniel Paul - Je le maintiens.

L'amendement 99, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Paul Charié - L'amendement 133 de M. Martin-Lalande est défendu.

M. le Rapporteur - L'amendement 2 vise à mettre en cohérence le fait que les appels à candidature conduisent les candidats à formuler une demande de compensation sur la base d'une évaluation a priori du coût net et l'intervention de l'ART pour vérifier a posteriori ce coût net, sur la base d'une comptabilité appropriée.

Sur l'amendement 133, avis défavorable.

M. le Ministre - Avis favorable à l'amendement 2, et défavorable à l'amendement 133.

M. François Brottes - Qu'entend-on par coût net ? Comment est-il calculé ? J'aimerais avoir la réponse d'ici à la fin du débat.

M. le Rapporteur - Le coût net correspond au coût moins les avantages immatériels dont bénéficie l'opérateur du service universel. Je vous renvoie au décret d'avril 2003. Nous pourrons vous donner des éléments plus précis si vous le souhaitez.

L'amendement 2, mis aux voix, est adopté.

L'amendement 133 tombe.

M. Alain Gouriou - Le Gouvernement propose d'exonérer de contribution les entreprises dont le chiffre d'affaires est inférieur à un certain seuil. Pourquoi ? Ce choix réduit le nombre des contributeurs et la directive ne l'impose pas. L'amendement 54 tend donc à supprimer cette disposition.

M. le Rapporteur - Avis défavorable. L'article 13 de la directive service universel ouvre expressément cette possibilité. Cette souplesse est du reste nécessaire lorsque le coût du prélèvement excède celui de la contribution.

M. le Ministre - Même avis.

L'amendement 54, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 3 vise à supprimer le dispositif pay or play en ce qui concerne l'annuaire. Sinon tout opérateur sera tenté de démontrer qu'il contribue à l'établissement de l'annuaire et de réclamer une compensation et cela entraînera des contestations.

M. le Ministre - Le Gouvernement souhaite conforter le service public : il ne doit pas être pénalisé par des contraintes d'ordre public qui ne seraient pas financées. C'est pourquoi nous sommes attachés au principe du pay or play, c'est-à-dire « contribution ou participation ». Les services d'annuaire ne concernent pas seulement le téléphone fixe. Je préférerais donc que l'amendement soit retiré.

M. le Rapporteur - Je retire l'amendement 3.

L'amendement 4 vise à appliquer le nouveau mode de calcul définitif de la contribution au service universel aux évaluations concernant l'exercice 2003, et non pas 2002.

M. Jean-Paul Charié - Monsieur le président de la commission, je suis surpris que la discussion des amendements précédents ait été réservée jusqu'à la fin du débat. Je ne serai plus là, comme vous le savez, et je n'apprécie pas ce changement.

Mon amendement 10, qu'a repris la commission, vise à garantir le principe de non-rétroactivité. Nous sommes d'accord pour revoir la clé de répartition du financement du service universel, mais dans la mesure où ces dépenses doivent être provisionnées par les entreprises, il convient de décaler d'un an l'application du nouveau mode de calcul.

M. le Président de la commission - Monsieur Charié, je demanderai une suspension de séance pour que nous discutions entre nous des amendements réservés. Mais vous devez savoir qu'à partir du moment où le Gouvernement demande la réserve, elle est de droit. Le Gouvernement souhaite que les amendements 126 et 130 soient discutés ensemble, or l'amendement 130 n'arrive qu'à la fin du débat.

M. Jean-Paul Charié - Bonjour la bonne foi !

M. François Brottes - Le déchirement au sein du groupe UMP m'est insupportable ! (Sourires). La solution serait de demander une suspension de séance dès maintenant, mais c'est votre affaire...

Par notre amendement 55, identique aux amendements 4 et 10, nous souhaitons, nous aussi, garantir le respect du principe de non-rétroactivité. Il n'est pas correct de changer les règles en cours de route.

M. le Rapporteur - L'amendement 55 étant identique au nôtre, nous y sommes favorables.

M. le Ministre - Le but du changement du mode de calcul est de limiter la charge qui pèse sur les fournisseurs d'accès à internet. Tout le monde est d'accord sur le principe, qui a été arrêté, il y a plusieurs mois, dans le projet de loi sur l'économie numérique.

Le Sénat a estimé que la réforme devait s'appliquer dès 2004, c'est-à-dire sur la base des exercices 2002 et 2003 puisque les comptes de ceux-ci ne sont pas encore clos. Certains opérateurs ont versé des provisions trop élevées et seront remboursés ; d'autres s'inquiètent de la constitutionnalité de la mesure, la jugeant rétroactive. Mais elle est conforme à l'intérêt général et elle tient compte des efforts demandés aux différentes catégories d'opérateurs dans le cadre plus général de cette loi.

Je vous demande donc de retirer ces amendements.

M. le Rapporteur - Je retire l'amendement 4.

M. Jean-Paul Charié - Je maintiens le mien. Les charges ont été provisionnées par les entreprises sur l'année 2002. La loi sur l'économie numérique ne sera votée qu'après celle-ci, il sera trop tard pour revenir sur la mesure.

M. François Brottes - Nous maintenons également le nôtre. Le texte est anticonstitutionnel.

M. Jean Dionis du Séjour - Ne nous cachons pas derrière des arguments juridiques ! Nous parlons de gros sous : si l'application est reportée d'un an, les fournisseurs d'accès à l'internet auront à payer la bagatelle de 34,5 milliards d'euros de plus, alors qu'ils ont les épaules beaucoup moins solides que les opérateurs de téléphonie mobile. Ces derniers ont bénéficié jusqu'à présent d'un régime très favorable. Il y a un véritable arbitrage économique à opérer et je suis d'accord avec le ministre, à un bémol près : il ne faut pas attendre la discussion de la loi sur l'économie numérique pour fixer la date d'application de cette disposition, nous devons la fixer maintenant.

M. le Rapporteur - Monsieur Charié, nous avons effectivement évoqué la possibilité de reporter cette discussion à janvier. Il était donc logique de retirer votre amendement.

M. Jean-Paul Charié - Comme il n'y a pas eu de suspension de séance après l'amendement 126, je ne suis pas au courant de vos intentions.

M. le Président de la commission - Je répète que le règlement du problème de la tarification sera abordé en temps opportun. Compte tenu de l'emploi du temps de M. Charié, je demanderai une suspension de séance dès 16 heures 15, afin que nous puissions nous en entretenir et qu'il n'y ait aucune équivoque.

En ce qui concerne la date d'application du nouveau mode de calcul, nous étions tombés d'accord, en commission, pour reprendre la discussion dans le cadre du projet de loi sur l'économie numérique. Je m'y engage au nom de la commission et je demande à tous de respecter l'accord conclu.

M. Jean-Paul Charié - Les comptes rendus de la commission feront foi. Il y avait trois positions. La première : en rester à la rétroactivité sur 2002. La deuxième, qui était la mienne : s'appuyer sur l'année 2003, solution qui a été adoptée à l'unanimité sauf une voix, celle de M. Dionis du Séjour. La troisième, celle de M. Trassy-Paillogues, devant être discutée dans le cadre du projet sur l'économie numérique. Il n'a jamais été question, Monsieur le président de la commission, que mon amendement soit lui-même discuté à ce moment-là. Ce deuxième projet devant être discuté après le vote définitif de celui dont nous débattons, ou bien nous supprimons la rétroactivité aujourd'hui, ou bien elle sera définitivement maintenue.

Les amendements 10 et 55, mis aux voix, ne sont pas adoptés

M. Robert Pandraud - Rappel au Règlement ! Il est invraisemblable de travailler dans ces conditions. Nous ne sommes pas là pour faire un travail de commission. Celle-ci a débattu, une majorité s'est dégagée : nous devrions n'avoir qu'à suivre ses conclusions.

M. François Brottes - Comme vous n'êtes pas membre de la commission, Monsieur Pandraud, il me faut vous éclairer : la commission approuvait l'amendement de M. Charié, mais le Gouvernement n'était pas d'accord, le rapporteur a décidé de prendre ses jambes à son cou... Je le regrette.

M. le Rapporteur - Je ne saurais accepter cette expression ! Le rapporteur a le droit d'avoir sa propre idée et de la faire évoluer, compte tenu des informations qu'il a recueillies.

M. François Brottes - Je vous prie de m'excuser. J'aurais dû dire que vous vous étiez replié.

M. Alain Gouriou - Il est prévu au III que lorsque le coût net des obligations de service universel ne représente pas une « charge excessive » pour l'opérateur, aucun versement ne lui est dû. Nous proposons, par notre amendement 56, de supprimer cette phrase car on ne sait pas ce que recouvre cette expression... Quelle est la position du Gouvernement ? L'Etat prendra-t-il à sa charge le coût des tarifs spéciaux ? La charge sera-t-elle partagée entre l'Etat et les opérateurs ? L'Etat ne risque-t-il pas de se retourner vers les collectivités locales pour financer les impayés ?

M. le Rapporteur - L'ensemble des coûts du service universel sera couvert par le fonds du service universel. La notion de « charge excessive » est une transposition de celle de « charge injustifiée » figurant aux articles 12 et 13 de la directive « service universel ».

Il ne s'agit pas de remettre en cause le financement du service universel de façon arbitraire, mais de se laisser la possibilité d'y mettre fin si l'évolution des circonstances, des techniques ou des besoins le rend inutile. Je souligne que la prise en compte des avantages immatériels a fait passer le coût net de 415 millions à 142 millions en 2001.

En conséquence, avis défavorable.

L'amendement 56, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. François Brottes - Le projet transfère à l'ART le soin de déterminer le montant des contributions des opérateurs au service universel. Le pouvoir politique est donc dessaisi, ce que nous ne saurions accepter. C'est pourquoi nous proposons, par notre amendement 57, de revenir au système actuel.

M. le Rapporteur - Il est dans l'esprit du « paquet Télécom » de donner plus de marge de man_uvre à l'ART. Selon l'article 12 de la directive, il n'y a plus d'intervention de l'Etat ; en contrepartie, une coordination de l'action des autorités réglementaires nationales doit être réalisée à l'échelle du marché intérieur européen, sous le contrôle de la Commission européenne.

En conséquence, avis défavorable.

M. le Ministre - Egalement.

M. Jean Dionis du Séjour - Qui doit être le régulateur ? Telle est la question.

La légitimité de l'ART se fonde, en effet, comme le dit le rapporteur, sur le fait que l'espace devient européen. J'ajoute que dans une phase transitoire où l'Etat est actionnaire de l'opérateur dominant, cela peut poser problème de lui confier un rôle de régulateur. Mais il pourra être opportun, dans l'avenir, de s'interroger à nouveau sur la légitimité que pourrait avoir l'Etat pour exercer une régulation.

M. Daniel Paul - Deux conceptions s'affrontent : l'une, libérale, dont les tenants ne cachent plus leurs objectifs mais avancent néanmoins à pas comptés, les Français n'étant pas prêts à avaler des couleuvres ; l'autre, celle des défenseurs des services publics.

L'ART est un outil au service de la mise à mal des services publics. Le groupe communiste est pour le maintien de l'autorité de l'Etat. Que l'ART, chargée de mettre en place la concurrence, se retrouve grand argentier du service universel, c'est le monde à l'envers !

L'amendement 57, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Président de la commission - Comme je l'ai indiqué tout à l'heure, je demande une suspension de séance.

La séance, suspendue à 16 heures 15, est reprise à 16 heures 30.

M. Alain Gouriou - L'amendement 58 vise à rétablir l'alinéa du code des postes et télécommunications désignant France Télécom comme éditeur de l'annuaire universel.

M. Daniel Paul - L'amendement 95 a le même objet. France Télécom doit rester le fournisseur des services de renseignements.

Les amendements 58 et 95, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Rapporteur - L'amendement 5 vise à ce que les services d'urgence puissent accéder gratuitement à un dispositif d'annuaire inversé pour localiser les appels, les valider et accélérer l'intervention des services de secours ou de police.

M. le Ministre - Les opérateurs ont aujourd'hui l'obligation d'acheminer gratuitement les appels d'urgence.

La directive relative au service universel prévoit qu'ils devront mettre à la disposition des services d'urgence, lorsque c'est techniquement possible, les informations relatives à la localisation de l'appelant. Elle n'impose pas la gratuité, mais à mon sens, elle ne l'interdit pas. C'est donc un problème de gros sous qui se pose (Sourires). Qui doit payer ce que ne paieront plus les services de secours ?

Ce transfert de charges doit, selon moi, concerner l'ensemble des opérateurs de téléphonie fixe, et non pas seulement ceux qui sont chargés du service universel. Or, l'article premier ne porte que sur le service universel.

Je n'accepte pas de pénaliser les opérateurs qui acceptent des missions de service public. Je vous propose donc de traiter cette question, comme quelques autres, dans le cadre de la transposition du « paquet Télécom » qui permet d'imposer des obligations générales à tous les opérateurs.

Je suis d'accord quant à l'objectif de l'amendement. Le Gouvernement s'engage donc à prévoir un dispositif imposant la mise à disposition gratuite de l'information de localisation sur le réseau fixe. Compte tenu de cet engagement, je vous demande de retirer votre amendement.

M. le Président de la commission - Vous considérez donc que le texte de la commission est insuffisant puisqu'il n'englobe pas l'ensemble des opérateurs.

M. le Ministre - Oui.

M. le Président de la commission - Dont acte. Et si j'ai bien compris, dès lors que la gratuité n'est pas interdite, nous pouvons considérer que vous êtes d'accord pour qu'elle soit rendue effective, par ordonnance, dès que le « paquet Télécom » sera transposé avant l'été ?

M. le Ministre - Je le confirme.

M. le Président de la commission - Ce qui compte pour nous est que l'objectif soit atteint.

M. François Brottes - On ne peut ainsi renvoyer à des ordonnances toutes les dispositions qui ne sont pas abouties ! Une ordonnance, c'est un chèque en blanc donné au Gouvernement et l'exclusion de la représentation nationale.

Nous sommes tous d'accord pour affirmer que la gratuité est indispensable.

Nous sommes prêts à nous rallier à l'amendement 5 et à le voter. Rien ne vous empêche, Monsieur le ministre, de modifier par ordonnance ce qui vous paraîtra nécessaire, en fonction de la situation, dans quelques mois.

M. Daniel Paul - Par principe, je suis favorable à ce que le Parlement décide.

Je suis favorable à l'amendement 5, qui va dans le bons sens, et je souhaite que si problème il y a, la solution puisse être trouvée à l'occasion de la navette avec le Sénat.

M. Gérard Charasse - J'ai dit ce matin que j'avais déposé un amendement qui va dans le sens de celui de la commission et que j'étais prêt à le retirer s'il y avait une discussion approfondie.

Les ordonnances n'agréent pas le parlementaire que je suis. Je souhaite donc que l'on continue de discuter la proposition de la commission.

Je me rallie à la position de M. Paul : la navette parlementaire peut sans doute permettre de régler ce problème.

M. le Président - Vous avez retiré votre amendement ce matin, Monsieur Charasse.

M. Gérard Charasse - Au profit de l'amendement 5.

M. le Ministre - C'est une question de confiance entre vous et moi. Je vous répète que je suis d'accord avec votre objectif.

Je vous répète que l'article premier concerne le service universel et que je veux faire payer tout le monde.

Je vous demande donc à nouveau de bien vouloir retirer l'amendement.

M. le Rapporteur - L'engagement de M. le ministre est précis. Notre objectif étant atteint, je vous propose de retirer l'amendement 5.

L'amendement 5 est retiré.

M. Jean Dionis du Séjour - L'amendement 5 ne peut que vous aider, Monsieur le ministre.

Vous l'avez dit, c'est une affaire de « gros sous ». Or, il n'est jamais facile de faire payer tout le monde. Un amendement qui serait voté à l'unanimité après un votre unanime de la commission vous faciliterait les choses.

Je m'en remettrai à votre choix et à celui de la commission, mais je vous demande de réfléchir encore.

M. le Président - Je vous rappelle que l'amendement est retiré.

M. François Brottes - Il ne s'agit pas de confiance, Monsieur le ministre, mais de calendrier, et dans le souci de l'intérêt général, nous reprenons l'amendement de la commission.

M. Daniel Paul - J'approuve cette démarche. Il ne s'agit pas de confiance, en effet. Simplement, le Parlement doit voter la loi et nous sommes contre les ordonnances, quel que soit le Gouvernement. Si tout le monde est d'accord sur le contenu de cet amendement, pourquoi ne le voterions-nous pas ?

M. le Ministre - Parce que nous voulons tous que la gratuité de ces appels s'impose à tous les opérateurs et que la formulation retenue ne vise que France Télécom. En somme, je suis plus royaliste que le roi en vous proposant, pour atteindre l'objectif que vous visez, de passer par la loi relative au « paquet Télécom », même si son véhicule juridique est l'ordonnance.

M. le Président de la commission - Evitons les effets de séance et les comptabilités d'hémicycle. Ce qui importe à tous, c'est la finalité. Or, le ministre a pointé une lacune dans la proposition de la commission, et il a indiqué vouloir aller plus loin, ce que j'apprécie. L'outil juridique sera une ordonnance, c'est vrai, mais la mesure sera prise avant l'été et sans doute avant Pâques. Faisons confiance au Gouvernement et ne lui compliquons pas la tâche puisqu'il nous propose une méthode efficace. Je suis contre l'adoption de l'amendement dans ces conditions.

M. François Brottes - L'argument du ministre ne tient pas. L'ensemble des opérateurs participant au fonds de compensation, ils sont tous concernés par l'amendement, que j'ai repris et que je maintiens.

L'amendement 5, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Alain Gouriou - Les amendements 59 et 60 sont défendus.

Les amendements 59 et 60, repoussés par la commission et par le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Daniel Paul - L'amendement 92 vise à intégrer dans le premier rapport au Parlement une évaluation des possibilités d'implantations de bornes multimédias sur l'ensemble du territoire national, car le service universel doit garantir le droit à la communication et aux télécommunications et permettre à tous nos concitoyens de bénéficier des progrès technologiques.

M. le Rapporteur - Avis favorable, sous réserve d'une rectification consistant à insérer, après le mot « définies » les mots « à l'article 6 du cahier des charges figurant en annexe (...) ».

M. le Ministre - Le contenu du rapport me semble déjà exhaustif, mais je ne suis pas opposé à ce qu'il soit ainsi complété.

L'amendement 92 ainsi rectifié, mis aux voix, est adopté.

M. François Brottes - L'amendement 61 est défendu.

L'amendement 61, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 6 précise le texte : il ne faut pas donner à penser que le ministre se détermine par rapport à un document venu de l'extérieur alors que ce sont ses propres services qui l'ont élaboré.

L'amendement 6, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. François Brottes - Nous considérons que le politique ne doit pas se dessaisir du contrôle du service universel. La fixation du montant des contributions des opérateurs au financement du service universel ne doit pas être confiée à la seule appréciation de l'ART, qui peut être tentée de favoriser l'opérateur plutôt que l'usager. Voilà qui explique l'amendement 62, et l'amendement 63, de repli.

Les amendements 62 et 63, repoussés par la commission et par le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Président - Le vote sur l'article premier est réservé.

APRÈS L'ARTICLE PREMIER

M. Alain Gouriou - Par l'amendement 64, nous demandons que les opérateurs de télécommunications participent aux instances consultatives chargées de l'aménagement du territoire.

L'amendement 64, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

ART. 2

M. François Brottes - Par l'amendement 65, nous demandons la suppression de l'article, principal élément de notre opposition à ce texte.

Nous sommes contre la réduction de la part de l'Etat à moins de 50 % du capital de France Télécom, nous sommes contre la privatisation qui ne garantira pas l'égalité d'accès aux télécommunications et qui, quelle que soit la gymnastique juridique du Gouvernement, met en péril le statut du personnel.

M. Daniel Paul - Mon argumentation sera brève : l'article 2, en supprimant l'ensemble des obligations de France Télécom et en abrogeant le contrôle de l'Etat, fait disparaître le service public des télécommunications, le limitant aux réseaux et services ayant trait à la défense nationale. Cette vision pour le moins limitée du service public n'est pas acceptable. C'est pourquoi, par l'amendement 101, nous demandons la suppression de cet article.

Les amendements identiques 65 et 101, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Alain Gouriou - En proposant, par l'amendement 66, de supprimer le IV de l'article, nous nous opposons aux risques que le projet fait courir à la recherche en télécommunications, qui repose à 95 % sur France Télécom. Cette situation met en lumière la faiblesse insigne de l'effort de l'Etat en matière de recherche publique, comme nous l'avons dit à l'occasion des lois de finances. Quand nous comparons notre effort avec celui de nos voisins, nous pouvons vraiment nous interroger. Ainsi, en Allemagne, une partie des recettes issues de la vente des licences UMTS a été consacrée à l'effort de recherche sur les télécommunications des opérateurs comme des équipementiers. On ne peut concevoir un secteur dynamique des télécommunications sans un effort important de recherche.

M. Daniel Paul - L'amendement 102 est défendu.

Les amendements 66 et 102, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. François Brottes - C'est un jour noir, un jour de deuil pour l'aménagement du territoire. Nos lois prévoient à ce jour la présence de France Télécom et de La Poste dans les instances consultatives de l'aménagement du territoire. Sur tous les bancs, on réclame que les télécommunications soient implantées sur tout le territoire, et voilà que le projet veut enlever France Télécom de ce dispositif, lui interdire de s'impliquer dans l'aménagement du territoire. Nous proposons, par l'amendement 67, de supprimer le VI de l'article 2.

M. Daniel Paul - Notre amendement 104 est identique.

Les amendements 67 et 104, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Alain Gouriou - Au nom de la continuité du service public, il importe que l'Etat puisse s'opposer à la cession par France Télécom d'éléments d'infrastructure nécessaires au bon accomplissement de ces missions. Le cahier des charges n'y suffira pas. Ceci rejoint notre discussion sur la cohérence du réseau : il faut garantir son unité et éviter la tentation d'en vendre une partie au plus offrant. C'est pourquoi notre amendement 68 tend à supprimer le IX de l'article.

M. Daniel Paul - Notre amendement 103 a le même objet. Il s'agit de faire prévaloir la maîtrise publique qui permet à l'Etat de s'opposer à la cession des infrastructures et des réseaux ou, au contraire, de les mettre à disposition pour l'exécution des obligations de service public. Il serait très grave que cet article 2 soit voté en l'état.

Les amendements 68 et 103, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

L'article 2, mis aux voix, est adopté.

ART. 2 BIS

M. Daniel Paul - Notre amendement 105 de suppression est défendu.

M. François Brottes - Le président Ollier et M. le ministre nous ont invités à faire un travail cohérent, ordonné. Mais que vient faire un article sur les problèmes de télévision dans un projet sur France Télécom ? En effet, le V de l'article 2 bis abroge l'article 51 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication qui accordait le monopole de la diffusion à TDF en France et à l'étranger. Sur la forme, on peut s'étonner de la précipitation du Gouvernement à donner des bases légales à une privatisation de TDF, sous prétexte que France Télécom, que l'on privatise, détient encore 36 % du capital du diffuseur. On sent bien que le grand débat parlementaire sur l'audiovisuel qui devait permettre l'examen du projet relatif aux communications électroniques, n'est plus à l'ordre du jour.

La privatisation de TDF aura des conséquences sur l'ensemble du paysage audiovisuel ; mieux vaut attendre la discussion d'un projet de loi sur l'audiovisuel pour traiter de façon cohérente l'ensemble des questions ayant trait à la régulation de ce secteur. Enfin, sur le fond, il n'y a pas de raison réelle de céder le capital de TDF à des sociétés privées. Nous proposons, par l'amendement 131, la suppression de l'article 2 bis.

M. le Rapporteur - Défavorable. Le Sénat a fait un bon travail sur ce texte. Compte tenu de la modification de la structure du capital de France Télécom, il est nécessaire que TDF perde son monopole. Cela permettra une mise en concurrence favorable au secteur pour ce qui est de la qualité de l'offre et de son adaptation aux besoins.

M. le Ministre - TDF étant une filiale de France Télécom, il est nécessaire de prévoir des dispositions à son sujet. Cet article supprime son monopole pour la diffusion analogique des programmes des sociétés d'audiovisuel publiques. Cela est rendu nécessaire par la directive du 16 septembre 2002 sur la concurrence dans les marchés de réseaux et de services de communication électronique, qui prévoit l'abolition des droits exclusifs. L'article 2 bis transfère aux sociétés de l'audiovisuel public les missions de service public incombant jusqu'à présent à TDF, relativement aux impératifs de la défense nationale, de la sécurité publique, de la communication gouvernementale en cas de crise. La suppression du monopole de TDF implique, d'autre part, différentes mesures concernant les personnels, les fréquences, enfin l'application de la mesure à l'outre-mer.

Avis défavorable donc aux amendements de suppression.

Les amendements 105 et 131, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Jean Dionis du Séjour - M. Martin-Lalande, grippé, n'a pu venir défendre son amendement 11 qui est un amendement de bon sens, prévoyant la faculté de résiliation des contrats entre TDF et les sociétés nationales de radio et de télévision : c'est indispensable à l'ouverture effective de la concurrence dans le secteur de la diffusion. L'absence d'une telle disposition priverait en outre les sociétés de radio et de télévision publiques d'une économie substantielle sur le coût de leur diffusion, rendue possible par la mise en concurrence de l'opérateur historique avec des opérateurs tiers de diffusion.

L'amendement 11, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 2 bis, mis aux voix, est adopté.

ART. 3

M. Daniel Paul - Nous sommes surpris par cet article : dès lors qu'il y a accord pour que les fonctionnaires travaillant au sein de France Télécom puissent aller dans d'autres administrations, pourquoi un tel article vient-il dresser des difficultés et des obstacles ? Nous en demandons la suppression par l'amendement 106.

Cette nuit, M. le ministre a contesté ce que j'avais dit de l'évolution des effectifs de France Télécom. Or, mon propos se fondait sur un document reprenant des informations recueillies auprès d'OVICOM, l'organisme paritaire collecteur agréé de la branche des télécommunications. En juillet, une enquête a été faite auprès des principaux adhérents d'UNETEL-RST, l'organisation professionnelle de la branche. Elle montre qu'il y a une baisse des effectifs dans ce secteur, en particulier à partir de 2002. Nous sommes revenus aujourd'hui aux effectifs de 1998. Ces organismes officiels confirment une réduction significative des embauches chez tous les opérateurs, une rationalisation chez les opérateurs en consolidation, et la disparition de certains opérateurs. Au total, l'emploi dans les télécommunications, tous opérateurs confondus, est en recul.

L'amendement 106, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Alain Gouriou - Nous restons attachés au statut d'entreprise nationale de France Télécom. Aussi proposons-nous, par l'amendement 69, de supprimer le 1° et le 2° du II de l'article 3, afin de conforter le statut des fonctionnaires de France Télécom : le président de cette entreprise ne peut autoriser la subdélégation de ses pouvoirs.

L'amendement 69, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Alain Gouriou - Notre amendement 70 tend à supprimer le quatrième alinéa du 2° du II.

Cet alinéa met en place un mode de rémunération, « le salaire global de base », qui va pourtant être annulé pour erreur de droit par le Conseil d'Etat. Il n'est pas acceptable qu'un principe du droit de la fonction publique, le déroulement de carrière, soit remis en cause par ce mode de rémunération, qui consiste à rendre fongibles les différents éléments de la rémunération.

L'amendement 70, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Alain Gouriou - L'amendement 71 tend à disposer que, chaque année, le président de France Télécom organise une négociation salariale.

L'amendement 71, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 3, mis aux voix, est adopté.

ART. 3 BIS

M. Daniel Paul - Notre amendement 107 de suppression est défendu.

L'amendement 107, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Alain Gouriou - L'amendement 72 est défendu.

M. Daniel Paul - L'amendement 108 est identique.

Les amendements 72 et 108, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Ministre - L'article 3 bis adopté par le Sénat permet aux fonctionnaires de France Télécom qui le souhaiteraient d'être intégrés dans l'une des trois fonctions publiques. Dans certains cas, cette intégration pourrait se faire à un indice inférieur à celui détenu chez France Télécom, et donnerait alors lieu au versement par France Télécom d'une indemnité compensatrice forfaitaire. Il est nécessaire de compléter le texte du Sénat pour garantir un niveau de prestation de retraite basé sur l'indice détenu à France Télécom. Tel est l'objet de l'amendement 117 du Gouvernement. Des dispositions analogues existent déjà au sein de la fonction publique.

L'amendement 117, accepté par la commission, mis aux voix, est adopté.

L'article 3 bis ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 4

M. Daniel Paul - L'amendement 109 de suppression est défendu.

L'amendement 109, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - Les amendements 127 et 128 que je propose sont rédactionnels.

Les amendements 127 et 128, acceptés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés.

M. Jean Dionis du Séjour - Quand on a appliqué la loi de 1990, environ 5 000 fonctionnaires de France Télécom ont fait le choix de conserver leur statut d'origine plutôt que de passer sous le nouveau statut « maison ». Depuis cette date, leur carrière est bloquée. L'Etat s'honorerait à régler définitivement ce problème. J'ai là tout un paquet de lettres - des engagements non tenus - qui ne sont à l'honneur ni de la gauche, ni de la droite.

Ce problème, qui n'a au demeurant rien d'insurmontable, engage tant l'opérateur que l'Etat. Le président de la commission vient de nous faire part des engagements pris par le président de France Télécom. Ils sont importants et j'ai beaucoup de respect pour Thierry Breton. Mais la responsabilité est partagée. A l'Etat de renforcer les engagements de M. Breton. C'est le sens de l'amendement 78.

M. le Rapporteur - L'amendement 129, que j'ai déposé à titre personnel, vise à préciser que « les fonctionnaires relevant de statuts interministériels ou de corps d'administration centrale restent soumis aux dispositions de leurs statuts particuliers. Ces statuts particuliers prévoient les conditions spécifiques dans lesquelles les fonctionnaires concernés peuvent être mis à la disposition de l'exploitant public, de France Télécom ou de leurs filiales, notamment par voie de détachement ».

Si France Télécom n'a pas l'intention de s'opposer à ces détachements, cela reste en effet un motif d'inquiétude légitime. La commission a donné un avis favorable à cet amendement. En revanche, elle est défavorable à l'amendement 78 (M. Dionis du Séjour et M. Gouriou protestent). La lettre que M. Breton a adressée au président de la commission assure en effet que « les fonctionnaires reclassés de France Télécom qui souhaiteraient poursuivre leur carrière au sein d'une administration bénéficieront sans réserve des dispositions de mobilité prévues dans le projet de loi, par intégration dans les corps ou cadres d'emploi de l'une des fonctions publiques concernées.

France Télécom et la commission de mobilité France Télécom veilleront tout particulièrement à faciliter l'accès à ce dispositif à l'ensemble des fonctionnaires intéressés, indépendamment de leur situation administrative et statutaire. Je m'engage à ce que les fonctionnaires reclassés puissent bénéficier d'un déroulement de carrière normal et de perspectives de promotion selon les mêmes critères que ceux qui régissent la carrière des autres fonctionnaires de France Télécom.

M. le Ministre - Les 8 000 fonctionnaires dits « reclassés » qui n'ont pas souhaité intégrer l'un des corps créés au sein de France Télécom en 1992 n'en restent pas moins des fonctionnaires de France Télécom, au même titre que les autres : le président de France Télécom s'est donc engagé à ce que ces personnels relèvent de la même gestion que leurs collègues, et le projet de loi leur ouvre le dispositif de mobilité qui permet aux agents de France Télécom de rejoindre les autres fonctions publiques. Mais la question des fonctionnaires reclassés doit être traitée à part de celle - très spécifique - des ingénieurs des télécoms et administrateurs des postes et télécommunications visés à l'article 44 de la loi de 1990, qui ont l'Etat pour administration d'origine et ne peuvent donc être à France Télécom en situation d'activité. J'émets donc un avis défavorable sur l'amendement 78.

En ce qui concerne l'amendement 129, le projet maintient en poste les fonctionnaires qui travaillent à France Télécom. Il confie à France Télécom la gestion des 106 000 fonctionnaires de l'entreprise. Quant aux 750 ingénieurs des télécom et administrateurs des postes et télécommunications, ils sont et resteront gérés par leur ministère, qui les détachera d'office auprès de France Télécom. C'est dans le souci d'assurer une égalité de traitement que le Gouvernement émet un avis favorable à cet amendement.

M. Jean Dionis du Séjour - Permettez-moi de rappeler les engagements qui ont été pris. Je puis citer M. Jospin : « Nous devrons tirer toutes les conséquences du choix de ceux qui ont préféré demeurer dans un cadre d'administration d'Etat » ou encore M. Juppé : « Les agents de France Télécom qui sont fonctionnaires conserveront le statut de fonctionnaires de l'Etat ».

Il faut solder ce contentieux. M. Breton a fait ce qu'il avait à faire en s'engageant à reconstituer la carrière de ceux qui rejoindront le statut de France Télécom. Mais les autres ? Ils ont fait un choix en 1990. L'Etat ne peut pas revenir sur sa parole.

Le dispositif de mobilité ne règlera pas tout le problème. Au nom de quoi, par ailleurs, n'assurerait-on pas aux techniciens et aux agents administratifs le même traitement qu'aux ingénieurs et aux cadres ?

M. Breton a fait la moitié du chemin, à nous de faire l'autre !

M. Alain Gouriou - Je partage la déception de M. Dionis du Séjour. Nous étions parvenus à un accord en commission, Monsieur le rapporteur. Et le voilà remis en cause dans l'hémicycle ! Ces personnels avaient à l'origine le statut de la Poste. Ils ont fait le choix de le conserver plutôt que d'entrer dans celui de France Télécom. Depuis, ils ont perdu tout droit de carrière et d'avancement. Certains n'ont même plus de bureau, voire de poste.

Mme Fontaine s'était engagée l'année dernière à régler ce dossier. Le président Ollier vient de porter à notre connaissance le courrier que lui a adressé le président de France Télécom. Certes, j'ai confiance en la parole de M. Breton. Mais beaucoup des agents concernés souhaitent être intégrés non à France Télécom, mais dans une autre fonction publique. Je conçois que cela ne soit pas facile. Mais c'est une question de justice. L'Etat doit faire une partie du chemin.

M. Daniel Paul - Voilà 6 000 personnes qui ont fait confiance à la loi et qui ont désormais le sentiment d'avoir été trompées. Que peuvent en penser les 106 000 fonctionnaires de France Télécom à qui on promet aujourd'hui le maintien de leur statut ? Le groupe communiste avait déposé sous la précédente législature une proposition de loi qui n'a pas abouti. Il est temps de sortir de cette situation ! Le président de France Télécom a fait ce qu'il pouvait faire. Il appartient maintenant à l'Etat d'agir.

M. le Président de la commission - Je ne comprends pas bien le sens de cette discussion. Vos inquiétudes, Monsieur Paul, nous les partagions, et c'est pourquoi nous avons interrogé M. Thierry Breton sur le sort qui serait réservé aux personnels dits « reclassés ». A ma demande, il nous a confirmé, par lettre du 28 novembre, les assurances qu'il nous avait données lors de son audition : les fonctionnaires reclassés qui souhaiteraient poursuivre leur carrière au sein d'une administration « bénéficieront sous réserves des dispositions de mobilité... par intégration dans les corps ou cadres d'emplois de l'une des fonctions publiques concernées »... France Télécom veillera « à faciliter l'accès à ces dispositifs de l'ensemble des fonctionnaires intéressés »... Les fonctionnaires bénéficieront « d'un déroulement de carrière normal », y compris d'avancement de grade au sein de leur corps.

Cette lettre répond à toutes vos préoccupations.

Monsieur Gouriou, le consensus que vous évoquez portait précisément sur ces engagements.

M. le Ministre - Le Gouvernement étant actionnaire de France Télécom et responsable de la commission de mobilité, il veillera à ce que lesdits engagements soient tenus.

L'amendement 78, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'amendement 129, mis aux voix, est adopté.

M. Alain Gouriou - L'amendement 73 est défendu.

L'amendement 73, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 4 modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 5

M. François Brottes - Avec l'amendement 74, nous offrons à la majorité une dernière occasion de se ressaisir en renonçant à la privatisation de France Télécom.

M. Daniel Paul - C'est un jour noir (Exclamations sur les bancs du groupe UMP). Si cet article n'est pas supprimé, cela signifie qu'à l'avenir France Télécom perdra son statut d'entreprise publique, d'autant que vous n'avez fixé aucune limite à la réduction du capital détenu par l'Etat. L'article 5 est bien l'amorce de la privatisation de France Télécom. Nous sommes tristes.

L'amendement 110 est de suppression.

M. le Rapporteur - Avis défavorable aux deux amendements de suppression.

M. le Ministre - A nouveau, je voudrais souligner que nous ne proposons pas de procéder à une privatisation, mais simplement d'ouvrir à l'Etat la possibilité d'échanger des actions de France Télécom si son développement international l'exige, et donc de devenir, éventuellement, actionnaire minoritaire. Il n'y a pas de projet dans les cartons pour demain, c'est une simple faculté.

Jusqu'où irons-nous ? France Télécom est en redressement et nous ne sommes pas pressés de céder ces actions : si l'entreprise devient plus rentable qu'aujourd'hui, le contribuable y trouvera son compte.

M. Daniel Paul - C'est une politique d'épicier !

M. le Ministre - J'ai la responsabilité de gérer les intérêts de l'Etat et je le ferai (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. François Brottes - On se moque de la représentation nationale ! Vous nous demandez un chèque en blanc pour faire ce que vous voulez : peut-être la privatisation, peut-être une augmentation du capital... On croit rêver !

Nous étions à vos côtés pour constituer l'ERAP, mais se dispenser de tout contrôle de la représentation nationale serait une grave régression du droit.

Les amendements 74 et 110, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

L'article 5, mis aux voix, est adopté.

ART. 6

M. Daniel Paul - Les amendements 111 et 112 sont défendus.

Les amendements 111 et 112, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

L'article 6, mis aux voix, est adopté.

ART. 7

M. Daniel Paul - L'amendement 113 est défendu.

L'amendement 113, repoussé par la commission et le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 7, mis aux voix, est adopté.

ART. 8

M. Daniel Paul - L'amendement 114 est défendu.

L'amendement 114, repoussé par la commission et le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 8, mis aux voix, est adopté.

ART. 9

M. le Rapporteur - L'objectif de notre amendement 7 est de supprimer la revente en gros de l'abonnement à France Télécom, d'autant que l'accord conclu le 18 novembre dernier entre France Télécom et Cegetel permet désormais une facturation unique au client.

M. François Brottes - Notre amendement 75 a le même objet. Le Sénat a joué les apprentis sorciers en introduisant cette disposition. Nous partageons la position du rapporteur.

M. Daniel Paul - Notre amendement 115 est identique.

M. le Ministre - Sagesse !

M. Jean Dionis du Séjour - Il est effectivement raisonnable de supprimer cette disposition, compte tenu de ce que l'accord conclu avec Cegetel est ouvert aux autres opérateurs.

A terme, cependant, la revente devrait être possible dans une logique de libre concurrence.

M. le Président de la commission - M. Breton nous a annoncé cet accord lors de son audition.

Nous avons donc décidé, à l'unanimité, de supprimer cet article car un bon contrat vaut mieux qu'une loi contraignante.

Les amendements 7, 75 et 115, mis aux voix, sont adoptés et l'article 9 est ainsi supprimé.

ART. 10

M. Daniel Paul - L'amendement 116 est défendu.

L'amendement 116, repoussé par la commission et le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 10, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 10

M. le Président de la commission - L'amendement 130 rectifié est extrêmement important et nous le discutons avec l'amendement 126, qui a été réservé à la demande du Gouvernement.

Avant de présenter ces deux amendements, je souhaite rappeler notre conception de la concurrence et de la régulation. Une des justifications de ce projet de loi est de donner à France Télécom les moyens de son développement dans le cadre de la concurrence internationale. Cette concurrence, nous voulons l'introduire aussi au niveau national car elle comporte deux avantages pour le consommateur : elle incite à la baisse des prix et elle stimule l'innovation. C'est ce qui a justifié la libéralisation du secteur des télécommunications en 1998.

Mais on sait que quand on libéralise un secteur où les prix étaient administrés, l'entreprise qui en détenait le monopole en profite, dans un premier temps, pour augmenter ses tarifs, la concurrence ne se mettant en place que progressivement.

Ensuite, de nouveaux opérateurs apparaissent sur les segments du marché les plus rentables, avec le risque que l'entreprise dominante casse les prix, grâce aux revenus qu'elle retire de sa présence monopolistique sur le reste du marché.

Voilà pourquoi nous avons mis en place un régulateur, l'ART, qui a pour fonction d'empêcher que l'entreprise dominante « rançonne » le consommateur sur la partie non concurrentielle du marché, en augmentant ses tarifs, et en profite pour casser les prix face à la concurrence et sur les autres segments.

Mais que constate-t-on ? Comme l'a montré M. Paul en début d'après-midi en soulignant le montant élevé des cautions demandées par France Télécom, le régulateur ne fait pas pleinement le travail qui nous semble être le sien, c'est-à-dire empêcher France Télécom d'imposer des prestations d'un coût trop élevé là où elle est en position de quasi-monopole. De plus, il empêche France Télécom de baisser ses prix sur le marché concurrentiel, pour soutenir artificiellement les autres opérateurs : cela peut être compris dans une première phase d'ouverture à la concurrence, mais la bonne concurrence est celle qui apporte au consommateur la baisse des prix et les offres innovantes : or dans un tel système, les opérateurs concurrents ne sont pas incités à faire des efforts d'innovation puisqu'on leur assure une rente de situation.

Le régulateur doit faire tout son travail et rien que son travail. Il doit consacrer son énergie aux parties du marché non concurrentiels et ne pas perturber la concurrence là où elle peut s'exercer de façon fructueuse.

J'ajoute que France Télécom est l'une des entreprises les plus endettés du monde ; il est normal de lui laisser la possibilité de faire face à cette dette. Par ailleurs, nous sommes nombreux à solliciter l'entreprise pour qu'elle réponde à sa vocation de service public en équipant le monde rural ; il serait injuste qu'en contrepartie, elle ne puisse pas pratiquer des tarifs plus bas dans les zones urbaines pour tenter de l'emporter sur ses concurrents.

C'est pourquoi nous présentons deux amendements.

L'amendement 130 concerne les tarifs hors service universel. Il impose deux limites au pouvoir de l'ART : d'une part, il ne permet que celle-ci s'oppose à la mise en _uvre d'un tarif que par une décision économiquement motivée, d'autre part, il interdit l'encadrement tarifaire des offres innovantes.

L'amendement 126 concerne les tarifs du service universel. Il pose le principe que le contrôle de l'ART ne concerne que les tarifs de base, laissant France Télécom libre sur les autres offres commerciales.

Nous avons lu dans la presse que ces amendements ne seraient pas compatibles avec le droit européen. Si ! Leur rédaction a été pensée de telle manière qu'ils soient cohérents avec les dispositions du projet de loi sur le « paquet Télécom » qui va servir de référence pour l'ordonnance. De plus, l'amendement sur les tarifs du service universel renvoie à un décret en Conseil d'Etat, qu'il faut prendre le temps d'élaborer, et il ne pourra entrer en vigueur qu'une fois en place la nouvelle procédure de désignation des opérateurs du service universel, c'est-à-dire vers la fin de l'année 2004. Quant à l'amendement sur les tarifs hors service universel, il suppose l'analyse préalable par l'ART des marchés de télécommunications, afin de repérer ceux sur lesquels un opérateur est réputé exercer une influence significative ; cela demandera également du temps.

Le « paquet Télécom » devant être transposé au premier semestre 2004, ces deux amendements, au moment de leur entrée en vigueur effective, viendront tout naturellement s'insérer dans le nouveau cadre législatif. Ce ne sont que des amendements de bon sens : il ne s'agit pas pour nous de prendre des assurances sur le dispositif qui sera mis en place ni de perturber les équilibres généraux tels qu'ils sont définis dans le « paquet Télécom ».

M. le Ministre - Lorsqu'on ouvre un marché à la concurrence, l'opérateur préalablement protégé n'augmente pas toujours ses prix : EDF, par exemple, a choisi de les baisser afin de garder le maximum de clients. Le cas des télécommunications est évidemment particulier puisqu'il s'agit d'une technologie très vivante.

Vous nous proposez en quelque sorte de passer d'une régulation a priori à une régulation a posteriori : France Télécom passerait du régime actuel d'accord préalable à un régime d'appréciation des effets de ses initiatives. Cette philosophie me paraît bonne et je suis donc favorable à cette évolution, surtout dans ce métier des technologies de l'information, où la nouveauté est un facteur majeur de croissance.

En matière de politique tarifaire, beaucoup de propositions de l'opérateur dominant ne créent pas de problème ; il n'y a aucune raison de freiner leur mise en _uvre par un contrôle a priori.

Mais il peut arriver que certaines offres tarifaires perturbent la concurrence - par exemple, des tarifs artificiellement abaissés qui forcent les concurrents à s'aligner sans espoir de gain. Dans ce cas, l'agrément préalable pourrait conserver tout son sens.

Je vous propose donc - tout en partageant, je le répète, votre philosophie -, que nous nous donnions le temps de la réflexion. Je vous suggère de retirer vos amendements et de les redéposer, avec les compléments nécessaires, lors de la discussion du projet de loi sur la confiance dans l'économie numérique. Le Gouvernement pourra alors les soutenir.

M. le Président de la commission - Confirmez-vous que les amendements que nous redéposerons pour la discussion du 7 janvier prochain seront approuvés par le Gouvernement, dès lors que nous aurons procédé aux ajustements nécessaires, qui n'en changeront pas l'objectif ? Si oui, je retire ces amendements.

M. le Ministre - Je le confirme.

M. François Brottes - Monsieur le ministre, vous tenez bien vos troupes ! Tous les amendements sur lesquels vous avez exprimé un désaccord alors qu'ils avaient été votés en commission ont été abandonnés en rase campagne... C'est bien comme cela que les choses doivent se passer dans une majorité disciplinée et organisée.

L'amendement 130 rectifié est pourtant timoré. S'il était adopté, il ne constituerait pas un pas considérable. Je serais cependant prêt à m'y rallier même si l'amendement 132, que je défends, va plus loin puisqu'il propose que l'autorité de régulation n'homologue et ne régule que les tarifs qui sont dans le périmètre du service universel. Pour le reste, la concurrence doit jouer et France Télécom ne doit pas avoir de boulet aux pieds, pas plus que les autres opérateurs.

A ce propos, deux exemples m'ont frappé. Tout d'abord, lorsqu'un tarif attractif de connexion à internet a été proposé aux écoles, l'autorité de régulation s'y est opposée.

De la même manière, on voit bien dans les publicités comparatives que France Télécom a un boulet aux pieds parce que ses prix sont encadrés. C'est une injustice insupportable.

Je veux bien que l'on parle de concurrence, mais encore faut-il que tous les acteurs soient à égalité.

M. Daniel Paul - Nous sommes d'accord pour « retirer le boulet » de France Télécom, c'est clair.

Nous discutons d'une loi importante. Or, vous proposez de reporter des décisions et de procéder ordonnance. Trop, c'est trop !

M. Pandraud avait raison : le travail n'a pas été bien fait en commission.

Ceci conforte ma décision de voter contre ce projet.

M. Jean Dionis du Séjour - Le problème se pose principalement pour le marché de gros d'accès à internet par ADSL. France Télécom en possède 90 % des parts et est en effet encadrée par un contrôle tarifaire préalable. Il est également vrai que France Télécom a été évincée de certains marchés faute de pouvoir concourir librement.

Je remercie ceux qui ont pris l'initiative d'un assouplissement tarifaire. C'est un geste fort.

Je comprends qu'il faut du temps pour bien régler la question. La procédure proposée par M. le président de la commission et par M. le ministre est bonne.

J'ajoute que, pour être accepté par tous les acteurs, cet assouplissement doit être accompagné de mesures d'équilibre, d'où la nécessaire transparence des coûts et la séparation comptable et managériale des réseaux.

M. le Président - Dois-je considérer qu'au bénéfice des assurances données par M. le ministre, l'amendement 130 rectifié est retiré ?

M. le Président de la commission - Je fais en effet confiance aux déclarations de M. le ministre.

L'amendement 130 rectifié est retiré.

ARTICLE PREMIER (amendements précédemment réservés)

M. le Président - Nous en venons à l'amendement 126, au sous-amendement 134 et à l'amendement 132 à l'article premier, précédemment réservés.

Le retrait de l'amendement 130 rectifié implique-t-il le retrait de l'amendement 126 et du sous-amendement 134 ?

M. le Président de la commission - En effet. Il s'agissait d'un amendement « de repli ». Nous souhaitons qu'à l'avenir, France Télécom puisse baisser ses prix. M. le ministre a pris l'engagement de rendre possible un assouplissement tarifaire dans le cadre de la loi sur l'économie numérique qui viendra en discussion le 7 janvier. Dès lors, l'amendement 126 ne se justifie plus.

Si cet engagement n'est pas tenu, c'est à désespérer de la confiance que nous vous témoignons, Monsieur le ministre.

L'amendement 126 et le sous-amendement 134 sont retirés.

M. François Brottes - J'ai défendu tout à l'heure l'amendement 132.

A quoi sert-il, Monsieur le président de la commission, de travailler pendant des heures sur des amendements dont l'examen est finalement reporté ?

M. le Président de la commission - L'important, Monsieur Brottes, c'est le résultat. Nous devons faire en sorte que les objectifs définis en commission soient atteints. Il n'importe guère qu'ils le soient aujourd'hui, à cette heure précise, par un vote à l'arraché.

Nous sommes conscients de ce que le Gouvernement a besoin de réfléchir sur une décision qui a été prise hier matin.

Nous avons obtenu satisfaction et j'ai confiance en la façon dont le Gouvernement souhaite régler le problème de France Télécom.

Avis défavorable sur l'amendement.

L'amendement 132, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article premier modifié, mis aux voix, est adopté.

L'ensemble du projet de loi, mis aux voix, est adopté.

Prochaine séance mardi 9 décembre, à 9 heures.

La séance est levée à 18 heures 10.

                  Le Directeur du service
                  des comptes rendus analytiques,

                  François GEORGE

ORDRE DU JOUR
DU MARDI 9 DÉCEMBRE 2003

A NEUF HEURES : 1ère SÉANCE PUBLIQUE

Débat sur la conciliation des exigences de la continuité du service public des transports et du droit de grève.

A QUINZE HEURES : 2ème SÉANCE PUBLIQUE

1. Questions au Gouvernement.

2. Discussion du projet de loi, adopté par le Sénat (n° 1215), relatif à la parité entre hommes et femmes sur les listes de candidats à l'élection des membres de l'Assemblée de Corse.

M. Guy GEOFFROY, rapporteur au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République

(Rapport n° 1232)

3. Discussion, en deuxième lecture, du projet de loi (n° 593) relatif à la bioéthique.

M. Pierre-Louis FAGNIEZ, rapporteur au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

(Rapport n° 761).

Mme Valérie PECRESSE, rapporteure pour avis au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

(Avis n° 709).

A VINGT ET UNE HEURES TRENTE : 3ème SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l'ordre du jour de la deuxième séance.


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