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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2004-2005 - 36ème jour de séance, 87ème séance

2ème SÉANCE DU VENDREDI 3 DÉCEMBRE 2004

PRÉSIDENCE de M. Éric RAOULT

vice-président

Sommaire

COHÉSION SOCIALE (suite) 2

ART. 37-8 2

ART. 37-9 2

APRÈS L'ART. 37-9 3

AVANT L'ART. 38 5

ART. 38 6

APRÈS L'ART. 38 8

ART. 38 BIS 8

AVANT L'ART. 60 8

ART. 60 8

APRÈS L'ART. 60 TER 12

ART. 61 14

APRÈS L'ART. 61 19

ART. 62 19

ART. 63 20

ART. 64 21

ART. 64 BIS 21

ART. 65 21

APRÈS L'ART. 65 21

AVANT L'ART. 66 22

ART. 66 22

APRÈS L'ART. 66 23

AVANT L'ART. 39
(amendements précédemment réservés) 24

La séance est ouverte à quinze heures trente.

COHÉSION SOCIALE (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi adopté par le Sénat, après déclaration d'urgence, de programmation pour la cohésion sociale.

M. le Président - Je vous rappelle qu'à la demande du Gouvernement, nous examinerons les articles 60 à 66, relatifs à l'accueil et à l'intégration des personnes issues de l'immigration, après l'article 38 bis. Nous reprendrons ensuite le cours normal des articles.

ART. 37-8

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - L'amendement 852 demande la suppression de cet article, par cohérence avec les positions que nous avons déjà exprimées.

M. Dominique Dord, rapporteur de la commission des affaires culturelles - Avis défavorable.

M. Gérard Larcher, ministre délégué aux relations du travail - Même avis.

L'amendement 852, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Michel Fourgous - Les amendements 204 et 205 sont relatifs aux conventions de reclassement personnalisé. Le texte prévoit des sanctions financières pour l'entreprise en cas d'absence de convention, équivalentes à six mois de salaire. Ces sanctions ne doivent pas s'appliquer aux entreprises qui ont engagé une procédure avant la promulgation de la loi. C'est l'objet de l'amendement 204. L'amendement 205 précise que ces conventions ne seront applicables que quand la procédure sera établie par les partenaires sociaux, et non dès la promulgation de la loi.

M. le Rapporteur - Avis défavorable.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - L'article 37-8 indique les dispositions de la loi qui seront immédiatement applicables. Vous voulez y ajouter les dispositions de l'article 37-4, relatif aux conventions de reclassement. Mais ces dispositions ne pourront de toute façon pas s'appliquer sans qu'un accord des partenaires sociaux, ou, à défaut, un décret de carence, précise les conditions de mise en œuvre des conventions. Mentionner ici l'article 37-4 risque donc de prêter à confusion. Je pense que vous avez ainsi les assurances que vous souhaitiez.

M. Jean-Michel Fourgous - En effet, et je retire les amendements 204 et 205.

M. le Rapporteur - L'amendement 146 rectifié est de précision.

L'amendement 146 rectifié, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 37-8, ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 37-9

M. le Rapporteur - L'amendement 147 donne une nouvelle rédaction de l'article pour étendre l'objet du rapport d'évaluation, demandé par le Sénat, à l'ensemble des aspects de la loi, notamment à celui du dialogue social.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Cet amendement enrichit le rapport demandé par le Sénat. Avis favorable.

L'amendement 147, mis aux voix, est adopté et l'article 37-9 est ainsi rédigé.

APRÈS L'ART. 37-9

M. Francis Vercamer - Une jurisprudence constante veut que, lorsqu'un employeur commet une erreur de procédure, le licenciement soit considéré comme abusif. L'amendement 484 précise que le juge doit statuer également sur le fond : l'erreur de procédure ne signifie pas que le licenciement n'est pas justifié ! Cette jurisprudence crée un déséquilibre flagrant entre celui qui n'a pas de motif légitime de licenciement, mais qui a respecté la procédure - généralement une grande entreprise qui dispose d'un service juridique - et celui qui a commis une erreur - souvent une PME - mais qui a un motif réel et sérieux : ce dernier sera en fait plus lourdement sanctionné ! On m'objectera que la procédure fait partie des droits de la défense, mais dans aucun autre cas, le fait de ne pas avoir respecté la procédure n'entraîne une indemnité pour défaut de procédure !

M. le Rapporteur - La commission a rejeté cet amendement, bien qu'il soulève un vrai problème. La jurisprudence tire en effet argument du fait que la procédure n'est pas respectée pour ne pas examiner le licenciement au fond. Mais la loi est déjà très claire, et l'amendement n'est que redondant : je ne vois pas comment il pourrait faire évoluer la jurisprudence. Par ailleurs, cet amendement ne vise que le licenciement à caractère économique, alors que le problème concerne l'ensemble des licenciements.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Le problème est réel. La pratique du juge fait du vice de procédure un vice de fond, même si le licenciement est en fait justifié. L'article L.122-14-4 du code du travail prévoit que, lorsque le licenciement intervient pour une cause réelle et sérieuse, mais sans observation de la procédure, le tribunal accorde au salarié une indemnité, qui ne peut être supérieure à un mois de salaire. Il est parfaitement clair, mais il n'est pas appliqué, et votre amendement n'y changera rien. Avis défavorable.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - On a déjà modifié ce matin l'article L. 122-14-4, et je ne pense pas que ce soit opportun. Cette fois, il s'agit d'un licenciement justifié, mais effectué selon une procédure irrégulière. L'article L. 122-14-4 protège le salarié, en obligeant l'employeur à suivre une procédure précise. La sanction, s'il ne le fait pas, est que le salarié va le forcer à aller devant les prud'hommes ! Si la procédure a été respectée, on passe directement à la deuxième étape, qui est de savoir si le licenciement est fondé ou non. Je suis convaincu que le respect de la procédure est bénéfique pour tout le monde. L'employeur lui aussi y trouve un intérêt : l'entretien préalable par exemple le protège de toute allégation fallacieuse par la suite. En l'occurrence, la procédure a l'intérêt de faire évoquer le caractère réel et sérieux du licenciement.

Pour inciter l'employeur à être vigilant sur la procédure, il convient qu'une faute de procédure soit sanctionnée. En droit pénal, elle conduit à l'annulation de toute la procédure - la sanction va donc très loin.

M. Jacques Brunhes - En écoutant cette discussion, je m'interroge : veut-on encore que les licenciements soient juridiquement encadrés, ou qu'ils se fassent de manière totalement libre ? Si l'on veut conserver une protection, celle-ci est forcément liée à la procédure ; cet amendement n'est donc pas recevable.

M. Francis Vercamer - Il n'a pas pour but de supprimer la procédure, mais simplement de demander au juge de distinguer la forme et le fond. Actuellement - je parle au vu de mon expérience de dix ans au conseil des prud'hommes de Roubaix, et au moins dans le cas des licenciements économiques -, si la forme n'est pas respectée, il n'examine pas le fond : une erreur sur la forme entraîne une condamnation sur le fond...C'est très pénalisant pour les PME, qui, parce qu'elles ne disposent pas comme les grosses entreprises de conseils juridiques, commettent des erreurs de forme, d'autant plus facilement que la situation difficile qui les conduit à licencier les pousse à agir rapidement.

L'amendement 484, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Président - Je suis saisi par le groupe communiste et républicain d'une demande de scrutin public sur l'amendement 544 rectifié.

Mme Muguette Jacquaint - L'amendement 544 rectifié de mon collègue Desallangre tend à ce que la sanction normale d'un licenciement illégal soit la réintégration du salarié, le droit commun des contrats étant le retour à la situation juridique précédant l'acte déclaré nul. A défaut de pouvoir se faire au sein de l'entreprise, la réintégration doit s'exercer au sein du groupe. De plus, conscients de la réalité des relations du travail, nous proposons que le salarié ait la possibilité de refuser cette réintégration, et reçoive en compensation une indemnité.

M. le Rapporteur - Avis défavorable, d'autant plus légitime après le débat de ce matin : il serait curieux que le licenciement abusif soit plus sanctionné que le licenciement nul...

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Même avis.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Nous soutenons cet amendement, qui est dans la ligne de ce que nous défendons depuis ce matin.

A la majorité de 21 voix contre 7 sur 28 votants et 28 suffrages exprimés, l'amendement 544 rectifié n'est pas adopté.

M. Jean-Michel Fourgous - On est un peu surpris d'entendre qu'il faudrait protéger les salariés contre l'entreprise... L'entreprise n'est pas le Mal ! Je suggère à M. Le Bouillonnec de faire évoluer son vocabulaire. Par ailleurs, M. Vercamer a eu raison de rappeler que les PME et les entreprises du CAC 40 n'ont pas exactement les mêmes problèmes. Quant au code du travail, il ne doit pas servir à paralyser les entreprises, mais à créer des emplois. Un peu moins d'idéologie, un peu plus de réalisme ! La gauche française se démarque décidément de la gauche européenne, qui a annoncé officiellement son ralliement à l'économie de marché. Revenons à un débat plus serein et plus respectueux du travail et des responsabilités de chacun !

M. Jacques Brunhes - Pas de leçon de morale !

M. Jean-Michel Fourgous - Quant à mon amendement 540 rectifié, qui m'a donné l'occasion de dire quelques mots, je crois, Monsieur le Président, qu'il tombe...

M. le Président - Soit.

Mme Muguette Jacquaint - Je voudrais néanmoins répondre à M. Fourgous ! Nous n'avons jamais eu dans ce débat un mot contre les entreprises, et nous avons manifesté le souci que nous avions des plus petites d'entre elles. Qui, en vérité, n'a pas le souci des PME et de l'emploi ? Les grandes entreprises,

celles que M. Chirac lui-même a qualifiées d'entreprises de voyous ! Ne nous faites pas dire ce que nous n'avons pas dit !

M. le Président - Mes chers collègues, il nous reste plus de 350 amendements à examiner. Je vous appelle donc à la concision.

Mme Muguette Jacquaint - Lorsqu'un licenciement survient sans cause réelle et sérieuse, le tribunal octroie au salarié, à défaut d'une réintégration, une indemnité qui ne peut être inférieure au salaire des six derniers mois. Afin de mieux lutter contre les licenciements abusifs, l'amendement 71 rectifié propose de porter cette indemnité plancher au salaire des douze derniers mois. Rappelons que ce seuil n'a pas été révisé depuis la loi du 13 juillet 1973. A cette date, la France comptait trois fois moins de chômeurs qu'aujourd'hui et les suppressions d'emplois n'étaient pas encore une méthode de gestion banalisée.

M. le Rapporteur - La commission a repoussé cet amendement, pour des raisons que nous avons longuement explicitées ce matin. Vous venez par ailleurs de défendre un amendement réclamant non une indemnité, mais la réintégration !

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Les positions sont constantes de part et d'autre. Vous comprendrez donc que je ne puisse être favorable à cet amendement.

L'amendement 71 rectifié, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Muguette Jacquaint - Notre philosophie est toujours la même : préserver les moyens de défense que le droit du travail accorde aux salariés. La vôtre est évidemment différente : depuis le début de l'examen de ce texte, les ministres qui se sont succédé n'ont eu à la bouche que le mot de souplesse. Une souplesse qui confine à la flexibilité... C'est bien ce que vous voulez : que les salariés n'aient pas d'autre choix que de se plier aux exigences du patronat. La plupart des amendements votés sur les licenciements ont d'ailleurs été rédigés par le Medef et défendus par MM. Fourgous et Novelli, voire par le Gouvernement. Je ne suis donc pas étonnée que vous repoussiez les amendements qui vont dans le sens contraire.

M. le Président - Ce sont les parlementaires qui déposent les amendements, Madame Jacquaint, et non les organismes professionnels.

Mme Janine Jambu - Il y a des amendements qui sont signés du Medef !

M. le Rapporteur - Le Medef n'est pas le seul à rédiger des amendements. La CGT l'a fait aussi, et en tant que rapporteur, je m'en félicite.

Cet amendement aboutirait à une incohérence totale par rapport à tout ce que nous venons de voter : le salarié ayant deux ans d'ancienneté obtiendrait en effet une indemnité égale à un an de salaire là où un salarié présent dans l'entreprise depuis vingt ans ne toucherait que l'équivalent de six mois de salaire !

Mme Muguette Jacquaint - Faisons donc en sorte qu'il n'y ait pas de licenciements abusifs !

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Défavorable, par parallélisme. Au-delà de toutes les idéologies, seuls le principe de réalité et le pragmatisme nous guident.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Souplesse, parallélisme et éternité ! (Sourires)

L'amendement 72 rectifié, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Denis Jacquat - Par solidarité régionale, je défends l'amendement 282. Dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, le droit des associations coopératives de production et de consommation est régi par la loi du 1er mai 1889, modifiée par la loi du 20 mai 1898. Les associations coopératives contribuent grandement à l'économie locale dans des secteurs comme la banque, l'achat en commun de produits ou de logement ou l'alimentation en gros. Cet amendement vise à simplifier la création de ces organismes en assouplissant les règles d'acquisition et de perte de la qualité de sociétaire ainsi qu'en abrogeant des dispositions obsolètes.

M. le Rapporteur - La commission a repoussé cet amendement qui lui semblait être un cavalier. Je vous avoue cependant que je connais fort mal les lois du 1er mai 1889 et du 20 mai 1898...

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Ce n'est pas un cavalier, ni Saint Nicolas... (Sourires) Mais le sujet exige une expertise approfondie des problèmes qui se posent pour les associations coopératives en structure de droit local. Je vous propose de mener celle-ci dans le cadre de la préparation du texte sur les entreprises, et souhaite donc le retrait de l'amendement.

M. Denis Jacquat - Les élus d'Alsace et de Moselle tiennent à leur droit local, qui est une compensation de l'annexion de 1870. Cela dit, l'amendement est retiré.

AVANT L'ART. 38

M. Alain Joyandet, rapporteur pour avis de la commission des finances - La commission des finances a adopté l'amendement 14 rectifié à l'unanimité. Afin de mieux lutter contre le chômage, elle propose de permettre aux entreprises de substituer aux cotisations patronales d'assurance chômage des employés supplémentaires eux-mêmes indemnisés par les ASSEDIC. Afin d'éviter un effet d'aubaine, la mesure est limitée aux chômeurs de plus de six mois déjà indemnisés. Elle devrait être financièrement neutre pour les ASSEDIC.

Il s'agit de faire pour le secteur privé ce que nous avons décidé hier pour le secteur public, avec les contrats d'avenir. Les collectivités publiques toucheront en effet le montant du RMI lorsqu'elles embauchent un érémiste. Nous proposons d'exonérer les entreprises des cotisations ASSEDIC lorsqu'elles embauchent des salariés supplémentaires. Imaginons une PME qui embauche un quatorzième salarié. Il n'en coûte rien à l'entreprise, puisque ce sont des cotisations ASSEDIC qui sont remplacées par des salaires.

Il n'en coûterait rien non plus aux ASSEDIC. Cette mesure contribuerait à atteindre plus rapidement l'objectif de baisse de chômage fixé par le Premier ministre. Elle prendrait fin au 1er janvier 2008.

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales - Cet amendement est séduisant. La commission des affaires sociales s'est toutefois demandée si cela ne relèverait pas plutôt du champ de la négociation entre partenaires sociaux. C'est pourquoi elle l'a repoussé.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Le Gouvernement partage l'objectif de la commission des finances. Plusieurs problèmes se posent toutefois. D'une part, l'UNEDIC a adopté en 2001 une convention instituant un dispositif assez comparable d'aide dégressive à l'employeur, doté de cent millions d'euros dans le budget de l'Union pour 2005. D'autre part, c'est aux gestionnaires de l'assurance chômage qu'il appartient de définir le taux des contributions et celui des allocations car c'est à eux qu'il incombe de maintenir l'équilibre financier du régime. Enfin, l'amendement aurait pour effet d'augmenter la contribution Delalande, laquelle a eu des effets pervers sur l'emploi des seniors, que notre objectif est pourtant d'améliorer. Une négociation interprofessionnelle est d'ailleurs en cours sur le sujet. Dans ces conditions, je propose le retrait de l'amendement, tout en m'engageant à porter le sujet devant les partenaires sociaux.

M. Alain Joyandet, rapporteur pour avis - Je le redis, la mesure ne coûterait rien ni à l'Etat ni aux ASSEDIC. Je souhaite vraiment qu'elle soit étudiée, car, comme toutes les mesures simples, elle serait efficace, notamment dans les PME. Mais c'était un amendement d'appel.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Votre appel a été entendu.

M. Alain Joyandet, rapporteur pour avis - Je me doutais bien que cet amendement ne serait pas adopté aujourd'hui et sans doute, moi qui suis plus attaché au contrat qu'à la loi en ces domaines, ne dois-je pas le déplorer. Je le retire.

L'amendement 14 rectifié est retiré.

ART. 38

M. Francis Vercamer - Le groupe UDF avait déposé plusieurs amendements du type du dernier. Il aurait aimé obtenir du Gouvernement la même réponse que celle faite à M. Joyandet...

J'évoquerai un seul point cher à notre collègue Gilles Artigues, qui n'a pu être parmi nous aujourd'hui. L'amendement déposé en première lecture au Sénat par MM. Scellier, Pelletier, de Montesquiou et Mouly, qui prévoyait une programmation pluriannuelle pour le travail d'accompagnement effectué par les groupements d'employeurs auprès des publics en difficulté, a finalement été retiré, le rapporteur, M. Gournac, ayant estimé plus judicieux d'examiner telle proposition lors du débat budgétaire, et vous-même, Monsieur le ministre, ayant objecté l'accroissement de la charge publique. Ces groupements sollicitent de nouveau une telle programmation, dont chacun semble reconnaître par ailleurs l'utilité. Le sujet est-il à l'étude ? Je vous demande également, Monsieur le ministre, de bien vouloir me répondre sur les expérimentations en région, question que j'ai posée à l'article 34.

M. Alain Joyandet, rapporteur pour avis - L'amendement 602 rectifié est rédactionnel.

L'amendement 602 rectifié, accepté par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Denis Jacquat - L'amendement 317 est défendu.

Mme la Rapporteure - Avis défavorable.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Même avis. Cela réduirait les crédits des maisons de l'emploi.

L'amendement 317, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Alain Joyandet, rapporteur pour avis - L'amendement 606 est rédactionnel.

L'amendement 606, accepté par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Alain Joyandet, rapporteur pour avis - Je retire l'amendement 21.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Je peux vous rassurer sur la question qu'il abordait.

L'amendement 21 est retiré.

M. Alain Joyandet, rapporteur pour avis - L'amendement 603 rectifié est rédactionnel.

L'amendement 603 rectifié, accepté par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Denis Jacquat - L'amendement 777 rectifié de M. Accoyer vise à assurer une meilleure reconnaissance du travail d'accompagnement à l'insertion économique réalisé par le réseau national des groupements d'employeurs pour l'insertion et la qualification -GEIQ. L'an passé, 3 300 entreprises adhérentes d'un GEIQ ont embauché plus de 1 800 jeunes et 1 100 adultes sans qualification, dont 70 % ont trouvé un emploi à l'issue de leur parcours. Souvent portés par des fédérations patronales, comme la Fédération française du bâtiment, ou des conseils généraux, les GEIQ, qui cherchent à faire coïncider la demande sociale des personnes à la recherche d'un emploi et la demande économique des entreprises à la recherche de personnel qualifié, constituent un outil d'insertion professionnelle performant. L'Etat devrait les soutenir davantage. Ce soutien devrait aller de pair avec une campagne de promotion des GEIQ auprès des structures et des branches professionnelles.

Mme la Rapporteure - Avis favorable.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Même avis. Cela répond à la préoccupation exprimée tout à l'heure par M. Vercamer.

L'amendement 777 rectifié, mis aux voix, est adopté.

Mme la Rapporteure - L'amendement 891 est de coordination.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Il lève toute ambiguïté. Avis favorable.

Je profite de la présence du président Dubernard pour dire combien nous remercions la commission des affaires sociales de la qualité de son travail, et les deux rapporteurs, Mme de Panafieu et M. Dord, de leurs explications claires et patientes. Je n'oublie pas de remercier non plus la commission des finances, Monsieur Joyandet.

L'amendement 891, mis aux voix, est adopté.

M. Alain Joyandet, rapporteur pour avis - L'amendement 604 est de coordination.

L'amendement 604, accepté par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme la Rapporteure - L'amendement 148 est de précision.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Sagesse.

L'amendement 148, mis aux voix, est adopté.

Mme la Rapporteure - L'amendement 149 est également de précision.

M. Gérard Larcher, ministre délégué - Le Gouvernement en comprend le sens mais, dans la mesure où le fonds départemental d'insertion dont il est question n'a pas véritablement d'existence physique au niveau départemental, il préfère qu'on conserve le singulier. C'est la dotation nationale destinée à ce fonds qui est ensuite ventilée entre les départements.

L'amendement 149 est retiré.

L'article 38 modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 38

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - L'amendement 864 demande au Gouvernement de présenter au Parlement tous les deux ans à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport d'évaluation, en s'appuyant notamment sur les travaux de l'Observatoire national de la pauvreté et de l'exclusion sociale.

M. le Président - Cet amendement tombe.

ART. 38 BIS

L'article 38 bis, mis aux voix, est adopté.

La séance, suspendue à 16 heures 30, est reprise à 16 heures 35.

AVANT L'ART. 60

Mme la Rapporteure - L'amendement 197 rectifié, relatif à l'intitulé du chapitre IV, est rédactionnel.

Mme Nelly Olin, ministre déléguée à l'intégration, à l'égalité des chances et à la lutte contre l'exclusion - Favorable.

L'amendement 197 rectifié, mis aux voix, n'est pas adopté.

ART. 60

M. Serge Blisko - Nous sommes donc là dans une partie du projet dont on ne sait pas très bien comment elle s'intitule ni par conséquent à qui elle s'adresse, mais qui figure dans le titre consacré à l' égalité des chances, ou du moins, si l'on en croit le ministre, au traitement de certaines inégalités inacceptables... Bref, une certaine imprécision sémantique règne.

Quoi qu'il en soit, cet article et les suivants traitent de l'Agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations, qui se substitue à l'OMI et au Service social d'aide aux émigrants. Comme j'ai la chance d'avoir le siège de ce service prestigieux dans ma circonscription, je suis allé les voir et les écouter, et je peux donc vous dire que quelques incertitudes juridiques demeurent. Les personnels de cette association, très ancienne, très connue et dont chacun salue le travail, seront repris par la nouvelle agence en application des dispositions de l'article L. 122-12 du code du travail, c'est-à-dire intégrés dans le secteur public. C'est la première fois que je vois ce gouvernement créer des emplois publics ! Mais en l'occurrence, je crains qu'il ne le fasse dans des conditions un peu acrobatiques, car je ne suis pas sûr que cet article du code puisse vraiment s'appliquer ici et parce qu'il est dit plus loin que l'intégration se fera dans des conditions fixées par décret, alors que la Constitution pose que c'est à la loi qu'il revient de fixer les règles relatives à la création de catégories d'établissements publics.

Passer du droit privé au droit public n'est de toute façon pas une mince affaire pour ce personnel qui va être transféré ; et d'ailleurs, les deux principaux syndicats, la CGT et Sud, se sont en quelque sorte transformés en bureaux juridiques de conseil aux salariés, qui ne savent plus très bien où se trouve leur intérêt. Qu'en sera-t-il des primes, de l'ancienneté, des cotisations, de la retraite ? Il faudra aussi que la convention collective entre l'Etat et l'association soit dénoncée, et ce, dans les conditions précises posées à l'article 132-8 du code du travail.

Sur le fond, je voudrais souligner que le SSAE accomplit un travail social, qui ne se confond pas avec un travail administratif, et qu'il importe que cette action sociale, avec sa part de confiance et de secret, puisse continuer.

Enfin, il est à craindre que l'ANAEM ne puisse être présente en force dans certaines préfectures de province : les personnes concernées ne seront-elles pas contraintes dès lors à des déplacements onéreux ?

M. Denis Jacquat - Un effort considérable s'imposait pour l'intégration des migrants. Comme Mme de Panafieu a l'amabilité de le rappeler dans son rapport, j'avais, l'an passé, dans mon propre rapport sur la loi relative au droit d'asile, souligné cette nécessité, appelant de mes vœux un « vrai service public de l'accueil ». Or, Monsieur Blisko, ce rapport a été adopté à l'unanimité par la commission des affaires sociales. Il était donc logique que le Gouvernement reprenne l'idée à son compte dans le présent projet.

Je vous indique également que Mme la rapporteure avait déposé un amendement, qui n'a malheureusement pas été retenu mais qui distinguait entre « personnes immigrées » et « personnes issues de l'immigration » : nous reconnaissons donc bien l'existence de deux catégories, chacune avec ses problèmes spécifiques.

Mme Martine Billard - Le vocabulaire employé dans ces articles 60 à 62 est passablement fluctuant, ce qui me paraît révélateur d'un grand flou quant aux objectifs. Tout d'abord, le chapitre est intitulé « Accueil et intégration des personnes issues de l'immigration » : est-ce à dire qu'on va s'attacher à intégrer les Français d'origine espagnole ou italienne ? Je suppose que non. Par la suite, il est question de l'accueil « des étrangers et des migrations » mais, sous cette rubrique, on trouve curieusement les étrangers séjournant moins de trois mois en France : faut-il comprendre que la nouvelle agence aura à s'occuper de l'accueil des touristes ? Sont également mentionnés les demandeurs d'asile, qui relèvent en principe de l'OFPRA : l'ANAEM serait-elle appelée à se substituer à cet office ? D'autre part, il s'agit d'une catégorie qui n'a pas forcément vocation à s'intégrer en France, beaucoup repartant quand leur pays devient plus sûr...

En revanche, on a oublié les cadres des entreprises multinationales : auraient-ils par hasard moins de problèmes d'accueil que les touristes ?

Mais trêve de persiflage : ces fluctuations, ce flou dénoncent surtout notre incapacité à définir une politique claire de l'intégration et les publics auxquels elle s'adresse. Ayons donc le courage d'affronter les problèmes réels, y compris ceux du racisme et des discriminations, plutôt que d'inventer des catégories aux contours incertains.

Mme Muguette Jacquaint - Cet article crée une Agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations, établissement public administratif qui se substituera à l'OMI après fusion de celui-ci avec le Service social d'aide aux émigrants. Mais comment ne pas s'inquiéter de cette fusion entre un organe d'observation et de gestion des populations migrantes et un service social ? Les missions et les cultures des deux sont-elles bien compatibles ? Quid de la protection des données personnelles et du respect de la déontologie propres au travail social ? Notre préoccupation est d'autant plus grande sur ces points que l'Agence pourra « par voie de convention, associer à ce service public tout organisme privé ou public, notamment les collectivités territoriales» ! Un article fait d'ailleurs explicitement référence à la place des régions dans la nouvelle architecture administrative, mais sans que nous sachions de quelle autonomie jouiront ces collectivités ni comment sera garantie l'égalité de traitement entre primo-migrants sur l'ensemble du territoire. Les régions auront-elles des obligations minimales en matière d'accueil ? Ce dispositif n'est-il pas le premier pas vers un désengagement de l'Etat ? Nous avons d'autant plus de raisons de nous inquiéter qu'avec ses lois restrictives sur l'asile et sur l'entrée et le séjour des étrangers, le Gouvernement n'a cessé d'aggraver la précarité de ces derniers, multipliant statuts temporaires et sans-papiers.

Nous défendons une vision tout opposée de l'intégration. Pour nous, l'égalité des droits est une des conditions du bien vivre ensemble et elle doit s'étendre aux droits politiques, au droit de vote en particulier car c'est l'un des plus puissants ferments du sentiment d'appartenance à la société nationale. Disant cela, nous ne faisons pas preuve d'angélisme : on ne créera un véritable Etat de droit que si l'on reconnaît l'égale dignité des hommes, sans considération de nationalité, et il nous faut donc un nouveau contrat social entre habitants de toutes origines, non une agence de contrôle ! Ce contrat aurait toute sa place dans un projet de cohésion sociale et c'est pourquoi nous défendrons des amendements en vue de le fonder.

Mme Martine Billard - L'amendement 391 de suppression de l'article est défendu.

Le Gouvernement pourrait-il nous dire si les statistiques sur les flux migratoires prendront désormais en compte les étrangers venant en France pour moins de trois mois, les étudiants et les demandeurs d'asile ? Ces catégories sont en effet de celles dont l'agence aura à s'occuper...

Mme Muguette Jacquaint - L'amendement 759, qui est également de suppression, est défendu.

Mme la Rapporteure - M. Jacquat a rappelé que la commission s'était unanimement prononcée l'an dernier pour la création d'une agence de service public, chargée de l'accueil des étrangers. L'idée avait d'ailleurs été avancée dès 1998, puis reprise en 2001 dans son rapport par le Haut Conseil de l'intégration. Maintenant que cette création est enfin engagée, nous ne saurions accepter ces amendements de suppression.

Mme Nelly Olin, ministre déléguée - Le défi que nous avons à relever est à la fois qualitatif et quantitatif et seule une nouvelle agence peut garantir la mutation qui nous permettra de répondre aux attentes des migrants et des étrangers. A ce propos, je confirme que le texte ne concerne que les étrangers entrés régulièrement en France et engagés dans un parcours d'intégration.

Si nous voulons fusionner l'OMI et le SSAE en une agence placée sous le régime de l'article L. 122-12 du code du travail, c'est que la jurisprudence de la Cour de cassation nous l'impose. Le passage du personnel de l'association d'un statut privé à un statut public, assuré grâce à ce projet d'une base légale, ne sera pas défavorable aux intéressés, le statut associatif étant soumis à bien des aléas.

Vous avez affirmé que le SSAE était une institution prestigieuse : vous avez raison, et je lui rends hommage, tout comme aux personnels de l'OMI. C'est précisément pourquoi nous confions l'ambitieux service public de l'accueil que nous créons à des salariés très compétents qui auront un statut public.

Monsieur Jacquat, je partage évidemment votre point de vue quant à la nécessité de disposer d'un vrai service public et je salue à ce propos le travail que vous avez accompli.

Madame Billard, les objectifs du texte sont clairs : celui-ci vise principalement les étrangers qui viennent s'installer durablement en France même si l'Agence se chargera également des missions assurées aujourd'hui par l'OMI concernant les étrangers venant sous le régime du court séjour ainsi que les demandeurs d'asile. Les étudiants, en revanche, ne relèveront pas de sa compétence. Concernant plus particulièrement les demandeurs d'asile, la mission de l'Agence sera limitée au rôle de coordination générale déjà assumé aujourd'hui par l'OMI.

Madame Jacquaint, je sais que la fusion de l'OMI et du SSAE suscite des inquiétudes. Des discussions ont donc été engagées avec les organisations représentatives du personnel. Quant à l'association des collectivités territoriales et notamment des régions, je vous rassure : il ne s'agit pas de leur donner des compétences et des charges nouvelles mais d'articuler le service public que nous créons avec les compétences de droit commun de ces collectivités.

Avis défavorable sur les deux amendements.

Les amendements 391 et 759, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Serge Blisko - Le groupe socialiste ne s'oppose pas a priori au regroupement de services auquel vous procédez tant aujourd'hui l'accueil des étrangers relève du parcours du combattant, mais nous souhaitons néanmoins que l'action de l'ANAEM soit mieux définie. L'Agence n'a pas à recevoir de compétence en matière d'accueil des demandeurs d'asile, qui relèvent de l'OFPRA et de la Convention de Genève. D'où notre amendement 274.

Mme Martine Billard - L'amendement 392 est identique. L'article 60 précise en effet que l'ANAEM a pour mission de participer à toutes missions administratives, sanitaires et sociales relatives à l'accueil des demandeurs d'asile ; il y aura donc conflit d'intérêt avec l'OFPRA. Maintenir cette prérogative risquerait d'entraîner des recours et des contentieux.

M. Pierre Cardo - Il serait sans doute préférable de parler d'« orientation » plutôt que d'« accueil ».

Mme la Rapporteure - Avis défavorable aux deux amendements. Il serait paradoxal de vouloir supprimer la compétence de l'ANAEM en matière d'accueil des demandeurs d'asile dans la mesure où l'OMI, auquel l'Agence se substitue, exerce d'ores et déjà cette compétence.

En outre, l'article 60 précise que l'Agence a pour vocation de recevoir immédiatement la personne à son arrivée. Elle ne se substitue en rien à l'OFPRA.

Mme Nelly Olin, ministre déléguée - Avis défavorable aux deux amendements. L'OFPRA et l'ANAEM ont des missions tout à fait différentes même si elles sont complémentaires : l'OFPRA est chargé de la protection juridique et vérifie le bien-fondé de la demande d'asile et l'ANAEM participera à la prise en charge sociale du demandeur d'asile, reprenant ainsi l'une des missions confiées à l'OMI.

Mme Martine Billard - Votre réponse me satisfait davantage que celle de Mme la rapporteure : il doit être clair que l'Agence ne s'occupera pas de la partie administrative de l'accueil concernant les demandeurs d'asile.

Les amendements 274 et 392, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Serge Blisko - Eu égard aux données sensibles que peuvent recueillir les organismes privés associés aux missions de l'ANAEM, il convient de rappeler que la loi fondatrice du 6 janvier 1978 relative à l'informatique et aux libertés doit être scrupuleusement respectée. Tel est l'objet de l'amendement 275.

Mme la Rapporteure - Avis défavorable. Cette précision est superflue car elle figure déjà dans le cahier des charges relatif aux marchés passés entre l'Etat et les organismes de formation linguistique ou civique. Pourquoi indéfiniment répéter ce qui figure déjà dans la loi, au risque de la rendre illisible ?

M. Pierre Cardo - Très bien !

L'amendement 275, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Serge Blisko - C'est une grande mission qui sera confiée à l'Agence et nous lui souhaitons de disposer des moyens nécessaires à son accomplissement. L'amendement 276 vise à ce que son directeur général soit nommé par le ministre des affaires sociales pour une durée de trois ans. L'Agence bénéficierait ainsi d'un lustre certain.

Mme la Rapporteure - Avis défavorable. Cette disposition relève du décret - d'ailleurs en cours d'élaboration -, non de la loi.

L'amendement 276, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Serge Blisko - L'amendement 277 propose que siègent au conseil d'administration de l'ANAEM deux parlementaires, l'un de l'Assemblée, l'autre du Sénat, ainsi que des représentants de divers ministères.

Essayons de faire figurer dans la loi non un luxe de précisions qui la rendrait illisible mais de quoi conférer à l'Agence un certain « imperium », surtout sur un sujet aussi important.

Mme la Rapporteure - Cette mesure relève du règlement. Avis défavorable.

Mme Nelly Olin, ministre déléguée - Même avis. Je précise que le ministère des affaires sociales est le pivot et le responsable de la politique d'accueil et d'intégration.

M. Serge Blisko - Cette précision me pousse à retirer l'amendement 277, mais je continue à regretter que les parlementaires ne soient pas représentés.

L'article 60, mis aux voix, est adopté.

Les articles 60 bis et 60 ter, successivement mis aux voix, sont adoptés.

APRÈS L'ART. 60 TER

M. Jacques Brunhes - L'amendement 760 vise à supprimer l'article 8 de la loi du 26 novembre 2003, qui subordonne, pour la première fois, la délivrance d'une carte de résident valable dix ans à une « intégration républicaine » dans la société française, appréciée en particulier au regard de la connaissance de la langue et des principes qui régissent notre République. La stabilité du séjour est indispensable à une bonne intégration, et la multiplication des cartes valables un an précarise des milliers de familles.

Les déclarations du Gouvernement sur l'intégration sont contredites de façon criante par la politique du ministère de l'intérieur. La loi adoptée il y a tout juste un an multiplie les catégories de personnes qui ne reçoivent qu'une carte d'un an, et porte de trois à cinq ans le délai requis pour pouvoir demander une carte de dix ans, sans garantie bien sûr de l'obtenir. Et « l'intégration suffisante » de l'étranger dans la société française est une notion floue et subjective, qui laisse le champ libre à l'arbitraire : on ignore qui en déterminera les critères et qui les vérifiera et aucun recours n'est prévu. La carte valable dix ans ne doit pas être une sanction de cette fameuse intégration, mais l'outil qui la favorise !

Mme la Rapporteure - Avis défavorable. Le contrat d'accueil et d'intégration doit justement apporter, par rapport aux dispositions de l'article 6 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers, un élément d'appréciation. Si vous voulez vous intégrer dans un pays étranger, il vous faudra bien posséder les rudiments de la langue qu'on y parle et savoir un tant soit peu quels y sont les droits civiques ! N'oublions pas que des femmes, en France, justement parce qu'elles ne connaissent pas notre langue, ni leurs propres droits, vivent d'une manière totalement étrangère à notre société ! Nous le déplorons tous. Alors, pour ma part, lorsque cette connaissance rudimentaire devient une condition, je ne m'insurge pas : j'applaudis des deux mains !

Mme Nelly Olin, ministre déléguée - Même avis. Le Gouvernement n'entend pas revenir sur une loi aussi récente, car les motifs qui ont présidé à l'adoption de ces dispositions n'ont rien perdu de leur validité. Il est à la fois légitime et utile de lier l'accès à un statut aussi protecteur que celui de résident à une réelle intégration. En outre, ces dispositions sont conformes au projet de directive européenne sur le statut des résidents de longue durée.

M. Pierre Cardo - Il y a en effet des femmes qui, dans le cadre du regroupement familial, entrent en France sans savoir le moins du monde à quoi s'attendre. Elles sont mises dans une situation de dépendance totale, qui peut aller jusqu'au retrait de leurs papiers et à l'interdiction de tout contact avec l'extérieur. Il faudra bien, un jour, se demander si l'on accepte que cela continue ! L'objectif du contrat d'intégration, c'est de permettre d'acquérir les bases du français et de s'ouvrir sur l'extérieur, le tout pour mieux s'intégrer. Il ne me semble pas très opérant de prétendre protéger une femme qui ne connaît strictement rien à ses droits sur notre territoire par un contrat signé par un autre. Ce qui importe, c'est d'imposer à celui qui l'a fait entrer la responsabilité de veiller à ce qu'elle devienne un citoyen à part entière et soit en mesure de connaître ses droits. C'est une véritable obligation morale que nous avons envers ces femmes et ces enfants et le contrat actuel, qui est pourtant censé les protéger, ne la remplit pas. Nous devrons mener une réflexion à ce sujet.

M. Jacques Brunhes - J'apprécie beaucoup les propos de M. Cardo, qui, je le sais, vit ce genre de réalités dans sa circonscription. Je voudrais insister sur le fait que la loi du 26 novembre 2003 est la première qui subordonne l'obtention d'une carte valable dix ans à cette fameuse intégration républicaine. Est-ce que cette mesure favorise l'intégration ? Non ! Au contraire, elle aggrave la précarité ! La carte de dix ans a été instaurée à l'unanimité, dans cette Assemblée, en 1984, pour favoriser l'insertion des résidents, au moyen d'un séjour stable, et encourager la maîtrise de la langue française, car il faut du temps pour l'acquérir ! Précariser les résidents en prétendant les intégrer est proprement illogique et lourd de conséquences.

La carte valable un an constitue de fait un handicap lourd pour s'insérer socialement et professionnellement : elle suscite la défiance des employeurs, des banquiers et des bailleurs et le phénomène s'aggrave lorsqu'on approche de la date d'expiration. Elle nuit aussi à la mobilité géographique. Le rapport de la Cour des comptes a fait apparaître une véritable ségrégation spatiale. Or, la carte d'un an rend très compliqué de changer de département. Le transfert des dossiers est long, les sources de complication administrative ne manquent pas... Dans les faits, il faut se présenter trois fois par an à la préfecture : une pour renouveler le titre, une pour obtenir un récépissé de trois mois et une pour retirer la carte, qui n'est donc plus valable que neuf mois ! Elargir l'accès à la carte de dix ans est une mesure de bon sens pour favoriser l'insertion sociale et professionnelle. La carte d'un an, qu'on le veuille ou non, conduit à précariser son détenteur.

L'amendement 760, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jacques Brunhes - Notre amendement 784 tend à accorder une carte de séjour au parent d'un enfant né ou scolarisé en France, afin qu'il puisse subvenir à ses besoins au moyen d'un travail régulier - ce qui suppose la régularité du séjour. Son rejet signifierait soit qu'on veut expulser les enfants mineurs et leurs parents, soit qu'on veut maintenir ces familles dans la clandestinité, et par conséquent dans la précarité.

Mme la Rapporteure - La commission a repoussé cet amendement, qui rendrait quasi-automatique la délivrance de la carte de séjour, puisque la scolarisation est obligatoire pour tous les enfants qui vivent sur le territoire national.

Mme Nelly Olin, ministre déléguée - Avis défavorable, pour les mêmes raisons que sur l'amendement précédent.

M. Jacques Brunhes - Il s'agit d'un vrai problème de cohésion sociale. Dans un éclair de lucidité, M. Pasqua lui-même l'avait admis : il faut mettre fin à la confusion, entretenue depuis des années, entre la régularisation de sans-papiers vivant et travaillant en France, et l'entrée en France d'étrangers. La régularisation a seulement pour but de diminuer le nombre de personnes qui dans notre société sont privées de tout droit. Si ces familles sont expulsables en droit, elles ne le sont pas dans les faits ; et les élus de circonscriptions populaires comme moi constatent les effets de cette hypocrisie depuis vingt ans : des milliers d'hommes et de femmes déboutés du droit d'asile vivent avec leurs enfants dans nos quartiers, privés de tout droit en termes de logement, de protection sociale et de travail.

M. Denis Jacquat - Venant d'un département frontalier, je me souviens très bien des efforts entrepris d'abord par M. Stoleru, puis de la régularisation opérée après 1981. Comme membre d'une commission de régularisation, j'ai pu constater que non seulement des personnes qui étaient entrées illégalement dans notre pays demandaient à être régularisées, mais qu'on provoquait un appel d'air en direction de personnes habitant à l'étranger, qui sont arrivées avec de faux certificats.

Certes, la France est une terre d'accueil, mais nous avons besoin de règles très précises, afin qu'on ne pense pas dans le monde entier que tout le monde peut venir chez nous.

M. Charles Cova - Très bien !

L'amendement 784, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jacques Brunhes - Notre amendement 783 concerne l'accès à la carte de dix ans, nécessaire pour conforter l'insertion sociale et professionnelle.

M. Jacquat demande des règles précises, sur un sujet où il n'y en a justement pas : je parle des personnes qui sont dans une situation de non-droit, pour lesquelles il n'y a pas de règles, alors qu'il en faudrait ! Ce ne sont pas les élus de Neuilly qui supportent les conséquences de cette situation...

Mme Nelly Olin, ministre déléguée - L'héritage des vingt dernières années est lourd à assumer, mais aujourd'hui tout est fait pour améliorer l'accueil des étrangers, ne serait-ce que par la réduction considérable du délai de traitement des dossiers. Avis défavorable.

M. Jacques Brunhes - La régularisation d'un habitant est une mesure d'intérêt général. Nos voisins espagnols s'engagent dans une régularisation massive, l'Italie et la Belgique ont fait la même chose il y a trois ans. Nous sommes en retard !

L'amendement 783, repoussé par la commission, mis aux voix, n'est pas adopté.

ART. 61

M. Serge Blisko - Cet article concerne le contrat d'accueil et d'intégration : le Gouvernement fait là une tentative importante, mais j'ai l'impression qu'il existe en son sein une ligne de fracture entre les pragmatiques, qui veulent mettre en place des outils d'intégration, et les idéologues, qui voient dans chaque étranger un fraudeur en puissance ou un profiteur de toutes nos prestations sociales.

M. Charles Cova - Il faut reconnaître que c'est souvent le cas...

M. Serge Blisko - Pour notre économie, nous avons besoin de main-d'œuvre étrangère, c'est le Medef qui le dit. A nous de faire en sorte que l'intégration de ceux qui viennent travailler dans notre pays, se fasse dans les meilleures conditions. Elu comme Pierre Cardo de la région parisienne, je reconnais avec lui que nous ne maîtrisons plus rien dans certains domaines. Il nous faut maîtriser - avec humanisme - les flux migratoires. Le contrat d'accueil et d'intégration doit donc être étendu. Reste à l'améliorer.

On ne peut pas proposer un CAI à tout le monde. Sans doute, d'ailleurs, eût-il fallu commencer par rebâtir tout notre droit des étrangers, devenu bien trop complexe. Les catégories d'étrangers qui bénéficient de plein droit de la carte de résident ne peuvent se voir proposer le CAI, qui conditionne l'obtention de la carte. Il s'agit, selon l'article 15 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, de l'étranger marié depuis au moins deux ans avec un ressortissant français - on pourrait lui proposer un CAI facultatif, mais ce serait tout de même paradoxal -, de l'enfant étranger d'un ressortissant français, de l'étranger qui a servi dans la Légion étrangère - vous n'allez pas demander à un étranger qui a donné une jambe ou un bras pour la France de bien parler le français ! -, et de l'étranger qui a obtenu le statut de réfugié, de sa femme et ses enfants. Ceux-là sont placés sous notre protection et espèrent souvent retourner dans leur pays.

La Constitution reconnaît la convention de Genève : il serait grave de condamner un réfugié à repartir parce qu'il ne parle pas bien le français ! Il faut donc repenser le CAI, et je ferai des propositions pour lui conférer véritablement une valeur solennelle.

Mme Martine Billard - On aurait pu espérer que le XXIe siècle soit un siècle sans guerres, sans famines et sans dictatures. Malheureusement, il n'a pas commencé sous les meilleurs auspices. Les flux migratoires vont donc se maintenir - au détriment d'ailleurs, parfois, des pays d'origine qui perdent ainsi leurs éléments les plus dynamiques - et il ne servira à rien de dresser des murailles autour de l'Europe.

Première ambiguïté de ce texte : il n'opère pas de distinction entre les nouveaux arrivants et les étrangers qui se trouvent déjà sur le territoire. Il faut, certes, développer la connaissance de la langue française, mais on ne le propose que dans le cadre du contrat d'intégration. Rien n'est prévu pour les étrangers qui résident déjà en France, alors même que les crédits d'alphabétisation ont été réduits de manière drastique depuis deux ans.

On aurait souhaité avoir un bilan des contrats d'intégration, qui soulèvent, semble-t-il, quelques problèmes. Les différences linguistiques et culturelles ne sont pas prises en compte. Une personne déjà alphabétisée dans sa langue et une personne analphabète n'ont pas le même besoin de formation. Or, la durée de la formation est standard et la formation elle-même tend à le devenir depuis que le FASILD passe des marchés.

Faut-il absolument apprendre le français pour travailler en France ? Des milliers d'immigrés ont construit pendant des années nos maisons et nos voitures sans parler le français, sans que nous y trouvions à redire ! Nous sommes en train d'assimiler les conditions à remplir pour venir travailler en France aux conditions d'acquisition de la nationalité. Or, ce sont deux choses différentes.

Du point de vue de la cohésion sociale, enfin, nous avons surtout besoin que les populations déjà présentes en France maîtrisent le français. Je rejoins M. Cardo sur le problème des femmes, qui sont souvent opprimées. Je veux bien que l'on parle de « respect des lois et des valeurs fondamentales de la République française ». Pourquoi parle-t-on maintenant d'« intégration républicaine de l'étranger dans la société française » ? La première formule convenait très bien !

M. le Président - Veuillez conclure.

Mme Martine Billard - Il faudrait aussi régler le problème des stages d'apprentissage, auxquels les jeunes qui n'ont pas la carte de séjour de dix ans ne peuvent accéder.

M. le Président - Je considère que vous avez défendu votre amendement 393 qui vise à supprimer l'article.

M. Jacques Brunhes - L'amendement 761 a le même objet. J'ai déjà dit que la carte de séjour de dix ans était un facteur déterminant de l'insertion, je n'y reviens pas. Conditionner la stabilité du séjour aux résultats obtenus en termes d'insertion, c'est déstabiliser des milliers d'étrangers en situation régulière. J'ai longtemps assuré des cours du soir de français aux travailleurs immigrés des usines de Gennevilliers : je sais ce que peuvent être les difficultés d'apprentissage de la langue quand on fait les trois huit et qu'on vit dans un gourbi !

Nous sommes également opposés à l'élaboration d'un programme régional d'intégration des étrangers. Quelle sera l'autonomie accordée aux régions ? Quid de l'égalité de traitement des étrangers sur le territoire ? Est-ce un premier pas vers le désengagement de l'Etat du service public de l'accueil des étrangers ?

Mme la Rapporteure - La commission a repoussé cet amendement. Le CAI offre aux étrangers des facilités pour s'insérer, par l'apprentissage de notre langue et d'éléments d'instruction civique.

Le lancement du CAI a concerné 12 départements. En 2003, plus de 8 000 CAI étaient signés. La généralisation a été entreprise en 2004, avec un passage à 45 000 nouveaux contrats. En 2005, tous les nouveaux arrivants - soient 100 000 personnes - en signeront un. Il suffit de se rapprocher de l'OMI pour avoir les statistiques !

Il est rare que l'on émigre de gaieté de cœur. Notre modèle d'intégration républicaine exige un minimum de connaissance de la langue et du pays. Mieux vaut pour une directrice d'école avoir affaire à des parents qui parlent un tant soit peu le français que devoir apprendre les rudiments d'une langue étrangère pour pouvoir communiquer avec eux, comme je l'ai vu boulevard Bessières !

M. Jacques Brunhes - Dans le 17e, ce sont des enfants de diplomates !

Mme la Rapporteure - Il faut que les parents s'intègrent pour que les enfants puissent s'intégrer.

Mme Nelly Olin, ministre déléguée - Je souscris aux propos de Mme la rapporteure. Ancien maire d'une ville du Val-d'Oise confrontée à ces mêmes difficultés, je sais combien un apprentissage minimal de la langue française est essentiel. Chacun, je crois, en convient.

Monsieur Blisko, vous reconnaissez l'intérêt du contrat d'accueil et d'intégration. Il y a longtemps qu'un tel dispositif aurait dû être adopté. Nous pouvons être fiers de l'avoir proposé. Il suscite d'ailleurs un vif intérêt chez nos voisins européens. Pour ce qui est de l'accueil des étrangers au titre du travail, notre position est prudente et pragmatique, vu la ressource que peut offrir notre pays. Enfin, pourquoi exclure du bénéfice du contrat d'accueil et d'intégration les étrangers installés depuis longtemps et de façon durable ? Pourquoi ne pas offrir aussi aux réfugiés une formation linguistique ?

Madame Billard, nous sommes d'accord, nul ne défendrait plus les pratiques passées qui n'ont que trop duré, à savoir l'appel que l'on faisait massivement à des étrangers pour qu'ils viennent travailler sans se soucier aucunement des moyens de leur apprendre le français. L'apprentissage de la langue du pays d'accueil est en effet le socle de toute intégration. Le risque de confusion que vous avez pointé était plus évident dans la période passée : la création de l'ANAEM précisément y mettra fin en combinant la délivrance du titre de séjour et la mise en place d'un accueil social individualisé. S'agissant de certaines accusations que vous avez portées, elles relèvent plutôt du procès d'intention. Chacun s'accorde à reconnaître la qualité du travail des équipes sociales de terrain, notamment auprès des étrangers primo-arrivants. Le Haut conseil à l'intégration préconisait dans son rapport de novembre 2001 la mise en place d'un contrat individuel d'intégration et le dernier rapport de la Cour des comptes recommande de donner des effets juridiques à ce contrat, notamment dans la procédure d'attribution de la carte de résident. C'est précisément ce que nous faisons.

Monsieur Brunhes, pour les raisons déjà énoncées, nous ne voulons pas revenir sur les dispositions, fort opportunes, de la loi du 26 novembre 2003 fixant les conditions d'accès à la carte de résident. Que soient liés les conditions d'intégration républicaine définies dans cette loi et le contrat d'accueil et d'intégration aujourd'hui mis en place ne déstabilisera aucunement les étrangers ayant un projet d'installation durable. Au contraire, il sera de leur intérêt de conclure au plus tôt un contrat pour débuter leur parcours d'insertion. Enfin, la mise en place d'un programme régional d'intégration des populations immigrées ne signifie en rien que l'Etat se désengage. Elle garantit au contraire que la politique d'intégration, aujourd'hui refondée, sera déclinée partout sur le territoire.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement est défavorable aux amendements de suppression de cet article.

M. le Président - Par indulgence spéciale, je vous donne la parole, Monsieur Cardo.

M. Pierre Cardo - En matière d'apprentissage minimal du français, la loi doit prescrire une obligation de moyens, non de résultat. Il conviendrait de préciser ce que l'on entend par « niveau satisfaisant de maîtrise de la langue française ». Chacun sait qu'à partir d'un certain âge et selon leur niveau culturel de base, certaines personnes ne peuvent tout simplement pas apprendre une nouvelle langue. Le Gouvernement devra prendre des précautions dans l'application de cette loi afin de ne pas créer d'injustices supplémentaires à l'encontre de populations déjà en difficulté.

Les amendements 393 et 761, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

Mme Nelly Olin, ministre déléguée - L'amendement 1023 précise que la nouvelle politique d'intégration s'adresse aussi bien aux résidents qu'aux primo-arrivants.

Mme la Rapporteure - La commission n'a pas examiné cet amendement auquel je suis, à titre personnel, favorable.

Mme Martine Billard - J'aimerais beaucoup savoir ce qu'il faut entendre par « personne issue de l'immigration » ? Est-ce une personne qui n'est pas née en France ? Dont les parents ne sont pas nés en France ? Originaire d'un pays non membre de l'Union européenne, de Suisse par exemple ? Bref, petite-fille de polonais, suis-je une « personne issue de l'immigration » ?

M. Jacques Brunhes - Madame la ministre, vous n'avez pas écouté M. Cardo qui pose pourtant de vraies questions. Celle de l'apprentissage de la langue du pays d'accueil est aussi ancienne que l'immigration elle-même. Dans les houillères de l'Est, il y avait avant-guerre des citoyens français d'origine italienne parlant à peine notre langue...

L'amendement 1023, mis aux voix, est adopté.

M. Alain Joyandet - L'amendement 729 de M. Jego est défendu. 

Mme la Rapporteure - Il est satisfait par le 1024 à venir du Gouvernement.

Mme Nelly Olin, ministre déléguée - Avis défavorable.

L'amendement 729, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Serge Blisko - Le contrat d'accueil et d'intégration doit s'adresser aux primo-arrivants et aux résidents volontaires. Il faudra notamment encourager les conjointes arrivées en France au titre du regroupement familial à en conclure un. Mais il serait inopportun d'y contraindre un étranger titulaire d'une carte de résident de dix ans, qui ne le souhaite pas, ou un réfugié politique statutaire. Tel est le sens de notre amendement 937. La nouvelle obligation que vous créez risque de susciter de nombreux contentieux et d'engorger nos tribunaux.

Mme la Rapporteure - Avis défavorable. La philosophie même du CAI fait qu'il doit être proposé à tous les étrangers.

Mme Nelly Olin, ministre déléguée - Avis défavorable.

L'amendement 937, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Serge Blisko - Notre amendement 279 tend à ce que l'information sur la teneur du CAI soit donnée à l'étranger dans une langue qu'il comprend. Cela suppose l'existence de services de traduction.

Mme la Rapporteure - La commission avait repoussé cet amendement mais à titre personnel, je ne peux qu'y être favorable.

Mme Nelly Olin, ministre déléguée - Avis favorable. C'est le bon sens même.

L'amendement 279, mis aux voix, est adopté.

M. Serge Blisko - J'aurais souhaité en savoir davantage sur les programmes régionaux d'intégration des populations immigrées. Est-on assuré que tous les migrants seront traités d'égale façon dans toutes les régions ? C'est cette préoccupation qui inspire notre amendement 281.

Mme la Rapporteure - Que l'on parle de service public d'accueil des étrangers garantit l'égalité de traitement. La commission a repoussé cet amendement.

Mme Nelly Olin, ministre déléguée - Avis défavorable.

M. Serge Blisko - Je retire l'amendement.

M. Jacques Brunhes - Je le reprends. La ministre ne m'a pas répondu. S'agira-t-il de programmes régionaux ou d'une politique nationale avec des applications régionales ?

Mme Nelly Olin, ministre déléguée - Il s'agit d'un programme national décliné région par région.

L'amendement 281, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Nelly Olin, ministre déléguée - L'amendement 1024 introduit dans la loi le principe d'une sanction de la formation linguistique par une certification nationale.

Mme la Rapporteure - Avis personnel favorable.

Mme Martine Billard - Mieux vaudrait parler de validation des acquis, car entre une personne qui n'aura pas été scolarisée dans son pays et une autre qui aura fait des études supérieures, il risque d'y avoir une trop grosse différence. C'est pourquoi je préférerais que le Gouvernement retire son amendement.

Mme Nelly Olin, ministre déléguée - Retirer, non, mais remplacer par validation des acquis, nous serions d'accord.

M. le Président - L'amendement est ainsi rectifié ?

Mme Nelly Olin, ministre déléguée - Oui.

Mme Martine Billard et M. Jacques Brunhes - Très bien !

L'amendement 1024 rectifié, mis aux voix, est adopté.

M. Serge Blisko - Le contrat d'accueil et d'intégration prévoit une journée de formation civique, ce qui est une très bonne chose, étant entendu qu'il ne faudra pas seulement présenter les institutions mais aussi tous les organismes et associations qui peuvent être utiles aux personnes concernées - je pense par exemple aux associations d'aide aux femmes en difficulté. Il faut que cette journée soit la plus utile possible, mais il faut aussi qu'elle ait un cadre solennel. Ce doit être un moment fort de l'intégration républicaine. C'est pourquoi nous souhaitons que seul l'Etat ou l'un de ses établissements publics en aient la charge. Tel est le sens de notre amendement 280.

Mme la Rapporteure - L'Etat a déjà passé des conventions avec des organismes de formation, selon des cahiers des charges précis et offrant toutes les garanties souhaitables. Il est normal dans cette affaire de faire appel à des spécialistes de la formation. Avis défavorable donc.

Mme Nelly Olin, ministre déléguée - Défavorable.

L'amendement 280, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Martine Billard - L'amendement 394 est défendu.

L'amendement 394, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Pierre Cardo - L'étranger qui souhaite satisfaire à la condition d'intégration républicaine doit s'engager à signer et respecter le contrat d'accueil et d'intégration. C'est-à-dire qu'il y a pour lui obligation de s'engager dans une dynamique d'intégration républicaine. Mais cette obligation est une obligation de moyens, pas de résultat. L'étranger ne peut que s'engager à tenter d'apprendre le français, pas à le maîtriser parfaitement. Tel est l'esprit de mon amendement 947 rectifié.

Mme la Rapporteure - Favorable.

Mme Nelly Olin, ministre déléguée - Je partage l'analyse et les objectifs de M. Cardo, mais comme le CAI va connaître une montée en charge très importante, il est prématuré de prévoir dès à présent son caractère obligatoire pour la délivrance d'une carte de résident. C'est pourquoi je vous saurais gré, Monsieur Cardo, de bien vouloir retirer cet amendement.

M. Pierre Cardo - Je suis d'accord pour retirer l'amendement. Mais je voudrais que l'on respecte le rôle de chaque député. Le Gouvernement a pris le temps qu'il fallait pour exposer sa position sur ce texte pour le moins complexe et hétérogène, l'opposition aussi. La majorité a quant à elle évité d'intervenir systématiquement sur chaque article ou chaque amendement. Mais je ne veux pas que l'on m'explique à longueur de temps qu'il faut que j'abrège mes interventions, voire que j'y renonce. Si je suis là et si je compte rester jusqu'au bout alors que je n'y suis pas obligé, c'est parce que ce projet m'intéresse et que j'estime qu'il peut être amélioré sur certains points.

Mme Christiane Taubira - Belle défense du Parlement !

M. Pierre Cardo - J'insiste en tout cas pour que l'on distingue bien l'obligation de moyens de l'obligation de résultat.

Mme Nelly Olin, ministre déléguée - J'en prends acte.

M. le Président - Depuis le début de la discussion de ce texte, les présidents de séance ont eu à cœur que chacun puisse s'exprimer.

M. Pierre Cardo - Je ne vous adressais pas de reproche.

M. Alain Joyandet - Le souci de M. Jego, dans ses amendements 729, 730 et 731, était que l'on puisse aller plus loin que le certificat d'autonomie linguistique en y ajoutant la notion de citoyenneté. Mais compte tenu de l'initiative du Gouvernement, je retire l'amendement 730.

Mme Martine Billard - L'amendement 430 est défendu.

L'amendement 430, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme Muguette Jacquaint - Fort bien !

M. le Président - J'invite chacun à être plus attentif au moment du vote.

Les amendements 929, 431 et 198 tombent.

L'article 61 modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 61

M. Pierre Cardo - La position du Gouvernement n'ayant sans doute pas varié, je retire l'amendement 948.

L'amendement 948 est retiré.

ART. 62

M. Denis Jacquat - Je me bornerai à souligner que, si nous exigeons une connaissance suffisante de la langue française, c'est que celle-ci est indispensable pour l'exercice d'une activité salariée durable.

Mme Martine Billard - Exiger, et ce dans le code du travail, une connaissance suffisante de notre langue n'est sans doute pas conforme à nos engagements internationaux. Cela conduit en outre à discriminer entre les ressortissants de la Communauté et ceux d'autre origine, mais aussi entre les salariés, d'une part, et les travailleurs indépendants, les chefs d'entreprise ou les agriculteurs, d'autre part. A mes yeux, cet article est tout simplement irrecevable.

J'ai par là même défendu notre amendement 395 de suppression.

M. Jacques Brunhes - L'amendement 762 est également de suppression.

Le Gouvernement pourrait-il nous dire ce qui a motivé cette nouvelle exigence, à laquelle échapperont en effet les employeurs étrangers, les travailleurs indépendants et les ressortissants communautaires ? En tout état de cause, comme l'a rappelé Mme Billard, les discriminations pour l'accès au travail à raison de la langue sont expressément prohibées par les traités internationaux que nous avons ratifiés, par la Déclaration universelle des droits de l'homme en ses articles 2 et 23, ainsi que par le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels en ses articles 2-2 et 6.

Jusqu'ici, la maîtrise de la langue française n'était exigée que pour la naturalisation. Désormais, la voici promue au rang de critère d'éligibilité pour le droit de résider en France et d'y exercer une activité salariée. Une fois de plus, on exclut, on précarise !

Mme la Rapporteure - La commission a repoussé ces deux amendements pour les raisons que j'ai déjà exposées.

Mme Nelly Olin, ministre déléguée - Je suis bien sûr défavorable, moi aussi, à ces deux amendements. Leurs auteurs ont-ils bien lu le projet ? L'étranger qui ne pourrait prouver une connaissance suffisante de notre langue y est seulement requis de « s'engager à l'acquérir après son installation en France ». L'obtention du permis de travail n'est donc en rien subordonnée à la possibilité de justifier déjà de cette connaissance. Par ailleurs, la loi du 4 mai dernier a introduit dans le code du travail une disposition aux termes de laquelle l'apprentissage de la langue française figure dans les actions de formation continue prises en charge par les entreprises et par les organismes paritaires collecteurs agréés des branches professionnelles.

Enfin, ne convenait-il pas d'éviter l'arrivée en nombre de travailleurs étrangers privés de toute autonomie réelle dans leur vie quotidienne comme dans leur travail, faute de maîtriser notre langue ?

Les amendements 395 et 762, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Alain Joyandet - L'amendement 731 est défendu.

Mme Nelly Olin, ministre déléguée - Il sera satisfait par l'amendement 1025 qui, par cohérence avec l'amendement précédent du Gouvernement, dispose que la connaissance de notre langue sera « sanctionnée par une certification nationale » - mais, bien évidemment, nous tiendrons compte de ce que nous avons dit tout à l'heure sur la certification des acquis.

L'amendement 731 est retiré.

Mme la Rapporteure - Compte tenu de la précision donnée par Mme la ministre déléguée, j'accepte l'amendement 1025 à titre personnel, la commission n'ayant pu l'examiner.

L'amendement 1025, mis aux voix, est adopté.

L'article 62 ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 63

M. Serge Blisko - L'évolution du FASILD au cours des dernières années ne peut nous satisfaire. En particulier, la modification du code des marchés publics l'a obligé à passer, pour les formations linguistiques, des marchés avec des entreprises dont les compétences mériteraient un examen attentif, plutôt que, comme par le passé, avec des associations ayant amplement fait la preuve de leurs capacités. Celles-ci n'ont pu en effet s'adapter assez vite à un code devenu complexe.

Ce marché de la formation n'est pas un marché ordinaire car il y va de l'accueil et de l'intégration des étrangers, préoccupation proprement régalienne. On ne peut en traiter comme de travaux ou de commandes de matériel !

Mme Martine Billard - Très bien !

M. Denis Jacquat - Cet article est de simple cohérence. Je bornerai donc là mon commentaire.

Mme Christiane Taubira - Ce chapitre consacré à l'accueil et à l'intégration des personnes issues de l'immigration est éminemment ambivalent et le fait qu'on ne puisse fournir les définitions que nous demandons ne peut que le confirmer.

Lors de mon premier mandat, en 1993, l'un des premiers textes soumis par la nouvelle majorité portait déjà sur l'accueil et le séjour des étrangers et je me souviens que le débat s'était déroulé dans un climat passionnel, pour ne pas dire dans une espèce de moiteur glauque - M. Pasqua n'ayant pas les pudeurs dont la majorité témoigne aujourd'hui. En 1997, sous la législature suivante, le même sujet a fait l'objet d'une nouvelle réforme et se sont alors succédé séances de nuit, demandes de renvoi en commission et autres motions, suspensions de séance et incidents sans fin. Aujourd'hui, le climat semble plus serein mais il n'empêche que cette législature aussi a commencé par la discussion de textes relatifs à l'entrée et au séjour des étrangers. Or ce sujet de société est aussi un sujet qui divise.

Vous créez des structures : Agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations et, demain, une Haute autorité - dont le budget a déjà failli être amputé de moitié. De fait, à multiplier les structures, on divise les moyens. Ce n'est peut-être pas par hasard que le FASILD, par exemple, a été mis récemment en cause dans un quotidien : qui veut noyer son chien l'accuse d'avoir la rage !

Non seulement le personnel du FASILD a accompli un travail considérable mais cet organisme est le seul à assumer certaines missions, je pense à l'aide aux foyers de travailleurs migrants, à l'apprentissage du français, au soutien scolaire, à la lutte contre les discriminations indirectes. Mais surtout, derrière cet organisme se cache une kyrielle d'associations de quartier qui accomplissent un énorme travail de prévention auquel je ne veux pas croire que vous êtes insensibles. Or, ces associations, depuis deux ans principalement, sont nombreuses à disparaître. Il importe donc d'entendre les propositions du personnel du FASILD, de comprendre son inquiétude notamment en raison du gel de crédit de 2003, et, enfin, d'assurer que leurs moyens de fonctionnement seront maintenus et, au besoin, adaptés. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

M. Pierre Cardo - Je partage en partie ces propos. Toutefois, la disparition de ces associations n'est pas liée seulement à la réduction des crédits mais également à la complexité de procédures régulièrement allongées et modifiées qui mettent en difficulté de trésorerie la plupart des acteurs locaux. Les objectifs changent souvent, comme si le mouvement associatif pouvait du jour au lendemain adapter ses personnels et ses moyens. Le FASILD dépend de l'Etat, et celui-ci devrait s'en souvenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

M. Jacques Brunhes - L'amendement de suppression 758 est défendu.

Mme la Rapporteure - Avis défavorable.

Mme Nelly Olin, ministre déléguée - Nul ne conteste le travail des personnels du FASILD, mais je rappelle que cet organisme est soumis au code des marchés publics. Il est vrai que nous devons analyser de près le budget dont il dispose, mais en 2005, ce sont plus de 17 millions supplémentaires qui lui seront affectés.

L'amendement 758, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 63, mis aux voix, est adopté.

ART. 64

M. Serge Blisko - J'ai eu l'occasion de m'exprimer sur les conditions de reprise du personnel du SSAE par l'ANAEM. Je répète qu'il faut éviter les contentieux, même si je me réjouis que le Gouvernement crée enfin des emplois publics, ce qui n'était pas arrivé depuis longtemps. L'application de l'article L .122-12 du code du travail me semble en l'occurrence problématique.

M. Denis Jacquat - Les articles 64 et 64 bis sont des articles de conséquence.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - L'article L.122-12 fait en effet obligation, lorsqu'il y a fusion, cession ou reprise d'une activité, de faire suivre l'ensemble du personnel dans cette translation. Comment procèderont en l'occurrence les pouvoirs publics, qui seront l'organisme repreneur, puisque les personnels d'une association passeront à un statut public ?

L'article 64, mis aux voix, est adopté.

ART. 64 BIS

M. Denis Jacquat - Il s'agit d'un article de conséquence.

Mme la Rapporteure - Cet article étant satisfait par l'article 60 bis, l'amendement 199 vise à le supprimer.

L'amendement 199, accepté par le Gouvernement , mis aux voix, est adopté.

L'article 64 bis est supprimé.

ART. 65

M. Denis Jacquat - L'article 65 est de conséquence.

L'article 65, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 65

M. Francis Vercamer - L'amendement 495 vise à permettre aux maires de prendre en charge les demandes de renouvellement des cartes de résident de dix ans.

Mme la Rapporteure - Il convient de réserver cette responsabilité aux services de l'Etat. Avis défavorable.

L'amendement 495, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Francis Vercamer - L'amendement 792 tend à demander au Gouvernement de présenter chaque année au Parlement un rapport sur l'exécution de cette loi.

Mme la Rapporteure - Avis défavorable car le Gouvernement s'est engagé à procéder tous les six mois à un bilan de la mise en œuvre de la loi.

Mme Nelly Olin, ministre déléguée - Je souhaite que, compte tenu des propos de Mme la rapporteure, M. Vercamer retire son amendement.

M. Jacques Brunhes - Monsieur le Président, pourriez-vous transmettre à la Conférence des présidents notre souhait d'avoir un bilan exact du nombre de rapports demandés et effectivement présentés? A qui sont-ils présentés et quelles conclusions pouvons-nous en tirer ?

M. le Président - Dans ce domaine comme dans d'autres, nous sommes sans doute des champions du monde. Votre demande sera transmise, Monsieur Brunhes.

M. Francis Vercamer - Je retire l'amendement 792.

M. Serge Blisko - Je le reprends. Ce n'est pas parce que les rapports de bilan sont rarement remis que l'on ne doit pas en demander. Nous souhaitons donc avoir un rapport au moins tous les deux ans : on ne peut piloter à vue une politique aussi fondamentale que la politique d'immigration.

L'amendement 792, mis aux voix, est adopté.

AVANT L'ART. 66

Mme la Rapporteure - L'amendement 930 vise à rédiger ainsi l'intitulé du Titre IV : « Conditions d'entrée en vigueur de la loi ».

Mme Nelly Olin, ministre déléguée - La rédaction proposée par l'amendement 1013 rectifié du Gouvernement - « Dispositions diverses et transitoires » - me semble meilleure. Avis défavorable à l`amendement 930.

L'amendement 930 est retiré.

L'amendement 1013 rectifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 66

M. Serge Blisko - Nous avons essayé d'éclaircir les conditions dans lesquelles les étrangers arrivés régulièrement sur notre territoire pourront avoir droit au CAI dans le cadre d'une ANAEM et d'un FASILD renouvelés, mais la représentation nationale devrait faire un geste particulier supplémentaire.

Je pense qu'il est donc le moment de relancer la question du droit de vote des étrangers extracommunautaires aux élections locales. On leur demande de signer un contrat, d'améliorer leurs connaissances en français et de suivre une journée civique ... C'est la marque d'un nouvel état d'esprit qui nous fait passer d'un politique policière à une politique généreuse et ouverte. Le droit de vote aux élections locales est déjà acquis pour les étrangers issus de l'Union européenne, il devrait être accordé aux titulaires du CAI.

Mme Nelly Olin, ministre déléguée - L'amendement 827 reporte la date de création effective de l'ANAEM à la première réunion de son conseil d'administration et prolonge, pour remplir ses missions d'ici là, l'existence juridique de l'office des migrations internationales. Une telle solution a déjà été retenue par exemple pour la transformation de la commission des opérations de bourse en autorité des marchés financiers.

L'amendement 827, accepté par la commission, mis aux voix, est adopté.

L'article 66, ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 66

M. Serge Blisko - Avec le contrat d'accueil et d'intégration, nous demandons aux étrangers une preuve des efforts qu'ils fournissent. Il faut reconnaître ces efforts. L'amendement 442 propose donc de ramener le délai pour obtenir une carte de résident de cinq à trois ans, sans quoi nous paraîtrons nous situer plus dans une démarche de refus que d'intégration.

Mme la Rapporteure - Avis défavorable.

Mme Nelly Olin, ministre déléguée - Même avis.

Mme Martine Billard - C'est un amendement de bon sens ! Le CAI va être institué, et on sait qu'il va, au final, devenir une condition sine qua non d'obtention de la carte de résident. On ne peut pas demander encore des preuves supplémentaires d'intégration ! Les cartes temporaires sont un obstacle à l'intégration, notamment lorsqu'il s'agit d'obtenir un logement ou un emploi.

L'amendement 442, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jacques Brunhes - Vous n'avez pas bien compté ! Il est adopté !

M. le Président - Le président a voté, et l'amendement a été repoussé par neuf voix contre sept.

M. Jacques Brunhes - Je voudrais faire un rappel au Règlement. Il est arrivé, sur plusieurs amendements, et pas des moindres, que ce soit la voix prépondérante du président qui fasse pencher la balance. Cela veut dire que le groupe de la majorité, qui a un peu plus de 350 membres, n'est représenté que par cinq ou six députés en séance ! C'est un problème pour la démocratie parlementaire !

M. le Président - La voix du président n'est pas prépondérante : il peut simplement voter sur chacun des scrutins. Dois-je vous rappeler qu'au début de ce débat, il est arrivé qu'un parlementaire de votre groupe, de rappels au Règlement en interruptions de séance, retarde le débat d'une heure et demie ?

M. Jacques Brunhes - Vous ne pouvez pas me répondre de cette façon ! Vous n'êtes pas dans votre rôle. Je n'ai fait qu'exposer un constat : pour plusieurs amendements, c'est la voix du président qui a fait pencher la balance, qui était donc prépondérante. Et que les bancs d'un groupe qui compte plus de 350 députés soient presque vides pose un problème sur lequel vous pourriez attirer l'attention du président de l'Assemblée nationale, qui évoque souvent la question de l'absentéisme parlementaire.

M. Pierre Cardo - Monsieur le président, il est étonnant qu'on vous interdise presque de vous exprimer ! Mais pour parler sur un plan plus personnel, je peux dire combien j'ai été vexé, lorsque j'ai fait mon discours, de ne voir personne sur les bancs face à la majorité !

M. Jacques Brunhes - Vous êtes 350 !

M. Pierre Cardo - Et vous, vous êtes suffisamment nombreux pour ne pas être absents !

Les membres de notre groupe sont extrêmement attachés à leurs responsabilités sur le terrain, ce qui explique qu'ils ne soient pas tous là.

M. Denis Jacquat - Et, par courtoisie, ils veulent éviter d'écraser en nombre leurs collègues ! (Sourires)

Mme Nelly Olin, ministre déléguée - La tarification spéciale de l'électricité, instituée par la loi du 10 février 2000, constitue un des éléments fondamentaux du dispositif d'aide aux personnes en situation de précarité. La mise en œuvre de cette disposition a rendu nécessaire la création d'un fichier des ayants droit, constitué à partir des fichiers des organismes d'assurance maladie. L'amendement 1012, pour répondre aux demandes de la CNIL, donne une base légale à la constitution de ce fichier et à son transfert vers l'organisme chargé de gérer le dispositif.

Mme la Rapporteure - Avis personnel favorable.

L'amendement 1012, mis aux voix, est adopté.

M. le Président - Sur le vote de l'amendement 752, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.

M. Serge Blisko - Nous arrivons à l'issue du volet sur l'intégration, et nous regrettons d'ailleurs de ne pas avoir eu le temps d'examiner l'amendement sur la tarification spéciale de l'électricité. La majorité a mis en place un contrat d'accueil et d'intégration qui va demander un effort supplémentaire aux personnes qui arrivent sur notre sol ou qui sont déjà installées : elles vont devoir suivre des cours de Français et une journée civique... Alors, donnant-donnant ! On va demander un effort financier à des personnes qui ont souvent peu de moyens, un effort intellectuel à des personnes qui ne sont plus toutes jeunes... Donnons-leur, en échange, le droit de vote pour les élections des conseils des collectivités territoriales ! Ce serait une manière de montrer que notre volonté d'intégration est sincère. Voilà l'objet de l'amendement 752.

Mme la Rapporteure - Avis défavorable.

Mme Nelly Olin, ministre déléguée - Même avis.

M. Jacques Brunhes - Depuis toujours, notre groupe est favorable au droit de vote et d'éligibilité, pour l'élection des conseils des collectivités territoriales, aux étrangers non ressortissants de l'Union européenne résidant en France.

A la majorité de 25 voix contre 13 sur 38 votants et 38 suffrages exprimés, l'amendement 752 n'est pas adopté.

M. le Président - Avant d'en revenir aux articles précédemment réservés, je vais suspendre la séance quelques instants.

La séance, suspendue à 19 heures 15, est reprise à 19 heures 20.

M. le Président - Nous en revenons aux articles 39 à 59 septies, précédemment réservés. Il nous reste 286 amendements à discuter.

AVANT L'ART. 39 (amendements précédemment réservés)

Mme Nelly Olin, ministre déléguée - L'amendement 973 du Gouvernement supprime, à la fin de l'intitulé du chapitre premier du titre II, les mots « et le logement temporaire », pour tenir compte du report des dispositions relatives aux maisons relais dans un article 39 bis, introduit par le Sénat.

L'amendement 973, accepté par la commission, mis aux voix, est adopté.

M. Francis Vercamer - Le groupe UDF se réjouit que ce projet comporte des dispositions en faveur du logement, qui font l'objet de ce titre II.

Celui-ci prévoit la construction de 100 000 logements locatifs sociaux par an sur la période 2005-2009, hors Programme national de rénovation urbaine. Cet objectif très ambitieux nécessitera la mobilisation de tous, et en particulier des élus locaux. Or les maires qui ont des projets de construction sont confrontés à trois problèmes : la complexité administrative, la réticence des habitants, le coût. Il faut impérativement donner aux communes les moyens d'absorber le coût lié à l'arrivée de nouveaux habitants ; c'est pourquoi nous proposons, par notre amendement 789, que les communes qui construisent plus bénéficient d'une majoration de la DGF, dans une proportion qui sera laissée à l'appréciation du comité des finances locales.

Mme la Rapporteure - M. Daubresse s'est engagé, lors de la discussion au Sénat, à trouver un dispositif qui incite davantage les communes à construire des logements sociaux. Mais l'article 55 de la loi SRU ne peut pas être révisé ainsi au détour d'un amendement, et la concertation en cours devrait pouvoir aboutir dans le cadre du projet de loi « Habitat pour tous ».

M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale - Sur le fond, nous souscrivons à l'analyse, mais il nous faut débattre de cette question avec la DGCL et avec le comité des finances locales. En prenant l'engagement d'essayer de trouver un mécanisme adéquat, je vous demande donc de retirer cet amendement.

L'amendement 789 est retiré.

Mme Janine Jambu - C'est par millions que se comptent les mal-logés et ceux qui aspirent à trouver un logement ou simplement à en changer. C'est en centaines de milliers que se chiffre le nombre de logements sociaux nécessaires pour répondre à la demande. Cette situation exige un engagement national et solidaire en faveur d'un véritable droit au logement, garanti à chaque citoyen de notre pays.

Votre politique conduit au contraire à l'abandon de toute responsabilité publique et à l'emprise croissante des critères marchands sur le secteur du logement. Logement social, organismes publics, circuits de collecte publique, tout doit être soumis à la loi du marché. Le rôle de l'Etat garant n'est plus qu'une illusion, et le budget du logement une variable d'ajustement.

Le projet de loi à venir si mal intitulé « Habitat pour tous » entend en finir avec le statut public des offices HLM et abroger la loi de 1948, ce qui portera un coup fatal au secteur et aux fondements de détermination des loyers. II est encore question de pousser les feux de la vente et de l'accession à la propriété. Comment ne pas s'interroger sur cet acharnement ? Car enfin une réflexion sur la modernisation peut fort bien être menée dans le cadre des statuts publics.

Le Conseil économique et social, dans son rapport Accès au logement - Droits et réalités, se prononce lui aussi en faveur d'un service public de l'habitat, afin de rendre effectif le droit de se loger. L'Etat doit permettre aux collectivités territoriales et aux organismes HLM, par un engagement financier conséquent, de remplir leur mission sociale pour mieux répondre aux enjeux de notre société.

Le service public que nous proposons de créer par l'amendement 654 garantit que chacun puisse vivre dans un logement de qualité. Il est l'outil indispensable à une gestion démocratisée et à la participation des locataires aux décisions. Nous l'articulons autour de quelques idées-force : l'affirmation de la responsabilité publique nationale, l'implication de tous les organismes publics et privés - bailleurs sociaux, associations, établissements publics, collectivités territoriales - la démocratie participative, le financement par la mutualisation des crédits d'Etat, du livret A, de la contribution logement des entreprises, des fonds de la Caisse des dépôts et du réseau des caisses d'épargne...

M. le Président - Veuillez conclure.

Mme Janine Jambu - ...de la contribution du secteur bancaire et de la taxation des profits des majors du BTP et de la promotion immobilière.

Ces propositions sont versées au débat. Nous entendons les conforter pour construire les rassemblements dont notre peuple a besoin afin de sortir de ce « mal- logement » indigne de notre pays.

Mme la Rapporteure - Avis défavorable. Cet amendement pose de nombreux problèmes de rédaction : comment un service public décentralisé peut-il relever de la responsabilité de l'Etat ? Qu'est-ce que la « responsabilité publique de l'Etat » ?

Si l'opposabilité du droit au logement est un objectif à atteindre, l'affirmer de manière incantatoire ne résoudra pas la crise du logement. Le Gouvernement a choisi une solution pragmatique - construire des logements locatifs sociaux - et compte tenu du retard qui a été pris, c'est elle qu'il faut privilégier pour l'instant.

M. le Ministre - La crise actuelle est la plus grave que nous ayons connue depuis 1954. 1999 fut l'année noire de la construction de logements sociaux en France, avec 39 000 logements construits. Le vrai défi, c'est de relancer toute la chaîne du logement, de l'accession à la propriété au logement conventionné, en passant par l'hébergement d'urgence et la récupération de logements vacants en centre ville : 200 000 sont prévus dans le programme - c'est l'équivalent de sept ans de production au rythme de 1999.

Le Gouvernement a proposé aux partenaires sociaux et aux acteurs du logement social un grand accord cadre, afin de permettre rapidement un doublement, puis un triplement de la production. Il s'est engagé à établir les conditions de ce rattrapage, auquel les différents acteurs devraient parvenir, compte tenu de ce texte et des mesures qui ont déjà été prises. C'est la meilleure réponse que l'on peut apporter à l'augmentation invraisemblable du coût du logement. L'origine de la crise réside en effet dans la faiblesse des moyens alloués à la construction de logements conventionnés de qualité.

A la demande des collectivités locales, nous avons veillé à la souplesse du dispositif, afin qu'il puisse être géré au plus près de la demande dans le cadre des PLH. La loi d'août 2003 permet désormais aux collectivités locales d'intervenir dans les SA d'HLM. 

Certes, il y a des contraintes foncières dans les Alpes-Maritimes, en Ile-de-France ou dans l'ouest lyonnais. Nous avons prévu des outils spécifiques, la possibilité de créer des établissements publics fonciers d'Etat, et des aides interstitielles. Nous avons discuté, enfin, avec les associations pour avancer vers un droit opposable - ce qui se fera dans le cadre de la loi « Habitat pour tous ». Des réponses doivent être apportées au préalable à des questions simples - opposable à qui, efficace par rapport à qui ? Cet amendement est donc prématuré : avis défavorable.

L'amendement 654, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Nous sommes tous convaincus de la nécessité d'apporter de vraies solutions à la crise du logement. Nous éviterons donc, autant que faire se peut, de nous renvoyer la responsabilité de la situation - sauf si on travestit, comme c'est souvent le cas, le bilan du gouvernement de Lionel Jospin.

Nous sommes de plus en plus convaincus qu'il faut au moins se donner pour objectif l'opposabilité du droit au logement, avec les processus de sanction sans lesquels il n'aurait pas de sens.

Le dispositif mis en œuvre dès l'année dernière avec la loi Borloo, la loi sur les responsabilités locales - qui a notamment prévu la délégation des compétences de l'aide à la pierre et le transfert du FSL - n'a fait qu'accentuer ce que je qualifierai familièrement de « patates chaudes », ces demandes de logement que l'on se renvoie sans fin parce que personne ne sait les traiter.

La formule que nous proposons tient compte de toutes les objections qui pourraient être soulevées : « dans les deux ans suivant la promulgation de la loi, le Gouvernement rendra compte de l'état d'avancement de sa mise en œuvre et présentera un projet de loi visant à rendre le droit au logement opposable au plus tard le 1er janvier 2009. » Arrêtons donc un peu l'horloge pour mieux la faire repartir.

Si nous nous y refusons, la multiplicité des partenaires en matière de logement est telle qu'il sera impossible de rouvrir le débat. Je sais que notre proposition est difficile à mettre en œuvre mais plus on attend, plus elle le sera.

Mme Martine Billard - Nous sommes tous d'accord avec le ministre : il faut relancer toute la chaîne de production de logements. La crise actuelle est liée bien sûr au manque de constructions de ces dernières années, mais aussi à une spéculation immobilière effrénée de la part des fonds de pension, qui touche plus particulièrement les grandes villes comme Paris, Lyon ou Marseille et rend difficile à tous de se loger.

On en est arrivé à dépenser des millions pour payer des nuits d'hôtel à des familles à la rue, auxquelles on n'a aucun logement à proposer. Il est donc évident qu'il faut construire. Et si nous espérons que les moyens prévus ne seront pas réduits au fil des ans, nous nous inquiétons de la possibilité d'atteindre les objectifs fixés. Dans ce contexte, les amendements 406 et 384, qui prévoient tous deux que le droit au logement soit rendu opposable à compter du 1er janvier 2009, paraissent raisonnables. Toutes les associations qui œuvrent dans le domaine du logement craignent sinon que l'on repousse sans cesse les échéances. Inscrire dans la loi l'opposabilité de ce droit contraindrait les gouvernements futurs, de droite ou de gauche d'ailleurs, à opérer les constructions nécessaires. Il n'est pas acceptable que des quasi-bidonvilles se reconstituent dans nos villes quand on espérait que ce type de logement indigne en avait définitivement disparu au début des années 1970...

Mme la Rapporteure - Avis défavorable. Un million de ménages attendent un logement social. Ce n'est pas étonnant quand dans les dernières années on a construit en moyenne 40 000 logements par an, et même seulement 38 000 de 1998 à 2000, quand 80 000 auraient été nécessaires. Mais à vos incantations, je préfère l'attitude pragmatique du Gouvernement qui débloque les crédits nécessaires à la construction de 120 000 logements par an et verra sur le terrain ce qu'il est possible de construire en fonction des possibilités.

M. le Ministre - Pour avoir rencontré à de multiples reprises, Marc-Philippe Daubresse, Nelly Olin et moi-même, les principaux acteurs du logement, nous sommes bien convaincus de la nécessité de remettre toute la chaîne en mouvement. Mais invoquer, comme vous le proposez, un droit au logement opposable sans dire à qui, ne sert à rien, si ce n'est à se donner bonne conscience. Il faut prendre des engagements précis : ce sera chose faite dans le futur projet de loi Habitat pour tous.

Pour ce qui est d'évaluer nos actions, j'en suis d'accord. S'agissant de la rénovation urbaine, nous tenons les engagements pris. En ce qui concerne le présent plan de cohésion sociale, nous en publierons mensuellement les principaux indicateurs. Nous organiserons en outre chaque année un débat au Parlement sur son suivi, et ce sans attendre deux ans !

Mme Janine Jambu - Je serais assez d'accord avec vous, Monsieur le ministre. Dire qu'un droit est opposable sans dire à qui n'a pas grand sens. L'opposabilité du droit au logement est défendue par le Haut comité pour le logement des personnes défavorisées, et toutes les associations comme Emmaüs, ATD Quart-monde, le Secours catholique, le Secours populaire, Médecins du monde... L'idée a même reçu l'aval du Conseil économique et social.

M. le Ministre - ...et du Conseil national de lutte contre l'exclusion.

Mme Janine Jambu - Une autorité politique responsable de la politique du logement doit être désignée pour qu'il soit possible d'intenter un recours en cas de non-respect du droit au logement. Je crains, pour ma part, que, dans le mouvement à marche forcée vers la décentralisation engagée par ce gouvernement, on se reporte trop sur les collectivités, en particulier les communes. Pour être maire d'une ville entourée d'autres qui ne font guère d'efforts en matière de logement social - je pense à Sceaux, Bourg-la-Reine, Antony... - je redoute tout particulièrement que les communes ayant construit beaucoup de logements sociaux ne soient sollicitées en première ligne. Cela ne ferait qu'accentuer les inégalités et la concentration des ghettos urbains.

Si je suis favorable à ce que le droit au logement soit rendu opposable, je refuse à ce qu'il le soit avant que, préalablement, ait été clairement définie une responsabilité publique nationale en ce domaine.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Aussi bien lors du débat sur la rénovation urbaine que sur les responsabilités locales, on nous a toujours dit que l'Etat était le garant de la mise en œuvre du droit au logement. Je crains, hélas, que les dispositifs prévus ne diluent les responsabilités jusqu'à les rendre invisibles... Sortant de l'Elysée, et relayant ce que venait de lui en dire l'hôte des lieux, le Haut comité du logement pour les personnes défavorisées réaffirmait qu'il s'agissait là d'un objectif républicain. Nous proposons seulement d'aboutir rapidement en fixant un objectif réaliste d'opposabilité du droit au logement à l'horizon 2009. L'article 55 de la loi SRU est sans doute le seul outil qui puise permettre d'atteindre cet objectif. La position du Gouvernement a évolué sur ce point, et nous nous réjouissons d'entendre le ministre du logement dire qu'il faut avancer sur l'article 55 et mettre en œuvre des mesures coercitives. De fait, il est vraiment injuste que certaines collectivités se dispensent de créer du logement social et il faudra bien se donner les moyens de compenser cette défaillance républicaine. Il n'est plus temps de reculer. Le logement n'est-il pas un des tout premiers fondements de la cohésion sociale ?

M. Francis Vercamer - Il faut avant tout construire, car s'il n'y a pas de logements, le droit au logement restera purement formel. On se sera peut-être fait plaisir en l'inscrivant dans un texte, mais on n'aura pas fait avancer la situation des familles défavorisées. Je rejoins M. Le Bouillonnec pour dire que le logement est un élément fondamental de la cohésion sociale. Mais le ministre a raison aussi de demander à qui le droit au logement serait opposable. Il faut donc être à la fois audacieux et prudent en la matière. Je propose donc que nous créions une mission d'information, dont les conclusions pourraient être reprises de façon consensuelle lors de la discussion du projet de loi « Habitat pour tous ».

L'amendement 406, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que l'amendement 384.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance qui aura lieu, ce soir, à 21 heures 30.

La séance est levée à 20 heures 5.

            Le Directeur du service
            des comptes rendus analytiques,

            François GEORGE


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