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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2004-2005 - 30ème jour de séance, 73ème séance

2ème SÉANCE DU JEUDI 25 NOVEMBRE 2004

PRÉSIDENCE de M. Éric RAOULT

vice-président

Sommaire

      COHÉSION SOCIALE (suite) 2

      AVANT LE TITRE PREMIER 2

      ARTICLE PREMIER 3

La séance est ouverte à quinze heures.

COHÉSION SOCIALE (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat après déclaration d'urgence, de programmation pour la cohésion sociale.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances - Permettez-moi de préciser brièvement les conditions dans lesquelles j'ai appliqué l'article 40 de la Constitution aux 955 amendements qui ont été déposés sur ce projet, en vous indiquant d'emblée que seuls une soixantaine d'entre eux - soit 6,8% - ont été déclarés irrecevables.

J'ai été très souple s'agissant des acteurs du service public de l'emploi, à l'article premier, afin de laisser toute leur place aux initiatives locales, et notamment aux maisons de l'emploi. En revanche, les amendements qui prévoient des aides automatiques de l'Etat ou des régions pour les contrats d'aide sont irrecevables lorsqu'ils vont au-delà du texte. Il en va de même pour l'ANPE et pour l'UNEDIC : les amendements qui conduisent à augmenter l'indemnisation des chômeurs ou restreignent la portée du contrôle aujourd'hui exercé sur les demandeurs d'emploi sont irrecevables.

S'agissant du logement, il n'est pas possible, par exemple, d'étendre le champ d'intervention de l'ANRU. La commission a adopté de nombreux amendements relatifs aux aides au logement, notamment à l'APL, qui sont coûteux pour le budget de l'Etat. Je pense en particulier à un amendement - que le Gouvernement peut toujours reprendre - sur le versement trimestriel de l'APL, ou à la suppression du délai de carence. Tout cela dépasse l'enveloppe budgétaire - pourtant considérable - prévue par le Gouvernement.

Cette loi de programmation a une valeur normative s'agissant des engagements du Gouvernement d'ouvrir des crédits ou de construire des logements sociaux. Je n'ai donc pas accepté les amendements qui allaient au-delà de la programmation prévue.

Je rappelle enfin que les amendements qui diminuent une ressource publique doivent être gagés, et si possible bien gagés. J'ai accepté, à titre pédagogique, d'en gager la plupart moi-même. Mais vous devez avoir conscience qu'une perte de recettes n'est pas anodine dans le contexte budgétaire actuel. Compte tenu de la multiplication des niches fiscales et sociales, je demande à chacun de prendre ses responsabilités.

J'espère que ces éléments d'information permettront de limiter les suspensions de séance liées à l'application de l'article 40...

M. le Président - J'appelle maintenant les articles du projet de loi dans le texte du Sénat.

AVANT LE TITRE PREMIER

M. Francis Vercamer - Nous allons parler procédures, dossiers, institutions... Mais n'oublions pas qu'à travers la cohésion sociale, c'est d'abord de l'homme qu'il s'agit. L'amendement 494 vise à le rappeler en préambule du texte.

J'ai déposé plusieurs amendements qui ont trait à la discrimination. Là aussi, il s'agit bien davantage de problèmes humains que d'institutions ou d'équipements.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales - La commission souscrit bien évidemment à cette déclaration de principe : l'homme doit être au cœur non seulement des politiques de l'emploi, du logement, de lutte contre l'exclusion, mais aussi de toutes les politiques. Ce sont d'ailleurs les citoyens que nous représentons ! Mais il ne nous semble pas que cet amendement ait sa place dans ce texte, et la commission l'a repoussé.

M. Gérard Larcher, ministre délégué aux relations du travail - Le Gouvernement partage l'idée que le citoyen est au cœur des politiques de l'emploi. C'est du reste tout le sens de l'action publique, et les instances représentatives prévues par le texte répondront à votre préoccupation, Monsieur Vercamer. Nous souhaiterions donc que vous retiriez votre amendement au bénéfice de l'ensemble du texte.

L'amendement 494, mis aux voix, n'est pas adopté.

ARTICLE PREMIER

M. Jean-Paul Anciaux - En matière de cohésion sociale, trois approches sont possibles. On peut défendre une approche idéologique, et opposer aux difficultés de nos concitoyens une société idéale qui permettrait à tous d'être heureux. Cette approche est démagogique : si une telle société existait, cela se saurait ! La deuxième approche, théorique, consiste à prévoir tout ce qu'il faut faire ou ne pas faire, tout ce qu'on peut faire ou ne pas faire, et ce que l'organisation sociale doit apporter à chacun. Elle débouche en règle générale sur des usines à gaz caractérisées par un excès de réglementations et de contraintes. La troisième approche, qui est je crois la vôtre, est pragmatique : il s'agit de partir du terrain, de ce qui se passe dans les bassins d'emploi, pour proposer de nouveaux dispositifs, et ceux que vous proposez sont très intéressants.

C'est d'abord le dossier unique pour le demandeur d'emploi, qui n'aura plus l'obligation de pousser les portes - ANPE, missions locales - les unes après les autres. Il n'aura plus qu'à en pousser une seule pour se voir établir un dossier unique. Même si ce n'est que bon sens, tel n'était pas le cas jusqu'à présent. Les démarches des demandeurs d'emploi sont enfin réellement simplifiées.

Quant à la convention pluriannuelle qui doit être signée entre l'Etat, l'ANPE et l'UNEDIC, elle favorisera le partenariat et les échanges mutuellement enrichissants entre ces organismes. Pourquoi d'ailleurs ne pas y associer également l'AFPA ?

Enfin, par un jeu de cercles concentriques, le service public de l'emploi va gagner en efficacité. Tout d'abord, par le rapprochement entre l'ANPE et l'UNEDIC. Ensuite, par l'implication à un deuxième niveau de tous les acteurs de terrain pour l'accueil, l'information et l'orientation des demandeurs d'emploi. Enfin, à un troisième niveau, par l'association des collectivités. L'obligation qu'elles ont désormais de s'impliquer en ce domaine est la preuve que l'on compte aussi sur elles pour relever le défi de l'emploi et de la formation, au plus près des bassins d'emploi, au plus près de nos concitoyens.

L'article premier de ce texte répond aux attentes de nos concitoyens.

Maxime Gremetz - Je demande une suspension de séance pour donner le temps au ministre et à nos collègues de l'UMP de nous rejoindre. Au moment où débute l'examen des amendements au plan de cohésion sociale, il est pour le moins léger que le ministre de la cohésion sociale ne soit pas là !

M. le Président - La suspension est de droit. Permettez-moi néanmoins de vous faire observer que les collègues inscrits sur l'article, absents au moment où ils devraient s'exprimer, perdent leur tour de parole. Votre demande de suspension au motif que certains députés de l'UMP ne sont pas là n'est pas fondée. Quant au Gouvernement, il est représenté par MM. Larcher et Hénart. Tous les ministres chargés du secteur social n'ont pas à être là pendant tout le débat.

M. Maxime Gremetz - Je ne mets nullement en doute les qualités des ministres présents. Simplement il est inconcevable que l'on examine un plan Borloo en l'absence de M. Borloo ! (Interruptions sur les bancs du groupe UMP)

Mme Claude Greff - Ce n'est pas un plan Borloo !

M. Jean-Michel Fourgous - C'est un plan pour les personnes en difficulté.

M. Gaëtan Gorce - Nous avions déjà été choqués que le ministre soit absent pendant la plus grande partie de la présentation de notre exception d'irrecevabilité. Voilà qu'il l'est de nouveau aujourd'hui ! Il est clair que son plan est d'abord destiné aux médias et qu'il a autre chose à faire qu'à débattre avec les députés. Ce manque de respect à l'égard de l'Assemblée nationale est scandaleux. (Interruptions sur les bancs du groupe UMP) Ces propos n'ont pas à provoquer les criailleries de nos collègues de l'UMP. (Mêmes mouvements)

M. Rodolphe Thomas - MM. Larcher et Hénart représentent excellemment le Gouvernement et sont parfaitement à même de répondre à nos questions. Faisons preuve de responsabilité et engageons sans plus tarder le débat. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Paul Anciaux - Si les journalistes ont appelé le plan de cohésion sociale plan Borloo, c'est leur affaire ! Aujourd'hui, sont parmi nous le ministre délégué aux relations du travail et le secrétaire d'Etat à l'insertion professionnelle des jeunes. Nous pouvons donc parfaitement travailler.

M. le Président - Je suspends la séance pour trois minutes.

La séance, suspendue à 15 heures 25, est reprise à 15 heures 30.

M. Gaëtan Gorce - Cet article est un article important du texte, à défaut de l'être pour la politique de l'emploi. Il résume en effet les objectifs du Gouvernement en la matière. Réformer le service public de placement, pourquoi pas, mais prétendre que la solution à la situation très dégradée que nous connaissons aujourd'hui pourra venir des maisons pour l'emploi, non, car elle ne sauraient à elles seules se substituer à une politique locale de l'emploi, qui n'est même pas esquissée ici.

S'il s'agit d'en faire des guichets de proximité, alors n'en créer que 300 est trop peu. S'il s'agit de leur confier une mission de pilotage, alors leurs responsabilités sont trop mal définies dans cet article. Il est en outre difficilement admissible qu'elles se substituent aux structures de service public de l'emploi.

Nous ne refusons pas le dispositif, mais nous défendons une autre organisation, comme vous le verrez dans nos nombreux amendements. Nous pensons en particulier qu'il faut rapprocher et rendre plus complémentaires les prestations de l'ANPE, de l'UNEDIC et de l'AFPA. Il faudrait aussi clarifier la donne au plan local en s'appuyant davantage sur les agences locales pour l'emploi, dont on pourrait faire un pivot.

Cet article ne définit pas une politique territoriale de l'emploi, il ne fait qu'empiler différentes mesures, inspirées sans doute de l'expérience de Valenciennes. J'ajoute que si nous prônons une vraie politique locale de l'emploi, nous attendons aussi une politique nationale de l'emploi, qui ne saurait s'appuyer seulement sur cette solution bizarroïde que constituent les maisons de l'emploi. Ces dernières ne sont pas des maisons des miracles. Proposer des emplois aidés sans soutenir au niveau national la création d'emplois est à l'évidence une voie sans issue. C'est pourquoi nous souhaitons une profonde révision de cet article.

Mme Martine Billard - Notre collègue nous a expliqué tout à l'heure qu'il fallait se garder d'avoir une vision idéologique ou théorique du problème, mais faire preuve de pragmatisme. N'oublions pas tout de même que le chômage a une cause : le manque d'emplois. Je m'étonne aussi de la hiérarchie que certains semblent esquisser entre les trois secteurs pourvoyeurs d'emploi que sont les secteurs marchand, public et associatif. Pour moi, il n'y a pas de hiérarchie et le secteur marchand n'est pas obligatoirement le meilleur pour l'emploi. N'oublions pas que nous allons être confrontés à des départs massifs en retraite dans la fonction publique. Beaucoup d'emplois vont donc s'y libérer.

Je voudrais aussi que l'on remette au cœur du dispositif les chômeurs eux-mêmes. Pour cela, il convient tout d'abord d'éviter de multiplier les dispositifs, car lorsque quelqu'un doit se battre pour sa survie quotidienne, qu'il s'agisse de payer le loyer, les factures ou l'alimentation, il lui reste en définitive peu de temps pour chercher un emploi.

Si les maisons de l'emploi ont pour mission de coordonner les différentes structures, leur généralisation sur l'ensemble du territoire peut être une bonne chose...

M. Jean-Paul Anciaux - Très bonne, même !

Mme Martine Billard - ...mais en fait, leur définition semble vraiment très fluctuante. Et 300 pour tout le territoire national, c'est peu s'il s'agit vraiment de coordonner l'ensemble du dispositif. Ce qui m'inquiète d'autre part, c'est qu'il est dit qu'elles « peuvent » obtenir des aides de l'Etat. Faut-il comprendre qu'il ne s'agira pas d'une obligation et qu'elles n'en recevront pas les années suivantes ?

Sachant qu'il est très important, lorsqu'on est au chômage, de garder espoir, je regrette beaucoup que vous supprimiez les CIF, qui permettaient aux gens de compléter leur parcours professionnel et de reprendre pied. En les supprimant, vous ne laissez aux chômeurs que le choix entre un contrat aidé ou un autre contrat aidé, passage obligé ne garantissant pas de formation.

Je regrette aussi qu'il n'y ait rien sur l'un des problèmes dans l'accès à l'emploi, à savoir les discriminations, qu'il s'agisse de celles subies en raison de son âge, de son sexe ou de son origine sociale. Il n'y a en particulier rien pour aider les femmes seules, confrontées à des problèmes de garde d'enfants, à retrouver un emploi.

Mme Claude Greff - Si, c'est dans le texte !

Mme Martine Billard - Non !

M. Jean-Paul Anciaux - Mais si !

Mme Martine Billard - Il n'y a rien non plus sur la prise en charge des frais de transports.

Mme Claude Greff - La région le demande !

M. Jean Le Garrec - Je n'ai pas bien compris la distinction que faisait M. Anciaux entre idéologie, théorie et pragmatisme. Personnellement, je peux me battre pour ou contre une idéologie, mais s'agissant des problèmes d'emploi, j'ai toujours essayé de faire preuve de pragmatisme. Cela m'a par exemple amené à défendre depuis des années l'idée du guichet unique, qui se heurte aux difficultés que l'on sait. J'ai ainsi fait jouer un rôle important aux CCAS dans la loi sur les inégalités.

Mais je considère que cet article est frappé du défaut habituel : pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? Il introduit en effet une complexité énorme...

M. Jean-Paul Anciaux - C'est l'inverse !

M. Jean Le Garrec - Non, il additionne des conventions, des responsabilités, il mélange des compétences régaliennes de l'Etat avec des compétences de collectivités territoriales.

Vous laissez de côté le PARE - qui comportait un objectif de guichet unique, Monsieur Anciaux - dans lequel les trois éléments-clés étaient abordés : le placement, l'indemnisation et la formation. Vous abandonnez l'existant pour réinventer tout un système dont je ne vois pas comment il va fonctionner. Plutôt que de partir de ce qui a été négocié - non sans difficulté d'ailleurs - avec les syndicats et les entreprises, pour l'améliorer et le compléter, on réintroduit un ensemble qui sera très difficile à maîtriser : cela me paraît une erreur fondamentale.

En outre, l'ouverture de ce marché au privé peut poser des problèmes redoutables. Il peut en effet y avoir deux types de traitement des demandeurs d'emploi. Ceux qui, parmi ces derniers, sont les plus faciles à intégrer dans le marché du travail peuvent certes constituer un marché important ; mais qu'en sera-t-il des plus difficiles à employer ? Tout cela me semble bâti dans la précipitation, et d'une manière très technocratique (M. Jean-Paul Anciaux proteste) : à l'expérience on verra l'erreur. Enfin, trois cents maisons de l'emploi, cela n'a pas de sens : c'est trop ou trop peu ! Dans le Nord il en faudrait une par bassin d'emploi, donc quarante ; même chose dans le Pas-de-Calais... Que voulez-vous que je fasse d'une maison de l'emploi ? Votre approche est purement théorique, et conduira à une impossibilité de fonctionner. Et puisque vous allez être responsable de cela, Monsieur Anciaux, je vous félicite, mais je vous prédis que les débats avec vous ne seront pas faciles...

M. Rodolphe Thomas - Nous sommes unanimes à considérer que le chiffre de trois cents maisons de l'emploi peut être considéré comme un minimum : la situation devra être appréciée dans chaque bassin d'emploi, et on laisse aux élus toute latitude politique de créer ou non une maison. La manière dont les choses sont présentées permet en outre d'associer tous les partenaires, institutionnels mais aussi privés, ce qui est indispensable pour sortir des problèmes d'exclusion. Il est notamment pertinent d'associer la mission locale à la démarche de la maison de l'emploi. Ainsi, à Hérouville-Saint-Clair, lorsque nous mettons en place des chantiers d'insertion pour les chômeurs de longue durée ou les bénéficiaires du RMI, nous arrivons à étayer sur cette démarche un accompagnement de parcours professionnalisant. Les maisons de l'emploi éviteront aux chômeurs un vrai parcours du combattant ; disposer d'une structure qui regroupe tous les partenaires nous permettra d'être beaucoup plus réactifs sur le terrain.

M. Maxime Gremetz - Bonne nouvelle : M. le ministre Borloo arrive. Pour l'attendre, je demande une suspension de séance. Ainsi M. Borloo nous entendra, ce qui réparera le peu de cas qu'il fait de la représentation nationale. Eh quoi ? Nous débattons d'un vaste plan Borloo, de 10 à 15 milliards, et lui-même n'est pas là ? De mémoire de parlementaire, je n'ai jamais vu un ministre en user ainsi. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP)

M. le Président - Monsieur Gremetz, vous avez suivi nos débats sur les retraites et sur l'assurance maladie : il est souvent arrivé que M. Xavier Bertrand représente seul le Gouvernement en séance, en l'absence de M. Douste-Blazy.

M. le Président de la commission des affaires culturelles - Et sous l'ancienne législature !

M. le Président - En effet, la chose a dû aussi arriver alors. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste)

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Cela ne s'est jamais produit.

M. le Président - Quoi qu'il en soit, d'après le Règlement, le Gouvernement est valablement représenté dès lors qu'un ministre est au banc. M. Borloo est dans l'Assemblée, mais le Règlement ne précise pas qu'il doit rester vissé sur son siège pour toute la durée des débats...

M. Maxime Gremetz - La suspension est de droit.

M. le Président - Demandez-la pour un autre motif, par exemple pour réunir votre groupe...

M. Maxime Gremetz - Tout à fait !

La séance, suspendue à 15 heures 50, est reprise à 15 heures 55.

M. Maxime Gremetz - Une leçon de cet épisode, c'est que la bataille paie ! Je leur avais bien dit, Monsieur Borloo, que vous arriviez : ils n'ont pas voulu vous attendre, et c'est dommage.

L'article premier cherche à définir le service public de l'emploi et à créer une meilleure coordination entre ses composantes, en s'appuyant notamment sur la création des maisons de l'emploi. La définition du service public de l'emploi - terme que vous substituez à celui de service public de placement - est pour nous la source de vives inquiétudes. Certes, vous réaffirmez le principe selon lequel aucune rétribution directe ou indirecte n'est exigée des demandeurs d'emploi en contrepartie des services de placement. Pourtant, ce principe est mis à mal par la possibilité ouverte à des organismes privés - dont l'objet est la fourniture de services en matière d'insertion, de formation ou d'accompagnement des demandeurs d'emploi - de participer au service public de l'emploi. Comment cette perspective se traduira-t-elle concrètement ? L'expérience nous permet déjà de le savoir.

En effet, une étude a montré qu'un cabinet privé, à qui l'on a demandé d'exercer une activité de placement, a certes intérêt à placer des demandeurs d'emploi le plus vite possible...

M. Jean-Michel Fourgous - C'est de l'ultra libéralisme ! (Sourires)

M. Maxime Gremetz - ...mais qu'en l'occurrence, les trente premières personnes placées étaient les plus proches de l'emploi. Or, votre plan est censé favoriser les personnes qui en sont au contraire le plus éloignées. Non seulement votre projet ne résout rien, mais il remet en cause le service public de l'ANPE. Cette ouverture de l'activité de placement à des opérateurs privés conduit en effet à la suppression de fait du monopole de l'ANPE sur l'activité de placement. Ce sont les missions de service public de l'ANPE que vous fragilisez, d'autant que vous supprimez l'obligation faite aux employeurs de notifier à l'Agence toute place vacante dans une entreprise.

Ne s'agit-il pas enfin, à terme, d'une remise en cause du caractère gratuit de l'activité de placement, les opérateurs privés étant de plus en plus amenés à rechercher le profit maximum ? La création des maisons de l'emploi n'est pas, en soi, une mauvaise idée - l'amélioration de l'accueil, de l'orientation, de la formation et de l'insertion des chômeurs constitue un objectif louable. Mais outre que le statut juridique de ces maisons de l'emploi risque de favoriser des inégalités territoriales, elles relèguent les agences locales de l'ANPE au rang de simples agences publiques de placement à côté de bureaux privés aux moyens plus importants : ces agences risquent d'être absorbées totalement ou partiellement. Je signale que dans mon seul département par exemple, deux agences de l'ASSEDIC doivent être supprimées, à Friville-Escarbotin et Albert, ce qui compliquera considérablement les démarches d'inscription des demandeurs d'emploi.

M. le Président - Puis-je considérer que vous avez défendu l'amendement 211 ?

M. Maxime Gremetz - Non, mais d'ores et déjà je demande un scrutin public sur cet amendement.

M. le Président - Je suis saisi par le groupe communiste et républicain d'une demande de scrutin public sur l'amendement 211.

M. Maxime Gremetz - L'amendement 211 tend à supprimer cet article qui, sous des apparences vertueuses, vise en fait à remettre en cause le service public de l'emploi. Les organisations syndicales comme les associations qui oeuvrent en faveur de l'insertion des publics les plus éloignés de l'emploi s'en inquiètent à juste titre. Mme la Rapporteure, qui assure les avoir beaucoup écoutées doit le savoir.

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure de la commission des affaires culturelles - Avis défavorable car cet article est au coeur du premier des trois volets de notre projet.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Je profite de cette intervention pour répondre aux orateurs inscrits sur l'article.

Qui a initié les maisons de l'emploi, Monsieur Gorce ? A Lannion, au moment de la grande dépression du secteur des télécommunications, c'est le MEDEF et la CFDT.

M. Jean Le Garrec - En effet.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - La collectivité locale et l'Etat se sont alors engagés aux côtés des organisations représentatives. De même à Bressuire, où c'est un groupement d'entreprises et l'ensemble des organisations syndicales qui se sont engagés. A Bonneville, c'est la collectivité locale qui a pris l'initiative.

M. Jean Le Garrec - Ce n'est pas le problème.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Mme Billard a évoqué la nécessaire simplification des contrats et s'est interrogée sur la disparition des stages. Je rappelle que nous sommes passés de 14 contrats à 7, dont 4 principaux. Faudrait-il revenir sur cette diminution du nombre des dispositifs ?

Le PARE, Monsieur Le Garrec, a été institué en 2000 par les partenaires sociaux. Le projet ne le remet pas en cause...

M. Maxime Gremetz - Nous avons voté contre.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - ...et crée un nouveau dispositif pour les salariés des PME touchés par les licenciements économiques : il s'agit de développer encore plus l'accompagnement des demandeurs d'emploi.

A MM. Thomas, Anciaux et Gremetz, je rappelle que l'article premier, pour la première fois, inscrit dans la loi le service public de l'emploi...

M. Jean Le Garrec - C'est le point positif.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - ...qui ne relevait jusqu'ici que d'une circulaire de 1984.

Notre service public de l'emploi est à la fois centralisé et éclaté. En dépit des moyens importants que nous consacrons à nos politiques de l'emploi - 3% du PIB - notre pays compte 2,4 millions de chômeurs et, paradoxalement, 350 000 emplois non pourvus.

Pour y répondre, il faut d'abord faciliter le pilotage des trois grands réseaux nationaux, qui ont certes chacun leurs spécificités mais qui devraient être bien mieux coordonnés. Cela facilitera l'analyse des besoins, la formation et l'accompagnement des demandeurs d'emploi. La maison de l'emploi sera ce lieu de convergence. Elle ne sera pas bâtie sur un modèle unique, mais devra prendre en compte les spécificités territoriales. L'objectif de 300 maisons que nous avons fixé pour 2006 n'est pas un plafond : il y en aura beaucoup plus si c'est nécessaire ! Les maisons de l'emploi auront pour périmètre leur bassin d'emploi, lieu de convergence et de solidarité, aux réalités sociales et aux difficultés cohérentes. Dans certains endroits, les maisons couvriront un grand territoire. Dans d'autres, il faudra sans doute fractionner le bassin tel qu'il est défini pour l'instant, comme dans le Nord-Pas-de-Calais par exemple. Enfin, certains territoires en plus grande difficulté ont besoin d'une maison de l'emploi plus proche, comme Pierre Cardo est en train d'en bâtir une. Les maisons seront dotées de la personnalité morale et réuniront, dans le cadre d'une convention, service public de l'emploi, ANPE, ASSEDIC et Association pour la formation professionnelle des adultes pour travailler ensemble avec les partenaires sociaux, les chambres consulaires, les missions locales et tous les acteurs économiques et sociaux. Voilà pourquoi cet article premier est essentiel et pourquoi le Gouvernement ne peut pas être favorable à cet amendement.

Mme Martine Billard - Monsieur le ministre, je n'ai pas demandé le maintien des CIF, je souhaite qu'on en dresse le bilan. A l'heure actuelle, les chômeurs non indemnisés par les ASSEDIC n'ont plus accès à la formation en dehors des contrats aidés. Il faut régler ce problème.

M. Maxime Gremetz - Monsieur le ministre, vous n'avez pas répondu à cette question majeure : pourquoi refuser à notre service public de l'emploi les moyens en personnel nécessaires ? Pourquoi certains de ses bureaux doivent-ils fermer ? Ne dites pas non, je vous emmène les visiter ! Les ASSEDIC ferment un bureau à Albert et un autre à Friville-Escarbotin ! Votre idée de base n'est pas mauvaise. Nous avons décidé, dans ma région, de faire quinze maisons de la région, qui réuniront tous les services publics et les rendront plus proches des citoyens. La région est grande, ils ne doivent pas avoir à se rendre à Amiens ! Mais les maisons de l'emploi, qui comprennent tous les acteurs de l'emploi, dont les agences de placement privées, ouvrent la voie à la privatisation du service public de l'emploi et au règne de la rentabilité. Si vos services ne sont pas capables de vous tenir au courant des études récentes, je peux vous les communiquer : l'expérimentation que j'ai déjà évoquée a montré que ceux qu'on a voulu accompagner dans leur reclassement étaient ceux qui en avaient le moins besoin ! (Interruptions sur les bancs du groupe UMP) Voilà la réalité, elle nous permet de voir derrière vos arguments. Je suis d'accord pour simplifier le système, mais pas n'importe comment ! Vous fourrez dans les maisons de l'emploi des choses qui ne vont pas ensemble ! En revanche, nous sommes d'accord pour que l'accès à l'emploi ne ressemble plus à un parcours du combattant.

A la majorité de 36 voix contre 17, sur 53 votants et 53 suffrages exprimés, l'amendement 211 n'est pas adopté.

Mme la Rapporteure - La législation prévoit déjà des règles particulières d'agrément et de rémunération des agents sportifs qui opèrent le placement des joueurs. L'amendement 23 rappelle ces règles spécifiques, comme pour les agents artistiques.

L'amendement 23, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme Jacqueline Fraysse - L'article premier offre à l'ensemble des acteurs du placement la possibilité de se faire rétribuer pour leurs services. L'ANPE pourra ainsi se faire payer par les entreprises. L'inscription, même partielle, de l'ANPE dans le champ du marché n'est pas sans effets, sur l'institution certes, sur la politique de l'emploi, et sur les chômeurs eux-mêmes. Faire de l'ANPE un acteur marchand dénature ce service public, nous tenons à insister sur ce point. L'ANPE remplit un rôle capital dans la politique de l'emploi, quel que soit le gouvernement. Ce rôle est neutre et indépendant de toute considération financière. La transformer en acteur marchand va lui faire adopter des comportements économiques et financiers dans ses relations avec les entreprises et avec les chômeurs, alors que l'objectif de l'institution consiste à rapprocher l'offre et la demande d'emploi, sans arrière-pensée et sans en tirer de bénéfices.

Par ailleurs, cette façon de procéder est une nouvelle entorse aux conventions internationales que la France a ratifiées, qui définissent précisément les conditions du placement. Certes, vous prenez bien soin, dans ce texte, de ne pas obliger les chômeurs à payer le service de placement. C'était le minimum ! Mais en déséquilibrant la relation entre offreurs et demandeurs, vous ouvrez la porte à une modification ultérieure. L'argument sera simple : il suffira de dire, comme dans les agences privées, que le service rendu s'inscrit dans une relation commerciale. Vous aurez ainsi rendu marchande l'information sur l'emploi, secteur particulièrement lucratif dans votre perspective globale de flexibilisation du marché du travail. D'ailleurs, les agences d'intérim, auxquelles vous faites quelques cadeaux dans ce texte, sont très attentives à vos projets.

Mais ce n'est pas tout. Votre proposition est aussi particulièrement contreproductive en terme de création d'emplois. En faisant payer les entreprises, vous introduisez une discrimination entre elles. Vous facilitez les choses pour celles qui pourront assumer ce coût nouveau et vous excluez les plus petites et les moins riches, celles qui ont pourtant le plus besoin de trouver des salariés. Cette discrimination s'étendra aussi nécessairement aux chômeurs : les entreprises qui recourront malgré tout au service n'auront d'autre choix que de peser sur la rémunération, le coût de la formation et les conditions de travail des nouveaux embauchés. Nous réaffirmons donc la nécessité de garder ce service gratuit, financé par l'Etat. L'amendement 260 tend à préciser qu'il ne peut être demandé aucune rétribution, directe ou indirecte, aux offreurs d'emplois en contrepartie du service de placement.

Mme la Rapporteure - Avis défavorable. Le projet garantit la gratuité aux demandeurs d'emploi. Pour les entreprises offrant des emplois, l'ouverture à la concurrence implique que les nouveaux acteurs privés puissent leur facturer des services de la même manière qu'ils le font pour des prestations très comparables, comme le conseil en recrutement ou le reclassement en cas de fermeture de site. Le directeur général de l'ANPE, M. Bernard, s'est déclaré satisfait que l'Agence dispose d'une filiale, laquelle toutefois ne représenterait que 1% de son budget, soit 20 millions, et n'agirait que lors de reclassements dans des grands bassins d'emploi. Il est normal que ce service-là soit payé.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Le principe de gratuité vaut naturellement à l'égard des demandeurs d'emploi. La possibilité de demander aux entreprises de contribuer financièrement aux prestations de placements réalisés à leur demande ne met nullement en cause le bon fonctionnement du service public de l'emploi. La facturation de tous les services s'applique tant aux prestations privées qu'aux filiales de l'ANPE.

M. Maxime Gremetz - Après le marché aux esclaves, le marché aux chômeurs !

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Actuellement, l'ANPE est chargée par une très grande entreprise automobile française de recruter en particulier des jeunes dépourvus de qualification. Il est utile que ce soit l'Agence qui le fasse, et normal que cette prestation lui soit payée. Avis défavorable à l'amendement.

M. Gaëtan Gorce - Cet amendement met en lumière l'ambiguïté du texte. On nous parle de cohésion sociale, mais nous repérons ici et là de petites dispositions qui nous laissent pour le moins perplexes. La définition que vous donnez du service de l'emploi conduit à organiser la concurrence sur le marché de l'emploi. En quoi l'intérêt général y trouve-t-il son compte ? En revanche le risque est grand d'alimenter des organismes privés dont l'objectif est, tout naturellement, de réaliser des bénéfices et non pas de rendre un service public. Ils auront donc tendance à privilégier les chômeurs les plus faciles à réinsérer. Le risque est le même lorsque l'on donne à des organismes privés la mission d'exercer des contrôles ou de formuler des prescriptions dont la conséquence pourrait être la radiation ou la suppression de l'indemnisation. Au total, votre dispositif contient bien des éléments dangereux. A supposer que vos intentions soient bonnes, ce dont nous pouvons douter, le plan de cohésion sociale ressemble à une petite cuiller de sirop versée dans un grand bol d'huile de ricin.

L'amendement 260, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Francis Vercamer - Je ne suis pas mécontent que le premier de mes amendements tendant à lutter contre la discrimination porte sur l'anonymat partiel du CV. La lutte contre la discrimination met la France en émoi depuis vingt-quatre heures. Moi, voilà deux ans et demi que je suis mobilisé sur cette question souvent évoquée, mais rarement traitée, sauf par le code pénal.

Pourquoi rendre le CV anonyme ? demande-t-on souvent ; il n'est pas possible d'embaucher à l`aveugle. C'est vrai. Aussi s'agit-il de garantir l'égalité des chances devant l'embauche, et de permettre aux gens de défendre leur candidature face à l'employeur, qui choisit qui il veut.

Après discussion avec Mme de Panafieu, nous sommes convenus d'un nouvel amendement qui sera présenté au titre III relatif à l'égalité des chances. Pourquoi ce qui étonne pour le CV n'étonne pas s'agissant des offres d'emploi, qui pourtant sont elles-mêmes souvent anonymes ?

Mme la Rapporteure - M. Vercamer a bien fait de soulever un problème qui le préoccupe depuis longtemps. Aujourd'hui sa démarche est en passe d'aboutir, au moins partiellement. Comme il vient de l'indiquer, un autre amendement viendra se substituer à cet amendement 454, que je lui suggère de retirer. Je donnerai alors l'avis de la commission.

M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale - Vos amendements, Monsieur Vercamer, portent pour la plupart sur le problème de la discrimination, que vous connaissez bien, et qui est un enjeu de société capital. Notre pays se trouve à un moment de sa vie où ce qui paraissait impossible à envisager peut maintenant être examiné avec pragmatisme, dans l'objectif que nous partageons tous de rendre impossible la discrimination, tout en préservant la liberté d'embauche. De fait, des chefs d'entreprise ont fait des propositions, le Premier ministre a confié une mission à Claude Bébéar qui a rendu ses conclusions, vous-même vous reprenez cette problématique. Comme Mme la rapporteure, je vous propose de regrouper à l'article 58 toutes les propositions relatives aux objectifs et aux méthodes de lutte contre la discrimination, pour laquelle il est très important que la représentation nationale fixe le cap.

M. Francis Vercamer - Je ne tiens pas à débattre de la discrimination uniquement à l'occasion de cet amendement. Je le retire donc, pour reprendre au titre III la discussion sur la discrimination, qui est à la racine de la fracture sociale.

L'amendement 454 est retiré.

M. Jean Le Garrec - L'anonymat des candidatures ne vaudra que pour les entreprises de moins de 250 salariés, ce qui change presque tout. Ne traitons pas ce grave problème à la légère. En 2002, j'ai fait voter une loi contre les discriminations renforçant les pouvoirs des inspecteurs du travail et des organisations syndicales, avec un assez large accord de l'Assemblée puisque le groupe UMP s'était abstenu.

En la matière, on se contente trop souvent de déclarations d'intention. Après le débat sur le voile, où la plupart des cinquante orateurs avaient évoqué la lutte contre la discrimination, le groupe UMP avait décidé d'organiser dans les quarante-huit heures un débat sur le sujet : nous étions dix en séance !

Je me refuse à traiter ce problème au détour d'un amendement, qui est de surcroît retiré. Que le Gouvernement organise un vrai débat ! Masquer la réalité d'un problème derrière l'anonymat est d'ailleurs une grave erreur.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - C'est dur pour les personnes concernées.

M. Jean Le Garrec - Ce serait tout de même un paradoxe qu'après vous avoir demandé d'ôter le voile, on prétende le jeter sur ce que vous êtes en réalité ! C'est une approche insultante - le mot est fort, je vous le concède - non seulement pour la personne concernée, mais aussi pour l'entreprise.

J'admets volontiers que la législation actuelle et la répression soient insuffisantes, qu'il faille relancer la négociation avec les organisations syndicales, organiser une table ronde avec le patronat... Le problème est politique et culturel. J'insiste pour qu'il ne soit pas traité trop vite. Il ne sera pas difficile au Gouvernement de reprendre l'initiative sur le sujet.

M. Maxime Gremetz - Je comprends le souci de votre amendement, Monsieur Vercamer : lutter contre les discriminations, notamment à l'embauche, en faisant d'une personne un numéro. Mais je réclame un débat sérieux. Or, nous allons discuter toute une série d'amendements qui, eux non plus, n'ont jamais été examinés en commission. On fait diversion ! Lisez la presse d'aujourd'hui : à quoi réduit-elle votre grand plan de cohésion sociale ? A un amendement qui propose l'anonymat pour lutter contre les discriminations ! Je suis discriminé comme communiste, je dois donc devenir un numéro !

M. le Président de la commission des affaires sociales - On aura tout entendu !

M. Maxime Gremetz - Sommes-nous dans une société de numéros ou d'êtres humains ?

Prétendre résoudre le problème de la discrimination par l'anonymat, c'est ignorer comment se passe réellement une embauche. Pour avoir été au chômage, je le sais : vous envoyez votre CV, puis vous allez vous présenter...

Mme Martine Billard - Si on vous convoque !

M. Maxime Gremetz - Et là, stupeur. Un Noir ! Un communiste ! En quoi l'anonymat aura-t-il facilité l'embauche ? On dira à l'intéressé qu'il n'a pas le profil recherché !

M. le Président - Je vous rappelle que l'amendement a été retiré.

M. Maxime Gremetz - Faut-il baisser la garde sur la lutte contre les discriminations ? N'avons-nous pas créé une Haute autorité de lutte contre les discriminations ? Faut-il demander à des êtres humains de cacher leurs origines ? C'est masquer le problème, voire encourager le phénomène de la discrimination.

Je ne baisserai jamais la garde face aux attitudes racistes. Elles doivent être sanctionnées. A cet égard, Monsieur Larcher, je vous ai demandé quel était le nombre de plaintes déposées qui n'étaient pas suivies faute d'inspecteurs du travail.

En tout état de cause, je fais confiance au patronat pour trouver d'autres moyens de discrimination.

M. Francis Vercamer - Je confirme le retrait de l'amendement. Nos amendements ont été examinés en commission, Monsieur Gremetz, et je remercie la rapporteure d'en avoir repris un certain nombre à son compte pour que le débat soit lancé.

Je n'ai pas déposé seulement cet amendement, Monsieur Le Garrec : j'en ai proposé d'autres sur la formation des DRH, la charte de diversité... Cela fait deux ans et demi que je me bats sur ce sujet ! Je ne comprends pas qu'on puisse encore demander des études et autres commissions. C'est la meilleure façon d'enterrer le dossier.

Je ne vois pas ce que l'anonymat a de choquant. Le suffrage universel n'est-il pas anonyme ?

M. Maxime Gremetz - Avant de voter, on présente sa carte d'identité !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - L'amendement 674 vise à modifier la rédaction de l'article L 311-1 telle qu'elle a été adoptée par le Sénat. Nous souhaitons en effet mieux distinguer la définition du service public de l'emploi et les organismes chargés de l'assurer, et intégrer pleinement chacun des responsables dans le dispositif.

L'article L 311-1 préciserait donc que « le service public de l'emploi comprend le placement, l'indemnisation, l'insertion, la formation et l'accompagnement des demandeurs d'emploi » et qu'« il est assuré par les services de l'Etat chargés de l'emploi, l'ANPE et l'Association nationale pour la formation des adultes. » Seraient ensuite déclinées les conditions de l'intervention des autres organismes et précisée la vocation particulière des collectivités territoriales.

Les missions locales, les PAIO, les collectivités territoriales pourraient être associées au service public de l'emploi dans le cadre de conventions.

Les objectifs du service public de l'emploi seraient fixés par une convention nationale qui serait déclinée dans chaque département par des conventions territoriales. Serait enfin posé le principe, pour les organismes privés, de la signature d'une convention avec l'ANPE.

Mme la Rapporteure - La commission a repoussé cet amendement. L'ANPE ne recueille aujourd'hui qu'un tiers des offres d'emplois et de très nombreux placements sont effectués par des organismes privés. Le texte proposé par le Gouvernement a le mérite de reconnaître la situation actuelle et de mieux l'encadrer. Il n'est pas possible d'aller plus loin en exigeant des opérateurs privés qu'ils signent une convention avec l'ANPE.

M. le Ministre délégué - Avis défavorable.

L'amendement 674, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Notre amendement 675 tend à ce que les missions locales et les PAIO soient pleinement reconnues au sein du service public de l'emploi.

Etant absent, M. Zuccarelli m'a demandé de défendre son amendement 254 qui va dans le même sens. La qualité du travail et le professionnalisme des missions locales et des PAIO ne peuvent être contestés, écrit-il. Plus de 900 000 jeunes se rendent chaque année dans une mission locale, où un sur deux a pu bénéficier du programme TRACE. Les missions locales sont par ailleurs les seuls organismes disposant d'une base de données en temps réel sur l'insertion sociale et professionnelle des jeunes. Comment pourraient-elles être exclues du service public de l'emploi ?

M. Rodolphe Thomas - Notre amendement 727 a le même objet. Les missions locales jouent un rôle clé dans l'insertion et le placement des jeunes, leur ouvrant de réelles passerelles vers des emplois du secteur marchand. Elles doivent faire partie du service public de l'emploi.

M. Jean-Paul Anciaux - Lors de la récente assemblée générale des missions locales au Creusot, j'avais indiqué à M. Hénart que je déposerais un amendement allant dans le sens des précédents. Mon amendement 22 est toutefois plus précis indiquant que peuvent participer au service public de l'emploi « les associations nationales ou réseaux associatifs nationaux conventionnés avec le service public de l'emploi, reconnus pour leur utilité sociale dans le domaine de l'emploi, notamment les missions locales, les PAIO, mais aussi d'autres organismes conventionnés et à l'utilité reconnue.

Mme la Rapporteure - Tous les élus locaux et tous les parlementaires savent quel rôle jouent les missions locales sur le terrain, et la commission a d'ailleurs largement auditionné le secrétaire général de leur conseil national. Pour autant, les intégrer dans le premier cercle du service public de l'emploi emporterait des conséquences juridiques non négligeables. En effet, l'article 7 du texte dispose que le non-respect de mesures d'aide au retour à l'emploi ou d'accès à une formation prescrites par l'un des acteurs de ce premier cercle peut entraîner une radiation des listes de demandeurs d'emploi et une suspension, voire une suppression, des allocations chômage. Dans la mesure où existe cette possibilité de sanction, il paraît très difficile d'élargir le premier cercle. Cela étant, la commission a adopté à l'article premier bis un amendement reconnaissant la mission de service public des missions locales.

M. Laurent Hénart, secrétaire d'Etat à l'insertion professionnelle des jeunes - Les missions locales concourent-elles au service public de l'emploi. Assurément. Pour autant, elles présentent des particularités qu'il importe de conserver et qui font qu'elles ne peuvent faire partie des acteurs du premier cercle. D'une part, n'étant pas obligatoires, elles résultent toujours de l'initiative d'une collectivité ou de plusieurs collectivités, si bien qu'il n'en existe pas partout sur le territoire. D'autre part, contrairement aux acteurs du premier cercle, elles ne détiennent pas de monopole et offrent aux jeunes un accompagnement plus large, incluant non seulement les aspects de formation et d'emploi, mais aussi de logement, de santé...

L'amendement 28 de la commission à l'article premier bis, que vient d'évoquer la rapporteure, ainsi que deux amendements ultérieurs de M. Vercamer et de M. Joyandet à ce même article préciseront que les missions locales participent bien au service public de l'emploi, sans risque de remettre en question leurs particularités. Aussi le Gouvernement vous demande-t-il de bien vouloir retirer ces quatre amendements au profit de ceux à venir.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - M. Zuccarelli m'avait demandé de retirer son amendement si des explications satisfaisantes étaient apportées. Je crois donc pouvoir retirer l'amendement 254. Je maintiens en revanche le nôtre. Les missions locales et les PAIO se sont inquiétées à l'idée de n'être pas reconnues comme acteurs du premier cercle du service public de l'emploi, et ce d'autant plus qu'elles ont déjà traversé beaucoup de turbulences ces dernières années concernant leur financement ou leur conventionnement.

A partir du moment où l'on crée une hiérarchie entre les différentes structures chargées de l'emploi, il est normal que certaines se demandent si elles ne vont pas disparaître. J'ai entendu les explications juridiques de Mme de Panafieu, mais je crois vraiment que la rédaction du Sénat rend les choses beaucoup plus confuses. La rédaction du Gouvernement articulait mieux le dispositif. Là, on dilue, et je ne comprends toujours pas pourquoi on ne pourrait pas introduire les missions locales dès le premier alinéa. Le rattrapage que vous effectuez ensuite génèrera des difficultés.

M. Pierre Cardo - Je crois qu'il faut distinguer trois niveaux : d'abord, le service public de l'emploi, qui comprend tout ce qui a été dit, ANPE, AFPA, assurance chômage ; ensuite, les organismes qui participent au service public de l'emploi, missions locales, PAIO, mais aussi les PLIE ; enfin, tous les autres qui « peuvent » participer audit service public - entreprises privées, sociétés d'intérim...

M. Jean-Paul Anciaux - Je vais retirer mon amendement, compte tenu des assurances qui m'ont été données par le Gouvernement. Il est clair que les missions locales participent au service public de l'emploi, mais il existe d'autres structures qui le font, je pense par exemple aux comités de bassin. Si on retient les deux critères que sont l'appartenance à un réseau national et le fait d'être reconnu par le service public de l'emploi, on va en réalité au-delà des missions locales, et toutes ces structures qui émergent du terrain peuvent s'intégrer dans le deuxième cercle qui a été défini par le ministre.

M. Rodolphe Thomas - Je retire mon amendement, mais il faut vraiment insister sur le fait que les missions locales sont partie intégrante des maisons de l'emploi

M. le Président - Les amendements 254, 22 et 727 sont donc retirés.

L'amendement 675, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Pierre Cardo - Quand je suis devenu maire et que j'ai voulu créer des structures locales pour l'emploi, beaucoup de collègues du département m'ont dit que je me mêlais là de choses qui ne regardaient pas un maire. Depuis, les choses ont beaucoup évolué et chacun sait que les collectivités territoriales et les élus sont très concernés par l'emploi. Peut-être ne font-elles pas partie du premier cercle, mais elles n'en sont pas moins en première ligne. Je propose donc, dans mon amendement 950, d'inverser l'ordre des alinéas et de placer les collectivités territoriales et leurs groupements avant les organismes tels que les entreprises de travail temporaire.

Mme la Rapporteure - Avis favorable.

M. Gérard Larcher, ministre délégué aux relations du travail - Votre préoccupation rejoint celle qui a présidé à la création des maisons de l'emploi, à savoir renforcer la politique territoriale de l'emploi. Avis favorable.

L'amendement 950, mis aux voix, est adopté.

M. Bertho Audifax - Compte tenu des explications qui ont été données sur les maisons de l'emploi, je retire mon amendement 551.

M. Jacques Desallangre - L'amendement 212 de notre groupe tend à supprimer, à la fin du deuxième alinéa, les mots : « les entreprises de travail temporaire ainsi que les agences de placement privé mentionnées à l'article L.312-1. » On peut douter en effet que l'introduction de ces opérateurs privés soit compatible avec la mission du service public de l'emploi. Elle conduirait de fait à supprimer le monopole de l'ANPE sur l'activité de placement, qui garantit l'intérêt général. L'ANPE serait fragilisée de ce fait, comme elle le serait par la suppression de l'obligation faite aux employeurs de lui notifier toute place vacante dans leur entreprise. Ne peut-on craindre d'autre part une remise en cause indirecte du principe de la gratuité des activités de placement ? Maintenant que les opérateurs privés sont introduits, la prochaine étape pour eux sera logiquement la recherche du profit maximal. Va-t-on créer un marché du placement, spéculer sur le chômage ? Cela pose de graves problèmes éthiques, et nous ne pouvons prendre ce risque. Nous proposons donc de maintenir le rôle de l'ANPE et de circonscrire celui des opérateurs privés.

Mme Martine Billard - Mon amendement 324 est identique. On nous dit certes qu'il n'y a plus de fait monopole des annonces pour l'ANPE, et que cet article ne fait donc qu'entériner une situation. Mais tout d'abord son écriture comporte beaucoup de flou et de complexité. En outre, si en effet il n'y a plus de monopole total de l'ANPE sur les offres d'emploi - du fait que certains secteurs professionnels très ciblés passent les offres sur des réseaux spécifiques - il demeure une majorité d'offres d'emploi qui passent par différents réseaux, mais aussi par l'ANPE. Le risque est donc que demain les demandeurs d'emploi soient obligés de courir en plusieurs lieux pour trouver les annonces qui peuvent leur correspondre. Jusqu'ici la concurrence entre réseaux d'offre concerne surtout certains secteurs ciblés et des emplois du type cadre supérieur ; elle risque de s'étendre demain à tous les demandeurs d'emploi, ce qui aggravera les difficultés inhérentes à la recherche d'un emploi.

Et voilà qu'en outre on ajoute les entreprises de travail temporaire. Elles sont vraiment choyées depuis que votre gouvernement est en place : dans chaque loi touchant au domaine social on les introduit, hier sur le RMA, aujourd'hui sur le placement, bientôt sur d'autres dispositions de ce texte... Or, un rapport de la présidente de la Délégation aux droits des femmes vient de montrer l'aggravation de la pauvreté féminine liée au développement du temps partiel. Si l'on y ajoute une explosion de l'intérim, dont les missions peuvent être très courtes - de telle sorte qu'elles n'ouvrent droit à aucune indemnisation lorsqu'on se retrouve sans offre d'emploi - il faut s'attendre à une nouvelle aggravation de la précarité. On nous dit certes que les sanctions ne peuvent résulter que du non-respect par les demandeurs d'emploi des obligations du premier cercle. Mais je crains que l'ambiguïté du texte ne permette bientôt de refuser une indemnisation pour tout refus d'une offre émanant d'un quelconque acteur des différents cercles. A terme - et peut-être plus tôt qu'on ne pense - les demandeurs d'emploi devront vraiment tout accepter, sous peine de se retrouver sans aucun revenu. Ouvrir cette voie dans une loi de cohésion sociale est plus que contradictoire !

M. Patrick Roy - Notre amendement 676 est identique aux deux précédents. Je suis convaincu que l'ANPE sera fragilisée par l'arrivée du secteur privé. Le service public de l'emploi doit être réservé à la puissance publique. L'ouvrir au privé crée un grand risque d'aboutir à un placement à deux vitesses : par définition le secteur privé s'intéressera aux chômeurs les plus directement employables, laissant aux acteurs publics ceux qui sont les plus éloignés de l'emploi. C'est inévitable, puisque la vocation du privé est de rechercher le profit. Moralement, nous ne pouvons accepter que des entreprises fassent du profit sur le malheur des chômeurs. A coup sûr, dans une loi de cohésion sociale, le Gouvernement et la commission ne l'accepteront pas, et approuveront nos amendements.

Mme la Rapporteure - La commission est défavorable à ces amendements. L'alinéa qu'ils veulent supprimer constate que certains organismes participent à l'activité de placement : en les nommant au titre du service public de l'emploi, il leur impose certaines obligations, notamment la gratuité du service aux demandeurs d'emploi et la non-discrimination.

Il est d'autre part abusif d'attaquer sans cesse les entreprises de travail temporaire. Une étude a été conduite sur les personnes se trouvant en intérim en avril 2002. Elle a montré que 44% d'entre elles étaient auparavant des demandeurs d'emploi. Un an plus tard, en mai 2004, 18% étaient encore dans la même situation, tandis que 58% occupaient un emploi temporaire et 14% un CDI. L'intérim est donc un moyen de s'insérer dans l'emploi, et même de parvenir à un emploi stable.

Mme Martine Billard - Pour 14% !

Mme la Rapporteure - Depuis dix ans les entreprises d'intérim ont beaucoup évolué. Elles ont des obligations de formation qui vont au-delà, en termes financiers, des obligations habituelles ; elles ont des salariés qui peuvent être syndiqués, et fonctionnent de plus en plus comme des entreprises plus classiques. Il n'y a plus lieu de leur lancer l'anathème.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Le Gouvernement partage l'avis de Mme la rapporteure. Concernant l'intérim, je souhaite reprendre les chiffres de 2002 fournis par la DARES - dont chacun reconnaît l'impartialité. Le secteur privé regroupait alors 15,5 millions de salariés. Cet ensemble d'emplois se décompose ainsi : 91% de CDI, 5,7% de CDD, enfin 3,3% d'intérims. Que deviennent ceux qui passent par l'intérim ? Parmi les personnes qui se déclaraient en intérim, et sur la base du ratio cumulé de 2002 et 2003, 30% sont en CDI ou dans des structures non salariées, mais avec une activité ; 10% sont en CDD ou en emplois aidés ; 40% sont encore en intérim ; enfin 15% sont au chômage.

Je souhaite rappeler la position du Gouvernement, à l'heure où nous discutons un projet de directive européenne sur l'intérim. Cette position - que nous partageons notamment avec la Belgique - est la plus exigeante de toute l'Union européenne : c'est l'égalité de traitement, à tous égards, dès le premier jour. Il faut d'ailleurs noter que depuis vingt ans les entreprises de travail temporaire se sont dotées de structures conventionnelles, qui permettent notamment la formation, et que naturellement elles participeront au dispositif de formation tout au long de la vie. La principale préoccupation porte sur les jeunes face à l'intérim. Parmi les jeunes en phase d'insertion, c'est-à-dire ceux qui ont quitté le système scolaire depuis moins de cinq ans, 20% occupent une forme particulière d'emploi, CDD, intérim ou contrat aidé ; un quart seulement des embauches de jeunes de moins de trente ans se fait sur CDI. La probabilité de passage d'un contrat temporaire à un emploi stable est plus élevée pour les jeunes en phase d'insertion que pour leurs aînés : 40% des jeunes qui étaient sur un emploi de type particulier occupent un emploi stable un an plus tard, contre 35% pour les moins de cinquante ans et, malheureusement, 27% pour les plus de cinquante ans : il y a donc bien un problème vis-à-vis des seniors, et cela ouvre sur la priorité qu'accorde le Gouvernement à la négociation interprofessionnelle sur l'emploi des seniors, dont on voit qu'ils sont réellement discriminés sur le marché du travail.

La probabilité de la transformation de ces formes particulières d'emploi en CDI s'accroît bien sûr avec les diplômes : 48% des titulaires de diplômes de l'enseignement supérieur ont trouvé un emploi stable, contre 22% de ceux qui n'ont aucun diplôme. Voilà qui montre l'importance de la formation, qui est un des acquis du plan de cohésion sociale ; c'est ce qui sépare les contrats d'avenir des CES et des contrats jeunes sans formation.

Le contrat d'avenir, lui, prévoit une formation et une validation des acquis tout en contribuant à la revalorisation de l'apprentissage. L'intérim ne mérite ni excès d'honneur ni indignité. Depuis vingt ans, la situation des intérimaires a beaucoup changé. Avis défavorable.

M. Jacques Desallangre - Je ne suis pas convaincu par ce bel exposé. Certes, il est facile de dire que l'on accède aux CDI à partir des CDD puisque 80% des nouveaux contrats de travail sont aujourd'hui des CDD. Mais les agences d'intérim vont en fait devenir les instruments de votre politique de précarisation de l'emploi. Vous savez, de plus, que l'intérim n'est pas choisi mais subi.

M. Charles Cova - Pas toujours.

M. Jacques Desallangre - Vous évoquez le rôle des sociétés d'insertion en matière de formation, mais prouvez ce que vous avancez ! Les entreprises d'intérim n'ont aucun intérêt à assurer une formation et encore moins à faire accéder ceux qu'elles exploitent aux CDI. Nous sommes résolument opposés à toute institutionnalisation de l'intérim.

M. Patrick Roy - Mon collègue a été si convaincant que je ne doute pas du plein accord de M. le ministre (Sourires).

Je n'ai pas voulu jeter l'anathème sur l'intérim. J'ai seulement rappelé qu'il existe un secteur privé et un secteur public et que c'est une question de morale de ne pas mêler service public de l'emploi et recherche du profit. Un parallèle avec l'école peut être esquissé : il est toujours facile de faire réussir les meilleurs élèves, mais l'école doit surtout assurer la promotion de tous. Il en va de même pour le SPE.

Comme M. Desallangre, je rappelle en outre qu'en période de chômage de masse, l'intérim est subi et non choisi.

Enfin, je suis également partisan du développement de la formation : nous devons faire le maximum pour sortir de ce drame national qu'est le chômage, mais votre plan n'apporte que des réponses très limitées.

Comme nous avons été convaincants, je suis certain que nous allons avoir une vraie loi de cohésion sociale (Sourires).

M. Charles Cova - Vous êtes bien le seul à vous trouver convaincant.

Mme Martine Billard - Il ne s'agit pas de diaboliser l'intérim dès lors, comme le prévoit le code du travail, qu'il est utilisé dans le cadre du remplacement de salariés malades ou afin de répondre à des périodes d'intense activité. Mais il n'était pas question, jusqu'ici, de proposer aux demandeurs d'emploi des missions d'intérim dans le cadre du service public de l'emploi, et cela au nom des Verts, je continue à le refuser.

Vous évoquez les taux de CDI dans les embauches, mais le rapport en fait foi : ils n'ont cessé de baisser depuis l'an 2000, passant de 32,3% à 28,4% en 2003. Il est vrai que l'on peut toujours proposer à nos jeunes de commencer leur vie professionnelle par les contrats aidés, puis les missions d'intérim, les CDD et, peut-être qu'à l'âge de trente-cinq ans ils finiront par obtenir un CDI, mais telle n'est pas mon idée de la société.

M. Alain Gest - C'est pour cela qu'il faut arrêter de caricaturer.

Mme Martine Billard - Je ne caricature pas, c'est la situation que vivent et que vivront quantité de personnes.

Enfin, les contrats aidés tels qu'ils existaient jusqu'ici prévoient déjà la possibilité ou l'obligation de formation. Les contrats que vous proposez n'apportent aucune amélioration. Je rappelle que, lorsqu'un chômeur est indemnisé par les ASSEDIC, il peut bénéficier de formations dont la durée ne peut hélas être supérieure à la durée d'indemnisation et que lorsque ce n'est pas le cas, soit la personne en question bénéficie des minima sociaux et entre dans la catégorie des emplois aidés, soit elle ne bénéficie d'aucune indemnisation faute de pouvoir y prétendre, par exemple en raison de sa situation familiale. Il est alors presque impossible de bénéficier d'une formation, ce que je ne peux que regretter.

M. Pierre Cardo - Les entreprises d'intérim participent peu ou prou au service public de l'emploi, même si leur comportement peut toujours être critiqué, comme d'ailleurs celui d'autres structures. Associer dans la loi ces entreprises au SPE, n'est-ce pas précisément un moyen de les contrôler un peu plus, est-ce toujours négatif ?

M. Jacques Desallangre - C'est en tout cas dangereux.

M. Pierre Cardo - Mais un encadrement est possible à travers des accords ou des conventions et donc, à travers un cahier des charges.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - M. Cardo est pragmatique. Je rappelle que dans le cadre des collectivités territoriales, les forums pour l'emploi rassemblent tous les acteurs concernés - et donc les entreprises d'intérim.

Mme Billard a évoqué la situation des femmes : le Gouvernement est particulièrement attentif à ce que le service du droit des femmes soit partie intégrante du SPE, comme il est attentif au développement de l'égalité professionnelle.

Les amendements 212, 324 et 676, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Patrick Roy - J'ai eu l'occasion de le dire : cette loi ne répond pas aux objectifs qu'elle se fixe. Nous nous opposons sur le sens à donner à la cohésion sociale, au rôle de l'Etat, à celui et du secteur privé.

De plus, ce projet est extrêmement flou, notamment en ce qui concerne les maisons de l'emploi.

L'amendement 677 précise donc le contenu de la convention pluriannuelle passée entre l'Etat, l'ANPE et les organismes de l'assurance chômage. Il est important de clarifier les objectifs du service public de l'emploi, ses moyens de coordination et ses modalités de déclinaison locale.

Mme la Rapporteure - La commission a repoussé l'ensemble des amendements qui visent à donner une nouvelle rédaction à l'article premier.

Mme Jacqueline Fraysse - Bel argument !

M. Gérard Larcher, ministre délégué - La convention pluriannuelle tripartite entre l'Etat, l'UNEDIC et l'ANPE est préconisée dans de nombreux rapports, dont celui de M. Marimbert. L'objectif est le renforcement de la synergie entre ANPE et UNEDIC : le guichet et le dossier uniques font partie de cette logique. L'AFPA appartient à ce qu'on appelle le premier cercle. Elle participe pleinement aux orientations de la politique de l'emploi, tant au niveau national que territorial. La convention tripartite ne doit pas devenir une sorte de calcification définitive de ce que doit être la maison de l'emploi ! Les réponses à apporter sont différentes outre-mer, en Ile-de-France ou dans le Nord-Pas-de-Calais. Il faut privilégier la souplesse et l'adaptation aux réalités du terrain. Nous ne pouvons donc accepter cet amendement.

L'amendement 677, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Jacqueline Fraysse - Vous avez modifié la définition des acteurs du service public de placement et des conditions particulières dans lesquelles ce service fonctionne, en élargissant à de nouveaux acteurs la prérogative du placement et en créant une convention qui sera en fait un outil de contrôle de l'ANPE. Cette convention, signée entre l'ANPE et les organismes d'assurance chômage, précisera les objectifs du service public de l'emploi et leur adaptation au plan local. L'amendement 261 répare un oubli du Gouvernement : la dimension financière. Il est en effet curieux de constater que sur ce point, la loi de programmation est vide. Vous êtes prolixes sur les objectifs fixés à l'ANPE, mais pas sur les moyens supplémentaires dont elle a besoin pour les atteindre. Le financement sera-t-il assuré par l'Etat ou par les collectivités locales ? Le fait que vous introduisiez les collectivités locales dans le GIP qui fondera les maisons de l'emploi y est-il lié ? De la réponse dépendra l'égalité de traitement des chômeurs sur l'ensemble du territoire. Quels que soient les moyens dont ils disposent, les communes, les départements et les régions ne peuvent être considérés comme des vaches à lait, ainsi que vient de le rappeler l'association des maires de France. Le financement public de ces activités doit apparaître clairement dans les conventions territoriales.

Mme la Rapporteure - Avis défavorable. On ne négocie pas à trois un financement public : il s'agit de contrats bilatéraux. Cet amendement est en fait contraire au paritarisme. L'ANPE, si elle voulait passer un contrat avec l'Etat, ne serait pas heureuse de voir subitement surgir un troisième partenaire dans la négociation du financement. Et si l'UNEDIC et l'ANPE se rapprochent, ils n'aimeront pas que l'Etat s'immisce dans la discussion. Il faut respecter les règles du paritarisme.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - La convention tripartite ne porte pas sur les moyens financiers : c'est le contrat de progrès entre l'Etat et l'ANPE qui règle cette question. Ce contrat va être renouvelé dans les premières semaines de 2005. Il sera bien sûr élaboré parallèlement à la convention tripartite. L'UNEDIC est paritaire, et la convention tripartite n'a pas vocation à ficeler de tels organismes. Il ne faut pas restreindre le paritarisme.

L'amendement 261, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Jacqueline Fraysse - Le service de l'emploi a besoin, pour remplir ses objectifs, des moyens financiers adéquats. Le financement public de ses activités, ses circuits et ses destinataires doivent donc clairement apparaître dans les conventions territoriales. Pour parvenir à cette transparence, nous demandons, par l'amendement 262, qu'un rapport annuel d'activité soit remis aux élus locaux, définissant la nature et les moyens de ces objectifs. Vous introduisez les collectivités locales dans votre dispositif. Il est donc normal que leurs élus soient informés sur la question.

Mme la Rapporteure - Avis défavorable. Encore un rapport ! Les statistiques existent, qui proviennent du ministère et d'autres organismes. Il suffit de s'y reporter.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Je rappelle en outre que le comité régional de l'emploi, placé sous l'autorité du préfet, examinera le fonctionnement du service public de l'emploi.

L'amendement 262, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Claude Sandrier - La convention pluriannuelle détermine les modalités de coordination des actions respectives du ministère, de l'ANPE et des organismes d'assurance chômage, et de transmission des informations nécessaires entre elles. L'amendement 213 propose de préciser qu'il s'agit des informations « strictement » nécessaires. Vous voulez réaliser d'ici 2006 un dossier unique du demandeur d'emploi, accessible aux différents réseaux. C'est plutôt positif, mais l'article premier n'envisage aucune garantie de confidentialité. Un tel fichage avait cours au XIXe siècle : c'était le livret ouvrier. Il faut donc veiller à ce que seules les informations objectives minimales et à caractère non personnel figurent dans ce dossier, à titre parfaitement confidentiel.

Mme la Rapporteure - La commission a rejeté cet amendement, qui ne semble pas avoir beaucoup de portée. L'encadrement du dispositif est de toute façon assuré par la commission informatique et liberté.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Le texte prévoit, conformément à la loi du 6 janvier 1978 relative à la CNIL, que l'accès à ces informations ne vaut qu'en tant que de besoin, pour la seule réalisation des actions menées par chaque intervenant sur le marché du travail.

La CNIL veille au respect des dispositions de la loi de 1978. L'amendement n'apporte donc aucune protection supplémentaire.

M. Patrick Roy - Puisque le Gouvernement déclare partager la préoccupation des auteurs de l'amendement, tout en jugeant ce dernier inutile, et puisque la disposition proposée n'a pas de portée idéologique, pourquoi la refuser ? Ce serait laisser croire que vous pourriez nourrir des arrière-pensées.

L'amendement 213, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Francis Vercamer - Voilà quelques mois, lors d'une autre discussion, j'avais proposé de créer le guichet unique pour les demandeurs d'emploi. Le Gouvernement avait accepté de consacrer à ce sujet un rapport, qui doit être remis avant le 31 décembre. Aujourd'hui, je demande, par l'amendement 726, la constitution et l'accès à un dossier unique.

Mme la Rapporteure - Je m'en étais remise à la sagesse de la commission, qui n'a pas été convaincue.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Nous partageons la préoccupation de M. Vercamer. De fait, la convention tripartite porte sur l'interopérabilité des données détenues par les agents des grands opérateurs, dont la plupart des réseaux sont très difficilement compatibles. Le Gouvernement s'est fixé pour objectif la réalisation du dossier unique, qui existe chez presque tous nos partenaires. Il n'y a guère que chez nous que subsistent trois dossiers distincts pour le même demandeur d'emploi. Avis favorable.

L'amendement 726, mis aux voix, est adopté.

M. Francis Vercamer - Dans la suite du précédent, l'amendement 471 tend à faire participer l'AFPA, principal organisme de formation, à la constitution du dossier unique.

Mme la Rapporteure - La commission estime que l'AFPA n'a pas vocation à participer au dossier unique, car elle ne peut pas être juge et partie.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Même avis défavorable. En effet, dans certains territoires, d'autres organismes de formation que l'AFPA auront à intervenir. Je vous suggère de retirer l'amendement.

L'amendement 471 est retiré.

M. Patrick Roy - Tout à l'heure, Mme la rapporteure a rejeté un amendement au motif qu'il conduirait à récrire l'article premier. Cet argument, assez faible, laisse peu d'espoir à nos amendements 678 et 679, puisqu'ils ont le même effet. Le Gouvernement propose d'élaborer une convention territoriale de développement de l'emploi, qui doit servir de cadre à l'action du service public de l'emploi à un niveau pertinent. Il nous paraît nécessaire, sur ce point, de bien anticiper les plans de conversion et de tout faire pour qu'à terme cette convention favorise la cohérence entre les objectifs nationaux et locaux. Nous espérons que le Gouvernement aura la sagesse d'approuver ces amendements, mais l'intransigeance de la rapporteure risque d'y faire obstacle.

M. Jean Le Garrec - Ecoutez la voix de la sagesse, Monsieur le ministre !

Mme la Rapporteure - Ce n'est pas de l'intransigeance, mais de la cohérence. Votre vision, Monsieur Roy, est très respectable, mais elle est incompatible avec celle qu'exprime le projet. Avis défavorable.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Sagesse est mère de cohérence. Avis défavorable. Je suis désolé, Monsieur Le Garrec !

M. Patrick Roy - Et moi je suis déçu !

L'amendement 678, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Président - L'amendement 679 tombe.

M. Patrick Roy - Je ne doute pas que la sagesse du Gouvernement le conduise à adopter notre amendement 680, même si nous soulevons là une divergence majeure entre notre lecture du projet et la vôtre. On pouvait attendre de ce plan de cohésion sociale, par son nom même, qu'il offre des droits nouveaux, des garanties et des protections nouvelles aux demandeurs d'emploi, et tende à la réalisation du plein emploi. Or nous y découvrons beaucoup de souplesse pour les entreprises, et beaucoup de rudesse pour les chômeurs, qui sont exposés à de nouvelles sanctions, sans que rien soit fait pour leur proposer un emploi véritable. Cette absence d'équilibre est regrettable. Face à de nouveaux devoirs, l'Etat doit apporter de nouveaux droits. Ou alors, il ne s'agit plus de cohésion sociale.

Mme la Rapporteure - Le dernier paragraphe de cet amendement, qui dispose que « tout employeur est tenu de notifier à l'ANPE toute place vacante dans son entreprise » suffit à lui seul à justifier son rejet par la commission : il va exactement à l'encontre de l'objectif recherché.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - La mission du service public de l'emploi est précisément de fournir « le service adéquat, au bon moment, à la bonne personne. » Le dispositif PARE-PAP a été initié par les partenaires sociaux dans le cadre de la convention du 1er janvier 2001. Le PARE n'est pas supprimé. Nous y ajoutons un dispositif complémentaire de droit au reclassement, destiné notamment aux salariés des PME, qui fera l'objet de l'article 37. Je ne suis donc pas favorable.

L'amendement 680, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Alain Gest - L'amendement 501 est défendu.

Mme la Rapporteure - Je préfère l'amendement 24 de la commission.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Même avis.

L'amendement 501, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme la Rapporteure - L'amendement 24 vise à mentionner dans l'intitulé de la section 5 du chapitre 1er du titre 1er du livre II du code du travail les intercommunalités, dont les compétences sont de plus en plus nombreuses.

M. Rodolphe Thomas - L'amendement 620, identique, répond à la même argumentation.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Avis favorable aux deux amendements, dans la logique de la réponse que nous avons faite à Pierre Cardo.

Les amendements 24 et 620, mis aux voix, sont adoptés.

Mme la Rapporteure - Avec l'amendement 25, la commission a adopté une précision, proposé par M. Perrut.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Il s'agit de définir un territoire d'action pertinent pour les maisons de l'emploi. L'adaptation à la configuration des bassins d'emploi doit s'apprécier en fonction des besoins identifiés sur le territoire; la souplesse est, en effet, indispensable.

M. Francis Vercamer - Le groupe UDF est bien sûr favorable à cet amendement. Je souhaiterais néanmoins que le ministre nous confirme qu'il peut y avoir plusieurs maisons de l'emploi dans un bassin d'emploi. N'oublions pas que certains bassins d'emploi comptent jusqu'à 100 000 habitants.

M. Jean Le Garrec - L'intervention de M. Vercamer est des plus pertinentes. Je me suis donc trompé en avançant tout à l'heure l'hypothèse d'une quarantaine de maisons de l'emploi pour le Nord : il nous en faut 175. (Rires)

M. Pierre Cardo - Laissez-en pour les autres !

M. Jean Le Garrec - Il en faut à peu près autant pour le Pas-de-Calais et notre région accueillerait les 300 maisons de l'emploi qui sont prévues ! Il faut donc redimensionner le dispositif, sans quoi on risque de bâtir des monstres qui ne correspondront à aucune réalité.

M. Pierre Cardo - Je suis plutôt favorable à cet amendement. Je me pose néanmoins une question. Il est dit que le ressort des maisons de l'emploi ne peut excéder la région. Quid de ma commune, qui est située dans un bassin d'emploi à cheval sur les régions Ile-de-France et Haute-Normandie ?

M. Jean Le Garrec - M. Cardo simplifie le problème. (Sourires)

M. Pierre Cardo - Le texte ouvre la voie à différentes interprétations. Il me semble donc souhaitable d'apporter une précision.

M. Jean-Paul Anciaux - La notion de bassin d'emploi est importante pour la mise en œuvre des dispositifs et l'intervention des acteurs. Dans certaines régions, comme la Bourgogne - pour prendre l'exemple d'une région qui m'est chère - les maisons de l'emploi intégreront parfois, compte tenu de la démographie, plusieurs bassins d'emploi. Dans le Nord-Pas-de-Calais, il y aura à l'inverse plusieurs maisons dans les grands bassins d'emploi. L'essentiel est que la maison de l'emploi soit la tête de réseau. L'existant sera évidemment pris en compte. Quant aux chevauchements, je pense que, dans ce cas, l'entité la plus grande pourrait être porteur du projet.

M. Jean Le Garrec - Notre collègue Cardo a posé le problème des frontières régionales, auquel on peut ajouter celui des frontières nationales - notre Flandre travaille de plus en plus avec la Flandre belge.

Je rejoins M. Anciaux : il fallait utiliser le seul concept de tête de réseau, partant des structures existantes dans les bassins et assurant la coordination et la participation du patronat et des organisations syndicales. Il faudra réécrire cet article.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Naturellement, il pourra y avoir plusieurs maisons de l'emploi dans les grands bassins d'emploi que l'on trouve par exemple dans votre région, Monsieur Vercamer.

Monsieur Cardo, on peut avoir des bassins d'emploi interdépartementaux ou interrégionaux. Permettez-moi de prendre l'exemple d'un territoire que je connais bien, celui de Rambouillet-Epernon : deux pôles industriels, région Ile-de-France, région Centre, département d'Eure-et-Loir, département des Yvelines. Le projet n'enferme pas les maisons de l'emploi dans des limites préétablies.

Nous n'excluons pas a priori qu'une maison de l'emploi puisse être créée à cheval sur deux régions si les réalités économiques et sociales territoriales l'exigent.

M. Alain Gest - Restera à le faire entendre aux préfets.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Je leur écrirai personnellement en ce sens. L'important est que chaque région ait une maison de l'emploi.

L'amendement 25, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Jacqueline Fraysse - L'amendement 265, de repli, précise le rôle des maisons de l'emploi, notamment par rapport aux outils locaux actuels de la politique de l'emploi comme les PLIE ou les missions locales. Il est dit dans le texte que les maisons de l'emploi « coordonnent les actions menées dans le cadre du service public de l'emploi », « informent sur les besoins de main-d'œuvre comme de reconversion des territoires », et « peuvent participer à l'accueil, l'insertion et l'orientation des demandeurs d'emploi. » Pourquoi ce conditionnel pour cette troisième mission, essentielle ? Celle-ci ne saurait être facultative. Nous ne pourrions accepter des maisons de l'emploi si leur finalité, avouée ou non, était de mettre à bas les outils publics actuels de la politique de l'emploi, en liquidant l'ANPE et toutes les structures locales d'accueil et d'orientation. Or, nous sommes inquiets sur ce point. Pour nous, les maisons de l'emploi doivent être un outil supplémentaire pour coordonner, améliorer le travail actuellement mené sur le plan local au profit des demandeurs d'emploi. C'est pourquoi nous jugeons essentiel que l'accueil et l'orientation des chômeurs fassent partie intégrante de leurs missions.

M. Rodolphe Thomas - L'Alliance Ville Emploi demande l'intégration dans les maisons de l'emploi des PLIE et des missions locales, opérateurs du suivi et du financement des chantiers d'insertion notamment, et ce d'autant que l'un des objectifs des futures maisons est de décloisonner les actions au profit des demandeurs d'emploi. Tel est le sens de mon amendement 622 rectifié.

Mme la Rapporteure - Si la commission, d'une manière générale, a repoussé la plupart des amendements relatifs aux maisons de l'emploi, c'est qu'ils traduisent une certaine incompréhension du projet du Gouvernement. Notre objectif n'est pas de créer une nouvelle structure venant se superposer à d'autres mais, à partir des structures existantes, de labelliser les dispositifs qui ont fait leurs preuves.

Nous avons fait un triple choix de souplesse pour les futures maisons de l'emploi. Tout d'abord, pour ce qui concerne leur forme juridique : ce pourront être ou non des GIP. Ensuite, pour ce qui est de leur composition : un noyau dur, restreint, de partenaires sera obligatoire, mais en aucun cas des structures comme les missions locales, les PAIO, les PLIE, des organismes comme l'AFPA ou les chambres consulaires, ne se verront interdire d'y participer. Leur présence au sein des maisons de l'emploi sera possible, mais nous ne pouvons l'imposer. En effet, plus une structure associe de partenaires obligatoires, plus elle est difficile à mettre en place. Par ailleurs, que ferait-on là où n'existe pas de mission locale, de PAIO ou de PLIE, voire de chambres consulaires ?

M. Gérard Larcher, ministre délégué - En effet, la souplesse doit être le maître mot en matière de création et de fonctionnement des maisons de l'emploi. Sur la base d'un socle commun et de cercles concentriques, tous les partenaires qui le souhaitent ont vocation à les rejoindre. J'ai évoqué tout à l'heure une maison de l'emploi créée à l'initiative conjointe du Medef et de la CFDT, et qui fonctionne parfaitement. Tout peut être imaginé. Une mission sera confiée à M. Anciaux concernant la définition des critères de labellisation. Aussi, quel que soit l'intérêt de ces amendements, le Gouvernement souhaite leur retrait.

L'amendement 265, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que l'amendement 622 rectifié.

M. Rodolphe Thomas - L'amendement 621 remplace les mots « peuvent également participer » par les mots « participent également », afin d'affirmer plus clairement la compétence première des maisons de l'emploi.

M. Jean Le Garrec - Notre amendement 682 a le même objet : supprimer le verbe « peuvent », car si on le laisse, on est vraiment dans le virtuel.

Mme la Rapporteure - La commission a eu le sentiment que ces amendements risquaient de créer une obligation, alors que la souplesse est ici recherchée. Plutôt rejet, donc.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - De son côté, le Gouvernement est plutôt favorable. (Sourires)

M. Francis Vercamer - Si le rôle des maisons de l'emploi ne consistait qu'à débattre ou organiser des réunions, nous serions loin du compte. Je remercie donc le Gouvernement d'avoir accepté cet amendement.

M. Pierre Cardo - D'une façon générale, il vaut mieux éviter le mot « peuvent » dans un texte de loi. Et dans ce cas particulier, il importe de mettre l'accent sur la mission primordiale des maisons de l'emploi.

M. Jean-Paul Anciaux - Je rejoins ce qui vient d'être dit.

L'amendement 621, mis aux voix, est adopté.

M. le Président - Par conséquent, l'amendement 682 tombe.

M. Jean-Claude Sandrier - Notre amendement 214, qui ajoute les mots « professionnel et social » après les mots « à l'accompagnement », insiste sur la nécessité de faire de ces maisons de l'emploi des lieux de vraie construction de projets personnels et de retour à l'emploi stable.

Mme la Rapporteure - Il me semble que cette précision n'apporte pas grand chose, car on ne vient pas à la maison de l'emploi pour y cueillir des fleurs. Avis plutôt défavorable, donc, mais sans passion.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - L'ajout de ces termes limite en effet a priori l'accompagnement que peuvent apporter les maisons de l'emploi. N'oublions pas qu'il pourrait aussi avoir une dimension médicale, par exemple. Avis plutôt défavorable donc.

L'amendement 214, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Président - Seriez-vous d'accord, Madame la rapporteure, pour que l'on corrige l'amendement 26 en écrivant « la discrimination à l'embauche et dans l'emploi » ?

Mme la Rapporteure - D'accord. Cet amendement a été adopté par la commission à l'initiative de M. Vercamer.

M. Francis Vercamer - L'amendement 452, identique, tend à ce que les maisons de l'emploi mènent des actions de sensibilisation sur la discrimination à l'embauche et dans l'emploi auprès des entreprises privées et publiques et proposent une information sur les aides apportées en matière de formation en ce domaine.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Nous avons déjà avec l'article L. 122-45 un dispositif de lutte contre les discriminations, mais je suis d'accord pour que la sensibilisation à ce problème fasse partie des missions des maisons de l'emploi.

Les amendements 26 et 452 rectifiés, mis aux voix, sont adoptés.

M. Francis Vercamer - Mon amendement 472 dit que les maisons de l'emploi se substituent à l'Etat pour la conclusion des conventions prévues aux articles L. 322-4-7, L. 322-4-8, L. 322-4-11, et L.322-4-16 du code du travail.

Mme la Rapporteure - La commission a émis un avis défavorable. Cet amendement aurait pour effet d'instaurer un véritable transfert de l'Etat vers la maison de l'emploi de la compétence de signer des conventions d'aide dans le cadre des contrats aidés et pour le secteur de l'insertion par l'économique. Ceci semble incompatible avec la souplesse que nous souhaitons pour ces maisons ; elles ne doivent pas avoir la même structure juridique sur tout le territoire national. Il faut noter que, sans qu'il soit besoin pour cela de mesures législatives, la maison de l'emploi pourra bénéficier de formes de délégation, mais au cas par cas et seulement pour des tâches d'instruction ou de gestion des aides à l'emploi.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Même avis. Je souhaite le retrait de cet amendement.

L'amendement 472 est retiré.

M. Francis Vercamer - L'amendement 470 concerne à nouveau la lutte contre les discriminations, non plus cette fois en sensibilisant les acteurs, mais en permettant aux maisons de l'emploi de passer des conventions avec les entreprises en vue de favoriser la diversité sociale du recrutement. On peut imaginer qu'à titre expérimental certaines maisons de l'emploi, situées dans des bassins où les discriminations sont fortes - je suis l'élu du bassin de Roubaix-Tourcoing-vallée de la Lys, où le taux d'immigration est important - puissent lancer des chartes de la diversité, comme celles qu'envisage le ministre, mais au niveau local.

Mme la Rapporteure - Avis défavorable. Je comprends bien votre préoccupation, mais à trop multiplier de telles précisions nous perdrions de vue l'objectif de faire un texte simple.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Le Gouvernement est partagé. La possibilité de passer des conventions avec des entreprises pour favoriser la diversité sociale du recrutement est intéressante, mais la question est de savoir s'il faut l'inscrire dans la loi. Le Gouvernement s'en remet à la sagesse de l'Assemblée.

L'amendement 470,mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Francis Vercamer - Lors du débat sur la loi créant le RMA, j'avais défendu le guichet social unique. Le Gouvernement m'a répondu qu'il n'était pas prêt, et s'est engagé à présenter un rapport à ce sujet avant le 31 décembre 2004. Je sais que nous ne sommes que le 25 novembre, mais je n'ai pas de nouvelles de ce rapport. Je propose par l'amendement 455 d'écrire que la maison de l'emploi est le lieu unique pour accueillir, informer, élaborer un premier bilan des personnes à la recherche d'un parcours d'insertion professionnelle ou d'un emploi, afin de les orienter, et qu'elle est donc un guichet unique.

Mme la Rapporteure - La commission ne l'a pas adopté. Nous recherchons certes pour le demandeur d'emploi un dossier unique, pour lui éviter de devoir donner sans cesse les mêmes renseignements à différents guichets. En revanche faire de la maison de l'emploi un guichet unique obligatoire serait la formaliser à l'excès, à l'inverse de la souplesse que le ministre et la plupart des membres de la commission souhaitent lui conserver.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Naturellement le guichet unique est un objectif. Mais la réalité peut exiger qu'on ait plusieurs guichets. Songez au rôle que pourra jouer la maison de l'emploi, notamment en milieu rural, là où d'autres lieux proposeront des offres d'emploi. Encore une fois, nous partageons l'objectif de parvenir à un lieu unique où le demandeur d'emploi trouvera l'information, l'accompagnement, les pistes de formation ; mais nous ne pouvons nous enfermer ainsi. Je souhaite le retrait de cet amendement.

M. Francis Vercamer - Je l'ai déjà retiré lors du débat sur le RMA, et l'on m'avait annoncé qu'il serait étudié avant la fin de l'année. Je ne peux le retirer à nouveau, ou bien dans dix ans on me demandera encore de le retirer... Je ne voudrais pas que, comme pour la discrimination, on parle du guichet unique durant des décennies avant d'avancer concrètement à ce sujet. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UDF)

M. Pierre Cardo - La fonction de la maison de l'emploi est bien d'être une forme de guichet unique, c'est-à-dire d'offrir un ensemble de prestations, car la personne qui a un problème d'emploi en a en général plusieurs autres : ce n'est pas un problème unique, dont on pourrait charger un spécialiste, selon un travers bien français. Il y aura donc un réseau qui va prendre les gens en charge. Quelqu'un a déjà tenté d'établir le guichet unique, à savoir M. Schwartz, et d'ailleurs ce guichet existe... dans les textes : c'est la mission locale. On a vu ce qu'il en est advenu. Je crois dangereux d'écrire que la maison de l'emploi est « un lieu unique ». Car certaines communes, par exemple parce qu'elles ont des bureaux de l'emploi, ne voudront pas rejoindre tout de suite le nouveau dispositif, de sorte que certaines personnes risquent d'être privées des prestations de la maison de l'emploi.

A mes yeux, ce qui fera le succès des maisons de l'emploi, ce sera leur performance, leur intérêt pour les gens. Quand le chômeur qui a en outre un problème de logement, un problème psychologique, et ainsi de suite, ira à la maison de l'emploi et verra qu'il est pris en charge globalement, au lieu d'être renvoyé d'un acteur à l'autre comme une balle de ping-pong - cela finira par se savoir dans le bassin d'emploi, et les « concurrents » potentiels de la maison de l'emploi devront finir par la rejoindre, parce que tous les demandeurs d'emploi souhaiteront bénéficier de ses prestations. Mais il est dangereux de l'imposer par la loi comme le lieu unique. Le terme de « lieu », dans un texte de loi, peut d'ailleurs avoir des effets imprévus, si on l'entend au sens spatial : n'oublions pas que certains bassins d'emploi peuvent être très étendus. Bref, je comprends bien l'objectif du guichet unique, et c'est précisément ce que vise le cahier des charges de la maison de l'emploi ; mais je ne pense pas qu'il faille l'inscrire dans la loi. C'est le résultat que le texte vise, et vers lequel, globalement, il conduit.

M. Jean-Paul Anciaux - La dernière fois qu'on a inscrit dans la loi un guichet unique d'accueil, d'information et d'orientation, c'était à l'article 76 de la loi quinquennale. Ce guichet n'a pas connu un franc succès. La maison de l'emploi est quelque chose de tout à fait différent, c'est l'ouverture totale, et non ce carcan que risque d'être la notion d'unicité.

M. Patrick Roy - Le texte comporte beaucoup de flou, et j'ai dit ma difficulté à cerner ce que seront exactement les maisons de l'emploi. L'amendement semble aller dans le bon sens, la notion de guichet unique apportant un peu de clarté sur cette notion. Au demeurant, je l'ai dit, le nombre de trois cents maisons de l'emploi est très insuffisant pour assurer l'indispensable proximité.

L'amendement 455, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'amendement 468 est retiré.

M. Francis Vercamer - Je vais retirer également l'amendement 453, car il concerne les CV anonymes, et il est repris dans un amendement de Mme de Panafieu dont je suis cosignataire ; c'est un débat que nous aurons au titre III.

L'amendement 453 est retiré.

Mme Martine Billard - Pourquoi des « maisons de l'emploi », sinon, au fond, pour des raisons médiatiques ? Il aurait été plus humble de parler de « point unique ». Nous aurions quant à nous préféré que le projet mette en synergie l'ensemble des structures existantes en faveur de l'emploi et il aurait suffit qu'un article permette la signature de conventions entre ces différents organismes. De plus, les maisons de l'emploi n'ont pas d'intérêt à moins d'être très nombreuses et donc, proches des demandeurs d'emplois car l'une des difficultés rencontrées par les chômeurs réside dans le coût des transports. Il est vrai que le ministre a parlé de mises en réseaux électroniques et donc, en quelque sorte, de maison virtuelle. Est-ce utile, dans ce cas, de légiférer ?

L'amendement 330 vise à ce que le statut des maisons de l'emploi soit clarifié et qu'elles adoptent toutes le statut de GIP.

Enfin, je suis étonnée que M. Borloo ne soit pas présent pour défendre personnellement une mesure phare de son projet.

M. le Président - Je répète qu'il est de tradition que le ministre n'assiste pas à l'intégralité des débats.

M. Patrick Roy - Ce plan a été présenté comme une très grande loi mais je note que les médias semblent s'en désintéresser et, en effet, que M. Borloo lui-même n'est pas présent pour la défendre : apparemment, il s'agit donc d'une petite loi. Ces maisons de l'emploi sont des gadgets... (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

Le guichet unique ne sera pas effectif, et la question de la proximité n'est pas résolue : on a parlé de 400 ou 500 maisons de l'emploi quand il en faudrait 1 000 ou 1 500.

M. Pierre Cardo - Que ne les avez-vous créées !

M. Patrick Roy - L'amendement 683 a le même objectif que le précédent. Comme Mme la rapporteure est favorable aux simplifications, je lui propose de remplacer deux mots - « peuvent prendre » - par un seul - « prennent ».

M. Francis Vercamer - L'amendement 723 a le même objectif. Comment une maison de l'emploi juridiquement informelle pourrait-elle contractualiser, embaucher, informer ? Il faut préciser son statut et la définir comme personnalité morale, GIP ou association.

Mme la Rapporteure - Avis défavorable. Cette structure doit être souple. GIP ou association, ce sera aux acteurs locaux de décider.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Même avis. Je rappelle que le code du travail prévoit déjà que la maison de l'emploi doit avoir une personnalité morale, que ce soit sous la forme de GIP, de GIE ou d'association.

Les amendements 330, 683 et 723, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Francis Vercamer - Mon amendement 473 vise à remplacer, pour des raisons rédactionnelles, le mot « groupement » par le mot « structure ».

Mme la Rapporteure - Avis défavorable car il n'y a pas de catégorie juridique pour définir une « structure d'intérêt public ». Par l'amendement 870, la commission propose de remplacer les mots « d'un groupement » par les mots « de groupements ».

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Avis favorable à l'amendement 870 et défavorable à l'amendement 473.

L'amendement 473, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'amendement 870, mis aux voix, est adopté.

M. Francis Vercamer - L'amendement 728 vise également à donner un statut de personnalité morale aux maisons de l'emploi en complétant le premier alinéa de l'article L.311-10-1 du code du travail par les mots : « ou d'une association ». Si ce mot ne convient pas, je propose « doter d'une structure de personnalité morale », ce qui explique l'emploi du mot « structure » dans le précédent amendement.

Mme la Rapporteure - Avis défavorable. Je répète que nous ne voulons pas rigidifier le statut des maisons de l'emploi.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Même avis. Je rappelle que les maisons de l'emploi peuvent prendre le statut de GIP.

Mme Martine Billard - Le ministre a dit en commission que ces maisons de l'emploi peuvent prendre la forme d'une mise en réseaux électronique. Je crains que ce ne soit outrancièrement le cas, ce qui limiterait leur action. Quelle sera la personnalité morale de cette « mise en réseau » si elle n'est pas un GIP, un GIE ou une association afin de pouvoir signer des conventions ou organiser des formations contre les discriminations ?

Mme Martine Billard - On nous rebat les oreilles de souplesse, mais les maisons de l'emploi ressortent carrément du flou artistique ! L'amendement 331 propose donc que des conventions d'objectifs obligent l'ensemble des intervenants à se coordonner au bénéfice des demandeurs d'emploi, sans mentionner nommément les maisons de l'emploi.

M. Patrick Roy - A force de vouloir de la souplesse, on finit par se faire mal ! Plus le débat avance, moins nous savons ce que seront ces maisons de l'emploi. La volonté d'y intégrer des partenaires privés soulève cependant des craintes quant à des services de placement à deux vitesses. Par l'amendement 685, nous proposons donc que des conventions d`objectifs apportent des garanties sur la nature des maisons de l'emploi.

Mme la Rapporteure - Avis défavorable. Si tout le monde doit passer des conventions, les maisons de l'emploi ne sont pas près de voir le jour ! Rien ne les empêche de passer des conventions si elles le veulent. Alors de grâce, ne nous substituons pas indéfiniment, sous prétexte que nous faisons la loi, à ceux qui sont chargés de les faire fonctionner !

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Les maisons de l'emploi ne sont pas virtuelles. Elles existent déjà, et elles fonctionnent, si les acteurs locaux en ont la volonté. Ce ne sont pas des articles incroyablement complexes qui vont les inciter à les créer !

M. Pierre Cardo - Nous mettons en place un dispositif. Nous proposons des outils et l'on nous répond que ce sont des gadgets. Nous donnons des moyens supplémentaires et l'on nous dit qu'ils ne suffisent pas, même s'il n'y avait rien auparavant. L'on se prononce pour l'expérimentation et l'on chante les vertus des acteurs locaux, mais l'on cherche systématiquement à rigidifier le système et à créer une société administrée. Comment voulez-vous que les acteurs locaux prennent des initiatives ? L'Etat reste présent dans les maisons de l'emploi : le préfet accorde ou non les financements en fonction des résultats, et des évaluations sont envisagées. Ne soyons pas défiants a priori, mais prudents a posteriori !

Mme Martine Billard - Je suis tout à fait favorable à l'expérimentation, mais quel besoin d'écrire une loi pour les mener ? Si la loi ne permet pas de mettre les structures existantes en synergie, on la modifie, et si l'on peut déjà mener les expérimentations, était-il vraiment nécessaire de réécrire l'article 311-10-1 du code de façon aussi compliquée ? Ce n'était pas la peine de nous vendre une invention, il suffisait de poursuivre les expériences en cours !

M. Patrick Roy - Il est évident que ces maisons vont simplifier la vie quotidienne des chômeurs, qui n'auront plus à se rendre que dans un lieu unique, mais la loi que vous proposez semble quelque peu disproportionnée par rapport à ce résultat. Je ne crois pas en effet qu'elle ait d'autre conséquence, en particulier pas sur la courbe du chômage. Quant à la souplesse, ce qui est choquant, c'est qu'elle ne soit pas la même partout. Les sanctions prévues contre les chômeurs ne sont pas souples du tout !

M. Pierre Cardo - Votre présentation des sanctions est quelque peu orientée, mais restons-en aux maisons de l'emploi. Pour arriver à en créer une, j'ai eu les pires problèmes. Je l'ai fait sans moyens, pour rassembler toutes les structures qui se promènent sur tout mon territoire. Aujourd'hui, on me propose des moyens, un cadre pour les réunir, avec assez de souplesse pour que je puisse régler les problèmes spécifiques de mon territoire. Ce n'est pas une structure supplémentaire, mais un dispositif. Les élus locaux vont se trouver face à leurs responsabilités, et ils ne pourront pas prétendre qu'ils n'ont pas de moyens. On peut toujours demander plus, mais l'objectif de 300 maisons, ce n'est qu'un début. Lorsqu'on aura démontré leur efficacité sur la courbe du chômage, l'Etat sera très heureux d'en financer plus !

L'amendement 331, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que le 685.

M. Jean-Claude Sandrier - Les maisons de l'emploi pourront être constituées sous la forme de GIP, dont la particularité est de rassembler acteurs publics et privés pour mener des actions communes dans des domaines d'intérêt général. Vous y avez donc intégré les entreprises d'intérim et de placement privées. En outre, il n'y a pas de texte unique régissant les règles applicables à tous les GIP et le contenu des conventions qui lient les partenaires n'est pas défini de manière exhaustive. Le mode de gestion peut être privé ou public et le personnel est souvent détaché des administrations - laquelle, en l'occurrence ? Cette flexibilité laisse une marge de manœuvre extrême, qui pourrait s'avérer défavorable aux demandeurs d'emploi. L'amendement 266 tend donc, pour des raisons tout autant démocratiques que d'efficacité, à élargir les maisons à l'ensemble des partenaires participant à la stratégie territoriale de l'emploi : partenaires sociaux, associations et structures d'insertion par l'activité économique ou chambres consulaires par exemple. Rassembler sans exception toutes les compétences en un même lieu et les faire travailler en commun me semble particulièrement adapté aux maisons de l'emploi.

Mme la Rapporteure - Nous avons suffisamment parlé de la souplesse nécessaire. Associer « obligatoirement » des partenaires, comme vous le proposez, ne peut générer qu'une lourdeur extrême.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Même avis.

M. Pierre Cardo - J'attire l'attention sur le rôle du directeur, par rapport à celui du président. En tant que président d'une structure, je n'aimerais pas que le directeur dispose de pouvoirs si importants.

L'amendement 266 mis aux voix, n'est pas adopté.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu ce soir, à 21 heures 30.

La séance est levée à 20 heures.

            Le Directeur du service
            des comptes rendus analytiques,

            François GEORGE

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne deux heures après la fin de séance.

Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.

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