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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2004-2005 - 33ème jour de séance, 79ème séance

2ème SÉANCE DU MARDI 30 NOVEMBRE 2004

PRÉSIDENCE de M. Jean-Louis DEBRÉ

Sommaire

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT 2

POLYNÉSIE FRANÇAISE 2

GESTION DE LA CRISE POLYNÉSIENNE 2

MINES ANTI-PERSONNEL 3

TRAVAILLEURS VICTIMES DE L'AMIANTE 4

AL-MANAR 4

VIOLENCE DANS LES STADES 6

VIOLENCES RACISTES EN CORSE 6

INCESTE ET VIOLENCES SEXUELLES 7

UKRAINE 8

SIDÉRURGIE 8

PERSPECTIVES DE CROISSANCE 9

TGV RHIN-RHÔNE 10

RAPPEL AU RÈGLEMENT 10

DROITS DES MALADES
ET FIN DE VIE (suite) 11

EXPLICATIONS DE VOTE 11

COHÉSION SOCIALE (suite) 16

ART. 7 (suite) 16

ART. 8 24

AVANT L'ART. 9 30

La séance est ouverte à quinze heures.

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

POLYNÉSIE FRANÇAISE

M. Eric Raoult - Brel et Gauguin ont décrit Tahiti, Temaru et ses amis socialistes ne cessent de décrier la Polynésie. Mme la ministre de l'outre-mer est une femme de bonne volonté... (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains) qui se bat avec courage contre beaucoup de duplicité. La semaine dernière, elle a réussi à réunir autour de la même table des responsables politiques que tout oppose, et elle a obtenu des avancées substantielles, traduites dans le document commun du 27 novembre, agréé par MM. Flosse et Temaru. Las, ce pré-accord n'a pas été respecté par le chef indépendantiste, qui a finalement préféré son plan à son pays. Notre ami Gaston Flosse est un homme de parole (Mêmes mouvements)... et M. Temaru est le seul responsable de la suspension des discussions, par son refus de tenir son engagement écrit de libérer, conformément à la décision du Conseil d'Etat, les locaux qu'il occupe illégalement.

La Polynésie, ce n'est pas l'Ukraine ! C'est la France d'outre-mer, c'est une part irremplaçable de notre République, rétive à toute idéologie, soucieuse avant tout de progresser dans la voie de son développement. Profondément républicains, les Polynésiens sont attachés au respect des valeurs communes...

M. le Président - Posez votre question.

M. Eric Raoult - Madame la ministre de l'outre-mer, pouvez-vous éclairer la représentation nationale sur les perspectives d'évolution du dossier polynésien ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Mme Brigitte Girardin, ministre de l'outre-mer - Il est vrai qu'il n'était pas facile de mettre MM. Flosse et Temaru autour de la même table et d'obtenir, au terme de six jours d'intenses discussions, qu'ils signent le même document. Cette démarche constitue donc une avancée importante dans la voie du règlement de la crise actuelle. Tout le monde s'accorde sur la nécessité d'organiser des élections générales...

M. Christian Paul - Enfin !

Mme la Ministre - ...et convient que la voie de la dissolution n'est pas à retenir. Tout indique en effet qu'elle conduirait à une impasse et que le Conseil d'Etat annulerait la décision. Il reste cependant à régler le problème du calendrier des élections, et le temps presse pour finaliser le texte de la loi organique. Il revient donc à M. Temaru de tenir ses engagements écrits et de respecter la décision du Conseil d'Etat en libérant tous les locaux qu'il occupe illégalement. S'agissant du bâtiment hautement symbolique de la présidence de la Polynésie française, nous avons accédé à la demande de M. Temaru de le « neutraliser » et M. Flosse accepte de ne pas s'y réinstaller pour contribuer au rétablissement d'un climat serein.

Je reste à la disposition des parties pour reprendre les discussions, qui ne sont pas rompues mais simplement suspendues. Loin de vouloir imposer telle ou telle solution, mon seul souci est de favoriser le retour à la sérénité. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

GESTION DE LA CRISE POLYNÉSIENNE

M. René Dosière - Monsieur le Premier ministre, la réponse de votre ministre de l'outre-mer est tout à fait conforme à son comportement tout au long de cette crise : partisane et partiale ! (Protestations sur les sur les bancs du groupe UMP) Le recours à des élections générales n'est une nouvelle que pour Mme Girardin, qui s'obstinait jusqu'à présent à ne pas en voir l'utilité, cependant même que tous les responsables politiques - y compris de l'UMP - s'attachaient à l'en convaincre. Et s'agissant des élections, la vraie question n'est pas réglée : quand et comment ? La réponse de Mme la ministre n'est pas complète. Au reste, elle n'a cessé de soutenir la position de Gaston Flosse et le mode de scrutin de circonstance qu'il avait imposé contre l'avis général.

Monsieur le Premier ministre, vous qui vous dites épris de résultats, croyez-vous qu'il soit possible de réussir une négociation lorsque le ministre qui la conduit se fait le porte-parole de l'une des parties ? Le souci de rétablir la paix civile ne vous commande-t-il pas de reprendre en main un dossier sur lequel votre ministre a lamentablement échoué, au point de se discréditer définitivement ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste ; protestations sur les bancs du groupe UMP)

Mme Brigitte Girardin, ministre de l'outre-mer - (Applaudissements prolongés sur les bancs du groupe UMP) A vous entendre, l'on pourrait croire, Monsieur Dosière, que vous avez participé à des négociations auxquelles personne cependant ne vous avait convié... (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste) M. Temaru se répand dans la presse ; moi, je retiens ce qu'il me dit et ce qu'il signe. Le mémorandum du 27 novembre l'engage précisément et il a clairement exprimé son souhait de voir organiser des élections générales, une fois adoptée la loi organique disposant le retour au mode de scrutin antérieur...

Les suggestions de M. Temaru ayant été agréées par M. Flosse, ce point ne devait pas poser problème. Las, M. Temaru ne tient pas les engagements qu'il prend, alors même que dix décisions de justice successives confirment le bien-fondé de nos positions. Alors, Monsieur Dosière, puisque vous conseillez volontiers M. Temaru, essayez plutôt, de votre côté, de faciliter la recherche d'un consensus. En cette affaire, l'Etat est d'une stricte neutralité. (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste) Il ne propose rien, il se borne à favoriser l'émergence d'un processus consensuel entre Polynésiens, car c'est à eux qu'il appartient de décider de leur avenir. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

MINES ANTI-PERSONNEL

M. François Rochebloine - Monsieur le ministre des affaires étrangères, vient de s'ouvrir à Nairobi la première conférence d'examen de la convention d'interdiction des mines anti-personnel, dite convention d'Ottawa. Cette conférence doit d'une part, dresser le bilan de la convention d'Ottawa depuis son entrée en application en 1999, d'autre part, définir une stratégie commune aux Etats parties pour les années 2005-2010. Deux points posent problème, celui du niveau des stocks de mines à conserver à des fins d'études et de formation des démineurs, celui des mines anti-char et anti-véhicule munies d'un allumeur sensible. Sachant que la loi française fixe à cinq mille le nombre de mines pouvant être détenues aux fins ci-dessus indiquées, notre pays militera-t-il pour que ce soit dorénavant le maximum autorisé pour tous les Etats parties à la convention ? Sachant que le ministère de la défense a déjà retiré du service opérationnel des armées deux types de mines anti-char et anti-véhicules à allumeur sensible, notre pays acceptera-t-il que ce type d'armes fasse l'objet d'un examen particulier pour la période 2005-2010 ? Le groupe UDF considère ces deux questions comme essentielles dans la lutte contre ce fléau planétaire que constitue la dissémination des mines anti-personnel. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF)

M. Michel Barnier, ministre des affaires étrangères - Dès lors que les mines anti-personnel tuent de 15 000 à 20 000 personnes, comment tous ici ne pourrions-nous pas considérer cette question comme éminemment grave ? A cet égard, je tiens à rendre hommage au travail exemplaire des associations, au premier rang desquelles Handicap International. La France, qui a été l'un des premiers pays du Conseil de sécurité à signer la convention d'Ottawa, consacre des sommes importantes à la lutte contre ce fléau. Il est vrai que cette convention n'a pas fixé de niveau maximal des stocks, alors que la loi française dispose, elle, que notre pays est autorisé à détenir cinq mille de ces mines à des fins d'expertise, d'entraînement et de formation aux opérations de déminage. Pour ce qui est des mines anti-char, il n'est pas prévu d'en traiter à Nairobi, car elles font l'objet d'une autre convention, datant de 1980. Monsieur Rochebloine, je vous remercie de votre engagement personnel au sein de la commission nationale pour l'élimination des mines anti-personnel. Soyez assuré que M. Darcos, qui représente le Gouvernement français à Nairobi, demandera que la convention d'Ottawa soit renforcée et que notre pays fera tout ce qui est en son possible pour qu'elle devienne universelle. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF)

TRAVAILLEURS VICTIMES DE L'AMIANTE

M. Pierre Goldberg - Monsieur le Premier ministre, s'il ne nous appartient pas de commenter une décision de justice, permettez-moi de dire l'écoeurement du groupe communiste et républicain devant la décision de la cour d'appel de Douai, saisie par les veuves de victimes de l'amiante. Celle-ci a été ressentie comme un déni de justice : des milliers de personnes ont d'ailleurs manifesté à Dunkerque pour dire leur incompréhension devant telle indifférence et témoigner leur solidarité à l'égard des victimes. L'amiante continue de tuer quelque 3 500 personnes chaque année. Les industriels, qui ont privilégié leurs intérêts au détriment de la santé de la population, les employeurs qui n'ont pas respecté la réglementation censée protéger la santé de leurs salariés ont commis un crime. Les travailleurs de ma circonscription ont payé un lourd tribut...

Le temps est venu de la réparation. Or, le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante ne bénéficie plus cette année d'aucune dotation directe de l'Etat : pas moins de cent millions d'euros lui feraient défaut ! Le reversement de 330 millions d'euros de la branche accidents du travail - maladies professionnelles prévu par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 est ridiculement insuffisant quand le coût des cancers d'origine professionnelle supporté par l'assurance maladie depuis dix ans est évalué à 144 milliards. Aucune disposition nouvelle n'est envisagée pour rattraper le retard considérable pris en matière de prévention et de reconnaissance des maladies professionnelles. Aujourd'hui éclate le scandale de l'amiante, ce sera demain celui des éthers de glycol... (Interruptions sur les bancs du groupe UMP ; protestations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains)

Monsieur le Premier ministre, êtes-vous prêt, autrement qu'en paroles, à renforcer la législation relative à la protection des salariés au travail, ainsi qu'à la prévention, la reconnaissance et la réparation des maladies professionnelles ? (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains)

M. Philippe Douste-Blazy, ministre des solidarités, de la santé et de la famille - L'amiante, matériau très cancérigène, à l'origine de cancers de la plèvre et du poumon, a été, durant des décennies, massivement utilisée dans le bâtiment et l'industrie. Bien que son utilisation soit totalement interdite depuis 1996, une catastrophe sanitaire se profile. On enregistre en effet mille nouveaux cas par an de cancers de la plèvre et deux mille de cancers du poumon, et ces chiffres devraient aller augmentant. Le temps de latence entre l'exposition à l'amiante et l'apparition de la maladie varie entre trente et quarante ans.

Pour ce qui est de l'indemnisation des victimes, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 a doté le Fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante de 700 millions d'euros et le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante de 450 millions, qui seront portés à 600 millions l'an prochain.

En mars 2004, le Conseil d'Etat a reconnu pour la première fois que l'Etat était responsable. C'est la raison pour laquelle je souhaite que soit organisée le plus vite possible une table ronde avec les partenaires sociaux, les associations, les professionnels de santé et les pouvoirs publics, afin que les droits des malades soient respectés, au niveau médical mais aussi judiciaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

AL-MANAR

M. Pierre Lellouche - Ma question, à laquelle s'associent de nombreux députés UMP, notamment Alain Marsaud, Michel Diefenbacher, Claude Goasguen et Hervé Mariton, s'adresse à M. le Premier ministre, d'abord parce qu'elle concerne plusieurs ministres, au moins celui de la culture et celui de la justice, ensuite parce qu'elle a trait à des dysfonctionnements extrêmement graves de nos institutions.

La chaîne Al-Manar est la chaîne d'un groupe terroriste, le Hezbollah, qui est à l'origine des attentats de la rue de Rennes et des Galeries Lafayette, ainsi que de l'enlèvement de plusieurs citoyens français - dont Jean-Paul Kaufmann. Cette chaîne diffuse quotidiennement des appels au meurtre de juifs et, il y a un an, elle avait diffusé en France un feuilleton qui, reprenant la propagande nazie du « Protocole des sages de Sion », montrait le complot juif mondial, en l'illustrant notamment de l'égorgement d'un enfant chrétien, dont le sang servait ensuite à fabriquer des galettes azyme pour la Pâque juive.

Ce feuilleton avait amené le président du CSA, M. Baudis, à saisir le procureur de la République en janvier dernier. Depuis lors, aucune nouvelle. Au printemps dernier, le Gouvernement a proposé, dans le cadre de la loi sur l'audiovisuel, un amendement visant à lutter contre ce genre de dérive et donnant la possibilité au CSA de se tourner vers le Conseil d'Etat pour obtenir l'interdiction de la diffusion d'une telle chaîne. La loi a été votée et promulguée le 9 juillet dernier. Le CSA s'est aussitôt tourné vers le Conseil d'Etat pour demander l'interdiction de la chaîne, mais à la surprise générale, ce dernier a au contraire ouvert la voie à un conventionnement avec elle. Le CSA a alors considéré que le Conseil d'Etat lui enjoignait de conventionner la chaîne, ce qu'il a fait le 20 octobre.

M. le Président - Posez votre question.

M. Pierre Lellouche - Permettez, c'est important.

M. le Président - Toutes les questions sont importantes, mais chacun a le même temps.

M. Pierre Lellouche - Monsieur le Premier ministre, pourquoi la justice pénale de notre pays n'a-t-elle pas instruit la plainte du CSA ? Et pourquoi, alors qu'il était question d'interdire cette chaîne, que des otages français sont retenus par des fondamentalistes islamiques, que nous sommes tous mobilisés contre le racisme et l'antisémitisme, en arrivons-nous à une situation comme celle-là ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication - La semaine dernière, je vous ai indiqué que, grâce à la décision du Parlement, le CSA avait des pouvoirs renforcés pour mettre un terme à ce qui est inacceptable dans le pays des droits de l'homme que nous sommes. Dans la France d'aujourd'hui, confrontée à la violence internationale que nous savons, des propos racistes, xénophobes ou antisémites n'ont pas droit de cité.

Plusieurs députés socialistes - La preuve !

M. le Ministre de la culture - Le Conseil supérieur de l'audiovisuel a la responsabilité politique, morale et juridique de contrôler, heure par heure, les déclarations qui sont diffusées. Permettez-moi de vous citer, afin que chacun en mesure la gravité, la phrase qu'il a relevée : « on a assisté, ces dernières années, à des tentatives sionistes pour transmettre des maladies dangereuses comme le sida, à travers des exportations vers les pays arabes. Cet ennemi n'aura aucun scrupule à commettre des actes qui pourraient porter atteinte à la santé des citoyens arabes et musulmans. »

Plusieurs députés socialistes - Agissez !

M. le Ministre de la culture - Phrases honteuses, comme l'étaient celles qui ont amené le Garde des Sceaux à déclencher une procédure judiciaire (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste) pour que soient pénalement condamnés les auteurs des infractions. (Mêmes mouvements) Aujourd'hui même, le président du CSA a saisi le Conseil d'Etat pour qu'il soit mis un terme à la diffusion sur le territoire national d'une telle chaîne. De son côté, le Premier ministre a demandé que l'on voie si des moyens juridiques supplémentaires sont nécessaires. (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste) La justice est saisie : la justice pénale par le Garde des Sceaux, le Conseil d'Etat par le président du CSA. S'il faut des moyens juridiques supplémentaires, le Gouvernement vous les proposera (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste) Je ne comprends pas que vous ne fassiez pas confiance à la justice ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

VIOLENCE DANS LES STADES

M. Bernard Carayon - Aujourd'hui, beaucoup de compatriotes ne vont plus dans les stades parce qu'ils craignent de ne plus pouvoir assister en toute tranquillité à une rencontre sportive. De nombreux voyous s'y livrent en effet à des comportements violents, souvent racistes : attaques contre d'autres supporters, contre de simples spectateurs, invectives et insultes à l'encontre de joueurs. On ne peut pas accepter une banalisation de ces comportements, qui nient les valeurs du sport. Ces délinquants doivent être identifiés, interpellés, sévèrement punis, voire interdits de tribune.

Le Garde des Sceaux s'est engagé la semaine dernière à prendre des mesures pour qu'il y ait un véritable suivi judiciaire en la matière. Pouvez-vous nous dire, Monsieur le ministre de l'intérieur, comment vous entendez mobiliser les forces de l'ordre pour lutter contre ce phénomène et quelles sont les mesures que vous préconisez pour endiguer cette violence et ce racisme ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Dominique de Villepin, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales - Vous avez raison : une rencontre sportive ne doit pas être prétexte à des manifestations de violence, de racisme, d'antisémitisme, d'homophobie. Il faut donc des sanctions exemplaires.

Un partenariat est nécessaire avec les clubs et c'est pourquoi nous avons signé avec le Parc des Princes et le PSG un contrat local de sécurité. Tout est mis en œuvre pour garantir la sécurité : nous avons tout d'abord renforcé notre dispositif juridique et deux décrets seront signés d'ici la fin de l'année, le premier concernant les personnes interdites de stade, le second concernant les fouilles avant les matchs. De plus, au cours du dernier match entre le PSG et l'OM, 1500 policiers et gendarmes ont été mobilisés, pour un coût total de 400 000 euros assumé essentiellement par mon ministère. Il convient donc d'organiser une table ronde afin de mieux répartir l'ensemble de cette charge financière. Les contrôles doivent être accrus, de même qu'une meilleure coordination interministérielle est nécessaire. Un guide des bonnes pratiques est à cette fin en voie d'achèvement.

Enfin, il faut mettre en place trois obligations nouvelles : une obligation de pointage pour les personnes interdites de match, la notification de ces personnes à l'ensemble des services de sécurité, la mise en place d'un dispositif de surveillance dans chaque stade où cela sera nécessaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; protestations sur les bancs du groupe socialiste)

VIOLENCES RACISTES EN CORSE

Mme Elisabeth Guigou - Samedi dernier, l'iman de Sartène, Mohamed el-Atrache, a été victime d'une tentative d'assassinat, la porte du lieu de culte où il se trouvait ayant été criblée de balles de gros calibre. Des inscriptions abjectes ont été trouvées dans la rue. Cet attentat raciste survient après beaucoup d'autres qui ont visé en Corse les habitants d'origine maghrébine. Les manifestations d'Ajaccio et de Calvi, la solidarité spontanée à l'égard de l'iman montrent que la très grande majorité des Corses n'est évidemment pas raciste. Le climat créé par ces attentats est néanmoins d'autant plus inquiétant que, plus généralement, l'insécurité a considérablement augmenté en Corse, je pense en particulier à l'ignoble attentat contre la gendarmerie d'Aléria.

Les agressions racistes se sont aussi multipliées sur tout le territoire national : profanations de cimetières juifs et musulmans, incendie de l'établissement juif de Gagny sur lequel je vous avais interrogé il y a un an, Monsieur le Premier ministre. Où en sont les enquêtes sur les attentats racistes que je viens d'évoquer ? Quels moyens exceptionnels allez-vous déployer pour identifier les agresseurs et les déférer devant la justice afin qu'ils reçoivent une sanction sévère ? Comment allez-vous enrayer la spirale de la violence en Corse ? Allez-vous rompre ici le silence de votre Gouvernement sur la situation générale de la Corse et sur cet attentat en particulier ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Dominique de Villepin, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales - La tentative d'assassinat de Sartène est en effet odieuse et j'ai demandé au préfet d'exprimer mon indignation ainsi que la volonté du Gouvernement de faire toute la lumière sur cette affaire.

Vous avez été amenée, Madame, à traiter des affaires délicates lorsque vous étiez Garde des Sceaux : vous savez donc qu'il faut laisser la justice faire son travail jusqu'au bout.

Il est vrai que de très nombreux actes inacceptables ont été perpétrés en Corse ces derniers mois. Nous nous sommes mobilisés et nous avons démantelé un réseau important, Clandestini Corsi : 21 personnes ont été interpellées, 15 ont été arrêtées. Sur le plan national, il est également vrai que nous sommes confrontés à une recrudescence des actes racistes. Le premier, à Chambon-sur-Lignon, le Président de la République a appelé à un sursaut national. Dans quelques jours, le Premier ministre réunira l'ensemble des préfets et les appellera à la mobilisation. Des actions spécifiques sont également engagées dans le domaine de la formation des OPJ et de la police technique et scientifique.

D'autres pays, comme les Pays-Bas ou l'Allemagne, connaissent également des manifestations de racisme. Nous devons prendre conscience des risques existants afin de mobiliser tous les élus et tous les responsables. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

INCESTE ET VIOLENCES SEXUELLES

M. Christian Estrosi - De nombreux enfants subissent des agressions sexuelles et, parfois, de la part de leur parent ou de leurs ascendants. Or, notre code pénal ne sanctionne les relations sexuelles avec des mineurs de moins de quinze ans que de manière « aggravante » lorsqu'elles sont commises par un ascendant. Avec 140 collègues, nous avons donc déposé une proposition de loi visant à ériger l'inceste en infraction spécifique et tendant à présumer le non-consentement de l'enfant de quinze ans à une relation sexuelle avec l'un de ses ascendants.

De nombreuses associations de victimes se battent pour exprimer le calvaire d'enfants transformés en poupées sexuelles par ceux qui auraient dû les protéger. Dimanche dernier, à Lyon, Monsieur le Garde des Sceaux, vous avez pris des positions très claires. Quelle mesures précises allez-vous donc prendre et dans quels délais pour que ces enfants retrouvent la dignité et que, demain, ces crimes insoutenables soient sanctionnés par la justice ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice - Je vous remercie, Monsieur Estrosi, comme l'ensemble des parlementaires qui ont pris l'initiative de cette proposition de loi qui permettra d'améliorer notre code pénal lequel, en effet, ne prévoit pas clairement la présomption de non-consentement lorsqu'un mineur est violenté par un ascendant.

J'ai donné mon accord sur cette orientation, et je vous propose que nous ouvrions maintenant ensemble des discussions assez larges sur le sujet, avant de faire aboutir cette modification simple du code pénal, qui va dans le sens de la demande faite par l'Assemblée générale de l'ONU à l'ensemble des pays membres.

Concernant la maltraitance des mineurs en général, le Parlement a déjà prolongé le délai de prescription des crimes sexuels, qui a été porté, à l'initiative de M. Léonard, à 20 ans après la majorité. De plus, la justice se fait de plus en plus sévère : une affaire sur deux, aux assises, concerne les poursuites engagées pour ce type de crimes, essentiellement contre des mineurs. Enfin, j'ai mis en place avec ma collègue ministre de la famille un dispositif de signalement de la maltraitance de l'enfant, et je m'efforce de développer avec les services du ministère de la santé des unités d'accueil de la parole de l'enfant maltraité, afin que les procédures judiciaires puissent être engagées sur la base de preuves suffisantes. Nous menons donc une politique d'ensemble pour faire en sorte que ces crimes abominables soient poursuivis et sanctionnés (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

UKRAINE

M. René André - Le sommet Russie - Union européenne qui s'est tenu la semaine dernière à La Haye a été dominé par la question ukrainienne. La Russie et l'Europe ont souhaité une approche pacifique pour résoudre la crise politique qui résulte, après l'annonce des résultats officiels de l'élection présidentielle, des accusations de fraude formulées tant par des membres de l'opposition ukrainienne que par de nombreux observateurs indépendants. Réuni en session extraordinaire à Kiev samedi dernier, le Parlement ukrainien a estimé que le deuxième tour de l'élection n'était pas valable et ne reflétait pas la volonté des électeurs. Il a également voté une motion de défiance à l'encontre de la commission électorale centrale. La Cour suprême d'Ukraine mène actuellement des auditions sur l'appel formé par l'opposition, et le président sortant s'est dit favorable à l'organisation d'un nouveau scrutin présidentiel pour sortir son pays de l'impasse.

Le Président Chirac, en appelant de ses vœux un accord politique, a souhaité que tout soit fait pour éviter à ce pays « une crispation ou un drame dont il n'a pas besoin ».

Monsieur le ministre des affaires étrangères, pouvez-vous nous éclairer sur la situation en Ukraine et nous préciser ce que la communauté internationale et la France peuvent entreprendre pour préserver la paix et le consensus, et permettre l'émergence en Ukraine d'une société véritablement démocratique ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Michel Barnier, ministre des affaires étrangères - A l'évidence, l'élection présidentielle en Ukraine n'a pas été démocratique (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP et du groupe UDF), ce qui a conduit le Parlement ukrainien et le président actuel à suggérer un nouveau scrutin. Le peuple ukrainien demande dans la rue avec dignité, émotion et ferveur que sa volonté soit respectée.

L'Union européenne, et donc la France, par la voix de M. Javier Solana, soutiennent et soutiendront tous les efforts pour trouver à cette crise une solution pacifique qui respecte la volonté populaire et préserve l'unité du pays, sans compromettre la stabilité régionale. En disant cela, nous ne choisissons pas un candidat contre un autre,...

M. Pierre Lellouche - C'est dommage !

M. le ministre des affaires étrangères - ...nous choisissons simplement la démocratie (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP).

SIDÉRURGIE

M. Michel Liebgott - Monsieur le ministre délégué à l'industrie, le 25 novembre dernier, la pénurie d'acier sur le marché mondial conduisait le constructeur automobile Nissan, filiale de Renault, à suspendre l'activité de production de trois de ses usines au Japon durant cinq jours, représentant la production de 25 000 véhicules.

Or il y a plus d'un an, j'interrogeais en vain votre prédécesseur sur l'annonce manifestement prématurée de la fermeture d'installations sidérurgiques, stratégiques pour notre pays, par le groupe Arcelor. Depuis, celui-ci est passé à l'acte, à Longwy notamment, et envisage de le faire dans la vallée de la Fensch, berceau historique de la sidérurgie française, entraînant la disparition de 4000 emplois directs ou induits. Les faits nous donnent donc raison : seuls les actionnaires des grands groupes sont satisfaits, le cours des actions ne cessant de grimper - l'instrument financier dicte sa loi. Mais que dire des salariés et de l'ensemble de la population dans ces régions de tradition industrielle ? Alors que le chômage bat à nouveau tous les records depuis bientôt trois ans, et au moment où l'on dit vouloir combattre les délocalisations, nous avons sous les yeux l'exemple d'une entreprise performante, pour laquelle existent des débouchés, mais qui se désengage progressivement du territoire national.

Dans ce contexte, et parce que nous voulons une vraie politique industrielle, je demande à nouveau au Gouvernement de jouer pleinement son rôle en amenant Arcelor à maintenir ses activités et à investir aussi en France. Même les gouvernants belges et luxembourgeois l'ont fait, Arcelor étant un groupe européen. Entre le laisser-faire total - comme pour l'affaire Péchiney-Alcan - et le traitement au coup par coup - comme pour Sanofi-Aventis et Alstom -, il y a place pour une politique industrielle volontariste et ambitieuse...

Le pire serait pour la France de renoncer là même où elle a un savoir-faire. Pour progresser, il faut déjà consolider. Il est urgent d'agir (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste) !

M. Patrick Devedjian, ministre délégué à l'industrie - Votre propos recèle une contradiction, Monsieur Liebgott ! Qui, en effet, a assuré au Japon au groupe Nissan - groupe à participation française - les fournitures interrompues du fait de la crise mondiale de l'acier ? Arcelor ! Vous voyez donc pour la France et pour l'Europe tout l'intérêt de disposer du deuxième groupe mondial de ce secteur.

En ce qui concerne l'usine de Longwy, vous savez parfaitement que c'est en 2001 qu'on a annoncé qu'elle arrivait au maximum de sa capacité de production et qu'il faudrait désormais s'approvisionner au Luxembourg, à Belval. Aujourd'hui, les pertes cumulées de cette entreprise se montent à quelque 110 millions. Mais c'est aussi en 2001, sous le gouvernement de vos amis, qu'a été arrêté un plan social prévoyant la construction d'un nouveau laminoir près des aciéries de Belval, un regroupement des activités et une reconversion de la totalité du personnel de Longwy, partiellement transféré à Belval - qui ne se trouve qu'à quelques kilomètres.

L'existence de ce groupe, européen puisque belge, luxembourgeois et français, est donc un atout maître aussi bien pour la solution des problèmes économiques mondiaux que pour le règlement des difficultés sociales. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

PERSPECTIVES DE CROISSANCE

M. Michel Terrot - Monsieur le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, grâce à l'action du Gouvernement, la croissance est repartie en France, un peu plus tôt et de manière un peu plus vigoureuse que dans le reste de l'Europe. Elle repose sur une demande intérieure soutenue, dont témoignent les chiffres publiés hier, et sur le dynamisme persistant de la construction. Cependant, le taux de chômage demeure trop élevé, les risques d'origine externe sont encore importants et le tassement observé au troisième trimestre montre que la reprise européenne est fragile. Nous souffrons de la hausse du prix du pétrole, la faiblesse du dollar face à l'euro handicape nos exportations... Au moment où vous prenez vos nouvelles fonctions, pouvez-vous nous dire votre sentiment sur la situation et nous exposer ce que vous comptez faire pour consolider cette croissance, si nécessaire pour l'emploi ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. le Président - La parole est à M. Gaymard. (Applaudissements soutenus sur les bancs du groupe UMP)

M. Hervé Gaymard, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie - La croissance, pour être durable, suppose la confiance et celle-ci repose sur trois piliers : une politique économique au service de l'emploi, une politique financière qui ne tire pas de traites sur les générations à venir (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste)... et une politique industrielle volontariste. Ce sont de telles politiques qu'ont menées, sous l'impulsion de M. Raffarin, Francis Mer et Nicolas Sarkozy !

Comme vous l'avez relevé, notre consommation intérieure se comporte bien puisqu'elle a crû de 2 % dans le temps où elle n'augmentait que de 1 % dans l'ensemble de la zone euro. Quant à l'investissement industriel, il est également en hausse. Mais il est vrai que nous sommes aussi confrontés à l'augmentation du cours du pétrole et à une parité défavorable entre dollar et euro. Que faire dans cette conjoncture ? Nous devons d'abord jouer sur les ressorts internes de la croissance. Comme l'a dit le Président de la République, la croissance, il faut aller la chercher ! Nous avons donc à éliminer tout ce qui peut l'entraver, en nous inspirant par exemple du rapport Camdessus (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). Mais nous devons aussi agir au niveau de l'Europe et, la semaine prochaine, les ministres des finances de l'Eurogroupe se réuniront pour réfléchir aux moyens de régénérer cette croissance en 2005.

L'objectif d'une croissance de 2,5 % l'an prochain demeure valable et, dans les mois à venir, sous l'autorité du Premier ministre, MM. Copé, Devedjian, Loos et moi-même mettrons tout en œuvre pour faire gagner la France ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

TGV RHIN-RHÔNE

M. Marcel Bonnot - Lors du comité interministériel d'aménagement du territoire de décembre 2003, le Gouvernement a érigé au rang de projets prioritaires la réalisation d'un nombre important de lignes ferroviaires à grande vitesse. La décision était attendue et elle est bienvenue, le TGV étant aussi un outil du développement économique. Mais si décider, c'est bien, dégager les crédits nécessaires est encore mieux ! Lors du débat budgétaire, Monsieur le ministre de l'équipement, vous avez donc annoncé la création d'une agence de financement des infrastructures de transport pour le 1er janvier prochain.

Au nombre des projets que cette agence aura à financer, figure le TGV Rhin-Rhône, branche est : Mulhouse-Dijon. Les travaux devraient commencer en 2006 sur cette ligne transeuropéenne. Les quarante parlementaires qui se sont constitués en collectif pour soutenir ce projet aimeraient, comme les collectivités appelées à en cofinancer la réalisation, savoir à combien se montera la participation de l'Etat. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer - Le CIADT du 18 décembre 2003 fera date, en effet, dans l'histoire du transport en France : il a décidé non seulement la réalisation de 35 grandes infrastructures respectant les impératifs du développement durable, mais aussi la création d'une agence de financement, alimentée par les redevances domaniales et les dividendes que versent les société autoroutières. Son conseil d'administration sera composé de 12 membres, dont quatre élus parmi lesquels deux parlementaires. Le décret est à la signature et l'agence sera en place le 1er janvier prochain.

C'est au moyen de cet instrument que sera financée la ligne à grande vitesse Rhin-Rhône : les deux milliards d'euros nécessaires seront rassemblés grâce à un tour de table qui fait actuellement l'objet de négociations - la conclusion étant attendue au cours des prochaines semaines. Quant au début des travaux, il est prévu pour 2006.

M. le Président - Nous en avons terminé avec les questions au gouvernement.

La séance, suspendue à 16 heures, est reprise à 16 heures 20.

RAPPEL AU RÈGLEMENT

M. Jacques Myard - Rappel au Règlement, sur le fondement de l'article 58. Hier, au cours d'un débat auquel je n'ai pu assister sur des conventions internationales entre la France et Monaco, mon collègue François Loncle m'a traité d'homme « acariâtre ». Je l'en remercie, car il s'agit pour moi d'un compliment...

M. le Président - Monsieur Myard, vous connaissez le Règlement. Il s'agit d'un fait personnel et vous ne pouvez vous exprimer qu'à la fin de la séance.

M. Jacques Myard - Ce n'est pas un fait personnel, puisque je remercie mon collègue...

DROITS DES MALADES ET FIN DE VIE (suite)

EXPLICATIONS DE VOTE

L'ordre du jour appelle les explications de vote et le vote sur l'ensemble de la proposition relative aux droits des malades et à la fin de vie.

M. le Président - M. le ministre ainsi que le président et le rapporteur de la commission spéciale m'ont fait part de leur souhait de s'exprimer.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre des solidarités, de la santé et de la famille - Avec Mme Vautrin, j'aimerais rendre hommage aux quatre groupes parlementaires qui, dans un esprit de consensus et de dialogue, ont su rédiger un texte garantissant à tous les Français la possibilité de mourir dans la dignité.

Cette initiative parlementaire honore notre démocratie. Ce consensus est conforme à l'intérêt général. Pour que cette proposition soit votée, chacun a accepté de comprendre l'autre dans sa différence : celui pour qui la vie est sacrée, celui pour qui la liberté individuelle est inaliénable, celui pour qui l'interdit de tuer constitue une valeur essentielle de la société.

Je veux remercier Jean-Louis Debré de nous avoir permis d'examiner ce texte dans des délais très brefs. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP, du groupe UDF et sur quelques bancs du groupe socialiste.)

Je salue le talent de Jean Leonetti. Je remercie Mme Morano et M. Gorce, qui sont à l'origine du texte.

Je souhaite que cette initiative parlementaire ne reste pas un cas isolé : c'est un modèle à reproduire.

Nous nous sommes retrouvés sur la même vérité : il fallait déterminer la règle sociale garantissant une mort dans la dignité et permettant de refuser l'obstination déraisonnable dans des soins que le progrès rend cependant possibles.

L'article 2 autorise le médecin à augmenter la dose d'anti-douleur même si cela peut entraîner la mort. L'article 6 permet de refuser le traitement de trop. L'article 9 permet à un collège de médecins de laisser partir le malade inconscient qui est artificiellement maintenu en vie.

Ces trois avancées vont changer la réalité. Elles ne se fondent ni sur le dogme, ni sur la science, ni même sur la morale, mais sur l'humanité. Ce texte n'instaure pas une procédure automatique, comme certains de nos voisins européens. Il organise le dialogue entre le patient, le médecin et les proches. C'est dans cet échange que le malade d'un cancer en phase terminale pourra choisir de passer de la chimiothérapie à la morphine. Respecter la vie, c'est respecter le temps de la décision de l'homme. C'est cela, le modèle français d'accompagnement en fin de vie.

Je remercie la représentation nationale, les représentants des Eglises et Marie de Hennezel. Avec ce texte, la fin de vie en France va devenir le moment du choix, au lieu d'être le moment de la soumission.

« C'est pourquoi le sage vit, non autant qu'il peut vivre, mais autant qu'il le doit », écrit Sénèque dans les Lettres à Lucilius. Et d'ajouter : « Parfois cependant, même si le sage est menacé d'une mort certaine et n'ignore pas le supplice qu'on lui réserve, il n'y prêtera pas lui-même la main. C'est sottise de mourir par crainte de la mort... N'est digne de mourir que celui qui affronte l'épreuve de vivre. »

Dans ce débat, des voix se sont élevées pour réclamer un autre texte, sur la dépénalisation de l'euthanasie. La première erreur serait de dépénaliser l'interdit de tuer. Ne nous laissons pas entraîner par l'émotion que peuvent susciter certains cas particuliers. Mes pensées vont à Mme Humbert, dont je salue le dévouement et le courage, mais les Français n'attendent pas de nous que nous légalisions le droit de tuer. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP) La deuxième erreur serait de réclamer le suicide assisté comme un droit. La société peut-elle décider que la vie de certaines personnes gravement handicapées ne vaut pas d'être vécue ? Au contraire, les personnes handicapées souhaitent vivre. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF)

Respecter la vie, accepter la mort : c'est ce que vous faites dans ce texte. Une mort digne est possible sans recourir à l'euthanasie, il faut que les Français le sachent. Encore faut-il savoir pratiquer ces soins de fin de vie qu'on appelle « les soins palliatifs ». C'est un savoir-faire doublé d'un savoir être. Il ne suffit pas de traiter la douleur : il faut savoir écouter, dialoguer, s'asseoir au lit de celui qui va mourir, accepter de parler avec lui de ses peurs, et tenter de les comprendre. Cette proximité avec la mort réveille l'angoisse des médecins et des soignants, qui ont besoin d'être formés et soutenus.

On entend souvent dire : « les soins palliatifs, c'est très bien, mais il y en a trop peu ». C'est vrai. Malgré la loi du 9 juin 1999 il reste beaucoup à faire. Certaines régions ne sont pas encore dotées d'unités de soins palliatifs, et la formation est inégale. La loi que vous allez voter rendra obligatoire le développement de ces soins, je m'engage devant vous pour que chacun dans ce pays puisse demain bénéficier de l'accompagnement auquel il a droit au seuil de la mort, des mots et des gestes qui donnent le sentiment d'appartenir jusqu'au bout à la communauté des vivants. Car c'est cela, la véritable dignité (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur plusieurs bancs du groupe UDF).

M. Jean Leonetti, rapporteur de la commission spéciale - Le drame vécu par le jeune Vincent Humbert il y a un peu plus d'un an a provoqué dans la société tout entière une émotion intense. Interpellée par Mme Morano et M. Gorce, la représentation nationale s'est saisie sans attendre de ce sujet essentiel et nous sommes reconnaissants au président Debré d'avoir créé aussi rapidement la mission d'information sur l'accompagnement de la fin de vie. Trente-et-un députés de tous les groupes ont travaillé ensemble pendant plusieurs mois. Nous n'avons pas voulu précipiter les choses : 81 auditions ont été organisées, ainsi que plusieurs déplacements - notamment au Pays-Bas et en Belgique - et visites de centres de long séjour, d'hôpitaux et d'unités de soins palliatifs. Il en est résulté le rapport collégial « Accepter la mort, respecter la vie », puis une proposition de loi par la commission spéciale. C'est ce texte, amélioré grâce aux travaux de vendredi dernier, que nous avons aujourd'hui la fierté de vous soumettre. Chacun a pris une part active à son élaboration en acceptant de cheminer vers l'autre dans ses convictions et de le considérer, moins comme un adversaire que comme un partenaire enrichissant. Ensemble, nous avons précisé le sens que nous entendions collectivement reconnaître aux valeurs de dignité, de liberté et de respect de la vie. Nous nous sommes accordés sur le fait que nos sociétés tendent à escamoter la mort, tout en oubliant pourtant de vivre. Technique au point parfois de céder à une dérive scientiste, la médecine moderne nous a fait gagner dix ans d'espérance de vie, et elle a guéri des maladies que l'on croyait intraitables. Mais cette quête permanente de la performance n'a-t-elle pas tendu à la déshumaniser, au point que nombre de malades la redoutent aujourd'hui ?

La méthode de travail retenue explique pour une large part la réussite de notre mission. Nous avons choisi de mener toutes les réflexions à leur terme, de canaliser l'émotion en raison concrète, de travailler sur un mode collectif, progressif et discret, à l'abri de tout tapage médiatique. Notre objectif était de trouver un équilibre entre les deux valeurs fondamentales que sont le respect de la liberté de choisir et celui de la dignité humaine. Nous avons refusé la compromission, le troc des valeurs et toute concession pouvant déboucher sur un agencement de notions mal façonné. C'est ensemble que nous avons cheminé pour dévoiler une part de vérité, en ayant à l'esprit la peur de nos concitoyens de mal mourir, sous le coup d'une médecine déshumanisée qui conduit à la déchéance, et celle des soignants de ne pas faire les bons choix, tant le vide juridique qui s'est creusé sur ces questions crée un véritable espace de l'arbitraire. Il y a loin du droit à la pratique. L'euthanasie donnée sauvagement, clandestinement, le vendredi soir pour libérer un lit, souvent par une infirmière obéissant à des instructions codées, cela existe encore et c'est une indignité.

Nous nous sommes fixé des objectifs simples. D'abord, rien ne justifie que le mourant souffre. Il faut accepter que certains traitements de confort puissent abréger la vie, et donner le choix au patient d'en bénéficier. Nous souhaitons que la démarche se fasse dans l'humanité et en toute transparence : l'entourage doit être informé et le dossier médical du patient rendre compte des décisions prises. En toute circonstance, le malade ne doit pas être considéré comme un objet ou un terrain d'expérimentation. A ce titre, nous avons voulu combattre « l'obstination déraisonnable » - à distinguer de l'acharnement thérapeutique qui peut produire des résultats - car elle n'aboutit jamais à rien d'utile. Nous avons tenu compte du fait que plus de cent mille de nos compatriotes accueillis en service de réanimation sont chaque année débranchés parce que l'humanité s'est retirée d'eux et que la « vie » qu'on leur propose n'est plus acceptable. Bien entendu, nous avons prévu que l'entourage soit informé et que l'on tienne compte des directives anticipées du patient.

Enfin, le malade doit avoir le droit de dire non. Non au traitement disproportionné. Non à l'ultime - et hélas inutile - chimiothérapie qui risque de lui voler sa mort et ses derniers moments d'intimité avec ses proches. Non aux traitements curatifs lorsqu'ils ne paraissent plus acceptables et que l'orientation vers une unité de soins palliatifs doit être privilégiée. Non, parfois, au traitement salvateur, même si l'espérance de vie peut sembler encore importante. On imagine, derrière toutes ces situations, le poids du conflit de conscience pour le soignant, chargé tout à la fois de préserver la vie et de respecter la liberté du malade. Ensemble, nous avons choisi une procédure adaptée pour ne pas refuser la liberté fondamentale de choisir à ceux qui sont immobilisés. Il s'agit en effet de liberté de conscience, pas d'une faculté physique.

Je remercie M. Douste-Blazy pour son engagement résolu en faveur des soins palliatifs. Nul malade ne doit être abandonné. Les soins palliatifs sont des soins actifs, qui représentent tout ce qui reste à faire lorsqu'il n'y a plus rien à faire.

Dépassant les clivages qui nous enferment trop souvent, ce texte permet de sortir par le haut d'un problème de société majeur. Nous avons su nous rassembler sur l'essentiel et légiférer dans le consensus en refusant les solutions extrêmes qu'auraient représentés un statu quo hypocrite ou l'introduction sans précaution suffisante d'une euthanasie peu réfléchie. Aucun de nos collègues ayant participé aux travaux de la mission ne pourrait aujourd'hui défendre un choix binaire entre des options simplifiées. Nous avons su créer une voie française, humaniste et consensuelle, soucieuse de ne heurter les convictions de personne. Nous devons ce résultat au doute salutaire et à l'humilité qui nous ont inspirés. Au final, la somme des doutes l'emporte largement sur l'accumulation de certitudes dogmatiques. Pour autant, la loi ne résout pas tout : elle doit nous inviter, pour reconquérir les espaces d'un monde sans âme, à changer le regard que nous portons sur l'autre.

Dans une société où les maîtres-mots sont devenus utilité, rapidité, efficacité et rentabilité, s'impose ce regard différent sur celui qui souffre, le malade, le handicapé, le malade mental, le vieillard, et finalement le mourant, car tous font partie de notre humanité. (Applaudissements sur tous les bancs)

M. Gaëtan Gorce, président de la commission spéciale - Qui aurait imaginé lorsque le geste d'une mère et d'un médecin bouleversaient notre pays tout entier qu'un an plus tard, notre Parlement pourrait adopter dans le consensus une proposition de loi relative aux droits des malades et à la fin de vie ? Face au drame d'une mère laissée seule devant la décision de donner la mort à celui à qui elle avait donné la vie, le législateur pouvait-il rester indifférent ? Le pouvait-il face au conflit si souvent vécu par les médecins, écartelés entre le devoir et le droit ? A cet égard, je tiens à saluer la manière dont le médecin de Vincent Humbert a endossé la responsabilité de son acte, dans un grand geste d'humanité. Face à ce que notre conscience tenait pour inacceptable, il nous fallait chercher non pas la solution, mais une solution, car aucune ne s'imposait d'elle-même.

Le travail remarquable accompli par la mission d'information, sous la présidence pleine de tact de notre collègue Jean Leonetti, avec l'aide de notre collègue Nadine Morano, que je tiens tous deux à remercier, a permis d'aboutir à une proposition de loi faisant consensus. C'est que nous avons renoncé aux affrontements de convictions, et de philosophies pour nous en tenir à la recherche de solutions humaines, pratiques, oserais-je dire.

Assumant notre refus du statu quo actuel, hypocrite, indécent, où, derrière le droit, se cachent des pratiques souvent intolérables, qu'avons-nous décidé ? Que la volonté du malade, conscient ou inconscient, devra désormais être respectée en toute circonstance. Des repères ont été posés pour qu'elle puisse s'exprimer et être entendue, sans jamais conduire à un droit impersonnel et déshumanisé. La solution que nous avons retenue n'en est qu'une parmi d'autres et le débat reste ouvert. Certains considèrent que cette proposition de loi constitue un point d'équilibre et d'aboutissement, d'autres qu'elle n'est qu'un point de départ. Un dispositif d'évaluation sera d'ailleurs introduit dans le texte lors de son examen au Sénat.

Ce qui compte est que personne n'a jamais cherché à contraindre les consciences, mais bien plutôt à convaincre. Tout en conservant ses convictions, chacun a accompli un pas pour faire progresser le droit en humanité. Je suis de ceux qui pensent qu'il est possible d'aller plus loin, même si j'ignore par quelle voie nous pourrons y parvenir. Je sais en tout cas que le débat devra se dérouler dans les mêmes conditions de sérieux et de dignité, sans polémique ni passion. Dès lors que plus des deux tiers des morts ont lieu aujourd'hui à l'hôpital, chacun d'entre nous est en droit de se demander quelle part de liberté il peut espérer conserver à l'heure fatidique.

Je salue le travail de tous mes collègues, de la majorité comme de l'opposition qui se sont impliqués dans cette réflexion. Ce qui compte aujourd'hui est que le cri lancé par une mère, s'il n'a pas été totalement entendu - elle nous l'a fait comprendre -, ait trouvé un écho et que le Parlement se soit saisi de cette question pour en débattre hors de toute polémique. La discussion devra se poursuivre. J'espère que nous pourrons de nouveau progresser ensemble. (Applaudissements sur tous les bancs)

M. Alain Claeys - Les députés socialistes voteront cette proposition de loi, aboutissement d'un long travail mené au sein de la mission d'information présidée par Jean Leonetti, et au sein de la commission spéciale présidée par Gaëtan Gorce.

Ce débat honore notre Parlement. Fallait-il légiférer en un domaine aussi délicat ? Nous en mesurions tous la difficulté mais n'était-il pas de notre responsabilité de législateurs de permettre que la relation singulière entre le malade, sa famille et le médecin se déroule dans un cadre clair et totalement sûr ? Le débat sur la fin de vie est complexe, touchant à la fois au respect de la vie et au respect de la dignité et de la liberté de l'homme. S'il est interdit de donner la mort, comme nous le prescrivent l'éthique et les règles de la vie en société, tout homme doit néanmoins être assuré qu'il pourra vivre sa mort comme il le souhaite, conformément à ses convictions et à l'idée qu'il se fait de sa dignité. La loi de juin 1999 garantissant l'accès de tous aux soins palliatifs et la loi de mars 2002 relative aux droits des malades ont constitué des avancées réelles. Cette proposition de loi représente une étape supplémentaire, reconnaissant au malade conscient le droit de refuser un traitement lorsqu'il n'existe plus aucun espoir d'amélioration de son état et validant une procédure de décision collégiale pour le malade inconscient. La commission spéciale a enrichi le texte initial par divers amendements, dont celui de notre collègue Paulette Guinchard-Kunstler élargissant la pratique des soins palliatifs aux établissements médico-sociaux.

Ce débat sur la fin de vie nous touche au plus profond de nous-mêmes, nous renvoyant à notre éducation, à notre culture et à nos convictions. Au nom de quoi pourrait-on dénier l'ultime liberté de décider de sa propre mort à quiconque est en âge et en état de l'exercer ? Certains, au nom de leurs convictions religieuses, estiment n'avoir pas le droit de disposer de leur vie. Je respecte cette position, mais il est de l'honneur du politique d'aborder ces questions lucidement et en toute transparence. La proposition de loi que nous allons voter constitue un point d'équilibre, qui ne doit en rien cacher nos légitimes différences.

Je voudrais en terminant avoir une pensée pour Vincent Humbert et sa maman. Car comment ne pas avoir été bouleversé par ce formidable acte d'amour d'une mère qui a accompagné son enfant jusqu'au bout de son choix, à savoir mourir plutôt que de vivre une vie dénuée de sens ? Comment ne pas saluer le courage de l'équipe médicale qui a pris ses responsabilités et les a assumées publiquement ? (Applaudissements sur tous les bancs)

M. Olivier Jardé - Ce qui caractérise l'homme, c'est qu'il a conscience de sa propre mort. Nous sommes tous angoissés par notre destin et c'est sans doute par notre mort que nous donnons sens à notre vie. Pousser son premier cri, c'est déjà accepter de livrer son dernier soupir. Etre de relations, l'homme souhaite aimer et être aimé. Le drame de Vincent Humbert a accéléré notre réflexion sur la fin de vie et sur cette liberté ultime que peut être le droit de mourir comme on le souhaite.

Fallait-il légaliser l'euthanasie ? On connaît les risques de déviance, compte tenu du coût de certaines fins de vie.

Fallait-il légiférer ? Si le patient, la famille et les médecins forment un cercle harmonieux, cela peut apparaître comme inutile. Mais nous avons constaté que les souhaits des patients et des familles, ainsi que les pratiques médicales, n'étaient plus en adéquation avec la législation. Est-il répréhensible d'augmenter des doses lorsque le patient souffre, sachant que ces doses peuvent accélérer la mort ? Est-il répréhensible d'arrêter un traitement inutile ? De débrancher un malade pour lequel il n'y a plus d'espoir ? Tous nos actes sont-ils accomplis en toute transparence ? Les soins palliatifs sont-ils suffisants ? Nous nous sommes posé toutes ces questions et nos réponses ont modifié le droit.

La mission a eu la grande sagesse de ne pas créer de commission de sages et de ne pas fixer le « délai raisonnable ».

La mort est unique, personnelle, différente. Elle ne doit pas être volée. C'est pourquoi le groupe UDF votera cette proposition de loi, même si elle ne répond pas aux situations exceptionnelles. Nous souhaitons qu'à plus long terme, elle soit évaluée et réexaminée. D'autres modifications législatives apparaîtront peut-être alors nécessaires. (Applaudissements sur tous les bancs)

M. Michel Vaxès - Le texte soumis aujourd'hui à notre vote trouve son origine au confluent d'une double évolution. La première est celle de la médecine et de ses exigences éthiques. Parce qu'il est désormais possible de maintenir un corps en vie longtemps après que ce qui a fait son humanité, c'est à dire sa relation aux autres, sa capacité à donner, à recevoir, à partager, s'en soit retiré, le réexamen des questions liées à la fin de vie était devenu indispensable. La seconde est consubstantielle à l'exigence croissante et légitime de nos concitoyens de vouloir maîtriser leur destin et de prendre part aux décisions les concernant. Celle concernant leur fin de vie ne pouvait y échapper.

Faute d'y avoir répondu plus tôt, la représentation nationale y a été contrainte par une bouleversante actualité : celle d'une maman et d'un médecin face à une loi interdisant les gestes d'humanité trop longtemps attendus par un jeune tétraplégique. Par amour et compassion, cette mère et ce médecin ont bravé l'interdit et permis du même coup que s'engage le débat aboutissant à l'évolution législative proposée aujourd'hui.

L'exercice était pour nous difficile, mais ce long cheminement a permis aux uns de convenir que la création, même exceptionnelle, d'un droit à donner la mort était lourde de dangers, aux autres d'admettre que face à la souffrance, le droit ne pouvait rester silencieux. Nous sommes ainsi parvenus à un texte d'équilibre et à une unanimité qui n'est pas formelle. Cette proposition de loi a en effet permis de dépasser le conflit entre ceux qui pensaient pouvoir aller plus loin aujourd'hui et ceux qui considéraient qu'il ne fallait rien changer à l'existant.

La genèse de ce texte montre que des avancées peuvent se réaliser par la voie de la démocratie, lorsque la représentation nationale se fait l'écho de l'exigence populaire et travaille à la traduire dans la loi en respectant l'intime conviction de chacun. Nos concitoyens auront donc contribué à faire évoluer le droit à mourir dans la dignité. Je ne doute pas qu'ils continueront à intervenir en faveur d'autres évolutions. Le droit à vivre dans la dignité mérite aussi la mobilisation de toutes les énergies et ce puissant souffle d'humanité, qui seul peut permettre de lutter efficacement contre toutes les souffrances, de la naissance à la mort.

Ce souffle d'humanité n'a pas manqué à notre mission et le résultat est là : une avancée significative du droit à la dignité en fin de la vie. Le groupe des députés communistes et républicains votera ce texte. (Applaudissements sur tous les bancs)

M. Jean-Michel Dubernard - Les députés du groupe UMP voteront ce texte issu des rangs de notre assemblée. Je remercie tous ceux qui ont travaillé au sein de la mission d'information et de la commission spéciale, en particulier Mme Morano, pour arriver à un texte équilibré, humain et faisant la synthèse de nombreuses auditions. Je salue Jean Leonetti, son rapporteur, et Gaëtan Gorce, son président ; je salue surtout le noble et beau consensus qui les a réunis.

La demande d'une législation sur le thème qui nous occupe n'a cessé de croître dans les sociétés occidentales, mais comment concilier des positions aussi différentes que respectables ? On parle d'acharnement thérapeutique ou d'obstination déraisonnable, mais où commence l'obstination et où est la raison ? Où mettre le curseur ? La commission spéciale a su conjuguer avec intelligence et pondération des demandes parfois contradictoires de tels et tels groupes de patients, tels et tels professionnels de santé.

Les dispositions du présent texte constituent ainsi un incontestable progrès pour les malades comme pour les professionnels de santé. Pour les malades, dont les droits se trouvent renforcés par le refus de l'obstination déraisonnable et par la définition des procédures d'arrêt de traitement. Pour les professionnels de santé, qui se verront exonérés de leurs responsabilités pénales dans le cadre prévu par la loi - c'est un grand soulagement pour ceux qui sont amenés à prendre ces décisions toujours difficiles.

Les soins palliatifs sont maintenant appelés à se développer. L'accompagnement de l'étape ultime d'une vie prend toute son importance. La considération apportée au mourant a une immense signification. C'est de dignité, celle de la personne en fin de vie comme de ceux qui l'accompagnent, c'est de la dignité consubstantielle à l'humanité qu'il s'agit ici. (Applaudissements sur tous les bancs)

A l'unanimité des 548 suffrages exprimés, sur 551 votants, l'ensemble de la proposition de loi est adopté.

La séance, suspendue à 17 heures 15, est reprise à 17 heures 25 sous la présidence de M. Raoult.

PRÉSIDENCE de M. Éric RAOULT

vice-président

COHÉSION SOCIALE (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi adopté par le Sénat, après déclaration d'urgence, de programmation pour la cohésion sociale.

ART. 7(suite)

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure de la commission des affaires culturelles - L'amendement 37 vise à insérer les mots « ou d'aide à la recherche d'emploi », afin de tenir compte de l'ANPE et des organismes du SPE.

M. Gérard Larcher, ministre délégué aux relations du travail - Avis favorable.

L'amendement 37, mis aux voix, est adopté.

Mme Hélène Mignon - Les actions de formation proposées par les opérateurs associés au SPE doivent l'être uniquement dans le cadre des objectifs arrêtés par la convention territoriale de développement de l'emploi. L'ANPE ou l'AFPA doivent en être les seules prescriptrices : tel est le sens de l'amendement 697. Ce serait par ailleurs conférer des pouvoirs exorbitants à un organisme privé que de pouvoir radier des demandeurs d'emploi.

Mme la Rapporteure - Avis défavorable car cet amendement va à l'encontre de la logique d'activation des moyens de l'assurance chômage que nous souhaitons promouvoir dans la continuité du PARE.

En outre, cette défiance à l'endroit des partenaires sociaux, gestionnaires de l'assurance chômage, est curieuse : nous, dans la droite ligne de notre projet, nous leur faisons confiance.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Cet amendement ne manque pas d'intérêt, mais je préfère l'amendement 942 de la commission que nous verrons tout à l'heure.

L'amendement 697 est retiré.

Mme Hélène Mignon - L'amendement 699 est défendu.

Mme Martine Billard - L'amendement 942 répond en partie à nos préoccupations, mais je maintiens l'amendement 366. Le texte du projet permet la radiation d'un demandeur d'emploi qui aurait refusé une action proposée par les organismes « compétents ». Une telle rédaction était floue, mais celle de l'amendement 942 demeure ambiguë en ce qui concerne les organismes « mandatés ». Je rappelle qu'un organisme de placement peut être désormais ouvert par toute personne physique ou morale de droit privé et qu'il conviendra d'être particulièrement vigilant : nous ne disposons pas aujourd'hui de garanties suffisantes pour accepter que des organismes « mandatés » par l'ANPE puissent enclencher la radiation d'un demandeur d'emploi.

Je rappelle enfin que la radiation implique la suppression de l'allocation de replacement et la suppression de l'accès aux offres d'emploi : c'est une double peine.

Mme la Rapporteure - Avis défavorable. Pourquoi tant de méfiance à l'égard d'un organisme comme l'ANPE ? On peut compter sur elle pour agir de façon sérieuse lorsqu'elle mandatera. Dans le même esprit, nous avons refusé d'intégrer les missions locales dans ce premier cercle, considérant que celui-ci devait être très restreint.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Nous souhaitons le retrait de ces amendements, préférant l'amendement 942 de la commission.

M. Maxime Gremetz - Je suis contre l'amendement de la commission, pour les mêmes raisons que Mme Billard. Alors que l'ANPE faisait bien son travail, on élargit le champ des services et organismes dont le non-respect des convocations sera susceptible d'entraîner des sanctions pour les demandeurs d'emploi. Les « prestataires » visés pourront être des organismes privés, c'est très dangereux. Après l'affaire des droits à l'ASS, voulez-vous faire à nouveau une énorme bêtise ?

Mme Martine Billard - Je maintiens mon amendement car il ne s'agit pas de défiance à l'égard de l'ANPE : celle-ci n'a pas toujours les moyens de vérifier a priori la qualité des prestataires auxquels elle fait appel, et il lui arrive, au vu des résultats, de rompre un contrat avec un prestataire. Mais avec les dispositions que vous proposez, les demandeurs d'emploi auront déjà été radiés quand cette rupture interviendra !

M. Jean Le Garrec - M. Gremetz et Mme Billard ont bien expliqué les termes du débat. Il ne s'agit pas de méfiance, mais il serait bon, à tout le moins, d'adopter notre amendement 700, qui met un verrou en demandant que les services et organismes aient « conclu avec l'ANPE une convention territoriale de développement de l'emploi » et satisfassent à un cahier des charges.

Les amendements 699 et 366, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

Mme la Rapporteure - L'amendement 942 a été défendu.

M. Jean Le Garrec - L'amendement 700 aussi.

Mme la Rapporteure - Contre.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Avis favorable à l'amendement 942, défavorable à l'amendement 700.

L'amendement 942, mis aux voix, est adopté.

M. Nicolas Perruchot - Mes amendements 286, 287 et 288 visent à lutter contre certains abus en radiant les personnes qui s'absentent de leur domicile pour plus de trente-cinq jours ou qui vont à l'étranger.

Mme la Rapporteure - Rejet. Les engagements internationaux de la France interdisent toute restriction à la liberté de sortir du territoire qui ne soit pas liée à une condamnation pénale : alors qu'on ne peut pas infliger ce type de restriction à des contribuables qui ont de grosses « ardoises », on ne saurait imaginer le faire pour des demandeurs d'emploi... Concernant l'absence du domicile, l'ANPE dispose d'un moyen beaucoup plus simple et beaucoup moins attentatoire aux libertés pour débusquer ceux qui confondent chômage et année sabbatique : les convoquer, et les radier s'ils ne viennent pas...

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Il n'est pas souhaitable de définir dans la loi des critères trop précis pour qualifier la recherche active d'emploi. En cas de demande de suspension partielle ou totale des prestations, il convient que puisse avoir lieu un débat contradictoire, comme l'a souhaité le Sénat. Je demande donc le retrait de ces amendements.

M. Nicolas Perruchot - Au bénéfice de ces explications, et étant entendu qu'il s'agissait d'amendements d'appel, je vais les retirer. Je veux cependant appeler votre attention sur le cas des activités saisonnières, en particulier, dans ma circonscription, la cueillette de fraises. Il faudrait que les producteurs puissent plus facilement faire appel à l'ANPE : j'ai en tête l'exemple de l'un d'entre eux, qui avait besoin d'une quarantaine d'ouvriers entre les mois de mai et juillet et en a trouvé quatre par le biais de l'ANPE ; et ceux-ci ne sont pas allés au bout du contrat parce qu'ils sont retournés dans leur pays d'origine...

M. Maxime Gremetz - Ces amendements m'ont fait sauter au plafond ! A vous entendre, les gens qui sont à l'ANPE peuvent se payer de beaux voyages à l'étranger. Mais de qui parlez-vous ? Plutôt de personnes poursuivies pour trafic d'argent sale !

Les saisonniers n'auraient-ils pas le droit de prendre leurs vacances avec leur famille dans leur pays d'origine ?

M. Nicolas Perruchot - Ce n'est pas ce que je dis !

M. Maxime Gremetz - Je croyais que c'était seulement à l'extrême bord de cet hémicycle qu'on avait pu, à certaines époques, entendre ce genre de discours !

Il est inadmissible de poser la question en ces termes. Les demandeurs d'emploi qui viennent nous voir dans nos permanences ne demandent que deux choses : un travail et un logement. Quant aux employeurs qui ne trouvent pas de main-d'œuvre, peut-être faudrait-il s'interroger sur les salaires et les conditions d'hébergement qu'ils offrent... Vraiment, je ne pensais pas que de tels propos pourraient nous venir de votre côté, Monsieur Perruchot !

M. Nicolas Perruchot - Vous avez mal interprété mon amendement et mes explications. Moi aussi, je reçois des demandeurs d'emploi à ma permanence mais je reçois également des producteurs qui ne trouvent pas de main-d'œuvre. Reconnaissez qu'il y a parfois des comportements abusifs, Monsieur Gremetz !

Je ne pense pas défendre une position extrême : je n'ai fait que décrire une situation. On peut défendre les sans-emploi, mais il faut aussi écouter ceux qui proposent du travail sans résultat.

Les amendements 286 à 288 sont retirés.

M. Gaëtan Gorce - Le contrôle ne peut être confié qu'au service public de l'emploi ou, à défaut, à des organismes associés ayant passé convention avec celui-ci et respectant un cahier des charges. Il faut que le service public soit assuré que ces organismes poursuivent les objectifs fixés avec toute la compétence et tout le sérieux nécessaires. Tel est le sens de notre amendement 701, qui est conforme aux positions que nous avons défendues la semaine dernière.

Mme la Rapporteure - Aux termes du projet, les aides à la recherche d'emploi sont proposées par les organismes du premier cercle du service public de l'emploi - ANPE, AFPA... L'amendement y ajouterait des organismes conventionnés qui pourraient être des organismes privés. Nous ne pouvons y être favorables : la prescription ne peut venir que du service public, les organismes privés devant se contenter d'un rôle de prestataires.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Dans le débat que nous avons eu jeudi, il n'était pas question de sortir du premier cercle pour ce qui est de la prescription. Votre amendement, Monsieur Gorce, ne me paraît donc pas fidèle à l'esprit de nos échanges !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Nous nous heurtons ici à une difficulté d'interprétation qu'il conviendrait d'éliminer. L'alinéa que nous souhaitons modifier renvoie bien aux « organismes mentionnés au premier alinéa de l'article L. 311-1 », c'est-à-dire l'ANPE et l'AFPA ainsi que les organismes de l'assurance chômage. Mais l'alinéa suivant dispose que « peuvent participer au service public de l'emploi les organismes publics ou privés dont l'objet consiste en la fourniture de services relatifs au placement, à l'insertion, à la formation et à l'accompagnement des demandeurs d'emploi », et quelques juristes estiment que cet ajout peut prêter à confusion dans l'affaire qui nous occupe. Pour conjurer ce risque, je suggérerai d'écrire : « organismes mentionnés au premier alinéa de l'article L. 311-1, à l'exclusion de ceux qui ne font que participer au service public de l'emploi » .

Mme la Rapporteure - La précision me paraît inutile.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Le premier alinéa de l'article L. 311-1 est parfaitement clair : « Le service public de l'emploi... est assuré par les services de l'Etat chargés de l'emploi, l'Agence nationale pour l'emploi et l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes », ainsi que par « les organismes de l'assurance chômage mentionnés à l'article L. 351-21 ». Nous ne sortons donc pas du premier cercle et cette précision que j'apporte dans le cours du débat devrait suffisamment éclairer l'interprétation qui sera faite du texte.

L'amendement 701 est retiré.

M. Gaëtan Gorce - L'amendement 702 est un amendement de principe. Si l'on veut s'inscrire dans une démarche de réciprocité contractuelle comme celle qui était à l'origine du PARE, il faut que, si l'on exige plus, on accorde plus. Il n'est pas scandaleux de vouloir contrôler les demandeurs d'emploi, mais, en contrepartie, ceux-ci doivent se voir garantir par le service public un accompagnement réellement dynamique et efficace et la réalité de la recherche d'emploi doit être appréciée aussi au regard de la prestation fournie par les organismes.

Ce point n'est pas seulement technique : ce qui est en jeu c'est la politique même de l'emploi, qui doit être offensive et non déséquilibrée : il ne faut pas qu'on contrôle parce que les choses ne marchent pas comme on le voudrait, et qu'on en attribue la faute aux demandeurs d'emploi sans chercher à savoir si le service public a fait tout ce qu'il fallait.

Mme la Rapporteure - Rejet. S'il y a des sanctions à prendre, on ne pourra le faire qu'au terme d'une procédure contradictoire et l'intéressé pourra donc se faire entendre. D'autre part, aux termes de l'article 8, les décisions de radiation ou de suspension définitive seront prises de manière collégiale.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Il est évident que, si le service public n'a proposé aucune action sérieuse de formation, d'insertion ou de placement, on devra en tenir compte dans le cadre de la procédure contradictoire !

M. Perruchot se souciait des réponses données aux offres d'emploi. Nous sommes ici dans le cas de figure inverse mais, précisément, nous devons maintenir un équilibre entre les parties et c'est le décret qui fixera les conditions de celui-ci, après concertation avec les partenaires sociaux. Ne nous lançons pas dans des précisions interminables !

M. Laurent Wauquiez - Il y a quatre ans, l'Allemagne avait voulu définir tout aussi précisément, dans la loi, la procédure permettant d'apprécier la réalité de la recherche d'emploi et le résultat ne s'était pas fait attendre : progressivement, c'est la justice qui s'est substituée au contrôle administratif ! Ne laissons pas l'intervention du juge remplacer le dialogue avec l'ANPE !

M. Gaëtan Gorce - La réponse de la commission et du Gouvernement ne peut nous satisfaire, au moins dans le cadre du débat politique... que nous n'aurons pas le temps d'engager. Le Gouvernement décrète une mobilisation en faveur de l'emploi, et cette mobilisation suppose naturellement une plus grande fluidité du marché du travail. En effet, si plusieurs milliers d'emplois sont abandonnés ou repris chaque jour, il faut à un chômeur de 15 à 17 mois pour retrouver un travail. Ce déséquilibre ne peut être réduit par le seul renforcement des contrôles. Pour raccourcir la durée du chômage, il faut avant tout renforcer les moyens dont disposent le service public de l'emploi et les organismes associés, et les renforcer massivement comme on l'a fait dans le cadre du « New Deal » pour les jeunes. Mais, bien entendu, il ne faut pas se limiter aux jeunes... Cette logique est bien éloignée de la vôtre, qui combine rustines et sanctions et ne peut donc améliorer l'adéquation entre offre et demande de travail.

M. Michel Liebgott - A entendre le ministre délégué, on a le sentiment que le pouvoir réglementaire interviendra essentiellement pour « réguler » les droits des demandeurs d'emploi. En revanche, les obligations dont le non-respect peut conduire à une radiation sont fixées par la loi. Il y a là une inégalité de traitement. On voit l'objectif poursuivi : plus il y aura de radiations, meilleures seront les statistiques du chômage...

Les chômeurs qui se présentent à l'ANPE, contrairement à ceux qui ont suffisamment de relations et la formation nécessaire pour retrouver seuls un emploi, sont au bout du rouleau. Il faut mettre à leur disposition les meilleurs outils. M. Perruchot a dit que beaucoup d'entreprises cherchaient de la main-d'œuvre : encore faut-il former et intégrer les chômeurs, ce qui nécessite un véritable service public de l'emploi. Il ne faudrait pas que les futures maisons de l'emploi ne servent qu'à apporter un soutien psychologique à ceux qui n'auront pu retrouver du travail parce qu'on aura démantelé le service public de l'emploi.

M. Maxime Gremetz - On nous parle d'une procédure contradictoire. Notre jeune collègue Wauquiez oublie qu'en attendant la décision de justice, les gens n'ont rien pendant des mois.

Je voudrais donc que le Gouvernement nous précise si le décret va faire appel au juge pour régler les contentieux. C'est important pour le vote de l'amendement.

M. le Président - Je mets au voix l'amendement 702. (Protestations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains)

L'amendement 702, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Maxime Gremetz - Je demande une suspension de séance. Il est étrange qu'on nous fasse voter avant d'entendre la réponse du Gouvernement.

M. le Président - Le ministre n'est pas contraint de vous répondre tout de suite. Ce n'est pas vous qui conduisez la séance.

M. Maxime Gremetz - Mais je peux demander une suspension de séance.

M. le Président - Pour éviter de casser le rythme du débat, M. le ministre délégué va vous répondre sans attendre l'amendement de M. Fourgous.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - La procédure de sanction respectera les droits de la défense, dans le cadre d'une procédure contradictoire. Le représentant de l'Etat prendra ensuite sa décision. En cas de désaccord, le juge administratif tranchera.

Nous restons donc dans la logique du dispositif, qui doit être efficace et juste à la fois. Nous créons un levier et un accompagnement au bénéfice du demandeur d'emploi, mais l'exigence doit être partagée : il y aura de part et d'autre des droits et des devoirs. Telle est notre conception de l'égalité républicaine. La position du Gouvernement est conforme à celle de la majorité de la commission.

M. Maxime Gremetz - Si j'avais entendu cette réponse plus tôt, j'aurais émis un autre vote.

M. le Président - Je plaide coupable.

M. Jean-Michel Fourgous - Mon amendement 320 vise à inciter le demandeur d'emploi à reprendre une activité le plus vite possible, afin de limiter le chômage de longue durée. Nous sommes le pays européen le plus laxiste dans ce domaine. Le budget de l'UNEDIC n'est pas financé par Lourdes ! En supprimant un milliard de prélèvements, on crée 30 000 emplois. (Rires sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains)

Psychologiquement, l'homme a besoin d'être utile. Or, le travail rend utile. Après six mois de chômage, le taux de divorce est très élevé. C'est dire les ravages du chômage de longue durée dans les familles.

Mon amendement demande aux chômeurs inscrits depuis six mois d'accepter l'emploi qui leur est proposé.

Mme la Rapporteure - La commission a repoussé cet amendement qui aurait pour effet d'imposer à un chômeur un emploi qui ne serait pas rétribué au niveau normalement admis. Je vois bien ce qui est recherché. Le retour à l'emploi doit être privilégié. Toutefois, la commission a préféré appliquer les règles actuelles et prévoir une procédure de sanction plus efficace : l'article 8 a été amendé dans ce sens.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Je connais votre action en faveur du retour à l'emploi, Monsieur Fourgous. L'idée d'une cité des métiers, je l'ai découverte chez vous il y a un an.

Vous soulevez le problème des critères, c'est pourquoi je vous renvoie au décret. Préparé avec les partenaires sociaux, il fixera les critères, qui ne seront pas les mêmes partout. L'exigence de mobilité ne peut être la même selon qu'on se trouve en zone urbaine ou non : il y a des réalités à prendre en compte. Je souhaite donc le retrait de votre amendement.

M. Jean-Michel Fourgous - J'accède à la demande du ministre et je vais retirer l'amendement. Puisse cependant le Gouvernement bien entendre que les 25 milliards de l'UNEDIC empêchent des centaines de milliers d'emplois de se créer. Il faut comprendre comment marche l'économie marchande (Exclamations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et du groupe socialiste) et arrêter la démagogie. La lutte des classes et l'affrontement idéologique entre la droite et la gauche, c'est fini !

M. Maxime Gremetz - La première phrase de l'exposé des motifs de l'amendement de notre collègue est très révélatrice de son état d'esprit : « La croissance est un état d'esprit entre le capital et le travail. Or, il existe en France une véritable sécurité de l'inemploi qui contribue aux faibles performances de son économie ». (Mêmes mouvements)

Mme Muguette Jacquaint - C'est pire que du Sarkozy !

M. Maxime Gremetz - Sur quelle planète faut-il vivre pour tenir de tels propos ? Vous arrive-t-il de quitter les salons des beaux quartiers ?

M. le Président - Monsieur Gremetz, je rappelle que l'amendement a été retiré.

M. Maxime Gremetz - Il est scandaleux qu'un élu puisse écrire de telles contrevérités. M. Fourgous a-t-il oublié que le taux de productivité français l'emporte sur celui des Etats-Unis ? Sa posture est au-delà du populisme car elle tend à stigmatiser les immigrés, les jeunes - forcément paresseux - et les chômeurs - nécessairement voleurs. On ne gagnera rien à instruire de tels procès d'intention. La réalité de ce pays, Monsieur Fourgous, c'est que les demandeurs d'emploi sont souvent prêts à accepter n'importe quoi pour s'en sortir !

L'amendement 320 est retiré.

Mme Martine Billard - Au cours de l'examen des premiers articles du projet de loi, le Gouvernement et la majorité n'avaient que le mot de souplesse à la bouche. Avec celui-ci, il n'y a plus du tout de place pour la souplesse et l'imagination de la droite semble sans limite pour compliquer la vie des demandeurs d'emploi. Quant à l'assertion selon laquelle l'homme a besoin de travailler pour être digne, elle est quelque peu vexatoire pour les bénévoles et pour tous ceux qui se trouvent empêchés de travailler bien contre leur gré. N'oublions pas que seulement la moitié des demandeurs d'emploi est indemnisée, dont l'immense majorité au-dessous du SMIC et pour une durée n'excédant pas dix-huit mois. Dans ces conditions, il est vraiment abusif de parler d'une « véritable sécurité de l'inemploi » !

Notre amendement 367 tend à revenir sur la possibilité de réduire le revenu de remplacement. En effet, celui-ci ne procède pas de l'aide sociale mais de la réalisation d'un droit acquis au fil d'années de cotisation. Au nom de quoi le réduire ? Selon quels critères objectifs ? Va-t-on sanctionner deux jours d'absence à une formation de l'AFPA ou les absences prises pour se consacrer à la rédaction de son CV ?

M. Jean-Michel Fourgous - C'est cela ! Ne touchons à rien puisque tout va bien dans le pays ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

Mme Martine Billard - Ce n'est pas en imposant des sanctions arbitraires que l'on redressera la situation.

M. Jean-Michel Fourgous - Mais oui, persévérez dans l'échec. Vous ne comprenez rien à l'économie. Vous êtes incompétents. Le bilan de votre politique ultra-étatiste, c'est trois millions de chômeurs ! (Mêmes mouvements)

M. le Président - Chers collègues, un peu de calme !

Mme Martine Billard - Je maintiens que la proposition de réduire le revenu de remplacement ne repose sur aucun critère objectif alors que celui-ci est un droit. Et ne nous renvoyez pas une nouvelle fois au décret. Nous attendons des réponses précises.

Mme la Rapporteure - Avis défavorable, dans la mesure où l'adoption de l'amendement conduirait à privilégier une logique du tout ou rien - soit le revenu de remplacement est intégralement maintenu, soit il est supprimé. L'introduction d'une forme de sanction progressive permettra - une fois que l'intéressé aura été entendu - de lui envoyer un signal, de lui faire comprendre qu'il a manqué à l'une de ses obligations et de l'inciter à rétablir sa situation.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Madame Billard, je me suis déjà assez largement exprimé à ce sujet et je considère comme votre rapporteure que l'adoption de votre amendement produirait l'effet un peu paradoxal d'appliquer la sanction maximale au premier manquement. Ce ne serait pas très pédagogique. La proposition que nous avons retenue est pragmatique et équilibrée ; elle est comparable à ce que pratiquent la plupart de nos partenaires. L'idée est bien, Monsieur Fourgous, de rappeler la règle au demandeur d'emploi qui n'entreprendrait pas une démarche de recherche suffisamment active et de permettre aux services qui l'accompagnent de faire un bilan des actions engagées. Croyez bien qu'aucun des organismes partenaires des démarches d'insertion professionnelle ne prend de gaieté de cœur ce type de décision. On ne suspend pas tout ou partie d'une allocation d'un revers de plume et sans avoir envisagé toutes les conséquences d'une telle décision. Le Gouvernement ne peut accepter l'amendement de Mme Billard car il est très attaché à la progressivité de la sanction.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Au-delà des provocations scandaleuses de M. Fourgous, le Gouvernement n'esquivera pas la responsabilité d'avoir ouvert ce débat. Pourquoi modifier l'article L. 351-17 du code de travail - issu notamment de la loi du 20 décembre 1993 - qui dispose que le droit au revenu de remplacement s'éteint lorsque, sans motif légitime, le bénéficiaire de ce revenu refuse d'accepter un emploi compatible avec son profil et normalement rétribué ? Pourquoi revenir sur un dispositif qui renvoie à l'article L. 311-5 du même code, déjà très complet pour ce qui concerne les modalités de radiation des demandeurs d'emploi ? Pourquoi s'en remettre à deux paragraphes rédigés dans un style sentencieux alors que nous disposons déjà de tout l'arsenal juridique nécessaire ?

Non, vous ne pouvez pas soutenir que vous mettriez fin à un dispositif de tout ou rien. En vérité, vous supprimez tout le cadre législatif institué en 1993, qui encadrait la procédure par laquelle un chômeur, dont l'attitude répréhensible nuit à l'ensemble des autres chômeurs, peut être sanctionné. Quelles que soient vos contorsions, il vous faudra bien assumer cette responsabilité politique.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Je l'assume. Et en dépit de ma rondeur, soyez assuré que je ne manque pas de souplesse... (Sourires)

M. Maxime Gremetz - Les indemnités chômage, ce n'est pas la charité ! C'est le produit des cotisations chômage et pour y avoir droit, il faut avoir cotisé. Le droit à revenu de remplacement pour les personnes au chômage est garanti par le code du travail.

Comme l'a très bien rappelé M. Le Bouillonnec, le dispositif actuel ne se résume pas au tout ou rien. Il comporte des droits et des devoirs. Il n'est pas admissible, en effet, qu'un chômeur refuse toute recherche d'emploi ou toute formation car il porte ainsi tort à la caisse qui l'indemnise. On ne se donne pas, hélas, tous les moyens de faire la chasse aux comportements frauduleux, cela dit beaucoup moins fréquents que vous semblez le penser...

Vous ne vous posez pas tant de questions quand vous décidez 2,5 milliards d'euros d'exonérations de charges patronales, et vous passez volontiers sous silence que c'est de l'argent ainsi volé à la sécurité sociale !

M. Jean-Michel Fourgous - Ce sont les entreprises qui créent les emplois.

M. Maxime Gremetz - Que ne vous appliquez-vous à vous-mêmes ce que vous préconisez pour les chômeurs ! Eh bien, je suggère, moi, que l'on opère des retenues sur les indemnités des parlementaires qui sont régulièrement absents en séance publique ou en commission. Qu'en diriez-vous ? (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et du groupe socialiste)

M. Alain Néri et Mme Martine Billard - Très bien !

M. Francis Vercamer - Je suis assez sensible à l'amendement de Mme Billard. En effet, si on comprend parfaitement que l'on supprime son revenu de remplacement au demandeur d'emploi qui exagère dans ses comportements, permettre la réduction progressive de ce revenu ne fera que créer des difficultés. Comment jugera-t-on de la gravité de la faute et de la sanction qu'elle doit entraîner selon cette gravité ? Permettre des décisions arbitraires serait très dangereux.

M. Maxime Gremetz - Monsieur Fourgous, si vous quittez l'hémicycle comme vous vous y apprêtez, vos indemnités vont être réduites !

M. Francis Vercamer - Le ministre a bien apporté quelques éclaircissements mais j'aurais aimé en savoir davantage sur le futur décret pour pouvoir voter de façon tout à fait éclairée.

M. Maxime Gremetz - Je demande un scrutin public sur l'amendement 367.

A la majorité de 47 voix contre 25 sur 72 votants et 72 suffrages exprimés, l'amendement 367 n'est pas adopté.

L'article 7 modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 8

M. Maxime Gremetz - Cet article renforce les modalités de contrôle de la recherche d'emploi à laquelle sont astreints les chômeurs indemnisés, et donne compétence aux ASSEDIC et à l'ANPE en matière de contrôle. Ces dispositions, présentées comme des améliorations, ne feront que faciliter la prise de sanctions puisqu'il sera possible de les graduer. Toujours plus de coercition, telle semble bien être votre optique ! Vous ignorez totalement ce que vivent les personnes les plus en difficulté. Il n'est pas si facile de remonter la pente quand on se trouve en pleine détresse et la spirale de l'échec est vite enclenchée, qui mène à l'abattement, au fatalisme et au renoncement. Vous voulez obliger les chômeurs à accepter n'importe quelle proposition d'emploi, fût-il précaire ou sans rapport avec leur formation, au nom d'un sacro-saint retour à l'activité, ce qui est bien différent d'un retour à l'emploi.

Vous les obligez en effet, sous peine de sanction, à accepter la première proposition plus ou moins compatible avec leur qualification. Il s'agira le plus souvent de sous-emplois, dans tous les sens du terme : précaires, sous-payés, à temps partiel... Des sous-emplois parfois moins avantageux financièrement que le chômage et les minima sociaux. De quoi faire réfléchir tout esprit sensé.

Au lieu de vous attacher à contraindre, vous feriez mieux de chercher à améliorer qualitativement les emplois proposés. Il faut que le travail soit valorisé. Il faut que travailler permette de vivre mieux qu'en ne travaillant pas. Oui, au lieu de valoriser les dividendes, valorisez donc le travail !

Cet article revient à subordonner le versement des allocations chômage - qui sont le fruit de cotisations antérieures, donc un droit - à l'accomplissement de démarches de recherche d'emploi. J'observe que personne n'a réagi à ma proposition consistant à dire : et si nous appliquions à nous-mêmes ce que nous prévoyons pour les autres ? Nous qui avons de bons revenus - presque 12 millions d'anciens francs, si l'on additionne tout -, ne pourrions-nous pas montrer l'exemple et accepter que nos indemnités soient réduites, chaque fois que nous manquons au devoir d'assiduité ? Vous stigmatisez les chômeurs, mais pensez-vous que les députés qui ne viennent jamais en séance méritent l'intégralité de leurs indemnités ? Ne sont-ils pas en quelque sorte des chômeurs grassement payés ? Montrons l'exemple !

M. Michel Liebgott - Nous fêtons une sorte d'anniversaire : celui des déclarations de Jacques Chirac sur la fracture sociale ! Après deux ans et demi d'attaques contre l'ensemble des dispositifs destinés à permettre aux chômeurs de vivre dans des conditions décentes, l'annonce du présent projet avait allumé en nous une lueur d'espoir. Ce fut très bref et l'on peut dire qu'elle est déjà éteinte, car, en vérité, une fois que ce texte aura été adopté, il faudra qu'il soit suivi de beaucoup de dispositifs d'accompagnement social.

Cet article consacre une diminution considérable du droit des demandeurs d'emploi. En plus d'être stigmatisés, ceux-ci vont être proprement évacués du dispositif d'indemnisation, et ce non par des agents publics, garants de la neutralité des décisions, mais par des instances qui seront à la fois juge et partie, puisque, comme chacun sait, l'UNEDIC est présidée par le Medef. Ce projet, prétendu social, nous fait donc vivre une révolution libérale. Comment peut-on à ce point stigmatiser les chômeurs ? Moi qui suis maire d'une ville où les 9/10ème des chômeurs sont regroupés dans une zone urbaine sensible, je sais que les gens ne font pas le choix du chômage. Ils sont le plus souvent victimes de l'absence de formation, de discrimination, voire de licenciements abusifs, et ils ne demandent qu'à travailler. Il est tout de même curieux qu'une loi dite de cohésion sociale s'intéresse surtout à la meilleure manière de les évacuer de l'indemnisation du chômage.

Avec ce dispositif inadapté à la réalité des quartiers, vous allez fabriquer des chômeurs de longue durée, privés de toute protection, notamment de celle qu'offrait le service public de l'emploi. En plus de perdre leur emploi, les personnes visées par cet article perdront le bénéfice de leurs cotisations et se retrouveront dans une précarité dramatique, et avec eux, leur famille, leurs enfants. Alors, bien sûr, l'assistance prendra le relais, mais pensez-vous qu'une famille n'a rien d'autre à espérer que la prise en charge de ses enfants par l'aide sociale ? Nous devons nous attendre à une explosion des budgets sociaux dans les départements.

Certes, seul point positif, les statistiques du chômage vont peut-être baisser. Mais le recours à l'assistance sociale augmentera d'autant. Et l'on verra alors sur vos bancs certains se plaindre de ce qu'il y a de plus en plus d'assistés dans ce pays et de gens qui ne veulent pas travailler. Les mêmes proposeront alors de renforcer encore les dispositions anti-chômage !

Face à la confusion des genres qui fait que l'UNEDIC sera à la fois juge et partie, quelques contre feux ont bien été allumés : le demandeur d'emploi pourra être accompagné par la personne de son choix dans une procédure contradictoire. Mais ce sera un peu comme une dernière cigarette avant la mise à mort (Protestations sur les bancs du groupe UMP).

Une fois ce texte adopté, le droit à l'emploi ne sera plus ce qu'il était. Vous commettez là une erreur politique (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste).

M. Jean-Paul Anciaux - Tout demandeur d'emploi doit être l'acteur principal de sa propre réinsertion, nous le savons bien. Nous nous donnons avec cet article les moyens que cette exigence soit prise en considération (Exclamations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains).

Mme Muguette Jacquaint - La majorité et le Gouvernement sont vraiment depuis quelques mois dans une logique de stigmatisation. Nous l'avons bien vu lors du débat sur la sécurité sociale : le malade y faisait figure d'un goinfre de médicaments (Exclamations sur les bancs du groupe UMP), les salariés en arrêt de travail de fraudeurs, les médecins de complices ! Nous voici maintenant dans le chômage de complaisance ! L'idée sous-jacente de cet article, c'est qu'il y en a assez de ces chômeurs, de ces érémistes, de ces gens assistés et de toutes ces personnes qui ne veulent pas travailler ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

Comprenez que l'on réagisse passionnément ! Vous semblez ignorer ce qui se passe dans certains quartiers. J'ai cité l'exemple d'une femme qui a accepté de travailler trois heures, qui doit pour ce faire s'absenter six heures et qui ne touche même pas de quoi payer la garde de son enfant !

M. Jean-Paul Anciaux - C'est précisément la situation de ces personnes qu'il convient d'améliorer.

Mme Muguette Jacquaint - C'est la faiblesse des salaires qui encourage le travail au noir et qui favorise les fraudes. Certes, j'ai entendu que le chômage avait diminué de 0,1 % mais un expert a aussi remarqué qu'avec les délocalisations et les licenciements, de plus en plus de salariés de 50 ans sont au chômage. En outre, comment se fait-il que l'on demande de travailler plus et que des travailleurs qualifiés ne trouvent pas d'emploi ?

Les chômeurs sont dignes.

M. Jean-Paul Anciaux - C'est exact.

Mme Muguette Jacquaint - Ils ne veulent pas être considérés comme des assistés, mais quand ils entendent vos points de vue, quelle idée peuvent-ils se faire des valeurs humaines ? L'amendement 221 tend donc à supprimer cet article. (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et du groupe socialiste)

Mme Martine Billard - J'ai beaucoup entendu parler de « faute », puis seulement après de « réinsertion » : le chômeur serait-il responsable de sa situation ? Certes, des demandeurs d'emploi ont baissé les bras...

M. Jean-Paul Anciaux - Il y en a.

Mme Martine Billard - ...mais c'est une minorité et l'on peut parfois comprendre, avec les conditions qui leur sont faites, qu'ils ne veulent plus s'épuiser à chercher du travail. Le demandeur d'emploi, de plus, ne doit pas être confondu avec des personnes qui ne sont pas insérées et je rappelle que parmi les SDF, on dénombre 25 % de salariés.

Après modification, je reconnais que l'article 8 est moins pire que dans sa rédaction initiale mais je maintiens néanmoins l'amendement 368 qui vise à le supprimer. Je note en effet que le revenu de remplacement peut être supprimé ou réduit après consultation d'une commission « le cas échéant » : la collégialité n'est donc pas obligatoire. En outre, la loi précise qu'il peut être fait appel aux services fiscaux, mais est-ce dans le cas des fraudes, des fausses déclarations - ce qui se conçoit - ou dans tous les cas ? Je ne comprendrais pas, par exemple que l'on vérifie la déclaration d'impôt d'un demandeur d'emploi en vue de la réduction d'un revenu de remplacement puisque celui-ci est lié aux cotisations, non aux autres revenus dont le salarié pourrait disposer. Enfin, si les revenus des demandeurs d'emploi diminuent, ceux-ci seront fondés à demander que soient recalculées toutes les aides associées : logement, CAF, aides aux transports... Sous prétexte de pédagogie, non seulement vous appauvrissez les chômeurs, mais vous contribuez à grever les finances publiques.

M. le ministre ne m'a pas répondu sur les raisons qui motivent la réduction de l'allocation de remplacement - refus d'une formation, d'un emploi ? - ni sur les modalités de cette réduction graduée.

M. Gaëtan Gorce - L'amendement 704 vise également à supprimer cet article.

D'abord, parce qu'il élargit la responsabilité du contrôle à l'ASSEDIC. Est-ce légitime, dès lors que l'ASSEDIC est directement intéressée à l'obtention de résultats, et pas seulement pour des raisons sociales ?

Ensuite, sur les neufs articles consacrés à la « mobilisation pour l'emploi », deux au moins concernent le contrôle des chômeurs. Nous, nous avons voté en 1999 une loi de lutte contre les exclusions qui renforçaient leurs droits : la différence de philosophie est patente.

Enfin, et c'est un paradoxe, les contrôles sont renforcés au moment où l'emploi est plus rare et où le chômage augmente.

En fait, en imputant aux chômeurs la responsabilité de leur situation quand votre politique n'est pas fichue de soutenir la croissance, vous faites œuvre d'idéologues. Je rappelle que pendant la législature précédente, ce sont deux millions d'emplois qui avaient été créés. Bref, votre tour de passe-passe est un peu gros et il est normal que nous le dénoncions.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Excellent.

Mme la Rapporteure - Si les précédents orateurs sont libres de se caricaturer eux-mêmes, qu'ils ne caricaturent pas les demandeurs d'emploi.

Il ne s'agit pas de dire que ce projet se résume au contrôle des demandeurs d'emploi : cette loi comporte 38 articles sur l'emploi, et deux articles seulement sont consacrés à la question du contrôle. Il s'agit surtout d'aider ceux qui souffrent à trouver une solution à leurs problèmes, d'autant plus que nous consacrons un tiers de notre richesse nationale aux dépenses sociales. Si, parmi les demandeurs d'emploi, il y a quelques fraudeurs, minoritaires, qu'ils soient sanctionnés puisqu'ils privent ceux qui en ont besoin d'une part des aides auxquelles ils ont droit. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

En outre, si ces amendements étaient adoptés, ce serait la fin des procédures contradictoires en cas de sanction, la fin de la graduation des sanctions - ce serait le tout ou rien, la stupide politique du pire -, et la fin de la collégialité.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Monsieur Gremetz, nous ne livrons pas les demandeurs d'emploi à l'inconnu : nous avons évoqué la semaine dernière différentes mesures d'accompagnement et de formation.

Monsieur Liebgott, vos propos sur l'UNEDIC m'ont étonné : je vous rappelle que nous proposons l'extension d'un accord sur le contrôle du chômage conclu par Mme Guigou en 2001. Je vous rappelle en outre que l'UNEDIC est alternativement présidée par les représentants des organisations des salariés et des entreprises.

M. Maxime Gremetz - Du Medef, donc.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Ou d'une autre organisation. Votre défiance à l'endroit du paritarisme m'intrigue. Alors, que dans quelques mois, sera engagée la réflexion sur la révision de la convention d'assurance chômage, on ne peut imaginer que ses différents acteurs soient en dehors du dispositif.

Pour répondre à Mme Jacquaint, je souligne que pour la première fois, le chômage des plus de 50 ans baisse, alors que nous n'avons pas encore entamé la négociation interprofessionnelle sur les seniors : -1,01% depuis le mois de mai. Il reste que les seniors ne doivent plus constituer une variable d'ajustement ; c'est là l'une des préoccupations auxquelles répond le plan de cohésion sociale. L'idée d'un « pacte intergénérationnel » entre les jeunes et les aînés est une vraie idée, que nous devrions faire partager demain dans le cadre de l'Europe sociale. Comment demeurer le pays où l'on rentre le plus tard dans la vie professionnelle et où l'on en sort le plus tôt ?

Enfin, Madame Billard, si le représentant de l'Etat peut recourir aux services fiscaux, c'est dans le cas où existe une suspicion de fraude.

Monsieur Gorce, notre assurance chômage fonctionne selon un principe de solidarité réciproque de la collectivité des salariés et de leurs employeurs : toute personne qui perd son emploi involontairement se voit garantir un revenu de remplacement, le temps pour elle de retrouver un emploi, donc un revenu. Mais l'assurance chômage ne donne pas un droit de tirage inconditionnel, acquis par chaque individu du seul fait de ses cotisations. A cet égard, ce n'est pas une assurance tout à fait comme les autres. Il ne s'agit pas de droits à consommation, mais de droits à solidarité (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Avis défavorable, donc.

M. Laurent Wauquiez - Nous avons le seul système en Europe qui ne limite pas le nombre de propositions d'emploi qui peuvent être refusées et qui n'applique pas de véritable dégressivité. Ce projet reste dans la filiation de ce qui existe aujourd'hui en France, à savoir un contrôle de la réalité de la recherche d'emploi, et vise seulement à rendre ce contrôle un peu plus effectif (Protestations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains). Il s'agit d'éviter qu'il y ait, à côté de ceux qui tous les matins vont consulter les offres d'emploi, ceux qui se contentent d'aller demander tous les trois mois une attestation de recherche d'emploi dans une entreprise (Nouvelles protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

M. Maxime Gremetz - Vous êtes jeune, mais vous êtes vieux dans votre tête !

M. le Président - Je vous en prie, Monsieur Gremetz, ce sont des propos inadmissibles !

M. Pierre Cardo - Les chômeurs qui essaient de s'en sortir à tout prix apprécient modérément qu'on ne soit pas plus exigeant à l'égard de certains autres. Certes, on ne choisit pas d'être au chômage et il faut comprendre la situation des chômeurs, mais ce n'est pas une raison pour tout admettre. Et ce n'est pas valoriser le travail social dont doivent bénéficier les demandeurs d'emploi que de n'envisager aucune sanction. Pourquoi, en effet, acceptez-vous le principe de la suppression du revenu de remplacement dans certaines circonstances, mais refusez-vous celui de sa réduction pour certains motifs ? Parce que vous savez qu'une sanction aussi importante que la suppression totale du revenu n'est jamais appliquée !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Ce n'est pas vrai !

M. Pierre Cardo - Regardez les statistiques ! La réduction du revenu de remplacement serait un moyen de donner un avertissement. Quant à la remarque de Mme Billard, elle n'est pas recevable car si l'on consulte les services fiscaux, c'est qu'on ne sait pas à l'avance si l'on est dans un cas de suppression ou de réduction.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - L'article L. 351-17 actuel, issu de la loi quinquennale pour l'emploi de 1993, est bien plus précis sur les motifs d'extinction du droit au revenu de remplacement : « lorsque le bénéficiaire de ce revenu refuse d'accepter un emploi, quelle que soit la durée du contrat de travail offert, compatible avec sa spécialité ou sa formation, etc... ». Pourquoi a-t-on voulu, dans le cadre d'une loi sur la cohésion sociale, toucher à ce dispositif ? C'est choquant !

M. Jean-Paul Anciaux - Non !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Si, car je continue à considérer qu'en dépit de l'introduction, soulignée par Mme de Panafieu, d'une procédure contradictoire, vous êtes loin d'avoir amélioré la loi en renvoyant ces précisions à un décret en Conseil d'Etat.

Par ailleurs, selon M. Larcher, il ne faudrait pas que la cotisation crée un droit de tirage. Personne ne pense cela... Néanmoins, qui peut contester qu'un salarié privé involontairement d'emploi fasse état de ses années de cotisation pour bénéficier de la plénitude de ses droits ? Le revenu de replacement est un dû, pas une aumône.

M. Michel Liebgott - A l'orateur qui dénonçait tout à l'heure une exception française, je commencerai par répondre que toutes les exceptions ne sont pas mauvaises, surtout quand elles ont nom retraite par répartition, sécurité sociale et système d'indemnisation du chômage.

Puisque vous reconnaissez, Madame la rapporteure, que les fraudeurs sont une infime minorité, est-il besoin de toute une nouvelle architecture pour les écarter ? Ce dispositif ne fera qu'ajouter à la précarisation de l'emploi celle de l'indemnisation en cas de chômage - mais sans doute le système libéral le veut-il ainsi...

Certes, Monsieur le ministre délégué, le Medef ne préside qu'en alternance, mais cela ne suffit pas à nous rassurer ! Quoi qu'il en soit, la loi est faite pour protéger le citoyen et nous ne devons surtout pas l'oublier, s'agissant de demandeurs d'emploi ou de salariés pour qui nous représentons bien souvent le dernier rempart contre les excès du libéralisme.

Quant aux services fiscaux, est-il nécessaire d'y faire appel ? Le service public de l'emploi est à même de sanctionner les fraudeurs, surtout s'ils sont peu nombreux.

Enfin, j'ai vécu de près la fermeture de l'usine Daewo. Certaines des femmes qui y étaient employées sont parties chercher un travail au Luxembourg, à 50 ou 60 kilomètres. Cela entraîne pour elles des frais de déplacement ou de garde d'enfants si élevés qu'elles travaillent pour rien, vu le niveau de leur salaire. Il conviendrait donc de regarder les choses de près lorsqu'on parle de mobilité...

Mme Martine Billard - Il me semble qu'il y a confusion entre les allocations versées par les ASSEDIC, d'une part, et l'ASS et le RMI, d'autre part. Les premières ne sont versées que pour une courte durée, sous condition d'une certaine durée de cotisation, et la majorité des chômeurs indemnisés ne le sont pas au niveau maximum tout au long des dix-huit mois. Même des salariés âgés peuvent ainsi se retrouver à l'ASS !

D'autre part, si des entreprises fournissent des attestations « bidons », cela relève indéniablement de la fraude. Ce n'est pas parce qu'une loi est mal appliquée qu'il faut en faire une autre !

On nous dit que l'ANPE ne traite plus que 30 % des offres et demandes d'emplois. Il est de fait que, dans certaines professions, celles-ci passent de plus en plus par internet : comment un demandeur d'emploi peut-il alors prouver qu'il a fait ce qu'il devait ? Et s'il n'y parvient pas, va-t-on réduire son allocation ?

Enfin, Monsieur le ministre délégué, nous attendons toujours que vous répondiez sur les critères de réduction.

Les amendements 221, 368 et 704, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Gaëtan Gorce - L'amendement 705 est défendu.

Mme la Rapporteure - Rejet.

M. le Ministre délégué - Avis défavorable.

C'est depuis 1992 que l'assurance chômage participe aux opérations de contrôle. Par ailleurs, M. Le Bouillonnec, vous oubliez qu'un changement fondamental par rapport à la loi Giraud de 1993 est intervenu en 2000, avec la convention sur l'assurance chômage qui a créé le PARE. Cette convention met l'accent sur les engagements réciproques pris par le demandeur d'emploi et par l'assurance chômage et l'opération est une opération gagnant-gagnant pour les deux, grâce à cette formule de contrat, comportant à la fois des droits et des devoirs, que nous reprenons volontiers à notre compte ! On ne peut donc comparer à celle de 1993 une situation qui doit beaucoup à la négociation collective. Et, pour le partage à faire entre celle-ci et la loi, je vous renvoie à la définition donnée dans la « position commune » de juillet 2001 des partenaires sociaux...

L'amendement 705, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme la Rapporteure - L'amendement 38 vise à organiser une décision collégiale pour les radiations ou pour les suspensions définitives de l'allocation chômage. Certes, quand une personne a été reconnu fautive au terme de la procédure contradictoire, on peut considérer qu'elle doit être radiée mais, dans la pratique, il se trouvera peu d'hommes ou de femmes pour le décider seuls, compte tenu des conséquences que cela emporte pour les familles. Sur des sujets aussi vitaux, on s'en remet de plus en plus souvent à la collégialité et nous proposons donc qu'en l'occurrence aussi, la décision revienne à un collège comprenant un représentant de l'ANPE, un représentant des ASSEDIC et le directeur du travail, représentant le préfet.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Nous regardons comme un progrès l'instauration d'une procédure contradictoire, mais celle-ci peut revêtir des formes bien différentes : en droit, un échange de correspondance peut suffire. Notre sous-amendement 971 vise donc à en préciser les modalités : le demandeur d'emploi sera convoqué à un entretien préalable par le représentant de l'Etat au moyen d'une lettre recommandée ou d'une lettre remise en main propre contre décharge et, au cours de l'entretien qui ne pourra avoir lieu que dans un délai de cinq jours ouvrables au minimum, le représentant de l'Etat devra indiquer les motifs de la décision envisagée et recueillir les explications du demandeur d'emploi, lequel pourra se faire assister par une personne de son choix.

Nous pensons que ces modalités garantissent le caractère contradictoire de la procédure. On nous opposera que le décret pourrait y pourvoir, mais, à mon sentiment, le législateur doit toujours être précis en ces matières, ne serait-ce que pour éviter des recours pénibles pour les personnes concernées.

Mme la Rapporteure - La commission n'a pu examiner ce sous-amendement...

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Mais elle a examiné un amendement qui comprenait les mêmes dispositions !

Mme la Rapporteure - ...et qu'elle a repoussé. Vous reprenez en fait les règles applicables dans les cas de licenciement économique, c'est-à-dire dans des situations conflictuelles qui exigent un cadre juridique très précis. Or nous sommes loin de ce cas de figure, en l'espèce, ne serait-ce qu'à cause de la présence du représentant de l'Etat. D'autre part, ces dispositions relèvent typiquement du décret en Conseil d'Etat. Rejet, donc

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Les dispositions du sous-amendement 971 sont du niveau du décret.

Après l'apport par le Sénat de la procédure contradictoire, votre commission enrichit le texte en introduisant l'exigence de la collégialité. Je veux l'en remercier.

J'ai moi-même examiné des cas douloureux de radiation. Même en cas de fraude manifeste, je n'ai jamais vu de dossier instruit de manière approximative. Il faut faire confiance aux hommes et aux femmes du service public de l'emploi, qui ne prennent pas de décisions expéditives. Avis favorable à l'amendement 38.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Je n'ai pas voulu polémiquer, mais nous avions compris que le Gouvernement n'était pas à l'origine de la procédure contradictoire : elle a été demandée par le Sénat. De même, c'est notre commission qui introduit la collégialité.

J'admets volontiers que les dispositions de mon sous-amendement relèvent du décret, mais il est important de préciser que le demandeur d'emploi pourra être assisté par la personne de son choix. Nous retirons le sous-amendement, mais il faudra préciser les modalités de la procédure, sans quoi celle-ci ne sera qu'une supercherie. Il y a souvent contentieux parce qu'une lettre n'est pas arrivée ou que l'intéressé ne s'est pas présenté.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Le principe de la procédure contradictoire est dans la Constitution : le Sénat n'a fait qu'introduire une précision.

L'amendement 38, mis aux voix, est adopté.

Mme la Rapporteure - L'amendement 39 est de coordination.

L'amendement 39, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 8, modifié, mis aux voix, est adopté.

AVANT L'ART. 9

M. Francis Vercamer - Mon amendement 289 vise à demander au Gouvernement un rapport dressant le bilan du contrat d'insertion des jeunes dans la vie sociale.

Mme Hélène Mignon - Le 3 novembre de l'année dernière, M. Fillon nous annonçait la disparition du programme TRACE et son remplacement par le CIVIS. Nous voyons maintenant réapparaître le programme TRACE, mais il serait intéressant de disposer d'un bilan pour savoir si des améliorations sont possibles, si les filles et les garçons sont traités à égalité et si les bénéficiaires sont toujours des jeunes qui connaissent de grandes difficultés.

Mme la Rapporteure - Vous trouverez à la page 173 de mon rapport toutes les statistiques sur le sujet. En outre, les ministères tiennent à la disposition des élus les données nécessaires pour se faire une juste idée de ces programmes. Avis défavorable.

Mme Hélène Mignon - Vous écrivez vous-même, dans votre rapport, que toutes les missions locales n'ont pas fait le travail statistique qu'on pouvait attendre d'elles. C'est reconnaître que tous les résultats ne sont pas disponibles.

M. Laurent Hénart, secrétaire d'Etat à l'insertion professionnelle des jeunes - La loi de lutte contre l'exclusion avait prévu l'évaluation des différents programmes qu'elle contenait, dont le programme TRACE. Son évaluation a été faite par les services du ministère. Le CEREC et la DARES ont publié des éléments intéressants. En outre, l'IGAS a réalisé un rapport qui est une synthèse complète du dispositif : mes services le tiennent à votre disposition.

Sur le CIVIS, vous allez disposer grâce à la LOLF de bons indicateurs qui vous permettront de l'évaluer plus sûrement qu'un rapport dédié. Par ailleurs, vous pouvez saisir la mission d'évaluation et de contrôle de la commission des finances. Il n'est donc pas besoin de légiférer.

Enfin, à la demande du chef de l'Etat, Jean-Louis Borloo s'est engagé à rendre compte semestriellement, en Conseil des ministres, des programmes que nous lançons. Je demande le retrait de ces amendements.

Mme Hélène Mignon - L'amendement 707 est retiré.

M. Francis Vercamer - L'amendement 289 aussi.

M. Pierre Cardo - Certes, un rapport n'est pas nécessaire, mais les structures et les dispositifs changent tous les deux ou trois ans, ce qui nous oblige à nous adapter sur le terrain. Comment faire pour continuer à suivre les jeunes en difficulté ? Pour 2005, les missions locales ne disposent pas de moyens financiers au titre du CIVIS. Il faut réfléchir à cette question.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu ce soir à 21 heures 30.

La séance est levée à 20 heures.

            Le Directeur du service
            des comptes rendus analytiques,

            François GEORGE

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne deux heures après la fin de séance.

Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.

www.assemblee-nationale.fr


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