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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2004-2005 - 42ème jour de séance, 100ème séance

2ème SÉANCE DU MARDI 14 DÉCEMBRE 2004

PRÉSIDENCE de M. Jean-Louis DEBRÉ

Sommaire

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT 2

ADHÉSION DE LA TURQUIE
À L'UNION EUROPÉENNE 2

CONVENTION MÉDICALE 3

ADHÉSION DE LA TURQUIE
À L'UNION EUROPÉENNE 4

POUVOIR D'ACHAT 5

AVENIR DE LA RURALITÉ 5

CHANTIERS D'INSERTION 6

TEMPS DE TRAVAIL 7

PRESCRIPTION D'ANTIDÉPRESSEURS
AUX ADOLESCENTS 7

PACTE DE STABILITÉ 8

VITICULTURE 9

APPLICATION DE LA LOI
SUR LES FÉDÉRATIONS SPORTIVES 10

FERMETURE DE L'ENTREPRISE ABELIA 10

FIXATION DE L'ORDRE DU JOUR 11

STATUT GÉNÉRAL DES MILITAIRES 11

A N N E X E ORDRE DU JOUR 32

La séance est ouverte à quinze heures.

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

ADHÉSION DE LA TURQUIE À L'UNION EUROPÉENNE

M. Bernard Deflesselles - Le 17 décembre, au sommet des chefs d'Etat et de gouvernement à Bruxelles, la France prendra position sur l'ouverture des négociations concernant l'entrée de la Turquie en Europe. Cette perspective inquiète une très grande majorité des Français et suscite même une vive opposition qui devrait être prise en compte. Le débat en cours depuis des mois a montré qu'il y avait deux possibilités : soit l'adhésion, après de très longues négociations, soit un partenariat privilégié, solution qui semble avoir la préférence des Français. Hier, au conseil des affaires générales et des relations extérieures, Monsieur le ministre des affaires étrangères, vous avez rappelé avec raison que le projet européen depuis plus de 50 ans était fondé sur le respect et la réconciliation entre tous les Européens et surtout entre la France et l'Allemagne, sur la réconciliation avec soi-même. Dans cet esprit, de très nombreuses voix en France, dont la nôtre, se sont élevées pour demander que la reconnaissance du génocide arménien par la Turquie constitue une condition préalable à l'ouverture de toute négociation avec ce pays.

M. Pierre Lellouche et M. Jean Leonetti - Très bien !

M. Bernard Deflesselles - L'Europe ayant fait sur elle-même un travail de mémoire, peut demander solennellement à la Turquie de l'engager. Au-delà des critères d'adhésion élaborés par Bruxelles, il y a là une exigence morale. Je vous demande d'expliciter la conviction de la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Michel Barnier, ministre des affaires étrangères - Tout au long de cette négociation, longue, difficile, qui va sans doute s'ouvrir avec la Turquie, la France veut tenir un langage de vérité. Toutes les questions seront posées, tous les problèmes soulevés, et ce sera le cas en particulier de cette tragédie...

M. François Rochebloine - Ce génocide !

M. Michel Barnier, ministre des affaires étrangères - Je n'oublie pas que votre Assemblée, à l'unanimité, a qualifié cette tragédie de génocide en 2001. (Quelques applaudissements sur les bancs du groupe UMP) Ce sera donc le cas de cette tragédie dans laquelle des centaines de milliers d'Arméniens ont été martyrisés.

Nous allons poser la question de la reconnaissance de cette tragédie, d'abord parce que c'est une blessure qui ne se cicatrise pas pour de très nombreuses familles françaises d'origine arménienne, ensuite car cette question touche au cœur même d'un projet européen fondé sur la réconciliation, avec les autres, avec soi-même, avec son histoire. Mais ce ne sera pas une condition préalable à l'ouverture des négociations d'adhésion. Ce sera une question que la France va poser dans la négociation, parce que c'est la négociation qui permettra à la Turquie de faire ce travail de mémoire et de nous donner une réponse et qu'elle sera de toute façon conclue par un vote des Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

CONVENTION MÉDICALE

M. Jean-Marie Le Guen - Monsieur le ministre de la santé, sur l'assurance maladie vous avez chanté tout l'été (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) et maintenant pour les Français, la bise est venue. Dès le 1er janvier, salariés et retraités subiront une augmentation de la CSG. La semaine dernière, vous avez diminué le remboursement d'un certain nombre de médicaments et demain, vous vous apprêtez à signer une nouvelle convention médicale qui constitue un recul sans précédent de notre accès aux soins. Elle va généraliser les dépassements d'honoraires, notamment pour les spécialistes chez qui la visite, en accès direct, coûtera 32 € au 1er juillet prochain, pour un remboursement inférieur à 15 €. Elle supprimera le médecin référent et plus de 1 400 000 de nos compatriotes les plus fragiles qui bénéficiaient du tiers payant pour l'accès aux soins en seront privés. Enfin, elle prévoit près d'un milliard de rémunérations supplémentaires, essentiellement au profit des médecins spécialistes, et le déficit de la sécurité sociale en sera aggravé d'autant.

Toute la semaine, vous avez participé très directement aux négociations sur cette convention, en complète contradiction avec la loi que vous avez fait adopter cet été. Continuerez-vous à peser sur ces négociations en faveur d'une petite minorité de médecins spécialistes, contre l'intérêt de la santé publique (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) ou laisserez-vous le directeur de l'UNCAM renégocier les concessions inacceptables que vous avez déjà mises en œuvre ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Philippe Douste-Blazy, ministre des solidarités, de la santé et de la famille - Voilà dix ans qu'il n'y a pas eu de convention entre les médecins libéraux et la CNAM. Des négociations ont lieu et je félicite les partenaires pour leur esprit de responsabilité. La convention a deux points forts. Il s'agit d'abord de l'engagement mutuel de réaliser un milliard d'économies en 2005 (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) et ces économies seront détaillées et réparties régionalement, ce qui est une première. Ensuite, cette convention permettra pour la première fois aux Français d'avoir un parcours personnalisé de soins puisqu'au premier trimestre 2005 ils devront choisir leur médecin traitant.

Monsieur le Guen, ce n'est pas parce que vous n'avez pas été capables de faire une réforme de l'assurance maladie, (Protestations sur les bancs du groupe socialiste) que vous devez faire croire que celle-là est inéquitable. Avec cette convention, il y aura un égal accès aux soins pour tous. (« Ce n'est pas vrai ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains) Aucun Français ne sera remboursé demain différemment, malgré le mensonge que vous venez de proférer, s'il choisit un médecin traitant. Je comprends votre embarras. il y aura une convention, l'égal accès aux soins pour tous, ...

M. Maxime Gremetz - Ce n'est pas vrai !

M. Philippe Douste-Blazy, ministre des solidarités, de la santé et de la famille - ...et nous aurons sauvé notre assurance maladie. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF)

ADHÉSION DE LA TURQUIE À L'UNION EUROPÉENNE

M. François Bayrou - Une décision dont nous mesurons tous l'importance sera prise dans deux jours à Bruxelles concernant l'adhésion de la Turquie à l'Union européenne. Malgré les nombreuses questions qui ont été posées, il est incroyable que l'on ignore encore tout de la ligne politique qui sera suivie par le Gouvernement : le débat a été refusé, le vote a été écarté. Le Gouvernement a d'abord affirmé qu'il était favorable à l'adhésion, puis nous avons cru comprendre qu'un partenariat privilégié pourrait être envisagé et il semblerait enfin que cette option ait été abandonnée. Le ministre des affaires étrangères a déclaré hier que la France exigerait de la Turquie la reconnaissance « de la tragédie arménienne du début du siècle ». Mais « tragédie » n'est pas « génocide » : c'est là le signe d'un premier fléchissement de notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF) Ce matin, le ministre a en outre annoncé qu'il n'était pas question de faire de cette reconnaissance une condition pour l'ouverture de négociations, de même en ce qui concerne Chypre : nous nous apprêtons donc à ouvrir des négociations avec un Etat qui ne reconnaît pas l'un des pays de l'Union et qui occupe militairement une partie de son territoire. Une telle inconséquence est incompréhensible et empêche notre pays de peser sur une négociation alors que nous disposons d'un droit de veto. Pendant ce temps, le gouvernement turc se montre, lui, fort conséquent puisque son Premier ministre a déclaré qu'il n'accepterait aucun partenariat privilégié, qu'il ne reconnaîtrait pas le gouvernement chypriote non plus que le génocide arménien.

Au-delà de l'acceptation pure et simple de l'adhésion de la Turquie à ses conditions propres et contre le sentiment d'une majorité de Français, que cherche le Gouvernement à travers l'ouverture de ces négociations ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF)

M. Pierre Lellouche - Et, vous, que cherchez-vous, Monsieur Bayrou ?

M. Michel Barnier, ministre des affaires étrangères - Je vous rappelle que nous dialoguons avec la Turquie depuis 1963. Le général de Gaulle avait alors évoqué la vocation européenne de ce pays. Depuis, aucun gouvernement, y compris ceux auxquels vous avez participé, Monsieur Bayrou, n'a jamais remis en cause cette vocation. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP) En 1999, le Conseil européen, auquel participaient MM. Chirac et Jospin, a reconnu à la Turquie un statut de candidat. Nous en sommes là. Jeudi et vendredi, en effet, nous devons décider de l'éventuelle ouverture de négociations sur l'adhésion de la Turquie. Il ne s'agit que de cela, et ceux qui font croire aux Français que la Turquie entrera demain ou après-demain dans l'Union ne disent pas la vérité.

Nous abordons cette négociation avec quatre exigences : sincérité - nous dirons aux Turcs, sans pour autant faire preuve de complaisance, que nous souhaitons l'aboutissement de ces négociations -, réalisme - ces négociations seront longues, difficiles et nous poserons toutes les questions, notamment celles de la reconnaissance du génocide arménien et de Chypre -, transparence - le Parlement sera régulièrement informé des étapes de la négociation -, démocratie enfin - car ce n'est ni vous ni moi, Monsieur Bayrou, qui trancherons mais bien le vote du peuple français. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

POUVOIR D'ACHAT

Mme Marie-George Buffet - Samedi, Monsieur le Premier ministre, je vous ai remis des milliers de pétitions exigeant une amélioration du pouvoir d'achat de 300 € pour les familles ainsi qu'une revalorisation des salaires. Le Medef multiplie les contrats précaires, impose le travail à temps partiel, fait un chantage aux délocalisations. Le pouvoir d'achat des familles populaires est laminé. Depuis deux ans, le gel des salaires est spectaculaire : sait-on assez que le salaire moyen d'un ouvrier est de 871 €, d'une ouvrière, de 603 €, d'une employée de 744 € ? Depuis que vous êtes au pouvoir, les fonctionnaires ont perdu 4 % de pouvoir d'achat. La part du salaire dans la valeur ajoutée a reculé à nouveau alors que les salaires des grands patrons ont augmenté de 15 % à 20 %. Vous prétendez vouloir revaloriser le travail mais vous êtes en fait complice de la logique patronale. Mois après mois, vous facilitez les licenciements et culpabilisez les chômeurs. Le récent rapport du Secours catholique comme les statistiques fournies par les Restos du Cœur montrent qu'il y a désormais en France des salariés pauvres.

A ceux qui réclament un peu plus de salaire, vous répondez : « Travaillez plus ». Votre objectif est de revenir aux 39 heures voire aux 40 heures. (Protestations sur les bancs du groupe UMP) Il s'agit de travailler plus en gagnant moins. Allez-vous accorder la prime de 300 € financée par un prélèvement sur les placements financiers des entreprises et des banques ? Allez-vous augmenter de 5 % le traitement des fonctionnaires et le SMIC de 6 % ? Enfin, allez-vous organiser un nouveau Grenelle des salaires, de l'emploi et de la formation dès 2005 ? (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains)

Mme Nelly Olin, ministre déléguée à l'intégration, à l'égalité des chances et à la lutte contre l'exclusion - Merci de me donner une fois de plus l'occasion de rappeler les dispositifs que le Gouvernement a mis en place pour lutter contre la pauvreté.

Mme Marie-George Buffet - Il s'agit des salaires !

Mme Nelly Olin, ministre déléguée à l'intégration, à l'égalité des chances et à la lutte contre l'exclusion - Le Premier ministre a souhaité reconduire la prime exceptionnelle versée aux allocataires du RMI et de l'ASS. Cette prime sera versée avant Noël et concerne 1,5 million de personnes. Son coût total est de 350 millions. Le Premier ministre l'a rappelé lors de la présentation de son contrat pour 2005, le Gouvernement poursuit sa politique d'augmentation des salaires les plus bas. Les 35 heures ont en effet abouti à la création de six SMIC différents dont nous aurons achevé la réunification au début du mois de juillet. Nous sommes parvenus à faire distribuer l'équivalent d'un treizième mois pour les plus bas salaires, ce que vous n'avez jamais fait. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Par ailleurs, il est prévu dans la loi de cohésion sociale de proposer 185 000 contrats d'avenir en 2005 et un million en quatre ans. Ils répondent à une nouvelle logique : la transformation des minima sociaux en rémunération active, l'accompagnement personnalisé et l'acquisition de compétences.

Dans ce même texte, un effort sans précédent est consenti en faveur des plus démunis (Exclamations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et du groupe socialiste) en donnant une priorité absolue aux solutions durables : 500 000 logements sociaux, plus de 10 000 hébergements supplémentaires pour les sans-abri en trois ans, intensification de l'aide à l'emploi, tarif social EDF. Vous ne l'aviez pas fait, alors nous n'avons pas de leçons à recevoir de vous ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; protestations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et du groupe socialiste)

AVENIR DE LA RURALITÉ

M. Jean Auclair - Donnant suite aux engagements du Président de la République, le Gouvernement a décidé de construire une ruralité plus dynamique et plus attractive (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains). En milieu rural plus qu'ailleurs, nous avons besoin de logements et de services de proximité à la population ; le projet de loi sur le développement des territoires ruraux s'imposait donc.

M. le Premier ministre vient de recevoir à Matignon une délégation de maires ruraux de la Creuse, témoignant ainsi de l'engagement du Gouvernement en faveur de ces territoires. Monsieur le ministre de l'agriculture, pouvez-vous confirmer à la Creuse et à l'ensemble des départements ruraux cet engagement de l'Etat ? (Applaudissements sur bancs du groupe UMP ; exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

M. Jean Lassalle - Très bien !

M. Dominique Bussereau, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et de la ruralité - Vous vous battez pour votre département, et vous vous battez bien, notamment pour défendre ses services publics. Une ruralité vivante est pour ce gouvernement une préoccupation essentielle. C'est la raison pour laquelle deux CIADT ont été consacrés à l'amélioration des dessertes routières, aériennes et ferroviaires, ainsi qu'à l'accès à la téléphonie mobile et au haut débit. C'est également pourquoi le Gouvernement vous a soumis le projet de loi d'orientation sur les territoires ruraux, que vous avez enrichi et qui sera examiné par le Sénat en janvier. Enfin, lors du congrès de l'Association des maires de France, dont M. Pélissard a été élu président, le Premier ministre a pris l'engagement de tenir une conférence nationale sur le service public en milieu rural, qui sera présidée par un maire et sera installée début 2005. En outre, comme il vous l'a indiqué tout à l'heure à Matignon, il présidera lui-même dans la Creuse une réunion de travail sur les services publics en milieu rural (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

CHANTIERS D'INSERTION

Mme Christine Boutin - Je me fais aujourd'hui l'interprète des structures supports des chantiers et ateliers d'insertion, très préoccupées de la mise en application des contrats d'avenir.

70 % des 60 000 chantiers d'insertion, qui permettent à ceux qui en sont éloignés de retrouver le chemin du travail, sont concernés. Les CES vont en effet être remplacés par les contrats d'avenir et les contrats d'accompagnement, et la prise en charge des salaires par l'Etat et les collectivités serait, semble-t-il, dégressive dans le temps, mettant en péril l'équilibre financier de ces chantiers - dont la productivité n'est pas celle d'une entreprise : le temps passé pour réaliser une production est avant tout destiné à structurer la personne et à lui redonner confiance en elle-même ; la valorisation de la production d'un chantier dépasse ainsi rarement 20 % de ses frais de fonctionnement, et une aide pérenne est donc nécessaire.

Les chantiers d'insertion sont-ils toujours pour vous des outils ayant une réelle utilité sociale ? Si oui, quel sera le statut des personnes embauchées ? Bénéficieront-elles d'un contrat d'avenir avec prise en charge à 95 % par l'Etat sans dégressivité ? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP et sur plusieurs bancs du groupe UDF et du groupe socialiste)

Mme Nelly Olin, ministre déléguée à l'intégration, à l'égalité des chances et à la lutte contre l'exclusion - Les 5 000 structures d'insertion, qui emploient 300 000 personnes, sont en effet très utiles. Le nombre d'emplois financés passera de 11 000 à 15 000 en trois ans, l'aide à l'accompagnement socio-professionnel des associations intermédiaires sera étendu à l'ensemble des structures, et le fonds départemental d'insertion sera doublé, sans que l'apport des conseils généraux soit réduit. (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains) Au total, 66 millions supplémentaires seront consacrés à ce secteur en 2005 et 428 millions supplémentaires sur la durée du plan.

Concernant les chantiers d'insertion, le plan de cohésion sociale contient deux avancées majeures, attendues depuis des années par les associations : reconnaissance législative de ces structures et création d'une aide à l'accompagnement socio-professionnel. Pour les contrats d'accompagnement, l'aide de l'Etat sera fixée par décret, avec un maximum de 95 %, notamment pour ces chantiers ; pour les contrats d'avenir, l'aide de l'Etat cumulée avec l'aide à l'accompagnement socio-professionnel de 15 000 € par structure portera l'effort au-delà de 95 % la première année et à près de 90 % pour la deuxième année (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Mme Christine Boutin - Très bien !

TEMPS DE TRAVAIL

M. Alain Vidalies - Monsieur le Premier ministre, lors de la présentation du contrat pour 2005, qui signe la fin des 35 heures, vous avez omis de signaler la modification de la définition du temps de travail effectif. En effet, lors du débat sur la loi de cohésion sociale, le vote d'un amendement de M. Fourgous, soutenu par l'UMP et le Gouvernement, a mis fin à la prise en compte des déplacements professionnels dans le temps de travail effectif. Les ouvriers du bâtiment ou les salariés des sociétés de services découvriront ainsi bientôt qu'ils devront travailler 10 à 20 heures de plus chaque mois pour gagner le même salaire ! ( « Complètement faux ! » sur les bancs du groupe UMP)

Ce faisant, et l'auteur de l'amendement l'a lui-même reconnu, vous vous attaquez à la jurisprudence de la Cour de cassation, qui a décidé, depuis un arrêt du 31 mars 1993, que le temps de transport entre l'entreprise et le chantier était bien un temps de travail effectif.

Par ailleurs, cette nouvelle définition est un non-sens économique, au moment où les entreprises du bâtiment souffrent d'un manque de main-d'œuvre.

Comment une telle mesure a-t-elle pu être votée sans aucune concertation avec les organisations syndicales et, de surcroît, dans une loi dite de cohésion sociale ? Pourquoi le Gouvernement a-t-il soutenu cette initiative désastreuse ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Gérard Larcher, ministre délégué aux relations du travail - Il vous a échappé que, dans sa déclaration de la semaine dernière, le Premier ministre avait réaffirmé que la durée légale du travail était bel et bien de 35 heures, point de départ des heures supplémentaires. Il s'est par ailleurs attaché à engager, dès juin, des consultations approfondies avec les partenaires sociaux, pour définir le temps de travail, mais aussi pour réfléchir à la mise en œuvre de la directive 48 heures. C'est donc le fruit du dialogue social qui a fondé la décision du Gouvernement. Le principe reste celui de l'accord collectif pour définir le temps de travail. Celui qui travaille plus, doit gagner plus.

Quant à la durée du trajet entre le lieu de travail et celui de son exécution, nous ne visions que le développement de nouveaux modes de déplacement, et notamment les longs voyages de cadres, par exemple jusqu'à Tokyo ! (Huées et claquements de pupitres sur les bancs du groupe socialiste)

PRESCRIPTION D'ANTIDÉPRESSEURS AUX ADOLESCENTS

M. Christian Ménard - Monsieur le ministre de la santé, l'Agence européenne pour l'évaluation des médicaments a récemment déconseillé de prescrire certains antidépresseurs, de la classe des inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine, dont quelques produits sont commercialisés en France, aux moins de 18 ans, en raison des risques de comportement suicidaire. Le comité estime nécessaire d'inscrire une mise en garde dans la notice, et rappelle que les ISRS ne sont pas autorisés, en Europe, pour le traitement de la dépression chez les enfants et les adolescents. L'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé a conforté ces informations et rappelé qu'une conférence de 1995 avait déjà dénoncé l'inefficacité de ces produits dans le traitement de la dépression de l'enfant et de l'adolescent.

Quel est votre sentiment sur la question, et quelles mesures allez-vous prendre pour limiter l'éventuelle dangerosité de ces produits ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Philippe Douste-Blazy, ministre des solidarités, de la santé et de la famille - Le taux de suicide chez les adolescents en France est l'un des plus élevés de l'Union européenne.

M. Patrick Braouezec - Le plus élevé.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre des solidarités, de la santé et de la famille - Il faut tout d'abord se préoccuper de la surveillance de l'état sanitaire des garçons qui ne bénéficient pas, comme les jeunes filles en gynécologie, d'un suivi médical régulier.

Il faudra également réfléchir à la création de maisons des adolescents, sur le modèle de celles mises en place à Avicenne et à Cochin.

S'agissant du traitement de la dépression chez les adolescents, les études ont prouvé non seulement l'inefficacité des antidépresseurs dont vous avez parlé, mais le risque d'augmentation du taux de suicide. La France n'a pas autorisé la mise sur le marché de cette classe d'antidépresseurs pour les adolescents, mais, à titre personnel, j'ai écrit au directeur de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé pour rappeler que l'on ne doit pas prescrire ces produits aux moins de 18 ans, sauf en cas d'échec de la psychothérapie et sous la responsabilité de spécialistes.

Je présenterai, dans quelques mois, un plan de santé mentale pour répondre aux attentes de notre pays dans le domaine de la psychiatrie. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

PACTE DE STABILITÉ

M. Jean-Jacques Descamps - Par la voix de M. Almunia, commissaire aux affaires économiques et monétaires, la Commission européenne s'apprête à proposer une nouvelle lecture du pacte de stabilité et à suspendre les procédures en déficit excessif contre la France et l'Allemagne, ce qui tend à supprimer le seuil fatidique des 3 %. Heureuse évolution, la Commission se réserve dorénavant la possibilité d'apprécier les politiques budgétaires à l'aune des efforts réalisés par les Etats membres pour s'adapter aux réalités du moment et aux contraintes - souvent lourdes - héritées du passé. Par ce geste, elle apprécie donc positivement les efforts de la France pour réduire son déficit. Elle continue par contre de s'interroger sur l'avenir de nos comptes publics.

Monsieur le ministre de l'économie et des finances, quelles conclusions tirez-vous de l'évolution de la position de la Commission européenne ? Faut-il se satisfaire de sa décision sur les déficits publics, au risque de les laisser filer - ce que nous ne souhaitons pas de ce côté de l'hémicycle ? Faut-il lui demander d'accorder davantage d'importance à la dimension qualitative de la dépense publique et à la pertinence des engagements budgétaires des gouvernements ? Faut-il la prier de tenir compte de l'accélération des actions de correction qui sont menées ? Enfin, cela va-t-il vous permettre de mieux résister aux incertitudes qui planent sur notre budget pour 2005, en raison du niveau élevé de l'euro et de l'évolution non stabilisée des cours du pétrole ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Hervé Gaymard, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie - Aujourd'hui même, Monsieur le ministre Descamps, la Commission européenne a suspendu la procédure de déficit public excessif qui avait été engagée à l'encontre de notre pays. Il y a deux ans et demi, lorsque nous sommes arrivés aux responsabilités, nous avons trouvé une situation budgétaire très difficile... (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste)

M. Didier Migaud - C'est faux !

M. Hervé Gaymard, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie - Francis Mer et Alain Lambert, puis Nicolas Sarkozy et Dominique Bussereau, sous l'autorité du Premier ministre, ont mené une politique courageuse de réduction de nos déficits publics. Il ne s'agit pas de les réduire pour le plaisir, mais de ne pas laisser à la charge des générations futures le poids de notre manque de responsabilité. Je rappelle que la dette publique française représente aujourd'hui une année de SMIC par habitant ! L'Europe a donc pris acte de nos efforts mais il faut bien évidemment persévérer dans cette voie de l'économie de l'argent public. Trop d'impôt tue l'emploi, et il faut que les dépenses publiques soient réservées aux actions les plus efficaces. Quant au pacte de stabilité, il convient que les dépenses qualitatives soient prises en compte, de même que l'effet des réformes structurelles, telles celles des retraites ou de l'assurance maladie. Ce sont ces efforts que la Commission européenne a aussi salués et nous continuerons l'année prochaine, sous présidence néerlandaise, à discuter des possibilités de réformer le pacte de stabilité. Voilà ce que l'on peut dire aujourd'hui sur cette très importante question. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

VITICULTURE

M. Jacques Floch - Monsieur le Premier ministre, une campagne médiatique très forte a été orchestrée pour revenir sur les dispositions du code de la santé publique tendant à interdire la publicité sur le vin. Or la publicité pour le vin existe de fait. Il suffit de circuler dans le métro ou aux abords de nos villes pour s'en apercevoir. Pourtant, vous cédez à la rue et annoncez votre ouverture à davantage de publicité en faveur du vin. (Interruptions sur les bancs du groupe UMP) Plusieurs membres de votre majorité et l'ensemble des alcoologues sont inquiets. Croyez-vous vraiment que l'assouplissement des règles de publicité favorise la viticulture française ? (Mêmes mouvements) Tout le monde sait que cela profitera d'abord aux producteurs de whisky, de bière et d'alcools anisés, qui sont dans les mains de sociétés internationales disposant de capitaux destinés à la promotion sans commune mesure avec les moyens dont disposent nos viticulteurs ! Croyez-vous adresser un message favorable à la santé de nos compatriotes et à la filière viticole ? Toute cette agitation peine à masquer l'impuissance du Gouvernement à régler la crise structurelle qui frappe le secteur. Les viticulteurs français ont énormément travaillé pour améliorer la qualité de leur production. Ils ont arraché des vignes et amélioré les processus de vinification. Comment l'Etat les a-t-il aidés ? Comment a-t-il compensé l'endettement nécessaire à la modernisation des exploitations ? Quelle politique de promotion des vins français à l'étranger a-t-il menée depuis deux ans, date du début de la diminution des exportations ? La viticulture française a besoin de se sentir soutenue (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) ...dans ses efforts de restructuration, dans sa démarche commerciale à l'exportation et dans sa recherche permanente de qualité. Quand mènerez-vous enfin une politique responsable, allant au-delà du gadget du Conseil de la modération ? (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

M. Dominique Bussereau, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et de la ruralité - Je ne puis vous répondre en lieu et place du ministre de la santé sur la politique de santé publique du Gouvernement. M. Douste-Blazy le fera bien volontiers si vous l'interrogez. Le Gouvernement ne sous-estime pas les problèmes de la viticulture et il a entendu le message très puissant des manifestants de la semaine passée. Ici même, il y a huit jours, en réponse à M. Suguenot, j'ai annoncé que le Conseil de la modération, chargé de définir une politique équilibrée en matière de consommation, de publicité et d'éthique, serait installé dès le début du mois de janvier. Mon prédécesseur avait engagé un travail de fond avec la filière, portant notamment sur les appellations et sur la qualité, et j'entends le poursuivre avec la même détermination. Nous allons nous efforcer de mieux positionner l'offre française et d'assurer sa promotion. Enfin, les demandes conjoncturelles exprimées par les viticulteurs seront étudiées avec la plus grande attention, en particulier pour ce qui concerne l'aide à l'installation des plus jeunes. Je recevrai aujourd'hui à 18 heures, en présence des députés qui ont participé à la rédaction du Livre blanc, l'ensemble des organisations viticoles de notre pays. Après les avoir écoutées, le Gouvernement proposera des solutions. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur quelques bancs du groupe UDF)

APPLICATION DE LA LOI SUR LES FÉDÉRATIONS SPORTIVES

M. Francis Delattre - Monsieur le ministre des sports, lors des Etats généraux que vous avez organisés, les fédérations sportives, qui sont la pierre angulaire du mouvement sportif dans notre pays, avaient souhaité disposer de plus d'autonomie et de souplesse. La loi qui porte votre nom leur a donné largement satisfaction. En contrepartie, le législateur avait exprimé sa volonté de mieux encadrer les intérêts économiques et financiers qui les submergent au quotidien. A ce titre, votre texte prévoit notamment que les représentants des organismes à but lucratif ne peuvent pas dépasser 20 % de l'effectif des dirigeants des fédérations sportives de ce pays. Le processus s'installe progressivement et produit déjà des effets positifs, sauf pour une ou deux fédérations qui font l'actualité. L'une d'entre elles vient de subir un véritable coup de force, un groupe de représentants des milieux socioprofessionnels ayant convoqué une assemblée générale - considérée comme irrégulière par les tribunaux -, sur la base de statuts déclarés illégaux par votre propre département ministériel, pour destituer la présidente, dont le seul tort était de prôner le respect de la loi !

Face à cette situation, quelle est la position du Gouvernement ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-François Lamour, ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative - L'organisation du sport français repose sur trois principes : l'unité, la prédominance du socle associatif et le respect de certaines valeurs éducatives et sociales. La loi d'août 2003 donne plus de souplesse aux fédérations, mais dans le respect de ces trois principes. Toutes les fédérations ont adopté - ou sont en train d'adopter - les nouveaux statuts qui l'accompagnent.

Toutes, sauf une : la fédération française d'équitation. Election illégale d'un président, statuts non conformes, délivrance directe de licences par des structures commerciales... J'ai souhaité que cette fédération sorte de l'impasse où la menaient ces diverses irrégularités constatées au fil des années. Si elle n'en sortait pas, les conséquences pourraient être le retrait de l'agrément, le retrait de la délégation, le retrait des cadres techniques, la suspension des subventions. Cette fédération se verrait également retirer son habilitation - je dis cela sous le contrôle du ministre de l'agriculture. Elle perdrait alors au bas mot 5 millions d'euros. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

FERMETURE DE L'ENTREPRISE ABELIA

M. Joël Hart - Nous sommes nombreux ici, Monsieur le ministre de l'économie, à avoir subi les conséquences économiques, sociales et morales qu'engendre la fermeture d'une entreprise et à nous étonner de la mécanique implacable dont certaines banques font preuve dans ces circonstances. Comment admettre en effet que deux banques aussi importantes que le Crédit du Nord et le Crédit lyonnais condamnent l'entreprise Abelia décor - dont l'un des sites se trouve dans la ville dont je suis le maire - à disparaître en saisissant ses stocks de papiers peints ? Cette attitude empêche l'entreprise de satisfaire ses clients et de faire rentrer l'argent, bref de tourner. Comment comprendre qu'une banque que nous tous, contribuables, renflouons avec nos impôts puisse se montrer aussi intransigeante et qu'elle refuse à cette entreprise dont le savoir-faire est connu de tous, un nouveau délai, propice à la recherche d'un repreneur ?

A la veille des fêtes de Noël, je vous demande, au nom des 300 familles concernées, d'user de votre pouvoir auprès de ces banques pour que soit levé immédiatement l'embargo sur les stocks de papiers peints. N'oublions jamais que derrière les mécaniques économiques et financières, il y a des hommes, des femmes et des enfants qui ont le droit de vivre dignement ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Hervé Gaymard, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie - Oui, ce qui se passe chez Abelia et Abelia décor est un drame humain, qui concerne quelque 300 salariés à Abbeville et 40 à Puteaux. Le 8 décembre, le bilan a été déposé. La situation du marché l'explique, mais aussi la défaillance de la holding allemande VDN, qui possède ces deux sociétés (Interruptions sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains) Depuis ce dépôt de bilan, nous faisons tout pour que l'activité puisse se poursuivre et nous agissons en particulier - avec l'administrateur judiciaire et les deux banques concernées - en ce qui concerne le stock de papiers peints, le but étant que l'entreprise puisse continuer à vendre ses produits. Nous faisons également en sorte, s'agissant des créances de l'Etat, que les choses se passent le mieux possible et que les salariés ne soient pas pénalisés. Le trésorier payeur général et le préfet suivent cet aspect du dossier. Enfin, nous sommes intervenus auprès de nos partenaires allemands pour que la holding VDN ne se dérobe pas devant ses responsabilités économiques, sociales, financières et surtout humaines.

Nous suivons donc ce dossier avec beaucoup d'attention et je vous propose que nous restions en étroit contact. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

La séance, suspendue à 16 heures, est reprise à 16 heures 20, sous la présidence de M. Leroy.

PRÉSIDENCE de M. Maurice LEROY

vice-président

FIXATION DE L'ORDRE DU JOUR

M. le Président - L'ordre du jour des séances que l'Assemblée tiendra jusqu'au mercredi 22 décembre 2004, puis du mardi 18 au jeudi 27 janvier 2005 inclus a été fixé ce matin en Conférence des présidents. Il sera annexé au compte rendu de la présente séance.

La Conférence des présidents a également décidé que le vote solennel sur le projet de loi pour l'égalité des droits et des chances, pour la participation et pour la citoyenneté des personnes handicapées, en deuxième lecture, aurait lieu le mardi 18 janvier, après les questions au Gouvernement.

STATUT GÉNÉRAL DES MILITAIRES

L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi relatif au statut général des militaires.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense - Déterminant le caractère et le fonctionnement d'une de nos grandes institutions, ce projet prend évidemment rang parmi les textes fondateurs. Cependant, il vous est aussi soumis alors que, dans un contexte géostratégique plus incertain que jamais, nos militaires sont engagés dans des conditions parfois très difficiles dans de multiples opérations extérieures...

Le statut général en vigueur remonte à 1972. En 32 ans, la société française a beaucoup changé. Nous aussi, et nos armées de même. Mais les crises sont toujours aussi nombreuses et elles exigent peut-être encore plus des militaires que par le passé. Il convenait donc de prendre tous ces changements en compte dans le nouveau statut, sans pour autant remettre en cause les caractéristiques essentielles du métier des armes.

La méthode dont j'ai fait choix à cette fin allie expertise et ouverture. La commission, dont j'ai confié la présidence au vice-président du Conseil d'Etat, M. Denoix de Saint Marc - le plus haut fonctionnaire de l'Etat -, était donc composée à la fois de personnalités extérieures et de représentants des différentes armées, ainsi que des grandes directions du ministère, de manière à prendre en compte aussi bien l'état de notre société que les aspirations des militaires. Elle a entendu plus de 170 militaires, des membres d'associations, des femmes de militaires également. Des membres du CSFM ont été associés à ses travaux et l'avis des conseils de la fonction militaire, ainsi que du Conseil supérieur, a été sollicité à plusieurs reprises, sur le rapport comme sur le projet. Le débat fut sans tabou et a abouti à un texte qui recueille l'adhésion de la communauté militaire.

Ce nouveau statut, disais-je, vise à prendre en compte les évolutions pour garantir l'épanouissement des hommes et des femmes qui ont choisi le métier militaire, tout en préservant l'efficacité de nos armées et les principes essentiels de ce métier.

Ces évolutions ont été nombreuses. Ce sont d'abord celles de la société : modification du rapport à l'autorité, développement de la société de l'information, entrée massive des femmes sur le marché du travail, multiplication des associations... La communauté militaire ne saurait être sans dommage tenue à l'écart de ce mouvement général qui la conduit à aspirer à plus de responsabilité et à plus de dialogue.

Mais ce sont aussi les évolutions de nos armées elles-mêmes, la première de toutes étant la professionnalisation. Celle-ci est sans doute la transformation la plus profonde qui ait affecté l'ensemble de nos institutions et administrations et le ministère de la défense a fait là preuve d'une modernité et d'une capacité d'adaptation qu'aucun autre département n'a égalées...

M. Jean-Louis Bernard - Exact !

Mme la Ministre - Cette professionnalisation a fait naître, à son tour, des exigences : dès lors que nous ne pouvons plus compter sur les compétences procurées quasi-gratuitement par le contingent, nous devons disputer aux autres administrations et au secteur privé les spécialistes dont nous avons besoin ; il faut dès lors apprendre à les attirer et à les fidéliser. Dans le même temps, nous avons à assurer la cohésion entre militaires de carrière et militaires contractuels, qui composent maintenant quasi à parité nos armées.

En 32 ans, les conditions d'exercice du métier militaire sont également devenues plus complexes, d'abord en raison de l'importance prise par les règles de droit.

J'avais eu la surprise de découvrir que cet encadrement juridique est précis et généralisé. Il concerne par exemple les conditions dans lesquelles les militaires peuvent ouvrir le feu, comme les événements de Côte d'Ivoire l'ont rappelé. Or les opérations extérieures se déroulent dans un cadre de plus en plus flou : au Kosovo, en Afghanistan, est-on en état de paix ou en état de guerre ? II est de plus en plus difficile de déterminer le cadre juridique qui s'applique.

Enfin, le lien entre l'armée et la nation a beaucoup évolué avec la professionnalisation. La moitié d'entre nous - vous, messieurs... - avait avec l'armée un lien direct, ce lien a disparu avec la conscription. L'Armée doit donc tisser de nouveaux liens avec les citoyens.

Toutes ces modifications, il fallait les prendre en compte dans un nouveau statut général des militaires. Pour autant, il convenait d'y réaffirmer les principes fondamentaux qui sont la contrepartie de ce pouvoir extraordinaire donné aux militaires de pouvoir ouvrir le feu, et de donner la mort, avec le risque de la recevoir. Aussi, dès l'article premier du nouveau statut, rappelle-t-on ces principes fondamentaux que sont l'esprit de sacrifice, la discipline, la disponibilité, le loyalisme, la neutralité, ainsi que le maintien de cet autre principe qu'est l'unicité du statut militaire et qui vaut pour les trois armées, la gendarmerie et les services communs.

Ce texte comporte des dispositions qui prennent en compte de manière équilibrée les exigences du métier militaire et l'épanouissement des hommes et des femmes. Elles concernent les personnes et le fonctionnement de l'institution.

S'agissant des personnes, les avancées les plus significatives concernent les droits et la protection des militaires, le système de concertation dans les armées et la gestion des carrières.

L'encadrement des droits civils est assoupli. Certaines obligations anachroniques sont supprimées : on n'aura plus à demander l'autorisation de se marier avec un étranger ni à déclarer la profession du conjoint. Certains trouvent que nous sommes allés trop loin...

M. Jacques Brunhes - Et d'autres pas assez.

Mme la Ministre - Nous nous en expliquerons. D'autres restrictions ne se justifiaient plus pour des professionnels. Ceux-ci auront donc désormais la liberté d'exercer des fonctions associatives. De même, j'ai voulu que les règles régissant les conditions d'expression soient assouplies : les droits des militaires en ce domaine ont été rapprochés de ceux de la fonction publique.

Les garanties apportées aux militaires sont renforcées : ils bénéficieront d'une meilleure couverture juridique et les dommages qu'ils pourraient subir tout au long de la mission seront considérés comme imputables au service et donneront droit à réparation. A mon arrivée, une affaire en cours concernait un militaire décédé lors d'une excursion pendant une escale en cours de mission ; il n'y avait pas eu indemnisation. J'ai considéré que nous étions en retard sur le droit.

La responsabilité pénale en cas d'usage de la force en opération extérieure, examinée aujourd'hui au seul regard du droit interne de la légitime défense, le sera en tenant compte de l'impératif d'accomplissement de la mission dans le respect du droit international public. Il s'agit là d'une extension considérable de la protection pénale des militaires, indispensable aux nouvelles tâches qu'ils exercent dans le monde.

J'ai voulu également que le droit disciplinaire soit rénové et simplifié, et les droits de la défense mieux assis. En particulier, les sanctions disciplinaires et statutaires sont fusionnées dans une échelle unique.

J'en viens maintenant au fonctionnement de l'institution qui, au vu des conclusions de la commission Denoix de Saint Marc, a été amélioré sur divers points.

J'ai souhaité conforter le système de concertation particulier aux armées et rappeler que certaines instances doivent permettre un dialogue direct entre les chefs d'état-major et les militaires de leur arme. En temps normal, les conseils de fonction militaire seront présidés par les chefs d'état major ou les directeurs de service. Depuis mon arrivée, j'ai tenu à ce que chacun exerce ses responsabilités. Quant au conseil supérieur de la fonction militaire, dont les membres sont désignés parmi ces instances, il continuera d'être présidé par le ministre. La protection des membres de ces conseils sera garantie. Une commission indépendante d'évaluation est créée, qui remettra périodiquement un rapport au Président de la République sur l'évolution de la condition militaire et de la fonction militaire en général.

Enfin, les grandes règles de gestion seront modernisées. Les droits des personnels sous contrat, qu'on ne peut considérer comme des contractuels ordinaires de l'Etat, seront rapprochés de ceux des militaires de carrière. Les limites d'âge seront rationalisées pour concilier l'exigence d'une armée jeune et les conséquences de la réforme des retraites. Le dispositif de reconversion, qui est déjà l'un des meilleurs dans notre société, sera encore amélioré, pour l'accès à la fonction publique civile.

Ce nouveau statut ne constitue pas une révolution, mais contient les adaptations nécessaires au meilleur emploi des forces et à la gestion des ressources humaines d'une armée du XXIe siècle.

Lorsque l'on traite des problèmes d'hommes et de femmes qui prennent tant de risques pour la France, il ne s'agit pas de jeter de la poudre aux yeux, il s'agit d'améliorer concrètement leur situation, ce qui requiert humilité et grand sens de l'écoute. Ce statut modernise l'état militaire tout en réaffirmant ses spécificités. Lors d'une séance consacrée au budget de la Défense, nous avons eu l'occasion d'évoquer les événements tragiques de Côte d'Ivoire. Ceux-ci nous rappellent que le métier militaire n'est pas comme les autres, et c'est ce que nous devons garder à l'esprit. Ce projet de statut répond, je l'espère, aux attentes des militaires et devrait contribuer au renforcement du lien entre l'armée et les Français. Il est en cela fidèle à notre histoire et à notre tradition républicaine. Le fait d'avoir choisi de bâtir une armée professionnelle ne doit en rien remettre en cause la belle formule du général de Gaulle selon laquelle « la nation tout entière se reflète au miroir de son armée ». C'est cette armée républicaine et professionnelle que le Gouvernement vous demande de conforter dans son statut et sa vocation au service de la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Guy Teissier, président et rapporteur de la commission de la défense - Nos armées pourraient être dotées des équipements les plus sophistiqués, développer les stratégies militaires les plus élaborées, leur efficacité n'en dépendrait pas moins de la qualité des hommes et des femmes qui les servent. Le philosophe Jean Bodin le disait déjà au XVIe siècle : « Il n'y a de richesse que d'hommes ».

Ce projet vise à remplacer la loi de 1972 qui régit la situation de nos militaires, loi soutenue par M. Michel Debré, alors ministre de la Défense. Elle était particulièrement novatrice, rassemblant un ensemble de textes épars pour constituer le premier statut général des militaires.

Les rapports entre les armées et la société civile qu'elles doivent défendre sont vitaux pour l'harmonie de la nation, essentiels pour le bon fonctionnement des institutions ou la place de notre pays dans la communauté internationale. Notre histoire nationale est marquée par des rapports parfois tumultueux entre les armées et les institutions politiques. Depuis la Révolution ont alterné les périodes de ferveur et de méfiance envers l'institution militaire. C'est dans la première moitié du XIXe siècle que se mettent en place les premiers éléments juridiques qui feront la particularité de l'état militaire, je pense surtout à la loi du 19 mai 1834 sur l'état de l'officier qui fixe les premières lignes d'un statut pour un agent au service de l'Etat. Des règles précises pour le recrutement et l'avancement forment le premier bloc de garanties des militaires ; s'y ajouteront rapidement les règles sur les sanctions disciplinaires, puis l'éligibilité et le droit de vote. Il faudra toutefois attendre l'ordonnance du 17 août 1945 pour que le droit de vote soit reconnu définitivement aux militaires par le général de Gaulle, les autres droits et libertés publiques demeurant sous le régime général de l'interdiction, sauf autorisation reconnue au cas par cas par le ministre de la guerre. Tel est le « cantonnement juridique » des militaires selon l'expression du doyen Hauriou.

Certains s'interrogent sur la pertinence d'un statut dérogatoire pour les militaires, négligeant que cette mission n'est comparable à aucune autre : la défense de la patrie, jusqu'au péril de la vie si nécessaire. Le texte respecte deux grands principes. Le premier réside dans le maintien de notre culture militaire nationale qui imprime sa marque aussi bien à l'exercice des droits civils et politiques qu'à nos règles de gestion. Ne cédons pas à un certain « air du temps » ainsi qu'à la propension d'imiter ce qui se fait ailleurs. D'autre part, chaque modification du statut de 1972 doit avoir pour objectif d'améliorer la situation des militaires.

L'exercice des droits civils et politiques des militaires, objet du chapitre premier du titre premier, constitue le socle nouveau du cantonnement juridique des militaires. Comme s'y était engagé le Président de la République, les fondements essentiels de l'état militaire sont réaffirmés : interdiction d'adhésion à un parti politique ou à un syndicat, pas de droit de grève, obligation de disponibilité dans le temps et dans l'espace. La liberté d'opinion est heureusement confirmée à l'article 4 et la liberté d'expression élargie puisque l'autorisation préalable du ministre de la défense est abrogée ; en contrepartie, l'obligation de réserve est réaffirmée et rend le militaire responsable de son expression.

Enfin, des dispositions obsolètes sont abrogées comme l'autorisation préalable en cas de mariage avec un étranger et l'interdiction d'introduction de publications dans les enceintes militaires; toutefois, des restrictions demeurent possibles dans l'usage des moyens de communication ou d'information ; enfin, l'obligation de déclaration de travail du conjoint est supprimée. Le cantonnement juridique ne repose plus que sur les indispensables « blocs de granit », pour reprendre l'expression de Napoléon à propos des principes fondamentaux du code civil.

L'exercice du métier militaire est par nature risqué. Le statut de 1972 avait apporté de nombreuses garanties prolongées dans les codes de pension militaire d'invalidité, de pensions civiles et militaires, de retraites enfin. Elles sont évidemment maintenues, voire élargies comme la protection contre les menaces, injures ou violences à l'égard des familles de militaires.

Les conditions nouvelles dans lesquelles les militaires exercent leur mission devaient être mieux prises en compte. C'est un élément essentiel de la réforme qui doit permettre à tous de partir plus sereins en mission. Ainsi de l'introduction, par l'article 96, de la notion d'opérations extérieures dans le code de pensions militaires d'invalidité ; celles et ceux qui y participeront n'auront plus à contracter d'assurance pour se garantir contre les dommages subis à cette occasion. Mieux, le militaire sera considéré en permanence en service du début à la fin d'une mission opérationnelle, y compris lors des entraînements ou des escales des navires.

Les dispositions nouvelles ne se limitent pas à l'indemnisation des dommages corporels. Par l'article 17-11, les militaires en opérations à l'extérieur du territoire français - on en dénombre près de 15 000 aujourd'hui - bénéficieront d'une protection pénale dès lors qu'ils seront amenés à user de leurs armes dans le respect du droit international. C'est un progrès considérable, peut-être le plus important de l'ensemble de la réforme, en raison de la fréquence de ces situations et de la judiciarisation croissante du monde dans lequel nous vivons.

Notre système de sanctions disciplinaires change. A l'article 41, une nouvelle typologie des sanctions en trois groupes offre des garanties particulières pour que l'intéressé puisse s'expliquer ou se défendre. Seuls les arrêts subsistent comme sanction privative de liberté, avec, pour eux seulement, une possibilité de cumul et dans des conditions très limitatives.

Un troisième ensemble de mesures concerne les dispositifs de gestion des militaires, de leur recrutement à leur retour à la vie civile. Il s'agit de moderniser les règles qui organisent les déroulements de carrière et de les adapter au contexte nouveau créé par la professionnalisation de nos armées. Je ne retiendrai que deux principes et une mesure précise dans ce domaine de la réforme. Le premier principe réside dans le souci permanent de rapprocher autant que possible la situation des engagés de celle des militaires de carrière. Le statut de 1972 excluait les contractuels de nombre d'avantages et de garanties. Ce décalage n'est plus supportable alors que près de la moitié de nos militaires servent sous contrat et se trouvent côte à côte avec des militaires de carrière dont ils partagent les mêmes objectifs, à l'entraînement comme en mission.

Second principe : le regroupement, au sein du statut, de l'ensemble des mesures de reconversion et d'aide au départ, essentielles pour assurer la « respiration » de nos armées et l'adaptation des flux d'entrée et de sortie aux besoins.

Un chapitre particulier est consacré à l'accès à la fonction publique civile, qui est une voie très prometteuse. L'article 89 fixe de nouvelles limites d'âge : tout en les simplifiant, il les inscrit désormais dans le corps de la loi alors qu'elles figurent aujourd'hui en annexe, ce qui n'est pas sans signification symbolique ; et, tirant les conséquences de la réforme des retraites, il les recule en moyenne de trois années, afin de permettre au plus grand nombre d'acquérir les annuités nécessaires au bénéfice d'une retraite à taux plein.

S'agissant enfin des structures de concertation, ce projet conforte le dispositif institué en 1969, qui revêt une particulière importance puisqu'il contrebalance l'interdiction du droit syndical et doit constituer un rempart contre toute tentation de la tourner. Il fait entrer les organismes de niveau national dans le statut, ce qui n'avait pas été fait en 1972. Mais chacun sait que les institutions ne valent que par la façon dont on les fait vivre : on ne peut que se réjouir, Madame le ministre, de votre investissement personnel en faveur de la concertation, et nous ne doutons pas que les mesures réglementaires que vous prendrez, notamment au sujet du mode de désignation des membres du CSFM et des CFM, confirmeront votre volonté de leur donner force et crédibilité. Je suis convaincu aussi que la commission d'évaluation de la condition militaire nourrira le dialogue entre l'administration et les organismes de concertation et éloignera ainsi le risque de tentatives aventureuses.

Madame le ministre, nous sommes convaincus de l'importance de ce projet, qui apporte de nouvelles garanties aux militaires pour l'accomplissement de leur difficile mission. La commission est donc favorable à son adoption, mais proposera néanmoins des amendements, dont la finalité est d'améliorer encore le statut de nos militaires (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

M. Francis Hillmeyer - L'adaptation d'un statut vieux de trente-deux ans aux évolutions de notre société et aux réformes majeures de nos armées qui ont été conduites depuis 1996 était devenu indispensable. Fin de la conscription, grand nombre de militaires sous contrat, emploi ponctuel de spécialistes, utilisation croissante des NTIC : les mutations sont profondes. La commission de révision du statut a ainsi pu lister dans son rapport un certain nombre de dysfonctionnements.

Pour le groupe UDF, il s'agit tout à la fois de rendre la carrière militaire attractive et, tout en respectant les devoirs constitutifs de l'état militaire, d'adapter les pratiques de notre défense nationale à notre temps. Sans cette réforme du statut militaire, la loi de programmation militaire 2003-2008 ne pourrait pas atteindre tous ses objectifs, à commencer par la consolidation de l'armée professionnelle.

Il est bon que la commission de révision du statut, dont les recommandations ont inspiré ce projet, ait compté parmi ses membres trois personnalités qualifiées de la société civile : cette ouverture introduit dans un domaine pourtant très spécifique les méthodes vertueuses appliquées à la réforme de l'Etat. Le projet regroupe en moins de 100 articles une vingtaine de lois qui en comptaient plus de 400 ; il réaffirme les principes intangibles de l'état militaire : esprit de sacrifice, discipline, disponibilité, loyalisme et neutralité.

Concernant les avancements, l'article 36 distingue la nomination et la promotion, et la procédure est clarifiée. S'agissant des retraites et du retour à la vie civile, le projet modernise les règles statutaires des gestions, en renforçant la mobilité professionnelle et en améliorant les perspectives de reconversion de ceux - et ils sont nombreux - à qui l'institution militaire ne peut offrir un déroulement de carrière complet.

Par ailleurs, ce texte fait disparaître des obligations obsolètes, telles celle de demander l'autorisation d'épouser une personne étrangère ou de déclarer la profession du conjoint. Il supprime également l'interdiction d'introduire des magazines dans les enceintes militaires, ce qui devrait permettre à nos soldats de diversifier leurs lectures...

Le projet supprime aussi, à juste titre, les dispositions anachroniques en matière de droits civils et politiques et favorise la participation des militaires à la vie de la cité. La liberté d'adhérer à des associations non professionnelles leur est reconnue.

Par ailleurs, ce projet pose les bases d'une modernisation des instances de consultation, et rénove le régime des sanctions.

En ce qui concerne l'interdiction pour un militaire d'adhérer à un parti politique, la position du groupe UDF est sans équivoque : nous sommes favorables au maintien de cette interdiction. De même en effet qu'il doit y avoir une séparation totale entre le pouvoir spirituel et le pouvoir temporel, il doit y en avoir une entre l'état militaire et l'état militant, afin de garantir la neutralité du pouvoir militaire, dont les missions procèdent du Président de la République, chef des armées. C'est la condition d'une démocratie saine.

Des amendements importants ont été adoptés en commission. Pour la plupart, ils correspondent à de justes demandes des professionnels. Le groupe UDF est particulièrement attaché à celui qui introduit les grades spécifiques de la Marine, au rétablissement de la position de militaire en retraite - curieusement supprimée du statut de 1972 - et aux dispositions spécifiques concernant l'indemnisation des militaires blessés ou malades lors d'opérations extérieures. Nous sommes particulièrement satisfaits que la commission ait adopté notre amendement à l'article premier sur la participation de notre armée à la politique européenne de défense. Son importance est autant symbolique que légale.

La participation de nos armées à la politique européenne de sécurité et de défense résulte de nos engagements. On aurait certes pu aller jusqu'à la mise en place d'une formation militaire au sein d'une académie européenne pour promouvoir un véritable esprit européen de défense. Dans cet esprit, l'UDF, par la voix du général Morillon, souhaite la création d'un Institut des hautes études de défense européen. L'amendement déposé par l'UDF est le minimum pour donner à ce projet une dimension européenne.

J'en viens enfin à la réserve. Pourquoi de nombreux réservistes sont-ils encore contraints de se comporter comme des clandestins au sein de leur entreprise ? Quel dommage qu'un seul article dans ce projet soit consacré à ce sujet ! Certes, vous nous avez annoncé un projet de loi au cours du premier semestre 2005, mais l'encombrement législatif nous fait craindre son report. Le groupe UDF souhaite une simplification de l'avancement des réservistes.

Nous sommes convaincus que ce texte permettra à nos forces armées de répondre aux défis des prochaines décennies, mais nous attendons une ouverture de votre part sur les sujets que je viens d'évoquer, et en particulier sur la dimension européenne.

L'UDF, persuadé que vous serez sensible aux amendements adoptés en commission, votera pour ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et du groupe UMP)

M. Jacques Brunhes - Au cours de ces dernières années, nos forces armées auront connu la suppression du service national, la professionnalisation, la féminisation des personnels militaires, le renforcement des personnels civils. Elles devront affronter dorénavant la construction de la défense européenne et les opérations extérieures, généralement menées sous mandat international.

Parallèlement, l'évolution de la société française, et notamment la volonté de concilier vie professionnelle et vie familiale, impose la révision du statut général des militaires. La question de l'attractivité du métier est dorénavant posée, et au-delà des conditions matérielles, elle suppose de renforcer la couverture juridique et sociale, d'assouplir le régime disciplinaire dérogatoire, mais surtout de calquer les droits des militaires sur ceux des fonctionnaires.

Ce projet de loi contient des avancées, mais elles restent limitées, et nous regrettons que nombre de recommandations de la commission Denoix de Saint Marc n'aient pas été retenues, alors même qu'elles ne bouleversaient pas l'architecture du statut. Le Gouvernement n'a ainsi pas repris la proposition d'un congé d'éducation pour tenir compte de la féminisation des armées. L'idée d'un Haut conseil de la fonction militaire a par ailleurs été abandonnée au profit d'une commission définie a minima, mais heureusement, un amendement du rapporteur y revient.

Dans d'autres domaines, le projet est même en recul par rapport au statut de 1972 modifié. Il en va ainsi des restrictions relatives à la liberté de circulation et à la résidence des militaires, des congés exceptionnels et des congés de fin de service. Et je ne parle pas des militaires sous contrat qui quittent l'armée avant d'avoir accompli les quinze ans de service exigés pour prétendre à une pension de retraite, et perdent de ce fait les bonifications auxquelles ils avaient droit.

Mais surtout, nous regrettons le manque d'ambition du projet en matière de droits civils et politiques, et de modernisation des instances de concertation. Certes, l'autorisation du ministre pour évoquer des sujets politiques ou des questions internationales est supprimée, comme est levée l'interdiction d'introduire dans les enceintes militaires des publications susceptibles de nuire au moral ou à la discipline. Mais ces restrictions n'étaient-elles pas déjà vidées de leur contenu, à l'heure d'internet, et quand on sait que les militaires n'ont jamais cessé de s'exprimer sous des pseudonymes?

Quant à l'interdiction d'adhérer à un groupement politique, à un syndicat, et de créer des associations professionnelles, ou d'y adhérer, elle est maintenue, alors que certains militaires militent sous des pseudonymes, et qu'ils peuvent être candidats à une fonction publique élective ou adhérer à un parti pendant la durée de la campagne, et la durée d'exercice du mandat. Certes, ils sont alors en disponibilité, mais comment imaginer qu'ils perdront leur identité politique sitôt l'armée réintégrée ? Rappelons tout de même qu'au nom de ce même devoir de neutralité, les militaires ont été privés jusqu'à la fin de la deuxième guerre mondiale du droit de vote !

Quant à considérer que cette interdiction participerait à la discipline et au loyalisme des militaires, et conforterait la confiance de la nation dans l'institution militaire, cette position est saugrenue, (« Oh ! » sur les bancs du groupe UMP) sauf à considérer que le loyalisme et la discipline des policiers sont remis en cause par leur adhésion à des partis ! Et la confiance de la nation dans la Cour des comptes a-t-elle été remise en cause par la nomination de Philippe Séguin à sa tête ?

Quant au droit de se syndiquer, il est acquis dans certaines armées, comme celles de l'Allemagne, de la Belgique, du Royaume-Uni. Là encore, le droit de se syndiquer était interdit aux fonctionnaires jusqu'à la fin de la seconde guerre mondiale, et l'Etat ne s'est pas écroulé depuis !

Pourquoi ne pas autoriser les militaires à adhérer aux confédérations syndicales reconnues, ce qui apparaît d'autant plus nécessaire que le dispositif de concertation que vous envisagez n'est qu'un toilettage du système existant, alors que le rapport Denoix de Saint Marc dénonce les dysfonctionnements des instances nationales et que les instances locales donnent entière satisfaction. Dès lors, pourquoi ne pas renforcer la représentativité des instances de concertation par la création d'une chaîne élective continue ?

Nous regrettons que le rapport préconise un système mixte combinant tirage au sort et élection, et que le projet renvoie cette question capitale à un décret en Conseil d'Etat. Je rappelle en effet que le système a montré ses limites, le CSFM de la gendarmerie n'ayant pas su empêcher la manifestation des gendarmes...

M. Jérôme Rivière - C'est surtout le ministre de l'époque qui en a été incapable !

M. Jacques Brunhes - Malgré ces avancées, ce texte comporte encore trop d'imperfections, que nous nous efforcerons de corriger. Dans l'hypothèse - malheureusement plausible - où nos amendements ne seraient pas retenus, nous ne pourrions approuver le projet du Gouvernement.

M. Jean-Yves Hugon - « Le statut qui nous est proposé correspond-il aux besoins des militaires français ? Si la question se pose - et elle apparaît comme fondamentale à la commission - il est très difficile d'y répondre avec précision. La société militaire, expression commode, comprend plus d'un million de membres, et sans doute plus d'un million et demi de retraités, veuves et orphelins. Si l'on élargit cette notion aux familles, c'est plus du quinzième de notre société qui est concerné par le texte dont nous sommes aujourd'hui saisis. C 'est dire son importance.» C'est en ces termes que s'exprimait à cette même tribune l'un des prédécesseurs du président Teissier, M. Joël Le Theule, rapporteur du texte de 1972. Trente-deux ans plus tard, il est tout à l'honneur du Gouvernement de soumettre au Parlement un nouveau statut général des militaires. Permettez moi, Madame la ministre, de vous en féliciter au nom du groupe UMP.

Depuis 1972, le statut général des militaires détermine les grands principes qui régissent l'état militaire, ainsi que les droits et sujétions qui l'accompagnent. Il devait être réformé, pour mieux prendre en compte les évolutions de nos armées, et, au premier chef, leur professionnalisation. Au cours des six dernières années une nouvelle armée s'est constituée et les conditions d'emploi des troupes se sont transformées. La nature du lien entre l'armée et la nation s'en est trouvée bouleversée, cependant qu'apparaissaient de nouveaux enjeux, tels que le recrutement ou la fidélisation du personnel. Le temps était donc venu d'élaborer un nouveau statut, pour prendre en compte ces mutations tout en respectant la spécificité du métier des armes. Il convenait aussi de mettre en phase le droit applicable et la société actuelle, à l'évidence très différente de celle de 1972.

Le présent projet de loi répond à cette ambition. Le nouveau statut général des militaires se présente sous la forme d'un texte clair et concis, regroupant en moins de cent articles une vingtaine de lois. Il reprend l'essentiel des propositions formulées par la commission Denoix de Saint Marc et tient compte de l'avis des divers conseils de la fonction militaire, associés aux différentes étapes de son élaboration.

Ce nouveau statut, que le groupe UMP soutiendra sans réserve, modernise les règles statutaires de gestion, afin de permettre aux armées d'assurer le renouvellement de leurs effectifs en nombre et en qualité, en améliorant la force d'attraction de la condition militaire et en favorisant la fidélisation des effectifs. Comme cela est déjà le cas pour d'autres catégories de fonctionnaires, la rémunération des militaires inclura désormais une part liée au mérite. La part de la solde attribuée au mérite comprendra deux fractions, la première étant individualisée et la seconde attribuée par unité, en fonction d'objectifs assignés au préalable. Le recrutement de volontaires et de militaires « commissionnés » - c'est-à-dire spécialisés dans des domaines très techniques - sera favorisé. L'article 89 du texte dispose que ces personnels pourront désormais servir quinze ans au lieu de dix, ce qui leur permettra de bénéficier d'une pension de retraite à jouissance immédiate.

En matière de gestion du personnel, le projet traduit la volonté du Gouvernement de rapprocher le statut du personnel de carrière de celui du personnel sous contrat. Le caractère de précarité du statut des militaires du rang et des sous-officiers subalternes, naguère pour partie justifié par leur faible niveau scolaire, semble de moins en moins légitime. Il est donc opportun d'aligner - autant qu'il est possible - le statut de ces personnels indispensables au bon fonctionnement des forces sur celui des militaires de carrière.

Préconisée par la commission de révision du statut général des militaires, la création d'un congé d'éducation, qui devait répondre aux souhaits d'une partie du personnel féminin, n'a finalement pas été retenue. Cette mesure, qui aurait introduit le travail à temps partiel dans les armées, n'a pas été jugée compatible avec le caractère opérationnel des forces.

Deuxième avancée portée par le projet, il renforce la mobilité professionnelle en améliorant les perspectives de reconversion. La modernisation des règles de gestion rend nécessaire un meilleur accompagnement des militaires vers la vie civile. Le texte prend en compte cet élément, en multipliant les passerelles entre le ministère de la Défense et le secteur civil. Ainsi, dans l'intérêt du service, un militaire peut être affecté auprès d'un établissement public de l'Etat, d'une collectivité territoriale, d'une organisation internationale, d'une entreprise privée ou d'une association. L'article 46 du texte précise qu'il reste alors en position d'activité.

Reprenant les propositions de la commission de révision, l'article 65 conforte le dispositif de reconversion. Une formation professionnelle peut ainsi être proposée à tous ceux qui ont servi au moins quatre ans, et elle pourra s'effectuer à l'occasion d'un congé de reconversion. Le dispositif est assorti d'une évaluation et d'une orientation, destinées à faciliter la reconversion vers un emploi civil. Des dispositions facilitant l'accès aux emplois réservés sont également prévues. Quatre « passerelles » vers la fonction publique sont ainsi ouvertes : le concours, le détachement, la sélection sur dossier et les emplois réservés. En contrepartie, un délai de préavis est instauré, la définition de sa durée étant renvoyée à un décret.

Troisième priorité, le nouveau statut général renforce les garanties accordées par l'Etat, en matière de couverture sociale et de protection juridique, pour tenir compte des risques particuliers encourus dans l'exercice normal du métier et dans l'usage de la force en cours d'opérations. L'un des principaux sujets de préoccupation de la communauté militaire tient à la couverture sociale de ses membres à l'occasion d'opérations extérieures. Les suites juridiques données à certains événements tragiques survenus ces dernières années hors du territoire national ont suscité des inquiétudes justifiées. La multiplication des opérations extérieures et l'augmentation du nombre de militaires mis en cause devant les juridictions pénales ont conduit le Gouvernement à proposer une évolution de la législation relative à la protection juridique des militaires et du régime disciplinaire qui leur est applicable.

Conformément aux recommandations de la commission de révision, le projet de loi pose le principe de l'imputabilité au service de toutes les blessures et de tous les décès survenus en toutes circonstances, entre le début et la fin d'une mission opérationnelle. Les articles 94 et 95 modifient en ce sens le code des pensions civiles et militaires. Cette réforme permettra aux militaires de bénéficier de garanties identiques à celles que la Cour de cassation reconnaît depuis plusieurs années aux salariés du secteur privé en mission à l'étranger, ce qui paraît pour le moins légitime, compte tenu des risques spécifiques du métier des armes. Le projet de loi accorde, et c'est justice, les mêmes protections aux militaires de carrière et aux militaires sous contrat, lesquels devaient jusqu'à présent se contenter de la modique solde de réforme, lorsqu'ils étaient obligés de quitter le service actif à la suite d'une incapacité résultant d'une blessure ou d'une maladie survenue en service avant d'avoir accompli cinq années de services effectifs.

Enfin, le texte supprime quelques dispositions anachroniques ou inapplicables en matière de droits civils et politiques et favorise la participation des militaires à la vie de la cité. Ainsi, il supprime la demande d'autorisation avant d'épouser un étranger ou l'obligation de déclarer la profession du conjoint. Les militaires seront libres d'exercer des responsabilités associatives, mais ils n'auront toujours pas la faculté d'appartenir à un groupement professionnel ou à un parti politique, ce qui serait contraire à certains principes fondamentaux en matière de discipline, de loyalisme et de neutralité.

Concernant le droit d'expression, il est également opportun que l'autorisation préalable soit supprimée : une disposition qui pouvait se comprendre dans une armée de conscription paraît moins justifiée aujourd'hui, d'autant que demeure l'obligation de réserve, laquelle est relative au sujet évoqué et proportionnelle à la responsabilité exercée. S'agissant de la concertation, le système actuel des conseils de la fonction militaire, s'il s'avère globalement satisfaisant, a besoin de voir ses modalités confortées. Ce sont les chefs d'état-major ou les directeurs de service qui les présideront en temps normal et non plus le ministre. Les membres du Conseil supérieur de la fonction militaire, présidé par le ministre, seront désignés parmi les conseils de fonction militaire d'armée, au sein desquels la liberté de parole doit être totale. Pour compléter le dispositif, une commission indépendante d'évaluation de la fonction militaire sera chargée de remettre périodiquement un rapport au Président de la République, afin d'apprécier les évolutions du statut et des rémunérations des militaires.

Ce projet de loi, mes chers collègues, n'est pas une révolution. Son ambition est de permettre aux forces armées de répondre aux défis des prochaines décennies, aussi bien dans le domaine de l'emploi des forces que dans celui de la gestion des ressources humaines. Faire de la politique, c'est souvent rechercher un équilibre. Nous sommes parvenus à un texte équilibré, susceptible de combler les attentes légitimes des militaires.

Je ne pouvais conclure, sans avoir, au nom du groupe UMP, une pensée émue pour nos soldats tombés récemment en Côte d'Ivoire et pour leurs proches. Je veux redire aussi notre reconnaissance à nos 13 000 militaires en opérations extérieures sur les cinq continents. Dans des conditions matérielles souvent difficiles, ils luttent contre le terrorisme et contre les narcotrafiquants, soutiennent des opérations à caractère humanitaire, assurent la protection des populations civiles et participent aux opérations de maintien de la paix, portant - partout où cela est nécessaire - haut et fort les couleurs de notre drapeau.

Merci également à tous ceux qui ont contribué à l'élaboration puis à la discussion de ce texte, et à notre président Guy Teissier, dont chacun apprécie la bienveillante autorité et le sens du dialogue. Madame la ministre, nous vous sommes reconnaissants de nous donner l'occasion d'écrire ensemble une page qui marquera l'histoire parlementaire. Permettez-moi de laisser la conclusion à l'un de vos illustres prédécesseurs, Michel Debré, disant du haut de cette tribune : « Au-delà des dispositions que nous étudierons tout à l'heure, ce soir ou demain, et des votes sur tel ou tel article, le fond de l'affaire est le soutien que je demande au Parlement, pour l'approbation d'un texte qui est à la fois, je le crois, un beau moment juridique, mais avant tout l'affirmation que les pouvoirs publics ont conscience de ce que représentent éternellement l'Armée et ceux qui la servent, pour le bien de la République et de la nation ». (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Claude Viollet - Le statut général de 1972 fixe l'essentiel des dispositions qui régissent l'état militaire. Naturellement, les évolutions ayant affecté notre société au cours des trois dernières décennies justifient sa modernisation.

Le contexte géostratégique aussi, et par voie de conséquence les finalités et l'organisation même de notre défense : la conscription a été suspendue, notre armée s'est professionnalisée et féminisée, les personnels civils y sont plus nombreux, son format et sa doctrine d'emploi se sont modifiés, la réserve a pris une place plus active dans l'opérationnalité permanente de nos forces, le lien armée entre l'armée et la nation n'est plus le même...

Tout cela ne pouvait que conduire à s'interroger sur la place nouvelle des militaires dans notre organisation sociétale et à examiner les modifications à apporter à leur statut, étant entendu que nous ne révisons pas le statut pour deux ou trois ans mais plutôt pour vingt ou trente. Sur votre commande, Madame la ministre, une commission de révision du statut général des militaires, présidée par M. Renaud Denoix de Saint Marc, a été constituée pour ce faire. C'est sur la base de ses recommandations qu'a été élaboré le présent projet. Nul doute qu'il marque une évolution par rapport au statut de 1972 mais reconnaissons que c'est bien là le moins que l'on pouvait en espérer.

Un certain nombre de dispositions, particulièrement anachroniques, voire inapplicables - je pense en particulier au régime de l'autorisation préalable, qui limite le droit d'expression des militaires - vont ainsi être supprimées, tandis que d'autres vont être renforcées ou modernisées.

Pour autant, nous ne pensons pas que la réforme proposée, au-delà du mérite qu'elle a déjà d'exister, marque une évolution aussi importante que le prétend l'exposé des motifs et, en tout cas, qu'elle permette, en l'état, à nos forces armées de répondre aux défis des prochaines décennies, aussi bien dans leur domaine d'emploi que dans la gestion de leurs ressources humaines, voire dans la participation de nos militaires à la vie civile et politique.

Mais la qualité des travaux menés par notre commission de la Défense nous laisse à penser, Madame la ministre, Monsieur le rapporteur, que nous pouvons encore, ensemble, en sagesse, faire progresser ce texte.

Je ne prendrai ici que quelques exemples, en partant pour l'essentiel des amendements que j'ai personnellement défendus en commission ou auxquels je me suis finalement rallié.

S'agissant des dispositions statutaires, je pense que nous devrions adopter, à l'article premier, le principe, qui a recueilli l'accord de notre commission, de la création d'un Haut comité d'évaluation de la condition militaire, dans lequel le Parlement serait représenté, et qui, avec toute la solennité voulue et l'indépendance souhaitable, établirait périodiquement un rapport adressé au Président de la République, chef des armées, et soumis au débat de nos deux assemblées.

S'agissant des droits civils, je persiste à penser que nous devrions préciser, à l'article 4, pour respecter tout à la fois le principe constitutionnel de laïcité et la loi du 9 décembre 1905 sur la séparation des Eglises et de l'Etat, que si les opinions et croyances ne peuvent être exprimées qu'en dehors du service et avec la réserve exigée par l'état militaire, cette règle ne fait pas obstacle au libre exercice des cultes, et non du culte, dans les enceintes militaires.

Tout comme je pense que nous aurions intérêt à préciser dès à présent, à l'article 8, les conditions spécifiques dans lesquelles la responsabilité pécuniaire des militaires peut être engagée, en application de l'article 37 de la loi organique relative aux lois de finances.

S'agissant de la rémunération, nous devrions écrire qu'un militaire dont l'affectation entraîne des difficultés de logement, comme c'est souvent le cas en région parisienne, et plus encore pour les militaires du rang ou les sous-officiers, bénéficie de plein droit d'une aide appropriée - et non pas peut en bénéficier. A l'article 11, je pense que nous devrions ouvrir aux anciens militaires titulaires d'une pension d'invalidité l'accès aux soins du service de santé des armées, ainsi qu'à l'aide du service chargé de l'action sociale des armées.

A l'article 12, notre commission a accepté le principe d'un élargissement de l'utilisation des fonds de prévoyance militaire et aéronautique, de façon à faire face à des situations sociales exceptionnelles.

En ce qui concerne la protection juridique et la responsabilité pénale, l'article 17 constitue à l'évidence une avancée, mais il me semble, au vu de plusieurs événements survenus récemment en OPEX, qu'il conviendrait de relier plus étroitement le droit international, visé par ce texte, et les règles d'engagement, fixées ou approuvées par l'autorité nationale.

A l'article 18, nous devrions, à défaut d'ouvrir le débat sur de nouvelles formes d'organisation et de représentation des militaires, adopter la proposition de notre commission de renforcer la capacité de dialogue au sein de l'armée professionnelle en faisant des structures actuelles de consultation de véritables outils de concertation.

Il me paraît indispensable, au nom d'une fraternité d'armes qui ne saurait cesser avec l'activité, de rétablir à l'article 45 les retraités, nommément cités dans la loi Debré de 1972. A défaut de figurer dans le présent texte, ils pourraient disparaître du CSFM, alors que leur présence y avait été précisément obtenue par le Parlement dans la loi de 1969, et pourraient même craindre, à plus long terme, de se voir exclus de la Caisse nationale de sécurité sociale militaire.

Sachant que la féminisation de nos armées croît très régulièrement, puisqu'elle est passée de 7,4 % en 1993 à 12,5 % en 2003, il serait utile d'intégrer à l'article 46 le congé parental d'éducation sans solde, suivant en cela les recommandations de la commission Denoix de Saint Marc, du CSFM et du Conseil économique et social.

S'agissant de la non-activité, il conviendrait de modifier la rédaction de l'article 56 de telle sorte que le militaire de carrière conserve l'intégralité de sa solde jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à sa mise en retraite, lorsque l'affection dont il est atteint est survenue du fait ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, ou à la suite de l'une des causes exceptionnelles prévues par les dispositions de l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite.

La notion de blessures reçues par suite d'accidents survenus entre le début et la fin d'une mission opérationnelle étant trop restrictive, il conviendrait d'étendre les dispositions de l'article 95 aux autres dommages spécifiques, atteintes ou maladies, accompagnant plus qu'hier les conflits et les crises d'aujourd'hui.

Vous le voyez, Madame la Ministre, ce projet, qui constitue indéniablement une avancée, peut et doit être encore sensiblement amélioré.

Mais il est malheureusement un point sur lequel ce nouveau statut sera une occasion manquée : le plein exercice de la citoyenneté.

Cette question du statut des militaires et de la citoyenneté n'étant pas nouvelle, permettez-moi de rappeler quelques étapes.

Après s'être vus reconnaître le droit de vote - qui allait de pair avec l'éligibilité - par le décret du 5 mars 1848, les militaires en ont été privés par la loi du 27 juillet 1872. Sitôt cette loi votée, le Parlement s'attaquait à restreindre, puis suspendre le droit à l'éligibilité des militaires en activité, ce qui fut fait par l'article 7 de la loi organique du 30 novembre 1875, qui confirmait en son article 2 leur perte du droit de vote, une situation qui devait durer soixante-dix ans.

En effet, une proposition de loi déposée en 1894 par un député socialiste, Jules Guesde pour tenter de « réintégrer l'armée nationale dans la nation en lui rendant le droit de vote » fut massivement rejetée, tandis qu'une dernière tentative, lancée en 1898 par un autre député socialiste, Fournière, en pleine affaire Dreyfus, échouait également.

La loi du 21 mars 1905 sur le recrutement, qui consacrait l'égalité de tous devant l'« impôt du sang », principe démocratique s'il en fut, n'évoquait même pas la question du droit de vote, et il a fallu attendre la fin de la deuxième guerre mondiale et l'ordonnance du 17 août 1945 pour que les droits politiques soient de nouveau accordés aux militaires, sans que leur soient pour autant reconnus les mêmes droits d'expression et d'activité politique qu'aux autres citoyens.

Une situation qui perdure encore puisque, si l'article 3 de votre projet pose comme postulat que « les militaires jouissent de tous les droits et libertés reconnus aux citoyens », l'article 5 leur interdit d'adhérer à des « groupements ou associations à caractère politique», tout en précisant que « les militaires peuvent être candidats à toute fonction publique élective », alors même que l'article L. 46 du code électoral dit que « la fonction de militaire de carrière ou assimilé, en activité de service ou servant au-delà de la durée légale, est incompatible avec les mandats qui font l'objet du titre I », à savoir députés, conseillers généraux et conseillers municipaux.

La marche est encore plus lente pour les droits sociaux, puisque l'article 6 précise que « l'existence de groupements professionnels militaires à caractère syndical ainsi que l'adhésion des militaires en activité de service à des groupements professionnels sont incompatibles avec les règles de la discipline militaire». Reste à savoir ce qu'il faut entendre par « groupement professionnel militaire », notion dont le code du travail comme la loi de 1901 ne disent rien.

Plus globalement, chacun voit bien que l'évolution des droits politiques et syndicaux des militaires accompagne l'évolution sociale générale. Et c'est précisément pour cette raison que devait être révisée la loi du 13 juillet 1972 portant statut général des militaires, élaborée à la suite de la guerre d'Algérie, après le choc de 1968, dans le contexte d'une refonte visant à adapter nos forces armées aux conditions de la guerre froide.

Parce que notre société a évolué et que nos armées ont connu, elles aussi, de profondes mutations avec la professionnalisation, avec la multiplication des OPEX, avec la construction d'une défense européenne, avec la féminisation et avec l'importance accrue prise par les personnels civils et les réservistes, je ne puis qu'approuver la suppression de l'autorisation préalable prévue à l'article 7 du statut de 1972, ainsi que l'application du régime de droit commun de la fonction publique pour la liberté d'expression individuelle. Chez les militaires, le sens des responsabilités n'est pas moindre, en effet, que chez les autres agents publics.

Je suis de même favorable à la suppression de la possibilité offerte jusque là au commandement, par l'article 8, d'interdire certaines publications dans les enceintes militaires - la disposition était d'ailleurs tombée de facto en désuétude et le développement des NTIC en rendait la portée plus qu'illusoire.

J'approuve également la suppression de l'autorisation préalable au mariage avec un conjoint étranger et de l'obligation de déclarer la profession du conjoint ; la levée, sauf pour les gendarmes, de l'incompatibilité entre état militaire et fonctions de juré ; ou encore la suppression de l'obligation de déclarer les responsabilités assumées dans une association.

En revanche, je suis plus réservé sur d'autres dispositions, tel le maintien de l'interdiction de constituer des groupements à caractère syndical, d'adhérer à une organisation professionnelle ou à un parti politique, ou d'exercer un mandat électif. Sur tous ces points, il vaudrait mieux organiser l'évolution plutôt que de la subir ! En effet, les instances de concertation actuelles ont montré leurs limites, à l'occasion des manifestations des unités de l'armée de terre dans les années 1970 ou des manifestations de gendarmes avec matériel et en uniforme, en 2001. A vouloir une fois de plus clore le débat avant de l'avoir vraiment ouvert, on fraie la voie à des corporatismes qui, à terme, pourraient bien embarrasser le commandement.

Dans le prolongement des premiers pas réalisés par la gauche en 2000 et 2001, avec l'élection des présidents de catégories par leurs pairs, on pourrait commencer par renoncer à tout tirage au sort pour ne retenir que l'élection, s'agissant de composer les instances et leur bureau, qui devrait être maître de l'ordre du jour. On pourrait aussi, en allant au-delà du haut comité d'évaluation de la condition militaire inspiré d'une proposition de la commission Denoix de Saint Marc, créer une instance de médiation qui ne ferait pas concurrence aux instances représentatives, mais à laquelle les militaires pourraient s'adresser et qui aurait droit de regard sur les CFM et CSFM. Cependant, le simple fait de renoncer au tirage au sort au profit de l'élection nous renvoie bien évidemment au débat sur la capacité d'organisation des militaires en activité...

Quant à l'interdiction d'adhérer à un parti politique, elle me semble avoir été suffisamment détournée pour que, là aussi, on envisage sérieusement de revenir au principe de réalité en alignant les droits des militaires en activité sur le droit commun de la fonction publique d'Etat, sous réserve de la neutralité de rigueur. Notre Constitution ne reconnaît-elle pas les partis, affirmant qu'« ils concourent à l'expression des suffrages » ?

Il me semblerait également utile de revenir sur l'interdiction de fait d'exercer une fonction élective : l'obligation dans laquelle se trouve actuellement le militaire en activité de se placer en position de service détaché pour exercer un mandat est en effet rédhibitoire, notamment pour les mandats locaux. Cela pourrait se faire, je pense, dans le respect des spécificités de la fonction militaire, au prix de quelques restrictions qui ne sont pas sans équivalent dans le reste de la fonction publique d'Etat.

Telles sont les réflexions dont je tenais à faire part sur ce projet. Puissent nos débats nous permettre de décider utilement, afin de soutenir le mouvement de réforme de la société militaire. Cela devrait à mon sens nous obliger à sortir du « cantonnement juridique » actuel si nous voulons que nos militaires soient pleinement citoyens en même temps que pleinement soldats. Je suis en effet persuadé qu'ils sauraient s'impliquer davantage dans la vie sociale et politique de notre pays, au bénéfice de la compréhension par tous des impératifs de défense et du lien armées-nation.

Quant à notre position sur ce texte, après une « abstention favorable » en commission, elle sera bien entendu fonction des avancées que nous aurons effectuées ensemble au cours du débat, mais elle ne saurait rien enlever au soutien que nous donnons, avec toute l'Assemblée, à notre armée. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs autres bancs)

M. Jérôme Rivière - Par ce texte, vous nous demandez, Madame la ministre, de tirer les conséquences de la loi de 1996 qui a mis fin à la conscription. Vous me permettrez de dire, d'une phrase, que je m'interroge parfois sur le bien-fondé de cette professionnalisation : trop souvent, semble-t-il, nos militaires sont perçus comme des salariés remplissant une mission anodine, parce que nos concitoyens ne sentent plus le lien entre armée et nation. Toutefois, je vous sais attachée au maintien de ce lien, en particulier au travers d'une politique dynamique des réserves opérationnelles.

La professionnalisation appelait évidemment cette réforme et, travaillant sur la base des propositions de la commission Denoix de Saint Marc, vous vous êtes donné le temps de la réflexion tout comme vous l'avez laissé ensuite au Parlement. Vous nous proposez aujourd'hui plusieurs changements : les militaires ne seront plus obligés de déclarer la profession de leur conjoint ni de demander l'autorisation de se marier avec un étranger ; s'agissant des droits civiques et politiques, même si l'armée n'est plus depuis longtemps la grande muette, et si les militaires disposent depuis plus d'un demi-siècle du droit de vote, les simplifications que vous nous soumettez éviteront une plus longue hypocrisie à bien des chefs de corps - nous vous soumettrons toutefois des amendements à l'article 6 afin de faciliter la participation à la vie associative, étant entendu que nous excluons comme beaucoup l'adhésion publique et militante à un parti : la carrière militaire implique des sujétions particulières, dont la neutralité.

Je consacrerai l'essentiel de mon propos, cependant, aux améliorations à apporter au cadre juridique dans lequel nos militaires participent à des opérations extérieures. Les troupes engagées sous les couleurs nationales ou pour le compte d'institutions internationales sont en effet confrontées à des risques susceptibles d'affecter leur capacité même à remplir leur mission : l'exemple le plus caricatural et le plus triste en même temps pourrait en être l'incapacité où se sont trouvées les troupes américaines d'arrêter ou abattre le mollah Omar, en raison des incertitudes pesant sur le cadre juridique d'une telle interception. La même situation pourrait se présenter pour l'armée de n'importe quel autre pays, au profit de dangereux terroristes...

A l'article 17, vous proposez de demander au juge de ne pas rechercher la responsabilité pénale du militaire qui, dans le respect du droit international, aurait exercé des mesures de coercition ou fait usage de la force armée lorsque sa mission l'exigeait. La campagne odieuse menée contre nos soldats engagés en Côte d'Ivoire vaut que nous nous attardions un instant sur ce point. Si cette proposition constitue une avancée certaine, la notion de droit international apparaît très mal définie. Elle ne recouvre pas exclusivement des traités et des conventions et certains vont même jusqu'à y inclure les us et coutumes : faudrait-il alors comprendre que, là où le viol est un usage de guerre, nos soldats seraient en droit de s'y livrer ? Evidemment non, et un bouclier supplémentaire me paraît s'imposer : en cas de conflit entre les règles d'engagement formulées par l'autorité dont ils dépendent et des notions de droit international, il appartiendrait aux politiques et à la hiérarchie militaire d'en assumer la responsabilité. Ces règles sont le plus souvent couvertes par le secret-défense. Ainsi, selon la volonté du pouvoir politique, elles pourraient être, en totalité ou partiellement, déclassifiées.

Quoi qu'il en soit, notre discussion démontrera, j'en suis certain, que nous n'entendons pas laisser nos militaires soumis à la seule règle de la légitime défense.

Ce projet, raisonnable et consensuel, ne constitue pas une révolution, certes, mais il fallait montrer aux hommes et aux femmes qui portent les couleurs de notre pays dans le cadre de missions indispensables et difficiles que nous avions à cœur de leur donner, en sus des moyens financiers votés il y a quinze jours, un statut moderne et efficace qui les mettra encore mieux à même de servir la France. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP)

M. Charles Cova - Les précédents orateurs ayant décrit avec minutie l'architecture de ce projet, je n'y reviendrai pas, préférant m'attarder sur l'état d'esprit de nos soldats au moment où nous délibérons d'un statut qui pourrait bien leur être appliqué, comme le précédent, pendant trente années !

En 2000, rapportant sur la professionnalisation, M. Grasset et moi-même nous étions fait l'écho de leurs inquiétudes. Personnellement, j'avais mis l'accent sur le sentiment qu'ont ces militaires d'être mal aimés du pouvoir politique et trop peu défendus par leur hiérarchie. Les militaires et anciens militaires avec lesquels je suis en contact ont donc étudié le présent projet avec un intérêt tout particulier : si leur avis est plutôt favorable dans l'ensemble, ils ont approuvé plusieurs amendements de la commission et, en premier lieu, à l'article premier, celui qui porte reconnaissance de cette spécificité qu'est le consentement au sacrifice suprême.

Ils approuvent de même notre proposition de créer un Haut Comité de la condition militaire : indépendant, celui-ci sera le gage d'une considération au plus au niveau de l'Etat. Toutefois, je pense pour ma part que cette instance ne devrait comporter en son sein ni militaires ni parlementaires, afin d'éviter que la condition militaire soit l'enjeu de luttes politiques.

L'amélioration de la concertation est indispensable si l'on veut que le Conseil supérieur de la fonction militaire ne soit plus considéré comme une simple chambre d'enregistrement.

Mais il reste aussi à adopter des mesures qui, pour être symboliques, n'en sont pas moins importantes : je pense à la réintroduction aux grades de la marine ou à la reconnaissance des retraités - écarter ces derniers du statut serait nier l'idée même de collectivité militaire et nos anciens ne méritent pas cela !

D'autres points méritent d'être approfondis pour ne pas décevoir une attente forte. En effet, si les militaires n'ont pas l'habitude de s'adresser à leur député, certains m'ont fait part de leurs craintes et de leur souhaits, en ma qualité d'ancien officier supérieur. Des camarades d'active m'ont aussi fait parvenir des lettres non signées. En accord avec votre cabinet, dont je salue la parfaite collaboration, des réponses ont été apportées à ceux qui signaient leur courrier.

Je déposerai un amendement pour renforcer le lien entre l'armée et la nation en mettant en place des commissions extra-municipales. La commission l'a repoussé au motif que cela existe dans certaines communes ; j'y reviendrai. Je présenterai également un amendement permettant à des militaires en activité d'adhérer à des associations, dans des conditions strictes. Certes, il ne conviendrait pas de laisser agir des groupements subversifs ou professionnels qui ne disent pas leur nom. Mais le nouveau statut doit marquer une avancée significative sur ce point, ou vous devez nous donner des explications sans ambiguïté sur la possibilité pour les militaires en activité d'adhérer aux associations d'anciens militaires.

Mon souhait est surtout que nous rendions au monde militaire la place qui est la sienne dans la nation, en sachant bien que ce qui était supportable pour nos soldats il y a trente ans ne l'est plus aujourd'hui. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Louis Léonard - Il a fallu 32 ans pour que la représentation nationale s'intéresse de nouveau à la condition de ces hommes et femmes dévoués et courageux qui défendent la sécurité nationale ou celle de nos ressortissants. Je remercie donc le Président de la République, et vous-même, Madame la ministre, d'avoir engagé dès 2002 une réflexion sur la place des militaires dans notre société. L'évolution de celle-ci, comme celle du monde, la professionnalisation de notre armée et l'échec de la loi de 1972 rendaient nécessaire de réviser le statut des militaires, avec des enjeux nouveaux comme la fidélisation du personnel.

Le projet reconnaît les droits civils et politiques, améliore les garanties des militaires, renforce la concertation. Mais il est fondamental de réaffirmer dans le projet que les fondements de l'état militaire sont l'esprit de sacrifice, la disponibilité, la neutralité, la discipline et la loyauté. Surtout, il ne faut pas manquer l'occasion de renouveler le contrat moral entre l'Etat et ses militaires, de renouveler le lien entre l'armée et la nation, de rétablir un climat de confiance mis à mal par la négligence coupable des gouvernements socialistes. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste)

M. Gilbert Le Bris - Est-il bien nécessaire de polémiquer ainsi ?

M. Jean-Louis Léonard - Nous devons tirer les leçons de l'échec du précédent statut et réaffirmer la spécificité du monde militaire.

Je souhaite insister sur la création d'une instance d'évaluation de la condition militaire, essentielle aux yeux des militaires qui veulent sortir d'une logique corporatiste. Ce haut comité servira de baromètre sans interférer avec le conseil supérieur de la fonction militaire. La commission de la Défense a adopté un amendement que j'avais déposé avec M. Vitel et M. Baulieu, pour préciser que le Parlement devra être représenté au sein de ce comité. Parmi les autres membres, nommés par décret, je vous demande, Madame la ministre, de choisir aussi bien des responsables d'administration que des anciens combattants ou des personnalités qualifiées. Les rapports annuels de cet organe indépendant permettront, je l'espère, de ne plus attendre des décennies avant de faire évoluer les choses. Ce haut comité sera aussi un lien supplémentaire entre la nation et son armée.

S'agissant des droits et obligations des militaires, le texte souligne leur esprit de responsabilité et valorise leur place dans la société. Pour certains irresponsables, il a le tort de ne pas leur reconnaître le droit d'adhérer à des partis politiques ou des syndicats et de restreindre leur liberté de circulation. Mais l'intérêt du service doit primer sur certaines libertés individuelles.

Quant à la responsabilité des militaires en opération, je regrette que l'article 17 se réfère au droit international pour l'encadrer. En effet, il ne s'agit pas d'un corpus juridique bien défini. Nous avons déposé un amendement pour lier plus étroitement le droit international et les règles d'engagement qui doivent toujours être approuvées par l'autorité dont dépend le militaire. J'espère que vous y donnerez un avis favorable.

Les dispositions concernant les protections et garanties répondent largement aux attentes des militaires. Mais on ne peut admettre la rémunération en fonction des résultats individuels. En effet, la réussite est toujours collective. D'ailleurs, les militaires ne demandent pas cette rémunération au mérite et préféreraient une progression de leurs indices plus proche du monde civil. Cette prime au mérite ne peut que porter atteinte à l'esprit de solidarité de notre armée. On pourrait, tout au plus, l'imaginer pour les gendarmes, mais ce serait rapprocher dangereusement leur statut de celui de la police. J'ai déposé plusieurs amendements à ce sujet.

Le texte prévoit aussi une meilleure politique de recrutement, de gestion des carrières et d'aide au départ. Il faudra tenir compte du fait que ces hommes, qui servent la nation avec toute leur âme, vivent parfois mal le fait de devoir quitter très tôt la fonction militaire. Et que dire du décret du 18 juin 2004 sur la retraite complémentaire qui prévoit de reverser les cotisations non pas lors du départ en retraite mais à 60 ans seulement ! C'est inacceptable, et j'attends que les organes de concertation y réfléchissent pour trouver les solutions qui conviennent à tous.

Pour terminer, je salue le Gouvernement pour son esprit d'initiative, et le rapporteur et la commission pour avoir su réaliser un consensus. Réserviste dans la marine nationale, je suis directement concerné...

M. Gilbert Le Bris - Vous n'êtes pas le seul !

M. Jean-Louis Léonard - ...et j'attends ce statut avec impatience, même si je sais que vous préparez un dispositif spécifique pour la réserve. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Michel Boucheron - Le métier militaire ne sera jamais un métier comme un autre, ni l'armée un service de l'Etat comme les autres. Le militaire n'est pas un policier plus lourdement armé, et l'armée intervient uniquement dans les situations de crise. Banaliser son rôle serait une erreur. Néanmoins, il convient de préserver les droits de nos soldats.

Il fallait d'abord tenir compte du nouveau contexte stratégique. S'agissant des dommages, le statut de 1972 ne vise que l'état de guerre. Or, les opérations extérieures ne sont pas un état de guerre, mais pas non plus de simples opérations de maintien de l'ordre. Il fallait donc étendre la protection des militaires, trop restrictive, à la notion de participation aux opérations. Etendre aux autres militaires et à leurs familles la protection dont bénéficiaient les gendarmes contre les injures, voies de fait et diffamations, est aussi un progrès. Lier l'usage de la force au droit international est une adaptation nécessaire au monde actuel.

S'agissant des droits civiques, l'armée ne peut être le lieu de luttes syndicales, de divisions philosophiques, de joutes politiques ou de campagnes électorales (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP) Il fallait faciliter le dialogue, mais il n'y a pas d'action syndicale sans droit de grève. Est-on prêt à accepter une telle situation dans l'armée ? Non. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean Michel - Très bien.

M. Jean-Michel Boucheron - Pour construire d'autres organes de concertation, le tirage au sort rend impossibles les campagnes électorales tout en rendant possible le choix libre de représentants. Par ailleurs, les procédures du CFM et du CSFM doivent être élargies et publiques. Les associations de conjoints, de retraités, les amicales, sont aussi des lieux utiles de réflexion et de proposition. Nous souhaitons vivement que les retraités participent au CSFM et bénéficient de la caisse de sécurité sociale militaire.

Enfin, il y a l'éternel débat sur les droits civiques des militaires. Vous avez à juste titre desserré l'étau en pariant sur leur responsabilité. Les militaires peuvent s'exprimer : à eux de ne pas outrepasser ces limites que sont le « confidentiel défense » et le devoir de réserve. Je suis prêt à parier qu'il n'y aura aucun problème.

La participation directe des militaires à la vie politique est une question plus délicate. Le texte est très dur quant à l'adhésion éventuelle à des partis politiques. Un tel engagement ne me dérangerait pas, à condition de ne pas en faire la publicité. Il est évidemment impératif qu'il n'y ait pas une armée de droite ou de gauche, d'extrême droite ou d'extrême gauche, même si ce dernier cas de figure me parait improbable (Sourires) : l'armée doit être celle de la nation tout entière.

Vous présentez un texte moderne et prudent qui évite le verrouillage et les écueils de la mode. Nous pourrons y adhérer. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe UMP)

M. Yves Fromion - La réforme était indispensable : la professionnalisation de l'armée, la mixité des unités, l'évolution de la société et des modes d'engagement de nos forces, en particulier lors d'engagements sous mandat ou sous commandement international, impliquaient de repenser le cadre juridique dans lequel nos armées interviennent. Ainsi, qui pourrait dire, à lire les différents commentateurs, si nos armées agissent en Côte d'Ivoire sous commandement national ou de l'ONU ? Ceci témoigne de la confusion qui règne dans les esprits. Vous avez donc eu raison, Madame la ministre, de proposer ce nouveau statut. Je vous félicite en outre de la méthode que vous avez employée : l'ouverture d'esprit dont vous avez fait preuve illustre votre volonté de résoudre les problèmes réels qui se posent aux militaires.

Le projet maintient tout d'abord un certain nombre de limitations quant aux droits civils et politiques. Nos concitoyens sont attachés à la neutralité de l'Etat et de ceux qui le servent. Certains collègues considèrent que des militaires pourraient adhérer à un parti politique à condition de n'en pas faire la publicité, mais peut-on faire des partis politiques des officines opaques pour des citoyens clandestins ? Non. Toute demi-mesure serait néfaste.

Certains évoquent également la participation à la vie des collectivités locales. Mais je rappelle que les maires élisent les sénateurs, et que lors des campagnes électorales nationales, tous sont invités à prendre parti. Ne faisons donc pas d'angélisme !

Enfin, concernant l'expression syndicale, imaginons ce qui aurait pu se passer en 2001 lorsque nos forces armées ont été touchées par un mouvement de protestation. Peut-on encourager une contestation professionnelle, avec toutes ses conséquences sur le commandement, la vie des unités ?

M. Jean Michel - Ils ont manifesté avec leurs véhicules !

M. Yves Fromion - Doit-on l'accepter ? Non. Gardons-nous de toute considération théorique : notre débat porte sur les conditions de vie concrètes des militaires et rien ne serait pire que de créer un climat intellectuel qui ne correspondrait pas à leurs attentes car ceux qui se sont exprimés n'ont pas revendiqué des droits civils et politiques supplémentaires.

Nous voterons un texte qui répond aux demandes réelles des militaires et aux exigences de la République. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Mme Marguerite Lamour - Ce projet permet de prendre en compte les évolutions de la société au cours des dernières décennies. Il simplifiera le statut des militaires, et s'il ne constitue pas une révolution, il permet de nous adapter aux objectifs que nous nous sommes fixés pour nos armées. Le chef de l'Etat, qui a lancé en 1996 la professionnalisation des armées, a souhaité revoir le statut des hommes et des femmes qui les composent. Cette réforme démontre son attachement et le vôtre, Madame la ministre, à nos armées. Elle s'inscrit dans le droit fil de la loi de programmation militaire 2003-2008 qui a permis de redonner confiance aux armées grâce aux nouveaux moyens matériels qui leur ont été alloués. Il convenait, dans un second temps, de se pencher sur l'attractivité des armées et d'œuvrer à la fidélisation des hommes et des femmes qui les servent. Le texte réaffirme un certain nombre de principes auxquels nos militaires sont attachés - discipline, loyauté, neutralité et disponibilité - mais il expose également des prérogatives nouvelles qui répondront, je l'espère, à leurs attentes : meilleure couverture juridique et sociale, mais aussi possibilité d'effectuer un certain nombre d'actes citoyens.

Je suis très attachée à nos quatre armées, mais vous comprendrez aisément qu'en ma qualité de députée de Brest, j'accorde une attention particulière au statut des marins et plus précisément au maintien des appellations de leur grade. Tel est le sens des amendements à l'article 19 que j'ai cosignés. Ces appellations figurent dans le statut de juillet 1972 ; il est prévu qu'elle fassent l'objet d'un décret qui serait pris en application de cette nouvelle loi. Ne pas faire droit à leur demande serait faire offense à ces hommes et ces femmes qui ont donné, tout comme ceux des trois autres armées, le meilleur d'eux-mêmes et parfois leur vie pour notre patrie.

Cette loi permettra de moderniser nos armées. Les amendements que nous lui apporterons enrichiront son contenu. Grâce à vous, notre armée retrouvera très vite la place qu'elle n'aurait jamais dû quitter sur la scène internationale, et je vous en remercie. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Gilbert Le Bris - Les militaires sont extravertis : ils pensent à leurs missions, aux relations avec leurs supérieurs ou leurs subordonnés, à l'environnement humain dans lequel ils évoluent. Ils pensent peu à leur statut, et ils n'ont guère le temps d'avoir des états d'âme. Aux droits, ils préfèrent les devoirs. Au moment où l'on reproche parfois à certains civils de penser surtout à leurs droits, les militaires représentent souvent des exemples à suivre par la conscience avec laquelle ils font leur travail. Mais dans leur grande majorité, ils se préoccupent assez peu de leur statut. Raison de plus pour que la représentation nationale s'en préoccupe à leur place.

Il fallait donc revoir le statut de 1972 dans ses aspects les plus obsolètes. Il faudrait d'ailleurs procéder à des révisions périodiques, pour ne pas laisser se creuser l'écart avec l'ensemble de la société - car c'est avec des civils que l'on fait des militaires, et s'ils doivent bien sûr s'adapter à la structure qui les accueille, ils ne manquent pas néanmoins d'y apporter l'état d'esprit de l'époque.

Ce projet représente une évolution positive à bien des égards, et il a été utilement amendé en commission, en particulier à l'article 19 : la disparition des grades de la Marine constituerait non seulement une erreur, mais une faute juridique, historique et psychologique. J'apprécie aussi, à l'article 45, la réintroduction de la position « en retraite », qui figurait à l'article 52 du statut de 1972.

Au moment où nous cherchons à aller vers une défense européenne commune, il faut éviter les décalages avec ce qui se fait chez nos voisins. Certes le métier des armes a des contraintes particulières : disponibilité, qui écarte bien sûr le droit de grève et de manifestation ; discipline ; loyauté, qui implique la neutralité politique dans le service. Mais si l'on veut éviter la syndicalisation, il faut soigner la concertation ; or, force est de constater que les militaires ont un discours critique sur son déroulement et ses résultats. Ils ne peuvent pas se contenter d'un échange de monologues avec l'administration. Nous le savons aujourd'hui, même le respect de la discipline est amélioré par le dialogue ; la concertation doit donc être crédible.

Pour cela, il faut que les représentants aient une véritable légitimité et que leur immunité soit assurée - sinon, pour reprendre un mot célèbre, chacun choisira l'ennui plutôt que les ennuis ! La méthode de l'élection doit donc être retenue à tous les niveaux et dans chaque instance de représentation. Une certaine maîtrise de l'ordre du jour est également nécessaire pour tout ce qui concerne la condition militaire.

Reconnaissance, garanties et salaires compétitifs sont les clés d'une bonne adaptation de l'armée aux défis du XXIe siècle. Toutes les modifications du statut des militaires répondant à ces exigences vont bien dans le sens d'une armée moderne et motivée par le service de la nation (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Charles Cova - Très bien !

Mme Françoise Branget - Ce projet adapte le statut des militaires aux évolutions de la société, tout en réaffirmant les principes intangibles qui garantissent l'efficacité de notre armée. Il était devenu indispensable de revoir le statut de 1972, notamment pour tenir compte de la multiplication des interventions françaises à l'étranger et de la professionnalisation de nos armées, d'ailleurs réalisée avec une grande efficacité : peu d'institutions ont réussi en si peu de temps une transformation aussi profonde. Celle-ci n'aurait pas été possible si l'engagement des militaires n'avait pas été total, et il faut les en féliciter.

Ce texte représente plus un « changement dans la continuité » qu'une rupture avec le statut de 1972. S'agissant des restrictions de libertés, celles qui concernent la liberté d'opinion et de croyance sont inchangées - expression en dehors du service et avec la réserve exigée par l'état militaire. L'interdiction d'adhérer à un groupement politique ou de recourir au droit de grève est également maintenue, de même que l'interdiction d'adhérer à un syndicat ou de créer des associations professionnelles. L'autorité militaire peut également contrôler les moyens personnels de communication et d'information comme le téléphone portable ou internet ; il s'agit moins de restreindre les libertés individuelles que de garantir le caractère opérationnel des forces et de protéger les militaires contre d'éventuelles indiscrétions.

Tout militaire qui s'engage est conscient de l'utilité de ces dispositions. Il mérite pour ces sujétions le respect de ses concitoyens et la considération de la nation. Cependant nouveau statut ne veut évidemment pas dire statu quo : ce projet met fin à de nombreux archaïsmes.

Par ailleurs, il favorise une participation accrue des militaires à la vie de la cité. La suppression de l'interdiction d'introduire certaines publications dans les enceintes militaires élargit la liberté d'information. Le droit d'expression est également étendu, l'autorisation préalable requise pour s'exprimer sur des sujets politiques ou internationaux étant supprimée. L'esprit de responsabilité des militaires est ainsi valorisé, de même que leur place au sein de la société ; leur participation aux activités d'associations est facilitée, changement essentiel à leur meilleure intégration dans la vie sociale, culturelle et sportive de la collectivité.

Contribuent aussi à rendre l'armée plus proche des citoyens les nouvelles dispositions de détachement des militaires auprès d'administrations ou d'entreprises, avec une rémunération et une couverture juridique et médico-sociale plus avantageuses ; elles procèdent de la volonté plus générale de rapprocher le statut militaire de celui des autres agents de l'Etat.

Enfin, ce projet prend en considération la dimension internationale des actions de notre armée, la France faisant partie du cercle restreint des nations sollicitées par les autorités internationales lors des crises graves. Pour mettre fin à une insécurité juridique, il prévoit qu'un militaire n'est pas pénalement responsable lorsque, pour l'accomplissement de sa mission, il fait usage de la force armée dans le respect du droit international. De plus, afin d'améliorer la couverture sociale des militaires, ce projet étend l'imputabilité des blessures au service.

Le seul point d'ombre de ce texte concerne la situation des militaires sous contrat, quittant les armées sans avoir atteint les quinze années de service exigées pour prétendre à une pension de retraite, et qui n'ont donc pas droit aux bonifications ; mais je crois, Madame le ministre, que vous négociez avec Bercy pour remédier à cette injustice.

Enfin, je tiens à saluer le courage et le dévouement de nos soldats. J'ai une pensée toute particulière pour les familles des militaires français morts dans un raid ivoirien, ainsi que pour les personnels de la septième brigade blindée de Besançon, comprenant le 19e régiment de génie et le 35e régiment d'infanterie, dont trois compagnies sont actuellement en Côte d'Ivoire. Le respect et la confiance que les citoyens leur témoignent sont amplement mérités, et je leur exprime toute ma reconnaissance (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

La discussion générale est close.

Mme la Ministre - Je veux d'abord remercier le Président et rapporteur Guy Tessier, les membres de la commission de la Défense, qui ont beaucoup travaillé, et l'ensemble des orateurs et oratrices. Vous avez tous su rappeler le rôle essentiel de nos militaires et exprimé votre soutien à leurs actions. Un consensus est apparu sur la nécessité de concilier la modernisation du statut et le respect des contraintes inhérentes à la vie militaire, même si des divergences d'appréciation ont pu s'exprimer sur la manière d'assurer cet équilibre.

S'agissant de la méthode, je voudrais que les militaires s'approprient ce statut qui doit exprimer leurs aspirations, et je remercie le président Teissier qui a su engager le dialogue avec eux. J'ai du reste noté que d'autres orateurs, à titre personnel, ou en raison de leurs fonctions de réservistes, avaient fait de même. Parallèlement, nous avons essayé de clarifier le dispositif, en regroupant vingt textes en un seul, et en prenant soin de distinguer le législatif du règlementaire, comme l'ont reconnu M. Hugon et Mme Lamour.

Enfin, nous nous sommes attachés à ne pas créer de dispositif inutile. C'est ainsi que le congé d'éducation a été écarté, les textes ou les pratiques en vigueur permettant déjà de répondre à cette attente.

Parce que je souhaite que ce texte entre rapidement en vigueur, j'ai demandé au service juridique du ministère de préparer d'ores et déjà les décrets d'application, sous réserve des amendements qui seront votés ici et au Sénat.

Sur le fond, je reste ouverte à tous les amendements, dès lors que l'équilibre entre la modernité nécessaire et les grands principes fondamentaux de la vie militaire sont respectés. Nous avons essayé de nous rapprocher de la fonction publique, mais les militaires ne sont pas des fonctionnaires comme les autres, comme l'a rappelé M. Boucheron, ce qui interdit un parallélisme parfait.

Par ailleurs, la discussion des amendements devrait nous permettre de lever certains malentendus, comme la place des retraités, ou la question des réservistes. Du reste, Monsieur Hillmeyer, je vous promets que vous débattrez prochainement d'un texte sur les réserves, qui ne sera pas reporté - vous pouvez me faire confiance pour cela.

La discussion de ce soir permettra aussi de préciser la question des appellations dans la marine ou celle du Haut comité d'évaluation. Nous ne règlerons pas tout cette nuit, et je souhaite que nous continuions à réfléchir ensemble par la suite, notamment à propos du domaine juridique, soulevé par MM. Rivière et Fromion.

En tout état de cause, je tiens à tous vous remercier tous. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. le Président - Je rappelle aux membres de la commission de la Défense que leur commission se réunit immédiatement pour examiner les amendements déposés postérieurement à sa dernière réunion.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance qui aura lieu, ce soir, à 21 heures 30.

La séance est levée à 19 heures 10.

                Le Directeur du service
                des comptes rendus analytiques,

                François GEORGE

A N N E X E
ORDRE DU JOUR

L'ordre du jour des séances que l'Assemblée tiendra jusqu'au mercredi 22 décembre 2004 puis du mardi 18 au jeudi 27 janvier 2005 inclus a été ainsi fixé ce matin en Conférence des présidents :

CET APRÈS-MIDI, à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et à 21 heures 30 :

    _ Projet relatif au statut général des militaires.

MERCREDI 15 DÉCEMBRE, à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et à 21 heures30 :

    _ Suite de l'ordre du jour de la veille.

JEUDI 16 DÉCEMBRE, à 9 heures 30 :

    _ Suite de la proposition de MM. Pascal CLÉMENT et Gérard LÉONARD relative au traitement de la récidive des infractions pénales ;

(Séance d'initiative parlementaire).

à 15 heures et à 21 heures 30 :

    _ Eventuellement, suite de l'ordre du jour de la veille ;

    _ Projet relatif à l'ouverture du capital de DCN et à la création par celle-ci de filiales.

LUNDI 20 DÉCEMBRE, à 10 heures et à 15 heures :

    _ Texte de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de programmation pour la cohésion sociale ;

    _ Deuxième lecture du projet pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées ;

à 21 heures 30 :

    _ Eventuellement, texte de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de finances pour 2005 ;

    _ Suite de l'ordre du jour de l'après-midi.

MARDI 21 DÉCEMBRE, à 9 heures 30 :

    _ Questions orales sans débat ;

à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et à 21 heures 30 :

    _ Suite de la deuxième lecture du projet pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.

MERCREDI 22 DÉCEMBRE, éventuellement, à 9 heures 30 :

    _ Suite de l'ordre du jour de la veille.

à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et à 21 heures 30 :

    _ Eventuellement, texte de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de finances rectificative pour 2004 ;

    _ Sous réserve de sa transmission par le Sénat, deuxième lecture de la proposition relative à la situation des maîtres des établissements d'enseignement privés sous contrat ;

    _ Eventuellement, suite de l'ordre du jour du matin.

MARDI 18 JANVIER, à 9 heures 30 :

    _ Questions orales sans débat ;

à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et à 21 heures 30 :

    _ Explications de vote et vote, par scrutin public, sur l'ensemble du projet pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, en deuxième lecture ;

    _ Projet, adopté par le Sénat, relatif à la régulation des activités postales.

MERCREDI 19 JANVIER, à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et à 21 heures 30 :

    _ Suite de l'ordre du jour de la veille.

JEUDI 20 JANVIER, à 9 heures 30, à 15 heures et à 21 heures 30 :

    _ Deuxième lecture de la proposition tendant à conforter la confiance et la protection du consommateur ;

    _ Suite de l'ordre du jour de la veille.

MARDI 25 JANVIER, à 9 heures 30 :

    _ (Séance d'initiative parlementaire)

à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et à 21 heures 30 :

    _ Sous réserve de son dépôt, projet de loi constitutionnelle portant révision de la Constitution du 4 octobre 1958 et modifiant son titre XV.

MERCREDI 26 JANVIER, à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et à 21 heures 30 :

    _ Suite de l'ordre du jour de la veille.

JEUDI 27 JANVIER, à 9 heures 30 :

    _ (Séance d'initiative parlementaire)

à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et à 21 heures 30 :

    _ Suite de l'ordre du jour de la veille.

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne deux heures après la fin de séance.

Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.

www.assemblee-nationale.fr


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