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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2003-2004 - 61ème jour de séance, 156ème séance

2ème SÉANCE DU MARDI 10 FÉVRIER 2004

PRÉSIDENCE de M. Jean-Louis DEBRÉ

Sommaire

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT 2

TAUX RÉDUIT DE TVA DANS LA RESTAURATION 2

INDÉPENDANCE DE LA JUSTICE 2

TAUX RÉDUIT DE TVA DANS LA RESTAURATION 3

AIDES AUX MÈRES 4

LUTTE CONTRE L'IMMIGRATION CLANDESTINE 5

ASSURANCE MALADIE 5

CRISES AGRICOLES 6

PROCÉDURE DE RÉTABLISSEMENT PERSONNEL 7

PRISE EN CHARGE DES PERSONNES ÂGÉES DÉPENDANTES 8

PROJET DE LOI PERBEN 8

PERMIS DE CONDUIRE PROBATOIRE 9

TITRE EMPLOI ENTREPRISE 10

APPLICATION DU PRINCIPE DE LAÏCITÉ DANS LES ÉCOLES, COLLÈGES
ET LYCÉES PUBLICS (suite) 10

EXPLICATIONS DE VOTE 11

COMMUNAUTÉS AÉROPORTUAIRES 14

ARTICLE PREMIER 27

ART. 2 29

ART. 3 31

ART. 4 31

APRÈS L'ART. 4 32

ART. 5 32

ART. 5 BIS 34

ART. 6 34

APRÈS L'ART. 7 34

EXPLICATIONS DE VOTE 34

La séance est ouverte à quinze heures.

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

TAUX RÉDUIT DE TVA DANS LA RESTAURATION

M. Thierry Mariani - L'indispensable réduction du taux de TVA appliqué à la restauration est attendue par les professionnels et les organisations syndicales depuis de longues années. Alors qu'une conjoncture économique défavorable se conjugue aux effets néfastes de l'application des 35 heures (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains), une telle mesure permettrait de hausser les salaires et de créer de nouveaux emplois. Nous savons que, depuis votre arrivée au Gouvernement, vous n'avez pas ménagé vos efforts à cette fin, Monsieur le Premier ministre, conformément à l'engagement ferme de la majorité, qui tranche avec l'absence de volonté constatée au cours des années précédentes (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains). Mais votre détermination se heurte à certains pays membres de l'Union européenne. Dans ces conditions, selon quel calendrier l'engagement pris pourra-t-il être tenu ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre - Je sais, Monsieur Mariani, qu'en 1995 déjà vous vous battiez pour obtenir la réduction du taux de TVA dans la restauration, dossier qui, malheureusement, n'a pas avancé au cours de la précédente législature (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains). Je vous le dis tout net : je suis déçu et déterminé. Je suis déçu par l'attitude du gouvernement allemand (Mêmes mouvements), qui doit garder une vision équilibrée de notre amitié. La demande que nous avons faite est légitime, mais nous sommes victimes de la règle de l'unanimité au sein de l'Union européenne (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains). C'est d'ailleurs pourquoi nous proposons que cette règle ne vaille pas en matière fiscale (Mêmes mouvements). La Commission défend la position française, et nous avons donc quelques chances d'obtenir satisfaction (« Ce n'est pas vrai ! » sur les bancs du groupe socialiste). En attendant, le Gouvernement a décidé de débloquer 1,5 milliard en dix-huit mois en faveur de la restauration, qui bénéficiera ainsi d'un plan d'allégement massif de ses charges (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

J'ai informé M. Daguin de cette décision, et je le recevrai jeudi pour fixer avec lui les modalités d'application de ce plan (Huées sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains ; applaudissements sur les bancs du groupe UMP). Il est assez significatif que la moitié de la représentation nationale se réjouisse de l'appui manifesté aux restaurateurs, cependant que l'autre moitié manifeste son désintérêt ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

INDÉPENDANCE DE LA JUSTICE

Mme Elisabeth Guigou - Selon le journal Le Monde, le Garde des Sceaux aurait indiqué qu'une étude est en cours à la Chancellerie sur le remboursement des sommes dues à la ville de Paris, après la condamnation d'Alain Juppé dans l'affaire du financement du RPR, et sur les conséquences judiciaires éventuelles de ce remboursement. Certes, le ministre de la justice a démenti ces informations, mais le journal les maintient. La Chancellerie serait-elle devenue une succursale du cabinet d'avocats qui défend M. Juppé ? (Huées sur les bancs du groupe UMP)

Par ailleurs, le Garde des Sceaux s'en prend à notre collègue Roger-Gérard Schwartzenberg, qui a eu le tort de relever que, par leurs déclarations, certains ministres ont enfreint les dispositions du code pénal en cherchant à jeter le discrédit sur les juges, dans des conditions propres à porter atteinte à l'autorité de la justice ou à son indépendance (Exclamations sur les bancs du groupe UMP). Et le Président de la République n'a pas saisi le Conseil supérieur de la magistrature, pourtant garant de l'indépendance de la justice.

Monsieur le Garde des Sceaux, avez-vous tenu les propos qui vous sont prêtés ? Avez-vous donné des instructions au procureur général dans cette affaire ? Le Président de la République compte-t-il saisir le Conseil supérieur de la magistrature ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice - « Une telle décision de justice est inique ». Qui déclarait cela en 1996 ? M. Jospin... (Exclamations et huées sur les bancs du groupe UMP) Pour ma part, je démens formellement les propos qui m'ont été prêtés par le journal Le Monde de manière erronée ; d'ailleurs, cette conversation a été transcrite tout autrement par d'autres journalistes. Ensuite, je n'ai donné aucune instruction à quelque procureur que ce soit, comme cela a été ma position constante. S'agissant enfin des pressions évoquées par le tribunal de Nanterre, il s'agit de faits d'une telle gravité que le Gouvernement a immédiatement réagi. Dès samedi 31 janvier, j'ai demandé au procureur de la République qu'une information soit ouverte au plus vite sur l'aspect pénal du dossier. Le lendemain, en accord avec le Président de la République, une commission a été constituée, composée de trois personnalités incontestables : le vice-président du Conseil d'Etat, le premier président de la Cour de cassation et le premier président de la Cour des comptes. Cette commission se penchera sur les dysfonctionnements éventuels des services et, si l'enquête met en cause l'organisation de la magistrature, le CSM, informé, sera saisi si nécessaire (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

TAUX RÉDUIT DE TVA DANS LA RESTAURATION

M. Jean Dionis du Séjour - Je reviens sur la question du taux de TVA appliqué à la restauration, que le Gouvernement s'était engagé à réduire. Hier, le Président de la République a reconnu que cette mesure ne pouvait pas être appliquée. Vous avez souligné, Monsieur le Premier ministre, que l'on touchait là aux limites de la démocratie européenne, qui exige que les décisions soient prises à l'unanimité. Nos restaurateurs sont extrêmement déçus, particulièrement dans les régions de vieille tradition gastronomique comme l'Aquitaine, d'autant qu'ils subissent la concurrence de la restauration rapide, inexplicablement taxée au taux réduit. Ceux qui voulaient investir et embaucher ne le peuvent pas, et ils sont à la fois accablés et meurtris par la parole non tenue (Exclamations sur les bancs du groupe UMP).

Il n'est pas concevable de les abandonner. Quelles mesures précises sont prévues dans le plan national que vous venez d'annoncer ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF).

M. Alain Lambert, ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire - L'application du taux réduit de TVA à la restauration est une nécessité, et nous continuerons de nous battre pour l'obtenir car il en va de l'emploi, de l'avenir du secteur et de nos territoires. Il convient, aussi, de réduire les distorsions de concurrence auxquelles vous avez fait allusion (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains). Un peu de retenue, vous qui avez mis la pagaille avec les 35 heures ! (Huées sur les bancs du groupe UMP)

Le Premier ministre vient de vous indiquer qu'il prendrait des mesures alternatives...

M. François Hollande - Avec quel argent ?

M. le Ministre délégué - ...et que la concertation avec les professionnels du secteur s'engagerait dès jeudi prochain. Ainsi, nous nous serons battus pour l'emploi et pour l'égalité de nos territoires et nous aurons réparé les erreurs du passé ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; huées sur les bancs du groupe socialiste)

AIDES AUX MÈRES

M. André Chassaigne - Monsieur le Premier ministre, j'espère d'abord que vous rendrez aux laissés pour compte de l'allocation spécifique de solidarité les milliards que vous leur volez pour vos annonces électoralistes (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et sur de nombreux bancs du groupe socialiste ; protestations sur les bancs du groupe UMP). Il ne fait pas bon être chômeur ou mère de famille sous ce Gouvernement. Je ne parle pas bien entendu des plus aisées mais de toutes celles qui apprennent jour après jour qu'entre la maternité et des conditions de vie décentes, il va falloir désormais choisir. Heureusement, toutes ces femmes résistent et nous les aidons à vous convaincre d'infléchir vos positions régressives sur des droits chèrement acquis.

Certes, le congé de maternité des intermittentes est peut-être sauvé, si l'on en croit la lettre adressée par M. Aillagon au président de l'UNEDIC. Le cumul entre l'allocation de parent isolé et la prestation d'accueil du jeune enfant est peut-être maintenu, si l'on se réfère au décret qui devait être présenté au conseil d'administration de la CNAF. Les mères célibataires les plus précaires pourront ainsi se passer des « Restos du c_ur » pour nourrir leur bébé et éviter de venir grossir les effectifs du million et demi de foyers en situation de surendettement. Cependant, les mères les plus âgées, celles qui auraient dû bénéficier d'un départ anticipé à la retraite, ne peuvent même pas faire valoir toute la durée de majoration pour enfants et toutes les périodes d'activité passées en congé de maternité. Les petits-enfants attendront encore un peu plus que mamie quitte l'usine ou le bureau... (« Bla ! Bla !» sur les bancs du groupe UMP) Si, comme vous l'affirmez, la famille reste une priorité pour votre gouvernement, le droit à une maternité libérée de toutes les contraintes sociales est un acquis que vous avez le devoir de préserver.

Pour chacune de ces trois catégories de mères, quelles mesures concrètes votre gouvernement entend-il prendre pour remédier aux atteintes incessantes faites au principe de l'égalité entre les hommes et les femmes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et sur quelques bancs du groupe socialiste)

Mme Nicole Ameline, ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle - Si les femmes avaient bénéficié depuis vingt ans d'un réel accès au droit, à l'emploi, aux carrières et au revenu, vous seriez sans doute plus autorisé à prendre un ton polémique... (« Bravo ! » sur les bancs du groupe UMP) Pour sa part, le Gouvernement mobilise toutes ses forces pour favoriser l'égalité professionnelle.

S'agissant des salariées intermittentes, nous avons effectivement demandé aux partenaires sociaux de préciser la situation pour apaiser toutes les inquiétudes. Naturellement, ces femmes verront préserver l'intégralité de leurs droits au titre de l'assurance chômage.

Pour ce qui concerne l'API, vous avez vous-même indiqué que M. Christian Jacob avait procédé devant le conseil d'administration de la CNAF à la clarification qui s'imposait, dans l'esprit de favoriser le cumul des prestations liées à la PAJE.

Quant au départ en retraite anticipé, merci d'avoir rappelé que c'est notre Gouvernement qui a permis à des centaines de milliers de travailleurs, hommes et femmes, de partir avant l'âge exigé antérieurement... (Murmures sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et du groupe socialiste ; applaudissements sur les bancs du groupe UMP) Toutes les majorations de durées d'assurance seront effectivement prises en compte et permettront aux femmes ayant élevé des enfants de disposer à soixante ans de trimestre supplémentaires.

Ce qui est essentiel, ce sont autant les carrières que les retraites, et c'est bien l'égalité professionnelle qui fera progresser les droits des femmes. C'est ce qu'elles attendent et c'est ce que nous allons leur apporter ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

LUTTE CONTRE L'IMMIGRATION CLANDESTINE

M. Didier Quentin - L'immigration clandestine est sans doute l'un des problèmes les plus graves auxquels s'affronte notre société. Dès sa nomination, le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin s'est engagé à repenser la politique de l'immigration, en posant sans hypocrisie et sans laxisme toutes les questions en suspens. Dans cet esprit, il a élaboré une politique globale, visant tout à la fois à lutter contre l'immigration clandestine et à régler la question des sans-papiers, tout en définissant une véritable politique d'intégration.

Monsieur le ministre de l'intérieur, nous avons adopté en octobre dernier votre projet de loi sur la maîtrise de l'immigration et le séjour des étrangers en France et, en novembre, la loi de M. de Villepin portant réforme du droit d'asile. Parallèlement, vous avez relancé la coopération internationale avec nos voisins européens sur toutes les questions liées à l'immigration. C'est ainsi qu'a été décidée, en plein accord avec le Royaume-Uni, la fermeture du centre de réfugiés de Sangatte. Par ailleurs, soucieux du devenir des étrangers n'ayant pas vocation à rester en France, le Gouvernement a mis en _uvre des accords bilatéraux pour assurer leur retour au pays d'origine dans de bonnes conditions.

Après plusieurs mois d'application des mesures que nous avons votées, pouvez-vous dresser un premier bilan de la lutte contre l'immigration clandestine ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; « Allô Sarko ! » sur les bancs du groupe socialiste)

M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales - La règle est simple : quand on a des papiers, on est le bienvenu. Quand on a des faux papiers ou pas de papiers du tout, on est renvoyé chez soi. Pourquoi le système d'intégration à la française connaît-il toutes ces difficultés ? Parce qu'à partir du moment où la France était le seul pays à ne pas décider de qui entrait sur son territoire et de qui devait en sortir, les premières victimes étaient les étrangers en situation régulière, victimes d'un amalgame...

M. Lucien Degauchy - Merci Vaillant !

M. le Ministre - On ne peut pas accueillir et intégrer tout le monde et comme plus rien n'était contrôlé, tout le monde souffrait ! Nous avons donc engagé une politique d'intégration pour ceux qui sont en situation régulière, et une politique d'éloignement systématique des autres... Les résultats en sont désormais connus : il y a eu, en janvier 2004, 36 % d'éloignements d'étrangers en situation irrégulière de plus qu'en janvier 2003 (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) Dorénavant, la loi est appliquée en France.

Par ailleurs, nous disposerons de 25 % de places supplémentaires en centres de rétention dès le mois de mars et de 50 % de places en plus au mois de juin. A partir du moment où les clandestins restent plus longtemps en centre de rétention, ils doivent y être accueillis avec humanité et dans des conditions de confort dignes de la République française.

Nous voulons allier efficacité et générosité. Ceux qui n'ont pas de papiers seront raccompagnés ; ceux qui en ont seront accueillis dans le respect des droits de l'homme. C'est la réponse du Gouvernement (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur de nombreux bancs du groupe UDF).

ASSURANCE MALADIE

M. Jean-Marie Rolland - La modernisation de notre assurance maladie constitue l'un des chantiers prioritaires de l'action gouvernementale dans les prochains mois. Vous avez choisi de procéder en trois étapes : concertation, proposition et négociation. Monsieur le ministre de la santé, vous avez lancé hier la phase de concertation en recevant près de soixante délégations représentant les partenaires sociaux, les professions de santé, les usagers et les mutuelles.

Pouvez-vous dresser un premier bilan de cette rencontre et préciser à la représentation nationale la méthode de travail qui a été retenue ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées - Lorsque le Premier ministre a installé le Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie, il a fixé un calendrier précis. La première phase, celle du diagnostic, s'est achevée le 23 janvier dernier, avec la remise d'un rapport consensuel, juste et équilibré. Hier a débuté la deuxième phase, celle de la concertation. Cela m'a permis de rappeler les valeurs fondatrices de notre sécurité sociale, sur lesquelles le Gouvernement souhaite refonder notre assurance maladie qui en a bien besoin ! J'entends par là une assurance maladie obligatoire et universelle, juste et solidaire, ouverte à tous et de qualité, gérée sans étatisation ni privatisation et dont la viabilité financière garantira la pérennité.

La méthode de travail est simple : je rencontrerai personnellement chacune des cinquante-sept délégations, de une à trois fois selon le besoin. Huit groupes de travail vont décliner les deux principaux leviers d'action que sont la réorganisation de notre offre de soins et la modulation des prises en charge. Le Gouvernement n'a qu'une obsession : toujours mieux soigner ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

CRISES AGRICOLES

M. Jean-Yves Le Drian - S'agissant de la TVA, nous mesurons bien la difficulté dans laquelle se trouve le Premier ministre, pour corriger l'erreur de M. Juppé,... (Interruptions sur les bancs du groupe UMP) lequel avait relevé le taux ordinaire de deux points en 1995 et pour tenter de tenir la promesse de M. Chirac de généraliser le taux réduit tout en ménageant l'Allemagne ! Nous vous souhaitons, Monsieur le Premier ministre, bon courage et beaucoup de plaisir ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

Monsieur le ministre de l'agriculture, après la crise des secteurs du porc et de la volaille, voici maintenant celle du lait et des légumes. Plusieurs facteurs conjoncturels expliquent des difficultés, qui touchent en priorité les régions de l'ouest et la Bretagne en particulier : cours de l'euro, crise de Parmalat, grippe aviaire. Mais il est aussi des causes structurelles : insuffisante restructuration des filières agricoles françaises, abandon - par vos soins - des contrats territoriaux d'exploitation... (« Heureusement ! » sur les bancs du groupe UMP), entrée en vigueur sans cesse différée des contrats d'agriculture durable que vous avez annoncés.

Après un nouvel échec des négociations sur le lait, vous avez pris l'initiative d'une nouvelle table ronde ministérielle. Quelles actions entendez-vous conduire pour opérer le nécessaire rééquilibrage entre producteurs et agro-industriels, afin d'enrayer une baisse des prix anormale.

Après les déclarations du commissaire Fischler sur la régionalisation des aides dans le cadre de la réforme de la PAC, le Gouvernement a-t-il l'intention de s'engager rapidement dans la voie décrite ? Il y a urgence à trancher.

Enfin, pour faibles qu'elles soient, votre ministère dispose quand même de marges de man_uvre. A quand les grandes lignes de votre future loi de modernisation agricole ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales - Beaucoup des productions de la première région agricole de France qu'est la Bretagne ne sont régies par aucune organisation commune de marché. Pour les soutenir, des mesures à la fois conjoncturelles et structurelles sont donc nécessaires. C'est ce à quoi nous nous sommes attachés depuis vingt mois.

Ainsi, pour le porc, avons-nous obtenu au niveau européen le 23 janvier dernier les mesures nécessaires concernant les restitutions aux exportations et lancé un plan de modernisation de la filière doté de quinze millions d'euros. De même, pour la volaille, avons-nous obtenu l'arrêt des importations sauvages de viandes saumurées et dégagé neuf millions d'euros, au bénéfice tant de l'amont que de l'aval de la filière. Pour les légumes, notamment le chou-fleur, nous sommes en discussion avec la Commission pour que jouent les mécanismes de gestion de crise prévus par le compromis de Luxembourg du 26 juin dernier.

Reste le lait. Comme vous le savez, l'accord interprofessionnel sur les prix, conclu en 1997, a été dénoncé le 31 décembre dernier par les transformateurs. J'ai demandé instamment, ce matin même, aux professionnels de parvenir à « une clause de paix » pour le premier semestre 2004, les dispositions laitières de la réforme de la PAC décidées à Berlin en 1999 ne pouvant s'appliquer avant le 1er juillet. Au-delà, un plan de modernisation de la filière est nécessaire. Au cours de la table ronde que j'ai réunie ce matin avec l'ensemble des partenaires, sept groupes de travail ont été mis en place qui devront rendre leurs conclusions avant la fin du semestre. J'ai par ailleurs d'ores et déjà débloqué une enveloppe de vingt millions d'euros pour la production et la transformation dans cette filière qui concerne 110 000 exploitations sur l'ensemble du territoire (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

PROCÉDURE DE RÉTABLISSEMENT PERSONNEL

M. Frédéric Reiss - La Banque de France a indiqué hier que le nombre de dossiers de surendettement dont elle était saisie a augmenté de 16,9 % en 2003 et que cette tendance semblait, hélas, se confirmer depuis le début 2004 (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe socialiste). La procédure de rétablissement personnel, instituée par la loi d'orientation pour la ville de juillet 2003 dernier, apporte une réponse aux familles, trop nombreuses, qu'un accident de la vie - chômage, maladie, divorce, décès...- plonge dans la détresse et le surendettement. Cette procédure, qui permet aux familles de repartir de zéro, s'inspire de celle de la faillite civile, qui a fait ses preuves en Alsace-Moselle et permet notamment l'effacement des dettes, après la liquidation du patrimoine. Monsieur le ministre délégué à la ville, quelles sont les modalités exactes de mise en _uvre de cette procédure et qu'en attendez-vous ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF)

M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué à la ville et à la rénovation urbaine - Dans 90 % des cas, une famille surendettée est une famille qui, après un « accident de la vie », a accumulé une dette, le plus souvent modeste, de quelques milliers d'euros, mais va, de ce seul fait, plonger dans la spirale infernale des saisies, de l'expulsion... Pendant des années, n'étaient laissées à ces familles pour vivre qu'un « reste à vivre » - même l'allocation adulte handicapé pouvait leur être saisie ! Quelques-unes parvenaient à s'en sortir devant les commissions de surendettement, la grande majorité n'y arrivait pas. Mais, avec une grande hypocrisie, on refusait de voir ces drames, rejouant en quelque sorte « Cachez ce sein que je ne saurais voir » (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). Vos exclamations sont pour le moins déplacées, quand on sait que le nombre de familles concernées a triplé sous le précédent gouvernement ! (Mêmes mouvements)

Ce gouvernement a décidé d'une part, qu'il serait possible aux familles victimes d'un accident de la vie d'obtenir l'étalement du paiement de leur impôt sur le revenu ; d'autre part, que, dans les cas les plus graves, les familles seraient orientées par les commissions de surendettement soit vers les commissions de la Banque de France, soit vers le tribunal. Celui-ci pourra alors ordonner le rétablissement personnel, auquel cas il sera mis un terme aux saisies-arrêts et toutes autres procédures de même nature, de façon à faire le point avec la famille en toute sérénité. Laisser des familles, qui, avec leurs enfants, représentent tout de même quatre à cinq millions de personnes, accumuler leurs dettes sans aucune chance de jamais pouvoir s'en acquitter tout en les condamnant à vivre avec un « reste à vivre » était à la fois une faute morale et une erreur économique. Le décret relatif à la procédure de rétablissement personnel sera publié en début de semaine prochaine. Les premiers jugements de suspension des procédures devraient intervenir à la fin du mois. Au lieu de se voiler la face, il faut traiter le problème au fond, c'est-à-dire permettre aux familles de repartir de zéro et de pouvoir à l'avenir honorer de nouveau leurs créances, car, dans un pays démocratique, il faut s'acquitter de ses dettes, c'est la condition de la confiance (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

PRISE EN CHARGE DES PERSONNES ÂGÉES DÉPENDANTES

M. Jacques Domergue - Six mois ont passé depuis la tragique canicule de cet été, laquelle a éprouvé de manière inégale les régions - ainsi le Languedoc-Roussillon a-t-il été touché moins que d'autres. Le 6 novembre dernier, le Premier ministre a annoncé un vaste plan de solidarité en faveur des personnes âgées et handicapés dépendantes. Cette réforme, ambitieuse et de longue haleine, comporte la mise en place d'un plan de veille et d'alerte dans chaque département et crée une branche nouvelle de la Sécurité sociale pour couvrir le risque dépendance. Pourriez-vous, Monsieur le secrétaire d'Etat aux personnes âgées, faire le point sur l'état d'avancement de cette réforme ?

M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat aux personnes âgées - Jamais autant de moyens n'auront été dégagés pour la prise en charge des personnes âgées (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) puisque plus de quatre milliards d'euros vont y être consacrés (Mêmes mouvements). Comme vous l'avez dit, un plan de veille et d'alerte sera mis en place dans chaque département, en coordination avec l'échelon local. L'APA sera pérennisée et, surtout, financée : nous allons débloquer 1,7 milliard d'euros à cet effet en 2004. J'ai par ailleurs demandé à tous les préfets de veiller à ce que toutes les maisons de retraite publiques soient équipées d'ici à la fin juin d'une salle climatisée, et d'intensifier les contrôles systématiques pratiqués dans ces établissements.

Notre retard était considérable en matière de prise en charge des personnes âgées dépendantes. Nous avons dégagé les moyens nécessaires. Nous comptons maintenant sur l'échelon local pour prendre le relais (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). Messieurs, vous n'êtes pas les mieux placés pour nous donner des leçons, vu votre bilan ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

PROJET DE LOI PERBEN

M. André Vallini - Dans un Etat démocratique, le droit légitime de tous à la sécurité doit être concilié avec le droit de tous à la sûreté, lequel n'est autre que le droit de n'être ni poursuivi, ni arrêté, ni détenu, ni condamné arbitrairement (Exclamations sur les bancs du groupe UMP).

Ces droits sont énoncés par la Déclaration universelle des droits de l'homme et du citoyen de 1789. Et c'est elle que votre projet de loi, Monsieur le Garde des Sceaux, s'apprête à remettre en question. Depuis des mois, ici comme au Sénat, nous ne cessons de dénoncer les dangers de votre texte, lequel suscite aujourd'hui une mobilisation sans précédent. Demain, tous les barreaux de France seront en grève et les 180 bâtonniers de notre pays défileront devant le Palais-Bourbon à 12 h 30. Si les avocats et toutes leurs organisations professionnelles, si tous les magistrats et tous leurs syndicats, si toutes les associations de défense des droits de l'homme, unanimes, de dressent contre votre projet de loi, c'est que celui-ci va instaurer dans notre pays un état d'exception permanent, conjugué à une justice à l'américaine, dure avec les faibles et conciliante avec les puissants (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste ; exclamations sur les bancs du groupe UMP). Il aggravera de surcroît la situation dans nos prisons, dont nous devrions tous savoir ici qu'elle est indigne d'un pays civilisé (« Et vous, qu'avez-vous fait ? » sur les bancs du groupe UMP).

Quand les droits de la défense sont attaqués, quand la protection des citoyens contre l'arbitraire est menacée, quand l'égalité de tous devant la loi est bafouée, ce sont les principes même de notre République qui sont foulés aux pieds. Monsieur le ministre, sans attendre l'annulation de votre texte par le Conseil constitutionnel, que nous saisirons, non plus que la condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l'homme, retirez votre texte ! Nous vous le demandons solennellement (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur de nombreux bancs du groupe des députés communistes et républicains ; protestations sur les bancs du groupe UMP).

M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice - Ce ton grandiloquent n'est pas adapté s'agissant d'un texte qui répond à deux nécessités. La première est de lutter efficacement contre le crime organisé international. Je rappelle quels crimes et délits sont visés par mon texte : meurtre en bande organisée, torture et actes de barbarie en bande organisée, trafic de stupéfiants, enlèvements et séquestrations, traite des êtres humains, proxénétisme aggravé, vol en bande organisée, c'est-à-dire avec port d'arme, prise d'otages, blessures ou homicide... Voilà de quoi il s'agit ! (Huées sur les bancs du groupe UMP) La justice française doit se donner les moyens d'enquête nécessaires, comme celle des autres démocraties européennes. Mais vous, qui êtes juriste, savez fort bien que le texte place clairement tous les moyens exceptionnels d'enquête sous le contrôle du juge.

La seconde nécessité est de mettre fin à un scandale : l'absence de traitement dans des délais raisonnables d'un très grand nombre de dossiers pénaux (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). Considérez-vous comme acceptables ces après-midi, ces soirées au tribunal correctionnel où, après huit ou douze mois d'attente, un dossier est traité en trois minutes ? C'est ce que j'appelle une justice d'abattage ! Je veux y mettre fin, et pour cela j'introduis le plaider coupable, qui permettra, dans un dialogue équilibré de l'avocat avec le procureur et le juge, de traiter ces nombreux dossiers dans des délais raisonnables. Tels sont les deux objectifs du texte, et vous devriez les partager ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

PERMIS DE CONDUIRE PROBATOIRE

M. Jean-Marc Lefranc - Ma question, à laquelle s'associe M. Jean-Claude Lemoine, s'adresse à M. le ministre des transports. Samedi dernier, un jeune homme de dix-huit ans roulait à contresens, et à vive allure, sur une route nationale : il a percuté une voiture où se trouvaient une jeune femme et ses trois enfants. La jeune femme et l'un des enfants furent tués sur le coup. Cette tragédie nous rappelle que les jeunes titulaires du permis de conduire ne maîtrisent pas toujours leur véhicule aussi complètement qu'ils le croient. Par quelles mesures entendez-vous responsabiliser les conducteurs ? Je pense notamment au permis probatoire (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP).

M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer - L'accident de Saint-Avold est un signal d'alarme, d'autant qu'il s'ajoute aux résultats décevants de janvier 2004, qui a vu 4,9 % de blessés de plus que janvier 2003. Ce dernier mois, il est vrai, avait connu une baisse de 34 % du nombre des accidents. Pour autant, nous ne pouvons nous satisfaire des chiffres de janvier 2004, surtout illustrés par des accidents tels que celui de Saint-Avold.

C'est pourquoi, dans trois semaines sera instauré le permis probatoire. Il comportera six points seulement au lieu de douze, et le conducteur n'aura ses douze points qu'au bout de trois ans - deux ans s'il a pratiqué la conduite accompagnée. Ce permis probatoire ne sera pas réservé aux jeunes conducteurs : c'est aussi celui que passeront ceux qui ont perdu leur permis, par manque de points ou après décision d'un tribunal.

Par ailleurs le contraste entre la puissance excessive de certaines voitures et l'inconscience ou l'inexpérience de certains conducteurs pose un problème. Je vais saisir le conseil national de la sécurité routière, après quoi, au vu de son avis, je ferai des propositions au Premier Ministre en vue de décisions à prendre lors d'un prochain conseil interministériel de la sécurité routière (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et du groupe UMP).

TITRE EMPLOI ENTREPRISE

M. Gérard Dubrac - Ma question s'adresse à M. le Secrétaire d'Etat aux PME, au commerce et à l'artisanat. Compte tenu de leur rôle essentiel dans la création d'emploi, le Gouvernement à choisi une politique en faveur des entreprises, et créant un environnement favorable à l'initiative. Il a axé son effort sur l'encouragement à la création d'entreprises, avec la loi sur l'initiative économique. Les derniers chiffres montrent l'efficacité de ces mesures. Mais nos entreprises ont aussi de grandes attentes en matière de simplification des démarches administratives, qui pèsent sur la gestion et la compétitivité des PME. C'est pourquoi le Gouvernement a créé le titre emploi entreprise. Quand et comment les entreprises pourront-elles utiliser ce dispositif ? En quoi va-t-il libérer les énergies et répondre au besoin de simplification ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP)

M. Renaud Dutreil, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation - Le Gouvernement agit avec détermination pour l'emploi. En matière de charges sociales, le Premier Ministre a annoncé une mesure très importante en faveur d'un secteur à forte densité de main-d'_uvre. Nous agissons aussi pour que s'accroisse le pouvoir d'achat ; celui des ménages a augmenté de 1,2 % l'an dernier. Quant à la création d'entreprise, nous entendons simplifier l'acte d'embauche. C'est pourquoi nous avons créé le titre emploi entreprise, et le décret est paru aujourd'hui au Journal officiel ! Ce titre bénéficiera à quelque 2,5 millions d'emplois occasionnels, mais aussi à 700 000 emplois permanents. Il y a des gouvernements qui créent des obstacles à l'embauche ; on se rappelle celui qui avait inventé jusqu'à six SMIC, et quarante formalités pour embaucher... Nous, nous aplanissons le chemin de l'emploi par la simplification ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

La séance, suspendue à 15 heures 55 est reprise à 16 heures 15.

APPLICATION DU PRINCIPE DE LAÏCITÉ DANS LES ÉCOLES,
COLLÈGES ET LYCÉES PUBLICS (suite)

L'ordre du jour appelle les explications de vote et le vote par scrutin public sur l'ensemble du projet de loi relatif à l'application du principe de laïcité dans les écoles, les collèges et les lycées publics

M. Pascal Clément, président et rapporteur de la commission des lois - Ce projet n'est pas celui d'une majorité, mais de tous les représentants de la République (Murmures sur certains bancs du groupe des députés communistes et républicains). Sinon, mieux aurait valu ne pas le présenter à l'Assemblée. Il était indispensable, car la jurisprudence était contradictoire et le Conseil d'Etat ne jugeait qu'en fonction de l'ordre public. Il l'était aussi, car, aux termes de la Convention européenne des droits de l'homme, il faut une loi pour limiter les libertés publiques par un décret, un arrêté, a fortiori le règlement intérieur d'un établissement.

La grande difficulté était de concilier le principe de laïcité et celui de liberté religieuse et de liberté de conscience. C'est pourquoi le Président de la République avait indiqué dans son discours de décembre que le port de signes religieux discrets serait permis.

Ce texte ne résout pas tous les problèmes, mais nous n'en avions pas l'ambition. Convaincus de la force de la loi, nous sommes aussi conscients de ses limites. Aussi, après un dialogue en commission des lois entre le groupe de l'UMP et le groupe socialiste, nous avons convenu que dans un an un bilan serait dressé ; nous examinerons les contentieux et en tirerons les conséquences. Je tiens à remercier le Président Ayrault et René Dosière avec lesquels nous avons pu faire en sorte que ce texte soit commun à la majeure partie de notre assemblée. Je remercie également René Dosière et Gérard Léonard de nous avoir aidés à faire passer le dialogue avant toute sanction. Le texte qui vous est proposé est aujourd'hui celui de tous les républicains...

M. Alain Bocquet - Nous sommes tous aussi républicains !

M. le Rapporteur - ...qui ont le devoir de le voter, car il exprime la volonté de défendre une communauté nationale unie dans sa diversité autour des valeurs de la République, la liberté dans l'égalité pour la fraternité (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Jean-Michel Dubernard, président et rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales - Nous avons vécu un grand moment politique, et je remercie le Président Debré d'avoir laissé le débat suivre son cours. En commission, j'avais engagé mes collègues à exercer un suivi de la loi et je leur donnais rendez-vous dans un an pour en examiner l'impact. Je suis donc satisfait de l'amendement voté à ce sujet.

En cet instant, j'ai une pensée particulière pour les Français issus de terres d'islam. Qu'ils croient ou qu'ils ne croient pas, leur silence a été leur laïcité. Je les en remercie, d'autant qu'en hésitant sur les principes, nous avions exposé une immense majorité silencieuse à l'amalgame et à la suspicion. Nous n'oublierons pas l'intervention de haute volée de Mansour Kamardine qui nous a si bien montré comment concilier islam, laïcité et valeurs républicaines.

Les Français ont découvert que la laïcité était fragile, alors qu'ils n'ont plus le c_ur à ferrailler avec les religions pour qu'elles se tiennent à leur place. Après le Président de la République, l'Assemblée donne un signal fort en réaffirmant que notre vieux peuple ne veut plus entamer de guerre de religion. Par ces temps de violence dans nos villes comme à Jérusalem, il sait que l'on ne peut pas jouer sans risque avec les grands principes.

M. le Président - Nous en venons aux explications de vote.

EXPLICATIONS DE VOTE

M. Alain Bocquet - Dans ce débat, plus long que celui que vous prévoyez en juillet pour démanteler la Sécurité sociale par ordonnances (Exclamations sur les bancs du groupe UMP), les députés communistes et républicains ont exprimé en conscience leurs convictions personnelles.

Tous ont défendu la laïcité, en dignes héritiers d'Etienne Fajon, qui fit introduire ce concept dans notre Constitution. Tous l'ont lié aux principes fondateurs de la République. Tous ont dénoncé les coupes des budgets sociaux pour 2004 et l'insuffisance des crédits de l'éducation nationale pour assumer ses missions. Tous ont rappelé que l'exclusion est mère de tous les intégrismes. Tous ont réitéré leur détermination à lutter pour les droits et la dignité des femmes.

Ils ont dit combien le sujet était difficile et controversé alors que l'ascenseur social ne fonctionne plus, tandis que le chômage augmente - de 8 % pour les jeunes l'an dernier - , comme les profits boursiers (« Ah ! » sur quelques bancs du groupe UMP).

Ils ont dit aussi que la République n'était pas à la hauteur et que - les amendements en témoignent - dialogue et concertation devaient primer sur les interdits.

Certains ont évoqué une loi « boomerang » pouvant nourrir les racismes, les replis identitaires et les fondamentalismes ; d'autres ce « vivre ensemble républicain » qui est le grand oublié du projet ; d'autres encore, la nécessité d'éradiquer la misère endémique de la jeunesse dans cette société du tout-business. Tous ont rappelé que la laïcité est la « balise cardinale » des valeurs républicaines.

Les députés communistes et républicains exprimeront des votes différents. Un tiers votera pour et la majorité, dont je suis, votera contre (Exclamations sur les bancs du groupe UMP).

Il faudra vous habituer au fait que le groupe communiste est le seul qui ait la liberté de vote ! (Rires sur de nombreux bancs)

La situation ne pourra être modifiée durablement avec cette petite loi inapplicable. Au lieu de calmer le jeu, ne risque-t-elle pas plutôt de mettre le feu ? Comme vous avez chassé des établissements scolaires des milliers d'aides éducateurs et comme vous vous apprêtez à exclure des enseignants en supprimant des postes, vous ne craignez pas de fermer la porte à des jeunes filles précisément ciblées (Protestations sur les bancs du groupe UMP). Vous avez pensé aux prochaines élections plutôt qu'à l'avenir des jeunes générations.

Pourtant, le centenaire de la loi de 1905 était l'occasion d'un grand débat et d'une grande loi qui auraient témoigné de votre ambition pour l'école.

M. Bernard Carayon - Qu'avez-vous fait, pendant vingt ans ?

M. Alain Bocquet - Votre projet discrimine plus qu'il n'intègre. Il stigmatise une partie de notre population et ne donne en définitive qu'un faible écho aux propositions de la mission Stasi et de la mission parlementaire.

Nous redoutons que ce projet ne soit rapidement rangé au nombre des occasions manquées par la République pour rassembler tous les citoyens de France. Une grande loi laïque, moderne, républicaine, reste à faire (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains).

M. Jacques Barrot - Ce long débat nous a mobilisés pendant une vingtaine d'heures, dans une discussion que vous avez souhaité, Monsieur le président, aussi ouverte que possible. Nous vous en remercions.

Notre débat fut digne, à la hauteur des enjeux : la liberté de conscience, l'égalité entre hommes et femmes, la nécessaire séparation du politique et du religieux ; le refus de dérives inacceptables propres à susciter l'antisémitisme, le révisionnisme et le racisme. Ces valeurs fondent la République, et nous nous devons de les faire partager par la jeune génération.

Certes, d'autres démocraties semblent prendre leur partie du communautarisme alors que la France, au contraire, veut faire vivre ensemble tous ses citoyens. La communauté nationale se doit d'exiger de chacun le respect de l'autre pour protéger le droit de tous à la différence. En effet, la laïcité, c'est d'abord le respect (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Nous encourageons, avec cette loi, les parents et les éducateurs soucieux de former les consciences dans la liberté et la tolérance. En même temps, nous adressons une mise en garde à ceux qui voudraient empêcher l'école d'être le creuset de l'intégration et de l'égalité des chances.

Le texte est sobre, concis. Nous tournons ainsi la page d'une jurisprudence hésitante. Désormais, les chefs d'établissement et les professeurs sauront que leur refus d'admettre un élève ne pourra tomber sous la sanction d'un juge.

Cette loi d'apaisement pose également des limites au prosélytisme en permettant par ailleurs l'affirmation discrète de l'appartenance religieuse. Elle ne combat pas les religions mais les protège en permettant à leurs fidèles de vivre ensemble.

Elle devra être appliquée dans le dialogue, avec délicatesse et intelligence. La menace de l'exclusion est une dissuasion.

Plus généralement, elle prend valeur d'engagement en faveur de l'intégration et de l'égalité des chances. En effet d'insupportables discriminations existent. Il ne faut pas seulement affirmer les valeurs de la République : il faut les faire vivre grâce à des mesures concrètes dans l'entreprise, dans la cité. Le débat de ce matin a tracé des pistes. Le Gouvernement a déjà pris des engagements.

Le groupe UMP, dans sa très grande majorité, votera cette loi de fermeté et d'ouverture qui réaffirme les valeurs de la République : l'égalité des chances dans une France tolérante et pluraliste (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Jean Glavany - Il n'y a pas, Monsieur le président de la commission, les bons républicains qui votent la loi, et les mauvais qui ne la votent pas. Si la laïcité c'est le respect des différences, respectez la nôtre (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe UDF).

Nous devons cultiver le doute et faire preuve de modestie.

Cette loi était devenue nécessaire car un certain nombre de problèmes se posent dans des établissements, la communauté éducative nous a de plus adressé un appel pressant, enfin, l'offensive de certains milieux intégristes, certes limitée, a néanmoins défié la République.

Les socialistes ont donc abordé ce débat dans un esprit responsable et constructif.

La loi est protectrice pour les enfants, qui doivent être égaux dans une classe et dont les consciences doivent être protégées des influences religieuses.

La loi est émancipatrice pour les jeunes filles qui doivent accéder à l'égalité, pour celles qui ne portent pas le voile et qui nous demandent de les aider.

Les socialistes ont déposé trois amendements. Le premier visait à ce que le titre de la loi ne fasse pas référence à la laïcité, qui ne se limite pas à l'interdit. Nous avons été entendus.

Le deuxième tendait à ce que le dialogue, préalable à toute sanction, soit inscrit dans la loi. La mission de la République, en effet, n'est pas d'exclure, mais d'intégrer. Nous avons également été entendus.

Le troisième tendait à remplacer « ostensibles » par « visibles », comme l'avait souhaité la mission parlementaire. En effet, les professeurs, dans leur grande majorité, veulent une règle simple alors que, dans un souci de compromis avec des forces qui ne sont pas représentées ici, vous avez tenu à ce que les signes religieux discrets soient autorisés.

M. le Président de la commission - Ce n'est pas le problème.

M. Jean Glavany - Qui jugera de leur caractère discret ? Les chefs d'établissement refusent précisément les appréciations à géométrie variable.

Voilà pourquoi, même si nous apprécions que vous ayez retenu la proposition d'une évaluation à un an, nous exprimons un doute sur l'efficacité de la loi.

Les débats ont permis des échanges fructueux et une notable amélioration du texte, que le groupe socialiste votera donc. Mais notre « oui » sera vigilant et exigeant, car il ne s'agit pas d'un débat ponctuel, clos après ce vote. Les replis communautaristes qui nous inquiètent ont un fondement précis, et connu : ce sont les inégalités, l'exclusion et les lacunes de notre système d'intégration. La laïcité, c'est un combat constant pour la République sociale, et ce combat-là ne cessera pas avec ce vote.

Notre exigence et notre vigilance s'exerceront aussi contre les discriminations, quelles qu'elles soient - raciales, sexistes ou territoriales - et dans ce combat aussi nous redoublerons d'ardeur.

Et encore : la laïcité est confrontée au pluralisme religieux, et la République doit donner à l'islam, la deuxième religion de France, les mêmes droits et les mêmes devoirs qu'aux autres cultes ; chacun le sait, nous sommes loin du compte...

Il reste, enfin, à renforcer l'enseignement de la laïcité, par une pédagogie adéquate. Nous avons, à cette fin, proposé l'élaboration d'une charte de la laïcité, et nous attendons de savoir quelle suite sera donnée à cette proposition.

On l'aura compris : nous nous rejoignons aujourd'hui, mais il n'est pas dit que nous ne divergerons pas demain. Pour le groupe socialiste, la laïcité, c'est le « vivre ensemble dans la République », avec ces différences qui font notre richesse commune mais qui ne doivent jamais dicter leur loi. Il y faut un engagement sans faille, vigilant et exigeant. Ce sera le nôtre (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Nicolas Perruchot - Sur un sujet aussi personnel, une position de groupe aurait été absurde, et le groupe UDF, comme il le fait toujours, laisse à ses membres toute liberté de voter en conscience (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF). Certains voteront donc en faveur de ce texte, pour témoigner leur attachement au principe de la laïcité, que nous ne concevons pas comme un outil de combat mais comme une marque de tolérance et de respect d'autrui. Nous refusons tous le port de signes religieux ostensibles à l'école, mais une majorité d'entre nous considère que ce texte n'était pas indispensable. De plus, la question du voile aurait mérité d'être abordée d'une manière plus globale, en ce qu'il s'agit d'un élément de sujétion des femmes. Il n'en reste pas moins que le législateur est confronté à la demande d'enseignants désemparés et de jeunes filles qui refusent de porter le voile. A cet égard, le texte est plein de bonnes intentions ; seulement, nous sommes certains qu'il ne sera pas applicable, et qu'il ne réduira pas les contentieux. Or, nous n'avons pas été élus pour rédiger des textes déclamatoires et nous savons tous, pour avoir lu Montesquieu, que les lois inutiles affaiblissent les lois nécessaires. Cela vaut particulièrement pour ce texte si bref que rien n'y est dit de l'intégration. Il nous semble dangereux de sembler ainsi construire une politique d'intégration sur un interdit.

C'est pourquoi la majorité du groupe UDF, redoutant le réveil des querelles religieuses et l'exacerbation des tensions communautaires, s'abstiendra (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF).

A la majorité de 494 voix contre 36, sur 561 votants et 530 suffrages exprimés, l'ensemble du projet de loi est adopté.

M. le Premier ministre - Je me félicite que ce dossier difficile ait donné lieu à un dialogue républicain au terme duquel chacun a exprimé un vote respectable.

Je suis convaincu qu'au terme de ce débat, ce texte et ce vote, par son amplitude, renforcent la laïcité et la République (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

La séance, suspendue à 16 heures 50, est reprise à 17 heures 10, sous la présidence de M.Baroin.

PRÉSIDENCE de M. François BAROIN

vice-président

COMMUNAUTÉS AÉROPORTUAIRES

L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par le Sénat, portant création des communautés aéroportuaires.

M. François-Michel Gonnot, rapporteur de la commission des affaires économiques - Nous sommes saisis cet après-midi de la proposition de loi du sénateur Jean-François Le Grand visant à créer les communautés aéroportuaires. Cette initiative parlementaire est le fruit d'un long travail, M. Le Grand ayant été missionné par le Gouvernement pour réfléchir aux retombées économiques et fiscales de l'activité aéroportuaire pour les communes sous influence de grands aéroports. Les communautés aéroportuaires qui verront le jour très prochainement ne constituent cependant qu'une étape. S'agissant des relations entre les riverains et les pouvoirs publics, le Gouvernement s'attache en effet à conduire une politique ambitieuse et novatrice...

Mme Odile Saugues - Avec de bien maigres résultats !

M. le Rapporteur - Dans le cadre du rapport que nous avait confié le Président Ollier sur l'avenir du transport aérien et des plates-formes aéroportuaires, nous avons, avec Yannick Favennec, constaté l'état catastrophique des relations entre les riverains et les pouvoirs publics en région Ile-de-France. Sans doute faut-il y voir le résultat d'années de promesses non tenues et d'illusions savamment entretenues, en particulier sous la dernière législature !

M. Francis Delattre - C'est vrai !

M. Jean-Pierre Blazy - Et ça va continuer !

M. le Rapporteur - La mission que nous avons conduite avait mis en évidence la nécessite de conclure un nouveau contrat de confiance avec les franciliens. A ce titre, nous avons proposé de doter l'autorité aéroportuaire d'un nouveau statut et de modes de financement rénovés. Nous avons aussi préconisé d'informer les riverains de la manière la plus transparente, d'internaliser les coûts environnementaux en modulant les taxes d'aéroport, de mettre en place des procédures de moindre bruit innovantes, d'améliorer le dispositif d'aide à l'insonorisation, de limiter l'urbanisation à proximité des aéroports et de mieux répartir les retombées fiscales de l'activité aéroportuaire. C'est sur ce dernier point que le sénateur Le Grand a été mandaté, sa réflexion l'ayant conduit, à l'automne dernier, à déposer devant le Sénat la proposition visant à créer une nouvelle catégorie d'établissement public administratif portant le nom de « communauté aéroportuaire ».

Monsieur Bussereau, je tiens à vous remercier de l'attention que vous avez portée, avec M. de Robien, aux propositions de notre mission depuis plus de huit mois.

Quelques rappels sur le poids économique du transport aérien. Celui-ci a connu une croissance annuelle de 6,5 % ces trente dernières années. Il représente en Ile-de-France un chiffre d'affaires de 35 milliards d'euros, soit 11 % du PIB régional. Quant à ADP, il emploie 100 000 personnes, soit environ 2 % de l'emploi total dans la région. Le nombre d'emplois, directs et indirects, induit par chaque millier de passagers est lui aussi considérable. Ce sont là les retombées positives du transport aérien, dont nous savons combien le dynamisme est important, en particulier pour l'Ile-de-France. Son développement n'en doit pas moins avoir lieu dans des conditions acceptables pour les riverains.

Les futures communautés aéroportuaires, que la proposition de loi du sénateur Le Grand propose d'instituer, seront des lieux des concertation et de dialogue d'où devrait naître une meilleure « gouvernance » des territoires proches d'un aéroport. Leur vocation sera triple : traiter, avec les acteurs concernés, les questions d'environnement et de qualité de la vie ; faire bénéficier plus largement les populations riveraines des retombées économiques de l'activité aéroportuaire ; constituer une source d'information fiable pour la population. Ce texte, très attendu, répond à des préoccupations exprimées depuis longtemps.

Certains collègues, tant ici qu'au Sénat, ont cru y voir un désengagement de l'Etat. Or, c'est tout l'inverse. La communauté aéroportuaire sera créée à l'initiative du représentant de l'Etat, dans un cadre juridique défini par l'Etat, et dotée de moyens qui devraient s'accroître de manière considérable.

M. Jean-Pierre Blazy - Alors çà !

M. le Rapporteur - Un aéroport ne doit plus être un enfer pour ses riverains. Il ne doit pas non plus être considéré comme une panacée pour l'activité économique et les recettes qu'il génère. Des dialogues nouveaux sont nécessaires entre tous les acteurs concernés. Les communautés aéroportuaires en seront précisément le lieu (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire - Le sujet dont nous traitons aujourd'hui revêt une importante toute particulière pour notre commission de par ses implications économiques, sociales et environnementales. Contrairement à ce que certains peuvent penser, c'est précisément parce que nous sommes soucieux de transparence et de dialogue que nous souhaitons mieux associer les riverains à la politique aéroportuaire.

Notre commission avait d'ailleurs confié précédemment un rapport à François-Michel Gonnot sur la gestion des plates-formes aéroportuaires et l'avenir de ce secteur. Les propositions de ce rapport, rendues publiques récemment, ont recueilli l'approbation du Gouvernement et devraient, pour certaines d'entre elles, être prochainement mises en _uvre, concernant notamment l'Ile-de-France. Et en ce domaine, la transparence dans les initiatives importe tout autant que les initiatives elles-mêmes.

M. Eric Raoult - Très bien ! 

M. le Président de la commission - Les communautés aéroportuaires que cette proposition de loi propose d'instaurer répondent au souci de dialogue et de concertation si souvent exprimé. Elles permettront, j'en suis convaincu, d'assurer une plus grande transparence des arbitrages rendus et de mieux associer la société civile en amont des décisions. D'une façon plus générale, elles participeront de la mise en _uvre du principe de précaution en matière environnementale, voulue par le Président de la République.

En prévoyant que les communautés aéroportuaires devront soutenir les projets visant à limiter les atteintes à l'environnement et à la qualité de vie, favoriser l'accès des riverains aux emplois et équipements collectifs des plates-formes et développer l'information sur l'impact des activités aéroportuaires, ce texte relève le triple défi économique, social et environnemental qui se pose à nous.

Un aéroport est inévitablement source de pollution, sonore et atmosphérique. Il importe donc d'évaluer en amont les conséquences en matière de santé et de qualité de vie pour les riverains de toute nouvelle implantation, comme de toute extension ou réorganisation. Mais un aéroport est aussi souvent un poumon économique. Comment concilier les deux aspects ? Là est bien le problème. La communauté aéroportuaire sera précisément le lieu de débat permettant d'aboutir à des décisions à la fois plus efficaces sur le plan économique et plus respectueuses de l'environnement.

Mme Odile Saugues - Avec quels moyens ?

M. le Président de la commission - Les richesses générées par l'activité d'un aéroport doivent bénéficier en priorité à ses riverains : c'est même indispensable pour les « réconcilier » avec ce dernier. Les mesures aujourd'hui proposées le permettent.

En région parisienne, les nuisances sonores liées au trafic aérien sont, si j'ose dire, extrêmement bien réparties. Les changements de couloirs aériens auxquels il a été procédé depuis quelques années ont conduit à ce qu'un nombre croissant de Franciliens subissent des nuisances de plus en plus insupportables. Il y aurait beaucoup à dire sur les méthodes utilisées par le passé ! Il faut aujourd'hui, Monsieur le ministre, prendre des mesures énergiques pour réduire ces nuisances. Le département des Hauts-de-Seine, et ma commune de Rueil-Malmaison, les subissent aussi, contrairement à ce que l'on pourrait penser, et ce n'est pas M. Baguet qui me contredira pour Boulogne...

Il faut donc voter cette proposition de loi, sans néanmoins trop « charger la barque » car ce texte doit être appliqué rapidement pour être pleinement efficace. Il nous permettra, en toute transparence, de mieux gérer nos aéroports tout en luttant plus efficacement contre les nuisances subies par les riverains (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Eric Raoult - Excellente intervention !

M. Guy Drut - Si le développement du trafic aérien a eu des retombées économiques positives considérables, il a parallèlement entraîné des nuisances de plus en plus insupportables. Le Gouvernement cherche, par la création de communautés aéroportuaires, à surmonter cette contradiction.

Des mesures ont déjà été prises ces derniers mois pour réduire les nuisances sonores liées au trafic aérien en Ile-de-France...

M. Jean-Pierre Blazy - Avec quel effet sur le terrain ?

M. Guy Drut - Je connais moi aussi le terrain. Des mesures ont aussi été prises pour améliorer la transparence des décisions vis-à-vis des élus et des riverains.

Il est en effet inconcevable que des Franciliens, même habitant loin d'un aéroport, soient littéralement privés de jardin. La tranquillité n'a pas de prix. Si l'offre de transport doit être suffisante - nous aimons tous prendre l'avion mais n'aimons pas les entendre au-dessus de nos têtes ! -, il importe de ne pas privilégier les retombées économiques au détriment de la qualité de vie.

Assurer, en toute transparence, l'information des riverains et des élus sera l'une des missions essentielles des communautés aéroportuaires : trajectoire précise des aéronefs, mesures de bruit autour des aéroports, suivi des sanctions administratives à l'encontre des compagnies en infraction...

La vertu incontestable de ce texte réside dans la mission qu'il assigne aux communautés aéroportuaires d'organiser par le dialogue et la concertation une nouvelle forme de gouvernance territoriale, afin de corriger les atteintes à l'environnement, de faciliter aux riverains l'accès aux emplois et aux équipements collectifs des plates-formes aéroportuaires, et d'assurer l'équilibre entre nuisances sonores et retombées économiques.

Outre le collège des collectivités territoriales et celui des entreprises bénéficiant de l'activité aéroportuaire, qui composeront le conseil d'administration des communautés, intéressons-nous aux riverains. Qui sont-ils ? Selon quels critères seront-ils répertoriés ? On peut s'en tenir à un critère géographique. On peut aussi faire intervenir des critères plus subjectifs, mais importants, par exemple le lieu de résidence de populations plus éloignées mais qui travaillent sur la plate-forme, ou encore des populations intéressées bien que non riveraines de ces zones. Une chose est sûre : pour établir une vraie concertation, il faut y associer en permanence toutes les parties prenantes, y compris les associations, de riverains comme d'élus locaux ; il en est beaucoup en Seine-et-Marne, très actives et objectives. J'insiste sur la participation, qu'elle soit décisionnelle ou consultative, de toutes les parties prenantes ; sans elle le texte perdrait tout son sens. On pourrait en effet regretter que les riverains et les associations représentatives n'occupent pas une place suffisance dans le dispositif, avec de simples postes d'observateurs dans les conseils d'administration. Mais qu'importe si, dans les faits, leur participation est réelle, donc efficace.

Enfin, si le texte prévoit que les compagnies concernées, notamment les compagnies aériennes, mais aussi ADP, seront représentées au conseil d'administration des communautés aéroportuaires, il aurait peut-être été bon que les conseils d'administration de ces communautés soient aussi représentés dans les assemblées générales de ces compagnies (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Mme Odile Saugues - Les transports aériens ne laissent pas indifférents nos concitoyens. Outre les accidents spectaculaires que soulignent les médias, les conséquences de ces transports sur nos conditions de vie sont au c_ur des préoccupations des associations et des élus. Il est loin, le temps où, rien ne devant entraver la croissance économique, le souci de l'environnement était peu évoqué. Les riverains des aéroports sont attentifs à la progression des nuisances et n'acceptent plus le fait accompli.

La proposition de loi, issue de l'intéressant rapport du sénateur Le Grand, tente un rééquilibrage entre développement économique et environnement : répartition des richesses au profit des populations frappées par les nuisances, valorisation de leur cadre de vie. On ne peut qu'approuver ces objectifs, sans pour autant accepter ce qui pourrait n'être qu'un droit à polluer. L'ambition est louable, mais les moyens prévus ne sont pas à la hauteur. Nous nous interrogeons sur l'articulation de ce texte avec le projet de loi sur les responsabilités locales. Et nous déplorons la précipitation avec laquelle cette proposition est expédiée. Pris entre la décision de ne pas faire le troisième aéroport en Ile-de-France...

M. Francis Delattre - C'est une faute !

Mme Odile Saugues - ...au grand mécontentement des riverains de Roissy, et l'échéance proche des élections régionales, le Gouvernement a dû agir vite, supprimant les moyens que proposait le rapport Le Grand. Qu'est devenu le FISCA, ce fonds qui aurait donné au nouvel établissement public les moyens d'agir ? Bercy l'a exécuté. Le financement sera laissé à la générosité des partenaires, hormis le produit des amendes prononcées par l'ACNUSA. Les riverains, qui ont vu les ressources de l'ADEME diminuer de 12,5 % en 2003, ne peuvent se contenter de vagues promesses de dons. Le dernier rapport de l'ACNUSA évalue les besoins à plus d'un milliard d'euros : on ne peut donc que redouter l'impuissance du nouvel établissement à accomplir sa tâche.

Ce texte n'est donc pas synonyme de progrès pour l'environnement. Et il fera peser la gestion des nuisances aéroportuaires sur les collectivités locales, alors qu'elle devrait incomber à l'Etat. Quel sera le rôle des partenaires de la communauté aéroportuaire dans les discussions qui ne manqueront pas d'avoir lieu à la demande des compagnies à bas coût ? Quelle politique pourra être définie face à leurs exigences ? Voilà bien des questions. Ce texte, qui crée des communautés aéroportuaires sans périmètre bien défini et sans moyens suffisants ; ce texte situé à l'articulation du projet relatif aux responsabilités locales, de celui qui concerne la privatisation d'ADP, et de la modification des règles relatives à la sûreté des vols et de l'exploitation des aérodromes, crée une somme d'incertitudes, et nous sommes loin d'une grande loi aéroportuaire qui engloberait tous les aspects du problème. Le groupe socialiste regrette qu'on n'ait pas fait meilleur usage des propositions d'un excellent rapport sénatorial (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Pierre-Christophe Baguet - Chacun connaît l'ampleur du développement des activités aéroportuaires. De 1970 à 2000, les transports aériens ont connu un taux de croissance annuel de 6,5 %, passant de 460 millions de passagers transportés en 1970 à plus de 3 milliards en 2000. Cette progression est quasiment double de celle du produit intérieur français, et bien plus rapide que la croissance mondiale.

Les retombées économiques sont colossales pour les régions qui accueillent des plates-formes aéroportuaires internationales. Pour la région Ile-de-France, le transport aérien représente un chiffre d'affaires de 35 milliards d'euros, soit 11 % du PIB régional. Ses effets en termes d'emplois et de création de richesses affectent l'économie de tout un bassin. Ainsi, Aéroports de Paris emploie à peu près 100 000 personnes, soit 2 % de l'emploi total en Ile-de-France ! N'oublions pas non plus les retombées touristiques pour la France.

Mais il y a aussi la réalité environnementale. Des milliers de foyers sont exposés à des nuisances sonores insupportables. Les témoins évoquent « un bruit d'orage permanent », un sentiment d'étouffement quand, l'été, on ne peut pas ouvrir ses fenêtres...

Or, le bruit n'est pas un épiphénomène de nos sociétés. Il est la première préoccupation des Français, avant l'insécurité. Et les pouvoirs publics n'ont jamais pris la mesure de ce véritable problème de santé, qu'il serait injuste de réduire à une question de confort. C'est d'autant plus vrai que les élus, qui luttent avec leurs administrés contre le développement du trafic aérien, sont souvent les mêmes qui, par voie législative, essaient d'assouplir les règles de constructibilité dans les plans d'exposition au bruit, comme on l'a vu en première lecture du projet « urbanisme et habitat »... Aucun gouvernement ne s'est vraiment attaqué à la question, et ce ne sont pas les 55 millions d'euros du plan de lutte contre le bruit qui permettront de la résoudre.

La présente proposition de loi a le mérite d'aborder de façon pragmatique la question des nuisances aéroportuaires. L'établissement public qu'elle instaure permettra en effet de réunir tous les acteurs concernés : les gestionnaires des infrastructures, les entreprises qui bénéficient des retombées économiques et les associations de riverains. Nous disposerons ainsi d'un lieu de concertation où les problèmes à défaut d'être tous résolus, pourront être au moins débattus. Or ce point est psychologiquement très important, car la souffrance liée au bruit se double d'un grand sentiment de solitude et d'impuissance. Parions que cette nouvelle « communauté » saura traiter les problèmes. Elle donnera la parole aux associations de riverains, même si je regrette qu'elles n'aient qu'une voix consultative.

Je regrette également qu'un amendement introduit au Sénat limite la possibilité de créer ces communautés aéroportuaires aux seuls territoires environnant un aéroport éligible à la TGAP. J'ai déposé un amendement pour élargir le dispositif aux héliports à fort trafic situé dans les zones urbaines à forte densité. C'est le cas de l'héliport de Paris 15, qui connaît 12 000 mouvements par an : les nuisances engendrées par son exploitation sont subies par plusieurs dizaines de milliers de riverains.

Notre collègue Charles de Courson, qui a _uvré avec le conseil général de la Marne pour créer l'aéroport de Vatry, a aussi déposé un amendement supprimant le deuxième alinéa de l'article premier. Pourquoi, en effet, limiter ces communautés aux aéroports dits « pollueurs payeurs » alors que leurs sources de financement seront pour la plupart des cotisations volontaires ?

M. de Courson observe par ailleurs que ce sont parfois les départements, et non les régions, qui sont à l'origine de la création d'un aéroport, en particulier dans la Marne. Un autre de ses amendements a donc pour objet de permettre aux conseils généraux de proposer la création de ces communautés.

Notre ami Michel Aumas, maire d'Arnouville-lès-Gonesse, commune située dans le plan de gêne sonore de Roissy, s'inquiète pour sa part du transfert à ADP des ressources du Fonds de compensation des nuisances aéroportuaires et des dossiers de demande d'indemnisation pour l'isolation phonique des habitations, aujourd'hui traités par l'ADEME. Celle-ci a parfaitement rempli sa mission jusqu'à ce jour, alors qu'ADP, dans le passé, a pour le moins manqué d'enthousiasme dans la gestion de ces dossiers. Il ne faudrait pas qu'au sein des communautés aéroportuaires, il soit à la fois juge et partie dans leur traitement, puisque le rapporteur nous indique que c'est toujours ADP qui collectera et engagera le produit de cette taxe.

Sans entraver le fonctionnement des communautés aéroportuaires, il faut qu'elles bénéficient à toutes les victimes des nuisances aériennes. C'est donc en espérant que ses amendements et ses observations seront pris en compte que le groupe UDF votera cette proposition. Nous voulons répondre aux attentes pressantes de milliers de franciliens qui veulent pouvoir ouvrir leurs fenêtres durant les canicules à venir (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP).

M. François Asensi - Déposée au Sénat le 21 novembre 2003, adoptée le 11 décembre, cette proposition est traitée avec une diligence peu commune. Mais la précipitation est rarement bonne conseillère.

Certes, il est nécessaire d'établir une vraie coordination entre collectivités, entreprises et riverains, afin de maîtriser les nuisances tout en soutenant l'activité économique.

Maire d'une commune sur laquelle se situe un tiers de l'aéroport de Roissy, je suis le premier intéressé à ce genre de mesures. Mais est-il fondé de multiplier les textes ? Outre celui-ci, le projet relatif aux responsabilités locales transfère à des collectivités de province une centaine d'aéroports et l'article 16 du projet de loi de finances rectificatives pour 2003 remplace, à compter de 2005, la fraction de la TGAP destinée à l'insonorisation des logements de riverains des aéroports par une taxe affectée gérée non plus par l'ADEME mais par les gestionnaires d'aéroport. La philosophie est la même : toujours moins d'Etat, toujours plus de place à l'initiative privée.

Dans les communautés que vous voulez créer, les entreprises seront représentées à parité avec les collectivités locales, mais les associations de défense de l'environnement et les salariés seront sous-représentés. Il n'est plus fait référence aux commissions consultatives de l'environnement ni aux commissions consultatives d'aide aux riverains. Octroyer une voix consultative aux associations représentant ces derniers ne suffit pas.

J'espère enfin que les nouvelles structures ne seront pas un moyen pour accorder des aides déguisées aux compagnies low cost. Sans crier au loup, il ne faut pas perdre les risques de vue.

La proposition du sénateur Le Grand, sans doute ambitieuse, a été vidée de son sens par la suppression du fonds d'investissement et de services de la communauté aéroportuaire. Les ressources de celles-ci passent ainsi de 55 à 70 millions à 5,8 millions seulement. Espérer des contributions volontaires me semble relever de l'angélisme, si l'on s'en tient aux déclarations du président de l'association de concessionnaires d'ADP.

Les ressources étant taries, il aurait au moins fallu dégager les priorités à financer. J'y reviendrai dans mes amendements.

En Ile-de-France, c'est autour de Roissy qu'on a enregistré depuis dix ans le plus grand nombre de créations d'emploi, et les aéroports parisiens en regroupent 150 000, avec 11 % du PIB de la région. Pourtant, les populations riveraines ont des taux de chômage supérieurs à la moyenne nationale. En revanche, elles sont les premières à subir les nuisances. Selon l'ACNUSA, en 2002, 180 000 logements et 450 000 personnes étaient concernés par le bruit. Or en 2003, les crédits d'indemnisation ont baissé de 12,5 % par rapport à 2002, et l'augmentation de 20 millions annoncée s'est finalement réduite à 8 millions, alors que selon l'ACNUSA, les besoins d'indemnisation s'élèvent à 1,1 milliard. Pour 2004, la dotation budgétaire de l'ADEME a été réduite à la consommation des autorisations de programme déjà ouvertes et à l'achèvement des opérations en cours. Cet organisme est progressivement dépossédé de ses prérogatives au profit des gestionnaires d'aéroport, qui sont à la fois juges et parties. Les délais d'indemnisation sont désormais de trois ans ! Le trafic devant doubler à Orly et Roissy d'ici à 2015, les zones touchées ne feront que s'étendre. Aussi faut-il autoriser les organismes créés pour compenser les nuisances à emprunter afin de réduire ces délais d'indemnisation.

Je propose également de mettre en place une fiscalité négative et d'indemniser les collectivités en fonction des programmes immobiliers qu'elles avaient pu entreprendre dans les zones touchées, et qu'on ne peut abandonner. Il faut aussi valoriser leurs atouts notamment par la formation et l'information.

Enfin, mettons fin à une idée reçue, si l'on veut prendre l'argent là où il est : dans les communes où est installé Roissy, le revenu moyen par habitant est de 8 171 € ; il est de 18 512 € dans le « pentagone d'or » de Courbevoie, Puteaux, Suresnes, Rueil-Malmaison et Neuilly. Cette zone de La Défense a perçu 2,2 milliards de taxe professionnelle en 2002, contre 622 millions pour celle de Roissy, le produit des autres taxes locales est respectivement de 277 et 106 millions, la moyenne des recettes de fonctionnement par habitant de 1 912 € et de 790 €. Alors, si vous cherchez de l'argent en Ile-de-France, ne regardez pas vers la Seine-Saint-Denis, mais plutôt vers les Hauts-de-Seine.

Pour en revenir aux communautés aéroportuaires, la suppression de l'essentiel de leurs ressources a rendu cette proposition illusoire. Nous ne pouvons la soutenir (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste).

M. Eric Raoult - Il y a au moins une communauté qui unit déjà les gens qui vivent autour des aéroports, c'est celle des nuisances.

M. Jean-Pierre Blazy - Oui.

M. Eric Raoult - Elle est ancienne, nous la reconnaissons aujourd'hui grâce à cette proposition que, avec de nombreux élus d'Ile-de-France, nous attendions depuis longtemps. Elle est issue du rapport du sénateur Le Grand et des travaux de la mission d'information de notre rapporteur, François-Michel Gonnot. Elle vise à créer un nouvel établissement public administratif pour trouver un équilibre global dans le dialogue et la transparence.

Pendant longtemps, la politique aéroportuaire a donné lieu à une confrontation entre les acteurs, sans que ceux qui, chaque jour, entendent passer les avions au-dessus de leurs têtes aient toujours la parole. Or, d'ici à 2020 il faudra accueillir 80 millions de passagers supplémentaires et le trafic va doubler.

Il faut prévoir cette évolution en prenant en compte plusieurs exigences. Il y a d'abord celle du développement économique des territoires, car les retombées fiscales et pour l'emploi sont positives - pas pour toutes les collectivités d'ailleurs. Il y a ensuite l'environnement : selon une étude de Airparif, Roissy pollue autant que le périphérique parisien, mais essentiellement au détriment de la Seine-Saint-Denis.

M. Jean-Pierre Blazy - Et du Val-d'Oise.

M. Eric Raoult - De la Seine-Saint-Denis selon cette étude.

Il y a ensuite une exigence de sécurité, et je me réjouis de la création d'une mission d'information sur la sécurité du transport aérien de voyageurs dans notre assemblée. Il y a enfin le problème des nuisances sonores pour les riverains. J'ai à l'oreille le bruit des avions qui survolent les communes de ma circonscription et j'ai bien peur que la Seine-et-Marne, le Val-d'Oise et les Yvelines n'aient su mieux se défendre lors de la modification des couloirs aériens. Il faudra y revenir. En Seine-Saint-Denis, ces nuisances touchent les familles dans leur patrimoine, avec la dépréciation des logements, dans leur santé, dans leurs conditions de vie. A titre d'anecdote, avec des riverains nous avions un jour relevé les heures exactes de passage de trois avions. A la maison de l'environnement, on nous a répondu qu'il n'y avait pas eu d'avion ce jour-là... Dans le passé, on a apporté quelques réponses avec des aides au logement, des mesures de sécurité et une meilleure maîtrise de l'urbanisme.

Mais les mettre en pratique, c'est aussi donner la parole aux riverains, qui n'habitent pas toujours des communes percevant la taxe professionnelle des aéroports, mais qui subissent la taxe « auditionnelle ». J'ai créé, avec plusieurs de mes collègues, une association dont le nom est : « Silence, on vit en bas » afin de lutter également contre les nuisances aériennes en Seine-Saint-Denis.

Cette proposition de loi comporte des solutions de bon sens, elle crée un lieu de dialogue et d'écoute. Nous savons d'ailleurs à quel point M. Copé s'intéresse à ce dossier. Cette mise en cohérence permettra en outre de régler les litiges en amont plutôt que d'opposer les points de vue, de chercher le consensus plutôt que d'entretenir l'affrontement, d'aboutir à des majorités de décision plutôt que de multiplier des minorités de blocage.

Le groupe UMP votera cette proposition de loi, qui permet de faire enfin ce qui n'a pas été fait jusqu'ici (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. le Président de la commission - Très bien !

M. Jean-Pierre Blazy - L'idée de « communauté aéroportuaire » a été formulée par l'association nationale d'élus « Ville et Aéroport », lors de son audition par la mission Le Grand. La création d'une instance de concertation constitue une avancée mais les moyens prévus pour assurer son fonctionnement sont insuffisants. Pourquoi examine-t-on une proposition de loi vidée de sa « substance financière » au regard du texte initial ?

M. Francis Delattre - Malheureusement, il a raison.

M. Jean-Pierre Blazy - Si nous disons plutôt « oui » au rapport de Jean-François Le Grand, nous disons plutôt « non » à la proposition de loi de Jean-François Le Grand revue et corrigée par Jean-François Copé. Un Jean-François peut en cacher un autre ! Il s'agit-là d'un texte de circonstance électorale pour le candidat Copé, qui fait des promesses d'affichage après l'abandon du troisième aéroport par le Gouvernement.

Le 25 janvier, une manifestation a rassemblé à Paris des milliers de riverains franciliens et des élus de toutes tendances venus crier leur colère face à l'augmentation des nuisances...

M. Eric Raoult - Merci, Gayssot !

M. Jean-Pierre Blazy - ...et à l'abandon du troisième aéroport, conséquence d'une politique à courte vue.

Le gouvernement Jospin avait décidé d'implanter une nouvelle infrastructure à Chaulnes, mais M. de Robien s'est empressé d'annoncer le gel puis l'annulation des procédures déjà engagées.

M. de Robien a ensuite commandé un rapport d'information parlementaire...

M. Francis Delattre - Il a en effet commandé un rapport, je suis d'accord !

M. Jean-Pierre Blazy - ...qui a conclu à la non-opportunité du troisième aéroport. Si le constat formulé est juste, puisque la situation est qualifiée de « dramatique », la solution proposée - la création de deux nouvelles pistes à Roissy - est inacceptable.

M. le Rapporteur - Il s'agit de pistes alternatives.

M. le Président de la commission - Vous caricaturez !

M. Jean-Pierre Blazy - Ce n'est pas le hasard qui réunit une nouvelle fois le Gouvernement et le rapporteur Gonnot.

Cependant, vous avez raison, Monsieur le rapporteur : s'il n'y a pas de troisième aéroport, il faudra de nouvelles pistes à Roissy. Mais le Gouvernement jure ses grands dieux : « Il n'y aura jamais de cinquième piste » ! Vous ne serez peut-être plus ministre, Monsieur Bussereau, lorsque l'un de vos successeurs devra choisir l'inacceptable.

Tous les observateurs annoncent 140 millions de passagers sur les plates-formes parisiennes en 2020, contre 71 millions actuellement. Le trafic s'établirait entre 990 000 et 1 250 000 mouvements par an et 930 000 si l'on parvenait à optimiser l'emport moyen des avions d'ici 2020. Il faut donc repenser très vite le mode de développement du transport aérien en intégrant les contraintes d'environnement et de sécurité. Je constate à ce propos que vous n'avez pas appliqué le principe de développement durable voulu par le Président de la République. En fait vous pratiquez la politique du laisser aller, laisser faire...

M. le Rapporteur - C'est exactement l'inverse.

M. Jean-Pierre Blazy - ...qui vous conduit à privatiser Air France et, demain, Aéroports de Paris.

Les riverains franciliens comme ceux de province refusent d'être sacrifiés. Ils n'attendent pas seulement de l'argent, mais moins de bruit et de nuisances ! Le gigantisme aéroportuaire et la centralisation parisienne doivent être corrigés.

M. Eric Raoult - Que ne l'avez-vous fait ?

M. Jean-Pierre Blazy - Après avoir annoncé l'existence d'un troisième aéroport à Amsterdam, lors de la fusion entre Air France et KLM, vous parlez à présent de « troisième réseau aéroportuaire ». Monsieur le ministre, on a du mal à comprendre. Celui-ci reposerait sur le développement de plates-formes existantes en région, parallèlement à celui des plates-formes parisiennes. Mais la logique du « hub » rend impossible le développement d'un troisième réseau aéroportuaire autour de Beauvais, Vatry et Châteauroux. Il faut donc à la fois concevoir un bipôle aéroportuaire francilien avec Roissy et un site distant de quelques dizaines de kilomètres au nord ou à l'est, encourager le développement mesuré de quelques plates-formes régionales, parier sur l'intermodalité avec le TGV et très vite utiliser Vatry pour le fret de nuit.

L'aéroport de Vatry constitue en effet une solution immédiatement opérationnelle. Or le CIADT du 18 décembre 2003 n'en a pas fait mention et aucun calendrier précis n'est communiqué.

J'en viens au texte lui-même. Il a été inscrit très vite à l'ordre du jour.

M. le Rapporteur - C'est formidable.

M. Jean-Pierre Blazy - Mais sa version initiale a été vidée de l'essentiel de son contenu. Le rapport Le Grand allait pourtant dans le bon sens. Les montants prévisionnels, en rythme de croisière, étaient estimés entre 55 et 70 millions annuels pour Roissy, et de 25,5 à 37,5 pour Orly. Les deux nouvelles taxes qui devaient abonder le FISCA permettaient de dégager 30 à 35 millions d'euros pour Roissy et de 15 à 19 millions pour Orly, soit la moitié de la ressource. L'autre moitié est composée de ressources existantes.

Le gouvernement Jospin avait créé pour Roissy et Orly un fonds de compensation des nuisances sonores aéroportuaires, alimenté à parité par une contribution d'Aéroports de Paris et par l'écrêtement des fonds de péréquation de la taxe professionnelle. Les communes bénéficiaires sont celles concernées par les Plans de Gêne Sonore et ce dispositif fonctionne depuis 2000. De plus, l'ACNUSA, autorité indépendante, a été créée en février 2000 et le fonctionnement des instances consultatives locales grandement amélioré.

Les outils sont donc en place, il s'agit de les améliorer.

M. le Rapporteur - D'augmenter l'impôt !

M. Jean-Pierre Blazy - Il est essentiel de confier à la taxation ce rôle important de régulation et de compensation. La pollution et les nuisances sonores liées au trafic aérien doivent être prises en compte dans le calcul de toutes les taxes. Du reste, M. Le Grand avait retenu l'idée de la taxation additionnelle à la TNSA dans le cadre du Fisc A, désormais supprimé - car tel est bien le sens de la formule « le cas échéant » à l'article 5.

La proposition de taxer les entreprises a été remplacée par des contributions « volontaires » auxquelles M. Le Grand lui-même ne croit pas puisqu'il les qualifie d'« idylliques ». Finalement, seules les collectivités locales seront tenues de financer les projets de la communauté aéroportuaire par l'intermédiaire des fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle. C'est inacceptable.

Comment les élus pourront-ils gérer un dispositif sans disposer de ressources suffisantes pour répartir les retombées économiques sur un territoire qui devrait comprendre avant tout les communes incluses dans les PGS ? Nous sommes favorables au principe de la Communauté aéroportuaire, mais pas à la communauté aéroportuaire virtuelle. Monsieur le rapporteur, j'espère que votre mission ne se bornera pas à refuser les amendements que l'on vous proposera pour parvenir à un vote conforme et hâter la promulgation de la loi à des fins purement électorales (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

M. le Rapporteur - Je peux vous rassurer. Nous faisons la loi, pas les élections.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat aux transports et à la mer - Il a vraiment mauvais esprit !

Mme Geneviève Colot - Le poids économique du transport aérien qui se développe constamment est incontestable - tout comme son impact sur l'environnement dans des périmètres de plus en plus larges. Parfois, les nuisances atteignent un niveau qui n'est plus supportable. Nous devons donc trouver les moyens d'un développement compatible avec la qualité de l'environnement, pour concilier essor économique et qualité de vie. Les communautés aéroportuaires dont le sénateur Le Grand propose la création contribueront à répondre aux aspirations légitimes des populations riveraines, qui souhaitent bénéficier des retombées économiques de l'activité aéroportuaire tout en étant protégées des nuisances, bien réelles.

De fait, les avions sont trop bruyants autour des aéroports mais la proposition n'aborde que très peu cet aspect des choses. Des mesures doivent pourtant être prises tant pour améliorer la connaissance du trafic que pour réduire le bruit des aéronefs et pour sanctionner rigoureusement les contrevenants.

Aéroports de Paris avait élaboré un outil particulièrement performant destiné à informer objectivement la population sur les trajets des avions mais ce projet a été abandonné pour des raisons de sécurité. Les communautés aéroportuaires devront donc être les destinatrices naturelles d'informations honnêtes et incontestables.

S'agissant de la réduction du bruit, il convient de travailler à la fois sur les avions eux-mêmes et sur les technique de vol. On se félicitera que le Gouvernement ait interdit l'accès des aéroports aux aéronefs les plus bruyants, mais de trop nombreuses dérogations nuisent à la crédibilité de cette politique. Il faut tendre, dans les meilleurs délais à l'interdiction complète des dérogations. Quant aux modifications des techniques de vol, elles sont contrariées par des réticences tenaces. Une volonté politique déterminée est indispensable pour réviser certains principes trop souvent considérés comme définitifs car les intérêts catégoriels doivent être dépassés au bénéfice de la sécurité et de la tranquillité des populations survolées. A cet égard, le respect des altitudes réglementaires est primordial, et il faut tendre à l'élévation substantielle des plafonds.

Enfin, les sanctions appliquées à ceux qui contreviennent aux règles de navigation aérienne doivent être dissuasives. Autrement dit, leur montant doit être significativement réévalué, et les recettes ainsi dégagées doivent bénéficier aux populations victimes des nuisances.

La proposition qui nous est soumise doit être respectée par tous, dans l'intérêt de tous. Si tel est le cas, les communautés aéroportuaires seront un instrument utile, permettant que les communes ne s'opposent plus avec pour seul objectif de faire que les avions passent au-dessus de la tête des voisins... (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. François Scellier - Dans le Val d'Oise, on est très attentif à la législation relative à l'activité aéroportuaire. Les élus ont convenu que la proposition de loi constitue un progrès réel en inscrivant l'exploitation des aéroports dans une perspective de développement durable et en traduisant, sur le plan législatif, une réflexion menée depuis dix ans, notamment par les élus locaux.

Toutefois, le texte demeure incomplet ; la proposition est d'ailleurs en retrait sur le rapport du sénateur Le Grand. C'est pourquoi je défendrai quelques amendements tendant à la compléter, de manière qu'elle soit mieux perçue par la population et ses élus.

Il nous faudra en particulier assurer la cohérence entre les divers périmètres existants et le futur périmètre de la communauté aéroportuaire. Il conviendra aussi, pour respecter le principe démocratique selon lequel « qui paye décide », de donner voix délibérative aux seules entreprises appelées à contribuer obligatoirement au développement des territoires concernés. Il faudra encore définir en loi de finances un dispositif permettant de dégager au bénéfice de ces territoires des ressources bien supérieures, sans accroître la pression fiscale mais en améliorant la ventilation des retombées économiques du trafic aérien. Surtout, nous devrons garantir l'équilibre financier des opérations engagées par les communes aujourd'hui bénéficiaires du fonds de compensation des nuisances.

M. Jean-Pierre Blazy - C'est exact.

M. François Scellier - La proposition peut contribuer à réconcilier économie et environnement, riverains et gestionnaires des aéroports, mais elle ne suffira pas à éviter des nuisances que les riverains ne sauraient supporter indéfiniment. Nous persistons donc à penser que l'étude et la réalisation d'un troisième aéroport ne peuvent être définitivement écartées (Applaudissements sur de nombreux bancs).

La discussion générale est close.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat aux transports et à la mer - Je remercie votre rapporteur pour son excellent travail, ainsi que le président de votre commission et tous les orateurs. Personne ne conteste le rôle économique majeur que joue le transport aérien mais nous savons aussi qu'il est perçu comme une menace pour l'environnement et une atteinte à la qualité de vie des populations riveraines des aéroports, lesquelles aspirent, légitimement, à la réduction des nuisances. La quadrature du cercle consiste donc à concilier économie et environnement, d'autant que les populations concernées ne bénéficient pas au premier chef des retombées économiques du transport aérien ; c'est à quoi s'attache le sénateur Jean-François Le Grand.

Dès son arrivée, le Gouvernement a souhaité définir une politique de développement durable du transport aérien, sur laquelle M. de Robien a fait le point le 17 décembre en Conseil des ministres. Les orientations annoncées dès le 25 juillet 2002 tendaient à limiter la gêne sonore globale ; à réduire les nuisances nocturnes ; à garantir la transparence ; enfin, à mieux répartir les retombées mécaniques dues à l'activité aéroportuaire.

Les trois premiers objectifs ont été traduits dans les faits. Ainsi, les avions les plus bruyants n'ont plus l'autorisation de se poser à Roissy Charles-de-Gaulle, ce qui est une première en Europe. D'autre part, la réduction du trafic nocturne est engagée sur cet aéroport (M. Jean-Pierre Blazy proteste).

M. Francis Delattre - A un avion près !

M. le Secrétaire d'Etat - La Poste a réduit ses vols de 25 % entre minuit et cinq heures du matin !

M. Francis Delattre - Un seul avion de moins !

M. le Secrétaire d'Etat - Monsieur Delattre, il n'y a pas que l'Ile-de-France et il arrive à certains de vos collègues de déplorer les retards de distribution du courrier liés à un nombre restreint de rotations ! L'activité des PME peut s'en ressentir.

M. le Rapporteur - Absolument !

M. le Secrétaire d'Etat - Des volumes de protection environnementale sont définis pour Roissy et Orly, afin de vérifier que les trajectoires et procédures prescrites sont bien respectées, au départ et à l'arrivée de ces aéroports.

Mme Colot a rappelé à juste titre que nous avions stoppé le projet de suivi des trajectoires des avions en temps réel sur internet. Nous y avons été conduits pour des raisons de défense nationale, suite aux événements du 11 septembre 2001...

M. Jean-Pierre Blazy - Et depuis ?

M. le Secrétaire d'Etat - J'évoquerai ce sujet avec Mme la ministre de la défense pour voir s'il est possible de relancer cet utile projet, la conjoncture internationale ayant évolué.

Avec Gilles de Robien, nous avons donné instruction aux contrôleurs aériens de garantir bien entendu la sécurité du trafic et de veiller à sa fluidité - notamment pour éviter les retards -, mais aussi de s'assurer du respect absolu des trajectoires et d'interdire toute improvisation en la matière.

J'ai aussi demandé à la direction de la navigation aérienne d'envisager la généralisation des procédures de descente continue, telles que les pratiquent de nombreux pays, de manière à diminuer les descentes par paliers, certes plus faciles à gérer mais beaucoup plus bruyantes...

M. le Président et M. le rapporteur de la commission - Excellent !

M. Francis Delattre - C'est ce que nous demandons depuis dix ans !

M. le Secrétaire d'Etat - Eh bien, c'est parti et je vous tiendrai informés de l'évolution de ce dossier ! Mme Colot a eu raison de plaider pour davantage de sanctions. Je souhaite que l'ACNUSA soit dure et contrôle strictement le respect des trajectoires.

Quatrième objectif, une meilleure répartition des retombées économiques des aéroports. De la mission confiée à ce sujet au sénateur Le Grand est née la proposition de loi que nous examinons aujourd'hui. M. Blazy a semblé regretter que ce texte vienne en discussion aussi rapidement mais la différence entre ce gouvernement et le précédent, c'est que lorsqu'il y a urgence, il traite les problèmes... (Murmures sur les bancs du groupe socialiste)

M. Jean-Pierre Blazy - Surtout lorsque les élections approchent !

M. le Secrétaire d'Etat - Faudrait-il laisser la question en souffrance pour servir votre propre calendrier électoral ? Allez donc l'expliquer à vos électeurs !

Nous souhaitons améliorer les retombées socio-économiques des aéroports au profit des communes et des populations riveraines. Il faut en effet savoir que les taux de chômage observés dans les communes jouxtant Roissy sont supérieurs à la moyenne nationale, malgré le vivier d'emplois que représente un tel aéroport...

M. François Asensi - Eh oui !

M. le Secrétaire d'Etat - De fait, l'accès à ces emplois est souvent plus aisé pour les Parisiens que pour les habitants de la zone aéroportuaire !

Par ailleurs, les collectivités territoriales ayant engagé des opérations d'urbanisme se trouvent souvent dans l'impossibilité de les mener à bien, lorsque l'extension des plans d'exposition au bruit vient compromettre l'équilibre financier de ces programmes avec des limitations du droit à construire. La volonté de révision des plans d'exposition au bruit doit donc être réaffirmée, afin d'éviter que de nouvelles populations ne viennent s'installer dans les zones exposées. Mais il convient aussi d'éviter que les dispositions prises dans ce cadre ne conduisent à une dégradation des espaces concernés.

La proposition de loi vise clairement à remédier à ces situations en ouvrant de nouvelles possibilités d'action en faveur du développement socio-économique des territoires riverains de l'aéroport. Elle constitue donc une avancée très concrète pour leur aménagement.

Elle répond aussi au besoin de gouvernance des territoires concernés, où les problèmes posés relèvent clairement des élus des collectivités locales, mais aussi des acteurs économiques impliqués au premier chef dans l'activité aéroportuaire. La création d'une structure formalisée, bien identifiée, investie d'une telle mission de gouvernance territoriale, me paraît donc apporter une réponse adaptée.

La création de « communautés aéroportuaires » favorisera aussi un dialogue constructif entre toutes les parties. Ces établissements pourront devenir le creuset de politiques de développement socio-économique des territoires d'influence des aéroports.

Les riverains et les associations de riverains ont bien entendu leur place dans ce dispositif. Les riverains seront au c_ur des préoccupations des communautés puisque les actions qui seront menées le seront en leur faveur. Les communautés aéroportuaires auront d'ailleurs toute latitude pour les consulter et les associer, grâce à des instances de concertation ad hoc. La mobilisation de moyens financiers par voie contractuelle, prévue dans ce texte, devrait constituer un gage d'efficacité. Au-delà d'une simple péréquation, c'est par un véritable effet de levier que s'exercera l'action de ces établissements.

Comme le souligne justement le rapporteur, la création de ce véritable outil de gouvernance territoriale est de nature à favoriser la recherche de solutions consensuelles car il a vocation à devenir le lieu d'émergence de solidarités territoriales.

La création des « communautés aéroportuaires » s'inscrit dans le cadre d'une politique aéroportuaire globale. Le Gouvernement entend développer une desserte équilibrée du territoire, s'appuyant bien entendu sur les plateformes franciliennes, mais également sur le réseau des grands aéroports régionaux, comme Lyon-Saint-Exupéry ou, dans quelques années, Notre-Dame-des-Landes, et sur un troisième réseau de plateformes de taille raisonnable, existantes ou à créer.

Avec la malice que nous lui connaissons tous, M. Delattre a évoqué l'aéroport de Schipol. Vous voudrez bien noter que dans les conversations en cours entre Air France et KLM et la Commission européenne, il est envisagé de supprimer certaines liaisons redondantes. Mon image vous a peut-être choqué...

M. Francis Delattre - Elle m'a plutôt amusé !

M. le Secrétaire d'Etat - ...mais elle n'était pas aussi osée que l'on pourrait le croire, puisque je rappelle que le Thalys relie les deux aéroports...

Nous pensons également beaucoup à l'aéroport de Vatry, que M. de Courson et Mme Vautrin ont évoqué...

M. Jean-Pierre Blazy - Parlons-en !

M. le Secrétaire d'Etat - Des contacts sont en cours pour y faire venir un opérateur...

M. Jean-Pierre Blazy - FEDEX ?

M. le Secrétaire d'Etat - Il n'y a pas que FEDEX ! Vérifiez tout de même dans votre commune le nombre de gens que FEDEX fait vivre ! Le CIADT a validé l'idée qu'il faudrait relier Vatry au réseau ferroviaire, en particulier au TGV-Est. Autre plateforme formidable, Chateauroux-Déols...(Applaudissements sur les bancs du groupe UMP), ancienne base aérienne de l'OTAN remarquablement située.

S'agissant de Roissy, le Gouvernement a exclu de manière solennelle, lors du CIADT, la création d'une cinquième piste. M. Gayssot en a fait deux...

M. Jean-Pierre Blazy - Décidées par M. Juppé !

M. le Secrétaire d'Etat - Le gouvernement actuel n'en créera aucune. Pour mieux absorber la croissance attendue du trafic aérien, il faut enfin penser au développement du réseau TGV. En dehors de la voiture individuelle, les déplacements entre Paris et Marseille se font aujourd'hui à 80 % sous le mode ferroviaire. Il en ira de même de Bordeaux et Toulouse lorsque l'extension du réseau sera achevée. A terme, il faut donc bien envisager la suppression de plusieurs liaisons par vols courts courriers.

Mme Odile Saugues - N'oubliez pas l'Auvergne !

M. le Secrétaire d'Etat - Vous avez déjà un superbe Corail Téoz et il doit vous permettre de venir porter la contestation au Gouvernement dans les meilleurs délais ! (Sourires)

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement accueille très favorablement la présente proposition de loi. Nul doute que les dix aéroports concernés en tirent le plus grand profit car elle contribue à la solidarité entre les territoires à laquelle nous sommes particulièrement attachés (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. le Président - J'appelle les articles de la proposition de loi dans le texte du Sénat.

ARTICLE PREMIER

M. Jean-Pierre Blazy - Je voudrais au préalable lever une inquiétude. Est-il prévu que nous puissions amender ce texte ? Certes, il s'agit d'une proposition de circonstance mais elle a son utilité en ce qu'elle tend à réconcilier les exigences économiques et environnementales en associant de surcroît les populations riveraines.

M. le rapporteur peut-il indiquer clairement s'il sera possible d'amender ce texte ?

M. Francis Delattre - J'aurais pu m'inscrire sur tous les articles. Je ne l'ai fait que sur l'article premier. Vous me permettrez donc de m'exprimer à cette occasion sur l'ensemble du texte.

Je ne me suis jamais prononcé publiquement sur le rapport de la mission d'information parlementaire, mais sachez que je n'en suis pas fier du tout ! En effet, il a seulement visé à justifier la décision politique, prise dans la précipitation, de renoncer à l'implantation du troisième aéroport à Chaulnes. Heureusement que nous avions obtenu du Premier ministre - Jean-François Copé était avec nous pour le réclamer - la suppression du projet d'une cinquième piste à Roissy ! Quelque progrès que puisse représenter la création de communautés aéroportuaires, la question d'un troisième aéroport francilien reste posée. Lors des enquêtes publiques relatives au doublement des pistes de Roissy, nous élus du Val d'Oise, avions obtenu du gouvernement de l'époque certaines garanties... que celui-ci semble avoir oubliées. On nous avait ainsi assuré qu'un troisième aéroport serait construit, et que le trafic de Roissy serait limité à 550 000 mouvements par an. Or, on en est déjà à 500 000 mouvements ! Je n'ai rien contre le développement des aéroports de province, mais reconnaissez que le million et demi de Franciliens directement concernés par le développement de Roissy a des raisons d'enrager !

La communauté aéroportuaire pourrait sans doute être un bon outil. A condition toutefois d'en connaître précisément le périmètre d'intervention. Zones riveraines seulement, Monsieur le maire de Gonesse, ou zones survolées également ? Si le département des Hauts-de-Seine découvre aujourd'hui les nuisances sonores du trafic aérien, nous les subissons, nous, depuis longtemps, à vingt kilomètres de Roissy, où nous sommes obligés, même en pleine canicule, de fermer nos fenêtres à cause du bruit, et où nos meubles de jardin sont régulièrement souillés de kérosène, sans parler de notre belle forêt de Montmorency, dont les arbres perdent leurs feuilles dès le mois de juin. Il faut savoir tout cela, Monsieur le rapporteur, qui vous targuez d'environnement...

Nous aimerions que tous ces problèmes puissent être abordés sérieusement. Si deux gouvernements, celui de M. Juppé et celui de M. Jospin, avaient conclu à la nécessité de limiter le trafic d'Orly et de Roissy, et de créer un troisième aéroport, il y avait bien une raison. Si rien n'est fait, le nombre de mouvements annuels ne fera que s'accroître à Roissy et ce sont alors quelque deux millions de Franciliens qui subiront des nuisances.

Comment accepter que les représentants des associations n'aient que voix consultative au conseil d'administration des communautés aéroportuaires, alors même qu'ils disposent de toute l'expertise nécessaire ? Pour que votre nouvel outil soit crédible, il faudrait aussi qu'on puisse y débattre de questions aussi essentielles que la capacité des aéroports, le type d'avions, les vols de nuit... Je connais le poids des pressions de la DGAC et autres lobbies, qui explique pourquoi on n'est pas allé plus loin. Mais nous sommes ici pour défendre l'intérêt général. Nous savons tous qu'un troisième aéroport est indispensable. Si aucune décision n'est prise aujourd'hui, la situation sera ingérable demain.

M. Jean-Pierre Blazy - Très bien !

M. le Rapporteur - Monsieur Blazy, je vous rassure, oui, il sera possible d'amender le texte. Si la commission n'a pas retenu ceux que vous lui avez présentés, très tardivement, il faut bien le dire, cela ne veut pas dire qu'elle n'en acceptera aucun. Encore faut-il qu'ils ne dénaturent pas l'esprit du texte. La communauté aéroportuaire, qu'il est proposé d'instituer, n'est pas un cadre rigide. C'est plutôt un outil expérimental, qui pourra être mis en place aussi pour d'autres aéroports, voire d'autres infrastructures provoquant des nuisances. Nous travaillons depuis assez longtemps sur le sujet des aéroports, Monsieur Blazy, pour que vous ne puissiez pas mettre en doute ma volonté personnelle de dialogue sur le sujet.

Monsieur Delattre, nul doute que si vous aviez été membre de la mission d'information qui, sous ma présidence, a auditionné neuf mois durant des centaines d'acteurs du transport aérien, d'élus, de riverains..., notre rapport aurait été meilleur ! Nul doute que si vous aviez souhaité vous faire entendre, nous vous aurions écouté avec grand intérêt ! Alors, de grâce, ne remettez pas en question ce travail de fond, mené à bien par une mission où étaient représentés tous les groupes de l'Assemblée. Les conclusions du rapport, adoptées, je le rappelle, à l'unanimité, ne sont ni celles du rapporteur, ni celles du président mais celles de la mission.

M. Francis Delattre - Ou celles de la DGAC ?

M. Pierre-Christophe Baguet - L'amendement 35 a pour objet d'étendre la création de communautés aéroportuaires aux zones concernées par le trafic d'un héliport. Un hélicoptère fait en effet autant de bruit qu'un avion, parfois même davantage. Je pense tout particulièrement à l'héliport d'Issy-les Moulineaux et à ses 12 000 mouvements annuels, dont Issy, mais aussi Boulogne, Meudon, Sèvres, Saint-Cloud, Rueil et d'autres villes supportent les nuisances.

Le sous-amendement 37 de M. Rodolphe Thomas précise que les aérodromes concernés par la proposition de loi sont ceux éligibles à la taxe générale sur les activités polluantes.

M. Jean-Pierre Blazy - Mes amendements ont été déposés de façon tout à fait réglementaire...

M. le Président de la commission - Nous ne les avons eus que ce matin.

M. Jean-Pierre Blazy - Dans le délai prescrit ! Par ailleurs, je suis quelque peu surpris du départ de M. Bussereau, non que je doute de la capacité du secrétaire d'Etat au tourisme à répondre à nos questions, mais j'y vois un certain mépris à l'égard de la représentation nationale. Cela illustre bien la volonté du Gouvernement d'expédier à la hâte l'examen de ce texte, dût-il être en être bâclé.

Mon amendement 11 prévoit la création systématique d'une communauté aéroportuaire autour des dix plus grands aéroports français et en donne la possibilité autour de tous les aérodromes régionaux. Pour ceux-ci aussi, une meilleure « gouvernance » peut être nécessaire.

M. le Rapporteur - N'oublions pas que la communauté aéroportuaire a pour première tâche de répartir plus équitablement l'aide à l'insonorisation des logements. C'est pourquoi le Sénat l'a, dans un premier temps, circonscrite aux dix aéroports pour lesquels existe un tel dispositif d'aide. Cela étant, si l'expérience est positive, elle pourra être étendue, pourquoi pas à des héliports, à d'autres aérodromes, voire à d'autres infrastructures de transport génératrices de nuisances, le ministre l'a dit au Sénat. La commission a donc jugé nécessaire, dans un premier temps, de s'en tenir aux dix plus grands aéroports de France, et a émis un avis défavorable.

M. Léon Bertrand, secrétaire d'Etat au tourisme - Je comprends bien la préoccupation de M. Baguet, car les héliports aussi font beaucoup de bruit. Des mesures ont déjà été prises : à Issy-les-Moulineaux, le trafic a été divisé par deux, et les trajectoires évitent le plus possible les zones urbanisées ; leur relèvement est à l'étude. Mais il faudra aller plus loin. Le Gouvernement s'engage à développer la concertation avec les riverains des héliports dans les commissions consultatives existantes. Cette démarche pragmatique semble mieux adaptée que des procédures plus lourdes : utilisons d'abord au mieux ce qui existe. Avis défavorable.

Avant de répondre sur le fond à M. Blazy, je lui rappelle que les ministres sont tous membres du même gouvernement, et appliquent la même politique : je me crois donc tout à fait fondé à lui répondre ce soir (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). Quant à la création des communautés aéroportuaires, la proposition de loi privilégie un acte volontaire du conseil régional : il est important que cette création résulte d'une initiative locale. L'article 3 permet toutefois au représentant de l'Etat dans la région, s'il le juge indispensable, de créer cet établissement. Il est préférable de le laisser juge de l'opportunité de cette création plutôt que de l'imposer dans la loi. Au demeurant, la création d'une communauté aéroportuaire se justifie là où les contraintes imposées par l'activité aérienne aux territoires environnants concerne des secteurs fortement urbanisés, et appellent des projets durables en matière d'équipement, d'accès et d'emploi - ce qui peut être le cas des dix plus grands aéroports. Pour les autres, il existe déjà des structures de concertation entre professionnels, collectivités locales et riverains pour tous les aéroports qui accueillent un trafic commercial : ce sont les commissions consultatives de l'environnement créées par la loi de 1985 et dont le rôle a été accru en 1999. N'alourdissons donc pas les institutions en étendant à l'excès les cas de création de communautés aéroportuaires. Avis défavorable.

M. Pierre-Christophe Baguet - Nos collègues sénateurs s'en sont tenus à dix aéroports dans une première phase d'expérimentation. Il ne serait pas absurde d'expérimenter sur dix aéroports et un héliport, en l'occurrence le plus grand de France. J'envisageais de retirer mon amendement, mais j'espérais que le Gouvernement s'engagerait davantage. Vous me parlez des commissions consultatives, Monsieur le Ministre. Il se trouve que je suis membre de celle de l'héliport Paris 15 : elle est restée plus de deux ans sans se réunir... Je ne suis pas sûr qu'elle remplace une disposition législative. J'aimerais que le président de la commission veuille bien me confirmer qu'on trouvera l'occasion, dans un prochain texte, de prendre en compte l'héliport d'Issy-les-Moulineaux.

M. le Président de la commission - Le problème que soulève M. Baguet est essentiel pour toute une partie de la région parisienne, et je le sais bien, car nous sommes voisins. Nous sommes, Monsieur le Ministre, dans une période...

M. Jean-Pierre Blazy - Électorale !

M. le Président de la commission - ...où nous mettons en place un système expérimental. Dès lors qu'il se révèlera fonctionnel, il faudra y intégrer notamment l'héliport d'Issy-les-Moulineaux. Nous pouvons agir de façon progressive. Le Gouvernement sera certainement sensible à cet argument ; en tout cas la commission sera vigilante pour que votre souhait puisse être exaucé.

L'amendement 35 est retiré.

L'amendement 11, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article premier, mis aux voix, est adopté.

ART. 2

M. Jean-Pierre Blazy - Nous parlons de plus en plus de développement durable, et cette notion sera bientôt constitutionnelle. Elle doit être appliquée au transport aérien, et figurer explicitement dans les missions des communautés aéroportuaires : tel est l'objet de l'amendement 12.

M. le Rapporteur - Défavorable. L'article 7 de la proposition répond à votre souci, puisqu'il prévoit que « l'intervention financière de la communauté aéroportuaire sur un projet s'inscrit dans le cadre d'un contrat de développement durable signé avec le maître d'ouvrage et, le cas échéant, les autres contributeurs ». Au-delà même d'une affirmation de principe, il fait entrer votre préoccupation dans le concret.

M. Léon Bertrand, secrétaire d'Etat - L'amendement élargit trop le champ d'intervention de la communauté aéroportuaire : elle ne doit pas interférer avec les institutions existantes. Défavorable.

L'amendement 12, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. François Asensi - L'amendement 23 précise que le périmètre de la communauté aéroportuaire prend en compte le plan de gêne sonore et le plan d'exposition au bruit lorsqu'ils existent. Un aspect si important pour les riverains doit être inscrit dans ses missions. En outre, pour remplir une vraie mission d'intérêt général, la communauté aéroportuaire doit pouvoir emprunter pour réduire les délais d'indemnisation.

M. Jean-Pierre Blazy - Notre amendement 13 va dans le même sens. A lire la rédaction actuelle de l'article 2, on ne comprend pas quel sera le périmètre d'intervention de la communauté aéroportuaire. Il est nécessaire de dissiper ce flou par quelques précisions, en faisant notamment référence au plan de gêne sonore. Ce qui ne signifie nullement que le périmètre de la communauté aéroportuaire doive se limiter à celui du plan de gêne sonore ; mais cette référence est nécessaire, parce que ce plan signifie la reconnaissance des nuisances subies par les riverains.

M. le Rapporteur - Avis défavorable. Le souci des auteurs de la proposition est la souplesse. Bien sûr, vous avez raison : il y a un lien direct entre le périmètre de la communauté et le plan de gêne sonore. Mais la communauté aéroportuaire doit aussi avoir un périmètre pertinent par rapport à la zone d'activité économique, qui sera productrice notamment de richesses permettant d'indemniser les riverains. Le périmètre devra être fonction à la fois des plans de gêne sonore, comme vous le souhaitez, mais aussi d'une zone d'impact économique qui pourra être beaucoup plus large et apporter des ressources supplémentaires.

M. Léon Bertrand, secrétaire d'Etat - La communauté aéroportuaire est chargée de soutenir des actions tendant à favoriser la correction des atteintes aéroportuaires à l'environnement et à la qualité de la vie. Le plan de gêne sonore et le plan d'exposition au bruit, quand ils existent, lui serviront sans nul doute de référence pour délimiter son périmètre d'intervention. Mais il faut laisser toute latitude aux acteurs concernés pour opérer cette délimitation. Défavorable.

M. François Asensi - M. le rapporteur parle de souplesse, d'expérimentation. Nous sommes, je le crois, en présence d'une loi d'opportunité, même si je ne vois pas quel profit M. Copé en tirera. Je crains d'ailleurs qu'on ne retienne que peu d'amendements, ou même qu'on aille vers une adoption conforme, pour aller vite. Mais je ne comprends pas qu'on légifère ainsi en restant dans le flou.

M. Jean-Pierre Blazy - Il est clair qu'on veut refuser tout amendement. La réponse de M. le ministre est rassurante sur le fond : plans de gêne sonore et plans d'exposition au bruit seront pris en compte. Mais nous proposons de préciser sur ce point la rédaction, et non pas de réduire à cela le périmètre. Je dois conclure que la commission et le Gouvernement refusent tout amendement pour les raisons qu'a suggérées M. Asensi.

Les amendements 23 et 13, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. François Scellier - Mon amendement 7 tend aussi à préciser le périmètre d'intervention de la communauté aéroportuaire. J'entends bien sur ce point M. le rapporteur et M. le ministre, et je comprends qu'il sera tenu compte du plan de gêne sonore et du plan d'exposition au bruit, faute de quoi d'ailleurs on aurait un dispositif incohérent. Mais mon amendement entend aussi rectifier une incohérence entre les limites actuelles de la zone C du plan d'exposition au bruit, qui dépend d'une valeur de l'indice « Lden » située pour Roissy dans une fourchette 55-57, et de la zone III du plan de gêne sonore, qui résulte de la seule valeur 55.

Je comprends bien qu'il faut une certaine souplesse. Si j'avais l'assurance que le préfet de région prendra son arrêté de définition du périmètre après consultation avec les collectivités territoriales, et au moins avec le département, je pourrais retirer l'amendement.

M. le Rapporteur - Je comprends bien cette volonté de prendre en compte les nuisances sonores, mais limiter le périmètre des communautés à celui des périmètres de gêne sonore serait réducteur. Il faut tenir compte de tous ceux qui seront éventuellement éligibles à des financements, et aussi du fait que la loi concerne dix aéroports. Nantes ou Marseille ne sont pas Roissy ou Orly. Sur la précision demandée, le Gouvernement répondra.

M. Léon Bertrand, secrétaire d'Etat - Sur le fond, il maintient sa position, mais il peut s'engager à ce que les préfets, avant de signer leur arrêté, s'assurent du consensus des collectivités.

L'amendement 7 est retiré.

L'article 2, mis aux voix, est adopté.

ART. 3

M. François Asensi - Notre amendement 25 prévoit que l'Etat doit pouvoir créer la communauté aéroportuaire, même si le Conseil régional n'en manifeste pas la volonté réelle.

M. le Rapporteur - Cet amendement est surprenant. L'Etat veut créer ces établissements publics administratifs dans un souci de déconcentration. Il tend ainsi la main aux collectivités territoriales qu'il se propose d'y associer. Une création automatique serait contraire au principe de liberté des collectivités.

M. Léon Bertrand, secrétaire d'Etat - Effectivement, il faut privilégier les démarches volontaires et laisser les préfets décider de l'opportunité de créer ces établissements publics. Quand le Conseil régional ne le fait pas, on ne peut le lui imposer. Je viens d'indiquer à M. Scellier qu'il y aura concertation.

M. François Asensi - J'entends bien, mais puisqu'il nous demande d'agir dans l'urgence, l'Etat doit assumer des responsabilités. Si un Conseil régional ne veut pas aller vite, ce sera autant de retard dans les indemnisations. Pour éviter cela, il serait normal que, dans ce cas, l'Etat se substitue à la collectivité.

L'amendement 25 , mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 3, mis aux voix, est adopté.

ART. 4

M. François Scellier - Le texte ne différencie pas la représentation des entreprises dont la contribution financière est obligatoire et celle des entreprises dont elle est volontaire. L'amendement 8, 3e rectification, crée un collège obligatoire avec voix délibérative pour les premières et un collège représentatif des intérêts économiques et environnementaux à vocation consultative.

M. François Asensi - Le conseil d'administration de ces établissements ne peut se réduire aux collèges des entreprises et des collectivités territoriales. L'amendement 26 en crée un troisième représentant les associations de riverains et les salariés. Par souci de démocratie, on ne peut laisser un strapontin à ceux qui vivent près des aéroports ou y travaillent.

M. le Rapporteur - La commission a repoussé ces deux amendements. Je comprends la volonté d'ouvrir les conseils d'administration. Mais il ne faut pas les confondre avec les commissions consultatives de l'environnement ou d'aide aux riverains. Ce ne sont pas des lieux de discussion, mais de décision pour les entreprises qui payent et pour les collectivités, qui de toute façon représentent les riverains.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat - Défavorable.

L'amendement 8, 3e rectification, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que l'amendement 26.

M. Jean-Pierre Blazy - Un amendement socialiste au Sénat a déjà augmenté le nombre de représentants des associations au conseil d'administration. Par l'amendement 14, nous portons ce nombre à la moitié de celui des deux autres collèges et nous leur donnons voix délibérative.

M. le Rapporteur - Défavorable. Le Gouvernement a été d'accord avec la bonne idée du Sénat, mais s'agissant de dépenser l'argent public, la décision ne peut être prise par ceux qui en bénéficieront.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat - Même avis. Le conseil d'administration ne peut faire double usage avec les commissions consultatives.

L'amendement 14, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 4, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 4

M. François Asensi - Le FISCA a été privé de ses ressources. Pour garantir les moyens nécessaires à l'indemnisation, notre amendement 28 rectifié rétablit le texte de la proposition de loi.

M. Jean-Pierre Blazy - Je salue le retour du secrétaire d'Etat aux transports. Nous allons pouvoir recommencer à discuter sérieusement (Protestations sur les bancs du groupe UMP).

La proposition Le Grand donnait aux communautés des ressources que les élus pouvaient utiliser pour financer des projets dans les communes environnantes. En les supprimant, vous la videz de son sens.

L'amendement 15 revient à l'esprit de la proposition.

M. le Rapporteur - Avis défavorable. La communauté aéroportuaire bénéficiera de recettes. Je ne comprends pas cette idolâtrie soudaine pour M. Le Grand (Sourires). Des lois de finances à venir examineront, si nécessaire, la création d'un fonds d'investissement.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat - Je prie la représentation nationale d'excuser mon absence. Je devais décorer un haut fonctionnaire de mon ministère, et M. Bertrand a eu l'amabilité de me suppléer.

Créer un fonds spécifique constitue une complication administrative et financière inutile. Je ne vois pas ce qu'apporterait votre fonds...

M. Jean-Pierre Blazy - C'est celui de M. Le Grand.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat - C'est alors un fonds commun (Sourires). Avis défavorable.

L'amendement 28 rectifié, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que l'amendement 15.

ART. 5

M. François Asensi - La communauté aéroportuaire a besoin de moyens financiers. C'est le sens de l'amendement 29 rectifié. Le montant des ressources était à l'origine évalué entre 55 et 70 millions. Le Sénat les a revues à la baisse, et elles ne reposeraient plus que sur le produit des sanctions sur le fonds de compensation des nuisances aéroportuaires et sur les contributions volontaires des entreprises, auxquelles je ne crois guère.

M. Jean-Pierre Blazy - L'amendement 16 a le même objet. Les ressources de la communauté aéroportuaire seront virtuelles, car aléatoires. Qu'allons-nous mettre en _uvre de concret ?

M. le Rapporteur - Nous avons décidé en 2003 d'affecter la taxe nationale sur les nuisances sonores à ADP. C'était un retour à la normale. Or, ces amendements vont à l'encontre de cette décision et introduisent de nouvelles taxes. La commission y est donc défavorable.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat - Même avis. Nous créons une nouvelle structure. Nous aurons le temps de voir s'il devient ou non nécessaire de lui donner plus de moyens.

L'amendement 29 rectifié, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que l'amendement 16.

M. Jean-Pierre Blazy - L'amendement 17 vise à supprimer le mot « volontaires » et à maintenir le mot « contributions » (Sourires).

M. le Rapporteur - On joue sur les mots. ADP verse 4,5 millions de contribution « volontaire ». Nous ne doutons pas qu'il s'agit en fait d'une obligation.

L'amendement 17, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. François Asensi - L'amendement 27 vise à instaurer une ressource nouvelle et durable pour la communauté aéroportuaire. Il s'appuie sur le principe qui prévaut en Corse ou à Amsterdam, où une taxe doit être payée par passager entrant et par tonne de fret débarquée. Cette taxe pourrait être, à Roissy, de trois euros, ce qui rapporterait 90 millions.

M. le Rapporteur - Avis défavorable. Il sera temps, éventuellement, dans le cadre des lois de finances à venir, d'inventer de nouvelles taxes.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat - Nos compagnies aériennes croulent déjà sous les taxes...

M. Jean-Pierre Blazy - Nous y voilà !

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat - ...à tel point qu'un problème de compétitivité se pose. Avis défavorable.

M. François Asensi - Une taxe de trois euros, c'est pourtant dérisoire au regard du prix du billet !

L'amendement 27, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Pierre Blazy - L'amendement 18 vise à supprimer les mots « le cas échéant » au début de l'avant-dernier alinéa. En fait, le cas n'écherra jamais ! M. le ministre vient de livrer le fond de sa pensée.

Le sénateur Le Grand est un fin connaisseur de l'économie aérienne, et nous ne faisons ici que reprendre sa proposition. Trois euros pour les riverains, c'est beaucoup moins que les taxes de sûreté.

L'amendement 18, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Pierre Blazy - Le dernier alinéa de l'article est mal placé. Il trouverait mieux sa place à l'article 6 qui prévoit les projets éligibles au financement par la communauté aéroportuaire. Tel est le sens de l'amendement 19.

L'amendement 19, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. François Scellier - L'amendement 9 corrigé vise également à donner des moyens à la communauté aéroportuaire, comme le préconisent tous les rapports précédents.

En cas de renvoi à la loi de finances, on ne manquera pas d'invoquer l'article 40. Je crains que, faute de moyens, les communautés aéroportuaires ne puissent remplir leurs missions.

M. François Asensi, M. Jean-Pierre Blazy et M. Francis Delattre - Très bien.

M. le Rapporteur - Nous comprenons ces préoccupations. Personne n'a dit qu'il n'y aurait jamais de ressources nouvelles, mais nous n'en sommes pas encore à en définir l'assiette.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat - Je partage cet avis. La question sera traitée lorsque nous débattrons de la fiscalité locale dans le cadre des nouvelles lois de décentralisation ; on pourrait, par exemple, envisager de réduire la taxe d'habitation des riverains gênés par les nuisances sonores, avec compensation pour les communes. Je suggère le retrait de l'amendement.

M. François Scellier - Il est retiré, avec regret mais sans amertume (Sourires).

L'article 5, mis aux voix, est adopté.

ART. 5 BIS

M. Jean-Pierre Blazy - Depuis que le gouvernement précédent a institué le Fonds de compensation des nuisances aéroportuaires, les communes affectées par les nuisances perçoivent une dotation substantielle. Or, à compter de la création de la communauté aéroportuaire de Paris-Charles-de-Gaulle, c'est à elle que ces ressources seront attribuées. Quelle compensation percevront les communes considérées ? Que répondrez-vous, par exemple, à Mme Olin, sénatrice-maire de Garges, dont le budget communal va se voir allégé de 600 000 € ? J'ajoute que les communes ont, pour la plupart, un faible potentiel fiscal, et qu'elles connaissent de grandes difficultés de tous ordres, qui justifient leur participation aux projets liés à la politique de la ville.

M. le Rapporteur - Le problème est réel, et je ne doute pas que le Gouvernement en soit conscient.

M. François Scellier - De nombreux dispositifs garantissent, dans des cas semblables, le maintien des ressources dont étaient dotées les communes. Le Gouvernement doit prendre l'engagement que les communes concernées ne sont pas lésées par le nouveau mécanisme.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat - Je suis prêt à donner cette garantie : si le mécanisme est défavorable aux collectivités, il sera modifié.

M. Jean-Pierre Blazy - Il le sera obligatoirement !

M. François Asensi - Je retire l'amendement 36 de suppression.

L'article 5 bis, mis aux voix, est adopté.

ART. 6

M. François Asensi - Il apparaît de manière flagrante que cette proposition est vidée de toute substance, faute de moyens. Il n'empêche : le champ des projets éligibles au financement des communautés aéroportuaires doit être défini, au lieu d'être laissé à l'appréciation de ces établissements. C'est à quoi tendent les amendements 31 à 34.

M. le Rapporteur - J'ai l'opinion inverse. Il est bon que les nouveaux établissements fassent preuve d'imagination.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat - Même avis. Les précisions apportées sont, de plus, d'ordre réglementaire.

Les amendements 31 à 34, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

L'article 6, mis aux voix, est adopté, de même que l'article 7.

APRÈS L'ART. 7

M. François Scellier - L'amendement 10 tombe, puisqu'il fait référence à l'amendement 9 corrigé, qui n'a pas été retenu.

EXPLICATIONS DE VOTE

M. François Asensi - Ce débat était cousu de fil blanc, puisque l'objectif recherché était un vote conforme, ce qui empêchait toute amélioration. La proposition apparaît donc pour ce qu'elle est, un texte d'opportunité électorale. Ce qu'aurait pu être une disposition innovante étant vidé de tout contenu faute de moyens, je voterai contre un texte dont je réprouve l'adoption dans ces conditions.

Mme Odile Saugues - Ce texte a été examiné à la hussarde et dans une telle précipitation que je ne suis pas sûre que les gens à qui est destiné ce paquet-cadeau électoral en tireront un grand profit. Je note que, sur tous les bancs, des élus attentifs aux besoins réels de leurs administrés n'ont pas eu du Gouvernement les réponses qu'ils attendaient, et je le déplore. Je regrette aussi qu'aucun amendement n'ait été accepté, ce qui nous a empêchés d'améliorer le texte, très en retrait sur le rapport du sénateur Le Grand, dont tous les orateurs ont salué la qualité. De cette proposition décharnée, il ne reste que l'arête et, pour tout dire, elle ne passe pas. De quoi s'agit-il, en fait ? De promesses de dons, ce qui est risible. Le groupe socialiste vous laissera donc à votre « aérothon » et s'abstiendra.

M. Guy Drut - Au terme de ce débat riche et constructif, les termes que je viens d'entendre me choquent. Rien n'a été fait « à la hussarde » ni avec « précipitation » ! Chacun a pu s'exprimer, mais le temps de l'action était venu...

M. Jean-Pierre Blazy - Plutôt celui de l'activisme électoral !

M. Guy Drut - Il était urgent de légiférer, pour tenter de trouver une solution aux problèmes qui touchent les populations riveraines des aéroports et c'est ce que fait la majorité. L'esprit du rapport Le Grand est respecté ; de plus, comme l'ont souligné et le rapporteur et le ministre, ce projet est évolutif, ainsi qu'en témoignent les engagements pris par le Gouvernement. En l'état, la proposition va dans le bon sens et le groupe UMP la votera (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Pierre-Christophe Baguet - Le groupe UDF votera ce texte, qui suscite de grands espoirs et dont j'espère qu'il sera le plus efficace possible. Il est d'ailleurs amendable.

M. Jean-Pierre Blazy - Mais non, justement !

M. Pierre-Christophe Baguet - Il le sera au fil du temps. Je remercie le Gouvernement de l'engagement pris par M. Léon Bertrand que l'héliport d'Issy-les-Moulineaux ne serait pas oublié au cas où une future extension du dispositif serait envisagée.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat - Je salue la capacité de M. Baguet à faire passer son message, et je remercie M. Drut de son intervention. Ce texte n'est que le début d'une aventure... (Rires sur les bancs du groupe socialiste) et il est surtout ce que nous en ferons ! Les décrets d'application seront disponibles rapidement...

M. Jean-Pierre Blazy - Avant les régionales ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat - Ne soyez pas obsédé par cette échéance ! Ce texte est aussi porteur d'espoir et je gage que nous saurons l'améliorer ultérieurement, sur la base notamment des propositions très intéressantes de M. Scellier et dans le même esprit constructif qui a prévalu ce soir (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur les bancs du groupe UDF).

L'ensemble de la proposition de loi, mis aux voix, est adopté.

Prochaine séance, ce soir, à 21 heures 30.

La séance est levée à 20 heures.

                Le Directeur du service
                des comptes rendus analytiques,

                François GEORGE

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne trois heures après la fin de séance.

Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.

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